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Syllabus de la matière Génie de la réaction I : réacteurs non-idéaux et bioréacteurs

L’unité d’enseignement réacteurs non-idéaux et bioréacteurs (UEF 1.1.1) est enseignée aux
étudiants de 1ère année Master de Génie des Procédés. Elle est intitulée « Génie de la
réaction I : réacteurs non-idéaux et bioréacteurs». L’objectif principal de ce cours
est de doter l’étudiant de connaissances concernant l’hydrodynamique dans les
réacteurs réels ou non-idéaux, les principaux modèles de réacteurs homogènes et des
notions sur le fonctionnement des bioréacteurs.
Ce polycopié est conforme au programme d’enseignement proposé par l’instance
habilitée du ministère d’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Le
programme proposé est présenté comme suit :

Chapitre 1 : Réacteurs non- idéaux


- Notions fondamentales (introduction et définitions)
- Modélisation des réacteurs : notion des distributions des temps de séjour (DTS),
- identification des réacteurs, réacteurs non isothermes, réacteurs adiabatiques,
modèles simples : réacteur piston à dispersion axiale, modèles à plusieurs
paramètres, états d’agrégation (micro et macro mélange).

Chapitre 2 Bioréacteurs
- Classification et caractéristiques des bioréacteurs
- Transfert de matière dans les bioréacteurs : couplage transfert- réaction,
- Mécanisme et cinétique des réactions enzymatiques homogènes et hétérogènes
- Mode de fonctionnement des bioréacteurs (réacteurs continus parfaitement agités,
réacteurs à lit fixe, réacteurs à lit fluidisé, réacteurs membranaires).

1
Table de matière
Chapitre I : réacteurs non-idéaux

I.1. Notions fondamentales …………………………………………………………


I.1.1. Réaction chimique………………………….…………………........................
I.1.2. Thermodynamique…………………………………………………………….
I.1.2.1. Conversion …………………………………………………………….
I.1.2.2. Sélectivité……………………………………………………………….
I.1.3. Equation de Van’t Hoff………………………………………………………..
I.1.4. Bilan Matière et Bilan Energétique ……………………………………………
I.1.5. Equations caractéristiques des réacteurs idéaux, 𝐴 → 𝑃𝑟𝑜𝑑𝑢𝑖𝑡𝑠 ………………...
I.2. Notion de distribution des temps de séjour……………………………………….
I.2.1. Fonctions de distributions caractéristiques de l’écoulement d’un fluide……...
I.2.2. Détermination expérimentale des fonctions de distributions ………………..
I.2.2.1. Réponse à un échelon………………………………………………..
I.2.2.2. Réponse à une impulsion…………………………………….............
I.2.3. Fonctions de distribution des divers types d’écoulement……………………….
I.2.3.1. Ecoulement de type piston……………………………………………
I.2.3.2. Écoulement avec mélange parfait……………………………………..
I.2.3.3. Écoulement quelconque………………………………………............
I.3. Identification des réacteurs………………………………………………………
I.3.1. Réacteur non isotherme…………………………………………………
I.3.2. Réacteur adiabatique……………………………………………………
I.3.3. Modèle simple………………………………………………………….
I.3.3.1. Réacteurs piston à dispersion axial……………………………….
I.3.3.2. Modèles à plusieurs paramètres ……….........................................
I.3.3.3. Etas d’agrégation (micro et macro mélange) ……………..............

Chapitre II : Bioréacteurs

II.1. Classification et caractéristiques des bioréacteurs………………………………...

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II.2. Transfert de matières dans les bioréacteurs : Couplage transfert-réaction…………..
II.3. Mécanisme et cinétique des réactions enzymatiques homogènes et hétérogènes……
II.4. Mode de fonctionnement des bioréacteurs…………………………………………..
II.4.1. Réacteurs continus parfaitement agités………………………………………
II.4.2. Réacteurs à lit fixe……………………………………………………….
II.4.3. Réacteur à lit fluidisé…………………………………………………….
II.4.4. Réacteurs membranaires………………………………………………….
Référence ……………………………………………………………………

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I.1. Notions fondamentales
I.1.1. Réaction chimique
Une réaction chimique est une transformation au cours de laquelle une ou plusieurs espèces
chimiques se transforment. Elle est caractérisée par son équation stœchiométrique et son
équation cinétique :
D’une manière générale, la relation stœchiométrique s’écrit sous la forme :
∑ 𝜗𝑖 𝐴𝑖 = 0 𝑖 = 1, 𝑆
𝐴𝑖 Espèce moléculaire de rang i
𝑆 Nombre total d’espèces participant effectivement à la réaction
𝜗𝑖 : Coefficient stœchiométrique de l’espèce 𝐴𝑖 .

La forme d’expression de la vitesse de réaction la plus courante rencontrée dans les systèmes
homogène est :
𝑆 𝑆

)⃑⃑⃑⃑
⃑ ∏(𝑝𝑖 ⃐⃑⃑⃑⃑
𝑟=𝑘 𝛽𝑖
− 𝑘⃐⃑ ∏(𝑝𝑖 )𝛽𝑖
𝑖=1 𝑖=1

Π Désignant un produit de facteurs


𝛽𝑖 Un exposant affectant la concentration 𝐶𝑖 ou la pression partielle 𝑃𝑖 et appelé ordre
partiel par rapport au composé 𝐴𝑖 .
k Désigne les flèches qui surmontent 𝛽𝑖 et k se réfèrent respectivement à la réaction
prise dans son sens direct et à la réaction prise dans son sens inverse.

Le coefficient 𝛽𝑖 ne doit pas être confondu avec le coefficient stœchiométrique, sauf s’il s’agit
d’une étape élémentaire ; une constante de vitesse.

I.1.2. Thermodynamique
- La thermodynamique permet de fixer les conditions de température et de pression dans
lesquelles la formation d’un produit C est possible avec un rendement acceptable.

- Une réaction peut être possible thermodynamiquement sans pour cela se faire facilement.
L’équation cinétique fournira la dynamique de la transformation.

- Telle que nous venons de la caractériser, nous avons une réaction simple définie par une seule
équation stœchiométrique. Souvent, en pratique, plusieurs réactions simples ont lieu
simultanément (soit successivement, soit parallèlement), on a alors une réaction dite complexe.

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Dans ce dernier cas plusieurs équations stœchiométriques sont nécessaires pour décrire la
transformation.

I.1.2.1. Conversion
On définit ainsi la conversion f qui permet de chiffrer la qualité de la transformation : on peut
définir la conversion d’un réactif, c’est-à-dire le pourcentage de ce réactif qui a été transformé.
Exemple :
𝑎0 − 𝑎
𝑓𝐴 =
𝑎0

I.1.2.2. Sélectivité
On peut prendre encore prendre la conversion d’un réactif A en un produit C comme étant le
rapport de la quantité de C formée et de celle de A disparue, multiplié par le rapport inverse
des coefficients stœchiométriques.
On a alors, ce qu’on appelle, une sélectivité :

𝐶 − 𝐶0 𝛼
𝑆𝐴𝐶 =
𝑎0 − 𝑎 𝛾

On peut définir aussi la sélectivité instantanée :

𝛼 𝑑𝐶
𝑆𝐴𝐶 = −
𝛾 𝑑𝑎

Dans le cas de réaction complexes l’utilisation des sélectivités sera, comme nous le verrons,
absolument nécessaire.

D’une manière générale, il faut distinguer dans un système chimique le nombre totale M de
constituants qui prennent part à la réaction, du nombre M' de composés qui jouent un rôle
dans la cinétique. Appelons S le nombre de relations stœchiométriques indépendantes entre
les M constituants et S' le nombre de relations stœchiométriques indépendantes entre les M'
composés. On aura les inégalités suivantes :

M ≥ M' et M > S ≥ 1

S ≥ S' et M' > S'

Soit, par exemple, la réaction complexe caractérisée par les équations suivantes :

𝐴+𝐵 ⇌𝐶+𝐷

5
𝐶+𝐷 ⟶𝐸+𝐹

𝐴+𝐸 ⟶𝐺+𝐽

On aura : M = 8, M' = 5 (A, B, C, D, E), S = 3 et S' = 1.

En plus des S relations stœchiométriques, la cinétique fournit M équation de vitesse qui,


combinées avec les bilans- matière formant les bases du calcul d’un réacteur. Le problème
mathématique est donc de résoudre M équations différentielles ou aux différences finies avec
des conditions limites données par les compositions des alimentations et recyclages éventuels.
Il sera avantageux, lorsque cela sera possible, de remplacer S' de ces équations différentielles
ou aux différences finies par les S' relations stœchiométriques. Ainsi le nombre de variable
indépendantes sera dans ce cas : m = M' - S'

Dans le cas système à deux phase, le nombre de variables indépendantes sera : : m = 2M' - S'.
Les M' relations supplémentaires nécessaires pour faire le calcul seront soit les relations
d’équilibres physiques entre les phases, soit les équations traduisant la cinétique du transfert de
masse. Il faut noter qu’à ces m variables indépendantes pourront venir s’ajouter la température
dans le cas de système non isothermes, la pression lorsque des systèmes gazeux seront
considérés.

Si les débits varient par suite du déroulement de la réaction, les choses seront encore plus
compliquées car le nombre de variable indépendantes sera non plus m = M' - S', mais
généralement m = M - S

I.1.3. Equation de Van’t Hoff


Une modification de température change la valeur de la constante d’équilibre. L’équation de
Van’t Hoff donne quantitativement l’influence de la température sur la constante
d’équilibre :
𝑑(ln 𝐾𝑎 ) Δ𝑅 𝐻 0
=
𝑑𝑇 𝑅𝑇 2

L’équation de Van’t Hoff permet de prévoir le sens d’évolution du système en fonction de la


température. Lorsque 𝑇 augmente :

𝑑(ln 𝐾𝑎 )
-Pour une réaction exothermique dans le sens direct, Δ𝑅 𝐻 0 < 0 donc < 0 : la constante
𝑑𝑇

d’équilibre 𝐾𝑎 diminue avec 𝑇 ;

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𝑑(ln 𝐾𝑎 )
-Pour une réaction endothermique dans le sens direct Δ𝑅 𝐻 0 > 0 donc > 0 : 𝐾𝑎
𝑑𝑇

augmente avec 𝑇.
Donc, connaissant la constante d’équilibre à une température, il faut connaître la variation
d’enthalpie libre standard de réaction à une température quelconque pour calculer la constante
d’équilibre à une autre température. En supposant Δ𝑅 𝐻 0 constant dans l’intervalle de
température 𝑇2 − 𝑇1 , l’intégration de l’équation de Van’t Hoff donne :
𝐾𝑎,𝑇2 Δ𝑅 𝐻 0 𝑇2 − 𝑇1
ln 𝐾𝑎,𝑇2 − ln 𝐾𝑎,𝑇1 = ln = ( )
𝐾𝑎,𝑇1 𝑅 𝑇1 𝑇2
Cette équation est applicable pour la conception des réacteurs chimiques.

I.1.4. Bilan Matière et bilan énergétique


I.1.4.1 Bilan Matière

Un bilan matière peut être effectué sur tout ou partie du réacteur, sur la totalité des composés
présents, sur un réactif ou sur un produit choisi.
Toutefois, pour obtenir l’équation caractéristique d’un réacteur, le bilan de matière doit être
effectué pour le volume de réacteur le plus grand possible dans lequel la pression, la
composition du mélange réactionnel, la température sont uniformes. Pour les réacteurs fermé
et parfaitement agité continu, ce volume est celui du réacteur, pour le réacteur en écoulement
piston une tranche de volume dV normale à l’écoulement. Le bilan matière est établi pour un
réactif A ou pour un produit P. Quel que soit le type de bilan : matière ou énergie, quatre termes
doivent être considérés : flux entrant, flux sortant, consommation (ou production) et
accumulation (ou désaccumulation), certains de ces termes peuvent être nuls.

Le bilan de matière pour un réactif A s’écrit :

Entrée = sortie+ consommation + accumulation

Et pour un produit P :

Entrée + production = sortie + accumulation

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I.1.4.2 Bilan énergétique

Dans la plupart des problèmes de génie des procédés, le bilan énergétique sur un système
quelconque, pourra se faire en négligeant les énergies cinétiques et potentielles :

𝑑(𝑚. 𝐻 − 𝑃. 𝑉) 𝑑(𝑚. 𝐻) 𝑑𝑉 𝑑𝑃
𝑒
𝑄𝑚 . 𝐻 𝑒 + ∅ + 𝑊̇ ′ = 𝑄𝑚
𝑠
. 𝐻𝑠 + 𝑠
= 𝑄𝑚 . 𝐻𝑠 + − 𝑃. − 𝑉.
𝑑𝑡 𝑑𝑡 𝑑𝑡 𝑑𝑡
𝑒 Débit massique à l’entrée du réacteur
𝑄𝑚
𝐻𝑒 L’enthalpie par unité de masse à l’entré du réacteur
∅ Flux de chaleur
𝑊̇ ′ Flux de travail des forces de pression

Dans la plupart des problèmes de génie des procédés, aucun travail (autre que celui des forces
de pression) n’est mis en jeu. En outre les réacteurs fermés ou semi-fermés travaillent à
volume constant et sont rarement le siège de grandes variations de pression ; les réacteurs
ouverts fonctionnent en régime permanent (hors démarrages et arrêts). C’est pourquoi on
écrira souvent le bilan enthalpique comme suit :

𝑒
𝑑(𝑚. 𝐻)
𝑄𝑚 . 𝐻 𝑒 + ∅ = 𝑄𝑚
𝑠
. 𝐻𝑠 +
𝑑𝑡

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I.1.5. Equations caractéristiques des réacteurs idéaux, 𝑨 → 𝑷𝒓𝒐𝒅𝒖𝒊𝒕𝒔

Réacteur idéal Equation caractéristique Temps de séjour ts


Temps de passage𝝉

𝑟𝐴 Vitesse de la réaction
V Volume du réacteur
𝑛𝐴 Nombre de moles de l’espèce A
𝑋𝐴 Taux de conversion de l’espèce A
𝐹𝐴 Flux de l’espèce A
Q Débit de l’espèce A
𝛽 Facteur de dilatation physique
𝛼 Facteur de dilatation chimique

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I.2. Notion de distribution des temps de séjour
Un réacteur réel aura un comportement qui s’écartera plus ou moins du modèle idéal et il serait
intéressant de chiffrer cet écart par rapport à l’idéalité. C’est la raison pour laquelle la notion
de distribution des temps de séjour présente un intérêt tout particulier.
Lors d’un écoulement d’un fluide à travers un récipient de volume, les diverses molécules du
fluide séjournent à l’intérieur du volume pendant des temps 𝑡𝑠 qui dépendent directement du
type d’écoulement réalisé. Ces temps de séjour 𝑡𝑠 peuvent s’écarter notablement du temps de
séjour moyen = 𝑉 ⁄𝑄 . Il existe donc une distribution des temps de séjour qui dépend du type
d’écoulement. Les performances du système en tant que réacteur seront souvent liées à cette
distribution des temps de séjour.

I.2.1. Fonctions de distributions caractéristiques de l’écoulement d’un fluide


Considérons un volume 𝑉 de forme quelconque, à l’intérieur duquel circule un débit 𝑄 de fluide,
entre une section d’entrée 𝐸 et une section de sortie.

Figure I.1. Système ouvert avec écoulement continu de fluide

On peut définir différentes fonctions de distribution s’appliquant à des caractéristiques des


molécules du fluide en circulation, ces dernières étant considérées comme des individus
discernables.

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Figure 2.2. Fonction de distribution des âges

Figure 2.3. Fonction de distribution des temps de séjour ou âges à la sortie du système

Si, par analogie, on se réfère à une population d’êtres vivants discernables (humains par
exemple) on peut choisir l’âge comme caractéristique d’un individu. On peut d’ailleurs
distinguer deux âges caractéristiques :
- L’âge 𝛼 d’un individu à l’instant où on observe la population (pyramide des âges) ;
- L’âge 𝑡𝑠 auquel ce même individu va décéder et donc quitter la population des
vivants.
Pour l’ensemble de la population on peut ainsi considérer deux fonctions de distribution des
âges qui permettent de décrire globalement cette population :
1- La fonction de distribution des âges des vivants, 𝐼(𝛼).
2- La fonction de distribution des âges auxquels surviennent les décès, 𝐸(𝑡𝑠 ).

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Par analogie, on pourra définir de la même façon pour un fluide en écoulement à travers un
volume, les caractéristiques suivantes :
- L’âge interne 𝛼 d’une molécule à l’intérieur du volume, comme étant le temps qui
s’est écoulé depuis que cette molécule a franchi la section d’entrée 𝐸 ;
- Le temps de séjour 𝑡𝑠 de la molécule dans le volume 𝑉, comme étant le temps
séparant les passages de la molécule à travers les sections d’entrée 𝐸 et de sortie 𝑆.
Ce temps n’est rien d’autre que l’âge de la molécule au niveau de la sortie 𝑆.
Etant donné le grand nombre de molécules et leurs comportements différents liés au type
d’écoulement, il existe des fonctions de distribution de ces caractéristiques (Fig. 2.2 et 2.3).
On a ainsi :
- 𝐼(𝛼) la fonction de distribution des âges internes ;
- 𝐸(𝑡𝑠 ) la fonction de distribution des temps de séjour.
𝐼(𝛼)𝑑𝛼 représente donc la fraction de fluide à l’intérieur du volume 𝑉 donc l’âge interne est
compris entre 𝛼 et 𝛼 + 𝑑𝛼.

De la même manière 𝐸(𝑡𝑠 )𝑑𝑡𝑠 représente le flux sortant à la section 𝑆, la fraction du fluide
dont le temps de séjour ou l’âge est compris entre 𝑡𝑠 et 𝑡𝑠 + 𝑑𝑡𝑠 .

Par ailleurs, toute fonction de distribution est représentée sous forme normalisée à savoir :

∫0 𝐼(𝛼) 𝑑𝛼 = 1 2.1


∫0 𝐸(𝑡𝑠 ) 𝑑𝑡𝑠 = 1 2.2

On peut par ailleurs remplacer les variables 𝑡 (temps réel), 𝛼 (âge dans le réacteur) et 𝑡𝑠 (âge
en sortie) par une variable de temps réduit, définie sur la base du temps de séjour moyen 𝜃 =
𝑉 ⁄𝑄 .

𝑡 𝛼 𝑡𝑠
𝜏=𝜃 𝜏𝑖 = 𝜃 𝜏𝑠 = 𝜃

On a alors :

𝐼(𝜏𝑖 ) = 𝜃𝐼(𝛼) 2.3

𝐸(𝜏𝑠 ) = 𝜃 𝐸(𝑡𝑠 ) 2.4

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La fonction 𝐼(𝛼) est toujours décroissante et tend vers 0 pour les valeurs élevées de l’âge. Par
1
ailleurs pour 𝛼 = 0 , cette fonction a une valeur caractéristique égale à 𝜃 , l’inverse du temps

de séjour moyen 𝜃 .
En effet, si on a 𝑁 molécules dans le système et si 𝑛(𝑡) représente le nombre de molécule dont
l’âge est inférieur à t, on peut écrire :
𝑡
𝑛(𝑡)
∫ 𝐼(𝛼)𝑑𝛼 =
0 𝑁

Pour 𝑡 = 𝜀 , infiniment petit, l’expression ci-dessus restera valable :


𝜀
𝑛(𝜀)
∫ 𝐼(𝛼)𝑑𝛼 =
0 𝑁

L’intégrale se réduit à 𝐼(0)𝜀, alors que 𝑛(𝜀) représente l’apport de molécules nouvelles au
système pendant le temps 𝜀 ; on peut donc écrire :
𝐹0 𝜀
𝐼(0)𝜀 =
𝑁
𝐹0 étant le débit d’alimentation compté en molécules par unité de temps.

On a donc :

𝐹0 𝜐̅𝑚 𝑄 1
= =
𝑁𝜐̅𝑚 𝑉 𝜃

Ceci conduit à :

1
𝐼(0) =
𝜃

Dans la notation adoptée on a donc :

𝐼(0) = 1

Il faut noter que ces notions de distribution des âges ou de temps de séjour, présentées pour le
cas de l’écoulement d’un fluide à travers un volume 𝑉 , peuvent également s’appliquer à
n’importe quel système pour lequel on a un écoulement de particules ou même d’objets à travers
une enceinte munie d’une entrée et d’une sortie. Ces mêmes notions sont, par exemple au cas
où on a un écoulement de solide granulaire, comme un catalyseur par exemple.
On peut par ailleurs définir la distribution cumulative de la manière suivante :

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𝑡
𝐹(𝑡) = ∫0 𝐸(𝑡𝑠 ) 𝑑𝑡𝑠 = 𝐹(𝜏) 2.5
Cette fonction représente dans le flux de sortie la fraction de fluide dont le temps de séjour est
inférieur à 𝑡 ou le temps de séjour réduit inférieur à 𝜏 .
Il existe diverses relations entre ces fonctions de distribution qui sont faciles à démontrer et que
nous rappelons ci-dessous :
Pour 𝑡 = 𝑡𝑠 = 𝛼 :
1 𝑑𝐼(𝛼)
𝐸(𝑡𝑠 ) = −
𝜃 𝑑𝛼
1 1
𝐹(𝑡) + 𝐼(𝛼) = 𝐼(0) = 𝜃 2.6
𝜃

Dans la notation adimensionnelle adoptée, pour 𝜏 = 𝜏𝑠 = 𝜏𝑖 :


F(𝜏) + 𝐼(𝜏𝑖 ) = 𝐼(0) = 1
𝑑𝐼(𝜏𝑖 )
𝐸(𝜏𝑠 ) = − 2.7
𝑑𝜏𝑖

A partir d’une distribution quelconque, on peut définir des moments. Ainsi on utilise très
souvent :
- Le moment d’ordre 1 par rapport à l’origine ou moyenne ;
- Le moment d’ordre 2 par rapport à la moyenne ou variance 𝜎 2 .
A partir de la distribution des temps de séjour on aura ainsi :


𝑡𝑠̅ = ∫0 𝑡𝑠 𝐸(𝑡𝑠 )𝑑 𝑡𝑠 2.8

et :

𝜎 2 = ∫0 (𝑡𝑠 − 𝑡𝑠̅ )2 𝐸(𝑡𝑠 ) 𝑑𝑡𝑠 2.9

On peut noter que la moyenne 𝑡𝑠̅ devrait en principe être égale au temps de séjour moyen

𝜃 = 𝑉 ⁄𝑄 ; cependant les anomalies liées aux caractéristiques particulières de l’écoulement,


conduisent parfois à des valeurs différentes.

Les divers moments d’une distribution permettent en fait de caractériser une distribution.
C’est pourquoi les moments sont souvent utiles pour comparer entre elles des distributions.

I.2.2. Détermination expérimentale des fonctions de distributions


Dans la définition des fonctions de distribution nous avons supposé que les molécules étaient
des individus discernables. Ceci n’est réalisable que partiellement en utilisant ce qu’on appelle

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un traceur, permettant en quelque sorte de marquer les molécules ou du moins une partie des
molécules. On utilise ainsi des substances miscibles au fluide et ne modifiant pas ses
caractéristiques hydrodynamiques, mais décelables par une propriété physique particulière,
telle que la radioactivité, conductibilité électrique ou thermique, spectre d’absorption, etc.
La méthode expérimentale consiste alors à appliquer à l’aide du traceur un signal à l’entrée du
système sans perturber l’écoulement et à observer la réponse à la sortie du système. Les signaux
injectés dans le système peuvent théoriquement être de forme quelconque ; cependant on utilise
le plus souvent des signaux particuliers de formes telles que la réponse soit facilement
exploitable. Ainsi on réalise le plus souvent des signaux du type échelon ou impulsion.

I.2.2.1. Réponse à un échelon


Lors d’une injection du type échelon, la concentration du traceur au niveau de l’entrée 𝐸 passe
brusquement d’une concentration 𝐶1 à une valeur 𝐶2 et ce au temps pris comme origine (𝑡 = 0)
. Le plus souvent une des deux valeurs 𝐶1 ou 𝐶2 est prise égale à 0. A la sortie 𝑆 du système on
mesure à partir de 𝑡 = 0 la concentration 𝐶(𝑡) du traceur.
Si on suppose 𝐶1 = 0 , le bilan molaire relatif au traceur s’écrira de la manière suivante pour
𝑡 >0:
𝑑 𝑡
𝑄𝐶2 = 𝑄𝐶(𝑡) + 𝑑𝑡 (𝑉𝐶2 ∫0 𝐼(𝛼)𝑑𝛼) 2.10

𝑡
∫0 𝐼(𝛼)𝑑𝛼 est la fraction du volume 𝑉 occupée par du fluide ayant traversé l’entrée 𝐸 depuis
le temps 𝑡 = 0.

En divisant les deux membres de l’équation (2.10) par 𝐶2 , on obtient :

𝐶(𝑡) 𝐶(𝜏)
𝐶′ = = 1 − 0𝐼(𝑡) ou 𝐶′ = = 1 − 𝐼(𝜏) 2.11
𝐶2 𝐶2

En utilisant les relations (2.3), (2.5) et (2.7) on a finalement :

𝐶 ′ = 𝐹(𝜏) 2.12

Ce qui signifie que la réponse à un signal échelon ou réponse indicielle donne directement la
fonction de distribution cumulative (𝜏) , à partir de laquelle on pourra déduire les autres
fonctions de distribution 𝐼 et 𝐸 .
L’adoption de la forme réduite 𝐶 ′ pour la réponse revient en fait à considérer un signal échelon-
unitaire.

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Du point de vue mathématique le signal échelon correspond à la fonction échelon unitaire, 𝐻(𝑡),
caractérisée de la manière suivante :
𝐻(𝑡) = 0 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑡 < 0
𝐻(𝑡) = 1 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑡 ≥ 0

I.2.2.1. Réponse à une impulsion


Dans ce cas on injecte à l’entrée du système une quantité donée de traceur (par exemple 𝑛
moles) durante un temps très court. A nouveau on mesure la concentration 𝐶(𝑡) du traceur dans
le flux de sortie. Pour un temps 𝑡 compté à partir du moment de l’injection, la quantité de traceur
sortie du réacteur peut s’exprimer à partir de la fonction de distribution des temps de séjour,
soit :
𝑄𝐶(𝑡)𝑑𝑡 = 𝑛𝐸(𝑡𝑠 )𝑑𝑡𝑠 2.13
Dans ce cas, il y a identité entre 𝑡 et 𝑡𝑠 .
Si on divise les deux nombres de l’équation par 𝑉, et par 𝑑𝑡 (ou 𝑑𝑡𝑠 ), on peut réécrire cette
équation sous la forme suivante :
𝑛
𝐶(𝑡) = 𝜃𝐸(𝑡𝑠 )
𝑉

Si on adopte comme concentration de référence pour le traceur la valeur 𝐶0 =


𝑛⁄𝑉 ,correspondant à la concentration qu’aurait le traceur s’il avait été uniformément réparti
dans le volume 𝑉 , on obtient la fonction de distribution 𝐸 à partir de la réponse expérimentale :
1 𝐶(𝑡)
𝐸(𝑡𝑠 ) = 𝜃 2.14
𝐶0

Ou encore en désignant par 𝐶 = 𝐶(𝜏)⁄𝐶0 la réponse expérimentale sous forme réduite :

𝐶 = 𝐸(𝜏) 2.15

Du point de vue mathématique le signal impulsion correspond à la fonction de Dirac 𝛿(𝑡)qui


est caractérisée de la manière suivante :
𝑡=0 𝛿(𝑡) = ∞

𝑡≠0 𝛿(𝑡) = 0

+∞
∫ 𝛿(𝑡) 𝑑𝑡 = 1
−∞

On peut vérifier que les conventions adoptées ci-dessus pour exprimer la réponse sous forme
réduite 𝐶 correspondent en fait à la définition de la fonction de Dirac.

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On doit en effet avoir :

∫ 𝐶𝑑𝜏 = 1
−∞

soit :

𝐶(𝜏)
∫ 𝑑𝜏 = 1
−∞ 𝐶0

On peut donc tirer la valeur de 𝐶0 , soit :



1 ∞
𝐶0 = ∫ 𝐶(𝜏)𝑑𝜏 = ∫ 𝐶(𝑡) 𝑑𝑡
−∞ 𝜃 −∞
Ou encore ;

∫ 𝑄𝐶(𝑡)𝑑𝑡 𝑛
𝐶0 = −∞ =
𝑉 𝑉
Il est intéressant de noter que la fonction de Dirac est la dérivée de la fonction échelon unitaire.
Comme par ailleurs, lorsque l’on considère des systèmes linéaires, comme c’est le cas de celui
considéré jusqu’ici (figures 2.2 et 2.3), les relations existantes entre les signaux d’entrée sont
conservées entre les réponses.
Cette propriété peut être vérifiée sur les résultats établis ci-dessus :
𝑟é𝑝𝑜𝑛𝑠𝑒 à 𝑙 ′ é𝑐ℎ𝑒𝑙𝑜𝑛 − 𝑢𝑛𝑖𝑡𝑎𝑖𝑟𝑒 = 𝑭(𝜏)
𝑟é𝑝𝑜𝑛𝑠𝑒 à 𝑙 ′ 𝑖𝑚𝑝𝑢𝑙𝑠𝑖𝑜𝑛 = 𝑬(𝜏)
Or, d’après la relation (2.7), on peut écrire :
𝑑𝑭
= 𝑬(𝜏)
𝑑𝜏
Relation correspondant au fait que l’impulsion de Dirac est la dérivée de l’échelon unitaire.

I.2.3. Fonctions de distribution des divers types d’écoulement


Nous pouvons maintenant associer aux deux types d’écoulement idéaux considérés
précédemment des fonctions de distribution, telles que nous venons de les définir.

I.2.3.1. Ecoulement de type piston


Dans ce cas, toutes les molécules se déplacent à la même vitesse et le système agit comme une
simple ligne à retard pur. Tous les signaux entrants sont donc transmis sans déformation et se
retrouvent à la sortie au bout d’un temps 𝑡 = 𝜃 ou 𝜏 = 1.
La répartition des temps de séjour se réduit donc au temps de séjour moyen 𝑡𝑠̅ = 𝜃. Les diverses
fonctions de distribution ou réponses à un signal peuvent se représenter comme il est indiqué
sur la figure 2.4.
17
Figure 2.4. Représentation des diverses fonctions de distribution et réponses des signaux
d’entrée pour trois types d’écoulement

I.2.3.2. Écoulement avec mélange parfait

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Considérons le cas d’un signal d’entrée ayant la forme d’un échelon unitaire. Le bilan molaire
du traceur pourra s’écrire en prenant en compte le fait que le volume 𝑉 est parfaitement
mélangé. On aura ainsi :
𝑑𝐶(𝑡)
𝑄𝐶2 = 𝑄𝐶(𝑡) + 𝑉 2.16
𝑑𝑡

Cette équation est valable pour ≥ 0 , avec comme condition limite :


𝐶(𝑡) = 0 pour 𝑡 = 0
L’intégration de (2.16) est immédiate et l’on obtient :
𝐶(𝑡) 𝑡
𝑪′ = = 1 − 𝑒𝑥𝑝 (− )
𝐶2 𝜃
Ou :
𝐶(𝜏)
𝑪′ = = 1 − 𝑒𝑥𝑝(− 𝜏)
𝐶2
On tire donc directement la fonction de distribution 𝑭(𝜏) , conformément à 2.12 :

𝑭(𝜏) = 1 − 𝑒𝑥𝑝(− 𝜏) 2.17

La répartition des temps de séjour 𝑬(𝜏) , identique à la réponse à une impulsion 𝑪(𝜏) , se
déduira de 𝑭(𝜏) par simple dérivation, soit :
𝑑𝑭(𝜏)
𝑪(𝜏) = 𝑬(𝜏) = = 𝑒𝑥𝑝(− 𝜏) 2.18
𝑑𝜏

Ces diverses fonctions sont également représentées sur la figure 2.4.

I.2.3.3. Écoulement quelconque


Pour un système quelconque on aura des fonctions de distribution ayant des formes variées,
tout en conservant les propriétés intrinsèques de ces fonctions de distribution, telles que nous
les avons définies dans les paragraphes précédents. Sur la figure 2.4 nous avons indiqué, à titre
d’exemple, ce que pourraient être de telles courbes pour un système quelconque.
La connaissance de ces fonctions de distribution pour un système donné sera très importante en
pratique, car, par comparaison avec les courbes correspondant aux systèmes idéaux, on pourra
voir de quel type d’écoulement idéal le système considéré se rapproche le plus. Si les
différences sont importantes, les modèles idéaux pourront être compliqués ou modifiés de
manière à rendre compte du comportement réel du système.

19
La technique de mesure de la distribution des temps de séjour (DTS), au moyen d’un traceur,
constitue donc un moyen de diagnostic pour connaitre la structure d’un écoulement dans les
systèmes continus. A titre d’exemple, le simple fait que 𝑡𝑠̅ soit trouvé différent de 𝜃 peut déjà
conduire à certaines conclusions : existence d’un court-circuit ou d’une zone stagnante.
Nous verrons dans suivants comment les performances d’un système continu, utilisé en tant que
réacteur, peuvent être influencées par la distribution des temps de séjour. On peut noter dès
maintenant que les systèmes idéaux considérés jusqu’ici présentent des distributions de temps
de séjour totalement différentes et qu’on peut donc s’attendre à des différences de
comportement notables. Néanmoins, il faut remarquer que la correspondance entre distribution
des temps de séjour et structure d’un système n’est pas biunivoque. En d’autres termes pour un
système de structure connue il n’existera qu’une seule fonction de distribution, alors qu’à partir
d’une fonction de distribution donnée on peut imaginer diverses structures d’écoulement
pouvant conduire à la même fonction de distribution.
Pour s’en convaincre on peut reprendre l’exemple classique de l’association en série de
dispositifs à écoulement piston et parfaitement agité (figure 2.5). On peut dans ce cas permuter
les deux zones du système ou même diviser la zone à écoulement piston en deux parties
disposées de part et d’autre du mélangeur parfait sans pour cela modifier la courbe de
Distribution du temps de séjour. En effet, si la partie parfaitement agitée impose la forme
exponentielle décroissante de la courbe (équation 2.17), le décalage de cette courbe dans le
temps est dû à l’écoulement piston qui, nous l’avons vu, agit comme un retard pur. L’ordre dans
lequel ces opérations sont effectuées n’a donc aucune importance.
Aussi, les seuls renseignements que l’on puisse obtenir par une étude expérimentale au moyen
d’un traceur concernent les intervalles de temps pendant lesquels les divers éléments du fluide
séjournent dans le système, indépendamment des interactions qu’ils peuvent y subir.
On distingue généralement le macromélange (macromixing) ou ensemble des phénomènes liés
à la distribution du temps de séjour et le micromélange (micromixing) résultant des interactions
entre éléments du fluide en écoulement et intervenant à une échelle telle qu’elles se déroulent
de manière indépendante de macomélange. Les fonctions de distributions des temps de séjour
sont donc incapables de donner des informations relatives au micromélange.

20
Figure 2.5 exemples de trois systèmes pouvant conduire à la même distribution des temps de
séjour

21
I.3. Identification des réacteurs
L’identification des réacteurs par la distribution des temps de séjour est une méthode
couramment utilisée en génie chimique pour caractériser le comportement d’un réacteur. La
distribution des temps de séjour est une mesure de la façon dont les différentes particules ou
fluides passent à travers le réacteur à des moments différents. Cela peut être particulièrement
utile pour comprendre la dynamique d’un réacteur et son efficacité dans une réaction chimique
ou un processus. L’identification fonctionne comme suit :

-Collecte des données de DTS : pour identifier un réacteur par la distribution des temps de
séjour, nous devons collecter les données sur le temps qu’il faut aux particules ou aux fluides
pour traverser le réacteur. Cela peut être fat à l’aide de traceurs ou de techniques de mesure
appropriées
-Analyse des données de DTS : Construction de la distribution des temps de séjour. Il s’agit
d’un graphique ou d’un histogramme montrant combien de particules ou de fluides ont passé
un certain temps dans un réacteur. La forme de la DTS peut varier en fonction du type de
réacteur et de ses caractéristiques.
-Interprétation des résultats : L’analyse de la DTS fournit des informations sur le
comportement du réacteur. Si la DTS est étroite, cela signifie que la plupart des particules ou
des fluides passent rapidement à travers le réacteur. Si la DTS est large, cela indique une plus
grande variabilité dans les temps de séjour. Cela peut avoir des implications sur la réaction
chimique, la conversion des réactifs.
-Comparaison avec des modèles théoriques : Les résultats de la DTS peuvent également être
comparés à des modèles théoriques pour mieux comprendre le réacteur et éventuellement
l’optimiser.

I.3.1. Réacteur non isotherme


Les réacteurs non isothermes sont des dispositifs où la température à l’intérieur du réacteur
n’est pas constante et varie avec le temps. Dans ces réacteurs, les réactions chimiques ou
physiques qui se produisent à l’intérieur du système génèrent ou consomment de la chaleur, ce
qui entraine des variations de température. Les réacteurs non isothermes sont souvent utilisés
dans des processus industriels ou le contrôle de la température est crucial pour la réaction ou la
transformation des produits chimique. La gestion de la température dans les réacteurs non
isothermes est essentielle pour contrôler la sélectivité des réactions, éviter les réactions

22
désirables, maximiser les rendements et garantir la sécurité du processus. Pour cela, des
systèmes de contrôle de la température, tels que le chauffage ou le refroidissement, sont souvent
utilisés pour maintenir des conditions optimales à l’intérieur du réacteur. Les réacteurs non
isothermes couramment rencontrés sont :
-Réacteur à lit fluidisé : dans un réacteur à lit fluidisé, des particules solides sont suspendues
dans un flux de gaz ou de liquide. Les réactions chimiques peuvent se produire à différentes
températures à mesure que les particules sont en contact avec les réactifs et les produits. La
température à l’intérieur du lit fluidisé peut varier en fonction de la distribution des réactifs et
de la chaleur générée par la réaction.
-Réacteur à lit fixe avec réfrigération ou chauffage externe : Dans ce type de réacteur, la
température est contrôlée en ajoutant ou en retirant de la chaleur du réacteur à l’aide d’un
système de refroidissement externe. Cela permet de maintenir des conditions non isothermes
en ajustant la quantité de chaleur ajouté ou retirée.
-Réacteur discontinu (batch) : Les réacteurs discontinus sont des réacteurs où les réactifs
sont introduits dans le réacteur, la réaction a lieu, puis les produits sont retirés. Pendant la
réaction, la température à l’intérieur du réacteur peut varier en fonction de la cinétique de la
réaction et de la chaleur générée ou absorbée.

I.3.2. Réacteur adiabatique


Un réacteur adiabatique est conçu pour minimiser les échanges de chaleur avec l’environnement
extérieur. Cela signifie que la chaleur générée ou absorbée par la réaction à l’intérieur du
réacteur n’est pas échangée avec l’extérieur. Par conséquent, la température à l’intérieur du
réacteur peut varier considérablement en fonction de la réaction en cours. Les réacteurs
adiabatiques sont couramment utilisés dans l’industrie chimique et la recherche scientifique
pour des réactions où le contrôle précis de la température est nécessaire. Ls peuvent être utilisés
pour des réactions exothermiques (qui dégagent de la chaleur) ou des réactions endothermiques
(qui absorbent de la chaleur). Dans un réacteur adiabatique, la température peut augmenter à
mesure que la réaction progresse dans le cas d’une réaction exothermique, ou diminuer dans le
cas d’une réaction endothermique. La gestion de la température dans un réacteur adiabatique
peut être critique pour le succès de la réaction. Il est donc souvent nécessaire d’utiliser des
systèmes de contrôle sophistiqués, tels que l’ajout de réactifs ou de produits de manière
contrôlée, pour réguler la température et éviter des conditions non souhaitées comme la
surchauffe ou le refroidissement excessif.

23
Le réacteur le plus simple, au demeurant le plus utilisé industriellement, est le réacteur
adiabatique à écoulement axial continu, constitué d’un seul lit de catalyseur reposant sur une
grille support (figure 2.6).

Figure 2.6 Réacteur adiabatique à écoulement axial continu

La répartition des gaz dans le plan horizontal s’effectue naturellement dans la couche supérieure
du catalyseur. Éventuellement, des dispositifs statiques sont prévus à l’entrée du gaz pour
favoriser cette répartition en évitant les passages préférentiels.
Plusieurs lits superposés sont disposés dans le même réacteur, par exemple lorsque l’on cherche
à minimiser les efforts exercés sur les supports de grille, efforts qui peuvent devenir importants
lorsque la résistance opposée par la couche catalytique au passage du gaz augmente
(augmentation des pertes de charge). On dispose également plusieurs lits superposés dans le cas
où l’on utilise plusieurs types de catalyseurs dans le même réacteur, cela afin d’éviter les
mélanges de catalyseurs.

I.3.3. Modèles simples


Divers types de modèles plus au moins compliqués sont utilisés pour rendre compte de la forme
de DTS déterminée expérimentalement à l’aide d’un modèle hydrodynamique simple,
facilement utilisable pour estimer la conversion dans des réacteurs non idéaux. Parmi ces
modèles on distingue : le modèle piston à dispersion axiale et modèle à plusieurs paramètres.

13.3.1 Modèle piston à dispersion axiale (figure 2.7) : ce modèle qui s’applique dans le cas
d’un faible écart à l’écoulement piston dû à la superposition à cet écoulement d’une dispersion
aléatoire dans la direction axiale, causant donc un mélange entre les tranches dV du réacteur
piston.

24
Figure 2.7: Réacteur piston à dispersion axiale

Cette dispersion aléatoire obéit formellement à la l de Fick :


𝜕𝐶𝐴 𝜕2 𝐶𝐴
= 𝐷𝐿 (11)
𝜕𝑡 𝜕𝑥 2
Dans cette expression, 𝐷𝐿 (𝑚2 . 𝑠 −1 ) est un coefficient de dispersion axiale ou longitudinale,
qui caractérise le degré de mélange dans l’écoulement.
La forme adimensionnelle de l’équation de base représentant ce modèle de dispersion axiale
s’écrit :

𝑑𝐶𝐴 𝐷𝐿 𝜕𝐶 𝜕𝐶
= . − (12)
𝑑𝜃 𝑢𝐿 𝜕𝑧 2 𝜕𝑧
où 𝑢 est la vitesse axiale, 𝐿 la longueur du réacteur et 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 un nombre adimensionnel , 𝜃 =
𝑡𝑠 ⁄𝑡𝑠̅ = 𝑡𝑠 ⁄𝜏 et 𝑧 = (𝑢𝑡𝑠 + 𝑥)⁄𝐿. Le nombre 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 caractérise l’importance de la dispersion
axiale dans le réacteur. S’il est voisin de zéro, la dispersion axiale est négligeable et
l’écoulement est de type piston. S’il tend vers l’infini, la dispersion est importante et
l’écoulement est similaire à l’écoulement dans les réacteurs parfaitement agités. Toutefois, aux
valeurs élevées de 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 , l’utilisation de ce modèle n’est pas toujours physiquement justifiée.
Aux faibles valeurs de dispersion (𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 < 0.01) pour lesquelles ce modèle s’applique, la
solution de l’équation :
1 (1−𝜃)2
𝐸(𝜃) = . 𝑒𝑥𝑝 [− ] (13)
√4𝜋(𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 ) 4(𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 )

Donne les courbes symétriques représentés dans la figure ci-dessous.

25
Figure 2.8 : Fonction de distribution des temps de séjour 𝐸(𝜃) pour différentes valeurs du
paramètre 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿

La forme des courbes ne dépend pas des conditions aux limites, c’est-à-dire des conditions de
dispersion en entrée et sortie du réacteur. Les courbes dépendent du seul paramètre 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 ,
ce qui permet de déterminer sa valeur à partir de courbes obtenues lors d’expériences avec des
traceurs.
La valeur de 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 peut être tirée de la variance de la courbe 𝜎𝜃2 , de la valeur maximale de
𝐸(𝜃) notée 𝐸(𝜃)𝑚𝑎𝑥 :
𝜎𝜃2 = 2. (𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 ) (14)
1
𝐸(𝜃)𝑚𝑎𝑥 = − (15)
√4𝜋(𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 )

L’influence de la dispersion axiale sur la conversion de A est évaluée à partir du bilan de


matière du réacteur. Comme dans le réacteur piston, ce bilan est établi sur une tranche de
volume 𝑑𝑉 = 𝑆𝑑𝑙 perpendiculaire à l’écoulement. En régime permanent, le bilan pour le
réactif A s’écrit :
Entée= Sortie + Consommation par réaction

26
La différence avec le réacteur piston est que les termes entré et sorte prennent en compte à la
fois l’écoulement convectif et la dispersion axiale. Ce bilan conduit à l’expression suivante :

𝑑𝐶𝐴 𝑑 2 𝐶𝐴
𝑢 − 𝐷𝐿 + 𝑟𝐴 = 0 (16)
𝑑𝑙 𝑑𝑙 2
En introduisant 𝑧 = 𝑙 ⁄𝐿 ,𝜏 = 𝑡𝑠̅ = 𝐿⁄𝑢 = 𝑉 ⁄𝑄 et en remplaçant 𝑟𝐴 par 𝑘𝐶𝐴𝑛 , cette
expression devient :

𝐷𝐿 𝑑 2 𝐶𝐴 𝑑𝐶𝐴
. − − 𝑘𝜏𝐶𝐴𝑛 = 0 (17)
𝑢𝐿 𝑑𝑧 2 𝑑𝑧
Soit en termes de conversion de 𝐴(𝑋𝐴 ) :
𝐷𝐿 𝑑 2 𝑋𝐴 𝑑𝑋𝐴 𝑛−1 (1
. − − 𝑘𝜏𝐶𝐴0 − 𝑋𝐴 )𝑛 = 0 (18)
𝑢𝐿 𝑑𝑧 2 𝑑𝑧

Cette expression montre que la valeur de 𝑋𝐴 est déterminée par trois termes adimensionnels :
𝑛−1
le nombre cinétique 𝑘𝜏𝐶𝐴0 , le terme de dispersion 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 et l’ordre de réaction 𝑛.
La solution de l’équation, complexe dans le cas général, permet la comparaison des efficacités
du réacteur piston idéal et du réacteur piston avec dispersion. C’est ce qui est réalisé dans les
figures 2.9 et 2.10 donnant pour des réactions d’ordre 1 et d’ordre 2, le rapport des volumes
(ou des temps de passage) des réacteurs piston idéal et piston avec dispersion, en fonction de
1 − 𝑋𝐴 pour divers valeurs de 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 .

Aux faibles valeurs de 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 , la solution obtenue est simple ; par exemple pour une réaction
d’ordre 1 :
𝐷𝐿
1 − 𝑋𝐴 = 𝑒𝑥𝑝 [−𝑘𝜏 + (𝑘𝜏)2 ] (19)
𝑢𝐿

27
Figure 2.9 : Réaction du premier ordre cinétique sans dilatation. Influence de la dispersion
axiale caractérisée par le nombre sans dimension 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 sur la performance d’un réacteur

en écoulement piston (𝐷𝐿 𝑢𝐿 = 0).

Figure 2.10 : Réaction du deuxième ordre cinétique sans dilatation. Influence de la dispersion
axiale caractérisée par le nombre sans dimension 𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 sur la performance d’un réacteur
en écoulement piston (𝐷𝐿 ⁄𝑢𝐿 = 0).

28
1.3.3.2 Modèle à plusieurs paramètres (figure 11) : ces modèles permettent de rendre compte
du comportement de réacteurs dans lesquels l’écoulement est complexe.

Figure 11 : modèles à plusieurs paramètres


Ces modèles associent :
a) des zones où l’écoulement est supposé de type simple :
- écoulement piston pur ou avec dispersion axiale (figure 14a),
- zones stagnantes où le fluide ne circule pratiquement pas et s’échange lentement avec
les zones voisines (figure 14b) ; ces zones stagnantes occupent du volume sans presque
participer aux distributions, où elles se manifestent souvent par la présence d’une queue
;
b) des modes de liaison entre ces zones (14c) :
- associations en série, en parallèle,
- courants de court-circuit, d’échange, de recyclage.

En associant ces éléments, on obtient un graphe dépendant de plusieurs paramètres, qui permet
d’approcher le comportement réel et de rendre compte des courbes C expérimentales. Nous
avons mis au point à l’ENSIC un logiciel qui permet de construire très facilement ces modèles
représentatifs (le logiciel « DTS ») et d’en ajuster les paramètres sur des données
expérimentales. Imaginons qu’on ait, par exemple, à rendre compte de la distribution

29
des temps de séjour dans le réacteur schématisé sur la figure 15a

Figure 12 :Exemple de représentation d’un réacteur réel par des modèles de complexité
croissante
Un jet de fluide issu de la tubulure d’entrée atteint l’ajutage de sortie tout en se dispersant
partiellement dans le volume du réacteur. La description détaillée du profil hydrodynamique
est compliquée. Le premier modèle que l’on peut proposer est celui d’un écoulement piston (le
jet) rebouclé sur un mélangeur en recyclage (le fluide qui s’écrase et se mélange en retour).

Ce modèle (figure 12b) est à deux paramètres : le rapport des volumes et le taux de recyclage
R. Mais on peut être tenté d’affiner la description et de tenir compte d’une certaine dispersion

30
axiale dans le courant direct et dans le recyclage. Il faut alors ajouter deux paramètres de
dispersion, par exemple les nombres de mélangeurs JA et JP (figure 12c).
Une description encore plus réaliste ferait en outre intervenir des courants d’échange de matière
entre les deux courants (figure 12d) , et il serait sans doute plus commode de revenir dans ce
cas à des écoulements piston à dispersion axiale (figure 12e).

I.3.3.3. Etas d’agrégation (Micro et macro mélange)


On convient d’appeler macromélange l’ensemble des phénomènes qui assurent une
uniformisation de composition du mélange réactionnel à l’échelle macroscopique. Ceci se
traduit dans les réacteurs continus par l’existence d’une distribution des temps de séjour. On
réserve le terme de micromélange aux processus qui assurent l’homogénéité à l’échelle
microscopique et moléculaire, et qui caractérisent la texture fine du mélange.
Les problèmes liés au micromélange peuvent être abordés de deux manières différentes :
-Le premier de ces aspects a déjà été entrevu au paragraphe précédent : c’est l’aspect
précocité du mélange ;
-Le second aspect apparait lorsque l’on s’efforce de préciser le processus intime du mélange.
Au sein d’un fluide en mélange peuvent en effet subsister des agrégats créant des
hétérogénéités locales conduisant à ce qu’on dénomme une ségrégation.

Il apparait donc que le micromélange, abordé sous l’angle « précocité du mélange », concerne
le mélange au sein du récipient entre portions de fluide d’âges différents : c’est l’aspect
temporel du micromélange. Par contre, abordé du point de vue de la « ségrégation du fluide »,
le micromélange concerne le processus intime du mélange au sein du récipient : c’est son aspect
spatial.

- Précocité du mélange

L’aspect « précocité du mélange » a été le premier à être considéré et a permis de poser de


manière claire le problème du micromélange. Ainsi ZWIETERING a montré que la
connaissance de la fonction de distribution des temps de séjour permet d’édifier deux modèles
extrêmes, schématisés sur la figure 2.13.
La configuration correspondant au mélange « au plus tôt » (maximum mixedness) correspond
à un récipient tubulaire à écoulement piston, muni d’une multitude de tuyaux d’alimentation

31
latéraux ; les débits de fluide dans ces entrées latérales sont tels que le modèle ainsi construit
reproduit la fonction de distribution des temps de séjour concernée.
L’écoulement piston impliquant un mélange parfait dans toute section droite du tube, tout
élément fe fluide entrant est mélangé à des éléments de fluide d’âges différents, et cela, dès son
entrée dans le récipient.
La configuration correspondant au mélange « au plus tard » (minimum mixedness) correspond
également à un récipient tubulaire à écoulement piston, mais muni cette fois d’une multitude
de tuyaux de sortie latéraux ; les débits de fluide dans ces sorties latérales sont tels que le modèle
ainsi construit reproduit la fonction de distribution des temps de séjour concernée. En vertu des
propriétés de l’écoulement piston, tout élément de fluide n’est mélangé, durant son séjour dans
le récipient, qu’à des éléments de fluide du même âge ; ce n’est qu’à la sortie du récipient qu’il
est mélangé à des éléments de fluide d’âges différents.

Figure 2.13 les deux états extrêmes de micromélange d’un fluide, considéré sous l’aspect
temporel : mélange au plus tôt et mélange au plus tard

A toute fonction de distribution des temps de séjour relative à l’écoulement d’un fluide dans un
récipient, il est ainsi possible de faire correspondre deux configurations extrêmes distinctes.
En pratique, puisque la fonction de distribution des temps de séjour d’un fluide s’écoulant dans
un récipient permet de construire plusieurs modèles d’écoulement pouvant l’engendrer.
On peut être amené, dans certains cas où cela s’avère souhaitable, à vouloir préciser quel est le
modèle qui représente le plus fidèlement la réalité. A cette fin, on peut tout d’abord éliminer les
modèles non plausibles, en égard au type d’appareillage concerné. Ainsi, si l’on considère

32
l’écoulement dans un récipient tubulaire précédé par une cellule de prémélange, la fonction de
distribution des temps de séjour relevée expérimentalement devra plutôt être imputée à un
modèle du type « mélange au plus tôt »

-ségrégation au sein d’un fluide

Bien que macroscopiquement homogène, un fluide peut présenter une structure microscopique
variable, comprise entre deux états limites (figure 2.14).
Le premier de ces états limites serait celui d’un fluide intimement brassé à l’échelle moléculaire,
toutes les molécules étant libres de se mouvoir et de venir en contact les unes avec les autres :
on dit dans ce cas que l’on est en présence d’un microfluide.
L’autre état limite serait celui d’un fluide dont les molécules resteraient regroupées par agrégats
aux frontières hermétiques, de dimensions petites à l’échelle macroscopique, mais contenant
néanmoins un très grand nombre de molécules. Ces agrégats ou domaines de ségrégation
seraient brassés entre eux, mais les molécules appartenant à un même domaine de ségrégation
resteraient, dans un système continu, auraient ainsi à tout moment le même âge interne. On dit
alors qu’il s’agit d’un macrofluide ou encore d’un fluide en état de ségrégation totale. Cet état
limite, qui n’est évidemment jamais atteint par un fluide homogène, peut être comparé à la
phase dispersée d’un système liquide-liquide ou gaz-liquide, en l’absence de coalescence et de
tout phénomène d’interaction au sein de la phase dispersée.
Entre ces deux états limites, on dit que le fluide considéré est partiellement ségrégé, ou en état
de ségrégation partielle.
DANCKWERTS proposa le premier une mesure du degré de micromélane, qui a ensuite été
généralisée par ZWITERING. Le degré de ségrégation 𝐽 a ainsi été défini de la manière
suivante :
𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑒𝑠 â𝑔𝑒𝑠 𝑑𝑒𝑠 𝑎𝑔𝑟é𝑔𝑎𝑡𝑠
𝐽=
𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑒𝑠 â𝑔𝑒𝑠 𝑑𝑒𝑠 𝑚𝑜𝑙é𝑐𝑢𝑙𝑒𝑠

33
Figure 2.14. Les deux états extrêmes du micromélange d’un fluide considéré sous l’aspect
spatial

Ainsi 𝐽 = 1 pour une ségrégation totale ; et 𝐽 = 0 pour un mélange maximum.

Un second paramètre est à considérer si on veut caractériser complètement le phénomène de


ségrégation ; nous voulons parler de l’échelle de ségrégation, liée à la taille des agrégats (

figure 2.15).

Figure 2.15. Caractérisation de la ségrégation : échelle et intensité de ségrégation

34
Pour un écoulement piston l’intensité globale de ségrégation vaut l’unité, car chaque tranche
infinitésimale de l’écoulement assimilable à un agrégat n’a pas d’interaction avec les tranches
voisines. Cependant, radialement à l’intérieur d’une tranche, l’intensité de ségrégation devrait
être nulle. Une ségrégation non nulle à l’intérieur d’une tranche n(aurait cependant pas
d’importance dans la mesure où les réactifs seraient prémélangés.
Le cas du système parfaitement agité implique par contre une ségrégation nulle. Tout fluide réel
est partiellement ségrégé, car il est constitué d’agrégats de molécules formés sous l’effet de
cisaillement dû à l’agitation mécanique et aux frottements, agrégats échangeant de la matière
entre eux par diffusion. Le comportement intime d’un fluide réel résulte ainsi du couplage entre
l’hydrodynamique (convection, turbulence) et le transfert diffusionnel de matière. Il apparaît
donc qu’un fluide réel, considéré comme étant macroscopiquement homogène, peut s’avérer,
sous certaines conditions (diffusion lente vis-à-vis des autres phénomènes intervenant),
microscopiquement hétérogène.
On peut noter que le prémélange des réactifs ne peut être que favorable à une diminution de la
ségrégation et, si cette dernière subsiste, devrait tendre à minimiser ses effets néfastes.
On peut également remarquer que le concept de macrofluide (aucune interaction entre domaines
de ségrégation) implique, une fois la fonction de distribution des temps de séjour connue, des
performances identiques pour toute configuration d’écoulement, puisque la composition des
agrégats de molécules ne dépend que du temps passé par ceux-ci au sein du récipient. Dès lors,
l’hypothèse du macrofluide permet un calcul univoque des performances liées à une fonction
de distribution des temps de séjour donnée, sans que l’on doive tenir compte du facteur
précocité du mélange.
La détermination de l’intensité de ségrégation et/ou de son échelle implique des techniques
délicates, dont l’utilisation est pratiquement exclue pour étudier des cas réels. Aussi pour tenter
de surmonter ces difficultés, des modèles d’interaction entre agrégats ont été imaginés. A titre
d’exemple, nous présentons ci-après un de ces modèles, retenu pour sa simplicité : il s’agit du
modèle d’interaction par échange avec la moyenne, proposé par J.VILLERMAUX et coll. Ce
modèle rend compte de l’existence des interactions entre domaines de ségrégation par un
coefficient de transfert apparent ℎ entre un agrégat et l’ensemble des agrégats l’entourant, tel
que l’évolution de la concentration 𝐶𝐴 en une espèce chimique 𝐴 au sein de l’agrégat considéré
soit donné, en fonction du temps et en l’absence de réaction chimique, par l’équation :
𝑑𝐶𝐴
= ℎ(𝐶𝐴̅ − 𝐶𝐴 ) 2.19
𝑑𝑡

35
Où 𝐶𝐴̅ est la concentration moyenne locale. Le paramètre de ce modèle est donc le coefficient
de transfert apparent ℎ , qui mesure le taux d’interaction entre agrégat et les agrégats voisins.
Remarquons que ce paramètre ℎ peut être introduit d’une autre manière, à savoir en considérant
que chaque agrégat de molécules se comporte comme un petit récipient parfaitement mélangé
et fonctionnant en continu, de temps spatial 1⁄ℎ ; 1⁄ℎ est donc une mesure du temps pendant
lequel un agrégat de molécules conserve son identité. Le paramètre ℎ a pu être corrélé en
fonction des caractéristiques physiques du fluide et de la puissance dissipée.
Pour les liquides :
Σ𝜌
ℎ = [0,3 + 𝑙𝑛(𝑆𝑐)]−1 ( 𝜇 𝐹) 2.20
𝐹

où :
𝑆𝑐 = 𝜇𝐹 ⁄𝜌𝐹 𝐷𝐹 est le nombre de Schmidt ;
𝜇𝐹 est la viscosité du fluide;
𝐷𝐹 est le coefficient de diffusion ;
𝜌𝐹 est la masse volumique du fluide ;
Σ est la puissance dissipée par la turbulence par unité de masse de fluide.
La relation (2.20) montre que les valeurs élevées du coefficient de transfert apparent ℎ
correspondent à une agitation vigoureuse et à une faible viscosité, ce qui est bien conforme à
l’intuition. Bien que ce modèle puisse être appliqué à un écoulement quelconque, il n’a jusqu’à
présent été développé que dans le cas d’un récipient parfaitement mélangé à l’échelle
macroscopique, où son traitement mathématique est particulièrement aisé : dans ce cas
particulier en effet, 𝐶𝐴̅ est la concentration moyenne au sein du récipient, soit :


𝐶𝐴̅ = ∫0 𝐶𝐴 (𝜏) 𝑰(𝜏)𝑑𝜏 = 𝐶𝐴 (𝜏)𝑒𝑥𝑝(− 𝜏)𝑑𝜏 2.21
C’est aussi la concentration moyenne dans le flux de sortie du récipient.
Le concept de macrofluide est d’une importance toute particulière dans les systèmes
polyphasiques, car au moins une des phases de tels systèmes se comporte généralement comme
un fluide partiellement ou complètement ségrégé. Ainsi, la phase solide des systèmes fluide-
solide peut être assimilée à un macrofluide, car chaque particule solide est un agrégat distinct
de molécules. De même, la phase dispersée d’un système fluide-fluide est partiellement
ségrégé : elle peut l’être plus au moins fortement selon l’importance des interactions entre les
gouttelettes de liquide ou encore les bulles de gaz dispersées dans la phase continue.

36
Bioréacteurs
Un bioréacteur est un appareil ou unité technologique favorisant, sous des conditions de culture
contrôlées, la multiplication des micro-organismes (levures, bactéries, champignons
microscopiques, algues…), de cellules voire d’organismes pluricellulaires pour des fins
industrielles (production de métabolites et de tissus cellulaires, ou bioconversion de molécules
d’intérêt), en :
- Agroalimentaire (yaourts, boissons alcooliques…),
- Médecine (antibiotiques, vitamines…),
- et/ou traitement des déchets liquides et solides.
Il s’agit alors d’une combinaison de deux composantes principales, l’une biologique
(culture vivante), et l’autre artificielle (dispositif commandant les conditions de culture) pour
atteindre un objectif de production et/ou de bioconversion préalablement défini.
Uun bioréacteur est un réservoir (Figure ) fabriqué en verre de 0.1 à 15 L (≈ 25 % plus haut que
large) pour l’expérimentation au Laboratoire, ou en acier inoxydable de 20 à 1 000 L pour des
tests pilotes industriels voire plus de 10 000 L en vraie industrie.

II.1. Classification et caractéristiques des bioréacteurs


Les bioréacteurs sont utilisés en biotechnologie pour cultiver et manipuler des
microorganismes, des cellules animales ou végétales, ainsi que des organismes unicellulaires
dans des conditions contrôlées. Ils jouent un rôle essentiel dans la production de produits
biologiques tels que les médicaments, les enzymes, les protéines recombinantes et les
bicarburants. Les biréacteurs peuvent être classés en plusieurs catégories en fonction de leurs
caractéristiques et de leurs applications. Ci-dessous une classification générale des biréacteurs
ainsi que leurs caractéristiques principales :

II.1.1 Classification des bioréacteurs :


- Bioréacteurs à agitation mécanique : sont équipés d’agitateurs pour mélanger le
milieu de culture. Ils sont adaptés à la culture de microorganismes en suspension et
sont couramment utilisés pour la production de biomasse et de produits fermentés.
- Bioréacteurs à fermentation statistique : ces dispositifs ne disposent pas
d’agitateurs et sont généralement utilisés pour la culture de cellules sensibles à
l’agitation.

37
- Bioréacteurs à perfusion : ils permettent un apport continu de nutriments frais et
un retrait des produits métaboliques, ce qui les rend adaptés à la production de
composés sensibles à l’accumulation de déchets.
- Bioréacteurs à lit fixe : ils utilisent un support solide pour la fixation des
microorganismes, tels que les bioréacteurs à lit fluidisé. Ces systèmes sont employés
pour la biotransformation de substances chimiques
- Bioréacteurs à membrane : ils intègrent des membranes sélectives pour la
séparation des produits, des cellules ou des molécules spécifiques, ce qui permet
d’augmenter la pureté des produits.

II.1.2 Caractéristiques des bioréacteurs :


Les caractéristiques principales des bioréacteurs sont :
- Contrôle de la température : les bioréacteurs sont généralement équipés de
systèmes de contrôle de la température pour maintenir des conditions optimales de
croissance.
- Contrôle de pH/ : Le pH du milieu de culture est crucial pour la croissance des
microorganismes, et de nombreux bioréacteurs offrent un contrôle précis du pH.
- Aération et agitation : Pour favoriser la diffusion de l’oxygène et la mélange du
milieu de culture, les bioréacteurs disposent souvent de systèmes d’aération et
d’agitateurs.
- Surveillance et régulation en ligne : les bioréacteurs modernes intègrent des
capteurs et des systèmes de surveillance en ligne pour suivre en temps réel les
paramètres de culture tels que la biomasse, la concentration en substrats et la
production de produits.
- Echelle et volume : les bioréacteurs varient en taille, de quelques millilitres pour la
recherche en laboratoire à des milliers de litres pour la production industrielle.
- Mode de fonctionnement : les bioréacteurs peuvent fonctionner en mode batch
(fermentation en une seule étape), fed-batch (ajout progressif de nutriments) ou
continu (flux continu de nutriments et retrait de produits)
- Types de microorganismes : les bioréacteurs sont adaptés à divers types de
microorganismes, notamment les bactéries, les levures, les cellules animales et
végétales, et même les cellules souches

II.2. Transfert de matières dans les bioréacteurs: Couplage transfert-réaction

38
Toute réaction dans laquelle interviennent des microorganismes peut être considérée comme un
système hétérogène comportant une phase continue contenant les substrats et produits solubles
et des phases dispersées : phase solide (microorganismes, substrats solides tels que cellulose…),
phase gazeuse (air, vecteur d’oxygène nécessaire aux cultures aérobies, phase liquide
immiscible (substrats insolubles tels que les hydrocarbures). L’efficacité de ce système dépend
largement du contact suffisant entre les différentes phases. Par conséquent, le transfert de masse
des éléments nutritifs (sources de carbone et l’énergie, oxygène) est plus complexe que pour
les processus chimiques. Dans la fermentation aérobie ; le transfert de l’oxygène est un facteur
très important dans la conception des bioréacteurs, les microorganismes aérobies ont besoin
d’oxygène pour leur croissance, et la maintenance des cellules.
Au cours de la croissance, l’oxygène est utilisé comme accepteur final d’électrons mais aussi
incorporé dans les différentes molécules structurales. Si l’oxygène n’est pas disponible en
quantité suffisante dans le milieu, il devient en quelque sorte un substrat limitant et le taux de
croissance en est affecté (modèle de Monod). Cette demande en oxygène pour la fermentation
est normalement satisfaite par l’opération aération-agitation, qui est l’une des opérations
unitaires indispensables à la maîtrise des réactions biologiques.

II.2.1 Aération et agitation

Quel que soit le procédé d’aération retenu, on a toujours une injection de gaz et formation de
bulles au sein du milieu de culture. Le problème d’aération est donc essentiellement un
problème de transfert de l’oxygène des bulles d’air vers les microorganismes, ce qui est
schématisé par la figure II.8. On se place ici dans le cas d’un milieu gaz-liquide homogène.
L’oxygène étant très faiblement soluble dans l’eau, dès l’instant que cesse l’aération du
fermenteur, la réserve en oxygène dissout peut être épuisée en quelques secondes par les
microorganismes. De ce fait, l’oxygène consommé doit être renouvelé en permanence et le
facteur limitant sera donc la diffusion à travers l’interface gaz-liquide (Figure II.9) . La loi de
Fick relative à la diffusion peut être appliquée ici. On obtient :

𝑑𝑁
= 𝑘𝐿 𝑎(𝐶𝑂∗2 − 𝐶𝐿𝑂2 )
𝑑𝑡
𝑑𝑁
: La vitesse de transfert de l’oxygène exprimée en mole/m3.s
𝑑𝑡

𝐶𝑂∗2 : Concentration saturante en oxygène dans la phase liquide (mole/m3)

𝐶𝐿𝑂2 : Concentration en oxygène dans la phase liquide (mole/m3)

39
𝑘𝐿 : Coefficient de diffusion de l’oxygène côté liquide (m/s)
a : aire interfaciale volumique d’échange (m2/m3) de phase continue.

Figure II.8 : Transfert d’oxygène en milieu de culture liquide


A : Variation de concentration en oxygène dissous
B : Transfert d’oxygène de la bulle de gaz au micro-organisme (M)
I B-L : Interface bulle-milieu liquide
I L-M : Interface milieu liquide micro-organisme
MC : Milieu de culture infiniment mélangé
𝐶𝑀𝑂2 : Concentration en oxygène dans le micro-organisme
1 : Air interfaciale
2 : Film liquide
Le coefficient de transfert peut être évalué grâce à diverses théories faisant intervenir le
concept du double film, du renouvellement de surface et de la pénétration. Le coefficient 𝑘𝐿 𝑎
est une caractéristique propre pour un fermenteur fonctionnant dans des conditions précises
d’agitation et d’aération. Il exprime une capacité de transfert de l’oxygène et peut être déterminé
expérimentalement par la méthode au sulfite de Cooper, il peut décroître durant la croissance,
par suite d’une augmentation de la viscosité (production de polysaccharide) ou de l’introduction

40
d’agents tensioactifs. Il faut donc réduire au maximum l’emploi d’agents anti mousse qui
limitent la diffusion et leur préférer si possible des dispositifs mécaniques.

Figure II.9 : Répartition des pressions partielles et des concentrations en oxygène


respectivement dans la phase gazeuse et dans la phase liquide, à proximité de l’interface bulle
d’air-eau (théorie du double film)

L’amélioration de l’aération en fermentation repose sur :


• une adaptation de la demande biologique en oxygène et de la capacité de transfert de façon à
optimiser les rendements de transfert ;
• un accroissement du rendement d’oxygénation (quantité d’oxygène transférée par rapport à
celle injectée) en surveillant l’effet concomitant de l’accroissement des pressions partielles en
CO2 ;
• une augmentation du rendement énergétique d’oxygénation (quantité d’oxygène transférée
par unité d’énergie consommée pour l’agitation-aération ; en pratique, kg O2 transféré par
kWh) ;
• une augmentation des facteurs de potentialité 𝐶𝑂∗2 − 𝐶𝐿𝑂2 en opérant avec de faibles valeurs
de 𝐶𝐿𝑂2 (mais non limitantes) et des valeurs élevées de 𝐶𝑂∗2 (accroissement de la pression
partielle de O2 en opérant sous pression ou avec de l’air enrichi en oxygène ou par

41
augmentation de la solubilité de O2 par addition de phases liquides insolubles dans l’eau et
dans lesquelles O2 est très soluble (paraffines, dérivés fluorés…).
Trois types de systèmes sont employés pour réaliser efficacement l’aération. D’abord des
dispositifs mécaniques à l’aide de turbines, agitateurs et pales ou à l’aide de pompes.
Ensuite, des insufflations d’air par des colonnes à bulles et des réacteurs gazosiphons. Enfin le
dispositif mixte tel que le couplage d’un système mécanique et d’un gazosiphon. Mais il faut
se souvenir qu’il ne s’agit pas uniquement de fournir une quantité d’oxygène donnée, encore
faut-il le faire avec le meilleur rendement énergétique possible ? (C’est-à-dire que la masse
d’oxygène transférée par unité d’énergie dépensée doit être la plus élevée possible).
Il est à remarquer que le mobile d’agitation peut jouer un autre rôle tels que le mélange et
l’homogénéisation du liquide. De nombreux types d’agitation ont été décrits (Figure II.10), le
plus employé en fermentation est la turbine à pales droites et étroites (turbine Rushton) ; il s’agit
d’un mobile à débit radial. La turbine Rushton est bien adaptée pour l’agitation des fluides peu
visqueux. L’action de cisaillement de ce type de turbine facilite le transfert de l’oxygène. Dans
le cas de micro-organismes particulièrement fragiles, elle ne convient pas. Les turbines à pales
incurvées exercent le même type d’action. Lorsque la viscosité du fluide à agiter augmente, ce
qui est le cas de certaines fermentations (antibiotiques, polysaccharides), on utilise d’autres
agitateurs à débit radial, tel que l’agitateur à pales larges rectangulaires ou les agitateurs à ancre
(voir Figure II.10). Les agitateurs à débit axial sont intéressants du fait de la circulation du
fluide qu’ils provoquent. On utilise les hélices marines (propeller) carrées dont le pas est égal
au diamètre. Du fait de leur action de pompage, elles sont mal adaptées au transfert d’oxygène.
Les hélices à double flux sont également dans ce cas. Elles comportent aux extrémités des pales
tronquées d’une hélice, de petites pales d’une hélice de pas inverse. Au centre du mobile, le
fluide circule de haut en bas et au niveau des petites pales périphériques, il circule de bas en
haut. Pour les fluides visqueux, les hélices à grandes pales minces sont intéressantes, du fait
de leur débit qui peut être important. On peut utiliser également dans ce cas les agitateurs à
ruban hélicoïdal. En fermentation, on a souvent besoin des deux actions, de pompage et de
cisaillement. C’est pourquoi on peut monter sur le même arbre un mobile à débit radial (turbine
Rushton) alimenté par un mobile à débit axial (hélice à grandes pales minces). La turbine à
pales inclinées est à la fois génératrice d’action de pompage et d’action de cisaillement.

42
Figure II.10: Différents mobiles d’agitation

43
II.3. Mécanisme et cinétique des réactions enzymatiques homogènes et hétérogènes

II.3. 1 Cinétiques des réactions enzymatiques

Les enzymes sont des protéines qui ont, en raison de leur structure spatiale, la propriété de
catalyser des bioréactions de manière très spécifique et très efficace. On connaît actuellement
plus de 2 000 enzymes. Le tableau 1 donne à titre d’exemple les enzymes utilisées en industrie
alimentaire. On trouvera dans le tableau 2 les micro-organismes utilisés dans cette même
industrie. La structure d’une enzyme, et donc son activité catalytique, dépend du pH, il existe
en général un pH optimal. Cette activité augmente avec la température, selon la loi d’Arrhénius,
mais au-dessus d’une température limite, la structure de la protéine est dénaturée et l’activité
catalytique diminue. Il existe donc aussi une température optimale de mise en oeuvre de
l’enzyme.

44
• Une solution enzymatique possède un nombre fixe de sites catalytiques actifs auxquels
le substrat peut se lier ; aussi, à partir d’une certaine concentration en substrat, tous les
sites sont occupés et la vitesse de réaction devient indépendante de la concentration en
substrat (figure 9).

Figure 9. vitesse d’une réaction enzymatique

La loi de vitesse de Michaelis et Menten est une des premières et des plus simples relations
proposées pour modéliser la cinétique des réactions enzymatiques (figure 6 a)
𝑉 [𝑆]
𝑉 = 𝐾 𝑚+[𝑆] 3.1
𝑚

45
avec 𝑉 (𝑚𝑜𝑙. 𝑚−3 . 𝑠 −1 ) vitesse de la réaction,
𝑉𝑚 (𝑚𝑜𝑙. 𝑚−3 . 𝑠 −1 ) vitesse maximale de la réaction,
𝐾𝑚 (𝑚𝑜𝑙 ⁄𝑚3 ) constante de Michaelis et Menten,
[𝑆](𝑚𝑜𝑙 ⁄𝑚3 ) concentration en substrat
La vitesse maximale de la réaction 𝑉𝑚 est proportionnelle à la concentration enzymatique
initiale de la solution.
Cette forme de relation peut être expliquée par un mécanisme en deux étapes :
— la première étape est la formation rapide et équilibrée d’un complexe activé enzyme-substrat
;
— la seconde étape est la décomposition de ce complexe activé en produit et enzyme ainsi
régénéré.
La constante de Michaelis et Menten Km mesure l’affinité de l’enzyme pour le substrat, qui est
d’autant plus grande que la valeur de la constante est faible.
-La relation de Michaelis et Menten ne peut pas traduire le comportement cinétique de toutes
les réactions catalysées par des enzymes. Des relations plus complexes ont été développées
pour rendre compte des phénomènes d’inhibition observés lorsque des molécules, autres que
de substrat, peuvent se lier réversiblement sur les sites actifs des enzymes. Les inhibiteurs
compétitifs sont en général des molécules de structure proche de celle du substrat, qui entrent
en compétition avec ce dernier pour se lier aux sites catalytiques de l’enzyme et former des
complexes inactifs. La loi cinétique est alors (figure 6 b) :

𝑉𝑚 [𝑆]
𝑉= [𝐼] 3.2
𝐾𝑚 (1+ )+[𝑆]
𝐾𝐼

avec [𝐼](𝑚𝑜𝑙 ⁄𝑚3 ) concentration en inhibiteur,

𝐾𝐼 (𝑚𝑜𝑙 ⁄𝑚3 ) constante d’inhibition.

Une augmentation de la concentration en substrat peut contrer l’effet inhibiteur.

46
Figure 10 cinétique d’une réaction enzymatique

Les inhibiteurs non compétitifs sont des molécules de structure différente de celle du substrat,
qui se lient à d’autres sites actifs de l’enzyme et diminuent l’affinité de l’enzyme pour le
substrat. La loi cinétique est alors (figure 6 c) :

𝑉𝑚 [𝑆]
𝑉= [𝐼] 3.3
(1+ )(𝐾𝑚 +[𝑆])
𝐾𝐼

Une augmentation de la concentration en substrat ne peut pas contrer l’effet inhibiteur.


Les inhibiteurs incompétitifs se fixent uniquement sur le complexe enzyme-substrat et n’ont
aucune affinité pour l’enzyme lui-même. La loi de vitesse correspondante est (figure 6 d) :

𝑉𝑚 [𝑆]
𝑉= [𝐼] 3.4
𝐾𝑚 +(1+ )[𝑆]
𝐾𝐼

47
-Ces différentes équations de vitesse conduisent (figure 6) à des variations linéaires de 1⁄𝑉 en
fonction de 1⁄[𝑆]. Souvent les produits d’une bioréaction enzymatique sont des inhibiteurs de
l’enzyme. Enfin une concentration élevée en substrat peut entraîner, pour certaines réactions,
un phénomène d’inhibition. Cette inhibition par le substrat conduit à la loi de vitesse :
𝑉𝑚 [𝑆]
𝑉= [𝑆]2
3.5
𝐾𝑚 +[𝑆]+
𝐾𝑆

𝐾𝑆 (𝑚𝑜𝑙 ⁄𝑚3 ) étant la constante d’inhibition par la substrat.

II.3.2 Couplage entre réaction biochimique et transfert de matière liquide-solide

Ce couplage est observé lorsqu’un substrat réagit à la surface de particules solides sur lesquelles
sont fixés une enzyme ou des micro-organismes. Le substrat se déplace du coeur de la phase
liquide à l’interface liquide-solide où il est consommé par bioréaction. Un régime quasi -
stationnaire est rapidement atteint, et la concentration en substrat à l’interface [Si] s’établit à
une valeur telle que la vitesse de transfert de matière soit égale à la vitesse de la bioréaction. En
choisissant ici, pour illustrer ce couplage, une réaction enzymatique obéissant à la loi cinétique
simple de Michaelis et Menten, l’égalité des vitesses permet alors d’écrire :

𝑉 ′ [𝑆 ]
𝑘𝑙 𝑎′ ([𝑆] − [𝑆𝑖 ]) = 𝐾 𝑚+[𝑆𝑖 ] (20)
𝑚 𝑖

Avec 𝑘𝑙 (𝑚/𝑠) coefficient de transfert de matière liquide-solide,


𝑎′ (𝑚2 /𝑘𝑔) : aire spécifique massique du solide,
𝑉𝑚′ (𝑚𝑜𝑙. 𝑠 −1 . 𝑘𝑔−1 ) : vitesse spécifique maximale de bioréaction par unité de masse de
support solide,
[𝑆 ] (𝑚𝑜𝑙/𝑚3 ): concentration en substrat au cœur du liquide,

[𝑆𝑖 ] (𝑚𝑜𝑙/𝑚3 ) : concentration en substrat à l’interface liquide-solide,


𝐾𝑚 (𝑚𝑜𝑙/𝑚3 ) : constante de Michaelis et Menten.

En transformant la relation (20) pour la mettre sous forme adimensionnelle, on obtient :

𝐾𝑚 [𝑆𝑖 ] [𝑆𝑖 ] [𝑆𝑖 ]


( + ) (1 − ) = 𝐷𝑎
[𝑆 ] [𝑆 ] [𝑆 ] [𝑆 ]

𝑉′
𝐷𝑎 = 𝑘 𝑎𝑚
′ [𝑆 ] est le nombre de Damköhler qui représente le rapport entre la vitesse maximale
𝑙

de réaction et la vitesse maximale de transfert de matière. Transfert de matière et réaction étant


en série, si leurs vitesses sont très différentes c’est le phénomène le plus lent qui sera l’étape
limitante du processus. Un nombre de Damköhler très grand devant 1 correspond à une vitesse
de réaction élevée devant la vitesse de transfert, ce dernier phénomène est donc limitant. La

48
relation précédente montre alors que [Si] est très petit devant [S] et la vitesse du processus est
donc égale à 𝑘𝑙 𝑎′ [𝑆 ] .
Au contraire, lorsque le nombre de Damköhler est très petit devant 1, c’est la réaction
biochimique qui est le phénomène limitant, [Si] est très voisin de [S] et la vitesse du processus
𝑉 ′ [𝑆 ]
est donc égale à 𝐾 𝑚+[𝑆𝑖 ] .
𝑚 𝑖

Quand le nombre de Damköhler n’est ni très grand, ni très petit devant 1, la relation ci-
[𝑆 ]
dessus, du second degré par rapport à [Si] permet le calcul de [𝑆𝑖] :

𝐾𝑚
[𝑆𝑖 ] 1 𝐾𝑚 4
[𝑆 ]
= (𝐷𝑎 + − 1) ±√1 + 2−1
[𝑆 ] 2 [𝑆 ] 𝐾𝑚
(𝐷𝑎 + − 1)
[ [𝑆 ] ]
𝐾
le signe à choisir devant la racine carrée est le signe de 𝐷𝑎 + [𝑆𝑚] − 1 de manière à ce que le
[𝑆 ]
rapport [𝑆𝑖] soit positif.

II.3.2 Couplage entre réaction biologique et transfert de matière gaz-liquide

Ce couplage se rencontre lors de cultures aérobies de micro-organismes. L’oxygène passe de la


phase gaz, dispersée sous forme de bulles, à la phase liquide pseudo-homogène renfermant les
microorganismes, où il est consommé. Les deux phénomènes, transfert de matière gaz-liquide
et bioréaction, sont successifs et la concentration en oxygène dissous dans la phase liquide
résulte d’un régime quasi-stationnaire rapidement établi et pour lequel la vitesse de transfert de
l’oxygène est égale à sa vitesse de consommation par bioréaction. Compte tenu de sa très faible
solubilité, le substrat limitant est en général l’oxygène ; en supposant que l’influence de la
concentration en oxygène dissous sur la vitesse de croissance obéit à la loi de Monod , on peut
alors écrire en régime quasistationnaire.

49
[𝑟𝑋 ] [𝑋]µ [𝑋] [𝑋]µ𝑚𝑎𝑥
𝑘𝑙 𝑎 = ([𝑂2∗ ] − [𝑂2 ] ) = = =
[𝑌𝑋/𝑂2 ] [𝑌𝑋/𝑂2 ] [𝑌𝑋/𝑂2 ] [𝐾𝑂 + [𝑂2 ]]
2

Avec 𝑘𝑙 𝑎 (𝑠 −1 ) coefficient volumétrique de transfert,


[𝑂2 ](𝑘𝑔/𝑚3 ) concentration en oxygène dissous,
[𝑂2∗ ] (𝑘𝑔/𝑚3 ) concentration saturante en oxygène dissous,
[𝑌𝑋/𝑂2 ] rendement de la biomasse par rapport à l’oxygène,
𝐾𝑂2 (𝑘𝑔/𝑚3 ) constante de Monod pour l’oxygène

4. Modes de fonctionnement des bioréacteurs

Dans la pratique, les modes opératoires se caractérisent par les échanges liquides, c'est à dire
par la façon dont les réacteurs biologiques sont alimentés en substrat. Nous distinguons trois
modes principaux à savoir le mode batch (discontinu), le mode semi continu et le mode continu
(Figure II.7).

Figure 4.1 : Les différents modes de fonctionnement des réacteurs biologiques

4.1 Le mode discontinu (ou batch)

Dans ce mode de fonctionnement la totalité des éléments nutritifs nécessaires à la croissance


biologique est introduite lors du démarrage de la réaction. Aucun apport ni prélèvement
(excepté bien sûr pour quelques mesures hors lignes éventuellement) n'est réalisé par la suite et
la réaction se déroule à volume constant. Les seules actions possibles de l'opérateur ne

50
concernent que les variables d'environnement (pH, température, vitesse d'agitation, aération,...).
Peu de moyens sont ainsi nécessaires à sa mise en œuvre, ce qui en fait son attrait du point de
vue industriel. Il souffre cependant d’un inconvénient majeur : l’apport initial d’une quantité
élevée de substrat inhibe généralement la croissance des microorganismes qui le consomment,
ce qui se traduit par des durées de traitement allongées, et limite la charge initiale admissible .

4.2 Le mode semi-continu (ou fedbatch)

Tout en nécessitant un dispositif de stockage des affluents, ce mode de fonctionnement se


distingue du précédent par un apport des différents éléments nutritifs au fur et à mesure des
besoins constatés des micro-organismes. La variation du volume du milieu réactionnel est donc
une fonction directe de l’état d’avancement de la réaction. Ce mode permet essentiellement
d’éviter les problèmes d'inhibition associés au mode précédent, et de fonctionner à des taux
spécifiques de croissance proches de leur valeur maximale.
A partir d'un volume initial préalablement ensemencé, le réacteur est alimenté par un débit
augmentant de façon exponentielle, nécessitant un contrôle en boucle fermée. C'est d'ailleurs
ce dernier point qui a fortement limité l'utilisation du fedbatch en milieu industriel. Ce mode de
fonctionnement est essentiellement utilisé pour des productions issues de procédés déjà anciens
: production de levure, de vinaigre, de bière,… Il est par ailleurs, tout comme le précédent,
également préconisé lorsque la récupération des produits est réalisée en discontinu
(accumulation intracellulaire par exemple) ou que l'on ne peut se permettre de relarguer des
matières toxiques résiduelles (cas du fonctionnement en continu).

4.3 Le mode continu (ou chemostat)


C’est le mode le plus souvent employé dans le domaine du traitement de l’eau. Caractérisé par
un volume réactionnel constant, il est soumis à un soutirage de milieu réactionnel égal au flux
d'alimentation en matière nutritive (en employant une régulation de niveau).
Les procédés continus fonctionnent en régime permanent, en maintenant, pour des conditions
d'alimentation fixées, le système dans un état stationnaire, en évitant tout phénomène inhibiteur
grâce à l'effet de dilution dû à l'alimentation. Ces modes de fonctionnement permettent en outre
des productions importantes dans des réacteurs de taille réduite et ne nécessitent pas
d’importants dispositifs de stockage en amont, contrairement aux modes précédents. Ils peuvent
en outre être intégrés dans des dispositifs plus complexes constituant les stations de traitement
d’eaux.

51
Le choix d’un type approprié de bioréacteur est une étape principale dans la réalisation avec
succès de la fermentation. Dans le cas de la culture microbienne, l’environnement de la
fermentation et les conditions fournies par le bioréacteur devront adapter les besoins spécifiques
des microorganismes, afin d’obtenir une productivité élevée des produits désirés. La
performance des bioréacteurs dépend de leur construction géométrique, conception interne, la
dispersion du gaz (aération et agitation), et les modes opératoires. Les types de réacteurs les
plus utilisés dans les applications industrielles sont les cuves agitées. Dans le cas des
microorganismes sensibles aux forces de cisaillement, il est approprié d’employer d’autres
types de bioréacteurs tels que les colonnes à bulles ou les réacteurs Air-Lift.

A- Cuve mécaniquement agitée

La cuve mécaniquement agitée est souvent le réacteur choisi lorsque toutes les espèces de la
bioréaction (substrats, enzymes, micro-organismes) sont dans une phase liquide unique. Sous
réserve d’une agitation mécanique suffisante pour que la phase liquide soit parfaitement
mélangée, le seul phénomène à prendre en compte dans le dimensionnement et la conduite du
bioréacteur est la vitesse de la bioréaction. L’agitation et l’aération dans le bioréacteur
mécaniquement agité engendrent presque toujours la formation de la mousse, un excès de celle-
ci contaminera le système et peut poser des problèmes mécaniques pour le mobile d’agitation.
La présence de l’anti-mousse réduit la tension de surface qui est toujours appliquée en
fermentation, cependant, elle affecte également la vitesse de transfert de l’oxygène et la
croissance des cellules ; par conséquent, l’addition de l’anti-mousse est préjudiciablement
nuisible aux opérations de fermentation.
La figure (I.1) montre la conception générale d’un bioréacteur classique. C’est une cuve
cylindrique munie en haut et en bas de deux calottes sphériques. Elle est munie d’une agitation
introduite par le haut de la cuve, munie de dispositifs de guidage, de trois turbines d’agitation
et d’un mobile supérieur destiné à la réduction des mousses. La régulation de la température est
faite par un serpentin disposé au sein du liquide en fermentation. D’autres dispositifs peuvent
être utilisés, par exemple la mise en place d’une double enveloppe de préférence au serpentin.
Cela libère l’intérieur de la cuve et facilite les opérations de nettoyages.
Ce type de bioréacteur convient parfaitement à la production d’antibiotique. Il s’agit de
processus, généralement peu exothermiques, utilisant des microorganismes filamenteux
(bactéries, moisissures) relativement fragiles et sensibles aux actions de cisaillement et dont
les besoins en oxygène ne sont pas très grands.

52
Figure I.1 : Cuve mécaniquement agitée.

B- Cuve mécaniquement agitée aérée

La cuve mécaniquement agitée aérée est utilisée pour la production de microorganismes


en aérobiose. L’oxygène qui est très peu soluble dans les milieux de fermentation est alors le
substrat limitant. La vitesse globale de formation des micro-organismes est la résultante du
couplage entre leur vitesse propre de croissance et la vitesse de transfert de l’oxygène de la
phase gaz dispersée vers le milieu de fermentation. La puissance mécanique consommée sert à
la fois à mélanger la phase liquide et à générer une aire interfaciale importante entre les bulles
de gaz et le milieu de fermentation.
Chemap propose un bioréacteur à circulation interne muni d’un dispositif d’agitationaération

53
breveté : la turbine « Effigas » (Figure I.2). Ses bonnes capacités de transfert d’oxygène
permettent de l’employer en production de biomasse mais aussi en fermentation acétique,
processus particulièrement exigeant de ce point de vue. Afin de faciliter l’évacuation des
calories produites, rien ne s’oppose, étant donné leur conception, à ce que le tube de circulation
soit réalisé à l’aide de plaques cintrées de canaux thermiques. Il facilite ainsi deux actions
complémentaires l’une de l’autre : amélioration de la circulation du fluide à l’intérieur de la
cuve et augmentation du coefficient de transfert thermique. À la base du tube de circulation se
trouve la turbine « Effigas ». Il s’agit d’un mobile d’agitation conçu comme le rotor d’une
pompe centrifuge. Le liquide en fermentation et le gaz d’aération sont aspirés par la partie
centrale de la pièce. Ce liquide est celui de l’intérieur du tube de circulation, où il a tendance à
descendre. Le gaz est aspiré, soit à partir d’une conduite l’amenant au-dessus de la turbine par
le haut de la cuve, soit par le bas, au moyen d’un arbre creux. Le mélange gaz liquide ainsi
formé est propulsé radialement, à l’extérieur du tube de circulation. Allégé du fait de
l’émulsion, le fluide remonte à la périphérie de la cuve pour être réaspiré à l’intérieur du tube.
L’entraînement de la turbine a lieu par le bas de la cuve à l’aide d’un arbre court. L’aspiration
du gaz permet de réduire le coût énergétique entraîné par l’utilisation de compresseurs. Cet effet
d’auto aspiration est toutefois limité dans les grands fermenteurs du fait de la hauteur du liquide.
Mais, dans la plupart des cas, il permet tout de même de remplacer les compresseurs par des
surpresseurs. Contrairement au dispositif classique d’agitation qui disperse l’énergie dans la
totalité du fermenteur, la turbine « Effigas » disperse l’énergie dans un volume faible, à
voisinage immédiat. Les cellules microbiennes doivent évidement être capables de supporter
les forces de cisaillement importantes. Ce type de bioréacteur s’applique mal à la culture
d’organismes filamenteux sensibles à ce type d’action mécanique.

54
Figure I.2: Cuve mécaniquement agitée aérée.
C- Réacteur à lit fixe

Un autre moyen d'augmenter la concentration bactérienne ou d’améliorer l’activité de


l’enzyme consiste à les fixer sur des supports. Le support d'immobilisation sont des particules
ou billes sur lesquelles sont immobilisés des cellules ou des enzymes. Il est compacté dans
une colonne au travers de laquelle le milieu peut être injecté. Les deux extrémités du réacteur
sont fermées par des grilles ou des plaques perforées et permettant la percolation d’une phase
liquide, mais empêchant tout mouvement de la phase solide dispersée. L’alimentation peut se
faire de bas en haut ou de haut en bas selon le type de construction.
Le réacteur à lit fixe permet à la fois d’avoir une importante productivité et un produit final
exempt d’enzymes étant donné que celles-ci sont confinées dans le réacteur, évitant ainsi une
étape finale de séparation du biocatalyseur et du produit. Le réacteur à lit fixe constitue la
configuration classique utilisée dans la conduite de réactions catalytiques hétérogènes à
grande échelle. Il est cependant important de noter que ce réacteur conduit à une forte perte de
charge ainsi qu’au risque de colmatage du lit et d’importantes limitations diffusionnelles ce
qui réduit ses performances Si les particules sont de forme sphérique, la fraction de réacteur

55
occupée par la phase solide est de l’ordre de 0,6 et celle occupée par la phase liquide est de
0,4 La perte de charge subie par le liquide à la traversée d’un lit de particules sphériques peut
être estimée par la relation d’Ergun :

P : perte de charge (Pa)


H : hauteur du lit (m)
dp : diamètre des particules (m)
Ul : vitesse superficielle du liquide (m/s)
l : fraction de lit occupée par la phase liquide égale à 0,4 max
l: viscosité du liquide (Pa.s)

D. Réacteur à lit fluidisé

Les particules support avec leurs cellules fixées (ou enzymes) sont en mouvement, fluidisées
par un flux d'écoulement. Il est constitué d’un tube de section circulaire rempli de particules
solides actives, mais forcément placé verticalement et dont seule une extrémité est fermée par
une grille ou une plaque perforée. L’activité est assurée par des bactéries ou des enzymes qui
sont fixées sur un support mobile, particules granulaires fines et poreuses comme le sable ou le
charbon actif. La phase liquide traverse le réacteur de bas en haut et comme les particules
solides ne sont pas confinées, dès que la vitesse superficielle du liquide dépasse la valeur
appelée vitesse minimale de fluidisation, le lit s’expanse et les particules solides se déplacent
librement à l’intérieur de la suspension liquide-solide. On dit alors que le lit est fluidisé ; les
particules solides sont animées d’un mouvement du flux ascendant rapide et régulier de
l'effluent qui assure leur mélange. Ce système minimise les phénomènes de colmatage des
colonnes et d'emprisonnement des gaz produits. Il assure un meilleur transfert de matière et de
chaleur.
Ces réacteurs (Figure I.5) sont également adaptés à la culture de micro-organismes à croissance
lente, et à la régénération de substances peu biodégradables comme pour les eaux usées après
la gazéification du charbon (benzol, cyanure, acide sulfhydrique), de substances cellulaires
(acide lignique, chlorolignine) ou de l’industrie textile (lessives, nitrates).

56
Figure I.5: Schéma d’un réacteur à lit fluidisé

Il est à noter que le taux de solide diffère d’un réacteur à un autre, il ne représente que 10% en
cuve agitée et peut atteindre les 40% en lit fluidisé et 60% en présence de lit fixe. D’autre part,
dans une cuve agitée, les chocs de particules solides sur le mobile d’agitation peuvent entraîner
leur destruction.

E- Réacteurs membranaires

De nos jours, les bioréacteurs membranaires attirent de plus en plus l’intérêt des études
théoriques et industrielles. L’utilisation des modules membranaires associés aux bioréacteurs
est prometteuse. Le recyclage des cellules conduit à travailler avec des concentrations
cellulaires élevées, on peut donc augmenter les productivités et par voie de conséquence,
réduire la taille des installations et diminuer les prix de revient. De plus, ces dispositifs
permettent d’envisager, en parallèle, l’extraction des composés produits par le métabolisme,
d’où le concept de fermentation extractive, particulièrement intéressante dans le cas où les
produits formés sont inhibiteurs. D’ailleurs, plusieurs d’entre eux avaient été employés dans
l’industrie alimentaire, chimique, médical et biologique, aussi bien que dans les traitements
d’environnement. Sur la base de l’immobilisation des biocatalyseurs et le fonctionnement de la
membrane, généralement les bioréacteurs membranaires sont classifiés en deux types (Figure
I.6) :

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•des biocatalyseurs sont suspendus en solution, compartimentés par la membrane et où celle-ci
sert seulement à la séparation. (voir Figure I.6 A)
•des biocatalyseurs sont immobilisés dans la membrane, celle-ci agit en tant que support des
biocatalyseurs et unité de séparation. D’où différentes techniques d’immobilisation peuvent être
utilisées, comme l’attachement à une surface par adsorption ou par liaison covalente,
l’encapsulation ou encore l’inclusion dans une matrice (Yang et al., 2006 ; voir Figure I.6 B).

Figure II.6 : Les principaux types des bioréacteurs membranaires


En plus de la variété de formes des membranes et des modules membranaires, il y a également
différents types de bioréacteurs membranaires où l’utilisation du bioréacteur membranaire à
fibre creuse est la plus large dans les bioprocessus. Les bioréacteurs membranaires peuvent être
également classés selon les types de matériaux de membrane (exemples : organiques,
inorganiques, polymériques, etc.). Par ailleurs, les bioréacteurs membranaires sont
généralement distingués par leur modes opératoires, tels que le bioréacteur membranaire
d’ultrafiltration ; bioréacteur membranaire biphasique (organique et aqueuse).

Références

1- Réacteurs enzymatiques et fermenteurs par Jean-Pierre RIBA Professeur à l’Institut


National Polytechnique de Toulouse (INPT) École Nationale Supérieure d’Ingénieurs
de Génie Chimique (ENSIGC), Techniques de l’Ingénieur, traité Génie des procédés
2- Les réacteurs chimiques, conception /calcul/ mise en œuvre Pierre TRAMBOUZE et
AL, publications de l’institut Français du pétrole , collectons ‘science et technique du
pétrole n°26’

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3- Khadra-Hanane TOUMI, Modélisation et identification paramétrique des processus de
fermentation lactique, Mémoire de Magister, université Ferhat Abbas- Setif UFAS
(Algerie)
4- Réactions et réacteurs chimiques cours et exercices corrigés, Michel GUISNET et Al,
ellipses.
5- Génie de la Réaction Chimique : les réacteurs homogènes, Cesari Laetitia, Alain
Chamayou, Patrick Cognet, Marie Debacq, Éric Schaer, Stéphane Vitu, Génie de la
réaction chimique & Évaluation économique des procédés”, Cnam Paris, France. 2022. cel-
01487790v3

Symboles Définitions
𝑪 Concentration réduite
𝑪′ Concentration réduite
𝐸(𝑡𝑠 ) Fonction de distribution des temps séjour
𝑬(𝜏 ) Fonction de distribution des temps séjour réduits
𝐹(𝑡) Distribution cumulative des temps de séjour
𝑭(𝜏) Distribution cumulative des temps de séjour réduits
ℎ Coefficient de transfert de masse apparent
𝐼(𝛼) Fonction de distribution des âges
𝑰(𝜏) Fonction de distribution des âges réduits
𝐽 Degré de ségrégation
𝑡𝑠 Temps de séjour d’une molécule dans une enceinte
𝑡𝑠̅ Moyenne des temps de séjour
𝛼 Age d’une molécule depuis son entrée dans une enceinte
𝜃 Temps de séjour moyen
𝜏 Temps réduit : 𝑡⁄𝜃
𝜏𝑖 Age réduit : 𝛼 ⁄𝜃
𝜏𝑠 Temps de séjour réduit : 𝑡𝑠 ⁄𝜃
𝜎2 Variance

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