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THÉORIE DU RÉCIT DE

FICTION AU CINÉMA
FRONTIÈRES DU RÉCIT
ET PROBLÉMATIQUES NARRATOLOGIQUES
L3 CM Mardi 10h30-12h30 (Amphi Papy)
Pierre.Beylot@u-bordeaux-montaigne.fr
Qu’est-ce que la narratologie ?
• C’est littéralement un « discours sur le récit » que l’on peut envisager à la fois
comme une entreprise de conceptualisation – une théorie du récit – et une
pratique d’analyse des récits (on retrouve ces deux dimensions dans l’intitulé et le
contenu de ce CM et du TD correspondant).
• On peut aussi l’envisager comme « discours du récit » pour reprendre la formule
de l’un des fondateurs de la discipline, le théoricien de la littérature Gérard
Genette, qui part de l’étude d’une œuvre particulière – À la recherche du temps
perdu de Proust – pour redéfinir les grandes notions narratologiques (ordre,
durée, fréquence du récit, narrateur, point de vue) en montrant comment cette
œuvre reconfigure et interroge ces notions (Figures III, 1972).
• De la même façon, on pourrait se demander comment certains films ou séries
nous permettent de penser autrement le récit et ses catégories : ainsi, ce n’est
pas la même manière d’agencer le récit, de construire (ou déconstruire) le
personnage ou le rapport à l’espace et à la temporalité chez Hitchcock, Visconti
ou Christopher Nolan, ou dans Lost ou Breaking Bad.
Narratologie modale vs narratologie
thématique : une opposition à dépasser ?
On oppose traditionnellement deux approches narratologiques (André
Gaudreault et François Jost, Le Récit cinématographique, 1990, p. 12) :
• Une narratologie « modale » ou narratologie des formes d’expression qui porte
sur la manière spécifique dont le récit cinématographique (ou audiovisuel)
traite les questions du point de vue, de l’espace, du temps, du personnage, etc.
par rapport aux autres formes de récit (oral, littéraire, théâtral, graphique…).
C’est la voie privilégiée par la sémiologie structuraliste dans la lignée des
travaux de Roland Barthes et de Christian Metz au milieu des années 1960 et
plus tard de Gaudreault, Jost ou André Gardies (Le Récit filmique, 1993).
• Une narratologie « thématique » qui porte sur « l’histoire racontée », les
invariants narratifs, thèmes récurrents, réseaux de relations entre personnages,
schémas actantiels dans la lignée des travaux de V. Propp (1928) ou de Greimas
(1966) dont s’inspirent beaucoup de manuels de scénarios contemporains.
Définition, frontières et métamorphoses du récit
• Qu’est-ce qu’un récit ? Cette question a souvent été abordée au travers de l’analyse
des traits sémiotiques du récit comme le fait Christian Metz dans « Remarques pour
une phénoménologie du Narratif » (1966). On y reviendra dans la 2ème séance.
• Quelles sont les frontières du récit ? Plutôt que de tenter de saisir une « essence »
du récit, on pourrait le définir par opposition à d’autres modes discursifs dont il se
différencie, mais avec lesquels il peut parfois se combiner. On pourrait ainsi opposer
le récit à la description ou le récit au spectacle, mais aussi parler d’un récit-
description ou d’un récit-spectacle, ou encore d’un récit-méditation, d’un récit-
démonstration ou d’un récit-fable (trois séances seront consacrées à ces questions).
• Quelles sont les problématiques narratologiques ? Qui raconte ? Auteur/narrateur.
Qui voit ? Personnage/caméra ; focalisation/énonciation. Dans quelle temporalité ?
Linéaire, rétro- ou prospective, déconstruite.
• Des frontières aux métamorphoses du récit : on verra dans la suite du cours et des
TD d’autres combinaisons narratives : récit à twist, récit menteur, récit-performance,
etc.
Un exemple de « récit-méditation » : Mort à Venise, Luchino
Visconti, 1971
Séquence à télécharger sur Filesender

Approche « modale » : récit filmique/


littéraire/musical/plastique ; point de vue
surplombant ou subjectif

Approche thématique : motif du voyage, de


la traversée : un départ ou une arrivée ?
Programme du cours : Frontières du récit et problématiques narratologiques.
Mardi 10h30-12h30. Amphi Papy
• Problématique. Enjeux narratologiques. Mort à Venise, Visconti, 1971. Comment le récit nous dit-il qu’il est un récit ? Fenêtre sur cour, A.
Hitchcock, 1954 ; Le Loup de Wall Street, M. Scorsese, 2013 ; Caché, Michael Haneke, 2005. Mardi 16 janvier.
• Qu’est-ce qu’un récit ? 2001, S. Kubrick, 1968. Mardi 23 janvier.
• Spectacle dans le récit et récit-spectacle. Manhattan, W. Allen, 1979 ; Huit femmes, F. Ozon, 2002 ; Lord of War, A. Niccol, 2005 ; La
Vengeance dans la peau, Paul Greengrass, 2007. Mardi 30 janvier.
• Le récit et ses marges : récit-description, récit-méditation. Le Vent nous emportera, A. Kiarostami, 1999 ; Paterson, Jim Jarmush, 2016.
Mardi 6 février.
• Du Récit-démonstration au récit-fable. Mon oncle d’Amérique, A. Resnais, 1980 ; The Tree of Life, Terrence Malick, 2011. Mardi 13 février.
• Qui raconte le film ? (I) : Apparitions, disparitions et travestissements de l’auteur. La Splendeur des Amberson, O. Welles, 1942 ; Le
Roman d’un tricheur, S. Guitry, 1936 ; Les Glaneurs et la glaneuse, A. Varda. 2000. Mardi 20 février.
• Qui raconte le film ? (II) : Le narrateur, guide, compagnon, fantôme. Barry Lyndon, S. Kubrick, 1975 ; Ève, Mankiewicz, 1950. Mardi 5
mars.
• Qui raconte le film ? (III) : Voix in, off, over, en aparté. Psychose, A. Hitchcock, 1960 ; Voyage en Italie, R. Rossellini, 1954 ; Chaînes
conjugales, Mankiewicz, 1949; Trois souvenirs de ma jeunesse, A. Desplechin, 2015. Mardi 12 mars.
• Qui raconte/ qui voit ? (I) : Point de vue et focalisation. Les Enchaînés, A. Hitchcock, 1946 ; Jeune et innocent, A. Hitchcock, 1937 ; Dark
Passage, Delmer Daves, 1947. Mardi 19 mars.
• Qui raconte/ qui voit ? (II) : Point de vue et énonciation. Vertigo, A. Hitchcock, 1958 ; Shining, S. Kubrick, 1979 ; Husbands and Wives, W.
Allen, 1992 ; Blow Out, B. De Palma, 1980. Mardi 26 mars.
• Récit et explorations du temps. L’Étrange Histoire de Benjamin Button, David Fincher, 2008 ; L’Anglais, Steven Soderbergh, 1999. Mardi 2
avril.
• Devoir en 3h (analyse de citation). Mardi 9 avril, 9h30-12h30.

• Bibliographie : Pierre Beylot, Le Récit audiovisuel, Armand Colin, 2005 [cet ouvrage comporte une bibliographie très détaillée].
TD Analyse narratologique : Métamorphoses contemporaines du récit.
Jeudi 8h30-10h30 (J 008) et 10h30-12h30 (I 407).

• Le récit-gigogne. Chateauvert. Casetti. The Grand Budapest Hotel, Wes Anderson, 2014 et La Famille
Tenenbaum, W. Anderson, 2001. Autres exemples d’enchâssement : Trois souvenirs de ma jeunesse,
Desplechin, 2015 et Les Voyages de Sullivan, Preston Sturges, 1941. Jeudi 8 février.
• Le récit-menteur. Ledoux. Body Double, De Palma, 1984 ; Gone Girl, David Fincher, 2014. Jeudi 15 février.
• Le récit à twist. Prévision rétroactive renversée. Les Autres, Alejandro Amenábar, 2001 ; Premier contact
(Arrival), Denis Villeneuve, 2016. Jeudi 22 février.
• Récit et univers mentaux. Boillat. Inception, Christopher Nolan, 2010 ; Eternal Sunshine of a Spotless
Mind, Michel Gondry, 2004. Jeudi 7 mars.
• Le récit-performance. Snake Eyes, Brian De Palma, 1998 ; Birdman, Alejandro G. Iñárritu, 2014. Jeudi 14
mars.
• Exposés 1. Jeudi 21 mars. Marges du récit (spectacle, contemplation, fable)
• Exposés 2. Jeudi 28 mars. Récits enchâssés
• Exposés 3. Jeudi 4 avril. Récits menteurs
• Exposés 4. Jeudi 11 avril. Récits à twist

• 4 séances d’exposés = 12 exposés de 40 mn avec 2 ou 3 étudiants dans chaque TD = 24 exposés x 2 =


48 ou x 3 = 72 (64 étudiants inscrits)
Comment le récit nous dit-il qu’il est un
récit ? Transparence vs réflexivité
• On pourrait aussi définir le récit au travers de sa capacité à nous dire qu’il est un récit ou
au contraire à masquer sa nature artefactuelle et à se donner comme reflet du réel.
• Tout récit filmique met-il en scène sa propre narration ? Ou une figure de narrateur
(diégétique ou non) qui l’énonce ? Ou une figure d’auteur, responsable des images et des
sons ? Ou un point de vue de personnage, observant le monde filmé ?
• Le cinéma – y compris contemporain – fait-il prévaloir la transparence, l’effacement des
marques renvoyant à l’élaboration de la narration ou à la construction du regard (et de
l’écoute), conformément aux conventions instaurées par le cinéma classique ?
• Ou met-il au contraire en exergue le processus de narration et d’élaboration du point de
vue ? Que produit cette réflexivité en termes d’effet de sens ?
• En quoi ces nouvelles manières de raconter (si elles sont vraiment nouvelles) produisent-
elles une nouvelle conception du récit ? L’objet de ce cours et du TD sera d’étudier
quelques-unes de ces métamorphoses du récit, dans le cinéma contemporain comme
dans celui de périodes plus anciennes.
Un récit qui met en abyme le dispositif
filmique : Fenêtre sur cour, Hitchcock,
1954
Ou un récit transparent qui laisse place au
spectacle du quotidien ?
Séquences d’ouverture et de clôture à
télécharger sur Filesender
Le Loup de Wall Street, Scorsese, 2013 : exhibition post-
moderne du récit en tant que récit
Séquence à télécharger sur Filesender
Un narrateur-personnage qui peut
changer des éléments du décor
(couleur de la Ferrari) comme s’il
détenait les mêmes pouvoirs que le
cinéaste

Un narrateur-personnage qui
semble être capable de
déclencher un flash-back
(renouvellement de la
convention du récit rétrospectif
au cinéma)
Des personnages fictionnels qui
regardent la caméra

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