Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Septembre 2019
revue-banque.fr
C
ette troisième édition du numéro spé- tion, conformité, analyse financière etc.) que
cial de Revue Banque propose une série de cours de management (marketing de service,
de 23 articles tirés des thèses présen- stratégie, management d’équipe, leadership, etc.).
tées pour l’obtention du diplôme CESB Afin de renforcer encore la dimension opé-
Management, Mastère Spécialisé Senior Mana- rationnelle de cette formation, tous les par-
gement Bancaire, qui constituent l’aboutis- ticipants se voient confier la préparation et
sement d’un travail de recherche effectué au la soutenance d’une thèse professionnelle,
sein du Mastère. À partir du troisième opus, dont le sujet trouve idéalement sa source dans
on peut parler de tradition ; elle consiste à les réflexions que souhaite approfondir l’éta- René
mettre en avant les travaux des participants blissement qui inscrit son manager de mana- Desbiolles
de chaque promotion ayant obtenu les notes ger. La banque dispose ainsi de la possibilité Directeur
les plus élevées. d’orienter les recherches et les réflexions liées des Diplômes, Titres
Ainsi, le CESB Management confirme être la à la thèse sur des problématiques qui lui sont et Certifications
formation de référence reconnue dans la pro- propres et qui conduiront à des propositions CFPB École
fession bancaire depuis plusieurs décennies. de solutions concrètes pouvant ensuite être supérieure
de la Banque
Le CFPB s’est associé, depuis quelques années facilement développées.
et dans le but d’accroître la visibilité de ce titre, La publication de la synthèse des meilleures
à l’ESSEC Business School. Ce partenariat a thèses illustre ce qui constitue le défi des mana-
donné lieu à la reconnaissance de cette for- gers de managers pour accompagner le capital
mation par la Conférence des Grandes Écoles humain à l’ère du digital et de l’intelligence
comme le Mastère Spécialisé Senior Manage- artificielle, qui se décline à plusieurs niveaux :
ment Bancaire, entraînant sa visibilité officielle • adapter l’organisation vers… une banque 4.0 ;
à la fois nationale et internationale. • accompagner les équipes au regard de
Construite conjointement et en parfaite com- l’accélération du changement ;
plémentarité par les deux partenaires, l’orga- • enchanter l’expérience client ;
nisation pédagogique retenue a pour objectif • décliner dans les métiers l’apport du digital Wolfgang
de former des managers de managers capables et de l’intelligence artificielle ; Dick
de contribuer à la définition des stratégies de • transformer les modèles de management. Professeur,
l’entreprise et d’en faciliter la compréhension, Ces articles sont le reflet de thèses qui, nous Directeur
l’appropriation et le déploiement. Dans cette l’espérons, vous apporteront le même niveau académique du
Mastère Spécialisé®
optique sont dispensés aux participants autant de réflexion et d’enseignements que lors de Senior Management
de cours à caractère technique (contrôle de ges- leur soutenance. n Bancaire
ESSEC Business
School
Didier Chavagnac
77 Transformation managériale
Feedback et Speak Up Culture :
leviers d’implication des salariés
Technologie, IA et digital Frédéric Mailhan
62 Marketing bancaire
Face à la révolution numérique,
la segmentation bancaire n’est pas morte
Sébastien Haméon
Dossier coordonné par Philippe Reignard, CFPB École supérieure de la banque, et Élisabeth Coulomb, Revue Banque.
Rentabilité bancaire
C
Mastère Spécialisé ette recherche vise à identifier les facteurs qui I. ENJEUX DE LA RENTABILITÉ
Senior Management
influencent significativement la rentabilité des La rentabilité est gage de la pérennité de toute entreprise
Bancaire, Promotion
2018-2019 banques confrontées à la concurrence et à la dont les banques. En général, les banques poursuivent
réglementation prudentielle de Bâle II & Bâle III, l’objectif de rentabilité dans un environnement concur-
CFPB École afin de proposer des solutions idoines. La revue de la lit- rentiel dont l’intensité varie d’un marché à l’autre. En
supérieure
de la banque térature a montré que la plupart des auteurs recherchent effet, « les cinq forces concurrentielles[2] déterminent conjointe-
les effets des facteurs managériaux, macrofinanciers et ment l’intensité de la concurrence et de la rentabilité dans un sec-
ESSEC Business
School macroéconomiques sur la rentabilité économique. L’ap- teur » (Porter, 2004). La concurrence rend les clients de
proche dynamique du GMM[1] des données de panel a été moins en moins fidèles et de plus en plus exigeants avec
utilisée pour analyser les données des banques togolaises. une pression continue sur les marges. Ainsi la marge
L’étude économétrique révèle que les indicateurs, fonds d’intermédiation des banques togolaises est passée de
propres, liquidité, crédits, commissions affectent posi- 4,32 % en 2013 à 2,70 % en 2017[3].
tivement et significativement la rentabilité. Les charges En raison du rôle prépondérant joué par les banques
d’exploitation et les créances en souffrance, ont un effet dans le financement de l’économie, le secteur fait l’objet
négatif sensible. En plus des actions directement liées d’une réglementation spécifique qui tend à se renforcer
à ces variables managériales, la titrisation, la digitali- ces dernières années. En effet, « la crise financière mondiale
sation, une segmentation fine du portefeuille client, la a mis en lumière l’importance de la réglementation et de la super-
rentabilité de la nouvelle production, le RAROC, outil vision pour un système bancaire performant, capable de canaliser
de suivi de la rentabilité intégrant la rémunération du efficacement les ressources financières vers des investissements. »
capital et le risque, sont préconisés.
[2] Pouvoir de négociation des clients, pouvoir de négociation des fournisseurs,
menace de nouveaux entrants, menace des produits ou services substituables,
rivalité entre les firmes existantes.
[1] Generalized methods of moment : la méthode des moments généralisés est une [3] Suivant rapport de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest sur
méthode générique pour estimer les paramètres d’un modèle statistique. les conditions de banque à fin 2017 ; juillet 2018.
lité économique (Bourke, 1989; Ali et Puah, 2019). Par III. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE
contre d’autres chercheurs trouvent que la taille n’est Les données sont celles publiées par la Banque Centrale
pas une source d’économie des coûts et estiment que des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). L'échantillon
les grandes banques en arrivent plutôt à des situations de cette étude basée sur les données de panel, est composé
d’inefficacité d’échelle (Rouabah, 2006). de huit banques commerciales (sur les treize que compte
Contrairement à la théorie, des études empiriques ont le Togo) dont les états financiers sont disponibles sans
montré que les capitaux propres stimulent la rentabilité discontinuité sur la période de 2006 à 2017. En effet, les
des banques (Abreu et Mendes, 2002). Il en est de même cinq banques non prises en compte ont commencé leur
des charges d’exploitation bancaire dont la théorie éco- activité au Togo, il y a moins de douze ans.
nomique insiste sur l’effet négatif sur la rentabilité. Or, L’analyse des données est faite suivant la méthode des
plusieurs études empiriques révèlent un effet positif, moments généralisée (Generalized method of moments – GMM).
expliqué par le fait que les charges d’exploitation (non Le cadre adopté est similaire à celui appliqué sur les
oisives) contribuent à la productivité des banques et banques tunisiennes (Naceur, 2003), européennes (God-
donc à l’amélioration de leur rentabilité (Naceur, 2003). dard, Molyneux et Wilson, 2004), grecques (P. P. Athana-
Les effets positifs des crédits bancaires sur la rentabilité soglou, Brissimis et Delis, 2005) et de l’UEMOA (Adales-
des banques sont largement partagés par les chercheurs, sossi et Erdogan, 2019). Le modèle linéaire général[4] se
ce qui confirme les prédictions de la théorie économique présente comme suit :
(Bashir, 2001; Naceur, 2003; Ali et Puah, 2019). Les résul-
tats de certains travaux attirent toutefois, l’attention sur
le fait que le développement de l’activité de crédit peut
ralentir la rentabilité bancaire s’il n’est pas accompagné
d’une politique adéquate de recherche de ressources des-
tinées à financer ces crédits (Bashir, 2001).
Le degré de concurrence exerce sur la rentabilité ban-
caire des effets diversement appréciés. Certains auteurs
tout en reconnaissant la pression négative de la concur-
rence sur la rentabilité, trouvent qu’elle a un impact
positif sur les bénéfices qui progressent (Perera, Skully
et Chaudhry, 2013). IV. RÉSULTATS ET DISCUSSIONS
Concernant la réglementation, quelques-uns ne trouvent
aucun impact (Agoraki et Tsamis 2017), d’autres 1. Analyse statistique descriptive
démontrent un impact fort (Ozili, 2017; Swamy, 2018) Les graphiques 2 et 3 montrent la relation entre les
sur la rentabilité. Une étude réalisée entre 2005 et 2011 variables indépendantes et la rentabilité économique.
sur les grandes banques de six pays européens a mon- L’analyse économétrique qui suivra permettra d’appré-
tré que la régulation et la supervision bancaire avaient cier la portée des relations (significatives et non).
un impact positif sur la rentabilité des banques de la
France, de l’Allemagne et de la Grande Bretagne. Par
contre l’impact est négatif pour les banques d’Italie, de [4] La littérature a généralement conclu que la forme fonctionnelle appropriée
la Grèce et de l’Espagne (Bouheni, 2013). pour le test est une fonction linéaire bien qu'il y ait des opinions dissidentes.
Court (1979) a étudié cette question et a conclu que les fonctions linéaires
produisent des résultats meilleurs à toute autre forme de fonction.
Tableau 1
Abréviations des variables dépendantes (1 à 3) et indépendantes (4 à 15)
N/R SIGLE Définition N/R SIGLE Définition
1 NIM Net Interest Margin 9 LiAR Liquidy Assets Ratio
2 ROE Return On Equity 10 NIR Cost to Income Ratio
3 ROA Return On Assets 11 NAR Cost to Assets Ratio
4 SHER Shareholders Equity Ratio 12 NPAR Non Performing Assets Ratio
5 LiDR Liquid Deposit Ratio 13 LOGSIZE Logarithm of Size
6 LAR Loan to Assets Ratio 14 BCR Bank Concentration Ratio
7 LDR Loan to Deposit Ratio 15 GDPG Gross Domestic Product Growth
8 NIIR Non Interest Income Ratio
Source : Auteur,
2. Résultats économétriques
Les Tableaux 2 et 3 présentent les résultats économétriques et leur discussion.
Tableau 2.
Résultats GMM first difference ROA, ROE, NIM
Modèle 1 : ROA (Return On Assets) Modèle 2 (ROE Return On Equity) Modèle 3 NIM (Net Interest Margin)
Variables
Coef t.stat Prob Coef t.stat Prob Coef t.stat Prob
ROA(-1) , ROE(-1), NIM(-1) 0.088 2.574 0.020** 26.25 1.755 0.083*** 0.027 2.685 0.006*
SHER (Shareholders Equity Ratio) 0.3568 5.349 0.000* 2.062 -0.442 0.6597 0.007 0.1940 0.8467
LiAR ( Liquid Assets Ratio) -0.4612 -0,883 0.000* 2.543 1.5170 0.1335 -0.122 -2.00 0.0496**
LiDR (Liquid Deposit Ratio) 0.26 4.904 0.000* 25.246 1.899 0.0614 0.016 0.413 0.6808
LAR (Loan to Assets Ratio) 0.931 6.042 0.000* -18.10614 -1.9491 0.0550 0.075 0.669 0.5054
LDR (Loan to Deposit Ratio) 0.6989 -5,37 0.000* -2.121639 -1.640 0.1050 -0.0457 -0.5276 0.5995
NIR (Cost to Income Ratio) -0.065 -4.025 0.000* 5.712 1.642 0.104 -0.0054 -1.894 0.0625***
NIIR (Non Interest Income Ratio) 0.187 5.668 0.000* -3.90 -1.047 0.298 -0.041 -2.899 0.0051*
NAR (Cost to Assets Ratio) -0.262 --2.13 0.035** -8.15 -1.5 0.117 0.039 2.304 0.0244**
NPAR (Non Performing Assets Ratio) -00.07 2.103 0.038* -1.4 -1.05 0.292 0.0 2.98 0.0040*
LOGSIZE (Logarithm of Size) -0.008 -0.747 0.457 5.4 0.93 0.351 0.002 0.628 0.5316
BCR (Bank Concentration Ratio) -0.003 -0.120 0.9043 -0.045 -0.280 0.779 -0.009 -0.636 0.5270
CROISSANCE DU PIB 0.0032 0.942 0.348 26.25 1.755 0.083 -0.003 -1.735 0.0873***
INFLATION
J-statistic 50.025 55.8 64,56
Bon Bon Bon
Prob(J-statistic)1 0.432 0.234 0.557
Johansen condition Bon Pas bon Bon
Arellano-Bond Serial Correlation Test
AR(1)2 0.000 < 0,05 Bon 0.000 < 0,05 Bon 0.000 < 0,05 Bon
AR(2) 3
0.4987 > 0, 05 Bon 0.017 > 0,05 Pas Bon 0.557 > 0,05 Bon
Décision Accepté Rejeté Accepté
Observation 96 96 96
Source : Auteur
Les notes «* », «**» et «***» traduisent une signification statistique respective aux niveaux 1 %, 5 % et 10 %.
(1) Test de suridentification des restrictions dans l’estimation du modèle dynamique GMM.
(2) Test d’Arellano-Bond indique que l’auto covariance moyenne dans les résidus d’ordre 1 est égale à 0 (H0 : pas d’autocorrélation).
(3) Test d’Arellano-Bond selon lequel l’autocovariance moyenne dans les résidus de l’ordre 2 est égale à 0 (H0 : pas d’autocorrélation).
Tableau 3
Tableau 4
Principales préconisations
Rang Préconisations Type Coût* Impact** Score
1 Suppression des charges improductives Action 5 5 25
2 Usage des outils stratégiques d’analyse, PESTEL et TOWS Action 5 4 20
3 Mobilisation prioritaire de ressources non ou faiblement Action 5 5 25
rémunérées
4 Déploiement de produits digitaux générateurs Action 2 4 8
de commissions et sources de mobilisation de ressources
non rémunérées
5 Développement de la banque de détail Action 2 5 10
6 Renforcement des fonds propres Ressource 4 4 16
7 Segmentation plus détaillée du portefeuille clients Action 2 5 10
8 Titrisation une part du portefeuille crédit Action 3 4 12
9 Mise en place de la « technique de rentabilité Ressource 3 5 15
de la nouvelle production » et du « RAROC »
10 Acquisition d’un outil moderne d’analyse de risque Ressource 2 4 8
de crédit (Application Moody’S,…)
Source : Auteur
* Échelle de 1 (Coût élevé) à 5 (Coût faible).
** Échelle: de 1 (Impact faible/rentabilité) à 5 (Impact fort/rentabilité).
M. Rouach, G. Naulleau et P. Audouin (2016), Profitability : Evidence from Tunisia », SSRN Scholarly in Kenya », International journal of economics and
Contrôle de gestion bancaire, RB édition. Paper ID 1538810, Rochester, NY : Social Science financial, vol. 3(1) : 237-252.
L. Scialom (2007), Économie bancaire, Research Network : https://papers.ssrn.com/ P. K. Ozili (2017), « Bank Profitability and Capital
La Découverte. abstract=1538810. Regulation: Evidence from Listed and non-Listed
F. Ben Bouheni (2013), « L’impact de la régulation Banks in Africa », Journal of African Business 18 (2)
et de la supervision sur la rentabilité bancaire », : 143-68: https://doi.org/10.1080/15228916.20
Articles Revue du Financier 35 (203) : 52-66. 17.1247329.
M. Abreu et V. Mendes (2002), « Commercial Bank P. Bourke (1989), « Concentration and other S. Perera, M. Skully et Z. Chaudhry (2013), « Deter-
Interest Margins and Profitability: Evidence from EU Determinants of Bank Profitability in Europe, minants of Commercial Bank Profitability: South Asian
Countries », Porto Çalısma Tebligi 122. North America and Australia », Journal of Ban- Evidence », Asian Journal of Finance & Accounting
K. Adalessossi et E.O. Erdogan (2019), « Analysis king & Finance 13 (1) : 65-79 : https://doi. 5 (1) : 365.
of Factors Influencing Bank Profitability: Evidence org/10.1016/0378-4266(89)90020-4. M. -D. Rodean et Nicolae Baltes (2016), « Study
from the West African Economic and Monetary Union G. Cerci, S. Y. Kandir et Y. B. Onal (2012), « Profita- Regarding the Influence of the Endogenous and
Banking Sector », Journal of Accounting, Finance bility Analysis of Banks An Application on the Turkish Exogenous Factors on Credit Institution’s Return on
& Auditing Studies 5 (1) : 122-54. https://doi. Banking Industry », Istanbul Stock Exchange Review Assets », Theoretical & Applied Economics 23 (1) :
org/10.32602/jafas.2019.6. 13 (50) : 29-44. 24754.
I. Adelopo, R. Lloydking et V. Tauringana (2018), « V. Flamini, L. Schumacher et C. A. McDonald A. Rouabah (2006), « La Sensibilité de l’activité
Determinants of bank profitability before, during, and (2009), The Determinants of Commercial Bank bancaire aux chocs macroéconomiques : une analyse
after the financial crisis », International Journal of Profitability in Sub-Saharan Africa, 9-15, International en panel sur des données de banques luxembour-
Managerial Finance 14 (4) : 378-98 : https://doi. Monetary Fund. geoises », 21, BCL Working Papers, Central Bank of
org/10.1108/IJMF-07-2017-0148. Luxembourg : https://ideas.repec.org/p/bcl/bclwop/
J. Goddard, P. Molyneux et J.O.S. Wilson (2004),
M.-E. K. Agoraki et A. Tsamis (2017), « Bank Profi- « The Profitability of European Banks : A Cross- bclwp021.html.
tability and Regulation in Emerging European Markets Sectional and Dynamic Panel Analysis », The R. Salim, Amir Arjomandi et Juergen Heinz Seufert
», Multinational Finance Journal 21 (3) : 177-10. Manchester School 72 (3) : 363‑81 : https://doi. (2016), « Does Corporate Governance Affect
M. Ali et C. Hong Puah (2019), « The Internal org/10.1111/j.1467-9957.2004.00397.x. Australian Banks’ Performance? », Journal of Inter-
Determinants of Bank Profitability and Stability », K. Kosmidou, S. Tanna et F. Pasiouras (2005), national Financial Markets, Institutions and Money
Management Research Review 42 (1) : 49-67 : « Determinants of Profitability of Domestic UK 43 (juillet) : 113-25 : https://doi.org/10.1016/j.
https://doi.org/10.1108/MRR-04-2017-0103. Commercial Banks: Panel Evidence from the Period intfin.2016.04.006.
M. A. Almumani (2013), « Impact of Managerial 1995-2002 », In Money Macro and Finance (MMF) H. Sbai et H. Meghouar (2017), « L’impact des
Factors on Commercial Bank Profitability: Empirical Research Group Conference, 45 :1-27. mécanismes de gouvernance sur la performance des
Evidence from Jordan », International Journal of S. W. Lee (2012), « Profitability Determinants of banques marocaines », Question(s) de manage-
Academic Research in Accounting, Finance and Korean Banks », Economics and Finance Review 2 ment 18 (3) : 173 : https://doi.org/10.3917/
Management Sciences 3 (3) : 298-310. (9) : 6-18. qdm.173.0173.
P. Athanasoglou, M. Delis et C. Staikouras (2006), F. Macit (2012), « Bank Specific and Macroeco- V. Swamy (2018), « Basel III Capital Regulations and
« Determinants of Bank Profitability in the South nomic Determinants of Profitability: Evidence from Bank Profitability »,Review of Financial Economics 36
Eastern European Region ». Participation Banks in Turkey », Economics bulletin (4) : 307-20 : https://doi.org/10.1002/rfe.1023.
P. Athanasoglou, S. N. Brissimis et M.D. Delis 32 (1) : 586-595. A. Trujillo-Ponce (2013), « What Determines the Pro-
(2005), « Bank-specific, Industry-specific and E. Menicucci et G. Paolucci (2016), « The Determi- fitability of Banks? Evidence from Spain », Accoun-
Macroeconomic Determinants of Bank Profitability », nants of Bank Profitability: Empirical Evidence from ting & Finance 53 (2) : 561-586.
25, Working Papers, Bank of Greece : https://ideas. European Banking Sector », Journal of Financial E. Turgutlu (2014), « Dynamics of Profitability in the
repec.org/p/bog/wpaper/25.html. Reporting and Accounting 14 (1) : 86‑115 : https:// Turkish Banking Industry/Türk Bankacilik Sektöründe
R. Ayadi, S.B. Naceur, B. Casu et B. Quinn (2016), doi.org/10.1108/JFRA-05-2015-0060. Karliligin Dinamikleri », Ege Akademik Bakis 14 (1):
« Does Basel Compliance Matter for Bank Perfor- E. F. Munyambonera (2013), « Determinants of 43.
mance? », Journal of Financial Stability 23 (avril) : Commercial Bank Profitability in Sub-Saharan Africa
15-32 : https://doi.org/10.1016/j.jfs.2015.12.007. », International Journal of Economics and Finance 5
A.-H. M. Bashir (2001), « Assessing the Performance (9) : 134 : https://doi.org/10.5539/ijef.v5n9p134.
of Islamic banks: Some Evidence from the Middle S. B. Naceur (2003), « The Determinants of the Tuni-
East », Topics in Middle Eastern and North African sian Banking Industry Profitability: Panel Evidence »,
Economies 3. Université Libre de Tunis working papers, 1-17.
S. B. Naceur et M. Goaied (2008), « The Deter- V. Okoth Ongore et G. B. Kusa (2013), « Determi-
minants of Commercial Bank Interest Margin and nants of Financial Performance of Commercial Banks
L
CFPB École e monde n’est pas « en train de changer », il de rentabilité mérite quelques explications. Il faut
supérieure « a changé ». La banque de détail vivra sous d’abord bien distinguer la question des taux d’intérêt
de la banque contraintes et protections tant qu’elle assumera et celle du digital pour conduire notre réflexion sur la
ESSEC Business les trois quarts du financement de l’économie. profitabilité.
School Des alternatives sont possibles techniquement, avec Deux éléments très nouveaux se conjuguent aujourd’hui,
une désintermédiation généralisée et l’accès de tous mais ne sont pourtant absolument pas liés. D’un côté,
au marché, mais avec les risques induits de crises et de se trouve la courbe de taux d’intérêt très plate, qui
faillites. Loin d’être le cas en France, ce scénario reste abîme fortement la rentabilité de nos banques de détail.
évidemment toujours une éventualité. Comme l’exprimait Rémy Weber, président du direc-
toire de La Banque Postale : « Tous les soirs, nous replaçons
RUPTURE CONJONCTURELLE ET STRUCTURELLE 15 milliards de liquidité à la BCE. Je commence donc chaque
À ce jour, deux types de ruptures consécutives à la journée de mauvaise humeur, car il nous faut travailler pour
révolution technologique sont intéressants à analyser : rattraper ce qu’on a perdu pendant la nuit[1]. »
– la première vient de l’apparition de nouveaux acteurs De l’autre côté, il faut désormais composer avec l’om-
comme les Fintechs ou les GAFA venant directement niscience du digital et ses effets structurels sur le résul-
nous concurrencer sur des segments rentables de notre tat et l’organisation de nos établissements.
chaîne de valeur ; Répondre uniquement par le digital à des questions
– la seconde est la possible évolution vers un modèle de taux d’intérêt, en pensant que la faiblesse des taux
de banque en ligne, dite « néo-banque », largement change structurellement le modèle, serait une hypocri-
portée par l’émergence du smartphone. sie. À un instant T, les taux d’intérêt ne changent pas
Ce nouveau paradigme pousse certains analystes à nous
qualifier de « Kodak de demain » ou de la « prochaine sidé- [1] Thibaut Madelin, « Taux négatifs : Villeroy de Galhau vole au secours des
rurgie du XXIe siècle ». Ce sujet de disparition et de perte banques », Les Échos, 26 février 2019.
le modèle en soi mais dégrade conjoncturellement la Grâce à l’innovation et au mobile, chacun a aujourd’hui
rentabilité, ce qui est très différent. « sa banque dans la poche ». Les applications bancaires
Dès lors, cette réflexion nous oblige à revenir aux fon- sont parmi les trois plus consultées, derrière les réseaux
damentaux : quelles sont les clés de succès d’une rela- sociaux et la météo. LCL doit assurément capitaliser sur
tion bancaire à l’aune de cette transformation numé- la sienne, déjà élue, mais également en faire un point
rique majeure ? Nous devons être capables de muter de départ dans le but de créer des nouvelles offres via
pour devenir une banque urbaine de référence pour des plateformes.
les prochaines années ; s’appuyer sur notre ADN qui De plus, l’orientation vers le self care et le digital sup-
porte une profonde culture de la transformation depuis prime les tâches répétitives, chronophages et coûteuses.
sa création en 1863. Cette banque était déjà « dans les En conséquence, le temps productif de nos commer-
villes, dans les coins de rue » dès sa création. Nous avons ciaux s’amplifie, entraînant de fait, un accroissement
su construire notre histoire au fil des années, pour de la productivité. Notre PNB va augmenter par notre
aujourd’hui assumer un positionnement urbain et haut capacité à mieux conseiller et servir les clients en répon-
de gamme, appartenant à un groupe mutualiste solide dant tout simplement à leurs besoins.
financièrement qui permet des économies d’échelles. Enfin, le digital est une opportunité pour nous, car il
Notre business model à l’instar de tous les autres établis- est en mesure d’améliorer le modèle relationnel. L’in-
sements bancaires a été chahuté ces dernières années telligence artificielle et le big data, de plus en plus inté-
pour des raisons connues. Dans un monde qui n’a jamais grés, permettent une bien meilleure compréhension
autant bougé, nous pouvons très clairement décider de de l’ensemble des attentes. On peut ici clairement par-
décliner, uniquement survivre ou de devenir la banque ler de productivité commerciale intelligente, avec des
urbaine la plus attractive de la Place. J’ai pris un pari sur clients beaucoup plus satisfaits car contactés pour des
cette dernière option et me suis appuyé pour cela sur le sujets qui concernent leurs vrais besoins.
positionnement réaffirmé de la marque « son ADN urbain,
son ancrage au cœur des villes, au coin de la rue ». DEVENIR UNE BANQUE DES PROJETS DE VIE
L’ensemble de mes recherches m’ont démontré la perti- Depuis une décennie, les modes de relation avec les
nence de nous positionner sur les grands axes suivants. réseaux bancaires ont évolué : physique, e-mail, télé-
phone, chat, visio et autres. Ils ne suppriment cepen-
UNE BANQUE OUVERTE AUTOUR DE LA VILLE dant pas le besoin de conseillers bancaires, notamment
Poursuivre son engagement dans sa stratégie de leader- pour accompagner les projets de vie.
ship des banques urbaines devient un élément incon- Les clients sont aujourd’hui plus exigeants, car ils
tournable pour repositionner notre marque et trouver peuvent avoir de nombreuses informations en navi-
de nouveaux relais de croissance. C’est pour nous un guant, en s’informant, en comparant. Augmenter la
facteur important d’avoir dans notre établissement une qualité du conseil et la praticité sont deux facteurs
clientèle urbaine, en développement, plus riche que la importants de succès. Deux axes le permettent, le digi-
moyenne nationale, avec des implantations physiques tal lui-même et la formation.
de qualité, dont les deux tiers du chiffre d’affaires sont Notre business model s’attache à assurer la même facilité
produits sur l’axe Paris-Lyon-Marseille. que les « néo-banques » mais sans pour autant prati-
Ce positionnement est un élément puissant pour renfor- quer des services à tarif aussi bas. Dès lors, il nous faut
cer notre cohérence et notre singularité. Il nous oblige nous différencier par un service, un conseil de qualité
à repenser plus largement encore notre manière de rai- pour contrer des concurrents, certes légitimes mais qui
sonner car LCL s’est vraisemblablement attaqué au plus ne disposent pas de conseillers. Nous disposons d’un
difficile. Il est également nécessaire d’affirmer notre avantage comparatif certain, à la condition d’optimiser
orientation avec des preuves tangibles. Réussir à faire deux éléments. Le premier, continuer à investir pour
naître la confiance, trouver des marqueurs forts vont être aussi agile et performant que les banques en ligne
être les clés de notre succès de demain. sur le quotidien, notamment sur l’aspect transaction-
nel. Le deuxième, s’assurer de produire des conseils
LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE COMME LEVIER de qualité, dont la valeur ajoutée admettra une rému-
DE RENTABILITÉ nération. En somme, réussir à travailler « côte à côte »
La digitalisation a modifié la donne pour plusieurs rai- du client plutôt que « face à face ».
sons. D’abord, pour l’ensemble des réductions de coûts La solution idéale réside plus que jamais sur notre capa-
qu’elle est capable d’engendrer notamment dans les back- cité à créer des offres différenciantes. Nous avançons
office et tous les autres services à faible valeur ajoutée. avec l’objectif de passer à un système de solutions plutôt
Carrière professionnelle
Conseiller bancaire :
quel avenir dans les banques
de réseau ?
Laurent
A
Cadart u cours des vingt dernières années, le monde ouvrage Le Pouvoir de la confiance[1], sur quatre fondements :
Mastère Spécialisé
bancaire a subi trois chocs : – l’intégrité (accord entre les paroles et les actes) ;
Senior Management
Bancaire, Promotion – le premier est lié aux crises financières ; – l’intention (servir des intérêts mutuels) ;
2018-2019 – le deuxième est la réponse faite à ces crises – les capacités (les moyens mis en œuvre) ;
CFPB École avec le durcissement de la réglementation ; – et les résultats (accomplir ce que l’autre attend de nous).
supérieure – et le dernier est révélé par la transformation digitale Les banques traditionnelles font face aujourd’hui à deux
de la banque de notre société. phénomènes. Une baisse de la fréquentation des agences
ESSEC Business Ces nouvelles technologies ont modifié les habitudes et une baisse sensible de l’activité des conseillers en face-
School de consommation et les attentes des clients, mais elles à-face. D’autre part, l’attrition des portefeuilles touche les
ont aussi permis à de nouveaux acteurs « banque 100 % établissements, certains plus que d’autres, au regard de la
digitale » d’investir le marché, dans un monde bancaire composition plutôt vieillissante des portefeuilles. Ces nom-
en quête de rentabilité. En effet, la politique de taux bas breux éléments montrent l’obligation d’évoluer vers un
menée par la Banque Centrale Européenne impacte le modèle où le client est placé au centre des préoccupations.
PNB (Produit net bancaire) et indirectement le coeffi-
cient d’exploitation du système bancaire. VERS LE REMPLACEMENT
Les études menées sur les attentes, confortées par les DES PLATEFORMES À DISTANCE
sondages, démontrent que nos clients recherchent, chez Offrir une expérience simple et « sans couture » à nos
leur conseiller bancaire, de l’accompagnement (pour les clients est un enjeu essentiel pour nos réseaux. La ges-
soutenir dans des moments de vie forts), de la disponi- tion de la relation doit être placée au plus proche du
bilité et de l’accessibilité, un conseil personnalisé, avec client, dans l’agence ou le groupement d’agences, et
un juste tarif pratiqué et une qualité de service irrépro- gérée par un « conseiller relation » chargé d’accueillir
chable. Le conseiller reste un acteur essentiel qui apporte et de prendre en charge les clients des portefeuilles.
au client, la sécurité et la confiance dans son établisse-
ment. La confiance est le facteur qui change tout dans [1] Stephen Covey, homme d’affaires et conférencier américain, professeur
à l’université d’État de l’Utah, auteur de nombreux ouvrages, notamment Le
la relation. Elle repose, selon Stephen Covey dans son Pouvoir de la confiance, Éditions First, 2008.
Carine Férey
L
Mastère Spécialisé
Senior Management es établissements bancaires sont confrontés à la relever le défi pour accompagner la trajectoire de déve-
Bancaire Promotion
baisse de leur rentabilité sur le marché des parti- loppement fixé.
2018-2019
culiers. Ils se tournent donc de plus en plus vers le Pour adapter sa stratégie de développement, face à la
CFPB École secteur des professionnels, qui apparaît comme un concurrence accrue, il est essentiel de commencer par
supérieure
de la banque véritable levier de croissance. Parallèlement, les banques comprendre qui sont les professionnels d’aujourd’hui
sont aujourd’hui chahutées par des nouveaux acteurs. et de demain, ainsi que l’évolution de leurs comporte-
ESSEC Business
School Ceux-ci surfent sur les nouvelles technologies pour offrir ments et attentes. L’analyse des opportunités offertes par
des services bancaires basiques, à bas coûts, et une expé- les nouvelles technologies, dont l’utilisation de l’Intelli-
rience client alliant simplicité et rapidité, couplée avec des gence artificielle, doit être confrontée à la place de l’hu-
services non bancaires destinés à simplifier la vie des clients. main dans la nouvelle relation de confiance réclamée par
La Banque Postale peut s’appuyer sur sa capacité de les professionnels. Ainsi, l’ensemble des éléments étu-
transformation, la force du groupe, son réseau phy- diés permettront d’extraire les facteurs clés de succès de
sique et ses conseillers spécialisés pour se démarquer la nouvelle proposition de valeur de La Banque Postale,
et renforcer son positionnement stratégique au service banque et citoyenne, afin de la positionner comme un
des clients professionnels. acteur majeur du développement et du dynamisme de
Reste à organiser la synergie et la cohérence de l’offre l’entrepreneuriat en France.
face aux attentes hybrides de ce segment de clientèle,
lui-même en pleine mutation, qui plébiscite autonomie LES PROFESSIONNELS, CE MARCHÉ EN MUTATION
et rapidité via le digital et un accompagnement person- ET EN FORTE CROISSANCE
nalisé sur-mesure, via une expérience client basée sur Avec 3,7 millions de professionnels, ce marché repré-
* W. Chan Kim
et R. Mauborgne, la confiance et la relation humaine. sente un réel potentiel de développement pour l’écosys-
Stratégie Océan
bleu : comment créer
La Banque des Professionnels est l’un des quatre pro- tème bancaire. La création d’entreprises augmente chaque
de nouveaux espaces jets majeurs inscrits dans le plan stratégique du Groupe année, portée majoritairement par les immatriculations
stratégiques, Pearson,
2015. La Poste à l’horizon 2023. La Banque Postale doit ainsi
Parallèlement, nous constatons une hybridation de la bancaires, des tableaux de bord et des ponts avec la fac-
relation banquier/professionnel, s’appuyant de plus en turation, les notes de frais et la comptabilité. Toutefois,
plus sur la dualité du phygital. En parallèle d’une appé- ces néo-banques sont freinées dans leur croissance par
tence pour une relation principalement digitale, liée leur objectif de rentabilité et une profondeur d’offres
à une demande de simplification, via une expérience encore trop faible en matière de relation conseils et
client mobile et en temps réel sur les services de gestion de financement, attendus par ces segments de clients.
de compte, les professionnels plébiscitent une relation
client de qualité et un accompagnement personnalisé LA BANQUE POSTALE ENTRE MIMÉTISME
aux moments vitaux de leur parcours professionnel. Ils ET DIFFÉRENCIATION
se déclarent, de surcroît, sensibles à la valeur délivrée Face à ces acteurs, La Banque Postale a l’opportunité
et aux nouveaux modèles de tarification à l’usage ou au d’apporter la preuve que digital et humain ne sont pas
forfait personnalisé. deux notions opposées mais complémentaires. En accé-
lérant sa transformation digitale et omnicanal d’une
UNE RÉPONSE DU SECTEUR BANCAIRE part, en se démarquant par son offre de services d’autre
ESSENTIELLEMENT TECHNOLOGIQUE part, et surtout en capitalisant sur sa force de vente
Depuis les années 2000, de nouveaux acteurs appa- dédiée, elle sera en mesure de proposer sur le marché
raissent et érodent les parts de marché des banques tra- des professionnels une approche différente, sociétale
ditionnelles. Pour répondre aux besoins d’autonomie et et humaine de la relation client, que la concurrence n’a
d’instantanéité des professionnels, les pure-players pro- pas su apporter jusqu’alors.
posent ainsi des services de banque à distance. Le succès du lancement de Ma French Bank, la banque
Les néo-banques 100 % digitales quant à elles, comblent digitale de La Banque Postale pour les Professionnels est
le vide laissé par les banques et couplent une offre ban- conditionné par le respect d’une promesse client simple,
caire élémentaire low-cost, avec des services annexes des- basée sur les valeurs de citoyenneté de La Banque Pos-
tinés à simplifier la vie des entrepreneurs et indépen- tale et positionnée pour capter de nouveaux clients via
dants, comme par exemple un agrégateur de comptes un enrôlement facilité et rapide. Elle servira également
Virements
Financement
SS moyen/long terme
DÉ
INE VE
US Prélèvements L
O
B
PP
Crowdfundind
N
O
ER
M
R
Solutions d’encaissement
E
ON
CR
Accélération
AN
terme
SIN
e-commerce
ES
D
Mastère Spécialisé
Senior Management ans les années à venir ce qui fera la différence cipales questions auxquelles nous devons répondre
Bancaire, Promotion entre les établissements bancaires est la force dans les années à venir sont :
2018-2019 de l’humain et sa capacité à s’adapter en utili- – comment transformer nos conseillers en vendeurs
CFPB École sant tous les moyens à sa disposition afin de connectés ?
supérieure maximiser la satisfaction de nos clients. – comment réaffirmer le rôle de l’humain au centre
de la banque
de notre modèle et comment renforcer le rôle de nos
ESSEC Business LA STRATÉGIE DU CRÉDIT AGRICOLE agences physiques ?
School
CENTRE LOIRE – quelle est la valeur ajoutée du Crédit Agricole Centre
A contrario, d’autres établissements bancaires, le Crédit Loire perçue par le client ?
Agricole Centre Loire a choisi de maintenir l’implantation – quel pilotage commercial et quelle impulsion mana-
de nombreuses agences sur le territoire malgré une forte gériale pour mettre au centre le client et favoriser la
baisse des flux en agence. Fin 2010, le projet d’entreprise transversalité et la complémentarité des différents
du Groupe Crédit Agricole a eu comme ambition de deve- canaux et des équipes de spécialistes autour du client ?
nir une référence des banques multicanales de proximité, – comment se différencier de la concurrence et des
en mettant en place un nouveau modèle de distribution nouveaux acteurs ?
qui conjugue le 100 % multicanal et le 100 % humain. Le
nouveau « Projet client » du groupe réaffirme le rôle de LA TRANSFORMATION DU MONDE BANCAIRE
l’humain en tant qu’empreinte de notre différenciation. Pour répondre à notre problématique, il faut com-
Compte tenu de ces choix stratégiques, et afin de mencer par comprendre les raisons de la transforma-
maintenir notre rentabilité dans un environnement tion que nous sommes en train de vivre. L’évolution
de plus en plus concurrentiel et évolutif, nos conseil- du système bancaire, l’évolution des attentes de nos
lers doivent apprendre à travailler différemment en collaborateurs, ainsi que l’évolution des attentes de
ayant en permanence une logique omnicanale, notre nos clients et leur façon de rentrer en contact avec
concept d’agence bancaire se doit d’évoluer. Les prin- leur banque sont des éléments déterminants.
Source : Observatoire des métiers de la banque, « Étude nouvelles compétences, transformation des métiers à horizon 2025 : réussir l’accompagnement au changement », 2018.
Source : Observatoire des métiers de la banque, « Étude nouvelles compétences, transformation des métiers à horizon 2025 : réussir l’accompagnement au changement », 2018.
un monde bancaire en perpétuelle évolution. L’essor vie professionnelle est très important. 92 % d’entre
du digital est une opportunité pour les banques uni- eux refusent les résultats comme seul indicateur de
verselles de proximité de capitaliser sur les innova- performance. Les critères qualitatifs sont tout aussi
tions technologiques pour renouveler leur modèle importants. Le corps managérial devra adapter son
et augmenter leur rentabilité. D’après une étude de style de management ainsi que sa façon de piloter ces
équipes (voir Figure 2).
leur agence bancaire, 85 % des interactions s’effec- « La banque dispose d’une multitude
de sources de données sur
tuent désormais en digital, ce qui oblige les établis-
sements bancaires à remodeler leur réseau d’agences
(voir Figure 3). ses clients. Si ces données
étaient peu exploitées auparavant,
Ceci renforce la stratégie des banques de détail d’in-
vestir dans la transformation de leur distribution à
l’aide du digital afin de rendre possibles les opéra- les banques se penchent sur ce sujet
afin de fidéliser leurs clients. »
tions simples à distance et concentrer les interactions
humaines aux opérations à valeur ajoutée. Un modèle
de banque omnicanale performant devrait faciliter le
parcours client afin de passer d’un canal à l’autre de
manière fluide et s’orienter vers son canal préféré en
fonction de son besoin.
12 caractéristiques, j’en identifie 6 qui seront indis-
QU’ATTENDENT NOS CLIENTS ? pensables à notre conseiller bancaire.
Lorsqu’ils se déplacent dans nos points de vente,
nos clients sont très sensibles à l’accueil qui leur est 1. « Le vendeur connecté émerveille le client et lui fait vivre une
réservé. L’agence n’est rien sans ses conseillers, leur expérience d’achat unique et inoubliable. » Le changement
sens de l’accueil, leur sourire et leur capacité d’écou- de comportement des clients avec une communication
ter et résoudre les problématiques. libre sur la toile autour de son expérience d’achat, a
Dans son livre, Le Vendeur connecté, Benoît Mahé[2] augmenté le pouvoir du consommateur et nous a ame-
recueille 12 caractéristiques nécessaires aux vendeurs nés à changer la façon de mesurer la satisfaction client.
pour réussir dans le monde de demain. Parmi ces Toutes les banques sont passées d’un suivi de la satis-
faction client en note moyenne, à un suivi de l’Indice de
[2] B. Mahé (2018), Le Vendeur connecté : coaching et relation client à l’ère de
Recommandation Client (IRE) qui permet de mesurer
l’omnicanal, Maxima-Laurent du Mesnil. l’écart entre les clients qui sont promoteurs et les clients
qui sont détracteurs. Pour les fidéliser, il ne s’agit plus prendre la majorité des décisions à son niveau ou
de les empêcher de partir, mais de les engager à nous avec son manager direct.
recommander et à augmenter la notoriété de la marque. L’empathie et l’intelligence situationnelle sont des
qualités essentielles, qui l’aideront à créer une rela-
2. « Le vendeur connecté assume qu’il est la pierre angulaire tion de qualité avec son client.
de la stratégie omnicanale et phygitale. » Malgré les évo-
lutions des dernières années, la tendance n’est pas à 6. Dans la banque de demain, les compétences com-
la disparition de l’humain dans le commerce, mais portementales prendront le dessus sur les compé-
à la transformation de son rôle. Quand un client se tences techniques. Le profil requis sera une personne
déplace en boutique, il ne vient plus pour ses opéra- adaptable, capable d’apprendre et doté d’un sens inné
tions simples mais pour l’échange qu’il peut avoir avec du service client.
son conseiller. Si « la chimie n’opère pas à la rencontre de
la personne, les autres canaux ne serviront à rien[3] ». LES CLÉS DU SUCCÈS
DE LA STRATÉGIE OMNICANALE
3. « Le vendeur est connecté aux outils numériques en maga- Les clés du succès de la stratégie omnicanale sont :
sins » (tablettes, kiosques, smartphone…). » Depuis – inculquer la culture du service pour maximiser la
plusieurs années, la tablette s’est imposée comme satisfaction client ;
outil dans le cadre des rendez-vous clients et en tant – faire évoluer les méthodes de formation : stop au
qu’outil d’aide à la vente partagée avec les clients. e-learning, bienvenue au adaptative learning ;
Pour y arriver, un pilotage rapproché des équipes a – accélérer les investissements technologiques pour
été nécessaire et ce suivi s’impose à chaque nouvelle une hyperpersonnalisation de la relation client ;
fonctionnalité pour lever les freins des commerciaux. – repenser nos processus internes et les adapter en
Son intégration dans la « cérémonie de vente » doit continu pour maximiser l’IRE de nos collaborateurs ;
se faire naturellement, la tablette ne doit pas devenir – faire évoluer notre pilotage commercial en partant
une barrière physique entre le conseiller et le client. du client et non pas du conseiller ;
– ne pas empiler la technologie ;
4. « Le vendeur connecté sait convertir le big data en small – apprendre à partager le client ;
data… en human data. » La banque dispose d’une – ne pas opposer humain et digital, mais plutôt
multitude de sources de données sur ses clients. Si mettre le digital au service de l’humain pour mieux
ces données étaient peu exploitées auparavant, les servir son client.
banques se penchent sur ce sujet afin de fidéliser leurs
clients. La personnalisation de la relation client ne EN CONCLUSION
peut se faire que par l’exploitation de cette donnée, Pour garder le maillage de notre territoire, tout en tra-
mise à disposition du conseiller sous une forme simple vaillant dans une logique omnicanale et en maximi-
et compréhensible. Pour obtenir l’effet escompté, le sant la satisfaction client, nous devons capitaliser sur
conseiller doit utiliser ces informations avec intelli- nos valeurs : l’humain, la proximité, le service client.
gence dans le cadre de ses interactions avec le client. Lorsqu’on mesure les éléments les plus déterminants
Toute cette mine d’or ne sert à rien si elle n’est pas dans la relation d’un client avec sa banque, la qualité
alimentée et actualisée en continu par nos conseillers des relations humaines occupe la première place. Un
(ex. les hobbies d’un client et surtout ses projets) et client est beaucoup plus attaché à son conseiller qu’à
si elle n’est pas utilisée au bon moment. sa banque, car c’est bien le conseiller qui incarne les
valeurs du Crédit Agricole Centre Loire auprès des
5. « Le vendeur connecté se sent autonome et reconnu : cela le clients. « Les meilleures banques seront celles qui parvien-
rend crédible et responsable aux yeux du client. » Pour que dront à combiner, au sein de parcours clients réinventés, la
nos conseillers soit crédibles devant les clients, ils réactivité et l’efficacité du digital avec une qualité relation-
doivent se sentir autonomes dans leur activité et assu- nelle, humaine supérieure »[4]. n
mer les décisions qu’ils donnent au client. Le mana-
ger doit être capable de fixer des objectifs « smart »,
motivants et atteignables par la force de vente. En
parallèle, les délégations doivent lui permettre de
[4] P. Dessertine, J.-B. Mateu et Le cercle Turgot (2018), Les Banques face à leur
[3] Ibid. avenir proche : les banques, miroirs d’un nouveau monde, Eyrolles.
Rentabiliser un réseau
d’agences sans toucher
à l’emploi est possible !
De nombreuses banques multiplient les annonces de réduction d’effectifs et de fermetures
d’agences. Pourtant, une autre voie est possible grâce à une refonte du parcours client
intégrant le digital, mais également la conquête de clients dans le cadre d’un réseau
physique d’agences qui optimise les marges de manœuvre dégagées en termes d’emploi
par l’utilisation des nouveaux outils numériques et l’innovation organisationnelle.
Arnaud
Pinatel
D
e nombreuses banques multiplient les annonces
CESB Master
Spécialisé Senior de réduction d’effectifs et de fermetures d’agences.
Management, Pourtant, une autre voie est possible grâce à une
Promotion refonte du parcours client intégrant le digital,
2018-2019
mais également la conquête de clients dans le cadre
CFPB École d’un réseau physique d’agences qui optimise les marges
supérieure de manœuvre dégagées en termes d’emploi par l’utili-
de la banque
sation des nouveaux outils numériques et l’innovation
ESSEC Business organisationnelle.
School Les banques de détail, confrontées à une problématique
de rentabilité et à l’arrivée de nouveaux acteurs sont à
la croisée des chemins. Le nombre de salariés ne cesse
de baisser, lentement, mais sûrement depuis plusieurs
années[1]. Ce n’est pourtant pas une fatalité. Des solu-
tions peuvent être mises en œuvre pour continuer à
développer la base clients afin de faire face à l’érosion
des marges.
Les concepts d’inbound marketing, de coopétition et de
« L’inbound marketing
conduite du changement permettent d’envisager les consiste à attirer le prospect
modifications profondes à mettre en œuvre dans le
modèle de conquête de nouveaux clients afin de l’adap-
par du contenu ciblé et de
ter aux nouvelles attentes. qualité, diffusé en accès
libre par l’intermédiaire
[1] Communiqué FBF du 20 juin 2019 : « 362 800 personnes travaillent dans d’un site internet, référencé
correctement par les moteurs
les banques adhérant à la Fédération bancaire française (FBF) sur le territoire français.
Bien qu’en baisse tendancielle des effectifs – inférieure à 1 % par an en moyenne
de recherche. »
– depuis 2011, le secteur bancaire reste l'un des principaux employeurs privés en France
(1,9 % de l'emploi salarié privé). »
Stratégie bancaire
La Responsabilité sociétale
des entreprises (RSE)
peut-elle constituer le socle
d’un nouveau business model ?
Si la prise en compte des enjeux de RSE a été tardive dans les banques dans un contexte
post-crise, elle peut devenir le fondement d’une stratégie nouvelle, construite sur
une éducation financière plus poussée, une expérience client exclusivement basée
sur le conseil et la transparence, et une meilleure acculturation des conseillers à cette notion.
Vincent
L
Bagnis e combat de Greta Thunberg en Suède comme prises et la Responsabilité sociétale des entreprises, qui
celui des gilets jaunes en France sont l’expression est la plus proche traduction du terme Corporate Social
Mastère Spécialisé
Senior Management de la volonté d’une meilleure prise en compte des Responsability. Pour les Anglo-Saxons, le mot « social » a
Bancaire, Promotion attentes (économiques, sociales ou environne- une portée bien plus large qu'en français. Il renvoie à la
2018-2019 mentales) des citoyens. 78 % des personnes interrogées responsabilité de l’entreprise envers la société dans son
CFPB École dans un sondage Viavoice de 2015[1] indiquent que si ensemble, contrairement au mot français qui ne se rap-
supérieure elles étaient seules décisionnaires, elles accorderaient porte qu’aux rapports sociaux internes de l’entreprise.
de la banque une place importante aux questions de responsabilité Ainsi le terme « sociétal » désigne les responsabilités de
ESSEC Business sociétale dans leur entreprise. Elles sont même 85 % à l’entreprise à l’égard de ses multiples parties prenantes
School vouloir s’investir plus dans les démarches RSE de leurs (employés, actionnaires, clients, fournisseurs, etc.) et
entreprises. En quête de différenciation – dans un uni- bien au-delà « des simples relations employeurs/employés »[2].
vers d’autant plus concurrentiel que les néo-banques La responsabilité sociétale des entreprises peut alors se
s’attaquent au marché – et souhaitant redorer une image définir comme « la manière dont les entreprises gèrent leurs acti-
ternie par la crise économique de 2008 dont elles sont vités en vue d’avoir un impact positif sur la société, ce qui couvre
tenues pour responsables, il semble que la RSE puisse à la fois des enjeux environnementaux, sociaux et éthiques »[3].
permettre aux banques de se démarquer.
LA RSE, UN CONCEPT PAS SI MODERNE
VOUS AVEZ DIT RSE ? Alors que l’on pense souvent que le concept de Res-
Une simple recherche de cet acronyme sur le moteur de ponsabilité sociétale des entreprises (RSE) est une
recherche Google fait ressortir plus de 46 300 000 résul- émergence de la toute fin du XXe siècle, il n’en est rien.
tats et renvoie majoritairement vers quatre notions : le
développement durable, la Responsabilité sociale et
[2] F. Dejean et J-P. Gond (2004), « La responsabilité sociétale des entreprises :
environnementale, la Responsabilité sociale des entre- enjeux stratégiques et méthodologies de recherche », Finance Contrôle Stratégie,
vol. 7, n° 1, mars, pp. 5-31.
[3] M. Becker, « Definitions of Corporate Social Responsibility
[1] Sondage Viavoice « Salariés et entreprises responsables », pour Mindded, – What is CSR ? » : http://mallenbaker.net/article/clear-reflection/
Ekodev et Des enjeux et des hommes. definitions-of-corporate-social-responsibility-what-is-csr.
[4] M. Friedman (1970), « The Social Responsibility of Business is to Increase its [5] A.B. Carroll (1979), « A Three Dimensional Conceptual Model of Corporate
Profits », The New York Times Magazine. Performance », Academy of Management Review, vol. 4, n° 4, pp. 497-505.
sivement mettre en place des actions notamment afin devient un enjeu primordial. On voit alors fleurir, en
de limiter leur impact environnemental (protocole interne, codes de conduite et autres codes éthiques,
de Kyoto, charte de l’environnement, 17 objectifs de tandis que vis-à-vis de leur environnement extérieur,
Développement…). Il faut toutefois attendre les années les banques doivent se montrer irréprochables que
1990 pour constater, en France, une accélération de la ce soit en matière déontologique ou environnemen-
mise en place de politique RSE au sein tale. La RSE se révèle un moyen efficace pour
de toutes les entreprises, sans elles d’améliorer leur réputation. Un autre
pour autant pouvoir identi- enjeu, tout aussi structurant pour les
fier de réel catalyseur. Il banques traditionnelles, est leur
convient alors de s’in- besoin de développer leur parc
terroger sur ce qui a de clients. Les établissements
conduit les grandes bancaires connaissent en effet
entreprises à adop- de fortes tensions sur leurs
ter une démarche revenus, liées notamment
RSE. Paul DiMag- au contexte de taux bas
gio et Walter dans lequel ils se trouvent
Powell, avec leur depuis maintenant plu-
ouvrage de 1983 sieurs années et auquel ils
intitulé The Iron devront vraisemblablement
Cage Revisited : Ins- s’habituer. Face à cette baisse
titutional Isomor- de leur Produit net bancaire,
ue phism and Collective ils cherchent alors, d’une part,
Rationality in Organiza- à développer leur volume d’af-
tional Fields, nous offrent faires avec leurs clients acquis et,
un éclairage structurant. Le d’autre part, à conquérir de nouvelles
développement de la thématique relations. Dans cette quête, les banques se
RSE au sein des entreprises serait, heurtent à une concurrence exacerbée par l’arri-
selon eux, le fait du développement de normes, de la vée des néo-banques et autres FinTechs. On notera que la
mise en place d’un cadre légal et d’un phénomène de concurrence au sein du secteur bancaire est restée pen-
mimétisme des entreprises. Une homogénéisation dant longtemps très limitée. Une explication vient de
des organisations qu’ils appellent « isomorphisme ins- l’hyper-réglementation du secteur qui agissait comme
titutionnel »[6]. une forte barrière à l’entrée. La révolution numérique,
le développement du digital et, paradoxalement, les der-
UNE PRISE EN COMPTE TARDIVE nières évolutions réglementaires (DSP2[7] et RGPD[8]),
PAR LES BANQUES en desserrant l’étau, vont inverser la tendance et accé-
Pourquoi les banques ont-elles encore plus tardé à lérer l’arrivée de nouveaux acteurs sur le marché.
s’emparer de la problématique du développement res- La question plus globale est de savoir comment une
ponsable ? D’abord parce qu’en tant qu’industrie de banque traditionnelle peut se démarquer de ses concur-
services très peu consommatrice de ressources natu- rents, en ne misant pas uniquement sur les nouveaux
relles, elles n’ont pas été les premières ciblées par la modes de distribution de ses produits. Nous sommes là
société civile. D’autre part, du fait de l’importance de confrontés à un dilemme : celui de choisir entre mimé-
la régulation du secteur qui, en les protégeant de la tisme et différenciation. Alors que les établissements
concurrence, les a, tout du moins au départ, éloignées cherchent à se distinguer, notamment au travers des
des questions de RSE. innovations, ils adoptent pour autant des comporte-
La crise financière de 2008 va alors jouer un rôle d’ac- ments grégaires et ne font que suivre les mêmes ten-
célérateur en révélant au secteur l’importance de la res- dances, plutôt que réellement se différencier.
ponsabilité éthique des banques, que ce soit dans leur
choix d’investissement, de financement ou de mana-
gement. La défense de leur image et de leur réputation [7] La Directive des Services de Paiement 2 du 27 novembre 2017 : https://eur-
lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1527155500723&uri=CELEX%3A320
18R0389.
[8] Le Règlement général pour la protection des données du 27 avril 2016 a
[6] P.J. Di Maggio et W.W. Powell (1983). « The Iron Cage Revisited : Institutional pour vocation d’encadrer la récolte, le traitement et la gestion des données
Isomorphism and Collective Rationality in Organizational Fields », American personnelles et numériques dans l'Union européenne : https://eur-lex.europa.
Sociological Review, pp. 147-160. eu/legal-content/FR/TXT
Participer au développement
d’économies durables
pour bâtir un avenir meilleur
L
Mastère spécialisé
’éthique regroupe un ensemble de règles destinées à la fin du siècle. Ainsi, le profit réalisé par les clients,
Senior Management
Bancaire, Promotion au bien vivre ensemble et à la justice sociale. La longtemps considéré comme suffisant à donner du sens,
2018-2019 répartition des richesses en est donc un domaine montre désormais ses limites et ne semble plus suffi-
CFPB École de réflexion majeur. sant pour satisfaire à la pérennisation du modèle. Nous
supérieure Sans compter le pouvoir considérable généré par la déten- avons assisté à une décorrélation des objectifs recher-
de la banque tion de données sur ses clients dans l’ère digitale, les chés entre les actionnaires, le management, et la société
ESSEC Business établissements bancaires traditionnels jouent un rôle clé civile. Pour retrouver cet alignement, les banques doivent
School dans nos sociétés par les financements qu’ils accordent. désormais faire des choix plus sélectifs sur la contri-
Ils exercent aussi une puissance supranationale en par- bution positive à l’évolution de la société et de l’envi-
ticipant au financement de la dette des États. Le déve- ronnement des projets qu’elles financent et se montrer
loppement économique d’un pays est ainsi directement transparentes quant à la manière dont leurs produits et
corrélé à son niveau de bancarisation. services créent de la valeur.
L’enjeu du financement des entreprises à impact positif,
ACCOMPAGNER ET FINANCER DES PROJETS c’est-à-dire dont l’activité est économiquement efficace,
À IMPACT POSITIF écologiquement tolérable et/ou socialement équitable,
Ainsi, les banques ont le pouvoir d’accompagner ou non est complexe car ces entreprises répondent rarement
un agent dans ses projets et son développement écono- aux critères d’octroi classiques du fait de leur profil de
mique en fonction du risque de non-remboursement risques spécifiques (croissance lente, rentabilité des
perçu et de la rentabilité de l’opération. Néanmoins, capitaux faible, créances de qualité moyenne…). L’en-
ces deux critères ne sont plus suffisants et il est désor- trepreneuriat social priorise le développement d’une
mais indispensable d’y ajouter des critères sociaux et économie durable et la lutte contre l’exclusion au détri-
environnementaux. Nous pouvons souligner que 2 500 ment du profit personnel. Il développe ainsi des solu-
milliards de dollars d’actifs financiers pourraient être tions innovantes et engagées pour de nombreux pro-
perdus si le réchauffement climatique dépasse les 2,5° blèmes économiques, sociaux et environnementaux
d’actionnaires. C’est l’occasion pour les gestionnaires de pour le recrutement, la formation, la gestion des car-
fonds ISR d’exercer un pouvoir de contrôle et d’amélio- rières, la diversité, les possibilités de reconversion,
ration de la gouvernance des entreprises dans lesquelles l’adaptabilité des postes, le dialogue social, les condi-
ils investissent. Ils peuvent ainsi influencer les décisions tions de travail, le respect de la vie privée… Il est éga-
vers plus d’éthique et de développement durable tout lement indispensable de contribuer mondialement à
en profitant des effets positifs sur la valeur des titres et l’élimination de toutes les formes de discriminations
donc valoriser les placements des épargnants. et de travail forcé. Le management de proximité se doit
également d’aider les salariés à trouver le sens de leur
PRÉSERVER L’INTÉRÊT DES CLIENTS action dans l’entreprise en communiquant sur la vision
Envers les clients, la responsabilité des banques repose à long terme. Statistiquement, l’innovation et la produc-
sur la qualité éthique et la sécurité des produits propo- tivité augmentent lorsque les employés sont en accord
sés, ainsi que sur l’exhaustivité et la transparence des avec la stratégie. Les entreprises bénéficient ainsi de
informations communiquées. Un conseil en investisse- l’implication de leurs collaborateurs qui deviennent
ment de qualité repose sur trois piliers que sont la proxi- des ambassadeurs et des clients potentiels.
mité, la proactivité, et l’aptitude à réaliser une gestion
financière de qualité dans le respect du profil de risque DES OBJECTIFS DE GESTION INTERNE
du souscripteur. Le respect de la primauté des intérêts ET DE GOUVERNANCE
du client n’est plus à citer tant il est évident. Ainsi, pour Mise à part la consommation d’énergie, l’impact envi-
s’assurer de l’aspect responsable de l’offre créée, il faut ronnemental des activités bancaires est faible. Le rôle
régulièrement s’interroger sur les solutions attendues éthique des établissements dans ce domaine ne se
limite donc pas à l’impact de la banque elle-même,
mais repose sur les orientations d’investissement réa-
lisées. Il convient de prévenir la pollution, de réduire
« Les banques doivent aussi la production de déchets, de protéger les ressources
assurer un rôle didactique
naturelles et de préserver la biodiversité.
La gouvernance désigne la manière dont la prise de
pour accompagner les clients épargnants décision est organisée dans l’entreprise. Cette notion
[3] 362 800 personnes travaillent dans les banques adhérant à la Fédération
bancaire française (FBF) sur le territoire français (source : Site FBF juin 2019)
C
Senior Management
Bancaire, Promotion onfrontées à la transition énergétique, au dérègle- le financement du logement. Nous avons également
2018-2019 ment climatique, à la digitalisation, les banques 37 209 agences bancaires, 56 649 distributeurs automa-
CFPB École et les grandes entreprises prennent un virage tiques et il a été assuré en 2017 pas moins de 22 milliards
supérieure important dans leurs stratégies et agissent en d’opérations de paiements. Selon l’Observatoire de la
de la banque
prenant en compte les enjeux de la société dans son microfinance, 99 % des Français ont un compte ban-
ESSEC Business ensemble, car les États ne peuvent pas tout faire. Dans caire. Sur le terrain financier, les banques représentent
School leurs décisions, les banques doivent agir en tant qu’ac- une contribution de 2,1 % de la valeur ajoutée totale en
teurs responsables de la société. Toutefois seront-elles France. La banque est bien un acteur majeur de la vie
capables de devenir des leaders de l’impact positif tout économique française. Alors en quoi la banque a-t-elle
en restant des leaders économiques ? besoin de se poser la question de son impact ?
La banque est une entreprise spéciale, car elle a une
UN ACTEUR MAJEUR DE LA VIE ÉCONOMIQUE capacité à contraindre d’une part et à accompagner
Si l’on doit parler d’impact, rappelons d’abord qu’en d’autre part. En effet, le banquier peut décider qu’il ne
termes d’utilité à la communauté, les banques emploient souhaite plus financer les entreprises ayant un lien avec
366 200 collaborateurs en France. En 2017, le secteur le charbon d’un côté, et de l’autre, il peut mettre sur la
bancaire a réalisé 42 200 embauches, dont les deux tiers table 155 milliards d’euros (exemple de la banque BNP
en CDI et 61 % recrutés au statut cadre. Selon l’OCDE, Paribas) de financement en faveur de la transition éner-
la banque est l’un des six principaux atouts de l’écono- gétique et des secteurs considérés comme contribuant
mie française ; 60 % du financement de l’économie pro- directement aux objectifs de développement durable
vient en effet de banques, contre 30 % de l’autre côté de des Nations unies. C’est cette opportunité de position-
l’Atlantique. Les crédits aux entreprises ont représenté nement que la banque doit exploiter pour à la fois agir
965 milliards d’euros à fin 2017, et les crédits aux ménages sur l’avenir de la société et ses préoccupations et conti-
1 160 milliards d’euros dont 954 milliards d’euros pour nuer à jouer son rôle de financement de l’économie
LA THÉORIE DE SIMON SINEK prendre en compte dans leur décision : les actionnaires.
R. Edward Freeman[3] a développé une théorie révolu-
Le cercle d’or permet de prioriser les trois grandes tionnaire de la stratégie d’entreprise permettant aux
questions à se poser avant d’engager toute action : managers une vision plus ouverte sur la société dans son
« pourquoi ?, « comment ? », « quoi ? » ensemble et plus objective sur la réflexion à mener par
les entreprises dans la poursuite de leur activité com-
merciale. L’idée principale est que l’entreprise, et plus
particulièrement la banque, a plusieurs interactions
internes et externes à son organisation. Ces « organi-
sations » sont toutes aussi concernées par les décisions
prises par l’entreprise et doivent être intégrées dans la
réflexion du manager tout autant que l’actionnaire qui
Why? devient dans ce modèle une partie prenante comme une
autre. Désormais, l’intérêt des différentes parties pre-
nantes doit être pris en compte au-delà de l’unique intérêt
How?
de la finance qui devra faire avec une réflexion plus large
qu’une vision de profit. Dans sa prise de décision pour
What?
avoir le meilleur impact possible, la banque doit négo-
cier avec les parties prenantes le meilleur choix possible.
Les parties prenantes représentent ici les actionnaires
qui partagent donc leur rôle, même si, sans être naïf,
leur pression reste importante surtout dans une banque,
les parties prenantes internes que sont les salariés en
quête de sens et d’équilibre professionnel et privé, et les
syndicats acteur engagé pour les salariés de l’entreprise,
réelle au travers de projets responsables et ambitieux les partenaires opérationnels qui sont les clients, four-
dans un monde qui change et pour un avenir meilleur. nisseurs, sous-traitants et partenaires économiques, la
communauté sociale qui désigne les services publics,
DEVENIR UN LEADER DE L’IMPACT POSITIF les médias, les ONG, les associations, la communauté
La banque est aussi cet organisme dont 84 % des Fran- environnante et la société civile dans son ensemble et
çais sont satisfaits mais auquel seulement 64 % font pour finir, l’environnement naturel qui est un élément
confiance[1]. Ceci s’explique en partie par la crise de 2008, déterminant dans les décisions des entreprises au travers
pour laquelle les banquiers sont tenus pour responsable. des conséquences de leurs actions sur l’environnement,
Les scandales qui ont suivi ensuite n’arrangent pas non le climat et sur la planète. La banque construit son profit
plus l’image de la banque. La banque est aussi, depuis avec toutes ces pressions sociales et environnementales.
toujours, le symbole du capitalisme dur, avec comme La responsabilité sociale et environnementale (RSE)
seule motivation la recherche du profit à tout prix. Le est intégrée dans la stratégie, le greenwashing est révolu.
leadership économique est reconnu, mais la banque doit
se réconcilier avec la société pour devenir le tiers de COMMENCER PAR SE DEMANDER POURQUOI ?
confiance recherchant le bien commun pour aboutir à La banque souhaite ainsi devenir ce leader inspirant agis-
ses profits. Les Français ont besoin davantage d’enga- sant pour le bien collectif et un avenir meilleur. C’est selon
gement pour faire confiance à leur banque, de plus de cette philosophie que la banque BNP Paribas a intégré à
services ; les clients veulent du « positive banking ». son Comex une direction de l’engagement en 2017, une
La banque cherche donc à devenir un leader de l’impact décision majeure qui montre l’importance que la banque
positif et s’inspire de nombreuses théories. La première souhaite donner à cette démarche. L’entreprise compte ins-
est que l’entreprise ne peut pas avoir une vision focali- pirer plutôt que « manipuler » au sens de Simon Sinek[4],
sée uniquement sous le prisme des actionnaires. Dans par des prix, des produits ou des promotions, etc. Simon
l’approche classique propre à Milton Friedman[2], les Sinek, dans son ouvrage Commencer par pourquoi [5], a déve-
managers d’entreprises voient une seule partie prenante à
[3] Philosophe et universitaire américain, connu pour ses travaux sur la théorie
des parties prenantes.
[1] Étude Relations banques et clients – 8e édition Deloitte [4] Conférencier britannique, auteur de livres sur le management et la motivation.
[2] Économiste américain (1912-2006), Prix Nobel d’économie 1976 [5] Éditions Performance, 2014.
Management
Faire converger enjeux des banques
et aspirations des salariés
Les banques doivent faire face à des enjeux fils d’entrepreneurs qui ont besoin de relever des défis et
d’atteindre des objectifs, souvent les jeunes qui ne veulent
majeurs financiers et réglementaires et adapter plus subir le travail.
– l’expérience salarié et la qualité de vie au travail. Après
leur stratégie en conséquence. Cette adaptation la notion d’expérience client, c’est l’expérience salarié qui
doit aussi se faire sur le plan managérial vis-à- est recherchée et son bien-être. L’environnement (l’am-
biance, l’esprit d’équipe, la flexibilité) reste un élément
vis des équipes et des facteurs de motivation. de motivation pour les salariés ;
Thomas – le management collaboratif. L’une des principales pré-
N
Belotti os organisations ont évolué, passant du taylo- occupations relevées dans nos organisations est la verti-
Mastère Spécialisé risme[1] à l'ohnisme[2], pour tendre vers l’entre- calité et le fonctionnement exclusivement top down. Alors
Senior Management prise dite libérée… ou pas ! Le monde bancaire, que Vineet Nayar[3] est persuadé que « le bas représente une
Bancaire, Promotion dans ses relations externes (avec les clients), a lui énorme opportunité inexploitée ».
2018-2019 aussi évolué puisque nous sommes passés d’une rela-
CFPB École tion statique et captive à une relation choisie et challen- LES SOLUTIONS
supérieure gée, tout en adaptant les canaux de distribution (l’ère Pour satisfaire ces besoins, trois principales pistes de
de la banque
du phygital). Les rapports internes (avec les salariés) réflexion ont émergé :
ESSEC Business ont également évolué, d’un management des tâches à un – l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle :
School
management des neurones, où l’exigence managériale développement du temps partiel, télétravail, flexibilité
des salariés est plus forte. Enfin, les banques sont face des horaires, crèches d’entreprise et la prise en compte
à des enjeux financiers, réglementaires, RH, technolo- d’une distance ou temps maximum entre lieu de travail
giques, organisationnels… qu’il faut aussi surmonter. et domicile ;
S’il semble difficile d’avoir un impact sur certains aspects – le management où, notamment, les décisions concernant
tels que les taux, la pression réglementaire, une réflexion les rétributions financières doivent être laissées au N+1
peut être menée sur la motivation des salariés. sans interférence du N+2. Il s’agit également de doter les
La littérature et les interviews auprès de professionnels managers d’un budget permettant d’organiser des moments
ont permis d’identifier les facteurs de motivation, cer- de convivialité dans le but de créer de la complicité entre
tains étant satisfaits et d’autres non. les membres d’une équipe, qui, au-delà de la cohésion,
permettra de mieux consolider l’équipe en faisant appel
LES FACTEURS DE MOTIVATION aux émotions. Enfin, il conviendrait de développer le feed-
Parmi les facteurs de motivation satisfaits, nous retrou- back à double sens, c’est-à-dire permettre aux collabora-
vons notamment l’autonomie et la responsabilisation, teurs de s’exprimer lors des entretiens annuels sur leurs
le développement des compétences, la valorisation, la attentes vis-à-vis de leur manager ;
confiance et le droit à l’erreur. – l’intrapreneuriat, en permettant à chacun d’entreprendre
D’autres facteurs de motivation restent non satisfaits : au sein et pour son entreprise, en allouant du temps et un
– la réalisation de soi et l’accomplissement. Ce besoin budget à ceux souhaitant développer une nouvelle idée.
d’accomplissement de soi est surtout visible chez les pro- Ces idées ne sont pas exhaustives et une réflexion régu-
lière sur les facteurs de motivation doit être menée afin
[1] Du nom de l'ingénieur américain Frederick Winslow Taylor (1856-1915), que les établissements bancaires puissent adapter leur
le taylorisme désigne une forme d'organisation scientifique du travail fondée management et compter sur la mobilisation des salariés. n
sur la parcellisation du travail et la standardisation des outils pour obtenir un
rendement maximum dans le cadre d'une organisation.
[2] Inventé par l'ingénieur japonais Taiichi Ono, l’ohnisme ou toyotisme est une
forme d'organisation du travail fondée sur une plus grande responsabilisation
des travailleurs, qui voient leurs tâches enrichies, deviennent polyvalents et [3] Homme d’affaires indien, expert des technologies de l’information et du
doivent s'impliquer dans leur équipe. management, auteur de Les Employés d’abord, les clients ensuite, Ed. Diateino, 2011.
L
’origine des activités bancaires remonte à une histoire américaine, on dénombre plus d’ingénieurs que chez
Mickaël
très ancienne… Cependant les banques ne sont pas Twitter. Le monde entier est devenu technologique,
Blanchard immortelles comme nous l’avons vu lors de la crise y compris celui de la finance. Cette numérisation de
Mastère Spécialisé des subprime de 2008. Elles sont en quasi-mono- l’activité et un contexte réglementaire tolérant ont
Senior Management pole sur leur secteur d’activité. Mais dans un environne- incité des start-up à s’engouffrer dans l’industrie ban-
Bancaire, Promotion
ment économique incertain et de taux d’intérêt bas, les caire. Des FinTechs et néo-banques attaquent donc les
2018-2019
rentabilités souffrent. Les banques traditionnelles doivent banques par tous les côtés[1]. Elles créent de la valeur
CFPB École donc évoluer, également poussées par la révolution digi- dans le domaine du paiement, du crédit ou du conseil
supérieure tale. Tout l’enjeu pour elles sera de se transformer, tandis financier. Cependant, aujourd’hui, le plus grand dan-
de la banque que leur modèle continue de fonctionner. ger provient sûrement des géants de la tech (GAFAM[2])
ESSEC Business qui, après avoir bouleversé l’univers des médias, de la
School UNE CONCURRENCE NOUVELLE D’ACTEURS distribution, du tourisme ou des transports, semblent
FINANCIERS
« Nous sommes une entreprise technologique », a déclaré Lloyd
[1] R. Bouyala (2018), La Révolution FinTech : acte 2, RB Édition.
Blankfein, le dirigeant de la banque d’affaires Goldman [2] GAFAM est l'acronyme des géants du Web : Google, Apple, Facebook,
Sachs. En effet, parmi les collaborateurs de la banque Amazon et Microsoft.
avoir trouvé un nouveau terrain de jeu dans la finance[3]. DES ÉVOLUTIONS SOCIÉTALES MAJEURES
Elles ont pour elles une grande puissance financière et À VENIR
une très forte audience. Depuis une dizaine d’années, le comportement du consom-
Cette disruption des services financiers est rapide et mateur s’est transformé très rapidement. Il devient de
violente. Les banques sont donc très exposées car ces plus en plus urbain et technologiquement connecté.
nouveaux acteurs attirent les clients par la viralité et les Dans ce contexte, plusieurs tendances se dégagent :
réseaux sociaux en se reposant sur des principes simples – un besoin de transparence : les entreprises doivent se
de gratuité, de haute valeur de produit, de grande sensi- préparer à devoir rendre des comptes sur la composi-
bilité au design et d’une expérience client élevée. tion des produits et les tarifs pratiqués ;
À côté, les banques sont chères, leur proposition de – l’instantanéité et l’hyper personnalisation seront
valeur reste floue avec un design pas encore au niveau la norme. Les nouvelles générations demandent des
et un manque de confiance dans l’image de marque. produits et des services parfaitement adaptés à leurs
Elles sont donc prises en tenaille entre les GAFAM et les besoins ;
FinTechs mais elles capitalisent sur leurs points forts : la – la valeur sera désormais placée dans l’usage des pro-
régulation, la confiance des clients dans la protection duits. L’essor de l’économie collaborative en est la preuve ;
de leurs données personnelles et la masse d’informa- – le marché des seniors sera en plein boom et consti-
tions clients qu’elles détiennent. tuera un marché d’avenir pour les banques ;
– le phygital mis en place dans les points de vente phy-
LA MAÎTRISE TECHNOLOGIQUE, UN ENJEU MAJEUR siques afin de faciliter le processus d’achat est une véri-
La frontière entre tous ces acteurs s’estompe progres- table tendance aujourd’hui ;
sivement et il existe un monde d’opportunités pour les – enfin, la raréfaction des moments d’échanges entre
banques à se transformer. Pour cela elles doivent mon- une entreprise et ses clients bouleverse la façon de
ter en puissance sur la maîtrise des dernières techno- s’adresser à ces derniers et augmente les enjeux de
logies de rupture comme l’intelligence artificielle ou la l’expérience client.
blockchain. Ces innovations envahissent nos sociétés à Dans un contexte de transformation numérique, l’un
une vitesse incroyable. des rôles principaux des individus en entreprise sera
d’offrir des réponses typiquement humaines, prenant
en compte le contexte émotionnel.
Stress optimal
Zone
de Pression
réalisation
Fatigue
Anxiété
Satisfaction Resistance
Fatigue Performance
Épuisement
Créativité
Ennui Progression Perte de contrôle
Confiance
Inactivité Panique
Initiative
Sommeil Burn out
Dépression
Absence Excès
de stress de stress
Niveau de stress
[8] Développée en 1908 par les psychologues Robert Yerkes et John Dilligham
Dodson.
Murielle
L
Michon
’analyse du client via les données risque exigées vs être alerté d’une opportunité commerciale. Ainsi, le
Mastère Spécialisé par les instances réglementaires pourrait être un risque et le marketing deviennent complémentaires.
Senior Management outil pertinent pour le marketing. En analysant L’un et l’autre enrichissent l’expérience client, élément
Bancaire, Promotion
le comportement clients dans la durée, les don- majeur dans le choix d’un réseau bancaire.
2018-2019
nées deviennent prédictives de la relation du client avec
CFPB École sa banque et permettent d’affiner la stratégie commer- LES ENJEUX LIÉS À L’OUVERTURE
supérieure ciale. Leur utilisation permettrait de se projeter sur un DU COMPTE COURANT
de la banque
événement futur à forte probabilité de réalisation, pou- L’environnement bancaire est en pleine mutation. La
ESSEC Business vant non seulement être source d’actions commerciales digitalisation, la réglementation impactent fortement la
School pour la banque, mais aussi créer des alertes pour le client rentabilité des grandes banques universelles en favori-
en amont d’un risque ou d’une opportunité, liés à une sant l’arrivée de nouveaux concurrents et en édictant de
modification de son environnement. nouvelles normes prudentielles. Au sein de cet écosys-
Le pilotage de ces données prédictives pourrait optimiser tème, la capacité d’attraction de nouveaux clients n’est
le diptyque risque-rentabilité, tant pour la banque que pas identique d’une banque à l’autre. Les banques tra-
pour le client : côté banque, se prémunir de la fermeture ditionnelles se caractérisent par une faiblesse d’attrac-
de comptes vs améliorer la profitabilité d’un compte ; côté tion alors que les nouveaux acteurs attirent la clientèle
client, être alerté du coût d’un comportement bancaire via des offres promotionnelles très avantageuses. Les
nouveaux acteurs souhaitent asseoir leur croissance
sur des ouvertures de compte en proposant une offre
Méthodologie courte, simple, lisible, gratuite, sans agence et sans
conseiller dédié. Les banques en ligne et les néo-banques
Pour conduire cette étude, des observations d’entretiens clients ont été effectuées représentent aujourd’hui plus de 22 % des ouvertures
dans plusieurs agences bancaires de la même enseigne. En complément à ces obser- de compte, les situant au global en première position
vations ont été réalisées soixante interviews de clients, de conseillers et de mana- devant le Crédit Agricole[1]. Plusieurs acteurs évoluent
gers. L’étude qualitative s’est conclue par l’organisation de deux ateliers de design
négativement par rapport à 2016 : La Banque Postale, les
thinking.
Caisses d’Épargne et la Société générale. C’est un défi
Parallèlement à cette collecte de données terrain, une recherche documentaire a été
majeur pour les banques de détail qui sont confrontées
effectuée pour s’enrichir de réflexions sur le risque, l’expérience client, les motivations
des collaborateurs et pour mieux appréhender le marché des comptes courants.
[1] Source : Direction Études et Veille, La Banque Postale.
« Un des points de vigilance bancaire fait l’objet de nombreuses études aux calculs de
plus en plus sophistiqués intégrant la probabilité de l’oc-
est la qualité des données saisies currence d’un événement. Un des points de vigilance est
dans le système d’information la qualité des données saisies dans le système d’informa-
tion qui nourrissent les algorithmes conçus par les Data
qui nourrissent les algorithmes Scientists. Selon la précision et la véracité des informations
conçus par les Data Scientists. » collectées, le calcul de la probabilité de défaut sera proche
de la réalité et de la situation financière du client. Du fait
de cet enjeu de la qualité de la donnée, le niveau de risque
est non seulement de la responsabilité de la direction des
à la remise en cause du modèle relationnel traditionnel risques, mais aussi de celle des directeurs opérationnels.
basé sur l’ouverture des comptes en agence. L’ouverture Chacun à son niveau doit avoir conscience des risques
des comptes courants dans la banque de détail est fon- engendrés par son activité. La connaissance client lors
damentale pour la pérennité de son activité. Le compte de l’ouverture d’un compte et le respect du KYC imposé
courant est à la base de l’entrée en relation et définit la par la 4e directive européenne sont les fondamentaux du
notion de banque principale. Il est pourvoyeur de PNB début de toute relation commerciale.
via les commissions, la souscription de produits ban-
caires complémentaires, et tous les autres événements UNE NOUVELLE APPROCHE COMMERCIALE
de la vie d’un compte. Mais il est aussi porteur de risque. Concernant la vente de produits, le marketing mix tradi-
tionnel se définit par 4 P : le Prix, le Produit, la Publicité
GESTION DU RISQUE ET QUALITÉ et la Place (le mode de distribution). Dans le milieu ban-
DES DONNÉES caire, ce mix est peu différenciant : le prix et le produit
Le Comité de Bâle définit le risque bancaire comme l’as- sont quasi identiques d’une marque à l’autre, la publicité
sociation de deux éléments : un aléa et une perte poten- est réglementée et le mode de distribution reste l’agence
tielle. C’est cette perte potentielle qui constitue tout l’enjeu ou internet. Avec le mix des services, Xavier Pavie[2] men-
du risque. Les différentes réglementations prudentielles tionne l’ajout de trois nouveaux P : le Process, le Person-
Bâle I, II, III, ont renforcé le pilotage des risques au fil des nel et les Preuves matérielles (preuves que la promesse
crises systémiques qui ont jalonné l’histoire du système a été tenue). Le personnel et le physical evidence (preuves
bancaire international. Elles imposent aux banques une matérielles) sont primordiaux pour un service réussi,
gestion très pointue de leurs risques en leur demandant pour qu’il puisse se passer au bon moment et au bon
de les identifier, de les quantifier, de les piloter et de les endroit avec la bonne personne. La servicisation est le
couvrir avec un niveau de provisions suffisant pour garan- concept le plus adapté pour définir au mieux le marketing
tir la solvabilité de leurs établissements. Avec l’évolution contemporain des services, et donc celui de la banque.
des statistiques et la complexité de l’économie, le risque Ce néologisme indique le passage de la fourniture d’un
produit à une logique de prestation de services.
Cela pourrait être un nouveau moteur de croissance, en
1. LA PYRAMIDE DE GARTNER proposant de répondre aux attentes des clients par la créa-
tion de services autour du produit et par la personnalisa-
tion de la relation. Au-delà du produit qu’est une ouver-
ture de compte courant, le client souhaite rencontrer une
personne compétente et disponible avec laquelle il peut
échanger sur le financement de projets, sur le risque d’une
Make me
better, safer, or situation ou d’une opération. Un client choisit son ban-
more powerful. quier selon l’expérience vécue lors d’entretiens de vente
Provide what I need réguliers renforçant la confiance et l’envie de continuer
without me asking. dans le temps la relation établie lors du premier rendez-
Resolve my needs vous, le besoin ultime du client étant « Make me better, safer
when I ask. or more powerful : Rendez-moi meilleur, plus sûr ou plus puissant ».
Solve your problem when I ask. Sous forme de pyramide, le cabinet Gartner propose cinq
phases dans les attentes des clients, de la plus primaire,
Furnish information I can use.
Source : Gartner, 2018. [2] Professeur à l’ESSEC Business School, directeur du centre i-Magination,
chercheur associé à l’Institut de recherches philosophiques.
« Ces données de
l’acquisition », 31 mars 2015, Revue Banque n° 784 : http://
www.revue-banque.fr/banque-detail-assurance/article/
déséquipement progressif
banque-detail-un-double-enjeu-pilotage-actif-selec.
1. L’AGENCE COMME CHEF D’ORCHESTRE DU PARCOURS CLIENT La mise en place de ce nouveau design organisationnel
de l’agence passe donc par un triple choc : choc des
Avant la visite en agence structures, choc des métiers, choc du management[3].
[1] Patricia Rossi et Nina Krey (2017), Marketing Transformation: Marketing Practice [3] Michel Mathieu (2014), Nouvelles banques – Les banques ne seront plus jamais
in an Ever Changing World, Springer. les mêmes, Éd. Débats publics.
[2] Jacques Lendrevie et Julien Lévy (2014), Mercator, Dunod. [4] Bernard Roman et Alain Tchibozo (2017), Transformer la banque, Dunod.
Conformité
El Abidine
D
Amrane epuis la crise financière de 2008, de nombreuses certaines ont davantage marqué le paysage bancaire.
Mastère Spécialisé réglementations ont fait leur apparition pour On retiendra la digitalisation favorisée par l’apparition
Senior Management assurer et renforcer la stabilité des marchés d’Internet, la technologie Blockchain et sa cryptomon-
Bancaire, Promotion
financiers. Afin de respecter ces nouvelles règles, naie, les API (Application Programming Interface) fortement
2018-2019
les autorités de contrôle, représentées notamment par utilisées par les FinTechs, ou bien encore l’intelligence
CFPB École
l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) artificielle dont aucun établissement bancaire ne sau-
supérieure
de la banque et l’AMF (Autorité des marchés financiers), ont infligé rait désormais se passer.
de multiples sanctions financières. Face à ce renforce- Ces évolutions technologiques ont donc bousculé
ESSEC Business
School ment réglementaire, les banques se sont réorganisées les habitudes des banques mais également celles des
et chaque collaborateur a dû être mis à contribution. La consommateurs. Ces derniers font désormais preuve
fonction conformité a ainsi pris une place centrale dans de plus d’autonomie et d’exigence à l’égard des éta-
un environnement économique difficile où les priori- blissements financiers. Ils n’hésitent plus à les quitter
tés étaient orientées vers le développement de l’activité au profit de banques en lignes et néo-banques qui pré-
commerciale. sentent des modèles de consommation plus adaptés et
des tarifs préférentiels. Un phénomène accentué par les
UN ENVIRONNEMENT EN PROFONDE réseaux sociaux devenus influents dans le monde de la
ET PERPÉTUELLE MUTATION consommation et qui n’ont pas épargné les banques.
Au lendemain de la crise, le modèle des banques dont Ces nouvelles réglementations se sont donc révélées de
la pérennité n’avait jamais été ébranlée jusqu’ici, était leur côté menaçantes puisqu’elles pouvaient conduire à
remis en cause. Les politiques prenaient le sujet en main des sanctions financières, à la cessation d’activité voire
avec la création de nouvelles normes internationales et à des sanctions pénales. Elles ont ainsi conditionné
européennes. Les banques qui se considéraient intou- l’activité de la banque de détail et celle de ses collabo-
chables furent bien surprises de se voir ainsi sanction- rateurs. Parmi celles qui furent le plus contraignantes,
nées. Face à une position des autorités de contrôle très on retrouve la directive européenne concernant la lutte
claire, elles ont été contraintes d’investir, de s’organiser contre le blanchiment et le financement de terrorisme,
et de structurer leur activité de conformité. FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) ou bien encore
Ce travail a été réalisé dans un contexte de transforma- l’AEOI (Automatic Exchange Of Information). Ces dernières
tion technologique sans précédent. Parmi toutes ces ont notamment incité les banques à avoir une meilleure
évolutions technologiques qui ont touché la société, connaissance de la situation de leurs clients ainsi qu’une
Fonction indépendante
été réalisées en 2017[1].
Contrôle périodique
Pour faire face à ces nouvelles obligations, les établisse-
ments bancaires se sont dotés de moyens humains plus Audit
conséquents. Tandis que les équipes étaient en train de interne
se constituer, il fallait trouver une nouvelle organisa-
Contrôles
tion. La tendance générale dans les entreprises voulait de 3e niveau
que les contrôles permanents de premier niveau soient
• Piloter le contrôle
assurés par les conseillers et managers en agence. Les
Fonctions dédiées
interne
fonctions dédiées à la conformité venant alors en relais • Analyser l’exposition Conformité • Appliquer la politique
aux risques ; Contrôle interne
pour contrôler les incidents déclarés par le réseau (voir de gestion des risques
Contrôle permanent
• Préconiser
validée par le Conseil
Schéma 1). des plans
d’administration
d’amélioration Contrôles
de 2e niveau
MÉTHODES ET REGARDS CROISÉS DES ACTEURS
• Analyser • Définir et sensibiliser
Directeurs et pilotes de processus
L’activité de conformité devenant l’affaire de tous, il les plans les acteurs ;
(Juridique, SI, conformité, finance,
a fallu alors s’interroger sur les moyens utilisés pour d’amélioration qualité, risques, correspondants • Piloter la mise
la mettre en application et sur la façon dont elle était du contrôle interne contrôle interne) en place
opérationnelle
pratiquée au quotidien. Parmi les corps de métiers les • Déclarer Managers et opérationnels de la banque des plans
les incidents d’amélioration
plus impactés, trois d’entre eux nous ont fait part de • Évaluer Contrôles
de 1er niveau
leurs ressentis : les risques Mettre en oeuvre
les plans
– les conseillers commerciaux considèrent la confor- d’amélioration
mité comme une activité contraignante avec des outils et
des procédures non adaptés conduisant à une mauvaise
approche du client et une détérioration de leur relation ;
– les chargés de conformité indiquent avoir des difficul- l’idée est de pouvoir aboutir à la livraison d’un projet
tés à stabiliser une activité, lesquels tirent leurs sources qui soit le plus en adéquation avec les besoins des uti-
de réglementations évoluant plus rapidement ; lisateurs. Une méthode qui reste néanmoins difficile à
– enfin, les chefs de projet rencontre des difficultés à mettre en place en raison du manque de disponibilité
maîtriser les projets de conformité, bien souvent trai- des participants qui occupent d’autres fonctions en
tés séparément par les services opérationnels, ce qui ne parallèle. Selon Tim Brown, « le design thinking per-
permet pas d’homogénéiser les procédures et de maî- met de bâtir des idées à fort contenu émotionnel tout en demeu-
triser les évolutions réglementaires. rant fonctionnelles »[2]. Ce ne sont pas les émotions qui
De leur côté, les clients ont le sentiment de devoir s’ex- manquent dans un environnement devenu compliqué.
pliquer davantage quant à l’utilisation de leurs comptes. Il devient alors important pour les banques de mobi-
Pour eux, les banques donnent l’impression de réaliser liser l’ensemble de leurs acteurs autour d’un objectif
des démarches personnelles sous couvert de la législa- commun, même si les intérêts personnels peuvent
tion. De plus, ils considèrent que les procédures ban- rendre la tâche compliquée.
caires sont lourdes et désorganisées. Ils déplorent par En réalité, tous les organismes financiers subissent
exemple le fait d’adresser à plusieurs reprises des justifi- de façon quasi similaire cette recrudescence de la
catifs voire de les communiquer simplement. Pour eux, réglementation. Il n’y a pas de réelle distinction dans
certaines institutions comme les banques et les finances le choix des stratégies adoptées. La compétition est
publiques pourraient échanger directement entre elles. essentiellement menée sur le front de la technologie,
Afin d’essayer de répondre à ces problématiques, les plus particulièrement celui de l’intelligence artificielle,
banques se sont orientées vers de nouvelles méthodes avec certaines entreprises plus ou moins avancées sur
de travaux tels que la méthode Agile et le design thin- le sujet. Leurs objectifs communs étant d’optimiser leur
king. La méthode Agile veut que l’on s’appuie davan- efficacité opérationnelle et de diminuer leurs coûts.
tage sur les personnes provenant de domaines variés. En attendant, les autorités de contrôle continuent d’af-
Sur la base d’un développement itératif et incrémental, ficher leurs priorités chaque année. L’ACPR sera parti-
[1] Source : Fédération bancaire française. [2] T. Brown (2010), L’Esprit Design, Pearson France.
2. CRÉER UN ESPACE COLLABORATIF DIGITAL Aussi, le RGPD (Règlement général sur la protection
des données) assure de belles promesses pour faciliter
le développement de l’activité commerciale. Il contraint
Espace les organismes à structurer les données recueillies auprès
fidélisation Espace
collaboratif des clients permettant ainsi un meilleur traitement opé-
d’échange rationnel. Cette nouvelle réglementation permet égale-
avec le conseiller
ment avec l’accord du client, le transfert des données
entre différents organismes. C’est une réelle opportunité
pour les banques de mieux identifier le comportement
de leurs clients et de mener des actions commerciales
à forte valeur ajoutée.
Espace
Espace avec Les enjeux d’appropriation de la réglementation par les
personnel
des offres banques peuvent finalement être regroupés en quatre
de dépôt
commerciales
des documents parties. La connaissance du client permise par des outils
personnalisées
privés
performants permettant le recueil d’informations, l’ana-
Espace Espace
lyse des comportements et la détermination de profils.
commercial client Un modèle de distribution utilisant tous les canaux de
distributions possibles sur la base d’un référentiel client
commun où toutes les informations et les actions seraient
annexées. Un parcours client davantage, voir intégrale-
ment, dématérialisé. Un modèle de relation plus digitalisé
culièrement attentive aux risques de crédits en raison mais qui doit permettre de maintenir le contact humain.
d’une évolution du taux de créances douteuses, ainsi La création d’un espace collaboratif digital (voir Schéma 2)
qu’aux risques informatiques et de cybersécurité car serait alors la solution à envisager, c’est-à-dire un outil
les banques sont plus que jamais exposées. Enfin, elle fonctionnant sur la base d’une plateforme accessible par
se concentrera sur les risques multidimensionnels que les collaborateurs de la banque et les clients depuis tout
représente par exemple le Brexit. De son côté, l’AMF objet connecté (ordinateurs, tablettes, portables…). Il
sera vigilante quant aux conseils en investissement déli- permettrait, selon le même concept qu’un réseau social,
vrés sur des produits non régulés et à la conformité de l’échange immédiat d’informations, d’offres com-
la gestion sous mandat. merciales, de documentation et de justificatifs entre le
conseiller et son client. Doté de l’intelligence artificielle,
LES PERSPECTIVES DE CHANGEMENT il conduirait à une meilleure efficacité opérationnelle de
L’une des premières solutions consisterait à faire évo- traitement des informations : lecture des documents et
luer la méthode Agile telle qu’elle est appliquée de nos enrichissements automatisés de la base de données.
jours. Bien qu’utilisée par la majorité des établissements Toujours grâce à cette technologie, le conseiller aurait
bancaires, aucun ne présente réellement un programme une meilleure connaissance des attentes de son client
axé sur les conditions de l’utilisateur (élément fonda- (analyse des comportements en lien avec la gestion des
mental de cette méthode). Il s’agirait ainsi de proposer données). Il permettrait également aux personnes de
un programme incluant de vraies méthodes de détec- mieux consommer la banque (transmission d’offres et
tion des individus, permettant un management matriciel, de documentations ciblées).
des objectifs réadaptés et une rémunération adéquate.
La qualité d’intervention des participants serait amélio- TRAVAIL COLLABORATIF ET INTELLIGENCE
rée et les projets délivrés de bonne facture. COLLECTIVE
La réussite de l’appropriation des réglementations au Les appréhensions à l’égard de ces nouvelles réglemen-
profit de l’activité commerciale réside également dans tations sont différentes mais toute résistance serait inu-
l’intervention du Compliance Officer. Longtemps, les tile. L’impact est trop fort pour être maîtrisé avec les
banques ont choisi d’être le plus en adéquation possible outils dont disposent actuellement les banques. Sur la
aux dépens des intérêts du client. Étant désormais en base d’un travail collaboratif, il faudra s’adapter très
ordre de marche, elles doivent intégrer dans leurs pro- rapidement tout en préservant l’intérêt du client. La
positions commerciales, des démarches de conformité quête d’innovations permise par l’intelligence collective
fluides et transparentes pour le consommateur. C’est à devient alors primordiale. C’est dans ces conditions que
ce niveau, que l’appui apporté par le chargé de confor- certaines banques pourront se démarquer des autres et
mité jouerait un rôle crucial. ainsi développer leur activité commerciale.n
L
Axel Cathala ’« ubérisation de l’économie » et les « taux bas » du système financier français ont stimulé la concurrence.
entraineraient la chute du secteur bancaire fran- Les banques coopératives ont alors fait preuve de dyna-
CESB Mastère
Spécialisé Senior
çais selon certains analystes. Nombreux sont les misme en gagnant des parts de marché et en devenant
Management, spécialistes qui qualifient la banque de « Kodak leader de la clientèle de particuliers, de professionnels
Promotion de demain », ou encore de « la prochaine sidérurgie ». Les et de PME (petites moyennes entreprises) en France.
2018-2019 banques françaises ne disposeraient pas des atouts Elles ont aussi fortement contribué au bouleversement
CFPB École pour faire face à ce bouleversement. Revenu, organisa- du paysage bancaire français avec la reprise du Crédit
supérieure tion, métier, tout va être modifié dans un avenir proche Lyonnais par le Crédit Agricole, et du CIC par le Crédit
de la banque
pour ce secteur d’activité et peu restent optimistes sur Mutuel (Alliance Fédérale). Leur modèle a évolué et est
ESSEC Business la capacité des banques françaises à rebondir face à la aujourd’hui une réussite à la lecture de leurs rapports
School
révolution digitale et à la politique des taux d’intérêts financiers mais il leur faut désormais trouver des nou-
bas. Ce constat doit faire preuve de discernement. Il velles pistes de croissance, là où elles ne sont pas ou
est tout d’abord essentiel de distinguer la question du peu présentes. C’est notamment le cas des Entreprises
digital de celle des taux d’intérêt, la conjonction de ces de taille intermédiaire (ETI).
deux phénomènes ne veut pas dire qu’ils soient liés. Il
convient également de souligner que les métiers des BANQUES COOPÉRATIVES ET ETI :
banques sont nombreux et ne sont pas sensibles de la UNE RESSEMBLANCE QUI LES ÉLOIGNE…
même façon à l’ubérisation de l’économie. Enfin, trop Le constat est unanime, les entreprises françaises pour-
peu d’analyses distinguent les deux modèles bancaires raient exporter et innover davantage si le pays comportait
français présents sur notre territoire : les banques com- un plus grand nombre d’entreprises de taille intermé-
merciales détenues par des actionnaires et les banques diaire[1]. Les ETI recouvrent toutes les entreprises qui
coopératives détenues par des sociétaires. Une banque remplissent au moins l’un des trois critères suivants[2] :
coopérative n’est pas à la recherche de profit pour ses – le chiffre d’affaires se situe entre 50 millions et 1,5 mil-
investisseurs. Son objectif principal est de répondre aux liard d’euros ;
besoins de la communauté de sociétaires sur le long – le total du bilan se situe entre 43 millions et 2 mil-
terme. Ce modèle, souvent apprécié mais incompris et liards d’euros ;
encore méconnu, se distingue des banques commerciales. – le nombre de salariés se situe entre 250 à 4 999 salariés.
Depuis les années 1980, les banques coopératives sont
entrées dans une période de mutation liée aux évolutions [1] Le Lab de BPI, ETI Enquête 2018.
de l’environnement économique mondial. Les réformes [2] Source INSEE : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c2034.
Ces ETI deviennent stratégiques pour la France. Leur les banques commerciales possédaient. Les banques
nombre est en croissance de 26% depuis 10 ans (voir mutualistes cherchent donc à revisiter depuis 10 ans leur
Schéma 1), signe d’une transformation du tissu éco- stratégie pour répondre aux exigences des ETI mais elles
nomique français. C’est aussi une clientèle rentable le font pour l’heure sur le modèle des grandes banques
qui consomme encore de nombreuses offres bancaires, commerciales et tombent dans « un océan rouge » où
même si le phénome de désintermédiation s’amplifie. concurrence et guerre des prix sont le quotidien. Leur
Ces entreprises sont des acteurs économiques incontour- positionnement sur cette clientèle reste secondaire et le
nables des territoires et créateurs d’emplois mais elles PNB dégagé insuffisant. Le mimétisme sur les banques
restent absentes de la clientèle des banques coopératives. commerciales doit être oublié. C’est par leur spécificité
Pourtant les banques coopératives sont également des bancaire, leur point commun avec les ETI comme leur
ETI par leur taille et des acteurs ancrés profondément taille mais aussi par les valeurs du mutualisme que les
sur leur territoire. Leurs similitudes devraient être une banques coopératives peuvent s’affirmer sur ce mar-
force, elles semblent pourtant les éloigner mais pour- ché et devenir leader. La conquête des ETI passera par
quoi ? Les valeurs du mutualisme sont-elles compatibles une coopération efficace et durable avec l’ensemble des
avec cette cible ? Certains sondages démontrent un acteurs des banques coopératives : salariés, directions,
attachement au modèle coopératif de la part des Fran- caisses régionales d’une même enseigne, filiales et ETI-
çais mais ces mêmes sondages démontrent aussi que le Sociétaires. Bien plus qu’une cible, les ETI sont un atout
modèle coopératif est incompris. Les banques coopé- stratégique pour la transformation des banques coopé-
ratives, pour beaucoup, ne font aucune différence avec ratives en favorisant leur mutation.
une banque commerciale, le titre « Mutualiste tu parles ! »
fut déjà utilisé par de nombreux auteurs pour fustiger DU MIMÉTISME AU MUTUALISME
leur comportement, plus particulièrement lors de la La solution est peut-être dans le simple fait d’expliquer
crise financière de 2008. Aujourd’hui, peu de collabo- le mutualisme car il est un modèle réactif, efficace, adap-
rateurs, dirigeants et clients-sociétaires sont sensibili- table, un modèle responsabilisant ses clients, basé sur
sés au mutualisme. Pourtant, il y a fort à parier que le la confiance plus que sur des ratios financiers, en syn-
mutualisme peut aider les établissements coopératifs à thèse : un modèle simplement fondé sur l’humain. Depuis
fidéliser les acteurs en donnant du sens à leurs actions. quelques années, les acteurs des banques coopératives se
Pour ce faire, le mutualisme doit être expliqué auprès mobilisent pour faire ressortir les valeurs du mutualisme
tous. Renouer avec ses valeurs et son organisation peut afin que ce ne soit pas uniquement un modèle inscrit dans
servir la clientèle ETI. Mais il faut également que les ses statuts. Mais une fois compris, le mutualisme doit être
banques mutualistes reviennent à leurs fondamentaux défendu, partagé puis vendu. Oui, vendre le mutualisme
en commençant par la coopération. revient à vendre ce que les autres n’ont pas. Mais vendre
ne veut pas dire simplement par les chargés d’affaires
UN ESPRIT COOPÉRATIF RETROUVÉ entreprises auprès de leurs clients ; il doit être vendu
MAIS INSUFFISANT par tous, par l’ensemble des acteurs des établissements
Le mot coopératif, provient du latin « cooperati », signi- coopératifs : salariés, directions et sociétaires. Vendre
fiant « avec » et « operari » signifiant « opérer ». Opérer
avec tous est donc inscrit dans les titres de ces établis-
1. LE MARCHÉ DES ETI EN FRANCE
sements bancaires spécifiques. Seulement faire coo-
pérer les salariés d’une même caisse régionale n’est Évolution en nombre d’ETI
pas simple, d’une même enseigne est parfois difficile
et d’un modèle hybride peut paraitre impossible. Si à 5 800
5 576
cela nous rajoutons deux autres catégories d’acteurs 5 322
4 959
qui sont les sociétaires et la direction, ce défi semble
4 510
insurmontable. Mais, bien au contraire, ce défi peut
se relever, plus encore, il s’impose dans ce contexte
économique et sociétal. Aujourd’hui, les banques coo-
pératives mutualisent leurs moyens sur des sujets pré-
cis comme l’international ou la prévention du risque.
Dans un premier temps menacé par la mondialisation,
les banques mutualistes font désormais le choix de la
coopération, et cela fonctionne. En coopérant, elles
ont rattrapé en grande partie l’avance technique que 2007 2009 2013 2016 2018
Implication
Formation Communiquer
de la direction Intégrer les
Formation auprès de davantage
Cibler de la banque ETI dans la
des tous les Coopérer et autrement
les ETI coopérative démocratie
sociétaires salariés sur sur le
auprès de de la banque
le mutualisme mutualisme
cette clientèle
une histoire en partageant ses valeurs, c’est permettre à à cette communauté démocratique aux valeurs nobles,
chacun de s’identifier et plus encore de donner les sen- utiles pour tous et respectées. Il est temps de mobiliser
timents d’appartenance et de reconnaissance auxquels l’ensemble des spécificités de ces institutions au service
toutes les théories marketing font référence (Pyramide de leur développement économique et social en mettant
de Maslow) et sur lesquels les ETI attendent les établis- en place des éléments simples fondés sur leur modèle
sements mutualistes. (voir Schéma 2).
Depuis la déréglementation du marché bancaire, le
mutualisme a suivi les évolutions de son secteur sans PARTAGER LA MÊME IDENTITÉ
les anticiper. Aujourd’hui, dans un contexte d’inno- Nous sommes à l’aube d’une profonde mutation pour
vation mondiale où les comportements et les repères le secteur bancaire. Le mutualisme possède les moyens
sont bouleversés, où l’éthique et l’image deviennent d’innover par son modèle. La cible des ETI est une prio-
plus importantes qu’un risque de contrepartie et où le rité car c’est une clientèle rentable, en forte croissance
poids réglementaire devient de plus en plus lourd, le et attachée à son territoire. Plus encore, les banques
rythme des mutations s’accélère et met en cause bon coopératives apportent un triptyque recherché par
nombre de stratégies. La conquête des ETI ne passera cette clientèle encore méconnue : empathie par leur
donc pas par un nouveau plan stratégique fondé sur la taille commune, reconnaissance par la proximité de
technologie, la taille ou encore une offre spécialisée. leur direction et sentiment d’appartenance grâce à leur
Au contraire, le mutualisme se doit de saisir cette occa- fonctionnement démocratique. Cibler les ETI force les
sion pour asseoir sa position de leader sur sa clientèle acteurs des banques coopératives à se connaître, à se
mais aussi au profit de ses non clients : les ETI. Il s’agit comprendre et à coopérer ensemble. Les ETI peuvent
bien de déployer une nouvelle stratégie fondée non bouleverser le modèle du mutualisme et l’aider à inno-
pas sur le mot banque mais bien sur le mot coopératif. ver. Les établissements mutualistes doivent désormais
Aujourd’hui tout le monde veut agir, la puissance des mobiliser toutes les parties prenantes pour être mieux
réseaux sociaux le démontre. Certes, les positions et les comprises et contribuer davantage au développement
enjeux sont très souvent différents mais l’objectif lui est des ETI de leurs territoires. Bien plus qu’un mot, le
commun : s’identifier, se reconnaître, puis appartenir mutualisme est une identité. n
Stratégie
S
’il est un point commun à tous les établisse- produits, de nouvelles communications. Le rôle des
ments bancaires, c’est la nécessité de créer de la administrateurs ne s’arrête pas là, ils portent les mes-
Didier valeur ajoutée. Plus il y a de valeur ajoutée, plus sages, la stratégie de la banque, ses valeurs. Les élus
Chavagnac la rentabilité est potentiellement élevée. La ren- sont facilitateurs dans l’appréhension du territoire car
tabilité est un élément incontournable afin de pouvoir imprégnés de la vie locale. Pour conserver cette force
Mastère Spécialisé
Senior Management
faire face aux obligations de renforcement des fonds et répondre aux exigences imposées par les autorités
Bancaire, Promotion propres demandés dans le cadre de la réglementation de tutelle, le rôle de la banque est de les accompagner,
2018-2019 et notamment des textes bâlois. Mais en fonction de de les former à l’environnement financier, et aux évo-
CFPB École la nature de l’établissement, l’affectation des résultats lutions réglementaires.
Supérieure sera différente : versement de dividendes pour les uns
de la banque afin d’assurer la satisfaction des actionnaires, pour les LES FACTEURS DE RÉUSSITE
ESSEC Business autres participer activement à la redistribution dans La banque doit conjuguer le meilleur de l’humain et le
School l’économie locale pour favoriser l’investissement sur meilleur du digital, le second au service du premier et
son territoire et rendre des comptes à ses sociétaires. non l’inverse. L’intelligence artificielle notamment est
un moyen pour gagner du temps sur des opérations à
LA DIFFÉRENCE D’ÊTRE MUTUALISTE faible valeur ajoutée. Les conseillers peuvent ainsi béné-
La différence d’être mutualiste se retrouve dans les ori- ficier de ce gain pour le consacrer aux projets de leurs
gines du mouvement, les pères fondateurs en sont Raif- clients et mieux les accompagner. L’excellence relation-
feisen et Schulze-Delitzsch[1]. Le principe est simple : nelle doit être au cœur des débats, car la recherche de
permettre aux personnes ne pouvant de par leur profes- la satisfaction des besoins du client est un facteur dif-
sion avoir accès au crédit à en bénéficier via l’association férenciant. En outre, dans une société en accélération
de particuliers et d’entreprises qui collectivement vont constante, les décisions doivent pouvoir se prendre au
garantir le prêt. En quelque sorte un circuit court basé plus près du terrain. L’organisation doit donc être décen-
sur des relations humaines et une bonne connaissance tralisée pour plus de réactivité. Ces facteurs sont autant
de son environnement. d’éléments nécessaires à la pérennisation du modèle de
la banque régionale de proximité.
LES ÉLUS, UNE FORCE POUR LA BANQUE Lors des dernières crises financières la banque mutua-
Chaque caisse locale a un Conseil d’administration dont liste a montré sa fiabilité. Classée régulièrement sur le
une partie des membres est élue par les clients socié- podium de la relation client, elle est reconnue et appré-
taires pour les représenter. Ils constituent une force ciée du grand public. Elle répond au besoin de proximité,
pour la banque car ils permettent d’obtenir le ressenti de dimension humaine et trouve son autonomie dans la
des clients en direct, de tester auprès d’eux de nouveaux « chaleur ajoutée » qu’elle propose a contrario par exemple
des banques en ligne. Pour autant, la banque mutualiste
[1] Hermann Schulze-Delitzsch a été le fondateur en 1850 de la première banque pour durer doit se renouveler sans cesse pour faire face
coopérative à l’origine des banques populaires. Friedrich Wilhelm Raiffeisen
a créé dans les années 1870 la Fédération de crédit de Rhénanie, ancêtre des
aux nouveaux arrivants du marché, GAFA, Pure Player
réseaux de crédit agricole. mais aussi à ses concurrents directs. n
L
Bancaire, Promotion
2018-2019 a banque de détail est confrontée à de grandes – il est complexe, car il a un double besoin : il demande
CFPB École mutations : des taux bas qui amenuisent les marges, à être autonome sur des demandes simples et, en même
supérieure une forte pression réglementaire, la digitalisation temps, il souhaite avoir un conseiller de la relation
de la banque des relations et la concurrence de nouveaux acteurs client efficace et empathique, dans les moments clés
agiles : FinTech, GAFAMI américains et BATX chinoises[1]. qui lui sont propres.
ESSEC Business L’écosystème bancaire est positionné au centre d’une La personnalisation de la relation génère de la fidélité
School bataille des données, chaque institution cherchant à mais nécessite un équilibre entre contact humain et
recueillir les données générées par les consommateurs. contact numérique. Cet équilibre garantit une expé-
La structuration de cet immense potentiel de données rience client dynamisée, distinctive et économique-
permettra de gagner en pertinence sur les nouveaux ser- ment valorisée.
vices à proposer. La banque qui détiendra et utilisera les L’IA est de fait un outil pertinent qui s’intègre par-
données de façon hyperpertinente offrira l’expérience faitement dans les démarches phygitales : en effet,
client la plus différenciante. cette technologie renforce le lien avec le client en lui
proposant le service adéquat et prépare le « next best
LES USAGES DES CLIENTS NÉCESSITENT moment ». L’IA permet une adaptation à l’usage : le
L’UTILISATION DE L’IA bon produit au bon moment et à travers le bon canal,
Le client d’aujourd’hui trois grandes caractéristiques : la « next best action ».
– il est exigeant : il souhaite des réponses rapides et des Les opportunités sont nombreuses dans le domaine
offres de qualité ; il se renseigne avant de consommer, bancaire : pour le marketing avec l’anticipation de l’at-
notamment les avis en ligne pour les millenials (20 % de trition, pour le commercial avec le soutien à l’exper-
la population) ; tise du conseiller, pour la gestion des risques et de la
– il est engagé : il est influencé par les actions sociales conformité en repérant les signaux faibles et en amé-
et environnementales de l’entreprise, il s’intéresse au liorant l’identification du client (KYC), pour la perfor-
développement de l’économie collaborative et aux fonc- mance économique en améliorant les process internes.
tionnements en communauté ; Toutefois, les technologies n’en sont qu’à leur début,
les casques de télépathie, les chatbots vocaux autonomes,
* Source : cabinet [1] GAFAMI (originaires des États-Unis) : Google, Apple, Facebook, Amazon,
les objets connectés prêts à prendre des rendez-vous,
d’audit PwC 2018. Microsoft et IBM ; BATX (originaires de Chine) : Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi. sont encore loin d’être généralisables.
LA BANQUE DE DÉTAIL PRIORISE UNE STRATÉGIE data centric que la banque obtiendra des données intéres-
OFFENSIVE POUR CRÉER DE LA VALEUR santes pour personnaliser l’interaction client, et conduira
L’utilisation de l’IA dans le but d’optimiser la relation client le client à la recommander.
commence par la définition d’une stratégie customer centric, Comment sensibiliser les collaborateurs et créer un réflexe
qui génère une expérience client différenciante. Le comité data centric pour se différencier ?
exécutif de la banque est l’élément moteur de cette nou- Il s’agit dans un premier temps de mettre en place une
velle stratégie et le centre de la structure de gouvernance. « Lab factory », une équipe pluridisciplinaire transverse,
Par ailleurs, avoir une attitude ouverte sur les opportu- qui cassera les silos de la banque, et aura pour objectif
nités des marchés permet de rebondir sur l’open banking, de privilégier l’expérience client. Avec des ambassadeurs
suite à la mise en place de la seconde directive Services dans les directions régionales. La Lab Factory sera à l’ini-
de paiement (DSP2). Des plateformes multiservices avec tiative de partenariats avec des entreprises spécialisées
différents partenaires seront ainsi mises en place. Il est et notamment avec les FinTechs, à intégrer dans les incu-
primordial pour la banque d’être au centre de cette mar- bateurs que les banques de détail françaises mettent en
ketplace et de conserver la primauté de la relation client. place (Platform 58 de La Banque Postale, Village by CA
Cette création de valeur pour la banque nécessite un plan du Crédit Agricole…). Ces partenariats sont utiles pour
d’investissement conséquent. L’investissement dans un apprendre à mieux utiliser les données clients et à infu-
programme d’IA atteint entre 4 et 8 % du PNB[2]. Le retour ser la culture numérique auprès des salariés.
sur investissement attendu concerne le temps relation- La relation client augmentée grâce à l’IA déclenche aussi
nel supplémentaire (estimation +10 %), l’accessibilité des interactions en intelligence collective et favorise l’as-
(100 %), la rapidité de traitement des demandes clients sociation des clients à la réflexion sur les offres, grâce au
(gain estimé de 30 %). L’ambition en taux de recomman- design thinking. C’est dans cette démarche de co-construc-
dation doit être d’atteindre le Net Promotor Score (NPS) tion, au moment de la conception et du design de l’offre,
du meilleur prestataire de services du marché, soit 60 que sont décidées les technologies d’IA à utiliser. Élément
actuellement pour les meilleures plateformes (Amazon). de différenciation, c’est alors le client qui propose à la
Enfin, le comité exécutif de la banque, via son Chief Data banque des solutions.
Officer, est responsable de l’utilisation de l’IA, de l’impact Enfin, les indicateurs NPS (Net Promoter Score), CES (Custo-
de chaque octet manipulé. Ainsi, utiliser l’IA comme mer Effort Score), taux d’attrition, mesureront les améliora-
outil pour une nouvelle relation client, est conditionné tions en termes de satisfaction client, auprès de chaque
à la mise en place de principes de responsabilité : antici- segment de clientèle, y compris les plus fragiles. Le taux
per les risques de biais des algorithmes et de non-trans- de conversion sera utilisé pour mesurer les ventes suite
parence des décisions. à contact humain et suite à contact avec un bot.
La banque a une responsabilité dans le recueil des don-
LA BANQUE DE DÉTAIL PROPOSE UN MODÈLE nées : elle veillera à ne pas avoir une démarche de capta-
DE RELATION CLIENT AUGMENTÉE tion frénétique des données, mais à s’inscrire dans une
Afin d’anticiper les besoins des clients, d’être plus réac- approche éthique et responsable : l’hyperpertinence plu-
tif, et d’être pro actif pour éviter l’attrition, il convient de tôt que l’hyperpersonnalisation.
recueillir des données exploitables. Cela se traduit par la
mise en place d’un data management, fondation de l’orga- DÉVELOPPER L’EXPÉRIENCE COLLABORATEUR
nisation autour de la donnée. En effet, les clients et les Le nouveau modèle de relation client est pertinent grâce à
données générées sont à considérer comme un actif de l’équilibre entre l’humain et le digital. Le conseiller spé-
la banque. Cette prise de conscience est fondamentale et cialiste de la relation client est augmenté par la machine
doit être portée auprès de tous les salariés. C’est en étant qui lui apporte l’expertise technique et lui libère du temps
relationnel. Cette interaction entre l’homme et l’IA sou-
met la banque à des enjeux d’accompagnement des col-
[2] Les banques investissent des montants toujours plus importants dans la refonte
de leur système d’information (Information Technology – IT), ce qui intègre les laborateurs, y compris ceux qui ne passeront pas le cap
investissements en nouvelles technologies IA. Dernièrement, BNP Paribas a annoncé de la transformation.
investir 6 milliards d’euros sur l’année pour la refonte de son IT (source : Interview de
J.-L. Bonnafé, « Notre budget IT dépasse les 6 milliards d’euros à l’année », Les Échos, Afin de créer un cadre de confiance dans l’adoption de
10 mai 2019), ce qui représente 14 % de son PNB annuel. La Banque Postale a quant à l’IA et réussir la conduite du changement, il est primordial
elle investi 1 milliard d’euros sur 5 ans pour faire évoluer son système d’information de s’assurer de l’adhésion et de l’évolution des managers.
(source : « La Banque Postale lance sa révolution informatique », Les Échos, 10 mars
2015), soit 3,6 % de son PNB par an, de même que le Crédit Agricole, qui a engagé Le manager devient réellement un coach et une ressource
le même montant sur 3 ans (source : « Le Crédit Agricole investit 1 milliard d’euros pour son équipe. Il encourage les initiatives et l’émer-
pour transformer son SI et offrir à ses clients la meilleure expérience du marché »,
Site Groupe Crédit Agricole, 30 mars 2019), soit quasiment 2 % de son PNB (sources
gence de pratiques innovantes. Le manager passe du « com-
PNB : communiqué de presse des banques 2018). ment » au « pourquoi ». L’arrivée de l’IA dans la banque
Marketing bancaire
Face à la révolution
numérique, la segmentation
bancaire n’est pas morte
Comme beaucoup d’autres secteurs, le marketing bancaire se voit
fortement bousculé par une révolution numérique. Face à ce nouveau
paradigme, quel est le devenir de la segmentation ?
Sébastien
B
Haméon
ousculée par le numérique, contrainte par le Ensuite, il conforte un phénomène de darwinisme des
Mastère Spécialisé
Senior Management
réglementaire, la banque de détail voit le com- marques (voir Schéma). Les banques traditionnelles se
Bancaire, Promotion portement de ses clients évoluer. Le marketing situent dans le cœur de marché, immobilisées entre le
2018-2019 bancaire est en pleine mutation, avec, à sa base, low cost (représenté par les néo-banques et leurs ser-
CFPB École une segmentation en pleine incertitude. vices gratuits) et les services premium des banques
Supérieure Le secteur bancaire subit aujourd’hui trois chocs : haut de gamme ou privées.
de la banque – réglementaire : après un vent de déréglementation, la La solution n’est pas de faire une course au prix, car elle
ESSEC Business crise de 2007 a provoqué l’effet inverse ; est perdue d’avance. Mais de mettre en avant la valeur
School – technologique, avec une révolution numérique qui fait ajoutée. Pour éviter l’attrition, le renforcement de la seg-
naître de nouveaux acteurs. Après l’essor des banques mentation apportera une réponse en créant une réelle
en ligne, ce sont désormais les FinTechs qui boule- expérience personnalisée et en mettant le bon conseil-
versent le paysage ; ler face aux bons clients. Ceci permettra au conseiller
– comportemental : hyperconnectés, plus autonomes, de gagner en efficacité commerciale et à la banque de
les clients sont moins dépendants des conseillers. Plus renforcer la valeur ajoutée de la relation (physique ou
infidèles, ils recherchent une réelle plus-value dans une digitale). Surtout, le client sera assuré d’avoir le bon
relation individualisée. D’ailleurs, l’attachement aux interlocuteur, au bon moment, avec les bonnes com-
banques traditionnelles s’efface avec les nouvelles géné- pétences par le bon canal.
rations. Le mode de contact évolue également : le smart-
phone s’impose comme l’outil de communication princi- DE LA BANQUE POUR TOUS
pal. Les banques sont contraintes de revoir leur modèle À LA BANQUE POUR CHACUN
et leur relation client, en adoptant une posture digitale. Historiquement, le marketing est défini comme la créa-
Le nouveau paradigme qui découle de ces trois chocs tion de valeur conjointe entre le client et l’entreprise[1].
bouscule le marché à deux niveaux. Il crée un phéno- « La pierre angulaire »[2] du marketing ? La segmenta-
mène de banalisation de l’offre bancaire. Le marché
est inondé d’offres (la prolifération) et les services [1] Michel Badoc, professeur émérite au groupe HEC, expert en stratégie
d'entreprise et en marketing, auteur de nombreux ouvrages dans ce domaine.
proposés sont plus élaborés par le biais du digital et [2] Paul Millier, professeur de marketing et de management à l’EMLyon Business
moins chers, pour ne pas dire gratuits (la surenchère). School, responsable du Mastère spécialisé en management de la technologie et de
1 2 3 4. Segmentation 6 7
Love brands
Premium
« La course au prix
est perdue d’avance.
Il faut de la transparence
Darwinisme sur le prix proposé
et mettre en avant
la valeur ajoutée. »
Cœur de marché Pierre Metge
Low Cost
Source ; Xerfi, Jérôme Barthélemy, ESSEC, « Quelle riposte stratégique face à la banalisation de votre offre ? »,
Stratégie & Management 2017 - Nicolas Riou, Le Consommateur digital : les nouvelles approches pour le séduire, Eyrolles, 2017.
Enjeux, opportunités
et limites pour les placements
privés (Euro PP)
La technologie de rupture blockchain [B.3], révolutionnant le secteur bancaire
avec les FinTech*, change les règles du jeu en obligeant la Banque à la modernisation
accélérée de ses offres et dispositions de service [B.1]. Dans cet environnement
nouveau, il s’agit pour la Banque de concrétiser une vision en étant ouverte
et en favorisant la créativité afin d’accélérer l’innovation de rupture [B.4] [B.8].
Christine Cet article** donne un éclairage sur les cas d’usage de la blockchain en finance
Mahamba
de marchés et son intégration dans les processus métiers [B.21]***.
Mastère Spécialisé
Senior Management
Bancaire
L
– Promotion
2018-2019 a blockchain[1] bouleverse l’économie par de nouvelles LE CONSTAT ET LES DÉFIS
CFPB École règles et concurrences dans l’écosystème bancaire ; La technologie de rupture blockchain [B.3], révolutionnant
Supérieure les FinTech[2] influencent l’évolution législative et le secteur bancaire avec les FinTech (l’expression, combi-
de la Banque des marchés, obligeant les acteurs traditionnels à nant les termes « finance » et « technologie », désigne une
ESSEC Business moderniser leurs offres et dispositions de service [B.2]. startup innovante qui utilise la technologie pour repen-
School En effet, la Banque se trouve face à des défis inédits et doit ser les services financiers ou bancaires afin de rendre la
absolument se réinventer [B.13] [B.27]… En quoi et com- finance plus simple et plus accessible, en proposant des
ment, la blockchain, technologie de rupture, lui permet-elle offres de meilleure qualité et à moindre coût), change les
d’améliorer ses activités financières, et plus spécifique- règles du jeu en obligeant la Banque à la modernisation
* Pour exemple, voici
ment son dispositif de refinancement des Entreprises accélérée de ses offres et dispositions de service[4][B.1].
un rapport de situation : de taille intermédiaire (ETI) [B.10] [B.16] ? En apportant En effet, le secteur bancaire étant en pleine transforma-
Fintech100 : Leading
Global Fintech davantage de transparence, de rapidité et de confiance tion, entre nouvelles règles et nouveaux rapports à la
Innovators 2018 (https://
h2.vc/wp-content/
[B.5]. En effet, la « plateformisation BtoB » optimise les technologie, les attentes des clients évoluent et de nou-
uploads/2018/11/ processus et améliore les revenus associés (ici l’exemple veaux acteurs font leur apparition. Dans cet environne-
Fintech100-2018-
Report_Final_22-11- des produits Euro PP[3]) [B.19], mais cela au prix d’une ment nouveau, il s’agit pour la Banque de concrétiser
18sm.pdf).
** Synthèse de ma
mutation du rôle d’arrangeur/intermédiaire bancaire… une vision en étant ouverte et en favorisant la créativité
thèse professionnelle afin d’accélérer l’innovation de rupture [B.4] [B.8]. Cet
du MS SMB
(« L’innovation article donne un éclairage sur les cas d’usage de la block-
blockchain dans le
refinancement bancaire chain en finance de marchés et son intégration dans les
des entreprises : [1] La blockchain est une technologie de stockage et de transmission processus métiers [B.21]. Plus précisément il se propose
enjeux, opportunités d’informations, transparente, sécurisée, et fonctionnant sans organe central de
et limites pour les contrôle (source : Blockchain France).
placements privés
(Euro PP). » [2] France FinTech se présentant comme l’équipe de France de la FinTech
*** Les références entre
(https://francefintech.org). [4] L’ubérisation s’inscrit dans le cadre de l’économie collaborative, basée
crochets renvoient à [3] Euro Private Placement est une opération de financement à moyen ou long sur des plateformes numériques, en s’affranchissant des règles du business
l’encadré Bibliographie. terme entre une entreprise, cotée ou non, et un nombre limité d’investisseurs. traditionnel (www.uberisation.org).
[11] J. Moore (1996), The Death of Competition – Leadership and Strategy in the Age of
[10] www.blockchaintechnologies.com/blockchain-technology/. Business Ecosystem, Harper Business, New York.
Source : Auteure
FIGURE 2
Dispositif
N coopératif N N N
P1 P2
N
N N Xn
PLATEFORME N N
Blockchain Pn
CENTRALISATION
N
N Infrastructure réseau
N1 N2 … Nn
Nœud (N) DISTRIBUTION Source : Auteure.
de blocs » permet réellement d’optimiser les processus bâtir davantage de passerelles et d’échanges, dynami-
opérationnels et administratifs d’émission et de gestion ser les interactions et faire naître les idées.
des placements privés de dette[12] [B.23], notamment
grâce aux smart contracts [B.11] [B.35]. Néanmoins cer- DE L’INTERMÉDIATION À LA SUPERVISION
tains « écosystèmes » sont plus à même que d’autres à Pour finir d’un point de vue méthodologique, après avoir
promouvoir l’apparition de l’innovation de rupture et identifié les enjeux auxquels les banques traditionnelles
sa diffusion ; en externe, il faut s’inspirer des bonnes sont confrontées aujourd’hui, il s’agit aussi de s’inspi-
pratiques et des modèles exemplaires. En interne, il faut rer d’acteurs bancaires ou d’autres industries qui ont déjà
inciter les effectifs à partager leurs idées, en favorisant avancé dans leur transformation digitale. L’objectif est
la discussion pour créer une dynamique propice pour double car, d’une part il est important d’appréhender les
prérequis et opportunités pour mettre en place de nouveaux
modèles bancaires et, d’autre part, de donner des pistes de
[12] www.optionfinance.fr/dossiers/observatoire/observatoire-des-euro-pp-
de-cms-francis-lefebvre-avocats.html ; www.euro-privateplacement.com/
réflexion pour réinventer le modèle bancaire traditionnel
index_fr.htm. par la mise en œuvre d’une blockchain privée en coopéra-
tion avec les principaux partenaires du marché financier défi de modernisation, une vision prospective, des savoir-
cible[13] (cf. ubérisation). faire complémentaires (en interne comme en externe) et
En outre, l’étude identifie des outils performants et permet du courage managérial seront essentiels… Le bilan d’étude
la sélection de méthodes adaptées au contexte individuel, est donc favorable à une mise en œuvre d’une blockchain
aux besoins particuliers et aux contraintes spécifiques de privée des Euro PP (plateforme BtoB) dont voici les prin-
chacun pour s’engager et réussir ces projets bancaires de cipaux bénéfices : modernisation des pratiques (pour créer
transformation digitale[14] [B.22]. Donc il s’agira pour la de la croissance par davantage de valeur d’expertise), sim-
Banque, suite à un Proof of Concept (POC) selon les règles de plification des échanges et accélération des flux (étendre
l’art [B.25], de bâtir un dispositif fonctionnel unifié usant et capter du business sur le portefeuille ETI), augmenta-
d’une plateforme logicielle partagée (référentiel Euro PP tion des revenus (faire plus par transversalité et faire mieux
ou d’autres produits) réalisée avec un système distribué en profondeur). Comme étudié ici, l’impact et le rôle des
(blockchain privée) sur une infrastructure technique répartie nouvelles technologies dans la société en général et pour
entre les acteurs habilités et coopérants (cf. Figure 2). En les entreprises en particulier façonnent et orientent l’évo-
définitive, l’exigence de disruption fera muter le modèle lution des usages individuels (personnes) et des pratiques
de l’intermédiation structurelle vers celui de la supervision collectives (organisations). L’enjeu de gouvernance opéra-
de dispositif(s) de coopérations : en développant l’écosys- tionnelle et de management d’activités est de construire une
tème d’affaires du refinancement ETI autour de la Banque plateforme performante de coopération basée sur cette
(comme firme pivot), entre innovation collaborative et coo- infrastructure de confiance pour un meilleur pilotage
pétition [B.26]. Et, comme dans tout écosystème naissant, informationnel, décisionnel et opérationnel des investis-
le leader et la plateforme pivot ne sont pas préalablement sements de refinancement ; offrant à la Banque un nouvel
identifiés… C’est donc bien une formidable opportunité élan nécessaire vers plus de modernité, de synergies et de
de (re)positionnement organique (par leadership interne) profits durables. La blockchain a été créée dans l’esprit de
pour la Banque [B.24]. supprimer les intermédiaires financiers, mais elle permet
aussi de les introduire là où ils n’étaient pas présents. Dans
LE BILAN D’UNE (R)ÉVOLUTION À RÉUSSIR un contexte de foisonnement technologique prometteur,
L’objectif ici a été d’expliquer, évaluer puis montrer l’op- avec la data au cœur des modèles digitaux, cette innova-
portunité offerte par la blockchain de moderniser le dispo- tion permet d’élargir l’offre, développer des nouveaux
sitif coopératif de refinancement (ETI) de la Banque, afin modèles de revenus et conquérir de nouveaux marchés[15].
d’optimiser ses processus opérationnels et administra- Ainsi constaté, il y a une multiplication d’initiatives et de
tifs d’émission et de gestion de placements privés (Euro prises de participation dans la FinTech. La Banque (dans sa
PP), pour une prise de leadership dans l’écosystème en vue branche BFI) doit évidemment exploiter ces opportunités
d’une croissance rapide de l’activité [B.31]. En somme, pour survivre et prospérer dans la prochaine ère des services
tout cela montre en quoi et comment les « technologies financiers pour les entreprises. Enfin, FinTech et banques
blockchain » peuvent simplifier, réinventer et désintermé- sont concurrentes mais (encore) aussi complémentaires
dier les métiers de la finance, en apportant transparence, car elles complètent leurs offres pour mieux l’adapter aux
rapidité et moindres coûts (plateformisation rationnalisant besoins de leurs clients... En définitive, il semble bien que
les moyens et mutualisant les efforts). Pour réussir un tel l’avenir de la finance passe par la FinTech... et vice versa. n
[13] Ce dispositif, ou type de structure, permet de mutualiser la gestion [15] Traitant notamment des modalités de la formation des prix et
administrative et les infrastructures et donc, de réduire le coût de revient pour le du fonctionnement des échanges sur les marchés, la « théorie microstructurelle
service en question ainsi que les formalités pour le client. des marchés financiers » (selon Albert S. Kyle en 1985) permet de comprendre
[14] www.observatoire-metiers-banque.fr/f/onglet6/sf/1df38a192c4baacf/ l’impact des règles et modes du dispositif ainsi modernisé, particulièrement
Les-acteurs-du-systeme-bancaire. dans la production de la valeur fournie au marché.
3. Bibliographie et références
Ouvrages [B.3] J.-G. Dumas, P. Lafourcade, A. Tichit et S. [B.5] L. Leloup (2017), Blockchain : la
Varrette (2018), Les Blockchains en 50 ques- révolution de la confiance, Eyrolles.
[B.1] Blockchain France Associés (2016),
tions – Comprendre le fonctionnement et les
La Blockchain décryptée – Les clefs [B.6] P. Rodriguez (2017), La Révolution
enjeux de cette technologie innovante, Dunod.
d’une révolution, L’Observatoire Netexplo, mai. Blockchain – Algorithmes ou institutions,
[B.4] K. Kelly (2017), The Inevitable : à qui donnerez-vous votre confiance ?,
[B.2] M. Della Chiesa, F. Hiault, C. Tequi
Understanding the 12 Technological Forces Dunod, mars.
(avec la contribution de N. Bouzou et T. Gress)
That Will Shape Our Future, Penguin Books,
(2018), Blockchain – Vers de nouvelles [B.7] P. Silberzahn et S. Ben Mahmoud-
juin.
chaînes de valeur, Prospectives Accuracy, juin. Jouini (2016), Clayton M. Christensen
L
a montée en puissance du digital, l’évolution des leur service de banque à distance pour leurs opéra-
Alexis attentes des clients et une concurrence toujours tions les plus simples. La fréquentation des agences
Mainka plus vive ont obligé les établissements à revoir diminue et les établissements commencent, à partir
Mastère Spécialisé leur façon de travailler. À cela s’ajoutent de nou- de 2010, à ajuster leur réseau. Mais si cet ajustement
Senior Management velles mesures pour gérer la crise financière de 2008, semble inéluctable, il est très progressif et beau-
Bancaire Promotion
avec la mise en place d’une réglementation toujours coup moins rapide que chez nos voisins européens.
2018-2019
plus contraignante et coûteuse[1] pour les banques, La raison en est une exception française, les clients
CFPB École doublée d’une politique monétaire de relance très veulent de l’autonomie mais pas tout le temps et pas
supérieure accommodante qui place la France dans une période pour toutes les opérations. L’accès à l’information
de la banque de taux historiquement et durablement bas. immédiatement et à tout moment rend les clients
ESSEC Business De plus, de nouvelles réglementations européennes ont plus exigeants, plus impatients et plus informés.
School vu le jour (DSP 1 et 2 en particulier), dont l’objectif est Nous sommes entrés, depuis quelques années, dans
de stimuler la concurrence sur les moyens de paiement, l’ère du AnyTime, AnyWhere, Any Device (consommer
afin de faire baisser les prix pour les consommateurs. n’importe quand, n’importe où, et par n’importe quel
Ces dernières favorisent l’arrivée de nouveaux acteurs moyen). Ce phénomène est encore plus prégnant en
sur un marché déjà mature et à la croissance très faible. fonction des générations avec l’exemple des millenials
mais cette tendance, entre, dans un champ plus large,
LA TECHNOLOGIE ENGENDRE celui des IKWIWAIWIN, comprenez « I Know What I
LES CHANGEMENTS DE COMPORTEMENT Want And I Want It Now ». Ce concept, cher au scienti-
Les évolutions technologiques ont contribué très for- fique Joël de Rosnay[2], présente l’intérêt d’être « évo-
tement aux changements d’habitudes et des comporte- lutif » et de ne pas être cantonné à une génération.
ments des clients. L’arrivée d’Internet dans les foyers au Nous avons tous en nous une part de IKWIWAIWIN
début des années 2000, puis des premiers smartphones plus ou moins prononcée. On pourrait presque par-
en 2006 et surtout « du » smartphone d’Apple (l’Iphone) ler d’indice d’IKWIWAIWIN.
en juin 2007, va donner un véritable coup d’accéléra-
teur (+ 50% d’utilisation d’Internet entre 2006 et 2007) UNE CRISE DE LA VALEUR PERÇUE
à l’utilisation d’Internet et des services de la banque Le prix des services est aussi un point de crispation
à distance. On parle alors de banque mobile. Depuis pour les clients. Le fait qu’une opération soit automa-
2014, le smartphone a supplanté l’ordinateur pour navi- tisée lui fait perdre toute valeur aux yeux des clients et
guer sur Internet, et plus de 80 % des clients utilisent
[2] Vidéo Accenture, « L’avenir de l’entreprise numérique par Joël de Rosnay »,
[1] Source : FBF, Bilan 2018. juillet 2013.
LES ATTENTES DES FRANÇAIS EN MATIÈRE DE SERVICES DÉLIVRÉS PAR LES BANQUES
Le top 3 des services les plus plébiscités s’articule autour de l’assistance à des moments clés de la vie, sollicitant aussi bien la proximité de
l’agence que la position de référent du conseiller bancaire, la mise en relation avec un juriste capable de conseiller dans le cadre de litiges,
sinistres ou stockage de données.
En %
75
52 52
49 48 48
43
39 39 39 38
35 34
32 31
28
Litiges juridiques
Sinistres
Déménagement
Numérisation
Décès
Achat véhicule
Aides sociales
Référencement prestataires
Conservation de données
Déclaration d'impôts
Frais de santé
Relais colis
Procédures administratives
Billetterie
Source : « Banque de crédit : ce qu'attendent les Français en matière de services bancaires (étude de Stanwell Consulting, 2013).
Happy management :
une réponse plausible
dans le secteur bancaire ?
Le développement global des risques psychosociaux est devenu un réel sujet d’entreprise
impactant les coûts et l’attractivité. Le marché bancaire, challengé par la crise, est en pleine
transformation, ce qui génère également du stress. Dès lors, le bien-être au travail n’est plus
considéré comme un fantasme ou un outil de communication, mais bien comme une priorité,
gage de motivation et de performance. Le happy management peut-il être en ce sens
Romain
Lagrange une réponse aux maux du secteur bancaire ?
Mastère Spécialisé
L
Senior Management
Bancaire, Promotion es aspirations des salariés ont changé, dans un positifs du travail que nous connaissons, parallèlement
2018-2019 modèle managérial qui se veut de plus en plus au malheur et à la souffrance qui émaillent la sphère du
CFPB École
horizontal et participatif, mais qui reste encore travail ces dernières années. L’approche philosophique
Supérieure bien souvent centré sur des préceptes traditionnels définit le bonheur comme un état de satisfaction durable,
de la banque faisant écho aux conséquences économiques liées à la de plénitude, où l’individu se sent comblé dans un ou
ESSEC Business crise de 2008. La confiance, la transparence, la reconnais- plusieurs domaines de sa vie. Le bonheur est un état
School sance, le sens donné à son travail sont autant de valeurs et non pas un sentiment, comme peut l’être la joie. La
qui caractérisent de nouveaux modèles de management durabilité du bonheur indique également qu’il ne peut
centrés sur l’humain et son bien-être, tous deux gages refléter un plaisir éphémère ou un bref contentement.
de performance. Le management par le sourire, le mana- Il apparaît également que le bonheur ne peut avoir lieu
gement 3.0, le « bonheur au travail », l’entreprise « libé- sans un rapport à l’autre, sans le partage. Enfin, le bon-
rée », le management par l’enthousiasme, sont autant de heur est également vu comme une quête qui aide les
dénominations ayant cette caractéristique commune. La individus à avancer dans la vie. Il apparaît donc impos-
préservation du salarié trouve un écho démesuré, voire un sible que les individus ne soient pas en recherche du
réel business, avec la multiplication des coaches et autres bonheur, même si celui-ci reste un idéal inatteignable.
consultants du bien-être. Pour pouvoir réellement se Le bonheur est ainsi le fruit d’une représentation et doit
questionner sur la pertinence de ces nouveaux modèles être entretenu comme un projet en devenir (Cyrulnik,
et leur possible application par les managers au sein du 2002). Beaucoup de textes et recherches traitant du
secteur bancaire, il est important de pouvoir décoder les sujet mélangent indifféremment bonheur et bien-être.
études, recherches académiques et théories sur le sujet. Le bonheur se caractérise par un état de satisfaction
complète, stable et durable. La définition du bien-être
BONHEUR ET BIEN-ÊTRE AU TRAVAIL évoque quant à elle davantage la satisfaction des besoins.
Le happy management fait directement allusion au manage- Le bonheur et le bien-être restent tout de même deux
ment par le bonheur. Bonheur, bien-être, plaisir, satisfac- notions assez proches dans leur rapport au travail : le
tion… autant de concepts qui peuvent qualifier les effets bonheur peut être au sens large lié à la qualité de vie ou
au bien-être et au sens plus restreint, il combine à la fois à diffuser au sein du management et sont les moyens
l’intensité, la durée et recouvre les domaines du plaisir assurant la motivation et l’engagement. Le travail n’est
ou de la satisfaction (Veenhoven, 2007). Le bien-être au pas uniquement la satisfaction d’un besoin pécuniaire
travail est également composé de relations sociales, de et les individus recherchent des relations sociales, du
volonté d’engagement personnel, de reconnaissance, sens et une motivation à entretenir pour pouvoir s’épa-
d’estime de soi (sentiment de compétence), et de sens nouir et donner plus. Le management a évolué positive-
donné à son travail par son épanouissement (Dagenais- ment en relation avec les aspirations des salariés. Il se
Desmarais et Privé, 2010, p. 71). fait plus horizontal, plus collaboratif, plus à l’écoute.
Cependant, cela ne suffit plus pour les collaborateurs
UNE MODÉLISATION NÉCESSAIRE qui subissent de nombreux « rétropédalages » mana-
Il convient de vérifier les théories existantes pour déter- gériaux en période de tension. Les managers sont égale-
miner si le happy management est le moyen d’accéder à ment souvent sursollicités et davantage formés au culte
ce bien-être mais également s’il peut être généralisable du chiffre plutôt qu’au culte de l’humain.
quelle que soit l’entreprise. À la lecture de plus d’une
soixantaine d’auteurs, nous pouvons réaliser une syn- LES ENTREPRISES LIBÉRÉES
thèse des déterminants du happy management en lien Certaines entreprises, appelées « entreprises libérées »,
direct avec la motivation, l’engagement et la perfor- ont réussi à se relever de façon spectaculaire en faisant
mance (voir Figure 1). Le happy management peut ainsi des valeurs du happy management leur leitmotiv, ennemi
être défini comme la volonté de placer le collaborateur du contrôle et libérateur du bien-être et de la créativité.
au centre de la stratégie de l’entreprise en s’assurant de Ces entreprises prônent l’autonomie des salariés, la
son bien-être, gage de sa motivation, de son épanouisse- réduction voire la suppression du management intermé-
ment, et de son envie de s’engager dans l’action en vue diaire, la confiance totale annihilant ainsi toute forme
d’atteindre des résultats espérés ou pressentis. de contrôle. L’entreprise libérée met clairement le sala-
L’autonomie, la confiance réciproque, la reconnais- rié au cœur de la stratégie en suivant notamment l’un
sance, le sens du travail, la transparence dans la com- des principes de la méthode Kaizen du Lean management
munication, l’écoute et le respect sont les valeurs clés qui repose sur le fait que les salariés doivent être direc-
Feedback et Speak Up
Culture : leviers d’implication
Frédéric
Mailhan
des salariés
Mastère Spécialisé
Senior Management
Bancaire, Promotion
Dans un modèle bancaire qui limite ou interdit les brevets, et dans un monde complexifié
2018-2019
à l’extrême, ne peut-on pas percevoir les idées et recommandations des collaborateurs
CFPB École
Supérieure comme une source de rentabilité inexploitée ? En allant plus loin, peut-on réellement
de la banque
ESSEC Business
envisager, dans la société ouverte d’aujourd’hui, de ne pas le faire ?
School
D
ans un monde bancaire en pleine transformation L’installation d’une culture de la parole libre, une Speak
(digitalisation, apparition de nouveaux acteurs, Up Culture, apparaît comme une solution pour dévelop-
changement des comportements clients), les per la rentabilité d’une banque de réseau, sans que cela
banques de réseau doivent réinventer leur modèle n’engage des investissements financiers importants,
commercial, mais aussi managérial, afin d’optimiser tout en permettant de mobiliser les salariés et d’antici-
l’implication des collaborateurs. per sur les futures évolutions sociétales.
La notion de Speak Up Culture n’a étonnamment pas de consommateurs), un personnel désengagé dans une
traduction en français. Une notion approchante pourrait activité de service peut avoir des effets dévastateurs en
être celle de « parole libérée ». Le Speak Up se définit plus termes d’image.
exactement comme « évoquer des problèmes ou des préoccupa-
tions, soumettre des suggestions, apporter des idées et exprimer UN MONDE CHANGEANT
des opinions dans l’objectif de changer les choses et améliorer le Le monde s’est complexifié. Or il paraît évident que des
travail d’un groupe ou d’une organisation ». problèmes complexes nécessitent des compétences
variées. L’histoire des entreprises a créé une structure
POURQUOI hiérarchique pyramidale de nature plutôt rigide. Si l’ef-
La temporalité accélérée de ces dernières années a poussé ficacité de ce type de structure ne peut être niée dans un
la plupart des entreprises à repenser leurs modèles stra- environnement peu complexe, il semblerait que cette
tégiques et managériaux tout en gardant en ligne de mire pyramide tende à s’effondrer lorsque la complexité aug-
les quatre impératifs suivants : mente, partant du principe que, si intelligents soient-
– la rentabilité inhérente à toute entreprise commerciale ; ils, les dirigeants ne peuvent pas à eux seuls prendre la
– l’adaptation à un monde changeant ; mesure de cette complexité et tenter d’y apporter des
– l’anticipation sur les besoins de demain ; solutions. Le rythme d’apparition des problèmes n’est
– le développement d’une marque employeur forte per- plus le même qu’il y a une dizaine d’années encore.
mettant de capter les talents. Avant, les solutions apportées à ces problèmes avaient
une durée de vie suffisamment longue pour que certaines
personnes les conçoivent et que d’autres les appliquent.
Mais aujourd’hui la temporalité a changé, de nouveaux
problèmes apparaissent avant même que des solutions
[1] La méthode FAVI développée par Jean-François Zobrist, ancien directeur [2] Règle selon laquelle des contraintes sont mises en œuvre pour l’ensemble
général de cette entreprise spécialisée dans la fonderie, repose sur le principe de des collaborateurs alors que le problème initial à résoudre ne concerne qu’une
la confiance envers les équipes de production et sur l’auto-organisation. partie très minoritaire des salariés.
Le levier de l’expérience
collaborateur
Le business model des banques de détail est challengé : le contexte
de taux, la réglementation, la concurrence exercent des contraintes fortes.
L’amélioration de l’expérience client a constitué une première ligne de défense.
Elle est une réponse efficace si elle est portée par des collaborateurs engagés.
Dès lors, la question de l’expérience collaborateur devient un enjeu stratégique.
Laurent
L
Peillon es banques de détail évoluent dans un environne- objectif principal : fidéliser leurs clients dans une pers-
Mastère Spécialisé ment contraint. Elles subissent une forte pression pective d’amélioration des profits. La chaîne de valeur
Senior Management
sur les marges, leurs perspectives de développement d’un service mise en évidence par James L. Heskett et
Bancaire, Promotion
2018-2019 sont limitées. Par ailleurs, leurs clients sont moins consorts[2] démontre les liens qui permettent de déve-
fidèles car encouragés à changer de partenaire bancaire. lopper les profits d’une entreprise de services en détail-
CFPB École
supérieure Dans un contexte concurrentiel renforcé par l’arrivée de lant le processus de création de la valeur dudit service.
de la banque nouveaux acteurs, les banques de détail ont donc pris On y apprend que l’élément de départ est la satisfaction
ESSEC Business l’option d’apporter un soin particulier à redessiner l’ex- des collaborateurs, indispensable au développement de
School périence client pour rendre le contact avec leur marque la satisfaction des clients. Cette satisfaction des collabo-
inoubliable. L’objectif est de fidéliser une clientèle en rateurs étant elle-même engendrée par ce qu’ils appellent
recherche d’une expérience sans couture marquée par la qualité de service interne. Ce terme désigne concrète-
une empreinte digitale forte, à l’image de celle offerte ment l’ensemble de l’expérience vécue par les collabo-
par de nombreuses enseignes par ailleurs. Ce contexte rateurs au travail. Dès lors, il apparaît que l’enjeu est de
implique des mutations profondes dans les établisse- s’attacher au développement de la satisfaction des col-
ments bancaires qui ne sont pas sans conséquences laborateurs en redessinant, à l’image de l’expérience
pour ceux chargés de l’incarner aux yeux des clients : client, leur expérience vécue au travail. Pour y parvenir,
leurs collaborateurs. Différentes études montrent d’un les banques doivent penser l’expérience collaborateur
côté une forte augmentation de leur stress, et dans le pour qu’elle soit la plus stimulante possible. L’expérience
même temps une tendance globale au désengagement client étant enrichie par l’intention dont fera preuve le
au travail. L’une d’elles, réalisée par l’institut GALLUP collaborateur dans l’exercice de ses missions, l’objectif
en France[1], met en lumière que seuls 6 % des salariés à rechercher doit être d’au moins préserver, si ce n’est
interrogés s’estiment engagés au travail ! Le coût annuel développer l’engagement au travail des employés. Une
de ce désengagement (absentéisme, turnover, accidents expérience client de qualité étant une expérience qui se
du travail) y est d’ailleurs estimé à 97 milliards d’euros. dirige et s’organise, il doit en aller de même s’agissant de
l’expérience collaborateur en développant une stratégie
L’ENGAGEMENT DES COLLABORATEURS de management de l’expérience vécue au travail.
Les banques de détail qui entreprennent des démarches
d’amélioration de l’expérience client poursuivent un
[2] James L. Heskett et al., « Putting the Service-Profit Chain to Work », Harvard
[1] State of the Global Workplace, Gallup, 2018. Business Review, 1994.
Data
Communication Métier concerné
Retail
Entreprise
Opérations TESTER
RH Banque privée Éprouver
la solution
DÉCOUVRIR et l’améliorer
le parcours
IT
Collaborateurs
MAQUETTER
Construire
un prototype
DÉFINIR
CRÉER
Le besoin
Dessiner
collaborateur
le parcours
et l’objectif
la démarche doit s’inspirer de l’approche utilisée en des documents incontournables : contrat de travail,
matière d’expérience client au profit d’une refonte de code de conduite, guides de bonnes pratiques… Cet
l’expérience collaborateur. Pour y parvenir, il est néces- outil digital, qui peut prendre la forme d’une applica-
saire de repenser les parcours collaborateurs existants tion pour smartphone, appuiera efficacement l’approche
en utilisant l’approche du design thinking. De même, humaine indispensable à ces parcours d’intégration.
chaque changement dans l’entreprise amené à impac- Par ailleurs, les transformations successives se tra-
ter l’expérience collaborateur devra recevoir un label duisent par une perte de repères sur les carrières aux
expérience collaborateur by design délivré par l’équipe yeux de collaborateurs très majoritairement qualifiés,
Expérience Collaborateur. et pour une large partie attirés par les parcours de déve-
Par ailleurs et en cohérence avec les attentes exprimées loppement de compétences qu’offre une banque. Pour
par les collaborateurs, la culture managériale doit être y remédier, il est nécessaire d’organiser un mapping des
au centre des réflexions. L’action du manager de proxi- compétences maîtrisées et à développer pour appuyer
mité est déterminante dans la qualité de l’expérience les gestionnaires de carrière dans leur travail de coa-
vécue. L’approche proposée par la « symétrie des atten- ching carrière auprès des collaborateurs, et orienter la
tions », à diffuser dans le cadre d’une approche managé- stratégie de formation. De cette façon, il sera possible
riale top-down, et qui propose de pratiquer les attitudes de redonner la visibilité attendue sur les parcours de
en symétrie avec les collaborateurs, à l’image de celles compétences.
attendues auprès des clients, se positionne comme un
principe managérial adapté. AGIR DANS LA DURÉE
Pour finir, une stratégie consistant à façonner l’expé-
LE DESIGN DES MOMENTS STRUCTURANTS rience collaborateur suppose une mesure en continu.
En ce qui concerne les moments structurants, deux D’abord par des enquêtes personnalisées qui pour-
volets doivent être prioritaires. D’abord, il s’agit de favo- ront aller jusqu’à l’évaluation de l’action du manager
riser l’intégration par une nouvelle approche de l’on- dans les moments clefs de la vie des collaborateurs,
boarding, dans le cadre de l’embauche ou des mobilités mais également pour faciliter la remontée des irritants
professionnelles. Ces moments sont jalonnés d’étapes quotidiens et leur correction. Corinne Samama résume
clefs qui conditionnent le sentiment d’intégration et cette approche de la manière suivante : « Si le client achète
d’appartenance. Il est possible de s’assurer de la réus- la promesse de l’entreprise avec de l’argent, le collaborateur
site de ses étapes en s’appuyant sur un outil digitalisé l’achète avec une autre monnaie qui s’appelle l’engagement. »
accessible depuis le smartphone du collaborateur et du Il est donc incontournable pour les banques de repen-
manager pour permettre de suivre les différentes étapes ser l’expérience de leurs collaborateurs pour la rendre
du parcours et rendre facilement accessibles l’ensemble stimulante et engageante. n