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Introduction

Le thème de la « gouvernance » a fait l'objet de nombreux débats et la notion a beaucoup


d’ambiguïté. Elle interpelle tout particulièrement les sciences économiques et politiques, tant en
terme disciplinaire que sur le plan des champs théoriques investis.
Ce concept est aujourd'hui omniprésent : gouvernance mondiale, gouvernance nationale,
gouvernance d'entreprise, gouvernance urbaine, gouvernance locale… chaque fois que des
différents acteurs veulent exercer un pouvoir sur un système, quel qu'il soit, ils évoquent la notion
de gouvernance, alors d’où vient cette notion.
Étymologiquement, le mot gouvernance est dérivé des mots grecs « kyberman » et «kybernetes »
qui signifient respectivement « naviguer » et « piloter ».Il implique donc la conduite ou l’utilisation
d’un mécanisme quelconque afin d’assurer à la société une direction cohérente. Mais, plus tard sa
signification va ensuite évoluer en fonction, d'une part, des transformations historiques des
sociétés qui vont l'employer, mais aussi, d'autre part, de ses migrations transfrontalières, et
principalement transatlantique.
La gouvernance locale issue de la gouvernance politique, elle s’intéresse à l’étude des modes de
coordination alternatifs au marché et elle fait référence à des formes de coordination incluant une
pluralité d’acteurs : coopération, réseau, alliance, partenariat… L’action publique locale n’est plus
le seul fait d’une seule autorité – locale ou nationale -, mais implique des acteurs non-étatiques
dans les processus décisionnels.
Appelé également ‘gouvernance territoriale’, la gouvernance locale marque une nouvelle vision du
« territoire » dans le développement économique, social et écologique. Elle se réfère à une gestion
participative des programmes et projets locaux de développement, dont l’objectif est l’accès
équitable aux services essentiels pour tous (santé, eau, éducation,…).
Le concept de gouvernance locale apparaît alors comme une forme de régulation territoriale et
d’interdépendance dynamique entre agents notamment productifs et institutions locales. Dans
cette approche, le territoire contribue à réduire les coûts de transaction entre les firmes et
constitue de ce fait un niveau pertinent pour coordonner les actions collectives. Au- delà de la
seule efficacité comptable, est alors mis en évidence le fait que les institutions non économiques
peuvent faciliter la coordination entre agents, sont donc acteurs à part entière des coordinations
et décision, des coalitions et négociations
La gouvernance locale se présente comme « la manière dont l’ensemble des partenaires publics et
privés locaux définissent et mettent en œuvre les stratégies territoriales, qui permettent de gérer
conjointement la compétitivité du territoire ». Elle renvoie ainsi à l’organisation des structures et
de leurs services, suppose la mise en place d’une vraie répartition des rôles entre acteurs, une
responsabilité de ses membres ainsi que la fixation d’objectifs avec suivi et valorisation des
réalisations. Pour être efficace et durable, cette gouvernance doit être vécue comme une véritable
valeur ajoutée pour l’ensemble des partenaires, comme une communauté d’intérêts et de destin.
C'est dans ce cadre où s'inscrit notre problématique que nous la formulant de la manière
suivante : est ce qu’on peut considérer la gouvernance locale comme nouvelle manière de
gouverner le territoire ?
Partie 1 : cadre conceptuel
1- Qu’est ce qu’un territoire
Le territoire est un contenu objectif délimité par des aspects géographiques et politiques.
Cependant, on ne peut se contenter de cette approche car le territoire est aussi un construit
social. Il doit, en plus de son entité politique ou géographique, être considéré comme l'expression
organique d'un collectif humain chargé d'histoire, de culture et d'intérêts communs. Il se
concrétise dans la volonté de ceux qui veulent "vivre et travailler au pays".
* C'est un espace construit par les hommes, qui reflète leur culture et leur mode d'organisation
sociale, ce qui revient à dire que c'est un produit social.
* C'est un espace d'habitat, en ce sens que l'homme organise à sa convenance le milieu où il vit.
* C'est un lieu d'usage, parce qu'il est aménagé à des fins de production, de consommation et
d'échanges.
* C'est un lieu de relations sociales qui reflètent toujours les rapports hiérarchiques et inégaux qui
s'établissent entre les groupes et qui débouchent souvent sur des situations de conflits ou de
rivalités.
* C'est un lieu de culture, produit d'une histoire séculaire, ce qui se traduit par la permanence
d'une tradition, quelquefois d'une langue et d'une façon de vivre.
Donc le territoire s’impose comme un construit social permanent, en constante appropriation. Il
peut être apparenté à un système dynamique complexe (F. Leloup et L. Moyart, 2003). Il se
construit ainsi grâce aux relations durables de proximité géographique développée entre une
pluralité d’acteurs ; ces relations de « voisinage » peuvent mener à des actions concrètes voire à
l’élaboration commune de normes.
Les limites du territoire ne sont plus définies en référence à un périmètre politico administratif
(aspect politique) ou comme un fragment d’un système productif national (aspect économique),
elles définissent le lieu d’intersection de réseaux (physiques ou humains, formels ou informels), de
stratégies et d’interdépendances entre partenaires reliés entre eux, le lieu de production, de
négociation, de partage d’un devenir commun. Le système est bâti sur la proximité géographique
de ses acteurs mais aussi sur la dynamique commune qui les rassemble, le construit — les actions
— qui résultent de ces relations, voire les règles, normes et principes acceptés et mis en œuvre
ensemble.
En ce sens, le territoire est un système aux limites auto-construites et dès lors fluctuantes en
fonction du processus d’appropriation des acteurs.
Les acteurs ou groupes d’acteurs qui participent à cette construction territoriale peuvent avoir des
mobiles et des processus très divers pour se regrouper en vue d’un avantage dont chaque
membre serait bénéficiaire (groupe de pression, syndicat, entreprise).
Le système-territoire évolue donc en fonction des interactions unissant ses acteurs, les échanges
avec l’environnement, l’évolution même de ces variables. Les processus d’appropriation, de
régulation, de construction sociale et identitaire amenant ou non la pérennité et l’auto
renforcement du territoire.
De ce fait, le territoire devient un tout, cohérent et construit ; ce qui signifie qu’il développe sa
propre identité, sa propre histoire, sa propre dynamique différenciée des autres espaces ; une
certaine autonomisation et auto-organisation en résultent. En outre, il devient potentiellement un
acteur du système global, son évolution dépend notamment des échanges qu’il entretient avec les
autres acteurs du système, national et international, économique, politique et social : ce territoire
ainsi défini en tant que système ne peut évoluer qu’ouvert et non replié sur lui-même.
Pour faire évoluer le territoire vers ces objectifs souhaités amènent à créer de nouveaux lieux de
concertation, de nouvelles techniques d’action et de décision, de nouveaux processus d’où la
gouvernance territoriale

2- La gouvernance locale comme nouveau mode de gouvernance

La gouvernance locale est une manière de gouverner qui prend davantage en compte la société
civile. Elle est censée être plus efficace, mieux répondre aux attentes de la population et être plus
soucieuse de l’environnement.

Celle-ci est basée sur la reconnaissance de l’importance de la société civile et des acteurs non-
étatiques ; elle réfléchit à leur intégration dans le processus de gestion et de décision collective
ainsi que son contrôle, elle est devenue la bonne manière de gérer les affaires publiques ou
privées, et c’est ce sens que les grandes institutions internationales privilégient.
Elle fonctionne grâce à la participation des acteurs locaux, l’évaluation des besoins, l’information
des populations, leur consultation, la concertation et la codécision à des niveaux locaux.
La gouvernance locale se base sur :
* Tenir en compte le contexte culturel et institutionnel local : Il s’agit de tenir compte des
nombreux aspects et acteurs institutionnels impliqués ;
* la transparence et la redevabilité : de nombreux acteurs sont impliqués dans la gouvernance
locale sans nécessairement poursuivre le même objectif. Dans l’intérêt de toutes les parties
prenantes, il importe de leur donner à tous un sens de la responsabilité. Il est en effet plus facile
de suivre les activités des acteurs locaux lorsque des mécanismes ont été mis en place pour rendre
les responsables redevables de leurs actes et permettre à la population d’obtenir des informations
claires de leur part ;
* Augmenter le degré de participation : le degré de partage de l’information augmente la
participation locale qui, à son tour, élève le degré de participation aux débats et les possibilités de
contestation lors des prises de position ;
* Adapter l’appui de la gouvernance locale à la stratégie nationale : le développement local est
indissociable de son contexte régional et national. Il importe dès lors de s’associer aux autorités
nationales et de tenir entièrement compte de la stratégie nationale lorsqu’il s’agit d’élaborer des
mesures d’appui à la gouvernance locale. Ce type d’approche enraciné dans le contexte présente
notamment trois avantages :
* les organisations d’Etat déconcentrées peuvent plus facilement fournir une assistance technique
aux collectivités locales,
* il encourage les synergies entre la politique de l’autorité locale en matière de développement et
la politique sectorielle édictée et mise en œuvre par le gouvernement central, et
* il encourage les autorités locales et nationales à capitaliser et à partager leurs expériences
majeures.
* Améliorer les négociations et le dialogue entre les acteurs : la réussite de l’appui à la
gouvernance locale dépend largement de l’existence de négociations et de dialogues réguliers qui
permettent aux acteurs de se mettre d’accord sur les objectifs ainsi que sur la manière de les
atteindre. Ils peuvent également servir à améliorer les capacités organisationnelles et
institutionnelles des acteurs et, partant, leur capacité à suivre et évaluer l’appui à la gouvernance
locale.

3- Les acteurs publics :


A- Les acteurs institutionnels :

En sa qualité d’acteur de la gouvernance locale l’Etat est représenté par la région, les préfectures
et les provinces.

1- la région:

Créée en vertu du dahir du 16 Juillet 1971 pour des considérations éminemment économiques, la
région est devenue progressivement un acteur se préoccupant d’autres volets à relents politique,
administratif, social, culturel, etc. Cette évolution témoigne du rôle de plus en plus prépondérant
de la région dans la consécration de la décentralisation aussi bien économique que politique et
administrative, autant que cette région brille par son apport sans doute tangible dans la
gouvernance locale.

Dans le domaine politique, la région s’arroge le statut d’un espace garantissant aux citoyens la
participation dans la prise de décision relevant de leurs affaires locales, par le biais de leurs élus à
l’échelle de la région. Ce constat est d’autant plus tangible que les conseils régionaux sont les
pourvoyeurs de la chambre des conseillers en cadres susceptibles de faire avancer la pratique
législative.

Sur le registre socio-économique, il convient de souligner que le législateur a accordé par la loi
47696 des prérogatives importantes sur les plans économique, social et culturel. L’article 6 de
cette loi stipule que le conseil de la région prend les mesures qui s’imposent pour assurer la
promotion des affaires de la région revêtant un caractère économique, social et culturel et ce,
dans le respect des compétences dévolues aux autres entités territoriales.

Au demeurant, la région demeure un acteur occupant une place de choix dans la gouvernance
locale, comme en atteste ses prérogatives sur le plan de la création de projets de développement
socio-économique, de l’économie mixte, de prise d’initiatives en termes d’investissements à
travers les centres régionaux d’investissement dotés chacun de deux guichets de création
d’entreprises et d’assistance aux investisseurs.

2- Les préfectures et provinces:

Elles sont des acteurs primordiaux et indéniables en matière de politique de développement socio-
économique. Ainsi et compte tenu des profondes mutations que connait la gestion de la chose
locale, les conseils des préfectures et provinces ont été dotées d’importantes prérogatives.

A ce titre, l’article 36 de la loi organisant les préfectures et provinces, leurs conseils sont
compétents dans le cadre des affaires économiques, sociales et en rapport avec la création de
l’emploi, des entreprises et des sociétés de l’économie mixte.

Quoique il peut ressortir des prorogatives des préfectures et province une certaine similitude avec
celles dédiées à la région, il sied de faire remarquer que ce constat illustre la volonté de l’Etat de
susciter une convergence des intérêts et de l’approche adoptée par ces entités territoriales pour
une bonne gouvernance locale.

3-Les conseils communaux :

La Commune assure à l'ensemble de la population, sans discrimination, les meilleures conditions


de vie. Elle intervient dans le domaine de la planification et de la programmation du
développement local et de l'harmonisation de cette programmation avec les orientations
régionales et nationales.

Elle est compétente dans la gestion de l’occupation des sols, des projets d'aménagement, de
lotissement, d'équipement des périmètres affectés à l'habitation, d'affectation des terres du
domaine national, des foires et marchés, des dons et legs, de la voirie, des cimetières, etc.

3- Les Acteurs Non Etatiques «A.N.E »:

La notion d'Acteurs Non Etatiques a été introduite dans la politique de développement en 2000,
dans le cadre de l’accord de Cotonou, signé entre les 15 Etats membres de l’Union européenne et
77 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Cet accord reconnaît le rôle complémentaire et la
contribution potentielle des Acteurs Non Etatiques dans le processus de développement.

Les Acteurs Non Etatiques sont des organisations indépendantes relevant de la société civile, en-
dehors des gouvernements et de l’administration publique. On y regroupe notamment les
Organisations Non Gouvernementales (ONG), les partenaires sociaux (syndicats, associations
d’entrepreneurs…), les associations du secteur privé, les organisations confessionnelles, les
universités, etc.
Partie 2 : la place du territoire et acteurs publics dans le paradigme de la gouvernance locale
1- Territoire et gouvernance locale :
Les territoires doivent être considérés comme des rouages essentiels de la gouvernance pour le
XXIe siècle.
Dans cinquante ans, les territoires, en particulier les grandes villes, seront très probablement des
acteurs sociaux extrêmement importants, peut-être plus importants que les entreprises.
Gouvernance et territoires
En même temps que la mondialisation, le rôle du local s’affirme pour :
* le fonctionnement économique,
* la gestion des ressources naturelles,
* le renouveau de la démocratie,
et on assiste à un vaste mouvement de décentralisation qui tend à montrer que le territoire
devient la véritable « brique de base » de la gouvernance.
Et pourtant, on a cherché, on cherche encore aujourd’hui, à marginaliser le local :
* la formule « penser globalement et agir localement » est elle-même ambiguë. Elle laisse à penser
que c’est à partir de données globales que l’on peut penser et elle invalide de fait une pensée
locale ;
* le local est défini comme « la cour où les enfants s’amusent » pendant que les grands
travaillent ;
* le local ne serait que le lieu de l’action concrète, de l’immédiat ;
* c’est l’espace des pauvres, « l’infirmerie de campagne » ;
* le local est souvent associé à l’idée d’ancien, du traditionnel, opposé à l’ouverture sur le monde.
Au contraire, dans une perspective historique, il faut s’attendre à la revanche de territoires, à côté
de l’organisation du système industriel et de l’État lui-même, dont les rôles seraient transitoires.
Jusqu’au 18e siècle, on pouvait parler de sous-systèmes territoriaux autonomes. Avec la révolution
française et plus tard la révolution industrielle, la nation, faite d’individus citoyens, se substitue
aux communautés et les territoires se transforment en « espaces ».
En même temps, les systèmes sociaux et économiques se désagrègent et un nouvel acteur social
apparaît et se développe jusqu’à devenir dominant : l’entreprise. C’est un acteur mobile, organisé
avec ses filières verticales.
Mais dans une nouvelle étape récente, d’autres logiques économiques et sociales émergent à leur
tour, face à un modèle de développement où la société consomme plus de ressources qu’elle n’en
reproduit. De nouveaux acteurs issus du local apparaissent : c’est la source de la revanche des
territoires au 21e siècle.
2- Les défis de la gouvernance locale :
La crise des territoires dans leur rapport avec l’Etat, est souvent due à l’absence ou l’inefficacité
des réseaux de médiation et de représentation. La gestion de l’intérêt général a tendance à être
ramenée à la seule expression de la puissance publique alors que normalement il devrait être le
produit d’une élaboration concertée avec l’ensemble des acteurs sociaux concernés.
L’efficacité des acteurs sociaux dépend en générale de la flexibilité et de la capacité d’ouverture
des systèmes politiques en place.
Généralement, on peut constater divers problèmes qui empêchent ou limitent la bonne
gouvernance locale au Maroc. Entre autres:

* La faiblesse de l’interaction entre les municipalités et la société civile.


* L’existence de pratiques clientélistes et de corruption dans le secteur public
* La pauvreté de la qualité des services publics
* L’inefficience ou l’inefficacité de la gestion publique
* L’existence de modèles mentaux traditionnels et la passivité sociale en matière d’affaires
collectives.
* Le manque de reddition de comptes de la part des élus
* L’absence d’espaces et de normes pour la participation citoyenne
* La pauvreté en matière de capacité de gestion des fonctionnaires et techniciens municipaux
* La faiblesse de la culture ou de la conscience civique des citoyens
* La non-implication des municipalités dans le développement durable de leurs territoires
* L’iniquité en matière de distribution de ressources ou de prises de décision que ce soit pour des
raisons de genre, d’appartenance ethnique…

Dans tous les cas, il convient de noter que l’expérience de la décentralisation au


Maroc a permis de prendre conscience de façon croissante des difficultés existantes et du fait que
l’action publique locale se voit confrontée à une série de défis, afin de remplir un rôle effectif en
matière de développement territorial et de satisfaction des besoins sociaux de la population.

Cela concerne et remet en question l’aménagement du territoire et le développement des


mécanismes de fonctionnement des collectivités locales en particulier la modernisation des
modalités d’élection et de représentation, la clarification des compétences entre les différents
niveaux territoriaux, la simplification des échelles de la décentralisation, l’attention portée aux
exigences de partenariat pour une coopération cohérente entre la région, la province la commune
et les autres structures de l’action publique locale.

Cette réflexion amène nécessairement à une recomposition des territoires sur la base d’un
nouveau processus méthodologique où le centralisme doit céder la place à de nouvelles formes
d’organisation et de fonctionnement du territoire en vue d’une autonomie accrue, d’une
responsabilité soutenue de la part de l’ensemble des acteurs publics et d’une participation plus
engagée des acteurs territoriaux pour la mise en marche des programmes de développement
territorial.

3- la coordination territoriale et le nouveau rôle des pouvoirs publics institutionnel

On peut admettre que chaque territoire construit représente un cas irréductiblement particulier
du fait du quasi infini combinaison des variables qui s’y jouent, appelant par conséquent un mode
particulier de gouvernance. Des typologies existent cependant qui mettent en évidence un
nombre relativement restreint de modèles selon le type d’acteur clé qui domine le processus. J.P.
Gilly et J. Perrat (2003) identifient trois principaux types théoriques, selon le type d’acteur qui
domine la coordination territoriale : la gouvernance privée, institutionnelle ou mixte.
La gouvernance privée correspond au cas où une organisation (un centre de R&D, une association
d’entreprises, une firme motrice, etc.) est l’acteur clé du processus de coordination des acteurs. La
gouvernance institutionnelle ou publique correspond au cas où c’est un acteur institutionnel (ou
plusieurs institutions) qui joue ce rôle (collectivité territoriale administrative, État, centre de
recherche publique, etc.). Dans la réalité, ces types « purs » sont rarement rencontrés et on trouve
le plus souvent une association des formes précédentes, on parlera alors de gouvernance mixte ou
partenariale. « La gouvernance n’est donc pas une configuration de coordinations strictement
économiques ou strictement sociopolitiques : elle est une combinaison de ces dimensions,
caractérisée par une densité variable des interactions entre les trois catégories d’acteurs » (Gilly et
Perrat, 2003). Dans tous les cas, l’État reste un interlocuteur important, régulateur des niveaux
administratifs et garant de la redistribution.
Outre cette multiplicité d’acteurs dans le processus décisionnel, et les questions de coordination,
négociation, compromis ou conflit qui en découlent, le territoire tel que défini ici ne correspond
plus forcément à une unité politico administrative. Ses limites émergent du construit et ne sont
pas données ex ante.
Dès lors, l’espace défini correspondra souvent à un espace régi par diverses autorités publiques
(regroupant plusieurs organisations politico administratives), voire créera de nouveaux espaces (à
cheval sur diverses entités sans correspondances avec des frontières administratives).
Le gouvernement local devra alors satisfaire à un certain nombre de conditions pour respecter et
développer les atouts développés par le territoire.
Avant tout, ce système-territoire entraîne la nécessité de mettre sur pied des structures de
partenariat complexe entre acteurs, structures qu’il s’agira aussi de fédérer autour d’un projet
territorial. Ceci passe par une translation de la perception et des pratiques de la concurrence vers
des situations créatrices de solidarité, d’échanges, d’ententes, de mise au point de projets
communs dans un cadre de proximité géographique mais aussi organisationnelle où s’inscrit le
partenariat à base territoriale.
Ce partenariat induit la collaboration de groupes d’intérêts divers (chambres de commerce,
entreprises, associations professionnelles, organisations patronales et syndicales, société civile,
lobbies, élus…) dont les objectifs, les stratégies, les temporalités, les espaces de référence peuvent
être différents, voire contradictoires, mais qui contribuent, chacun à sa façon, à la production de
facteurs de développement. Les actions de ces acteurs et institutions peuvent se combiner
(échanges d’informations …) ou au contraire être conduites de manière isolée, ce qui met alors à
mal le processus global.
L’acteur public, entre autres, aura donc à rendre possible une mobilisation de l’ensemble de ces
acteurs — privés, associatifs et publics — et institutions sur des objectifs communs de
développement dans le cadre d’un projet intégré et cohérent, partageant ou acceptant de
partager une même vision à moyen et long terme du territoire.
Diverses modalités d’action reflètent ces aspirations, citons ainsi la nécessaire coordination
résiliaire (à l’intérieur du territoire mais aussi en relation avec l’environnement externe du
territoire), le développement de procédures contractuelles et de nouveaux instruments ou
techniques d’action afin de stabiliser les relations et les engagements des acteurs (ces instruments
et techniques constituent des productions communes propres au territoire ou au minimum
appropriées collectivement par celui-ci).
Ceci implique des jeux de négociation, de compromis, d’alliances et des rapports de force entre
groupes et acteurs divers obéissant à leurs propres logiques d’intérêt et/ou exerçant des
responsabilités sur des domaines de compétences tantôt partagés, tantôt disputés mais jamais
absolument étanches ni autonomes (N. Bertrand et al., 2001, p. 6). Ceci suppose l’activation de
relations et de réseaux multiples où diverses formes de proximité— tant géographiques
qu’organisationnelles — pourront jouer. Comme annoncé plus haut, le processus de gouvernance
territoriale — de mise en compatibilité entre acteurs — permet non seulement d’articuler entre
eux les acteurs situés sur le même site géographique mais aussi dans le même temps, il relie les
acteurs locaux, les autres territoires et les niveaux macro-économiques globaux du national voire
du supranational : il crée les relations mais aussi définit l’espace, les frontières du territoire.
En effet, il ne s’agit pas seulement de demander leur avis aux acteurs locaux mais bien plus
fondamentalement de susciter leur adhésion, leur participation et leur implication dans une idée
de construction collective des systèmes d’action publique. Dans ce contexte, l’action sur le
développement territorial n’est plus présentée comme la seule responsabilité du pouvoir public
(local, régional ou étatique) mais comme la résultante d’un processus de coopération et de
coordination entre de nombreux acteurs et opérateurs, dans lequel la collectivité locale (qui doit
maintenant composer avec divers acteurs et institutions publics et privés) a un quadruple rôle
d’orientation, d’animation, de pilotage et de régulation.
Le concept de gouvernance territoriale permet d’inclure dans les processus de prise de décision
territoriale l’existence de ces acteurs et relations multiples, l’importance des réseaux, l’émergence
de conflits et de négociations, le développement traduit en objectifs et en actions (N. Bertrand, Y.
Gorgeu, P. Moquay, 2001).
La gouvernance territoriale répondant à l’émergence de nouveaux espaces de développement,
construit par et pour les acteurs qui se les approprient, l’espace politico administratif et la
politique descendante ne prévalent plus, le suffrage électoral ne peut plus assurer la
représentativité nécessaire à la démocratie. C’est ainsi que les principes de démocratie
participative s’associent naturellement aux notions de gouvernance territoriale : il s’agit
d’emprunter de nouvelles voies de consultation, de participation et de légitimité afin de faire
émerger non seulement des avis mais des processus et des décisions.

Conclusion
Dans cet exposé on a discuté la gouvernance locale comme un processus de construction d’une
compatibilité entre différentes proximités institutionnelles unissant des acteurs (économiques,
institutionnels, sociaux.) géographiquement proches, en vue de la résolution d’un problème
productif inédit ou, plus largement, de la réalisation de projets locaux de développement se
succédant et/ou se combinant dans la durée.
Elle est considérée comme un mode de régulation qui ne peut être efficace qu’a l’existence de
deux éléments essentiels à savoir l’approche participative dont l’implication et la participation des
différents acteurs est primordiale et la proximité au sens pluriel du terme c'est-à-dire
géographique, institutionnelle et organisationnelle.
Cette forme de gouvernance est particulière dans la mesure où elle est comprise comme un
processus non seulement de coordination des acteurs mais aussi d’appropriation des ressources et
de construction de la territorialité. La gouvernance qui en résulte repose sur la multiplicité
d’acteurs, dans l’objectif de l’élaboration d’actions de développement local ‘’ Le développement
local est l’expression de la solidarité locale créatrice de nouvelles relations sociales et manifeste la
volonté des habitants d’une microrégion de valoriser les richesses locales, ce qui est créateur de
développement économique ‘’ qui est l’objectif final de la gouvernance locale sous tend une
proximité multiple qui rassemble la proximité géographique, institutionnelle, et organisationnelle
des acteurs.

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