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Problème : définition

Situation dans laquelle une personne


cherche à atteindre un but et doit trouver les
moyens pour y parvenir (Chi & Glaser,
1985). Ceci concerne tant les problèmes
intellectuels que des situations plus
quotidiennes et personnelles.
La résolution de problèmes

• L’approche gestaltiste

• Le traitement de l’information (lié au


cognitivisme computationnel)
L’approche gestaltiste
L’approche gestaltiste
La résolution de problème est une activité
perceptive : trouver la solution revient à voir les
choses sous un autre angle.

Il faut élaborer une « gestalt » : assembler les


parties en un tout cohérent, recombiner les
éléments d’un problème jusqu’à l’obtention d’une
configuration stable.

Comment est-ce possible ??


L’approche gestaltiste

Il faut d’abord reconnaître l’existence d’un


problème (i.e. une différence entre l’état actuel de
la situation et l’état désiré, appelé « but »).

Pour y parvenir, Wallas (1926) propose 4 étapes.


L’approche gestaltiste
Etape 1 : La préparation

Le sujet reconnaît l’existence du problème et


essaie d’en comprendre les données.
L’approche gestaltiste
Etape 2 : L’incubation

Après avoir reconnu l’existence du problème, le


sujet fait quelques tentatives vaines de résolution.
Après quelques échecs, il met le problème de côté
un certain temps et arrête de chercher la solution.
L’approche gestaltiste
Etape 3 : L’illumination

Le sujet se remet à chercher une solution au


problème. Le sujet a alors un « insight », une
illumination soudaine.
L’approche gestaltiste
Etape 4 : La vérification

Lors de la dernière étape, l’insight est confirmé, le


sujet vérifie la pertinence de sa réponse.
Quelques tentatives de validation
Pour l’effet d’incubation, la prédiction est qu’un sujet qui
met le problème de côté devrait trouver la solution plus
rapidement qu’un autre sujet continuant à chercher la
solution.
Expérience de Fulgosi et Guilford (1968)

Les sujets devaient imaginer les conséquences d’un


événement inhabituel (fermeture des pompes à essence).
Un groupe de sujets avait 10 minutes de pause au milieu
de la phase de résolution de problème, un autre 20
minutes.
Résultat : les sujets ayant eu un délai de 20 minutes ont pu
décrire plus d’événements
Quelques tentatives de validation
L’expérience de Silveira (1971)
« Ouvrir un maillon coûte 2 cents, en fermer un 3 cents.
Vous avez 15 cents. »

3 groupes avaient 2*15 minutes : G1 30 minutes d’affilée,


G2, ½ heure de pause, où les sujets faisaient autre chose,
G3, 4h de pause
Résultats : 55% des G1 ont trouvé la réponse, 64% pour
G2, 85% pour G3.
L’effet d’incubation
Comment expliquer l’effet d’incubation ?

Lors d’une tâche de résolution de problèmes, nous


activons une base de connaissances (procédurales et
déclaratives) appropriées ou non (Anderson, 1981).

La période d’incubation permettrait de désactiver les


connaissances inappropriées qui font obstacle.
Quelques tentatives de validation
de l’effet d’insight
• Il existe des processus cognitifs de résolution de
problèmes reproductifs (récupérés en mémoire)
et productifs (issus de la créativité).

• L’insight résulterait des processus productifs.


Pensée reproductive vs
productive (Katona, 1940)
Les sujets ont un problème à résoudre dans lequel ils
doivent déplacer des allumettes.

1) « groupe mémoire » : l’expérimentateur montre six fois


la solution.
2) « groupe créativité » : l’expérimentateur fournit des
indices de manière à permettre aux sujets de
comprendre le mécanisme et de résoudre eux-mêmes
le problème.
3) « groupe contrôle » : les sujets n’avaient aucun indice,
ni aucune aide.
L’expérience de Katona (1940)
Méthode : Les sujets ont été testés sur le même problème (A) et
sur un problème similaire (B) une semaine et trois semaines après
la phase d’apprentissage.

Résultats :
1. Le groupe contrôle obtient des résultats stables et bas.
2. Le groupe mémoire obtient de bons résultats quand c’est le
même problème, des résultats plus faibles lorsqu’il s’agit d’un
nouveau problème, particulièrement après 3 semaines.
3. Le groupe créativité obtient de bons résultats avec le même
problème ou un nouveau problème du même type, et
l’efficience se maintient dans le temps.
L’expérience de Katona (1940)

Conclusion

Pour Kaplan et Simon (1990), les aides ont permis de


développer une compréhension plus profonde de la
structure d’ensemble… base de l’insight, qui ne viendrait
pas de rien

=> Si on ne comprend pas l’ensemble, on reste dans un


schéma reproductif
Synthèse
• Perception du problème

• Reproduction

• Risque de fixation
• Insight

• Production
Critiques concernant
l’approche gestaltiste

• Mécanismes pas suffisamment validés, car


notamment trop vaguement décrits.

• Pas de preuves de la systématicité et de la


séquentialité des processus évoqués.
L’approche par traitement
de l’information
Le traitement de l’information
La résolution de problèmes
1) porte sur des problèmes qui
– ne nécessitent pas de connaissances spécifiques ;
– sont assez difficiles pour nécessiter un temps de
résolution et une certaine réflexion ;
– Peuvent être formalisés (de manière informatique ou
mathématique), ce qui permettra de comparer les
performances entre ordinateur et sujet.
2) est vue comme un long cheminement vers une
solution
1. La formalisation des
problèmes
Problèmes bien définis : les situations initiale et finale sont
clairement énoncées.
(ex : monopoly, jeux de cartes, faire démarrer une
voiture en panne,…)

Problèmes mal définis : l’état final du problème n’est que


partiellement précisé ; les critères de réussite sont flous.
(ex : réussir sa vie professionnelle ou amoureuse,
dépenser moins, écrire un beau texte, jouer une partie
d’échecs,…)
(Reitman, 1964)
Un exemple de recherche sur un
problème mal défini (Voss et al., 1983)

Le sujet devait s’imaginer être ministre de


l’agriculture en URSS et augmenter la productivité

3 groupes :
- des experts en sciences politiques spécialistes
de l’URSS
- des étudiants en sciences politiques
- des professeurs de chimie
Un exemple de recherche sur un
problème mal défini (Voss et al., 1983)
Résultats :
Tous les sujets avancent que le meilleur moyen est
d’éliminer les causes du problème. Ceci met en œuvre
deux types de connaissances :
- générales (domaine-indépendant ; comment éliminer la
cause du problème)
- spécifiques au problème (domaine-dépendant ; plus mis
en œuvre par les spécialistes)

De manière générale, les sujets chercheraient à transformer


un problème mal défini en problème défini
1. La formalisation des
problèmes
• Problèmes à état fini : il existe un nombre limité
d’étapes entre la situation initiale et la situation
finale

• Problèmes à état non fini : il existe a priori un


nombre illimité d’étapes entre l’état initial et l’état
final
2. La résolution de
problèmes
1. Problème d’induction de structure
2. Problème d’arrangement
3. Problème de transformation
(Greeno, 1978)
Problèmes d’induction de
structure
Problèmes d’induction de
structure
Définition : problèmes qui pour être résolus
supposent que le sujet identifie la structure des
relations communes entre différentes sources
d’information (problème analogique)

Exemples : « le chien est au loup ce que le chat


est au … » ; le Master Mind
Modèle sériel d’induction de
structure (Pellegrino, 1985)
1) Encodage des attributs : on extrait les attributs
des items à traiter (activation de la mémoire
sémantique verbale ou visuelle)

2) Comparaison des attributs

3) Sélection-évaluation de la réponse : on
détermine quel est le meilleur candidat à la
réponse
Modèle sériel d’induction de
structure (Pellegrino, 1985)
La résolution de problème est influencée par le
nombre et la complexité des attributs à extraire et
comparer

(Mulholland et al., 1980)


Problèmes d’arrangement
Les problèmes d’arrangement
Les éléments du problème sont arrangés d'une
certaine façon, et on doit réarranger ces éléments
suivant un critère donné.
Ex : les anagrammes (ex : oitcginno)

L’une des habiletés cognitives utilisées pour ce


type de problèmes est la recherche constructive
(développement systématique d’une manière
d’examiner les différentes combinaisons des
éléments à arranger jusqu’à ce que soit trouvée
une solution ; approche algorithmique)
Problèmes de
transformation
Les problèmes de transformation
Définition : le processus de résolution peut être vu
comme un cheminement dans un espace d'états.
Pour résoudre le problème posé, il est nécessaire
de transformer l'état en cours grâce à des
opérateurs (de déplacement, par exemple) qui
génèrent de nouveaux états.
Modèle de Polya

1. Comprendre le problème
2. Etablir un plan
3. Appliquer le plan
4. Examiner la solution
1. Comprendre le problème

- inconnue
- données
- condition(s)
2. Etablir un plan

- déjà vu
- problème auxiliaire
- problème semblable
- Reformulation du problème
- utilisation de toutes les données
3. Appliquer le plan

- vérifier chaque étape


- démontrer chaque étape
4. Examiner la solution

- vérifier le résultat
- vérifier la démonstration

Formalisation très proche


de la théorie GPS !
Algorithmes et heuristiques
Algorithme
Méthode ou procédure qui va à coup sûr
résoudre un problème si elle est appliquée.

Heuristique
Ensemble de règles qui ne garantissent pas
une solution du problème, mais qui
généralement font gagner du temps et des
efforts.
Exemples d’algorithmes

• Règles de la multiplication écrite

• Mettre la main sur un mur pour parcourir un


labyrinthe
• Règles pour préparer une recette de cuisine
Exemples d’heuristiques

• Astuces pour jouer à "des chiffres et des lettres"


• Techniques employées par les joueurs pour le
jeu d'échec
L'espace de la tâche
et
l’espace problème

La théorie
General Problem Solver (GPS)
de Newell et Simon
Théorie de l’espace de la tâche
Newell et Simon, 1972
Chaque problème est défini par un espace de la
tâche :
1. Pour tout problème il y a un grand nombre
de chemins reliant
- l’état initial
et
- l’état but.
2. Chaque chemin passe par différents
états intermédiaires
Théorie de l’espace de la tâche

3. Le passage d’un état à l’autre dépend des


opérateurs légaux
Les opérateurs légaux codent les
mouvements légaux et les restrictions
prévues sous certaines conditions.

L’ensemble constitue l’espace de la tâche.


La tour de Hanoï

A B C

But :
déplacer la tour de A en C
Règles :
1- ne déplacer qu’un seul disque à la fois ;
2- ne jamais mettre un disque sur un autre plus petit que lui
La théorie GPS
• Représentation du problème
1 • Construction de l’espace problème

• Recherche et sélection d’un opérateur


2

• Application de l’opérateur sélectionné


3

• Evaluation de l’état du problème et retour éventuel aux


4 étapes 1 ou 2
L’espace problème

Tout sujet utilise

- ses connaissances
- diverses méthodes heuristiques

pour chercher un bon chemin à travers


l’espace de la tâche en construisant son
espace - problème.
Construction de l’espace
problème
C'est l'interprétation par le sujet de l'espace de la tâche

propre au sujet
évolution dans le temps
La résolution de problèmes
• Le comportement de résolution de problèmes
est la production d’états de connaissances par
des opérateurs mentaux

- depuis un état initial


- jusqu’à un état but

• A l'aide d'algorithmes et/ou d'heuristiques,


l’objectif étant de se rapprocher de l’état but
Limites des capacités humaines
Tous ces processus se produisent dans les
limites d’un système cognitif

- limites de la mémoire du travail


- vitesse d’enregistrement des informations
- vitesse de récupération depuis la mémoire à
long terme.
La théorie GPS
Avantages
• description détaillée des états de connaissance
et des processus impliqués
• prédictions sur les difficultés
- taille de l’espace de recherche
- interaction avec les méthodes de recherche
Méthodes heuristiques
(Newell et Simon)

Analyse des moyens et des fins


1. Observer la différence entre l’état actuel et l’état but.
2. Créer un sous-but pour réduire cette
différence.

3. Choisir un opérateur qui amène à ce


sous-but.
Méthodes heuristiques
(Newell et Simon)

Réduction de la charge cognitive

Eviter les états de jeu offrant beaucoup de


possibilités parce qu'ils apportent une surcharge
cognitive.
Méthodes heuristiques
(Newell et Simon)

Stratégie anti-looping

Eviter (d’avoir l’impression de) d’aller (de revenir)


en arrière même si c'est indispensable.
Méthodes heuristiques
(Newell et Simon)

La recherche en arrière

Commencer par identifier l’état but et chercher à


rejoindre l’état initial.
Peut-on améliorer ses
compétences en résolution
de problèmes ?
Développer ses compétences
de résolution de problèmes
Objectifs
- alléger la tâche cognitive
- structurer le problème en sous-buts

Comment atteindre ces objectifs ?

• par apprentissage
• par expérience antérieure sur problème similaire
(analogie)
Par apprentissage
Expérience de Anzai et Simon, 1979

- objet : tour de 5 disques

- 4 essais par sujet

- analyse des stratégies successives


Les sujets deviennent plus efficients avec le temps

Au début :
• peu de recherche de sous-buts
• stratégies domaine-indépendantes (e.g. anti-
looping)

A la fin :
• élaboration d'heuristiques domaine-dépendantes
(travail sur des « sous-pyramides »)
L’analogie
Par analogie

Expérience de Egan et Greeno, 1974

- objet : tours de 5 et 6 disques

- groupe expérimental : avant 3 et 4 disques

- groupe contrôle : au préalable, rien


Egan et Greeno, 1974

- résultats du GE > GC

• Meilleure structure de but


• Moins de déviations du profil idéal près d’un
but/sous-but important

• Plus de difficultés loin d’un but/sous-but


important
Mais…

1. Tour de Hanoï classique


2. Cérémonie du thé (Kotovsky, Hayes et Simon, 1976)
La cérémonie du thé
Dans les auberges de villages himalayens est pratiquée une cérémonie du thé
particulièrement raffinée. Cette cérémonie implique un hôte et exactement
deux invités (un jeune, un âgé), jamais plus ni moins. Une fois ses invités
arrivés et installés à sa table, l’hôte leur rend cinq services. Ces services sont
classés dans l’ordre de noblesse que les Himalayens leurs attribuent :
(1) entretenir le feu (moins noble),
(2) attiser les flammes,
(3) passer les gâteaux de riz,
(4) verser le thé,
(5) réciter de la poésie (plus noble).
Au cours de la cérémonie, n’importe lequel des membres présents peut
demander à un convive «Honorable personne, pourrais-je remplir pour vous
cette tâche ardue ?».
Toutefois, un convive ne peut demander à un autre convive que la tâche la
moins noble de celles que celui-ci remplit. De plus, si un convive remplit déjà
une tâche, il ne peut alors pas demander une tâche plus noble que la plus
noble des tâches qu’il remplit déjà. La coutume nécessite qu’à la fin de la
cérémonie du thé, toutes les tâches aient été transférées de l’hôte vers le plus
âgé des invités. Comment cela peut-il être accompli ?
Cérémonie du thé (Kotovsky, Hayes et Simon, 1976) avec :
• 3 personnes (les trois piquets)
• 5 rituels (les cinq disques) avec ordre d’importance
• Un état initial et final identique (d’abord les cinq tâches
sont faites par l’hôte, ensuite par un invité)
• Les contraintes respectées :
• Un participant ne peut se voir enlever que la tâche la
moins noble (le plus petit disque)
• Il ne peut pas recevoir une tâche plus noble que celles
qu’il accomplit déjà (pas de grand disque sur un petit)
Résultats

• Cérémonie du thé significativement plus


difficile
• Pas de transferts
1. Tour de Hanoï classique
2. Cérémonie du thé (Kotovsky, Hayes et Simon,
1976)
3. Les monstres et les globes (Hayes et Simon,
1974)
Expérience de Kotovsky, Hayes et
Simon, 1985
3. Monstres et globes :
3 monstres de tailles différentes (petit, moyen et
grand) tiennent chacun un globe (petit, moyen et
grand).

Le petit monstre tient le grand globe, le monstre


moyen tient le petit globe et le grand monstre
tient le globe de taille moyenne.

Le but est de faire en sorte que chacun tienne


un globe de sa taille.
Règles de politesse

1. On ne peut transférer qu’un seul globe à la fois

2. Si un monstre tient deux globes, il ne peut


transférer que le plus grand
3. Un globe ne peut pas être transféré à un monstre
qui tient un globe plus grand
Règles de politesse
Version alternative :
les monstres doivent changer la forme des globes.

1. On ne peut changer qu’un seul globe à la fois

2. Si deux globes ont la même taille, seul le globe


tenu par le monstre le plus grand peut être
changé

3. Un globe ne peut être porté à la même taille


qu’un globe tenu par un monstre plus grand
Résultats
Temps moyen requis pour la solution en minutes :

Tour de Hanoi 3 disques : 1,83


Monstres variante 1 : 13,95
Monstres variante 2 : 29,39
Conclusion

L’heuristique consistant à traiter les


problèmes par analogie ne fonctionne que
lorsque les indices de surface ne sont pas
trop dissemblables

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