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Sigmund Freud
Oeuvre du domaine public.
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habituelles : on ne saurait se fier à la psychanalyse ni tenir pour
certaines les déductions tirées d'elle. Aussi ne puis-je ici éprouver la
validité d'un tel jugement ; je veux simplement donner l'assurance
que ceux qui connaissent et pratiquent la technique psychanalytique
acquièrent une profonde confiance dans ses résultats.
C'est pourquoi je n'ai pas divisé mon exposé selon les époques
successives de l'enfance mais regroupé ce qui entre en jeu plus ou
moins tôt selon les enfants. Je suis convaincu en tout cas qu'aucun
enfant - aucun du moins qui soit sain d'esprit ou moins encore aucun
qui soit bien doué intellectuellement - ne peut manquer d'être
préoccupé par les problèmes sexuels dans les années d'avant la
puberté.
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contenu psychique particulier qui leur appartienne en propre mais
que comme le dit C. G. Jung, les complexes qui les rendent malades
sont ceux-là mêmes contre lesquels nous hommes sains nous
combattons.
Mais comme les futurs névrosés offrent très souvent dans leur
constitution une pulsion sexuelle particulièrement forte et une
tendance à la précocité à la manifestation avant terme de cette
pulsion ils nous laisseront beaucoup voir de l'activité sexuelle
infantile et d'une façon plus vive et plus nette que cela ne serait
possible à nos capacités d'observation d'ordinaire si émoussées quand
elles s'appliquent à d'autres enfants. En tout cas on n'appréciera la
valeur réelle des informations fournies par des adultes névrosés qu'en
recueillant aussi les souvenirs d'enfance des personnes adultes saines,
selon le procédé d'Havelock Ellis.
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compréhension des mythes et des contes. Mais elle est proprement
indispensable pour la conception des névroses elles-mêmes : là les
théories infantiles ont encore cours et prennent une part déterminante
sur la forme que présenteront les symptômes.
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L'aîné manifeste, contre le concurrent, une hostilité non
dissimulée qui se soulage dans un jugement sans aménité, dans des
désirs comme que la cigogne le remporte et autres choses de ce genre
et qui même, à l'occasion lui fait commettre de petits attentats sur ce
qui est couché la, sans défense, dans le berceau. En règle générale, si
la différence d'âge est plus grande, l'expression de cette hostilité
primaire s'atténue; de même, à un âge un peu plus avancé, s'il ne
vient pas de frère ou de sœur c'est le désir d'un compagnon de jeu
comme l'enfant a pu en voir ailleurs qui peut l'emporter.
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L'enfant obtient soit une réponse évasive soit une réprimande pour
son désir de savoir; ou alors, on se débarrasse de lui avec une
information à portée mythologique qui pour les pays germaniques,
dit ceci : c'est la cigogne qui apporte les enfants, qu'elle est allée
chercher dans l'eau. J'ai des raisons de penser qu'il y a beaucoup plus
d'enfants que ne le soupçonnent les parents qui ne sont pas satisfaits
par cette solution et lui opposent un doute énergique, même si celui-
ci n'est pas toujours ouvertement avoué.
Mais ils ont aussi vécu par là la première occasion d'un conflit
psychique dans la mesure ou des opinions, pour lesquelles ils
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éprouvent une préférence de nature pulsionnelle mais qui ne sont pas
bien 'aux yeux des grandes personnes entrent en opposition avec
d'autres qui sont fondées sur l'autorité des grandes personnes, mais
qui ne leur conviennent pas à eux.
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la bonne voie pour résoudre le problème sur lequel il met d'abord à
l'épreuve la force de sa pensée.
Mais il est inhibé dans la suite de ses progrès par une ignorance,
que rien ne peut pallier et par de fausses théories que l'état de sa
propre sexualité lui impose. Ces fausses théories sexuelles que je vais
maintenant examiner ont toutes une propriété très remarquable. Bien
qu'elles se fourvoient de façon grotesque, chacune d'elles contient
pourtant un fragment de pure vérité, elles sont sous ce rapport
analogue aux solutions qualifiées de géniales que tentent de donner
les adultes aux problèmes que pose le monde et qui dépassent
l'entendement humain.
La première de ces théories est liée au fait que sont négligées les
différences entre les sexes, négligence dont nous avons souligné dès
le départ qu'elle était caractéristique de l'enfant.
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essentiel. Quand le petit garçon voit les parties génitales d'une petite
sœur, ses propos montrent que son préjugé est déjà assez fort pour
faire violence à la perception ; au lieu de constater le manque du
membre, il dit régulièrement en guise de consolation et de
conciliation : c'est que le... est encore petit; mais quand elle sera plus
grande, il grandira bien. La représentation de la femme au pénis
réapparaît à nouveau, plus tard, dans les rêves de l'adulte : dans un
état d'excitation sexuelle nocturne il renverse une femme, la dénude
et se prépare au coït, quand la vue du membre parfaitement
développé à la place des parties génitales féminines arrête le rêve et
l'excitation.
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à la valeur accordée à cette partie du corps il est donc
extraordinairement profond et durable.
Rien ne peut plus être changé dans cette réaction même quand
l'homosexuel apprend de la science que son hypothèse d'enfant à
savoir que la femme aussi possède un pénis n'était pas si absurde que
cela. L'anatomie a reconnu que le clitoris, à l'intérieur de la vulve
était l'organe homologue du pénis et la physiologie des processus
sexuels a pu ajouter que ce petit pénis qui ne grandit pas, se comporte
bel et bien dans l'enfance de la femme comme un véritable pénis : il
est le siège d'excitations qui conduisent à le toucher, son excitabilité
confère à l'activité sexuelle de la petite fille un caractère masculin et
une vague de refoulement est nécessaire dans les années de la
puberté pour laisser apparaître la femme en évacuant cette sexualité
masculine.
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D'un autre côté le pénis a aussi sans aucun doute sa part dans ces
processus mystérieux il en témoigne par son excitation qui
accompagne tout ce travail de pensée. A cette excitation sont liées
des impulsions que l'enfant ne sait pas interpréter impulsions
obscures à une action violente pénétrer casser percer des trous
partout.
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corps de la mère c'est là que la recherche s'interrompt déconcertée :
elle vient buter sur la théorie selon laquelle la mère possède un pénis
comme l'homme et l'existence de la cavité qui reçoit le pénis
demeure inconnue de l'enfant.
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qui demeure valable pour tant d'animaux était la plus naturelle et la
seule qui pût s'imposer à l'enfant comme étant vraisemblable.
Mais alors il n'y avait rien que de logique à ce que l'enfant refusât
à la femme le douloureux privilège de l'enfantement. Si les enfants
sont mis au monde par l'anus l'homme peut aussi bien enfanter que la
femme. Le petit garçon peut donc également forger le fantasme qu'il
fait lui-même des enfants sans que nous ayons besoin pour autant de
lui imputer des penchants féminins. Il ne fait par là que manifester la
présence encore active de son érotisme anal.
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pas absent un supplément d'excitation sexuelle. Je n'ai pas pu établir
que les enfants reconnaissaient dans l'observation de ce qui s'était
passé entre les parents le fragment nécessaire à la solution du
problème des enfants ; plus souvent il apparaissait que cette relation
était méconnue par les enfants, précisément en fonction du fait qu'ils
avaient ainsi interprété l'acte amoureux comme un acte de violence.
Il n'est pas rare non plus que l'enfant soit à même d'appuyer sa
conception sur des perceptions accidentelles qu'il saisit pour une part
correctement mais qu'il interprète pour une autre part de nouveau
faussement et même à l'envers. De fait chez beaucoup de couples la
femme répugne généralement à l'étreinte conjugale qui ne lui apporte
aucun plaisir mais seulement le danger d'une nouvelle grossesse et il
se peut que la mère fournisse ainsi à l'enfant qui est censé dormir (ou
qui fait semblant de dormir), une impression qui ne peut vraiment
être interprétée que comme une action de défense contre un acte de
violence.
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D'autres fois encore c'est l'ensemble du mariage qui offre à
l'enfant attentif le spectacle d'une lutte permanente se manifestant
dans des éclats de voix et des gestes hostiles ; aussi l'enfant ne
s'étonnera-t-il pas que cette lutte se poursuive aussi pendant la nuit et
finalement soit conduite par les mêmes méthodes que celles dont il
use habituellement dans ses rapports avec ses frères et sœurs ou ses
camarades de jeu.
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toute personne informée aurait ressenti l'absence. Soit par exemple la
théorie importante selon laquelle c'est par un baiser qu'on a un
enfant, théorie qui trahit avec évidence la prédominance de la bouche
comme zone érogène.
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émise par le membre de l'homme et il peut arriver qu'une jeune fille
innocente, aussi tard que pendant sa nuit de noces s'indigne de ce que
son mari urine en elle.
Un garçon, qui avait aussi entendu parler de l'œuf identifie cet œuf
avec le terme vulgaire pour désigner un testicule et se casse la tête
pour savoir comment le contenu des bourses peut se renouveler
constamment.
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jeunes filles en viennent-elles à s'attendre à ce que le rapport sexuel
n'ait lieu qu'une fois mais dure très longtemps vingt-quatre heures et
que la série de tous les enfants résulte de cette seule fois. On pourrait
penser que dans ce cas l'enfant a acquis sa connaissance du processus
de reproduction chez certains insectes ; mais cette supposition n'est
pas confirmée, la théorie apparaît comme une création spontanée.
D'autres jeunes filles méconnaissent la période de gestation la vie
dans le corps maternel, et supposent que l'enfant vient au monde
immédiatement après la nuit du premier rapport.
Je connais aussi deux garçons qui ont entre dix et treize ans et qui
certes ont reçu des explications sexuelles mais ont opposé à celui qui
s'en portait garant cette fin de non-recevoir : il se peut que ton père et
d'autres se comportent de la sorte mais je suis bien sûr que mon père
lui ne ferait jamais ça.
Pour variées que soient ces conduites tardives des enfants à l'égard
de la satisfaction du désir sexuel de savoir pour ce qui est de leurs
premières années d'enfance, nous sommes en droit d'admettre un
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comportement tout à fait uniforme, et de croire qu'autrefois ils
faisaient les plus grands efforts afin de découvrir ce que les parents
font ensemble pour que viennent les enfants.
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FIN