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L’application généralisée à partir des années 1980 des prescriptions imposées par les

institutions financières internationales (Banque Mondiale, FMI) en faveur des plans d’ajustement
structurel en vue de la stabilisation, du rétablissement des grands équilibres macro-économiques et
de la relance de la croissance, ont engendré des conséquences sociales désastreuses, avec
notamment l’aggravation de la pauvreté et l’accélération du processus d’informalisation de
l’économie dans les pays en voie de développement, dont certains sont aujourd’hui classés parmi les
pays pauvres très endettés.

A l’évidence, la pauvreté entretient des liens de causalité et de proportionnalité directes avec


l’expansion des activités informelles dans les pays de l’Afrique subsaharienne francophone. Le
secteur informel occupe 50 à 80% de l’emploi urbain, et sa contribution au produit national brut tend
à s’accroître, le plaçant souvent en deuxième position après l’agriculture, mais devant le secteur
moderne. L’économie informelle joue ainsi un rôle appréciable et de plus en plus apprécié par les
gouvernements et les partenaires au développement, qui se trouvent placés devant le dilemme
suivant: comment faciliter son intégration progressive dans l’économie et les institutions nationales, de
manière à accroître ses performances et améliorer la protection sociale des travailleurs, sans pour
autant réduire sa capacité d’absorber de la main-d’oeuvre et de générer des revenus?
Il ressort des enseignements tirés de la mise en oeuvre des nombreuses initiatives
gouvernementales et non gouvernementales entreprises pour l’amélioration du sort des travailleurs du
secteur informel avec l’appui de la coopération internationale et de l’OIT en particulier que: "s’ils
sont bien orientés et appliquent des méthodes offrant aux couches défavorisées les moyens d’influer
sur les décisions qui affectent leur existence, les programmes d’appui au secteur informel peuvent
s’avérer beaucoup plus efficaces en matière de promotion de l’emploi, de la production et de la lutte
contre la pauvreté que certains programmes en faveur du secteur moderne"

La Recommandation n° 169 de l’OIT concernant les politiques de l’emploi ainsi que les
dispositions complémentaires adoptées en 1984, appellent les pays à reconnaître l’importance du
secteur informel comme source d’emplois et à chercher à lui étendre progressivement des mesures
de réglementation. Les mesures à préconiser doivent plus généralement tenir compte de l’ampleur,
de la complexité et de l’hétérogénéité qui caractérisent les activités informelles.
Pour élaborer une politique adaptée à l’économie informelle, il y a une nécessité première de
collecter des informations pertinentes et fiables permettant de connaître sa taille, sa structure, ses
modalités de fonctionnement, de même que les contraintes et potentialités résultant des formes
spécifiques d’exploitation des diverses activités artisanales ou commerciales, entre autres. Tant que
les micro-entreprises informelles n’auront pas au préalable bénéficié d’une politique de promotion,
leur offrant de nouvelles perspectives d’insertion dans l’environnement économique et institutionnel, il
semble irréaliste de vouloir leur appliquer une législation contraignante, onéreuse et à maints égards
inadaptée à leur mode de fonctionnement.

Il s’agit plutôt en la matière de songer à une réforme du système légal pour éliminer les
restrictions et lourdeurs des procédures en vigueur, afin d’intégrer tous les travailleurs au sein d’une
nouvelle légalité à définir, dans le cadre d’un dialogue social qui implique des organisations que les
acteurs du secteur informel auront créées eux-mêmes, ou choisies pour les représenter. Il importe,
d’autre part, de développer l’éducation et la formation afin de lutter contre l’exclusion, d’améliorer la
rentabilité des entreprises, l’employabilité et la productivité des travailleurs, afin de transformer
progressivement les activités informelles dans l’optique du travail décent.

A ce sujet, le Secrétaire Général de l’ONU déclarait dans son rapport au Sommet du


Millénaire de septembre 2000 que ‘‘l’une des huit modalités prioritaires de lutte contre la
pauvreté est de définir des stratégies qui permettent aux jeunes du monde entier de trouver un emploi
décent’’. Alors que le Directeur Général du BIT considérait devant la 89ème session de la
Conférence internationale du Travail (2001) que la réduction du déficit de travail décent constituait
un défi mondial au seuil du 21ème siècle, et que c’était aussi la meilleure voie pour faire reculer la
pauvreté et donner à l’économie mondiale une plus grande légitimité.
Les stratégies de promotion du travail décent, dans le contexte économique des pays de
l’Afrique subsaharienne francophone, doivent privilégier des approches concertées et intégrées et
éviter de vouloir à tout prix formaliser l’informel ou, encore moins, informaliser le formel. Il s’agit
plutôt de trouver des instances de régulation adéquate, d’appliquer les mêmes normes et principes
juridiques, mais avec des tolérances et des pratiques tenant compte des spécificités des activités
informelles et, plus particulièrement, de l’augmentation rapide et préoccupante des effectifs féminins
dans les activités précaires de survie du secteur informel.
Discriminées et minoritaires dans l’emploi formel, majoritaires dans le secteur informel où elles
sont cependant confinées pour l’essentiel dans des activités peu productives et mal rémunérées, les
femmes constituent un groupe certes vulnérable, mais suffisamment motivé et mobilisé qui doit faire
l’objet d’une sollicitude particulière dans les stratégies de développement qui se déclinent
présentement en Afrique subsaharienne francophone à travers des programmes de lutte contre la
pauvreté urbaine et rurale.

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