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NOTES SUR L'ANALYSE

PAR SPECTROMETRIE D'EMISSION ATOMIQUE


A SOURCE PLASMA
J.MOUTTE / DÉPARTEMENT DE GÉOLOGIE / ÉCOLE DES MINES DE SAINT ÉTIENNE

A.INTRODUCTION:
A1.Importance croissante de l'analyse chimique dans les sciences de la terre
Depuis environ un siècle, l'approche géochimique est utilisée, parallèlement à l'évolution des techniques analytiques disponibles, pour répondre à différents
types de problèmes géologiques. Ces développements peuvent être résumés de la manière suivante:
= la seule analyse possible a d'abord été celle des éléments majeurs (>0.1% en poids), elle est alors utilisée pour la définition et le classement des différents

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types de roches;
= ensuite l'analyse des majeurs et des traces a joué un rôle important dans l'étude des processus géologiques, en particulier pour la compréhension des
phénomènes magmatiques;
= plus récemment, le développement d'appareillages permettant l'analyse des éléments à des teneurs en traces (ppm*) ou ultratraces (ppb**), et celle des
compositions isotopiques des éléments a permis de multiples applications:
+= étude des interactions, à toutes les échelles (minéral, affleurement, province, croûte/manteau,...), entre les matériaux constitutifs du globe,
+= étude de l'évolution du système solaire....
*ppm=partie par million, ou gramme par tonne.
**ppb= partie par milliard ('billion'), ou milligramme par tonne.
A2.Evolution des techniques analytiques
Jusqu'aux années 50, les techniques utilisées en routine en géochimie font surtout appel à l'analyse chimique classique ("voie humide"); il s'agit de méthodes
gravimétriques, colorimétriques, et, pour les alcalins, de l'émission atomique dans une flamme.
Le principe de l'analyse chimique dite gravimétrique consiste à peser les quantités des différents éléments présents dans une roche; pour cela, on met
l'échantillon en solution et on provoque, par des réactifs spécifiques de chacun des éléments recherchés, des réactions de précipitation; les précipités ainsi
produits sont pesés.
Les méthodes développées ensuite suivent une approche est différente: ce sont des méthodes physiques,. La plus ancienne de ces méthodes est la
spectrométrie d'émission atomique (source= flamme), pratiquée dès le 19ème siècle. On a ensuite, schématiquement, les repères suivants:
• 1950/60:
• spectrométrie d' absorption atomique de flamme;
• 1960:
• microsonde électronique (émission X produite ponctuellement par un faisceau d'électrons);
• spectrométrie de fluorescence X;
• 1970:
• spectrométrie de masse/dilution isotopique;
• spectrométrie d'émission atomique à source plasma;
• spectrométrie d'absorption atomique 'sans flamme' (four);
• spectrométrie d'émission gamma (activation neutronique);
• 1980:
• spectrométrie de masse à source plasma;
• microsonde ionique, microsonde protonique (qui sont des spectrométries de masse), PIXE (émission X induite par des protons), etc

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• et cetera
Ces méthodes physiques sont pour la plupart basées sur les propriétés des interactions de la matière avec du rayonnement électromagnétique. Celui-ci va du
domaine visible aux rayons gamma: parallèlement aux développements technologiques dans les domaines des matériaux et de l'électronique, on observe que
les techniques font appel à des rayonnements de longueur d'onde de plus en plus courte, c'est à dire d'énergie de plus en plus élevée, qui permettent d'accéder à
des structures de plus en plus profondes de la matière. On est passé ainsi de l'utilisation du rayonnement visible, à l'ultraviolet, puis à celui des rayons X, et
enfin aux rayons gamma.
Les différents domaines spectraux utilisés sont les suivants:

LAMBDA DOMAINE PHENOMENE PHYSIQUE


fréquences radio, RMN, orientation des spins dans les champs
<25cm
RPE magnétiques
<400µm micro-ondes, radar rotations moléculaires, IR lointain
<3µm infra rouge vibrations moléculaires
transitions électroniques "de valence" des
<800nm visible
atomes et molécules
<400nm UV idem
transitions électroniques des couches
<20nm UV lointain
internes
transitions électroniques des couches
1nm rayons X
internes
0.1nm rayons gamma noyau
Ces interactions peuvent être exploitées de différentes façons:
en EMISSION: l'appareil excite la matière et mesure le rayonnement que celle-ci émet;
en ABSORPTION: l'appareil émet un rayonnement et mesure son absorption par la matière;
en FLUORESCENCE ou PHOSPHORESCENCE: la matière ré-émet un rayonnement après absorption.
A3.Exemples de méthodes
Photométrie de flamme

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L'échantillon, préalablement dissout par attaque acide ou par fusion alcaline, est nébulisé dans une flamme produite par combustion d'un hydrocarbure
(acétylène ou autre). Quand les atomes, portés à un état excité, retournent à l'état fondamental, des photons sont émis suivant certaines fréquences qui sont
caractéristiques des éléments présents.
Activation neutronique
Les échantillons sont soumis, dans un réacteur nucléaire, à un bombardement par des neutrons. Les noyaux radioactifs produits par cette irradiation sont
ensuite détectés par spectrométrie gamma: le rayonnement gamma est mesuré par un détecteur à semi-conducteur, dont le signal est digitalisé à l'aide d'un
analyseur multi- canaux (on parle de 'spectrométrie à dispersion d'énergie'). C'est une méthode multi- élémentaire très sensible, mais assez lourde à mettre en
oeuvre (nécessité d'accéder à un réacteur).
Spectrométrie de Fluorescence X
On envoie des rayons X, produit par un tube cathodique, sur l'échantillon. Ces rayons X 'primaires' excitent les atomes, qui en retour émettent un rayonnement
X 'secondaire', dont le spectre, caractéristique de l'atome, est analysé par un spectromètre. Le spectromètre est, suivant les appareils, à 'dispersion d'énergie'
(analogue au détecteur utilisé en spectrométrie gamma) ou à 'dispersion de longueur d'onde' (goniomètre classique à cristal).
A4.Principe de l'émission
Un atome possède un grand nombre de niveaux d'énergie possibles. Une raie spectrale résulte d'une transition électronique entre certains de ces niveaux. Les
transitions possibles pour un atome d'un élément donné sont données par les règles de la mécanique quantique.
Excitation
Une quantité d'énergie Q est transférée à un atome par collision avec une autre particule. Cet atome est 'excité', c'est çà dire qu'un électron d'une couche donnée
de l'atome est éjecté sur un niveau d'énergie supérieure.
Emission
L'atome excité est instable, il tend à revenir ensuite, en une ou plusieurs étapes, à sa configuration d'énergie fondamentale.
A chaque transition électronique correspond l'émission d'une énergie sous la forme d'un rayonnement lumineux dont la fréquence est spécifique de l'élément et
de la transition considérés.
A une transition d'un niveau d'énergie E1 à un niveau E0 correspond l'émission d'un photon de fréquence nu transportant l'énergie h . nu. (h étant la constante de
Planck):
E1 - E0 = h.nu = h . c / lambda
Suivant l'espèce qui est excitée, les raies sont appelées:
• = Raie I: émission à partir d'un atome

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• = Raie II: émission à partir d'un ion une fois ionisé
• = Raie III: émission à partir d'un ion deux fois ionisé.
Les raies I et II sont les plus couramment observées dans les plasmas d'analyse.
Élargissement des raies (d'après doc° Jobin-Yvon)
Une raie purement monochromatique donnerait un spectre constitué de lignes "verticales" sans épaisseur, mais les raies naturelles ont toujours une certaine
largeur 'physique' (i.e. sans parler de l'élargissement produit par le disperseur), qui traduit les processus suivants:
= Élargissement naturel: Traduit la durée de vie limitée des niveaux d'énergie. Suivant le principe d'incertitude de Heisenberg, l'énergie interne d'un atome
dans un état d'excitation donné sera connue avec une précision d'autant plus faible que la durée de vie de cet état est faible (à la limite, seul l'état fondamental
est parfaitement connu: sa durée de vie est infinie). Cet élargissement est négligeable devant ceux dûs à d'autres phénomènes.
Élargissement par Effet Doppler: Lié à l'agitation thermique des atomes. Pour un atome possédant une vitesse radiale v par rapport à la direction
d'observation, et effectuant une transition de longueur d'onde lambda°, la longueur d'onde observée est lambda = lambda° + (v/c).lambda°. Cet élargissement
est proportionnel à T^1/2.
Élargissements par collision: Du fait des collisions que subissent les atomes, la durée de vie d'un niveau d'excitation donné n'est plus sa durée de vie
naturelle, mais l'intervalle de temps entre deux collisions. D'où, suivant le principe d'incertitude déjà mentionné, un élargissement de raie, dont on distingue
deux types:
= Élargissement de résonance: Provient des collisions avec les atomes ou ions de même nature. Il est sensible surtout sur les éléments de la matrice.
= Élargissement de pression, ou Effet Lorentz: Provient surtout de la collision de l'atome considéré avec les atomes d'argon.
Élargissement par effets Stark et Zeeman: (mentionnés pour mémoire, peu sensibles ici).
Intensité d'une raie (tiré de Trassy & Mermet, 1984)
Lorsqu'on observe une transition entre un état excité n et un état de moindre énergie m, l'intensité totale de la raie émise est proportionnelle à:
• à la différence d'énergie En - Em
• à la population du niveau de départ n: nn
• au nombre de transitions possibles entre n et m, par unité de temps. ce nombre se définit par la probabilité de transition A, de l'ordre de 10^8 s-1 pour
les transitions optiquement observables.
L'intensité peut alors s'écrire
I = (En - Em) nn A

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avec
En - Em = hc / lambda
nn/Sum(n) = N/Z . gn . exp(-En/kT)

On aura alors, pour une raie donnée dans des conditions données, I = N . Cte, ce qui se traduit par le fait que l'intensité est proportionnelle à la concentration.
Cette formule permet également de prévoir quelles seront, dans des conditions données, les intensités relatives des différentes raies d'émission d'un élément.
B. DESCRIPTION D'UN SPECTROPHOTOMETRE D'EMISSION A SOURCE PLASMA
B1.PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT DU SPECTROMETRE A SOURCE PLASMA
L'ICP* est une méthode d'analyse par spectrométrie d'émission atomique dont la source est un plasma généré par couplage inductif.
*ICP= raccourci pour "ICP-AES"= "Inductively-Coupled-Plasma/ Atomic-Emission-Spectrometry", ou encore OES, pour Optical Emission, car les raies
analysées sont souvent des raies ioniques et pas seulement atomiques.
NOTION DE PLASMA
"Dans les années 1920, Langmuir et Tonks ont introduit le mot de plasma pour désigner un gaz ionisé électriquement neutre, produit dans des tubes à
décharge [...]. On peut considérer que le plasma constitue un quatrième état de la matière, faisant suite aux trois états solide, liquide et gaz [...]. Les plasmas
conservent certaines propriétés des gaz (compressibilité, pression proportionnelle à la température absolue, ...), par contre, les propriétés
électromagnétiques en diffèrent du fait de la présence d'électrons en mouvement". (d'après Mermet & Trassy, Rapport du CAST).
En analyse, les plasmas constituent des sources de températures plus élevées (8000 à 10000K) que celles produites par les flammes et autres décharges (arc ou
étincelle). Les plasmas ont donc été utilisés depuis les années 1970 en spectrométrie d'émission atomique, en remplacement des flammes classiques.
Le rôle du plasma, dans l'analyse par émission optique, est
= de casser les liaisons moléculaires
= pour produire des ions et atomes libres,
= et d'exciter ces particules.
Des développement plus récents (à partir de 1985) ont conduit à utiliser aussi cette source d'ions que constitue le plasma en tant que source d'un spectromètre
de masse: il s'agit alors de "spectrométrie de masse à source plasma" (ICP-MS, pour ICP Mass Spectrometry).
B2. L'APPAREILLAGE
L'appareillage comprend:

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= une source de nébulisation / atomisation / excitation de l'échantillon; elle comprend générateur H.F., torche et nébuliseur
= un dispositif dispersif (monochromateur et/ ou polychromateur) pour analyser le rayonnement émis par l'échantillon;
= un ensemble électronique / informatique pour la gestion des spectromètres et l'exploitation des données.
Schéma d'un appareillage d'analyse par émission: source/ dispersion/ détection:

B2A. LA SOURCE
La source comprend les éléments suivants:
• -le générateur de courant alternatif à haute fréquence (ici 56 MHz, avec une puissance maximale de 2200 W);
• -le solénoïde d'induction couplé à ce générateur;
• -la torche, qui est un ensemble de tubes concentriques, en quartz, où circulent différents flux d'argon et le nébulisat;
• -l'ensemble de régulation des débits d'argon;
• -le dispositif de nébulisation de la solution à analyser.
LA TORCHE
La torche proprement dite est constituée de trois tubes,
• = entre le `tube extérieur' et le `tube intérieur' (tous deux en quartz) circule le débit d'argon principal (ou `plasmagène');
• = au centre de la torche est situé l' `injecteur', petit tube en alumine servant à introduire le nébulisat dans le plasma.

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Principe de fonctionnement de la 'torche'
Le passage d'un courant alternatif de haute fréquence dans la bobine d'induction engendre un champ magnétique oscillant dont les lignes de forces sont
orientées suivant l'axe à l'intérieur du tube de la torche, et des courants de Foucault induits circulent dans les plans perpendiculaires à l'axe de la bobine.
L'argon, une fois ionisé à l'allumage par l'introduction d'une pièce métallique à l'intérieur des spires, joue le rôle de conducteur, et sa résistance aux courants
induits se traduit par un échauffement par effet Joule. Le plasma H.F. est ainsi constitué d'argon partiellement ionisé (densité d'ionisation relativement faible:
environ 1/10000) porté à une température élevée (6000 à 10000 K).

emission zone
Le plasma est donc un milieu à très haute température qui sert ici:
magnetic field
• -à atomiser le nébulisat (suspension de très fines gouttes liquides dans l'argon de
induction coil
nébulisation);
• -à ioniser partiellement et exciter les atomes.
plasma
Les hautes températures permettent de détruire complètement les liaisons moléculaires, et de
s'affranchir des 'interférences chimiques' observées dans les sources moins chaudes (flammes).

LA NEBULISATION
Le nébulisat est produit par un ensemble comprenant, d'amont en aval: quartz tubes

• -une pompe péristaltique, qui permet d'obtenir un débit de solution indépendant de sa


viscosité; 'plasmagen' argon
• -le nébuliseur, ici de type concentrique (type Meinhard),
• -la chambre de nébulisation (ici chambre Cyclone) qui sert à éliminer les grosses gouttes pour
obtenir un aérosol fin et régulier; aerosol
• -le `gaineur d'aérosol' qui a pour rôle de gainer l'aérosol par un courant d'argon avant son
passage dans l'injecteur, et d'éviter ainsi que celui-ci garde mémoire de l'échantillon précédent..
De plus, l'argon de nébulisation, avant de passer dans le nébuliseur, passe dans l' 'humidificateur d'argon' (réservoir à moitié rempli d'eau déionisée), de façon
à éviter une cristallisation de la solution à la sortie du nébuliseur (phénomène couramment observé quand une solution chargée en sels arrive au contact d'un
argon sec).

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6000 K ionic line
IONS emission
IONISER excitation
7000 K
atomic line
ATOMES emission
ATOMISER excitation
9000 K

GAZ
VAPORISER

SOLIDE (SELS)
DESOLVATER

GOUTTELETTES
NEBULISER
SAMPLE
SOLUTION

B2B. LES SPECTROMETRES


Après leur passage dans le coeur du plasma, les atomes et les ions qui ont été excités émettent, en retournant à des états de niveau d'énergie moins élevé, un
rayonnement lumineux. La partie émise dans le domaine UV-Visible est analysée par le dispositif optique.
Le dispositif optique est constitué, dans le spectromètre considéré ici (JY70), de deux unités placées de part et d'autre de l'émission à observer:
- un polychromateur, qui permet de mesurer l'intensité lumineuse simultanément sur plusieurs longueurs d'onde caractéristiques des éléments à analyser,
- un monochromateur qui n'analyse qu'une longueur d'onde à la fois.
L'équation générale de la diffraction par un réseau s'écrit
(sin(incid)+ sin(reflect))*d=n*lambda

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avec:
• = incid: angle d'incidence du faisceau;
• = reflect: angle de diffraction;
• = (ces deux angles sont mesurés par rapport à la normale du réseau);
• = d: espacement des traits du réseau;
• = n: ordre de diffraction;
• = lambda: longueur d'onde de la lumière incidente;
Cette relation donne, pour une incidence normale au plan du réseau, sin reflect*d=n*lambda; la dispersion angulaire du réseau est alors donnée par:
d(reflect)/d(lambda)=n/(d*cos(reflect)).

Le polychromateur
Le polychromateur est construit suivant un montage dit de Paschen Runge. Tous les éléments du montage sont fixes, et situés sur un cercle, dit 'cercle de
Rowland':
• -la source à analyser (fente primaire);
• -le réseau concave (ici réseau holographique de 3600 traits/ mm), tangent au cercle, et de rayon de courbure égal au diamètre du cercle;
• -et les différentes images diffractées par le réseau.
C'est donc sur ce cercle que l'on place, à la construction, les fentes secondaires. Les intensités récoltées sur ces fentes sont mesurées par des
photomultiplicateurs.
Le monochromateur
Du fait des hautes températures d'excitation, les spectres d'émission des atomes sont en général très riches. Les interférences optiques ne pourront donc être
évitées qu'à condition d'avoir un dispositif dispersif de très haute résolution. L'appareil utilisé est un monochromateur JY 38 VHR dont les caractéristiques
sont les suivantes:
• = montage Czerny-Turner; focale 1 mètre;
• = réseau holographique de 120 par 140 mm, à 3600 traits/mm,
• = résolution théorique 504000, dispersion linéaire 0.266nm/mm dans le 1er ordre.
Le monochromateur suit un montage de Czerny-Turner: le signal de la fente d'entrée est envoyé par un miroir sur un réseau de diffraction plan (holographique,
3600 traits/mm), qui le renvoie sur la fente de sortie par l'intermédiaire d'un deuxième miroir. Un 'photomultiplicateur', placé en face de la fente de sortie,
mesure la lumière reçue à la sortie.

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L'orientation du réseau est contrôlée par un moteur pas à pas. Ce système de dispersion fonctionne systématiquement en balayage, non seulement pour passer
d'une raie à une autre, mais aussi, sur chaque raie, pour caractériser précisément la position du pic.
Schéma d'un montage Czerny-Turner

La bonne luminosité de ce 'disperseur' permet de l'utiliser en routine avec


des fentes d'entrée et sortie de 40 microns, même pour les traces, ce qui
donne un intervalle spectral résolu de 0.01 nm. Cela permet de résoudre de miroir
nombreuses interférences difficiles à résoudre par d'autres appareils. Le fente de sortie
domaine spectral analysable est 200-550 nm (en dessous de 200 nm la purge sortie
du spectromètre à l'azote devient nécessaire). La limitation à 550 nm interdit
le dosage des alcalins avec le JY 38 VHR. réseau de
Sur l'appareil acquis ultérieurement (JY138 Ultrace), le réseau est à 2400 diffraction
traits / mm; le spectre accessible s'étend alors jusqu'à 800 nm, ce qui permet
de mesurer les alcalins. miroir
fente
Les deux systèmes optiques sont complémentaires: d'entrée entrée

polychromateur
• Système très rapide, puisque tous les éléments sont analysés
simultanément;
• Reproductibilité très bonne puisque les positions de mesure sont figées et qu'on peut se permettre des temps d'intégration du signal de plusieurs
secondes (ce qui a pour effet d'intégrer les fluctuations de la source à court terme).
• Par contre, c'est un système qui manque de souplesse puisque les éléments à analyser sont choisis au moment de la commande et montés en usine;
• En outre, comme son pouvoir de résolution est relativement faible (il a le même réseau que le séquentiel, en terme de nombre de traits par mm, mais
une focale deux fois plus courte, et un réseau d'autant moins large), un certain nombre d'interférences majeurs/ traces sont trop importantes pour être
bien corrigées par calcul
monochromateur
• Optique plus lente et moins précise (du point de vue de la reproductibilité en longueur d'onde),
• mais indispensable pour résoudre les problèmes de résolution.
• Son utilisation est indispensable pour le dosage de certaines traces (en particulier les terres rares) dans les matrices complexes (roches basiques et

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intermédiaires).
C. INTRODUCTION AUX PROCEDURES DE CORRECTION
Comment passe-t-on des intensités lumineuses mesurées aux concentrations dans la roche ?
Il n'y a pas, en analyse par émission ICP, de méthode de correction 'intrinsèque' qui permettrait de mesurer la concentration directement à partir du signal: on
travaille toujours par comparaison avec des échantillons 'étalons' dont on connaît les teneurs dans les éléments recherchés.
Le principe de la méthode de correction est simple:
• d'une part, on sait par expérience que l'intensité lumineuse sur une raie analytique donnée est, sur un très large domaine de concentration (jusqu'à 10^5 fois
la limite de détection), directement proportionnelle à la concentration de l'élément correspondant dans la source.
• de plus, à la différence d'autres méthodes d'émission atomique utilisant des décharges de plus basse température (flamme, plasma micro-ondes), les liaisons
moléculaires sont cassées, du fait des très hautes températures d'excitation, et tous les éléments sont atomisés ou ionisés; ainsi, il n'y a pratiquement pas
d'effets 'de matrice': on effectue donc les corrections sur les différents éléments indépendamment les uns des autres, en construisant pour chacun une droite
d'étalonnage à partir de deux points:
• un point zéro, correspondant à une solution réputée pure, et de même acidité que les échantillons analysés,
• un point haut, correspondant à une solution contenant, dans une matrice de même acidité que les échantillons, des teneurs moyennes dans les
différents éléments recherchés.
On doit rappeler cependant que la linéarité de la courbe de réponse (intensité vs concentration) est limitée à environ cinq ordres de grandeur: on observe que,
pour un élément donné, à partir de 10^5 fois la limite de détection, l'intensité mesurée ICP est inférieure à ce que donnerait une réponse linéaire. Cette
courbure traduit un phénomène d'auto-absorption: si l'élément est présent à forte concentration dans le plasma, le rayonnement émis par un atome tend à être
réabsorbé par d'autres atomes du même élément. Pratiquement, dans l'analyse d'échantillons de roches, c'est avant tout pour quelques éléments majeurs que cet
effet est à prendre en considération. Sur le magnésium, le plus sensible en ICP-AES parmi les 'éléments majeurs', cet effet apparaît à partir d'environ 2.5%
MgO en roche dans le cas d'une dilution à 100.
On doit noter également que des 'effets de matrice' apparaissent sur certains éléments 'réfractaires' présents en grande quantité (par exemple, en géochimie, sur
l'aluminium). La pente de la droite de réponse doit alors être ajustée en fonction des concentrations des autres éléments majeurs coexistants.
Ce premier stade de correction nous donne les teneurs brutes des éléments dans la solution.
Il faut ensuite prendre en compte les interférences spectrales. On peut en distinguer deux types:
• interférences entre pics: le pic de l'élément à analyser est situé à proximité d'un pic d'un autre élément;
• interférence pic/ fond: l'élément interférant provoque une montée du fond dans la zone où se trouve le pic analysé (exemples: interférence de Al sur
W, de Ca sur Eu, ...).

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Les interférences du deuxième type sont déjà prises en compte au moment de l'analyse quand on mesure, pour chaque élément, successivement le pic, et le
fond à une distance donnée à gauche ou à droite du pic.
Pour corriger les interférences entre pics, l'expérience montre qu'une simple soustraction donne de bons résultats: pour corriger l'interférence sur l'élément X
d'un élément Z dont on connaît par ailleurs la teneur, on soustrait à la teneur de X l'interférence produite par Z:
Teneur[X]:= Teneur[X] - Teneur[Z] * Coeff_Interf[Z][X],

où Teneur contient les teneurs des éléments mesurés au premier stade de correction, et le tableau Coeff_Interf les coefficients d'interférence. Pour connaître
cette table des interférences, on a mesuré des échantillons synthétiques mono-élémentaires correspondant aux différents éléments dont on a reconnu, au cours
des études spectrales préliminaires, qu'ils provoquaient des interférences significatives sur les éléments traces étudiés.
D.INTRODUCTION A LA SEPARATION DES TERRES RARES SUR RESINES CATIONIQUES
D1. Pourquoi déterminer les teneurs en terres rares des roches?
On désigne par 'terres rares' la série d'éléments qui va du Lanthane au Lutétium dans la classification périodique. A ces éléments, appelés aussi lanthanides, on
rattache également l'Yttrium, et à un moindre degré le Scandium. Ces éléments constituent une série de transition: cette transition correspond, dans les
structures électroniques, au remplissage progressif d'une sous-couche 4f. Ces électrons n'étant pas en jeu dans les liaisons chimiques, les terres rares ont
propriétés géochimiques globalement similaires, avec en particulier une tendance générale à un état d'oxydation trivalent. L'évolution de la structure
électronique se traduit par une diminution régulière, du Lanthane au Lutétium, du rayon ionique. Comme ces deux paramètres, valence et rayon ionique,
exercent un contrôle prépondérant sur l'entrée des éléments dans les structures cristallines de type ionique que sont les silicates, on comprend que les terres
rares aient avec les différentes structures minérales des comportement assez systématiques.
D2. Pourquoi séparer les terres rares?
Pour la plupart des roches, les limites de détection obtenues en ICP permettent d'analyser, directement dans la solution obtenue par une attaque de la roche, un
nombre suffisant de terres rares pour avoir une idée générale (par exemple, mettre en évidence un fractionnement entres terres rares légères et terres lourdes
dans une série de roches). Cependant, pour obtenir un spectre plus complet, qui permettra une modélisation plus poussée, il est nécessaire de séparer, par
traitement chimique préalable de la solution, les terres rares d'éléments majeurs susceptibles, tels que Fe ou Ti, d'interférer sur certaines terres rares.
D3. Principe de la séparation par échange ionique:
La méthode la plus couramment utilisée pour séparer, dans une solution, les terres rares de la plupart des autres éléments est la séparation sur résines
échangeuses de cations. Ces résines consistent en un support solide (ici de petites billes en styrène divinylbenzène) sur lequel sont greffés, par des liaisons
covalentes, des 'groupements fonctionnels' de charge négative (ici de l'acide sulfonique). Les différents éléments ont des affinités plus ou moins fortes avec une
résine donnée. Dans le cas de la résine 'cationique' (= échangeuse de cation) utilisée ici, les terres rares ainsi que Zr, Hf ont les coefficients de partage résine/
solution les plus élevés, beaucoup plus élevés que les éléments (principalement Ti et Fe) qui provoquent les plus fortes interférences dans l'analyse par ICP.

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L'équipement utilisé est simple: il s'agit d'une colonne de 0.6cm de diamètre sur 6cm de long, contenant la résine échangeuse d'ion, surmontée par un réservoir
ce 10ml de capacité.
La séparation se déroule en plusieurs stades. [les volumes de solution utilisés sont donnés ci-dessous en nombre de volumes de résine]
• 1. équilibrer la résine avec une solution chlorhydrique de normalité équivalente à celle de la solution à traiter (ici HCl 1.5 M) ; pour ce faire, on fait
passer 3 volumes de HCl 1.5M; les 'groupements fonctionnels' sont alors chargés en ion H+.
• 2. charger la solution: 2 volumes de la solution à traiter sont passés à travers la résine; à ce stade, les cations ou les complexes cationiques contenus
dans la solution prennent la place des ions H+ sur les sites échangeables de la résine.
• 3. éliminer les éléments majeurs: 2 volumes de HCl 1M, suivis de 2 volumes de HNO3 1M, ont pour effet de refaire passer en solution les éléments à
faible coefficient de partage, en particulier les éléments à éliminer. Les terres rares sont également affectées par ce processus, mais, du fait de leur
affinité plus élevée pour la résine, elles n'atteignent pas la sortie de la colonne de chromatographique.
• 4. récupérer les terres rares: 6 volumes de HNO3 6M ont pour effet de nettoyer complètement la résine et d'entraîner les terres rares vers la sortie de
la colonne.

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