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AS Promotion 2021

Corinne Hommage, Responsable de Formations, IRTSNA


COURS « Approches territoriales »

Territoires, Territorialité, Territorialisation :

Construction et organisation des territoires

Introduction

1- Territoire(s) : approche conceptuelle

2- Territorialité

3- Territorialisation : les territoires de l’action publique

Bibliographie
PPT en appui

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Corinne Hommage, Responsable de Formations, IRTSNA
COURS « Approches territoriales », AS 2021

Territoires, Territorialité, Territorialisation :


Construction et organisation des territoires

Introduction

L'approche du territoire invite à croiser des données géographiques, les pratiques et


actions en un lieu dans l'intention de le modifier, de l'adapter, de le transformer. Cela
renvoie aussi aux usages et aux conflits d'usage, aux modes d'habiter, aux enjeux de
ressources. Simultanément la territorialisation des politiques publiques, le
développement du marketing territorial lié à la mise en concurrence d'espaces
productifs, la valorisation sociale du territoire comme ressource économique,
identitaire ou affective, ont conduit à une prolifération du mot territoire et de
néologismes dérivés comme : intelligence territoriale, innovation territoriale...

La notion de territoire recouvre deux acceptions : étendue d’un espace approprié par un
individu ou une communauté et espace délimité sur lequel s’exerce l’autorité d’un Etat
ou d’une collectivité ; en France, les communes, les régions, les départements sont les
trois niveaux de collectivité territoriales (+ intercommunalités)
Ces deux approches renvoient d’une part à l’idée d’appropriation et d’identité
collective (R. Brunet, 93), d’autre part à l’idée d’autorité politique (M. Weber) où le
territoire est consubstanciel à l’Etat, cette activité se déroulant dans les limites du
territoire qu’il domine ; le territoire a une existence juridique, administrative et
politique.
Dans les deux cas la notion de territoire n’est pas seulement spatiale mais implique une
dimension temporelle d’appropriation et de constitution du territoire, qui peut avoir été
très longue, tel qu’il est reconnu aujourd’hui. Le territoire est une partie de soi, un
ensemble d’usages et de rapports sociaux; constitutif de l’individu et non simplement
un lieu de vie. Il est par conséquent sensible à toute intervention le concernant; aussi
une approche territoriale n’est jamais une simple affaire de gestion mais toujours une
réflexion et une action politique complexe, où le territoire doit se penser comme une
globalité.

En principe, et dans les différentes acceptions, la notion de territoire implique celle de


limites précises (frontières avec les territoires limitrophes). Dans le domaine de
l’aménagement, la notion de territoire est surtout liée au territoire national qui est
l’objet des politiques d’aménagement du territoire. Le territoire constitue un échelon
réaliste en termes d’efficacité dans la socialisation des individus, le premier lieu
d’expérience concrète de l’existence de la société. Poser le territoire comme instance de
proximité pour l’usager, c’est le penser aussi bien sur le plan privé que public; c’est une
des conditions de la pérennité de l’existence d’un espace public, celui-ci étant au
fondement des sociétés (J. Habermas).
Le territoire s’appréhende dans une double approche, quotidienne et institutionnelle: la
socialité primaire et la socialité secondaire fonctionnent bien comme registres du
social, leurs rapports participent d’un tout, l’ensemble fait sens (A. Caillé).

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1- Territoire(s) : approche conceptuelle

Le concept de territoire est apparu il y a plus de 20ans dans la production scientifique de


géographes (Raffestin, Roncayolo, Brunet, Frémont, Sack…), de sociologues (Marié,
Barel, Ganne…), d’économistes (Beccatini, Bagnasco, Brusco, Triglia…) et d’autres
auteurs en sciences sociales (Alliès, Lepetit…) avant de connaître une formidable
diffusion dans le domaine des sciences et surtout dans celui de l’action publique et
collective.
Le concept de territoire est toujours fortement référé à la géographie ; mais des origines
juridiques, ethnologiques sont également à prendre en compte.

Parmi les nombreuses approches du concept de territoire proposées en géographie, un


premier usage consiste à faire du territoire un quasi-synonyme d'espace, incarné dans
des réalités non exclusivement géographique telle que l'histoire; un 2ème usage réduit
la notion de territoire à celle d'attribut de l'Etat, dans une approche géopolitique des
relations internationales; dans cette perspective le T est une surface contrôlée, encadrée
et organisée par un Etat.
La fonction politique consiste à garantir la cohésion d’un groupe social et à en réguler
les tensions internes. L’Etat, ensemble d’institutions est alors un acteur spatial en ce
qu’il installe un emboîtement des pouvoirs (avec ses représentants déconcentrés jusque
dans les plus petites circonscriptions), un maillage des services à la population, un
quadrillage par les forces de sûreté, et tout autre aménagement spécifique.
La fonction géopolitique consiste à garantir l’existence de sécurité d’une société face à
d’autres Etats. L’Etat est un acteur spatial en ce qu’il traite de façon particulière les
espaces de confins et de frontières du T national, en ce qu’il est présent à l’extérieur
dans le but de prévenir les risques pesant sur celui-ci ou sur les individus expatriés, et
qu’il mène plus généralement une politique d’influence.

D'autres propositions ont en commun d'associer au T l'idée d'appropriation.


3 axes ont été particulièrement explorés : la relation culturelle qu'un individu ou un
groupe entretient avec un ensemble de lieux et d'espaces ; la relation de pouvoir par
laquelle l'individu ou le groupe développe une capacité d'aménager et d'ordonner un
espace ; enfin la relation de coordination par laquelle des acteurs fabriquent de
nouveaux espaces économiques (technopôles, districts industriels...).

Nous pouvons distinguer trois grandes conceptions du territoire, qui traduisent les
différentes modalités de mise en oeuvre des politiques publiques :
. la conception objectiviste, fait du territoire un espace caractérisable au moyen de
critères et de paramètres qui en fondent la singularité, la cohérence, la spécificité
(situation géographique, population, activités, problèmes sociaux, économiques...).
. la conception instrumentale du territoire, celui-ci étant avant tout un espace
d'efficacité pratique souvent lié à une problématique d'échelle où le local constitue le
niveau pertinent de l'action notamment en matière de développement. On localise pour
plus de proximité, pour une plus grande efficacité ou souplesse, comme leviers
d'intervention.
. la conception "politique" du territoire, celui-ci étant conçu comme espace de légitimité
(ou de légitimation) : compétence ou mandat à intervenir (commune, département...);
inscription d'une politique (territoire des ZAC, ZEP, zones franches...) ; espace
démocratique (reconnaissance de droits: comité de quartier...).
Ces dimensions se mêlent le plus souvent permettant une globalité de traitement. En

3
matière d'action sociale le territoire des politiques publiques est donc
multidimentionnel. Quelque soit la dimension géographique comme le degré
d’institutionnalisation d’un territoire, il est toujours, du point de vue des sciences
sociales, ce qui articule un espace physique et un pouvoir politique (au sens large du
terme). Cette dimension politique est présente dans un sens plus récent de l’emploi du
terme territoire : ce qui est capable de fonder des appartenances et des identités.
Lorsque l’on tente de rendre compte d’un « processus d’objectivation » (cf démarche
de diagnostic territorial) portant sur une population localisée géographiquement, on se
situe dans un registre territorial ; de ce fait faire la genèse d’un territoire c’est
s’interroger sur la « réalité » même de ce territoire car il s’agit de situer dans le temps sa
création, de relater son élaboration institutionnelle et sa construction identitaire. Le
territoire, constitutif de l’individu, et non simplement lieu de vie, laisse présager une
extrême sensibilité à toute intervention le concernant.

= On peut donc parler de T à propos d'un ensemble de lieux quand il fournit à un


individu ou un groupe des repères pour vivre, à travers la relation symbolique qui
associe aux lieux des significations ; et quand il permet à l'individu ou au groupe de
répondre à la question “qui suis-je”?, ou “qui sommes nous? (question identitaire).
Il est un attribut singulier, emblématique pour l'individu ou le groupe, qui peut être
amené à en afficher des représentations lorsqu'il entre en rapport avec d'autres.

*
Autres notions :
• Paysage : associé au T le concept de paysage renvoie à l’idée de valeur :
valeur d’usage (familiarité, patrimoine), valeur marchande, valeur
d’intégration (paysages symboliques) (Brunet). La sensibilité à la
dégradation de la qualité des paysages a conduit à mettre en place des
mesures de protection dès 1906 en France (lois sur les sites et monuments
naturels à caractère artistique) et des mesures de préservation dans le cadre
du Code de l’urbanisme et du Code rural notamment. La prise en compte du
paysage est partie intégrante de l’aménagement et de la gestion du T :
insertion de grandes infrastructures, maîtrise de l’image identitaire…

• Milieu/environnement : ensemble des éléments et des propriété


physico-chimiques qui constituent le cadre de vie d’un individu ou d’1 groupe
social. La problématique sous-jacente est celle des rapports entre els hommes et
la nature. Le concept d’environnement rapporté à celui de T prend 2 sens : l’1
culturel l’autre politique. Au sens culturel l’E est une relation qui se réalise
entre 1 société et un cadre de vie. Au sens politique l’E est un ensemble
d’éléments et de qualités interprétés par une société comme autant de ressources
à rendre accessible, à protéger, à valoriser ou à préserver, en tout cas à gérer
dans le cadre d’une politique territoriale. Ex : SCOT, doc de planification
urbaine élaboré à l’échelle d’un bassin d’activités comprend un projet
d’aménagement et de développement durable établi à partir d’un diagnostic de
territoire.

• Aménagement : ce concept sert à décrire, comprendre et évaluer la part d’action


volontaire et réfléchie d’une collectivité sur un espace ainsi que le résultat de
cette action. Il a pour but d’organiser l’espace des sociétés à différentes
échelles, en fonction de besoins identifiés et hiérarchisés. Il se réalise en
4
opérations et projets dont la responsabilité politique est encadrée par un
ensemble de lois et de règlements.

• Développement durable
Aujourd’hui des questions de soutenabilité ou de modèles de développement
sont en débat, interrogeant la responsabilité, le vivre ensemble, la prévention
des risques.
La notion de développement durable trouve son fondement dans la Conférence des Nations
unies sur l’Environnement de Stockholm en juin 1972. Au cours de cette conférence, devenue
historique, est adoptée une déclaration qui marque une première étape essentielle d’un
processus désormais irréversible de négociations, conférences, accords, protocoles et
engagements internationaux sur les questions environnementales. C’est d’ailleurs à cette
époque qu’ont été créés la plupart des Ministères de l’environnement.
Le concept d’éco-développement sera peu à peu abandonné au profit du concept de
« développement durable », terme utilisé pour la première fois en 1980, lors d’un congrès d’une
ONG écologiste, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
Gro Harlem Brundtland, alors ministre de l’environnement de Norvège, en 1987 dans le cadre
d’une Conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement « Notre futur
commun », qu’elle préside, fait écho aux préoccupations exprimées pour la première fois en
1972, lors de la conférence des Nations unies de Stockholm.
Le Rapport Brundtland , « Our common future » soumis à l’Assemblée générale des Nations
Unies de 1987, introduit la notion de développement durable, démarche globale consistant à
« répondre aux besoins du présent sans compromettre la possibilité pour les générations futures
de satisfaire les leurs ». Ce mode de développement applicable à tous échelons du global au
local, du collectif à l’individuel doit permettre de réduire les écarts de développement
économiques entre les régions du monde, de lutter contre les inégalités d’accès à la santé et à
l’éducation, de résoudre les problèmes environnementaux.

Le concept de « besoin » défini dans la suite du rapport, désigne « les besoins essentiels des
plus démunis, auxquels il convient d’accorder la plus grande priorité : alimentation, emploi,
énergie, eau, hygiène. Ainsi dès la publication du rapport Brundtland, développement durable
et développement humain sont-ils explicitement associés ; le développement économique y est
considéré comme une condition nécessaire à la lutte contre la pauvreté, elle-même considérée
comme préalable indispensable à la résolution des problèmes écologiques.
Lors de la Conférence de Rio en juin 1992, sont énoncés 21 principes du développement
durable constituant la déclaration de Rio, articulés autour de trois notions fondamentales :
- la reconnaissance d’un droit au développement (principe d’équité intergénérationnelle et
intragénérationnelle)
- la reconnaissance d’un principe de responsabilité et d’un devoir de solidarité entre les Etats
(précaution environnementale, prévention des risques, coopération en matière de
développement économique, élimination de la pauvreté, information et participation des
citoyens aux processus de décisions)
- l’intégration de l’environnement dans le processus global de développement (« la protection
de l’environnement ne peut être considérée isolément »).

Un triple impératif est fixé au développement durable: de respect des interdépendances entre
générations, d’ouverture de l’économie sur les sphères qui l’englobent, de soumission à des
valeurs que l’économie (moyen et non finalité) ne saurait produire.
Le développement durable repose sur des principes fondamentaux dans une vision intégrée
(articulation des « 3E » : environnement, économie, équité): Précaution – Prévention – Responsabilité
- Participation – Solidarité – Subsidiarité.
L’Agenda 21 (1992) ou programme « Action 21 », adopté à Rio, constitue un plan d’action
mondial qui doit être mis en œuvre pour appliquer les principes de la Déclaration de Rio et par
delà le 21e siècle (d’où son nom). « C’est un programme dynamique qui pourra évoluer avec le

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temps en fonction des besoins et des circonstances. Il marque la naissance d’un nouveau
partenariat mondial pour le développement durable » (extrait du préambule), en effet l’écart
entre les pays riches et les continents ou pays les plus pauvres n’a cessé de s’accroître : le
revenu moyen des pays les plus riches est trente sept fois plus élevé que celui des vingt pays les
plus pauvres, écart qui a doublé au cours des quarante dernières années. Les écarts de niveaux
de vie au sein même des pays sont également en voie d’aggravation, non seulement dans des
pays à croissance accélérée, mais aussi dans les pays les plus industrialisés, provoquant des
situations d’exclusion et de violence.)1.
La notion de « décroissance soutenable et conviviale » constitue un des fondements de
l’écologie politique, courant de pensée écologiste inspiré des travaux de l’économiste bulgare
Nicholas Georgescu-Roegen. Le rapport du Club de Rome (1972) reposant sur le modèle global
de Jay W. Forrester2, souligna qu’une croissance matérielle immodérée détruisait le milieu
naturel : dans cette acception le développement se dissociait alors de la croissance. Joseph
Stiglitz3 (Prix Nobel d’Economie en 2001) montre abondamment combien la logique issue de
la pensée libérale (essentiel de la doctrine) peut être destructrice des sociétés humaines. Avec
l’ouverture des frontières aux mouvements de capitaux et de marchandises, la réduction du rôle
de l’Etat au profit d’intérêts privés, la primauté absolue de la régulation marchande,
l’instrumentalisation de la finalité humaine et finalisation de l’instrument économique, il en
résulte la concentration des capitaux et le déplacement des lieux de pouvoir économique du
niveau des nations à celui de la sphère financière internationale. L’approche néo-libérale évolue
dans un univers dominé par le nominal et le court terme ; toute sa stratégie consiste à réduire la
reproduction des trois sphères à celle du seul capital. Pour l’auteur, désormais la rationalité doit
s’apprécier dans le champ des finalités humaines4.
Pour Serge Latouche même avec la notion de « croissance zéro » prônée dans les années
soixante dix par les économistes du Club de Rome, l’humanité consommera son capital de
ressources : « il faut renoncer à l’imaginaire économique et à sa croyance selon laquelle « plus
= mieux » ». Dans ce contexte le développement durable est « un des concepts le plus
nuisible » : « le développement est proclamé durable, donc implicitement sans effets négatifs ;
il est consacré comme le modèle absolu à généraliser sur l’ensemble de la planète », d’où
l’équivoque de l’expression développement durable. « On appelle oxymore (ou antinomie) une
figure de rhétorique consistant à juxtaposer deux mots contradictoires : le développement
durable est une telle antinomie ». « On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui
les ont engendrés » (A. Einsten).
Ce concept humaniste et politiquement correct5 est la traduction contestable mais pas innocente
de la terminologie anglo-saxonne (« sustenable developpement »), le terme est polysémique
mais son interprétation est très écologique; la souplesse complaisante qui entoure la définition
du terme renvoie à la croissance classique avec des correctifs environnementaux (concept
mystificateur). Sur le plan juridique le développement durable est ambivalent : proclamé à la
conférence de Rio, il est inscrit à l’article 130-R du traité de Maastricht sous la forme de
« croissance durable ». Seul le concept d’équilibre durable entre les sociétés humaines et
l’écosystème terrestre peut être pris en considération ; un principe d’équilibre n’est jamais fixe,
il est toujours problématique.
Le développement durable apparaît, selon René Passet, comme un objectif et non une théorie ;

1 Selon le BIT (Bureau International du Travail) : progression des taux de suicides et d’homicides, devenus dans
certaines mégapoles une des causes majeures de décès des hommes jeunes (de 16 à 24 ans) ; dans les pays riches
industriels il y a maintenant 37 millions de personnes sans emploi, une centaine de millions sans domicile et presque
200 millions dont l’espérance de vie est réduite à moins de 60 ans. En France la pauvreté reste un problème majeur ;
elle touche d’abord les jeunes, les étrangers, les femmes, les chômeurs, les non-diplômés et les catégories les moins
qualifiées. La précarité du travail entraîne l’apparition d’une catégorie de « travailleurs pauvres », mais l’exercice
continu d’une activité ne met pas non plus à l’abri de la pauvreté : les 2/3 des « travailleurs pauvres » occupent un
emploi toute l’année.
2 Professeur au Massachussets Institute of Technology
3 L’auteur plaide pour une autre mondialisation, plus équitable, fondée sur des moyens politiques et financiers

adaptés.
4 Stiglitz Joseph, La grande désillusion. Fayard, 2002
5 Charbonneau Simon, Maître de conférence en Droit, Université Bordeaux I

6
objectif dont il s’agit de déterminer les conditions de mise en œuvre en confrontant les deux
logiques contradictoires que sont le développement économique et le maintien de la biosphère.
Le principe de responsabilité était affirmé dans le rapport Brundland au travers de la nécessité
d’une solidarité verticale entre les générations. Un renversement des priorités doit être
effectué : il s’agit de transformer l’économique en instrument, c'est-à-dire renoncer à ce que des
critères économiques et financiers constituent des critères dominants, refuser que ces critères
ne soient érigés en valeur.
Ainsi le concept de développement durable semble jouer un rôle central dans un nouveau
paradigme du développement qui reste cependant encore largement à créer ; la notion de
développement durable, envisagée selon une conception de la soutenabilité forte, combine les
aspects environnementaux et les aspects sociaux, même si les premiers semblent l’emporter
aujourd’hui dans les préoccupations théoriques. Le développement durable n’a de sens que s’il
cesse d’être quantitatif et devient qualitatif ; les paramètres fondamentaux de ce
renouvellement du paradigme global du développement deviennent alors les questions de
répartition, de redistribution et de qualité de la vie humaine.
Le « développement » est un phénomène à la fois qualitatif, quantitatif et multidimentionnel ;
son contenu ne s’impose pas de l’extérieur comme expression d’une objectivité scientifique ou
d’une norme éthique transcendante incontestable, il est d’abord affaire d’interprétation et de
projet, il en appelle à l’élaboration de critères stratégiques et de valeurs sociales.
• Agenda 21
L’agenda 21 local (issu du chapitre 28 de l’Agenda 21, programme d’actions en faveur du
développement durable adopté à Rio par 173 Etats dont la France), correspond à un projet de
territoire, global et intégré qui répond aux objectifs et principes du développement durable et
est établi en concertation avec la population et l’ensemble des acteurs d’un territoire. Il s’agit à
la fois d’un programme stratégique, d’un projet politique, qui donne une vision du territoire à
moyen terme, et d’un plan d’action concret. Le développement durable y est conçu à la fois
comme un objectif et comme une méthode de projet. L’agenda 21 local constitue un outil
privilégié pour la mise en œuvre et la territorialisation du développement durable.
Ses objectifs concernent :
- la responsabilité partagée : les élus locaux ont une responsabilité accrue devant les impacts
des décisions où la participation de la société civile aux prises de décision est un des enjeux
majeurs ; la reconnaissance de la diversité des valeurs et des savoirs, la transparence et la
démocratie participative conduit à une nouvelle façon de gouverner (gouvernance) à toutes les
échelles de la décision publique.
- la rationalisation des impacts et des coûts, débouchant sur une économie des ressources donc
des moyens.
- l’attractivité et la dynamisation du territoire : implication des acteurs dans le projet du
territoire, leur mise en relation permet de créer une synergie entre les projets, démarche multi-
acteurs, mobilisation.
L’agenda 21 devrait être un outil de mise en cohérence de tous les autres outils existants, des
objectifs de la collectivité, en concertation avec l’ensemble de ses acteurs, intégrant des
préoccupations sociales et économiques. C’est un document pour les pays, qui se décline
ensuite à l’échelle des collectivités territoriales, voire au niveau des quartiers. C’est un projet
politique local, stratégique et global pour le 21e siècle qui invite les collectivités locales à
s’engager à long terme visant à assurer un développement intégré, solidaire et partagé pour les
générations présentes et futures. Il permet d’intégrer dans tous les projets politiques de la
collectivité locale, les finalités du développement durable, c'est-à-dire équité sociale, efficacité
économique, amélioration et protection de l’environnement, démocratisation des modes de
prises de décision…
C’est un outil de mise en cohérence des politiques publiques ; il marque une rupture ou une
réorientation du mode de développement et amène la collectivité locale à s’organiser
concrètement pour prendre en compte tous les impacts des décisions publiques. Il repose sur le
volontariat et peut être réalisé à tous les niveaux de pouvoir et de responsabilité relevant de

7
territoires institutionnels6 : communes, agglomération, département, région ou de territoire de
solidarité sociale, économique, écologique et culturelle. Les collectivités locales se heurtent
cependant à différents types de difficulté dans sa mise en œuvre :
- difficultés liées à l’existence de procédures étatiques (modes de financement, aides) parfois
concurrentes, émanant des différents départements ministériels, juxtaposition sur le terrain,
cloisonnement de l’action locale.
- liées à l’organisation des services des collectivités locales divisés en secteurs relativement
étanches, frein à l’action transversale.
- dans la mise en œuvre de la concertation et de la participation citoyenne des habitants.
- aux insuffisances de l’intercommunalité en France et aux disparités de la fiscalité locale ; une
approche intercommunale apparaît souvent nécessaire à la mise en œuvre de politiques locales
s’inscrivant dans l’esprit du développement durable ; les collectivités locales demeurent
souvent dans une logique de concurrence plutôt que de partenariat ou de coopération. Aussi les
collectivités territoriales doivent-elles trouver de nouvelles voies d’action, expérimenter de
nouvelles façons d’agir.
La question de l’échelle pertinente d’élaboration des Agendas 21 locaux se pose également
compte tenu de la diversification des territoires concernés et l’augmentation de leur nombre.
Deux types d’approches coexistent dans leur mise en oeuvre: l’approche globale avec la
conception d’un projet global par les collectivités locales, l’approche sectorielle privilégiant
une entrée. L’agenda 21 local oblige à repenser le fonctionnement en interne de la collectivité et
l’organisation administrative vers plus de décloisonnement et de transversalité ; il est
synonyme de projet externe (projet de territoire) et de projet interne à la collectivité. Fondé sur
une démarche participative et citoyenne, il doit permettre l’expérimentation d’outils tels que la
formation, l’information, la participation, le diagnostic partagé, l’évaluation multi- partenariale
et citoyenne…Ces démarches intégrées sont basées sur l’équilibre7.

• Inégalités devant les risques : les inégalités sociales sont révélatrices d’un écart
entre la réalité et le référentiel politique du DD. Le thème des risques cible la
question des responsabilités politiques dans l’inégale fragilité des sociétés face
aux aléas d’origine naturelle. Le thème articule le concept de développement à
ceux d’aménagement et d’environnement. La capacité d’un Etat à assurer
l’amélioration générale des conditions de vie est mise à l’épreuve de sa gestion
des risques.
Le concept de T est utile dans l’approche des risques pour appréhender l’intervention
(ou la non- intervention) de la puissance publique, sa capacité à identifier le risque et lui
fixer un T de référence. C’est ce qui permet l’intervention des acteurs qui ont en charge
la protection des personnes et des biens (protection civile, services sanitaires…), en
relation avec les responsables administratifs et politiques. Cette approche du risque
permet de ne pas séparer l’un côté la « nature » et de l’autre la société, mais d’intégrer
dans l’origine naturelle et la construction sociale des dommages.
Ex :
- Ouragan Katrina, en 2005, Nouvelles Orléans, USA : croissance urbaine, étalement
urbain, inégalités socio-spatiales, ségrégation raciale, manque d’entretien des digues
(zones inondables), faible intervention de l’Etat fédéral, désorganisation des secours...
à ce jour bcp de familles non relogées ; pauvres déplacés, non assurés, 2/3 des écoles
réouvertes, manque de transport publics et d’équipements, pannes fréquentes d’eau et
électricité (réseaux inondés) = modèle non durable.
- Thailande, tsunami = zone touristique

6 En France, en 2004, 75 collectivités locales ont lancé un Agenda 21, dont 10 Conseils généraux ; le Conseil général
de la Gironde est le premier département d’Aquitaine à se lancer dans le processus. Le Conseil régional Aquitaine a
formalisé un agenda 21 avec 25 Pays ; agendas 21 en cours également au niveau des intercommunalités.
7 Bulletin CPAU, dossier « les Agendas 21 locaux », novembre 2001

8
2- Territorialité

Le T est une construction sociale. Pour qu'il y ait T il faut que soit engagée une relation
individuelle ou collective avec un espace qui se trouvera alors qualifié en tant que T.
Cette relation qualifiante à l'espace est appelée territorialité.
Le territoire constitue un ensemble de lieux grâce auxquels un individu ou un groupe,
dans l'ordinaire de ses pratiques quotidiennes, se construit des repères pour vivre en
société.
Les lieux matérialisent cette inscription dans l'espace terrestre (bâtiments, routes,
aménagements...) + dimension symbolique. ***PPT
Pour qu'un lieu fonctionne comme un lieu-repère, le rapport symbolique peut se
construire en fonction de la matérialité : distance (inaccessible) ou de la disparité
physique (ville détruite/reconstruite, mur-frontière séparant un quartier); connectée au
registre de l'immatérialité; le symbole est alors un lieu qui rend sensible à l'individu une
qualité, une valeur, une conception, une image partagée; ex: image de cohésion sociale,
de rassemblement paisible, associée à la vue d'un village pour signifier le T français.
= le T est donc doublement constitué de signification (savoirs, croyances, langages...) et
de matérialité(formes spatiales, zones de peuplement, de vides, réseaux, limites...) .
= Les pratiques de ces lieux-repères soutiennent le travail identitaire des individus et
des collectifs (ex: vie associative, sportive, festives = reconstruction, actualisation).
La mobilité accrue des individus s'est accompagnée en France non d'une désaffection
des T de la localité mais d'un investissement renforcé de leur dimension symbolique et
politique.
La spatialité d'un individu est ainsi engagée dans ses choix de mobilité résidence
/travail (voiture, transports collectifs, co-voiturage…), dans ses pratiques culturelles
(fêtes locales, évènements régional), suivants les aspects de sa vie quotidienne (vie
affective, travail, loisirs, déplacements, vie associative, activités des enfants,
commerces...) = appropriation des lieux différente (ex: périurbain).

Localité et « local »
La définition sociologique du concept de localité est à ce point déficitaire que le
géographe Bernard Kayser en arrive à se demander si « la localité constitue un concept
pertinent et si le terme n’est pas avant tout celui d’une représentation ». La difficulté du
concept est qu’il rend compte d’un espace géographiquement indéterminé, qui est en
même temps un espace dense parce qu’espace social ; comme l’énonce Henri
Mendras8, « c’est dans la mesure où il y a enchevêtrement entre réseaux économique,
politique, de voisinage, de parenté, de sociabilité, etc…qu’il y a localité.. ; il faut donc
décrire nos lieux d’observation comme des entrelacs de réseaux internes branchés sur
des réseaux externes ». L’importance du concept tiendrait moins à ce qu’il recouvre
qu’» au processus dont il peut être l’objet » et à cette densité de réseaux dont il est le
support. (B. Kayser).
Encore faut-il préciser de quel espace parle-t’on lorsque l’on raisonne en termes de
localité : espace institutionnel, espace économique, espace vécu, espace construit
comme le bassin d’emploi, le pays ?
L’appartenance est définie comme une relation directe avec une reconnaissance
réciproque, reposant sur la nécessité d’une proximité immédiate. Mais il s’agit d’éviter
l’illusion selon laquelle la proximité engendrerait une meilleure connaissance de
l’objet; cette « fétichisation du local » tendrait à évacuer les dynamiques et le

8
Mendras Henri, Les sociétés paysannes : Eléments pour une théorie de la paysannerie. Gallimard, 1995
9
changement social. Le traitement du local acquiert de ce fait une « double dimension
territoriale et historique.

Le « local » est une dimension récente du fonctionnement et de l’action des


municipalités. Dans les années soixante émerge un questionnement sur le pouvoir
local ; l’idéologie du quartier commence à se développer, un processus de
territorialisation place la demande sociale locale en position centrale. Le territoire
« local » est une invention récente (J.Ion, A.Micoud) avec le passage du modèle
référentiel de la « République une et indivisible » à celui de la « participation
généralisée » ou de la « République décentralisée ».
Dans les années quatre- vingt émerge la fin d’une représentation monolithique du
territoire national dans un contexte de distribution des pouvoirs entre Etat et
collectivités locales (décentralisation) et de construction européenne. Le local est saisi
par la complexité avec l’imbrication complexe des responsabilités dans la mise en
œuvre des politiques publiques.
Le local est défini comme lieu privilégié de l’impulsion du changement alors qu’il a
longtemps été considéré comme le symbole du conservatisme social, un lieu de
tradition ; un nouveau paradigme s’applique donc aujourd’hui au local. La politisation
des collectivités locales a largement contribué au changement du « statut juridique du
local » (J.Caillosse, 2003) conférant une légitimité nouvelle du local comme objet
d’analyse.
En parallèle la construction européenne pousse au relâchement des contraintes
territoriales ; un espace démultiplié est offert à des initiatives locales facilitées. Les
institutions communautaires soucieuses de s’imposer aux Etats-membres valorisent des
initiatives périphériques donnant un surcroît de légitimité au pouvoir local.

De nouvelles territorialités apparaissent avec de nouvelles échelles territoriales :


intercommunalités, bassins de vie et bassins d’emploi, aires urbaines et
agglomérations, jugées pertinentes du point de vue de dynamiques sociales et/ou
économiques, s’affranchissant de frontières historiques (communales, cantonales,
départementales, régionales…).
Un des modes de légitimation de ces nouvelles territorialités repose sur la production
d’une expertise (observatoires territoriaux, diagnostics de territoire, SIG – systèmes
d’information généraux).

3- Territorialisation : les territoires de l’action publique

Dans les années qui ont suivi la seconde guerre mondiale, la France a su se doter d’un
modèle original d’aménagement du territoire, porté par la Datar, administration de
mission, apparaissant comme l’outil d’une « grande ambition ».
Avec les lois de décentralisation les pouvoirs locaux acquièrent progressivement une
capacité autonome d'élaboration et de mise en oeuvre de politiques publiques.
La décentralisation constitue un moyen de redonner une certaine légitimité à des
démocraties représentatives qui ont toujours centralisé tous les processus de décision et
qui n’entendent pas vraiment se démunir des pouvoirs accumulés9, à des initiatives
locales car l’efficacité des politiques traditionnelles d’aménagement du territoire sont
de plus en plus faibles.

9 Xavier Greffe, Territoires en France. Editions Economica, 1984


10
es recompositions à l’œuvre des territoires de l’action publique provoquent des
transformations de l’organisation locale, notamment du fait des nouvelles dispositions
relatives à l’intercommunalité (Loi Chevènement, 1999) ; cette nouvelle architecture
locale amène des changements dans les modalités de l’intervention publique. Cette
stratégie vise à promouvoir une conception ascendante de l’action publique par les
démarches de contrat et de partenariat ; cette rénovation de l’action publique se
poursuit avec la deuxième phase du mouvement de déconcentration et de
décentralisation (changement de contexte). La prise en compte de la réalité des
territoires dans leur diversité semble constituer désormais une composante obligatoire
de l’action publique autour de la rencontre de trois exigences fortes : la proximité,
l’équité, la qualité.
On assiste au retour du « local » dans le champ social et politique, après avoir été
escamoté jusqu’aux années soixante ; sa réactivation se traduit par la recherche d’un
rééquilibrage entre les niveaux national et territorial dans la pratique politique sociale.
Les principes mis en avant par ces politiques de développement territorial sont la
territorialisation, la transversalité, le partenariat, la participation et la
contractualisation.

La territorialisation des politiques publiques reconnaît la singularité des territoires mais


plus largement elle produit un principe d’accommodation des politiques aux
spécificités locales.
La territorialisation des politiques publiques apparaît désormais comme une condition
nécessaire à l’efficacité de l’action publique.
= fabrication de territorialités de proximité.

Les opérations d‘aménagement du territoire s’inscrivent aujourd’hui dans des jeux


d’acteurs et des prises de décisions qui imposent le T comme catégorie à priori de
l’action publique. La territorialisation des politiques publiques est censée rapprocher
les décisionnaires des besoins des usagers.
Les innovations institutionnelles (notamment les formes d’intercommunalité) tentent
de répondre aux évolutions des pratiques spatiales (mobilité résidentielle, domicile
-travail) et à leurs effets dans l’espace (dynamiques démographiques, ressources
fiscales, accès aux équipements, demande environnementale…). Mais les individus ne
sont pas que demandeurs de foncier, de logement, d’équipements, ils sont aussi acteurs
et producteurs d’espace où se construit du lien social et s’éprouve un sentiment d’unité.
= articulation de « T institutionnels » et de la territorialité des acteurs.
(majorité des français dans aire urbaine ; croissance urbaine s’accompagnant d’un
étalement spatial (périurbanisation) en lien avec la mobilité des habitants).

Une partie des constructions territoriales actuelles s'appuie sur des lois (LOADT de
1995, LOADDT de 1999, Réforme territoriales, 2010) instituant de nouveaux T
d'action publique (processus de recomposition entre T hérités et “nouveaux T”).

Une nouvelle formulation de la question territoriale conduit à la recomposition actuelle


des territoires de l’action publique, dans un contexte de complexité, dans lequel le
mouvement de décentralisation et de construction européenne sont à analyser dans une
dynamique complémentaire. L'échelon local apparaît comme apte à créer des
représentations, des règles, un système d'actions, mais cette gestion s’inscrit dans
l’héritage d'une culture politico-administrative.
Ces changements ouvrent un espace public rendant nécessaire un nouveau
11
développement et d'autres comportements, d'autres procédures, d'autres types d'action.
Une nouvelle conception plus ascendante refonde les relations entre un local
« reconsidéré » et le niveau central, remettant en cause le modèle antérieur
de « régulations croisées » caractérisant les relations entre le centre et la périphérie
(paradigme centre – périphérie).
Un changement de référentiels s’opère dans l’aménagement du territoire, avec le
passage d’un territoire uniforme à la prise en compte de la diversité et multiplicité des
territoires, dans une vision plus subsidiaire et plus territorialisée des intérêts collectifs.
Le développement local prend ainsi le relais de l’aménagement du territoire avec une
idéologie de changement (revendication sociale) ; l’Etat, d’un rôle central sur
l’aménagement du territoire, passe à une compétence partagée.
Cette revalorisation du local accompagne un processus de « relocalisation » des
politiques publiques où la territorialisation des politiques publiques constitue un mode
de réponse à l’enjeu de cohésion socio-spatiale des territoires.

La question du "territoire" interroge doublement les politiques publiques et sociales en


particulier. D'un côté parce qu'avec l'aggravation de la crise, les problèmes sociaux ont
pris une dimension spatiale particulière (régions "sinistrées", quartiers « d'exil » ou
« d'exclusion», campagnes "désertifiées"...) et d'un autre côté parce que les politiques
en général et les politiques sociales en particulier ont connu un vaste mouvement de
territorialisation (décentralisation, déconcentration de certains services extérieurs de
l'Etat, dispositifs territoriaux d'actions concertées, politique européenne...). Toutefois
ce qui demeure problématique est moins la dimension spatiale et territoriale des
problèmes sociaux ou des politiques qui y répondent que la difficulté à mettre en
cohérence les différentes approches et les différents niveaux d'inscription territoriale de
ceux-ci et d'en démêler les enjeux.
= recherche du niveau d’intervention pertinent. Les T sont les mieux placés pour
favoriser l’innovation. L’enjeu des politiques publiques est de créer les conditions
locales de l’innovation, rassembler les acteurs et organiser un éco- système local
dynamique et collaboratif.
Les dispositifs territoriaux ont un impact direct sur le développement économique.
Plus de territoire institutionnel pertinent capable d’exercer le monopole sur l’action
publique.
Montée en puissance du pouvoir urbain et des intercommunalités.

Question : en quoi le territoire peut-être un frein ou un levier dans les inégalités


territoriales ?

• Ouvrage de L. Davezies : les nouvelles fractures territoriales, inégalités


croissantes.
• Voir :
Lois de décentralisation + Réforme territoriale :
- Refondation du dialogue entre l’Etat, les collectivités territoriales et le Haut
Conseil des Territoires
- Objectif de solidarité sociale et environnementale
- Pour une action publique locale simplifiée, plus efficace et moins coûteuse
- Priorité à l’accès de tous aux services publics
- Une action publique adaptée à la diversité des territoires
- Une action publique plus transparente et plus démocratique (participation)

12
Espaces de développement et Projet territorial
Les espaces de développement sont définis et promus par les collectivités territoriales
ayant pour vocation l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme de
développement.
Ils peuvent être vus comme des cadres rationalisateurs pour l’attribution d’aides ou
encore comme de nouveaux échelons d’organisation politique et administrative ; de fait
ils sont des lieux de concertation, de « partenariat » entre institutions publiques et des
acteurs privés autour de projets de développement local ; ils entrent aussi dans un jeu
institutionnel, leur mise en œuvre étant largement influencée par d’autres intérêts que le
développement local10. Un ensemble de communes s’associent pour l’élaboration d’un
programme de développement, en général financé en partie par la collectivité publique
qui propose la procédure, dans le cadre d’un contrat, et le cas échéant par d’autres
collectivités qui cofinancent les actions.
A travers ces politiques de développement territorial il s’agit d’encourager une
organisation de l’espace qui doit favoriser le « développement » de l’ensemble du
territoire. L’encouragement des initiatives locales, le renforcement des relations entre
les « acteurs du développement » dans le cadre « d’espaces réellement pertinents », a
pour contexte plus général la rénovation de l’action publique.
Avec l’intercommunalité et la mise en place d’établissements publics par les élus pour
porter les espaces de développement, se pose la question d’espaces d’identification
(Pays : espace de « cohésion culturelle et sociale) voire de territoires politiques
(territoires bornés et contrôlés par une autorité qui leur est propre et qui détient une
compétence générale sur le territoire).
Ces espaces pourraient déboucher sur de véritables politiques publiques ou n’être que
des « cadres rationalisateurs », dans des aires définies par ces institutions pour
distribuer des ressources ; la qualité du projet de territoire et du partenariat sont des
composantes essentielles à la constitution de ces espaces de développement : le projet
doit amener au choix du territoire pertinent pour l’action ; l’analyse des besoins et des
réponses possibles fait la pertinence des territoires autour d’une dynamique de
projet. C’est le projet qui fait le territoire.

Le projet de territoire apparaît comme une condition du développement en ce qu’il


traduit la volonté d’infléchir ou de dépasser les déterminismes qui ont joué
défavorablement pour un territoire. Le territoire doit donc se projeter dans un avenir qui
ne soit pas la reproduction ou l’enregistrement des tendances passées ; il permet aux
acteurs de partager des références communes et d’œuvrer dans la même direction là où
l’absence de développement a tendance à multiplier les sources d’incompréhension et
de conflit.
Le concept d’apprentissage est au cœur du développement local, le partenariat
constituant un levier de l’apprentissage collectif11. Le projet territorial repose sur un
processus collectif de construction de sens.
Les acteurs locaux sont incités à travailler sur le concept de projet social
local s’appuyant sur une concertation collective en vue de fonder un projet politique
d’insertion de l’homme dans la cité, reposant sur des références éthiques.
Les services sociaux ancrés sur les territoires ont à développer cette fonction essentielle
d'interface entre l'interne et l'externe, à construire des partenariats avec l'ensemble des

10
Douillet Anne-Cécile, Action publique et territoire ; Le changement de l’action publique au regard des
politiques de développement territorial ; Thèse pour le doctorat de science politique, décembre 2001 (op.
cit. p 9)
11 Greffe Xavier, Le développement local Editions de l’Aube, 2002
13
acteurs du territoire dans une vision stratégique de l'inscription de leur service sur le
territoire global et de désenclavement du social d'intervention au sein de la politique
générale des collectivités territoriales.

Le concept de projet de territoire


Ce concept renvoie à de multiples variantes sémantiques (projet de ville,
d’agglomération, urbain, charte de territoire…) et à une diversité de situations, de
contenus et de pratiques.
Les objectifs du projet de territoire sont de « réduire le risque de décider une action
inutile…d’accroître les chances de décider les actions les plus utiles parce que plus
intégrées dans une vision prospective prenant en compte les facteurs d’évolution
internes ou externes les plus probables et parce que possédant les meilleures capacités
d’entraînement et de mobilisation de toute la collectivité…Le projet de territoire se
présente…en forme d’outil supplémentaire de décision propre à accroître les chances
de réussite de l’action globale de la collectivité locale» (B. Rigaldies, 96).
Le projet de territoire est l’affirmation d’une ambition négociée et partagée, fondée
sur une réflexion prospective collective qui met en perspective et en synergie l’activité
des acteurs concernés. Le projet est un espace de dialogue qui invite les acteurs à :
- (re) lire leur territoire (diagnostic)
- identifier les enjeux (objectifs stratégiques)
- agir (opérations et actions).

Le projet devient un espace de négociation, de confrontation des points de


vue contribuant à construire une vision partagée (référentiel) et un programme
d’opérations.
Le projet est enfin un espace d’action, il permet de comprendre une situation locale
dans sa globalité dans l’optique de la transformer mais avant tout de passer à l’acte en
dépassant l’action au coup par coup et la gestion au fil de l’eau12.
L’ébauche d’un projet contribue à approfondir et élargir la mobilisation des acteurs
tout comme l’enrichissement de la dynamique partenariale densifie le projet.
Autrement dit la façon de « mobiliser » les acteurs conditionne le projet et
simultanément la façon de « construire » le projet influence la dynamique partenariale.

Les dynamiques de projet inventent de nouveaux territoires qui viennent s’ajouter aux
territoires existants (identitaires, culturels, historiques), aux territoires fonctionnels
(ceux des pratiques des entreprises, des habitants, des différents groupes sociaux), aux
territoires administratifs, aux territoires politiques institués (notamment les cantons) et
à ceux en cours d’institutionnalisation (notamment les intercommunalités) sans
forcément s’y opposer ; se pose alors la question de l’articulation entre les projets de
territoire.
En invoquant la nécessité du projet de territoire ce sont de nouvelles légitimités qui
sont recherchées à travers une logique prospective pour justifier ces nouveaux
découpages.
Le projet est conçu comme une étape obligatoire dans le développement territorial
(consensus), à savoir le projet comme anticipation d’action.
La démarche repose sur des éléments de consensus, sur un mouvement endogène
nécessitant une mise en réseau des partenaires = passage de l’initiative individuelle ou
sectorielle à l’action globale commune.

12Chappoz Yves, Rigaldies B (collaboration), Le projet de territoire. Collection Les guides Actelus, Editions du
Papyrus, 1996
14
L’enjeu territorial de prise en compte des besoins sociaux :
A partir du décodage du réel, la démarche de problématisation (mise en visibilité des
attentes sociales) va constituer une partie charnière entre analyse et action, dans un
processus de construction créative.
Ce processus de compréhension partagée porte sur le partage du sens général et de sa
définition, permettant la redéfinition de la situation concernée par la démarche de projet
en vue de sa résolution. Cette mise en visibilité de questions sociales et d’enjeux
collectifs mais aussi d’informations importantes manquantes, alimente la réflexion sur
les pratiques, sur les modalités de coopérations partenariales, sur l’implication des
habitants et usagers des services sociaux.
Outre une visée de cohérence territoriale, de cohérence dans les diverses interventions
menées à l’échelle de ce territoire, le projet de territoire est également porteur de
cohésion sociale fondée sur la proximité, le soutien aux initiatives locales et à la
participation à la vie sociale.

* voir modalités de réorganisation de la Direction générale chargée de la solidarité du


CG 33 (adaptations locales, proximité, décloisonnement, transversalité).
* exemples de Chartes de Pays.

15
Bibiographie

- Alliès P, L’invention du territoire. PUF, 1980


- Alvergne C, Taulelle F, Du local à l’Europe. Les nouvelles politiques d’aménagement du
territoire. PUF, 01.2002
- Azoulay G, Les théories du développement. Presses universitaires de Rennes, 2002
- Bonnet J, Aménagement et développement territorial, Ellipses, Paris, 2012
- Bourdin A., la question locale. PUF 2000
- Brunet R, Territoires de France et d’Europe. Raisons de géographe. Belin, collection
Mappemonde, 1997.
- DATAR, 50 ans d’aménagement du territoire, La découverte. Collection Territoires en
mouvement, La Documentation française, Paris, 2013
- Debarbieux B, Poisat J, La rhétorique des artéfacts territoriaux, in « Utopie pour le territoire :
cohérence ou complexité ? », dir. F. Gerbaux. Editions de l’Aube, 1999
- Di Méo G, Pitte J.R, Géographie sociale et territoire. Nathan Université, 2001
- Dubois J, Les politiques publiques territoriales. La gouvernancemulti-niveaux face aux défis
de l’aménagemetn. Presses Universitaires de Rennes, 2009
- Gouttebel JY, Stratégies de développement territorial, Economica, Paris, 2003
- Lévy J, Lussault, Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés. Belin, 2003.
- Logié G, L’intercommunalité au service du projet de territoire. Syros, 2000
- Lorthiois J, Le diagnostic local de ressources. Editions asdic, Collection Décision locale, 1996
- Merlin P, L’aménagement du territoire. PUF, 2002
- Minot D (Dir.), Le projet de territoire. La Bergerie nationale, 2001
- Mora O, Les nouvelles ruralités à l’horizon 2030, Editions Quae, Versailles, 2008
- Palier B, La référence au territoire dans les nouvelles politiques sociales. Politiques et
management public, vol 16, n°3, 09.1998
- Pecqueur B, Territoire et développement. Le développement local, 2000
- Perriet-Cornet P, Repenser les campagnes, Editions de l’Aube, Datar , 2002
- Perriet-Cornet P, A qui appartient l’espace rural , Editions de l’Aube, Datar , 2002
- Torre A, Beuret JE, Proximités territoriales. Economica, Collection Anthropos, Paris, 2012
- Wachter S (collectif), L'aménagement en 50 tendances. L'aube Datar, 2002

www.gouvernement.fr/gouvernement/decentralisation-et-reforme-de-l-action-publique

Sites :
PQA : Pays et quartiers d’Aquitaine
Conseil Régional
Conseil départemental
Bordeaux Métropole
AURBA : agence d’urbanisme de la métropole bordelaise

Voir Cours de Sociologie rurale et urbaine + références bibliographiques

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