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dossier

DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

Du transport
à la logistique
Itinéraire
compliqué

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

«Le flux de marchandises toujours plus important, les


coûts liés au transport de celles-ci toujours plus élevés,
les infrastructures pas toujours ad hoc à une éventuelle
reconversion, la concurrence au travers de l’élargisse-
ment toujours plus forte...
Quel est le climat dans lequel travaillent les transpor-
teurs routiers ?
Quelles sont les possibilités de développement de ce sec-
teur ?
Coup de projecteur sur un métier en pleine mutation…»

Dossier publié par la Chambre de commerce


et d'industrie du Luxembourg belge
Grand rue, 1 6800 Libramont
Tél. 32-61 29 30 40 fax 32-61 29 30 69
info@ccilb.be
Président : Eric Charlier
Administrateur-délégué : Fabrice Coulon Nous remercions pour leur collaboration:
Editeur responsable : Fabrice Coulon
• Jean-Marie Becker, Cluster Transport & Logistique Wallonie-Belgium
Rédaction • Gabriel Catania, Logistilux
Rédacteur en chef : Christophe Hay • Dominique et Eric Charlier, Transport N.Charlier
Rédaction : Anne Georges
Corrections : Stéphanie Wanlin et Agnès Dion
• Georges Cottin, Idelux
• Luc De Bruycker, Continental Cargo Carriers
Production • Véronique Hustin, Transport & Logistics Jost Group
Conception graphique & Mise en page : • Jacky In Den Bosch, Jigam
Logotype SA, Sprimont
Impression : • Thierry Jean, Esidec,
Imprimerie Schmitz & Gofflot SA, Bastogne • Jacques Löfgen, A.T.U. Transport
Diffusion & Promotion : Bernadette Thény • Michel Nadin, T.S.Lux
Distribution :
Entreprise de routage Barbier, Gembloux
• Nicole Nadin et Francis Van Nuffel, Ets Nadin
• Théo Weiler, Transports internationaux J.-P. Lorang
Ce cahier est réalisé avec le soutien financier de la
Région wallonne et de la Commission européenne.

Avec le soutien du Fonds européen de Développement régional et de la Région wallonne

2 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
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n relayant l’inquiétude qui plane sur le ment mué en un acteur des plus importants de

E secteur du transport wallon, principa-


lement d’actualité en province de
Luxembourg d’ailleurs, la Chambre de
commerce se propose de s’interroger
sur les réelles perspectives d’avenir d’une filière
particulièrement vulnérable de notre paysage
économique. N’est-il pas déjà trop tard? Est-ce
l’économie entraînant des métiers connexes
dans son sillage. Notre pays fait ici figure de ré-
férence et est, en raison de sa position géogra-
phique, une des régions les plus dynamiques sur
le continent européen.

Cependant, de nombreuses contraintes et moult


vraiment si préoccupant? Les questions fusent difficultés s’opposent au déploiement serein du
au moment d’aborder un sujet aussi difficile. Par secteur du transport routier et de la logistique
ailleurs, l’ensemble de la sphère économique est dans notre pays. Fiscalité et salaires freinent
aussi touché par le spectre de la délocalisation. toute envie… Résultat: nombre de développe-
Mais, dans le cas présent, à défaut de voir nos ments dans ce secteur se font, aujourd’hui, hors
élus brosser des pistes de salut à la fois claires, de notre pays. Conséquemment, les investisse-
précises et en adéquation avec les attentes des ments aussi se concrétisent en dehors de notre
principaux concernés, il est clair que notre décor territoire.
routier risque de prendre un mauvais virage...
En d’autres termes, l’avenir du transport n’est
Déjà, l’attribut minéralogique de plus en plus donc plus ici! Beaucoup de patrons interrogés
coloré des véhicules qui transitent sur notre ter- sur le sujet pensent clairement qu’il n’est même
ritoire laisse transparaître certains change- pas utile de s’y arrêter. Pour eux, c’est déjà trop
ments inévitables. Il témoigne en tout cas de tard, les dés ont été jetés par d’autres. Partis, en
choix jugés irréversibles. Délibérés pour certains, partance, peut-être encore en plein questionne-
nécessaires pour d’autres, ceux-ci noircissent le ment sur leur lendemain, ils parent au plus pres-
tableau social du transport wallon puisqu’ils sé et ne s’embarrassent guère d’un hypothétique
mettent en évidence l’itinéraire des entreprises sursaut politique. Tout juste, estiment-ils, qu’il
qui ont succombé - et qui leur en voudrait? - aux serait plus valorisant pour notre région de tenter
sirènes luxembourgeoises, côté grand-ducal! de participer à l’aventure logistique. Toutefois,
Mais que nos voisins du sud ne se réjouissent ils sont aussi convaincus que cela n’influera
pas trop vite… Car de l’aveu même des pre- plus sur leur destin. Malgré tout, d’autres s’ac-
miers concernés, il ne s’agit là que d’un premier crochent à la «bouée» logistique comme à une
arrêt pour un convoi désormais appelé à une fui- roue de secours. Mais ils ne sont pas seuls, nos
te en avant, vers l’est, là où les attraits en tous voisins y pensent aussi. Toujours est-il que la
genres se font toujours plus forts. saturation des réseaux routiers européens aux
abords des grandes cités, les caprices de la
Et pourtant, au niveau de l’Union européenne, le consommation moderne et les habitudes com-
secteur du transport a considérablement crû de- merciales nées avec l’abondance plaident en fa-
puis une vingtaine d’années. En effet, les veur du développement de pôles voués à ce mé-
chiffres le prouvent: le transport de marchan- tier nouveau. Mais sera-ce là une voie de salut
dises a quasi doublé en deux décennies. C’est à pour le transport lui-même, il est permis d’en
peine croyable, mais cela représente un taux de douter...
croissance supérieur à celui de la croissance
économique! Dans le même temps, les métiers Car tout cela nous éloigne de notre probléma-
qui en découlent - dont la logistique - ont eux tique de départ, le constat inquiétant fait par les
aussi suivi une tendance identique. Petit à petit, tenants du transport routier demeure, il s’accen-
ils ont alors évolué, jusqu’à être externalisés. tue même avec le temps. Aujourd’hui, il doit être
rappelé avec force à nos responsables politiques
À l’échelle de notre pays, petit mais idéalement que la majorité des entreprises du secteur quit-
situé aux croisements des grands axes de la te progressivement notre pays pour envisager
consommation, le transport routier s’est égale- l’avenir sous des conditions plus favorables.

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I. Contexte général du transport routier

L
e secteur du transport est un indicateur des tendances éco- Cependant, là n’est pas la seule mutation économique enregis-
nomiques générales. Depuis les années 70, ce secteur trée au cours des dernières années… Un autre facteur entre aus-
connaît une croissance régulière*. si en ligne : l’augmentation de la sous-traitance étrangère. Souvent,
Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette évolution globale: aujourd’hui, les marchandises circulent de gauche et de droite,
- la modification des structures de production industrielle transportées au gré de décisions éminemment stratégiques là où
(abandon des sites urbains et tendance à la dispersion géogra- la main d’œuvre est moins chère!
phique, voire à la délocalisation); Ex : les crevettes pêchées en mer du Nord sont acheminées en
- la modification des méthodes de production (réduction ou mê- Afrique du nord… pour y être décortiquées. Ensuite, elles re-
me suppression des stocks) au profit du «just in time» devenu prennent le chemin inverse pour être redistribuées aux consom-
règle générale; mateurs belges. Certes, cela paraît incroyable aux yeux du qui-
- la part croissante du secteur des services et la dispersion dam peu familiarisé avec les règles de la stratégie économique
croissante des sites d’activités (mobilité professionnelle)**. mondialiste, mais les lois de la concurrence imposent de sous-
Au cours du dernier quart de siècle, en effet, le tissu industriel a traiter les travaux à faible valeur ajoutée pour éviter l’asphyxie.
opéré un changement fondamental. Auparavant, les industries
lourdes transportaient leurs marchandises, tels que le charbon ou
le minerai, par les voies navigables. Aujourd’hui, l’industrie revêt
une valeur ajoutée plus importante. Les entreprises, souvent de
petite taille, fabriquent davantage de produits différents. Ces der- * Eurostat, «Panorama des transports - Aperçu statistique des transports dans l’Union européen-
ne», Commission européenne, Bruxelles, Ed. 2003.
niers sont moins faciles à transporter par train ou par péniche car ** http://www.mrw.wallonie.be/dgrne/pedd/, PEDD- Les transports et les infrastructures «Cahier 9:
les endroits vers lesquels ils sont acheminés sont éparpillés. Les transports, les infrastructures et l’environnement».

II. Analyse structurelle du secteur du transport routier


Dans les pays de l’Union européenne riode de référence de quatre mois et la durée maximale à 60
heures par semaine sera applicable, à partir de mars 2005, aux
À titre d’information, dans l’Union européenne des quinze, les re-
travailleurs employés dans une entreprise de transport et, en
tombées du secteur des transports sont substantielles: ce sec-
mars 2009, aux conducteurs indépendants.
teur représente environ 4% du produit national brut de l’Union. A
3. Définition d’un cadre commun pour la tarification des
lui seul, il emploie approximativement 6,3 millions de personnes,
infrastructures routières. Le Livre blanc sur la politique euro-
soit environ 4,1% de l’ensemble des salariés de l’UE. Par ailleurs,
péenne des transports a mis en évidence que l’une des princi-
signalons aussi que deux autres millions de personnes sont oc-
pales causes des déséquilibres du système des transports réside
cupées dans l’industrie des équipements de transport et plus de
dans le fait que les modes de transport ne paient pas toujours ni
six millions dans les industries liées au transport*.
partout les coûts qu’ils engendrent.
La politique communautaire poursuit trois objectifs en matière
En Belgique **
de transport routier :
1. Libéralisation du marché À l’instar de ce qui est la règle chez nos voisins, la Belgique
Mise en place d’un document unique: licence communautaire de connaît elle aussi une évolution considérable dans le secteur du
transport; permission d’opérations de cabotage routier, sans au- transport routier. Les chiffres publiés par l’Institut National des
cune restriction à partir du 01.05.2009. statistiques à ce sujet sont éloquents.
2. Harmonisation des règlementations
Les règles en matière d’accès à la profession de transporteur par Les principaux modes de transport de marchandises
route portent sur l’honorabilité, la capacité financière et la capa- Dans le tableau 1, lequel chiffre la quantité de marchandises
cité professionnelle du transporteur. transportées sur le réseau routier de l’ensemble du territoire au
Tous les cinq ans, les Etats membres doivent vérifier si les trois
conditions sont remplies. * Eurostat, «Panorama des transports - Aperçu statistique des transports dans l’Union européen-
ne», Commission européenne, Bruxelles, Ed. 2003.
Récemment adoptée, la directive sur le temps de travail fixant la ** Selon les chiffres de l’UPTR, 8995 entreprises de transport routier sont établies en Belgique dont
durée hebdomadaire moyenne du travail à 48 heures sur une pé- 2467 en Wallonie.

4 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
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cours des cinq dernières années, remarquons d’entrée de jeu que portant de percevoir une nouvelle réalité désormais afférente au
les volumes ont proprement explosé, augmentant de 68.409.000 transport routier: les camions roulent moins souvent à vide,
tonnes, c’est-à-dire une croissance de 15 %. Une augmentation donc les trajets sont davantage rentabilisés… Puis au verso,
d’ailleurs proportionnelle à celle enregistrée pour l’ensemble des rayon des non-dits, nous constaterons aussi que les quantités de
réseaux de transports. Mais entre les lignes, il paraît encore im- marchandises transportées par chemin de fer diminuent.

Mode de transport 1997 1998 1999 2000 2001 2002


Quantités transportées (en 1.000 tonnes) 614.807 601.849 646.736 682.843 661.483 709.702
Navigation intérieure 106.978 106.977 110.309 120.944 128.561 135.115
Chemin de fer 58.849 60.696 59.149 61.279 57.050 57.198
Transport routier (a) 448.980 434.176 477.278 500.620 475.872 517.389
- trafic intérieur (b) 323.583 287.390 329.934 323.210 298.134 313.874
- entrées 47.065 56.605 54.703 68.256 67.123 64.665
- sorties 60.485 66.768 67.685 84.319 85.910 114.624
- transit sans transbordement 17.847 23.413 24.956 24.835 24.706 24.226

Tonnes-kilomètres prestées (en millions tkm) 47.492 49.187 52.042 57.033 58.286 62.496
Navigation intérieure 5.931 6.113 6.455 7.313 7.732 8.150
Chemin de fer 7.465 7.600 7.392 7.674 7.080 7.298
Transport routier (a) 34.096 35.474 38.195 42.046 43.474 47.048
- trafic intérieur (b) 19.156 17.487 20.554 21.103 22.193 22.898
- entrées 5.041 6.227 5.875 7.487 7.397 7.178
- sorties 6.330 7.077 6.775 8.491 8.943 12.127
- transit sans transbordement 3.569 4.683 4.991 4.965 4.941 4.845

Transport belge et étranger par route avec des véhicules immatriculés en Belgique et dans l'Union européenne, par eau et par rail sur le territoire belge.
(a) Transport effectué à l'aide de véhicules d'au moins 1 tonne. Les données sont dérivées de l'enquête belge sur le transport routier.
(b) Y compris le trafic intérieur avec des véhicules étrangers qui est assimilé forfaitairement au total du trafic à l'intérieur de chaque état membre de l'U.E. avec des véhicules belges.
Source : INS, SNCB, Ministère de la Région wallonne, Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap et Port de Bruxelles.

Le transport routier de marchandises par des véhicules portées par des véhicules immatriculés en Belgique. Celui-ci a
immatriculés en Belgique également, sensiblement augmenté en 1999 et 2000 pour
Le tableau ci-dessous précise le poids de marchandises trans- connaître une légère régression par la suite.

Unité 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002


Poids transporté 1.000 t 367.603 395.505 351.526 402.799 411.623 386.380 397.289
Tonnes-km mln tkm 42.756 45.879 42.224 46.878 51.023 53.158 53.538

Il s'agit du transport de marchandises par route (sur territoire belge et étranger), effectué par des véhicules immatriculés en Belgique ayant une charge utile d'une tonne au moins.
Source : INS, enquête statistique relative au transport routier.


Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75 5
dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

••• L’immatriculation de véhicules et le parc de véhicules En 7 ans, le parc de véhicules neufs ou d’occasion pour le trans-
Le tableau suivant nous renseigne sur le nombre de véhicules im- port de marchandises (véhicules utilitaires et tracteurs) est pas-
matriculés en Belgique durant les années 1996 à 2003, en préci- sé de 109 342 à 145 481 unités, en d’autres termes une augmen-
sant les chiffres pour les véhicules servant au transport routier. tation de 33 %.

1996 1999 2000 2001 2002 2003


Immatriculation de véhicules neufs 471.531 604.823 626.344 594.927 556.854 550.666
Véhicules utilitaires pour le transport de marchandises (a)
39.811 63.429 60.261 64.360 53.322 56.125
Tracteurs (b)
4.140 5.795 5.521 5.758 4.649 4.818
Immatriculation de véhicules d'occasion(b) 731.397 778.870 783.010 774.571 776.377 759.466
Véhicules utilitaires pour le transport de marchandises (a)
61.378 68.633 73.181 75.229 76.953 80.212
Tracteurs (b)
4.013 4.298 5.232 4.883 4.359 4.326
Parc de véhicules au 1 août 5.230.589 5.596.309 5.735.034 5.836.594 5.913.747 5.980.429
Véhicules utilitaires pour le transport de marchandises 416.716 (a)
480.033 502.979 526.334 540.637 556.397
Tracteurs (b)
40.444 44.055 45.452 46.302 46.789 47.102
(a) Camions, camionnettes, tous terrains, camions-citernes.
(b) Les tracteurs routiers sont des véhicules utilitaires moteurs auxquels sont attelées des semi-remorques (véhicule sans essieu avant).
Source : INS et SPF Mobilité et Transports (DIV).

L’évolution du nombre de travailleurs salariés du secteur


30/06 Ouvriers Employés Total
du transport de la route, inscrits à l’ONSS
Référence est faite, dans le tableau ci-contre, aux travailleurs du 1975 19.118 4.905 24.023
transport routier. En 25 ans, le nombre de travailleurs a aug-
1981 20.901 3.397 24.298
menté de 29116 unités. Ici, il s’agit tout bonnement d’une pro-
gression exceptionnelle puisqu’elle affiche un taux explosif de 1985 24.434 3.323 27.757
121%.
1990 35.681 5.437 41.118
Remarque : 1995 39.004 5.306 44.310
Ces chiffres concernent les travailleurs inscrits auprès de
1996 39.512 5.444 44.956
l'ONSS. Le secteur compte également des travailleurs indépen-
dants. L'emploi direct s'élève donc à plus de 60.000 personnes. Il 1997 40.093 5.384 45.477
y a également beaucoup d'entreprises dans le secteur des activi-
1998 42.676 6.104 48.780
tés connexes telles que la prestation de services logistiques.
L'emploi total du secteur (transport routier et logistique, 1999 44.547 6.073 50.620
emploi direct et indirect) peut être estimé à près de
2000 46.269 6.870 53.139
100.000 personnes.
Les statistiques ne permettent malheureusement pas de Source : ONSS
connaître les chiffres actuels.

L’évolution du nombre d’entreprises


En province de Luxembourg
en fonction de la localisation
Il est important de savoir si cette évolution croissante présente Hélas, le tableau suivant le démontre, si le nombre d’entreprises
dans le secteur du transport se confirme aussi en Province de croît considérablement en Flandre, la même constatation ne se
Luxembourg. Tâche ardue s’il en est, les chiffres nous concernant vérifie pas en Wallonie. Et encore moins en province de
sont moins évidents à collecter. Il n’empêche, certaines statis- Luxembourg où nous n’enregistrons, entre 2000 et 2004, qu’un
tiques nous permettent d’avancer raisonnablement sur le sujet… maigre surplus de... quatre entreprises! De plus, alors qu’en 2002,

6 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
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la province de Luxembourg comptait encore 211 entreprises ac- Evolution du nombre total de véhicules pour le transport
tives dans le secteur, il n’en reste dans les faits que 198 aujour- routier pour compte de tiers en province de Luxembourg
d’hui. En l’espace de 24 mois, 13 entreprises ont donc quitté notre Selon le tableau suivant, la croissance du nombre de véhicules a
paysage économique. Soit elles ont complètement disparu, c’est la été particulièrement forte durant les trois dernières décennies en
première et regrettable hypothèse. Soit, elles n’ont disparu que de province de Luxembourg. En 1965, le parc de véhicules de trans-
nos statistiques et se sont déplacées sous des cieux nécessaire- port de marchandises équivalait à 2,6 % en province de
ment plus cléments. En outre, le calcul en question a été réalisé sur Luxembourg par rapport à l’ensemble du pays. En 2002, il repré-
des chiffres bruts ne prenant pas en compte les potentielles entre- sente 1,4 % de l’ensemble du parc de véhicules utilitaires belges.
prises venues s’établir dans notre province. Soit une chute... qui signifie aussi une baisse proportionnelle du
nombre de marchandises transportées.
01/01 Flandre Wallonie Prov. de Luxembourg

1787
2000 5141 3785 194 1500

1541
2001 5290 3790 202

1247
2002 5413 3812 211

1168
1000

1003

1017

997
2003 5371 3423 195

812
2004 5350 3511 198

735
Source : Service public fédéral de Mobilité et Transports 500
Remarque : pour certaines entreprises, il n'est pas possible de déterminer la répartition sur base
des données disponibles.

Nombre d'entreprises par province en % (01.01.2004)


0
Selon le graphique ci-dessous, 2,2 % des entreprises de transport
1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2002
routier sont établies en province de Luxembourg.

West-Vlanderen 19,4%
Antwerpen 16,5% Situation des entreprises
par nombre de véhicules moteurs au 1/1/2004
Oost-Vlanderen 16,3%
En province de Luxembourg, comme en atteste le tableau suivant
Vlaams Brabant 10,6% de l’ITR, 17 % des entreprises seulement possèdent 6 véhicules ou
Liège 8,8% plus, 2,5 % disposent de plus de 20 camions.
Hainaut 8,6%
Limburg 8,2% 1 2à5 6 à 20 >20 Total
Bruxelles-Capitale 3,6% Luxembourg 97 65 30 5 197
Namur 3,0%
Luxembourg 2,2%
Brabant wallon 2,0%
Brussel-hoofdstad 0,6%

Au cours des quatre dernières années, en comparant la situation Dans le même ordre d’idée, au contraire de ce que nous vivons
de l’emploi actif dans le secteur du transport en province de en région wallonne, la Chambre de commerce du Luxembourg
Luxembourg, notamment par rapport à celle évoquée par nos n’hésite pas à parler du transport comme d’un secteur en pleine
voisins luxembourgeois, le constat est très clair. Et pour cause, santé sur son sol. Selon nos sources, le territoire grand-ducal
l’évolution qui se vérifie à l’échelle européenne est, ici, annihilée compterait aujourd’hui près de 470 entreprises de transport. Pris
par la croissance exceptionnelle enregistrée côté grand-ducal. de manière aussi abrupte, ces chiffres sont peut-être difficile-
Les chiffres, difficiles à collecter parce que relevant de la gestion ment utilisables, mais il est inutile de préciser les raisons pour
interne des sociétés elles-mêmes, sont pourtant éloquents. En lesquelles, en province de Luxembourg, à quelques kilomètres de
moins de cinq ans, une douzaine de PME actives dans notre pro- là, sur un territoire considérablement plus grand, nous n’en re-
vince ont vu le nombre de leurs salariés passer de 140 à 50… censons que... 198, souvent de petite taille. ■
Pourtant, on l’a dit et répété, de tels chiffres ne révèlent pas la
mauvaise santé des PME en question. En effet, en 2000, lorsque Nombre total de travailleurs employés par 12 PME
celles-ci se sont établies de l’autre côté de la frontière, elles n’em- originaires de la province de Luxembourg,
ployaient là-bas qu’une vingtaine de salariés. Pourtant, fin 2004, établies aussi au grand-duché de Luxembourg
les mêmes entreprises sous bannière luxembourgeoise en comp-
tent plus de deux cent cinquante. Doit-on en déduire que le sec- Province Grand-duché
teur du transport ne se porte pas bien? Certainement pas… Il de Luxembourg de Luxembourg
faut surtout accepter que des réalités financièrement plus pal-
2000 140 20
pables concourent à de tels constats. De l’emploi a été créé par-
ce que le secteur a explosé, mais nous n’en avons pas bénéficié! 2004 50 250
C’est tout…

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75 7


dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

Délocalisation...
«La délocalisation de nos entreprises vers le grand-duché de Luxembourg? Ce n’est qu’une mise en
jambe! Surtout pour les entreprises qui emploient beaucoup de chauffeurs», dixit Jean-Marie Becker

est de croître elle-même. Une autre est de s’associer avec des


Ouverture des pays de l’Est :
transporteurs amis ou concurrents.
le bon et le mauvais
Après, les associations créées pourront chercher à rivaliser avec
«Les prétentions salariales des chauffeurs ont été revues d’autres groupements pour être plus compétitifs...
à la baisse…»
Se spécialiser... des exemples
Très logiquement, les transporteurs internationaux engagent de
plus en plus de ressortissants des pays de l’Europe de l’est : leurs Pour rompre la spirale des associations et rester leader dans un do-
salaires sont jusqu’à quatre fois moins élevés. maine, il est nécessaire de se spécialiser dans des activités rentables.
Entreprendre : Les chauffeurs locaux ont donc vu leur barème Pour cela, il ne s’agit pas nécessairement de se situer dans des zones
diminuer? de fortes concentrations industrielles. Les plus imaginatifs trouve-
Jean-Marie Becker : Oui, mais à côté de cela, la préoccupation ront une niche de marché spécifique, différente des autres. Cela est
majeure est la concurrence des pays de l’est. Le secteur réclame valable pour tous les secteurs… Chercher des débouchés à valeur
une réglementation commune. Jusqu’à présent, la réglementa- ajoutée, voilà peut-être un itinéraire gagnant.
tion européenne du temps de travail et de repos ainsi que les sa- Ex : le transport d’explosif, le déménagement de matériel infor-
laires sont différents entre les dix nouveaux pays de l’Union eu- matique, le transport complété par des prestations à valeur ajou-
ropéenne et nous. N’oublions tout de même pas qu’au sein du tée. Faut-il préciser que la sous-traitance a malheureusement le
secteur du transport routier, les salaires représentent 33 % du grand désavantage pour le transporteur de le rendre responsable
prix de revient. des risques?
Entreprendre : N’est-ce pas ce qu’on peut appeler de la • Continental Cargo Carriers
concurrence déloyale? Société spécialisée dans le groupage, la logistique et le transport
Jean-Marie Becker : Si, mais des dispositions se mettent en pla- maritime, cette entreprise n’a pas de tracteurs. En tant que trac-
ce pour régler le problème. Pourtant, ce qui nous attend avec le tionnaire, CCC s’occupe d’acheminer des containers en prove-
prochain élargissement de l’Union européenne ne va rien arran- nance ou à destination de la Grande-Bretagne. Ils n’ont pas de
ger. Cela va accroître le différentiel en terme de coût de la main tracteurs, par contre ils organisent tout le service de transport
d’œuvre. en travaillant avec de petits transporteurs. Ils n’ont pas le souci
de trouver un bon personnel, d’entretenir le matériel…
La politique européenne en matière
• Intertrans
de transport routier de marchandises
Autre société spécialisée dans le groupage et la distribution, sa
Trois grands principes : politique commerciale est d’être proche du client mais en pro-
- La libéralisation du transport routier posant des solutions «worldwide». Les marchandises qui sont
- L’harmonisation des règles sociales majoritairement transportées par cette société sont des produits
- La définition d’un cadre commun pour la tarification des chimiques.
infrastructures routières • Déménagements Nadin
Créée en 1953, la société de transport s’est progressivement
concentrée sur les déménagements de tous types, nationaux et
Le groupement,
internationaux en ce compris les déménagements outre-mer.
les associations de partenaires
Cette société offre des services complets, à la carte… Dans le
«La solution» disent certains… secteur du transport, le déménagement est un créneau rentable
Et oui, alors que la concurrence est toujours plus importante, il puisque particulier…
n’est pas toujours aisé pour une entreprise locale de rivaliser • J.P.Lorang
avec ses homologues sur des marchés internationaux. Et beau- Spécialisée dans les transports de charges complètes et par-
coup de marchés tombent parce qu’elle n’a pas une renommée tielles de lots industriels de toutes dimensions, la société JP
de taille. Lorang est parvenue à s’imposer dans le transport exceptionnel
Le critère de la taille est donc souvent déterminant pour rem- de marchandises hors gabarit… en acier. Bien située, correcte-
porter certains marchés. ment équipée et présente sur un marché particulier, l’entreprise
Une voie pour l’entreprise, pour autant qu’elle soit bien solide, est gagnante, sa niche est trouvée !

8 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
dossier

Choisir sa niche et s’y spécialiser Grâce aux relations de partenariat entre les transporteurs et
De manière générale, la conjoncture actuelle impose aux trans- leurs clients, il serait tout à fait raisonnable d’appliquer une sur-
porteurs de se réaliser uniquement dans la niche pour laquelle ils charge gasoil sur les transports lors de la négociation des prix.
ont de grandes compétences. Sans aucun doute, mieux vaut pas- À ce titre, le gouvernement a prévu que les professionnels du
ser de 50 à 30 camions, si cela est plus rentable. transport puissent récupérer une partie des accises sur présen-
Il est important - et le secteur du transport routier, n’y déroge tation d’un dossier complet mais, pour l’exercice 2004, ce dos-
pas - de se spécialiser. Investir dans une niche plutôt que de mul- sier ne pourra être introduit qu’en mai 2005. Ne sera-t-il pas déjà
tiplier ses activités, c’est ici la décision qui sauve. trop tard pour certains ?
Autre élément difficile à gérer au quotidien : le manque toujours
Les chauffeurs
croissant de mobilité est un élément qui coûte cher aux entre-
Conduire un camion n’est pas un jeu d’enfant. Que du contraire. prises. Les engorgements en périphérie des grandes villes dimi-
Le poids et la puissance des véhicules exigent un doigté spéci- nuent la vitesse moyenne du chauffeur alors que le salaire de ce
fique, une connaissance approfondie des capacités de réaction dernier reste identique.
dans des conditions de circulation parfois extrêmes. Mais il est encore de nombreuses préoccupations, notamment le
La responsabilité du conducteur professionnel ne concerne pas prix pour le donneur d’ordre de l’aller et du retour. En effet, il
seulement son engin, mais aussi la nature souvent dangereuse du n’est pas rare d’avoir un différentiel de prix de 35 % entre les
fret transporté, le savoir-faire pour son bon arrimage. Les com- deux trajets. Étonamment, entre deux points, la liaison de A vers
pétences d’un chauffeur doivent être larges. B est toujours plus chère que la liaison inverse de B vers A. Si les
Parti à l’étranger la plupart du temps, le quotidien des chauffeurs entreprises s’assemblaient en réseau, cela équilibrerait le flux
internationaux n’est pas non plus toujours très simple à gérer. des transports. Et le gain de productivité serait possible si le prix
Tout cela explique la bonne rémunération de cette fonction. À ce du retour s’alignait sur le prix de l’aller...
titre, est-ce le salaire qui motive les chauffeurs? C’est très diffi- Par ailleurs, à tous ces coûts, s’ajoutent également ceux liés aux
cile à dire. accidents. Parmi ceux-ci, Jacky In Den Bosch, cite les assu-
Contrairement au passé, on dit que les chauffeurs n’ont plus la rances, les carrosseries, l’immobilisation des camions et des
vocation de leurs prédécesseurs, que leurs bons salaires les ont chauffeurs (sans compter les dommages corporels), la gestion
embourgeoisés et les ont rendus parfois trop exigeants. Allez sa- administrative du sinistre, la mauvaise image de l’entreprise de
voir. Évidemment, si l’on oppose les chauffeurs belges à leurs transport. Il faut y penser !
collègues de l’Est, on pourrait s’étonner... Les frais engendrés par les accidents sont très souvent consé-
D’ailleurs la gestion du transport routier n’est pas simple, il faut quents. Il est donc rentable, à moyen terme en tous cas, de re-
contenter le client et le routier. courir à la prévention en matière de sécurité.
Pour un transporteur, le salaire du chauffeur représente une Jacques Löfgen : La sécurité dans le transport, c’est un processus.
charge importante dans le prix de revient. Ceux-ci pourraient Elle commence avant tout par la responsabilisation des chauf-
être tentés d’engager des ressortissants des nouveaux pays feurs, les formations, la motivation et différents incitants ...
membres, moins exigeants, puisque payés à des conditions satis- A.T.U. Transport a bien compris que la non sécurité coûte cher.
faisantes pour chacune des parties. Le remède, c’est la prévention autant que la guérison dans diffé-
Cependant, il semble que la qualité de service ne soit pas la même. rents domaines : l’organisation, le matériel et l’humain. Ils ont
Il n’est pas toujours aisé pour un planificateur (un dispatcher) de d’ailleurs mis en place un système de récompense aux
communiquer usuellement dans une langue étrangère. Et pour le «Professional Driver». L’idée est de rémunérer le chauffeur qui
client, c’est toujours préférable d’avoir une meilleure visibilité de fait son travail et de récompenser ce lui qui fait plus que son tra-
la société de transport avec laquelle il travaille. Au final, certaines vail. Un système de «bons points» à acquérir en fonction des évé-
décisions pourraient même augmenter la non-qualité. nements permet au chauffeur de recevoir un cadeau… Et, à la
lecture des résultats chiffrés, le dispositif mis en place chez
A.T.U. fonctionne bien. En effet, la première année, le nombre
Augmentation des coûts
d’accidents a diminué de 29 %. «Il faut continuer dans ce sens,
Pour Eric Charlier, l’heure n’est pas aux cadeaux. «Un trans- même si le retour sur investissement n’est pas immédiatement
porteur doit absolument connaître les gains et les pertes de perceptible».
toutes de ses prestations via des indicateurs fiables.»
Le cluster wallon Transport et Mobilité
Les coûts liés au transport de marchandises sont nombreux.
La hausse du gasoil devient manifestement un problème pour les Le Cluster Transport & Logistique Wallonie – Belgium a pour ob-
transporteurs. Quand on sait que le gasoil routier représente jet de favoriser le développement du secteur transport et logis-
21 % du prix de revient d’un transport, cette augmentation du tique en Région wallonne.
prix du carburant grève fortement les marges bénéficiaires des Parmi les membres dudit Cluster, on retrouve le monde de
sociétés de transport. la formation avec les Universités et les Hautes Ecoles qui ➤

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75 9


dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

••• proposent des formations axées sur la logistique. Le Cluster Toutes ces sociétés se regroupent et travaillent ensemble avec
compte également parmi ses membres des organes de formation comme but commun de faire évoluer le secteur du transport et
pratique comme le Forem Logistique. de la logistique afin d’offrir aux investisseurs étrangers les
Des organismes professionnels y sont également représentés : moyens de leur réussite sur le marché européen, tout en per-
représentants des transporteurs, représentations patronales…. mettant le développement endogène par un meilleur savoir-faire
Mais le Cluster, c’est aussi et surtout des entreprises : des pres- local et une meilleure structure financière des membres, per-
tataires logistiques tels que TNT Airways, des plates-formes mul- mettant des investissements conséquents en logistique.
timodales… Ce sont également des chargeurs tels que le groupe La Wallonie regroupe toutes les infrastructures nécessaires au
Arcelor ou Spadel. développement des entreprises qui choisissent de s’implanter
Ce sont aussi des gestionnaires d’infrastructures : le Ministère de sur son territoire : des terrains disponibles à un prix attractif, des
l’Equipement et des Transports, des Intercommunales de déve- plates-formes multimodales prêtes à accroître leurs volumes,
loppement économique, la SAB qui gère Liège-Airport mais éga- des nœuds autoroutiers au carrefour de l’Europe, des liaisons
lement les différents ports intérieurs. En tout, plus de 80 entre- fluviales à grands gabarits, un réseau ferré dense, ainsi que le
prises et/ou organismes sont déjà membres, ils permettent de re- huitième aéroport cargo d’Europe. De plus, ces différentes voies
grouper les 4 modes de transport (route, rail, air et voie d’eau) de communication bénéficient de très peu de congestion.
au sein d’une même organisation. En bref, la Wallonie est bel et bien une terre de logistique! ■

Pas de marché sans transport…


«Tout ce qui pénalise aujourd’hui le transport routier aura des répercussions
pour le consommateur privé».
Rencontré lors du salon Transport 2004, Jean-Marie Becker, administrateur
du cluster wallon Transport et logistique, nous a entretenus quant à sa
manière d’entrevoir l’avenir du transport routier. La pertinence de son avis
ne souffre d’aucune contestation, il connaît le domaine…

difficile de commercer. Le concept de Réalités concrètes


frontière n’existant plus, il est même D’autant qu’à l’inverse de ce qui est au-
communément admis de parler de jourd’hui vrai pour le territoire, les réali-
Selon lui, la situation actuelle vécue transport européen pour qualifier ce tés économiques et sociales ne sont pas
par les transporteurs n’a rien d’éton- que nous appelions hier encore le uniques du nord au sud de l’Union. Ainsi,
nant. À l’évidence, la concurrence qui transport international. Certes, les au sein de la même Europe, le coût horai-
touche de plein fouet tout le secteur temps d’attente aux frontières ont dis- re d’un chauffeur passe de un à quatre
existait bien avant l’élargissement de paru, mais le vaste marché est aussi selon son origine géographique! Pour
l’Union européenne. Mais jusqu’alors, ouvert à une concurrence féroce à la- s’en convaincre, on estime généralement
elle sommeillait, maintenue en léthar- quelle nos transporteurs se heurtent que le coût horaire d’un routier avoisine
gie par une série de réalités forcément avec pertes et fracas. Avant le 1er mai, la trentaine d’euros en Belgique, alors
différentes au sein d’une entité plus bien sûr, nombre d’échanges entérinés qu’il frôle à peine les cinq ou six dans les
morcelée. Désormais, la concurrence par des accords bilatéraux existaient nouveaux Etats membres. Même en ta-
s’est largement intensifiée et une mul- forcément. Depuis, ces autorisations bi- blant sur une augmentation inéluctable
titude de problèmes a jailli là où il fal- latérales ont officiellement disparu, la du coût d’un chauffeur en Europe de l’est
lait s’y attendre. Résultat: à l’échelle circulation est donc illimitée. Les règles dans les prochaines années, la différence
européenne, tant sur le trafic national du marché s’appliquent, elles ne plai- perdurera longtemps. Et l’on peut parler
qu’international, il est de plus en plus dent pas en faveur de nos entreprises. d’harmonisation fiscale et sociale comme

10 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
dossier

autant de thèmes à l’ordre du jour de l’Union européenne… En tout cas, d’un Le cabotage
l’agenda européen, celle-ci n’a pas enco- point de vue strictement pratique, Tout transporteur, titulaire de la licence
re dépassé le stade du projet. Pour peu lorsque les distances parcourues flirtent communautaire, est admis à effectuer, à
que l’on s’y applique, la réalisation pra- avec les 700 à 800 kilomètres, aucune titre temporaire, des transports dits in-
tique de ces modalités ne se mettra pas solution n’est plus rentable au départ de ternationaux de marchandises dans un
en place avant une dizaine d’années. bases belges. C’est clair… autre Etat membre que celui d’établisse-
Pourtant, jusque-là, les entreprises vont ment de son entreprise. Certaines me-
devoir vivre… ou survivre. Il faut donc Le libre droit de circuler sures de transition ont néanmoins été
agir. Et vite! Sans discrimination de nationalité ni de négociées avec les dix nouveaux Etats
lieu d’établissement, le droit de circuler membres de l’Union européenne, notam-
Toujours plus à l’est… en transportant des marchandises est ment pour les opérations de cabotage
La solution, selon Jean-Marie Becker, est complètement établi au sein de l’Union. routier. Elles ont pour objectif d’encadrer
radicale. Etablir une filiale en Europe de Pour pouvoir en bénéficier, il suffit qu’un dans le temps, l’ouverture complète du
l’Est avec des chauffeurs locaux. Ni plus opérateur soit en possession d’une licen- grand marché communautaire à 25. La
ni moins… A l’entendre, en pratiquant ce communautaire, délivrée par son Etat période durant laquelle les mesures de
de la sorte, le prix du transport pourrait membre et renouvelable tous les cinq restriction aux opérations de cabotage
être revu à la baisse, presque de 20%. ans. sont autorisées a été fixée, elle est arrê-
Aujourd’hui, convenons-en, il est extrê- Ce document uniforme, dont une copie tée à cinq ans. Donc, au plus tard le
mement difficile pour une entreprise de certifiée conforme est exigible sur tout 01.05.2009, l’ouverture totale du grand
transport installée chez nous de rivaliser véhicule, atteste que ce dernier répond marché européen à 25 sera réalisée dans
avec des concurrentes déjà établies sur bien aux prescriptions nationales de cir- le secteur du transport routier. Toutefois,
place, plus à l’est. Hélas, en raisonnant culation prévues dans son pays, en certaines exceptions permettent déjà à
de cette manière, force est d’admettre conformité avec celles prévues par les di- certains de sillonner l’Europe à leur gré:
que l’on quitte le navire. Mais quid des rectives et les règlements de l’Union, en pour les transporteurs de Slovénie, de
matelots? En effet, avec la délocalisa- particulier pour l’accès à la profession. Il Malte et de Chypre, l’accès au cabotage
tion, l’emploi partira forcément là-bas. n’y a donc plus aucune protection parti- est, en effet, déjà libéralisé. ■
En tout cas, il ne restera pas. Mais, culière, la libre concurrence est bel et
telles sont les conséquences des choix de bien la règle.

«Transporteurs et donneurs d’ordre, une relation en évolution…»


Commentaires d’Eric Charlier
Depuis une vingtaine d’années, la notion unissant le transporteur et le
donneur d’ordre a bien changé…
Il y a quelques années encore, cette relation se basait sur la confiance et
le partenariat. Les prestataires de services garantissaient une «certaine»
qualité en contrepartie de la fidélisation du client. Ce n’est plus vrai.

Aujourd’hui, de nombreuses entreprises péenne. Aussi, le «capital sympathie» - Oublié, le service…


d’importance établies sur notre territoire élément de valeur généralement admis il L’entreprise, qui jadis considérait le ser-
ne disposent plus des pleins pouvoirs dé- y a quelques années - ne pèse donc qua- vice comme un élément complémentaire
cisionnels. Souvent, leurs centres de dé- siment plus dans la balance lorsque vient susceptible de l’aider à conquérir, ou à
cisions sont même installés en dehors de le moment pour le donneur d’ordre de garder, un marché, sait désormais qu’un
nos frontières: en France, en Allemagne, choisir un transporteur avec lequel en- tel raisonnement est pour le moins
ou encore en dehors de l’Union euro- tretenir des relations commerciales. caduque.

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75 11


dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

Ce nouveau type de relation impose donc Et, pour peu que le transporteur n’ait pas • statuts des conducteurs (salariés mo-
à l’entreprise d’avoir une vision différente pris le temps de lire correctement tous biles ou indépendants);
d’elle-même. Ainsi, sur la scène euro- les articles du contrat, celui-ci se retrou- • pause au volant (45 minutes, divisibles
péenne, une structure de petite envergure ve contraint à des modalités imprévues… en trois, toutes les quatre heures et de-
éprouvera d’énormes difficultés à assurer Les marchés se négocient, en effet, très mie);
sa crédibilité en n’optant pas pour le par- rapidement, en 8 heures. Pour pallier les • période de conduite journalière (maxi-
tenariat. Beaucoup d’entreprises de difficultés engendrées par des négocia- mum 9 à 10 heures), fréquence de
transport ont perdu des marchés… car tions aussi ardues, via les enchères élec- conduite hebdomadaire (six périodes)
elles étaient trop petites par rapport à troniques, des sociétés se sont spéciali- et total de temps de conduite par quin-
leurs concurrentes. Par ailleurs, un autre sées pour conseiller rapidement sur les zaine (90 heures);
élément revêt son importance dans cette éventuels contractants. Il s’avère souvent • durée et répartition du temps de repos
relation entre transporteur et donneur rentable de faire appel à ces bureaux. journalier (minimum 11 heures) et heb-
d’ordre : les enchères proposées sur le domadaire (45 heures consécutives,
net complexifient encore les choses. Temps de conduite, pouvant être éventuellement réduites
Pourtant, il est très fréquent que les don- de travail et de repos moyennant compensation);
neurs d’ordre aient aujourd’hui recours à Tout en admettant la flexibilité indispen- • durée hebdomadaire moyenne du tra-
celles-ci. Cette facilité de marché offerte sable à un métier dont l’exercice est lié vail (48 heures, avec des pointes auto-
par la toile a cependant des revers. Les ca- par nature à des circonstances aléatoires, risées à 60 heures) et limite du travail
hiers des charges, rédigés en anglais, pa- la réglementation européenne fixe les exi- de nuit (10 heures par période de 24
raissent souvent très compliqués. gences à respecter en matière de : heures). ■

La logistique,
Selon Gabriel Catania La logistique n’est pas un concept nouveau, cette activité a tou-
jours existé puisqu’il y a toujours eu un flux de matières et,
conséquemment, un flux d’argent. Par contre, elle a progressive-
ment été externalisée des entreprises par le jeu de la compétitivi-
té du marché. Toujours plus importante, celle-ci a poussé les pro-
ducteurs à se concentrer davantage sur leurs métiers de base -
pour lesquels ils sont plus compétents - et à avoir recours à des
fournisseurs de services externalisés.
GC Partner SA

Pour une entreprise, la logistique, c’est AVANTAGES COMPÉTITIFS jours plus au sud, vers la concentration de
une question de rendement du capital, À S’INSTALLER consommation. D’autant que les choses
de rentabilité. EN PROVINCE DE LUXEMBOURG iront nécessairement dans le même sens à
L’objectif, avec le recours à sa version L’emplacement géographique l’avenir. Alors qu’aujourd’hui, il y a 6 mil-
externalisée, est de faire sortir du bilan C’est aussi la possibilité de capturer d’im- lions de containers concentrés sur le port
le capital à faible valeur ajoutée. Par portants flux de marchandises venant des d’Anvers, on estime qu’en 2010, la capaci-
contre, ce métier sera rentable pour un ports de Rotterdam et d’Anvers, et du ter- té aura doublé. Il faut pouvoir l’acheminer.
logisticien dont cette activité est la minal d’Athus (avec le PED) via un trans-
spécialisation. port multimodal (même s’il n’y a pas chez La proximité frontalière
En conclusion, la spécialisation a pour nous de voies navigables). N’oublions pas, Notamment celle du grand-duché du
corollaire une efficience nouvelle et la à ce propos, que le transport routier couvre Luxembourg et les avantages fiscaux et
concentration sur son propre métier. encore 80% des flux de marchandises. sociaux qu’il offre. Il est intéressant pour
les sociétés d’utiliser la différenciation
L’espace disponible entre les deux Luxembourg…
La Flandre est saturée, c’est un fait…
Résultat: on va donc naturellement tou-

12 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
dossier
Selon Selon Véronique Hustin, Selon
Jean-Marie Becker Jost Logistics Eric Charlier
En matière de logistique, le Pour Jostgroup comme Aujourd’hui, de plus en
scénario idéal serait de pour d’autres, les don- plus, la philosophie des
pouvoir tabler sur une dua- nées pratiques sont in- grandes entreprises est
lité entre notre pays et contestables et, en ma- d’externaliser leur produc-
l’étranger. Pourquoi pas, tière de logistique, le po- tion. Cela mène naturelle-
par exemple, une société sitionnement actuel ment au développement
établie sur le territoire d’un répond plus à une situa- de la logistique. Et dans
des nouveaux Etats membres, un personnel tion de fait qu’à un choix délibéré. La sa- ce sens, la logistique est différente de l’en-
salarié au grand-duché du Luxembourg et un turation a décidé des choix, il faut s’en treposage.
centre logistique en Belgique. La logistique accommoder, toujours plus au sud... Et En cette matière aussi, il s’agit d’être inno-
est un service coûteux au quotidien mais qui comme de surcroît le coût des terrains est vant pour offrir un service auquel le client
recouvre de nombreux avantages. En effet, plus acceptable en province de Luxem- n’avait pas pensé. Le résultat? Du Win to
comme le met en exergue l’étude de bourg qu’ailleurs, notamment de l’autre win... Permettre aux entreprises de se
Cushman et Wakefield, la Belgique a le privi- côté de la frontière, les choix sont vite concentrer sur leur core-business, voilà qui
lège de se trouver au cœur de la «nouvelle faits. Toutefois, il faut aussi être prudent devrait déboucher sur des résultats pro-
banane de la logistique». Proches des princi- en cette matière car la rentabilité n’est bants. Alors, la logistique devient un métier à
paux ports d'entrée d’Europe (Anvers et pas nécessairement plus élevée partout réelle valeur ajoutée. De plus, la convention
Rotterdam) qui ne se délocaliseront pas, la que chez nous, c’est par exemple le cas en collective pour la logistique est relativement
Belgique connaîtra toujours un flux énorme province de Liège. Pour elle, la logistique, intéressante par rapport aux autres secteurs
de marchandises. Elle apparaît donc être un c’est aussi une manière de reconvertir la lorsque l’on y ajoute une prestation supplé-
moyen de capitaliser en valeur ajoutée. main-d’œuvre laissée au chômage. Cela mentaire. ■
Il y a plusieurs types de logistique. peut être considéré comme une adaptation
- la production industrielle (logistique de du tissu industriel. Dans le secteur de la
consommation) logistique, il y a beaucoup de variation de
- la logistique sous-traitée par les transpor- main-d’œuvre. Les sociétés d’intérim y ont
teurs. Il s’agit d’une externalisation des mar- tout leur sens.
chandises.

La délocalisation, d’autres ont déjà choisi


des cieux plus favorables...
«Pourquoi rester en Belgique ?» rencontre avec Michel Nadin
Plus qu’un phénomène économique, le transport est également un phénomène social. Dans le transport routier, la
main d’œuvre a une place essentielle. Davantage encore dans la distribution! Et en Belgique, le climat n’est pas
favorable en matière de droit social. De plus, les raisons qui poussent à s’établir au grand-duché de Luxembourg
sont nombreuses… Trop pour hésiter.
Un choix vite fait payer d’impôts sur les investissements. Et, ce aux PME ou aux grandes entreprises, le ta-
En province de Luxembourg, les bons chauf- puisqu'une entreprise investit toujours... bleau est complet… L’attrait pécuniaire of-
feurs sont rares à trouver. Ceux-ci sont, fert par le Luxembourg est un plus, mais il
Règles différentes
comme tout le monde, tentés de passer de n’explique pas tout... En fait, c’est l’ensemble
Le souci de la Belgique, c’est le climat de
l’autre côté de la frontière. Evidemment, qui m'a conduit à prendre ma décision!
suspicion!Il y a des contrôles en permanence.
leur motivation est simple: le salaire y est D’autant que le secteur du transport routier
D’un point de vue fiscal, côté TVA, le contrôle
plus élevé. Il est donc très difficile pour un est particulièrement bien représenté là-bas.
des tachygraphes... Certains contrôles belges
transporteur de garder ses chauffeurs. La Confédération Luxembourgeoise du
vont même jusqu’à vérifier ce qui se passe
Commerce, et plus précisément son groupe-
dans votre société établie au Luxembourg...
Conditions plus difficiles chez nous ment transport, a un réel pouvoir de négocia-
Au grand-duché de Luxembourg, le droit du «C’est mon choix…» tion. L’Etat luxembourgeois n’agit et ne déci-
travail est connu et reconnu égal pour tous. La concurrence dans un métier où les charges de pas sans une concertation préalable avec
Tout le monde connaît les règles du jeu. ne cessent d’augmenter (gasoil, salaires, les concernés. Finalement, le seul souci au
Contrairement à la législation belge, la rec- acier…) et le ras-le-bol face au climat que grand-duché de Luxembourg, c’est le prix des
titude du droit luxembourgeois en séduit font régner les politiques belges, voilà ce qui terrains! Mais, pour cela, il y a la province de
donc plus d’un. Pour une entreprise, l’avan- exaspère. Et si l’on y ajoute les différences de Luxembourg... pour autant qu’on vous cède
tage énorme de s'y établir est de ne pas comportement des administrations belges fa- lesdits terrains. ■

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75 13


dossier DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE

Le Terminal Athus
En 1979, sur le site du PED, s’est créé une •l’Alsace, la Lorraine et les Vosges en problèmes de mobilité et s’intègre totalement
plate-forme destinée à l’acheminement de France; dans la logistique des flux de containers.
containers et à la meilleure circulation de ces •la Sarre, la Rhénanie Palatinat et le Bade-
derniers depuis leurs ports d’arrivée de la Würtenberg en Allemagne; En quelques chiffres :
mer du Nord jusqu’à leur destination finale. •le grand-duché de Luxembourg. •Surface : 110.000m2.
Cette création n’est autre que le Terminal Cette plate-forme est une réponse multimo- •2.100 m utiles de voies ferrées.
Athus. Géographiquement bien positionné en dale au transport de marchandises, elle joue •Capacité d’entreposage : 5.000 TEU.
tant qu’avant-port de Zeebrugge, Anvers et sur la complémentarité : •4 grues mobiles de 40 tonnes de capacité.
Rotterdam, il est également situé à plus de •du rail, idéal pour le transport de masse sur •Un portique sur pneumatiques de 40 tonnes
250 kilomètres de ces sites portuaires, ce qui moyenne et longue distance; de capacité.
optimalise le recours au rail. Complémentaire- •de la route, imbattable en matière de sou- •3 trains journaliers en aller-retour sur les
ment, le Terminal Athus dessert par la route plesse. ports de la mer du Nord.
les régions limitrophes des trois pays : Le Terminal apporte une réponse positive aux

La logistique, un métier à part entière...


Le point de vue de l’Intercommunale Idelux
e n’est un secret pour personne, la lo- vement de l’un ou l’autre manutentionnaire chez nous au cours de la dernière décennie.

C gistique fait partie des priorités que


défend l’Intercommunale de dévelop-
pement économique de la province de
isolé. D’ailleurs, depuis plusieurs années
déjà, la réalité concrète pousse à considérer
la logistique comme un métier très spéci-
Autover, Exxon Mobil, tout récemment Scott
ont certainement aussi perçu le potentiel
stratégique et géographique d’une province
Luxembourg. À Molainfaing (Neufchâteau), fique où interviennent nombre de compé- située au cœur de l’axe de consommation le
elle œuvre depuis près de cinq ans pour dé- tences. Elle ne se limite plus à de l’entrepo- plus important d’Europe (+/-1.000 milliards
velopper son projet visionnaire baptisé pla- sage ou à du transport puisqu’elle s’inscrit d’euros de PIB, 58 millions de consomma-
te-forme logistique du Centre-Ardenne. En dans le cycle linéaire de la production. A un teurs atteignables en 4 heures de camion...)
fait, il s’agit d’une zone exclusivement dédi- stade ultime, certes, mais elle évolue au- Je ne sais pas si nous avons été vision-
cacée à ce métier connexe au transport que jourd’hui davantage comme un métier à naires, mais je pense que nous avons sur-
certains n’hésitent pas à assimiler erroné- haute valeur ajoutée...» «En fait, le centre tout été attentifs à trois éléments essentiels,
ment à de l’entreposage. Pour Georges logistique joue le rôle tampon entre le ma- selon moi, de la réalité locale: espaces dis-
Cottin, Conseiller général d’Idelux, le rac- gasin et la production, mais en y ajoutant ponibles, réseaux de communication perfor-
courci facile assimilant logistique et trans- une plus value non négligeable... et de nom- mants et proximité des grands bassins de
port paraît dépassé, presque faux. «Hier, breux emplois difficilement délocalisables consommation. Ici, nous raisonnons en
mais avec certaines réserves, on pouvait car situés au cœur même du bassin de temps plutôt qu’en kilomètres…» Alors, si
peut-être admettre un tel raccourci sans consommation.» la zone logistique du Centre-Ardenne devait
sursauter, plus aujourd’hui... En tout cas, je «D’où l’attrait indéniable de notre pays, et devenir porteuse d’espoir à l’horizon des dix
tiens d’emblée à préciser que des potentiali- principalement d’une province de prochaines années, on imagine aussi qu’elle
tés nouvelles se font jour. Non seulement la Luxembourg parfaitement située, peu engor- sera porteuse d’emplois. Pour l’heure, il
logistique est aujourd’hui porteuse d’em- gée et disposant d’accès autoroutiers per- s’agit de prévisions, mais Georges Cottin se
plois, mais l’avenir plaide aussi en ce sens. formants…» explique Georges Cottin. «Ce prend à rêver... «On peut raisonnablement
Gommons donc définitivement le cliché du n’est tout de même pas un hasard si de tabler sur un millier d’emplois si la zone
hangar de stockage hanté par le seul mou- grands groupes européens se sont installés prend l’essor attendu...»■

Collaborations logistiques
La Chambre de commerce du Luxembourg belge peut s’associer à sa merce du Luxembourg belge pourrait ainsi développer l’aspect quali-
consoeur française de Moselle pour mettre sur pied un cycle de for- tatif de la main d’œuvre nécessaire au rayonnement du secteur lo-
mation à la logistique. En s’appuyant sur l’expérience indéniable de gistique en Wallonie.■
sa voisine, elle-même à l’initiative de l’ESIDEC, la Chambre de com-

14 Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°75


DU TRANSPORT À LA LOGISTIQUE
dossier
La chaîne logistique revêt une importance
toute particulière en Grande Région
Depuis 1982, l’ESIDEC (École supérieure in- d’études et la validation des acquis de l’ex-
ternationale de commerce de Metz), émana- périence professionnelle de l’étudiant. l’ESIDEC a conclu des accords avec des so-
tion de la Chambre de commerce et d’indus- Aboutissant à un niveau Bac + 5, la forma- ciétés qui ont fait de la logistique leur che-
trie de Moselle, s’est affirmée comme l’Ecole tion comprend une première année de tronc val de bataille. «Et nous n’avons aucun pro-
de référence dans les domaines de la logis- commun suivie de deux années de spéciali- blème de débouchés pour nos étudiants car
tique, du marketing industriel et des sation dans les domaines du management la logistique est réellement porteuse d’em-
achats. Ses étudiants lui arrivent déjà di- de la chaîne logistique, du marketing indus- plois» explique Thierry Jean, directeur de
plômés (Bac + 2), ils suivent alors un cur- triel ou du management des achats. l’école. ■
sus variant de un à trois ans selon le niveau Résolument orientée vers l’industrie, www.esidec.fr

Selon nous
Car s’il n’est plus rare de voir certaines fonctions quitter précipitam-

E
n quelques années, le secteur du transport a considérablement
évolué sous nos latitudes, traduisant la tendance consommatoire ment la région historique de leur développement, il est en revanche peu
de plus en plus vorace des sociétés occidentales. Hélas, nous probable que la logistique ait un jour à subir un tel scénario puisqu’elle
l’avons dit, de nombreuses raisons le poussent aussi aujourd’hui à suc- est intimement liée en temps au bassin de consommation sur lequel el-
comber à l’inévitable délocalisation. le base son devenir. Les industriels eux-mêmes l’ont bien compris et ils
Volatile par essence, le transport semble donc promis à un départ an- axent une partie de leur énergie sur la différenciation retardée qu’ils si-
noncé… Et n’allez pas penser que ce sera pour demain! Non, la grande tuent toujours plus proche des consommateurs. Et qu’importe s’il faut
marche est déjà lancée. «Avant-hier, nous y pensions, sans plus. Hier, externaliser une série de fonctions pour survivre. Qu’il s’agisse d’éti-
l’idée est revenue, plus pressante. Aujourd’hui, nous cherchons active- quetage, de reconditionnement ou de «packaging», la compétitivité est
ment comment réussir notre implantation à l’Est» nous expliquait ré- à ce prix. La logistique devrait y gagner. Et puisqu’il est prouvé que cel-
cemment un entrepreneur soucieux de pérenniser son activité. Et le mê- le-ci ne réalisera plus de gains majeurs sur le transport, elle devra né-
me d’ajouter: «Pour lutter, seul l’exil paraît encore envisageable…» cessairement agir sur le service pour s’assurer une place concurren-
Sachant cela, il n’est plus permis de se voiler les yeux. Il faut clamer haut tielle. Si une usine d’assemblage informatique installée dans la région
et fort ce que beaucoup pensent en silence. Non seulement les pistes de de Metz a su séduire le géant Hewlett Packard pour le montage de plus
salut du secteur paraissent bien maigres, mais il est presque trop tard de 60 % des imprimantes vendues en Europe de l’Ouest, c’est qu’elle a
pour agir. En tout cas, si tel était encore le souhait de nos dirigeants… aussi réussi à démontrer des qualités de service irréprochables. La pro-
Certes, des poches de résistance existent... Pour l’heure, elles parais- vince de Luxembourg pourrait suivre la même voie.
sent encore viables aux yeux des entrepreneurs qui ont su jouer la car- Mais justement, tout le leurre ne se situe-t-il pas là?
te de la spécialisation. Tant mieux. Mais pour les autres? En effet, s’il n’est pas permis de remettre en cause notre situation géo-
«Il reste à profiter de ce qui ne peut nous être enlevé...» explique Thierry graphique et les multiples données favorables qui plaident en faveur de
Jean, directeur de l’ESIDEC, une grande école française spécialisée la province de Luxembourg parlant de logistique, il faut toutefois s’abs-
dans la logistique. Pour ce spécialiste reconnu dans le domaine, l’avenir tenir de tout triomphalisme sachant que l’espace le plus propice à tout
du secteur transport au sens large est peut-être là. développement dans le domaine ne se limite pas aux frontières de
Et finalement, pourquoi pas… notre province. Loin s’en faut... Dans l’espace géographique SarLorLux,
Interrogé par nos soins, Thierry Jean estime la logistique porteuse d’es- nous ne sommes certainement pas seuls à fonder les mêmes espoirs de
poir et d’emplois. Pour lui, notre localisation plaide manifestement en reconversion d’une main d’œuvre en quête d’emploi. De l’autre côté
ce sens, au cœur de ce que les professionnels appellent la banane bleue des frontières, des entreprises vivent déjà la logistique au quotidien. Là,
- représentation schématique d’un axe Londres-Milan symbolisant un nous l’avons évoqué, les Chambres de commerce et des écoles prépa-
positionnement géographique idéal au centre du plus grand espace de rent même les approches nouvelles du métier. Et si des potentialités
consommation de l’Europe occidentale. A l’écouter, la réussite d’un existent bel et bien ici, il ne faut surtout se bercer d’aucune illusion
projet logistique quelconque se fonde sur trois critères incontournables quant aux intentions de nos voisins.
qui semblent parfaitement correspondre à notre positionnement. Oui, la logistique peut être porteuse d’emploi… Oui, la province de
«D’une part, il est indispensable d’appuyer un tel projet sur l’accès à Luxembourg offre d’indéniables avantages en la matière... Oui, les pro-
des infrastructures autoroutières et ferroviaires de qualité, parce que le jets logistiques ont un réel avenir.
fer risque à moyen terme de jouer un rôle important. Ensuite, j’insiste Mais, pour que notre région gagne sa bataille, il lui faudra calquer sa ré-
aussi sur la disponibilité et la qualification de la main d’œuvre, parce activité sur celle du secteur qu’elle entend soutenir afin que le ballon
que les activités logistiques en sont grandes consommatrices! Enfin, il d’oxygène gonflé en province de Luxembourg n’aille atterrir bien plus
est important de s’appuyer sur des infrastructures de transmission de concrètement chez nos voisins!
données à haut débit, parce qu’elles autorisent le travail en temps réel Pour l’heure, le consensus politique semble fait, cela augure, chacun
qui permet de réduire à néant le temps de circulation des flux d’infor- l’espère, d’un devenir meilleur pour un secteur qui en a manifestement
mation entre le producteur final et le distributeur». besoin. ■
Tout semble donc réuni ici pour que la reconversion se passe ainsi.
Sans peur d’un nouveau départ!

Supplément au magazine Entreprendre aujourd’hui n°71


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