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Review

Reviewed Work(s): Thèbes ou la naissance d'un Empire by Claire Lalouette


Review by: Bernard Mathieu
Source: Revue Historique, T. 276, Fasc. 2 (560) (OCTOBRE-DÉCEMBRE 1986), pp. 427-428
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: https://www.jstor.org/stable/40954440
Accessed: 11-04-2020 14:07 UTC

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Comptes rendus 427

tables inventaires qui n'ont pa


certes le fruit d'une expérienc
de classement.

Gildas Bernard.

Claire Lalouette, Thèbes ou la naissance d'un Empire, Paris, Arthème


Fayard, 1986, 650 p., 2 plans, 2 cartes, index, 140 F.

Après L'Empire des Ramsès, publié chez le même éditeur en 1985, Claire
Lalouette, égyptologue et professeur à l'Université de Paris IV, propose ici un
pèlerinage aux sources de l'idéologie impériale ramesside, élaborée progressive-
ment au cours de la XVIIIe dynastie, sous l'influence de souverains à la forte
personnalité, installés à Thèbes dont ils firent, un temps, la capitale du monde
oriental.
La méthode historique adoptée, fondée sur l'analyse attentive des vestiges
archéologiques et l'exploitation systématique de la documentation hiéroglyphique
offre deux principaux avantages : familiariser le lecteur, au moyen d'une abon-
dante illustration textuelle, avec le mode de pensée égyptien et la phraséologie
qui l'exprime, et surtout mettre en cause un certain nombre d'idées préconçues
qui n'ont pas seulement cours dans le grand public.
L'exposé suit l'ordre chronologique. Après une présentation des conditions
géographiques et historiques de l'Egypte et de ses voisins au xviir siècle avant
notre ère (chap. I), l'auteur retrace la fabuleuse guerre de libération contre
l'occupant Hyksos entreprise depuis Thèbes, «orgueilleuse enclave nationale»,
par Kamosis, puis son frère Ahmosis (chap. II). La politique de conquête est
lancée : Aménophis Ier et surtout Thoutmosis Ier, dotés d'une armée forte, multi-
plient les expéditions militaires au Sud comme au Nord, jusqu'à l'Euphrate, tan-
dis que le site de Karnak s'enrichit de nouveaux monuments (chap. III). Au début
du xv* siècle, le règne d'Hatshepsout, « Première-des-nobles-dames », plus orienté
vers les activités commerciales et les réalisations architecturales, marque une
pause (chap. IV), avant la grande geste de Thoutmosis III qui affirme l'autorité
de l'Egypte sur ses voisins et fixe la première idéologie du pharaon-héros invin-
cible (chap. V). Lui succède 1'« athlétique et sportif » Aménophis II, consolidant
les positions acquises et concluant une alliance avec le Mitanni, grande puissance
asiatique du moment (chap. VI). Sous Thoutmosis IV et son fils Aménophis III,
« roi-soleil », se développent la diplomatie internationale et les échanges avec le
Mitanni, Babylone et Chypre ; Karnak s'agrandit encore, Louxor s'embellit d'un
nouveau temple, et sur la rive gauche du Nil se bâtit une véritable cité palatine :
Maltaqa (chap. VII). Vers 1370 monte sur le trône d'Egypte le célèbre Améno-
phis IV, qui prend bientôt le nom d'Akhenaton et fait construire une nouvelle
capitale à Tell el Amarna ; la pensée religieuse évolue, les canons esthétiques sont
profondément modifiés, mais l'Egypte perd de son prestige et la situation inter-
nationale se dégrade (chap. VIII). Sous les règnes très brefs de Toutankhamon et
de Ay, la Cour regagne Thèbes et le clergé d'Amon retrouve ses prérogatives
(chap. IX), mais c'est avec le militaire Horemheb, qui réorganise le royaume par
de profondes réformes et réussit à contenir les forces hittites devenues menaçan-
tes, que débute véritablement l'ère ramesside (chap. X).
Parmi la moisson de textes passionnants récoltée par l'auteur, on retiendra

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428 Comptes rendus

particulièrement le mythe rac


mère d'Hatshepsout et comme
les récits du siège de Megiddo
irrésistiblement l'épopée troye
laquelle Thoutmosis III fut secouru par son fidèle Amenemheb (p. 294 sq.), le
« songe de midi » de Thoutmosis IV, endormi à l'ombre du Sphinx qui promit la
royauté au jeune prince en échange d'un désensablement (p. 413 sq.), ou encore
la lettre impatiente de Kadasman, roi de Babylone, demandant en mariage la
fille d'Âménophis III (p. 429).
Ce parcours chronologique de la XVIII* dynastie, richement documenté, donne
l'occasion à Claire Lalouette de dénoncer quelques idées reçues concernant notam-
ment 1'« esclavage» (p. 16 sq., 470), la «propagande» royale véhiculée par les
textes officiels (p. 210, 226), la « récupération » de l'œuvre de ses prédécesseurs
par le nouveau pharaon (p. 267 sq.), et surtout la prétendue « révolution » mono-
théiste d'Aménophis IV qui procède en réalité d'une longue gestation spirituelle,
dont le règne d'Aménophis II marque déjà une étape, et s'appuie sur de solides
traditions (p. 243, 492, 496, 509, 516, 526). Sur le plan artistique en revanche,
l'expérience amarnienne reste très originale, bien que l'interprétation réaliste et
intimiste que donne l'auteur du style amarnien nous paraisse devoir être nuan-
cée. Un seul exemple : la statuette du Caire (je 44866) représente Akhenaton avec
sur ses genoux non pas l'une de ses filles, qu'il embrasserait sur la bouche
(p. 517), mais la reine - Nefertiti ou Kiya - , l'objet se rattachant alors à une
tradition iconographique bien attestée et dont le sens idéologique est fondamen-
tal (voir, sur ce point, le récent article de D. Wildung dans Bulletin de la Société
française d'Egyptologie, 102, 1985, p. 20-24).
L'auteur refuse de qualifier d'« impérialiste » la démarche des premiers bâtis-
seurs de l'empire (p. 38), juge sévèrement, au nom de 1'« intérêt supérieur de
l'Egypte», l'attitude trop pacifiste d'Hatshepsout («le règne d'une femme faillit
tout compromettre » (!) : p. 199, 232, 256, 273), stigmatise l'intolérance d'Akhenaton
(p. 515) : toutes ces questions, à notre avis, restent ouvertes, faute d'informa-
tions suffisamment précises sur le péril extérieur et les intrigues du clergé
thébain.
Signalons seulement, pour finir, quelques errata ou omissions qui pourraient
parfois gêner la compréhension. Lire p. 23 : ( j forme dérivée du signe hiérogly-
phique _Q shen»; p. 90 : «furent sculptés»; p. 326 : «bâtie sur plan en
4. » ; p. 338 : « trouvée dans sa tombe (n° 74) » ; rétablir l'orthographe, souvent
fautive, de « Serabit el Khadim » (p. 79, 80, 288, 641, 642) et de « uraeus » (p. 168,
210, 273, 280, 316, 383, 569).
La consultation de l'ouvrage est facilitée par un index détaillé (p. 625-638) ; les
notes nombreuses (p. 589-612), donnant les références précises des textes tra-
duits, permettent en outre aux spécialistes de se reporter aisément aux originaux
hiéroglyphiques. Avec Thèbes ou la naissance d'un Empire, le public français
dispose désormais d'une excellente synthèse sur l'une des périodes les plus fasci-
nantes de l'histoire égyptienne et qui n'a pas encore révélé, beaucoup s'en faut,
tous ses mystères.

Bernard Mathieu.

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