Vous êtes sur la page 1sur 37

SUITE BAPTEME ET CONFIRMATION

INITIATION CHRÉTIENNE
1. Devenir chrétien
2. La préparation évangélique
3. Le catéchuménat
Les trois sacrements de l'initiation
Le baptême des petits enfants
6. La formation des enfants et des jeunes
7. La confirmation séparée du baptême
8. La mystagogie
« La vigne divine et antérieure aux siècles a poussé hors du sépulcre et a porté des fruits : les
nouveaux baptisés, grappes de raisins sur l'autel. La vigne a été vendangée et l'autel, comme un
pressoir, a été rempli de grappes. Vignerons, vendangeurs, cueilleurs, cigales chantantes, nous ont
montré aujourd'hui encore dans toute sa beauté le Paradis de l'Eglise. Et qui sont les vendangeurs ?
Les néophytes et les apôtres. Et qui sont les cigales ? Les nouveaux baptisés, trempés de rosée au
sortir de la piscine et se reposant sur la croix comme sur un arbre, se réchauffant au soleil de
justice, brillant de l'Esprit et gazouillant des choses spirituelles ». ASTERIOS LE SOPHISTE,
Hom. 14.

1. DEVENIR CHRETIEN
Par Philippe GUENELEY
« Ceux qui ont reçu de Dieu par l'intermédiaire de l'Église la foi au Christ, doivent être admis au
catéchuménat par des cérémonies liturgiques. Le catéchuménat n'est point un simple exposé des
dogmes et des préceptes, mais une formation à la vie chrétienne intégrale et un apprentissage
mené de la façon qui convient ; formation et apprentissage par lesquels les disciples sont unis au
Christ leur Maître. Les catéchumènes doivent donc être initiés comme il faut au mystère du salut
et à la pratique des mœurs évangéliques et introduits, par des rites sacrés à célébrer à des époques
successives, dans la vie de la foi, de la liturgie et de la charité du peuple de Dieu. Ensuite, délivrés
de la puissance des ténèbres, par les sacrements de l'initiation chrétienne, morts avec le Christ,
ensevelis avec lui et ressuscités avec lui, ils reçoivent l'Esprit d'adoption des enfants et célèbrent
avec tout le peuple de Dieu le mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur. » VATICAN
11. AG 14.

A. L'INITIATION CHRÉTIENNE
Parler aujourd'hui d'initiation chrétienne peut apparaître un peu désuet : en effet, ce terme, utilisé
particulièrement pour parler de l'entrée en christianisme dans les premiers siècles de l'Église, est
plus volontiers remplacé par ceux d'évangélisation, d'inculturation, de conversion, de vie en

1
Église. Par ailleurs, le terme d'initiation semble plutôt réservé aux religions à mystères et aux
sociétés appelées traditionnelles. Il ne conviendrait plus à nos sociétés modernes 21 . Enfin, de façon
courante l'initiation consiste à acquérir les premiers éléments, la première connaissance d'un art,
d'une science, d'un jeu, d'un sport, d'une langue. Ainsi, elle perd sa dimension religieuse.
Pourtant, dans ce contexte, l'initiation chrétienne garde sa pertinence et son originalité. Remise en
honneur par le concile de Vatican II22 et par le Code de Droit canoniques, elle tient sa place, non
seulement dans les pays de mission, mais aussi dans nos pays occidentaux. Car elle s'inscrit dans
le mouvement de toute première évangélisation ou de seconde évangélisation, de toute prédication
kérygmatique liée aux paroles du Ressuscité :
« Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père et du Fils et du
Saint-Esprit ; et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés » Mt 28,
20.
Pour mettre en œuvre cette mission reçue, et surtout, pour que l'action permanente du Christ, par son
Esprit, puisse trouver son retentissement dans une vie humaine, l'Église propose un chemin, un
parcours d'initiation à la foi et à la vie chrétiennes.
Ce parcours n'est pas une suite d'obstacles à franchir. Il n'est pas non plus une démarche désordonnée,
inorganisée, livrée aux caprices de l'initié ou aux impératifs de l'Église initiatrice. Il met en œuvre
des actes, des gestes, des choses, des attitudes, des enseignements, des personnes pour que la foi
puisse prendre corps. Il est marqué par des étapes successives et articulées entre elles ; chacune est
célébrée selon des rites adaptés.
Les catéchumènes doivent donc être initiés comme il faut au mystère du salut et à la pratique des
mœurs évangéliques, et introduits, par des rites sacrés, à célébrer à des époques successives, dans
la vie de la foi, de la liturgie et de la charité du peuple de Dieu »23 .
1. Les composantes de l'initiation
L'initiation chrétienne ne se réduit pas à la préparation et à la célébration de rites, en particulier des
trois sacrements de l'initiation que sont le baptême, la confirmation et l'Eucharistie. Elle n'est pas
uniquement un exposé progressif des vérités de la foi. « L'initiation atteste que la foi est adhésion
de tout l'être»24 . Elle comprend des éléments d'ordre symbolique, catéchétique, éthique,
communautaire, qui atteignent toute la personne humaine.
a) L'ordre symbolique
L'initiation à la foi chrétienne s'accompagne d'un développement de V ordre symbolique. Qu'est-ce à
dire ? L'initiation ne se réduit pas à la transmission, à la tradition de vérités dogmatiques et de
préceptes ; elle n'est pas uniquement un enseignement, une instruction. Elle est (l'opération par
laquelle la foi réalise, par une action symbolique, la communion au mystère »8 .
Cette action symbolique est réalisée par l'Église qui, dans des lieux déterminés (baptistère, entrée et
chœur de l'église, etc.), par un ensemble de gestes (signation, onction, repas, bain, imposition des
mains, etc.), d'objets (eau, pain, vin, huile, cierge, Bible, vêtement, etc.) et de paroles, rend

213
Cf. sur ce sujet : Mircea ELIADE, initiation, rites, sociétés secrètes, Gallimard, Paris 1959.
224
SC 64-65. - AG 14. - PO 6.
5CIC, canons 788, 2 ; 842, 2 ; 851, 1 ; 872, 879 ; 920, 1.
236
AG 14.
247
Henri BOURGEOIS, L'Église est-elle initiatrice ? LMD 132, 1977, p. 114.
«

2
présentes des réalités spirituelles et suscite une rencontre et un échange avec Dieu en Jésus-Christ.
Ce que l'initié, dans les commencements de la foi, découvre de Dieu, de l'Évangile, de la vie
chrétienne, grâce à la catéchèse, se trouve alors accueilli et célébré comme don de Dieu dans les
actes liturgiques, en particulier dans les sacrements.
Pour entrer dans cette dimension symbolique, signalons quelques points d'attention.
Premier point : il semble utile que l'éducation symbolique des nouveaux croyants soit envisagée
comme une découverte ou une redécouverte de la symbolique humaine fondamentale. En effet, les
symboles chrétiens sont proches des symboles fondamentaux de l'homme. Les liens, que réalise la
liturgie avec les choses, avec des objets, avec la nature, avec des événements (la naissance, la
mort, par ex.), demeurent pour l'homme « une voie d'accès à sa propre humanité »9. Dans cette
perspective les célébrations, en particulier Les sacrements, sont un lieu d’« humanisation».
« Les sacrements, à travers le pain, le vin, l'eau, les diverses modulations de la voix, du geste, du
corps, l'espace sacré, son aménagement architectural et sa décoration plastique, la pierre de l'autel,
la flamme du cierge pascal ou l’odeur d’encens, effectuent une reprise symbolique de notre
appartenance à la terre. Ils nous disent notre foi comme foi d'homme, toujours particularisée,
incarnée, limitée, et donc toujours soupçonnable de mystification ; il n'existe de foi que religieuse.
» 25
Deuxième point : l'initiation est une entrée dans les symboles d'un groupe. Il s'agit ici du groupe des
chrétiens. La symbolique chrétienne, même si elle a une dimension humaine fondamentale,
comporte aussi une dimension spécifique, de nature historique. La foi chrétienne qui naît et se
développe au sein de l'Église, fait entrer dans des significations symboliques nouvelles. Les
sacrements sont des actes du Christ.
« Ils ne comportent donc pas seulement un symbolisme naturel, mais une référence historique.
L’eucharistie n'est pas seulement un repas sacré, dont les religions fournissent des analogues ; elle
est la mémoire expresse du dernier repas du Christ proche de son sacrifice.
Le baptême n'est pas seulement un bain rituel de purification, mais la représentation efficace de la
mort et de la résurrection du Christ. Or, c'est le propre du symbole, dans son originale dialectique,
que de jouer à la fois, dans son processus de signification, la fonction de la présence et la fonction
de l’absence : il rend présent le mystère, il représente le mystère, accompli dans le passé, et donc
absent » 11 .
Ainsi, les différentes étapes de l'initiation chrétienne permettent de faire jouer (les symboles
successifs, en étroite symbiose avec les données successives de la foi en engendrement » 12. Dans
ce cas, pour l'initié, il ne s'agit pas tant de s'approprier le Christ que de s'ouvrir tout entier à lui, de
lui appartenir corps et âme (cf. Rm 14, 8 ; 1 co 3, 23: 2 co 5, 15).
Lors de la vigile pascale « où le peuple chrétien revient à ses sources, les nouveaux venus sont
plongés dans une symphonie de symboles.

25
Marie-D. CHENU, « Foi et sacrement., LMD 71, 1962, p. 74.
9 Marie-Louise GONDAL, Commencer ou recommencer à croire b, Catéchuménat, Lyon, 1983, p. 80.
10
Louis-Marie CHAUVET, Du symbolique au symbole », Essai sur les sacrements, Le Cerf, coll. Rites et symboles, 1979, pp. 163-164.
«

11 M.D. CHENU, art. cit. p. 77. Cf. aussi Les Évêques de France, ail est gand le Mystère de la foi». Le Centurion, 1978,
Paris, pp. 57-58.
12 M.N. CHENU, art. cit. p. 76.

3
Tirés de la terre et de l'eau, matrices originelles, ils sont éveillés à la création, invités à l'aventure de
la foi, appelés par leur nom à répondre librement. Et tout un peuple autour d'eux chante la nuit
d'où jaillit le feu du Christ répandu pour tous les hommes. Humilité des gestes, grandeur infinie de
la geste à laquelle ils sont introduits, à nul autre moment il n'est donné dans l'Église de vivre
l'expérience de la foi comme une expérience totale »13.
b) L'ordre catéchétique
Devenir chrétien, c'est aussi ouvrir son intelligence aux vérités de la foi des chrétiens, c'est accueillir
peu à peu les (mystères » de Dieu. Car la foi n'est pas un vague sentiment, fût-il religieux, ni la
satisfaction d'un désir personnel. Elle n'est pas non plus un système, une idéologie, une
abstraction. Elle est connaissance d'un mystère, au sens paulinien du terme (cf. Ep 3, 1-6), une
connaissance qui fait vivre.
La catéchèse, même initiale, est cette part de l'initiation chrétienne qui fait connaître, qui transmet la
connaissance de la foi. Au centre, domine la personne de Jésus-Christ, qui conduit à Dieu Père et
qui révèle son dessein de vie et de salut pour l'homme.
C'est pourquoi, savoir qui est Jésus-Christ, connaître ses actions et son message, sa relation unique et
privilégiée avec Dieu, fait partie de la toute première initiation chrétienne 14 . Dans cette
découverte du Christ, la lecture de la Bible tient une place unique et fondamentale. La plupart des
catéchèses chrétiennes s'appuient sur la Bible, y compris l'Ancien Testament, qui permet de
connaître qui est Dieu et la vocation profonde de l'homme.
Quels sont les traits majeurs d'une catéchèse dans l’initiation ?
1. Elle est d'abord une catéchèse pour des débutants, des « commençants » à croire15. Elle ne
s'adresse pas à des ignorants, mais à des personnes qui sont dans les débuts de la foi, qui font les
premiers pas sur le chemin de la foi chrétienne et de la vie en Église. Elle est plus axée sur les
commencements de la foi que sur l'approfondissement elle n'est pas de l'ordre de la formation
permanente. Ce qui ne veut pas dire qu'elle est une catéchèse au rabais ; elle doit « communiquer
dans son intégrité la Révélation de Dieu» 26 . Mais elle pose les fondements d'une foi appelée à
connaître d'autres développements, d'autres approfondissements.
Il convient donc d'être simple dans cette première catéchèse, ce qui ne veut pas dire simpliste. Il s'agit
la plupart du temps de permettre aux catéchumènes d'avoir une vue globale sur la foi et la vie
chrétiennes, qui les conduise à professer la foi des chrétiens et à être membres de l'Eglise à part
entière.
Elle est aussi une catéchèse qui respecte les personnes auxquelles on s'adresse. Elle sait tenir compte
de leur histoire et de leur culture. « C’est d'après la diversité de mon impression que mon discours
lui-même débute, s'avance et s'achève. Nous devons, certes, à tous la même charité, mais ce n'est
pas là une raison d'appliquer à tous le même remède », dit Saint Augustin 17 .

26
M.L. GONDAL, o.c. p. 85.
14 Henri BOURGEOIS, Catéchèse catéchuménale, éd. Groupe Pascal-Thomas de Lyon, 1985, p. IIO.

15 cf. Saint AUGUSTIN, De catëchizandis rudibus. Bibliothèque augustinienne, vol. 11, DDB.
16
Jean-Paul II, Exhortation Catechesi tradendae, no 58
17 De catéchizandis rudibus, XV, 23.
4
Pour cette raison, il convient d'écouter ceux qui sont initiés parler de leur vie et des moments
importants qui ont marqué leur existence, de repérer les événements (rencontres de personnes,
lectures, actes ecclésiaux...), qui ont été déterminants dans leur recherche de
Dieu. Leur initiation chrétienne prend corps dans leur vie d'homme, passée et présente.
Elle est encore une catéchèse progressive ; c'est une catéchèse des cheminements. Elle part de la foi
de l'Église pour conduire l'adulte converti à faire lui-même profession de foi 27 . Cette démarche
s'inscrit dans une durée. Si, dans les débuts, l'annonce de la foi chrétienne est plutôt de type
kérygmatique ou bien développe tel ou tel point particulier, peu à peu les éléments du message
chrétien et de la vie chrétienne se mettent en place dans un ensemble organisé.
Dans ce sens, l'Église a prévu des célébrations d'étapes, qui ponctuent les progrès dans la foi.
Depuis le moment où quelqu'un demande à devenir chrétien jusqu'au jour où il pourra exprimer la foi
de l'Église reçue des apôtres et être baptisé, il s'écoule un temps de maturation, de structuration de
la foi, où l'expérience intérieure de Dieu finit par s'exprimer en une adhésion explicite de la foi.
Enfin, la catéchèse dans l'initiation s'articule sur la conversion et l'expérience spirituelle de celui
qui devient chrétien. La catéchèse prend appui sur la conversion initiale et progressive, et la
conversion est éclairée par la catéchèse. La catéchèse tient compte de la conversion première à
Dieu, conversion à la fois fragile et forte, conversion qui est l'œuvre de l'Esprit Saint dans la vie de
quelqu'un. Ainsi, celui qui assure la catéchèse, sait qu'il n'est pas seul à agir. Tout en faisant naître
la foi, en la développant, il sait que l'Esprit de Dieu travaille au cœur de celui qu'il initie. Bien
plus, la catéchèse consiste essentiellement à suivre l'action même de l'Esprit de Dieu, qui guide le
chemin de l'initié.
« Cette catéchèse nourrit et fortifie la foi des catéchumènes, en révèle les exigences et introduit à une
expérience plus vive du mystère du Dieu vivant ».
c) L'ordre éthique
L'initiation chrétienne comprend aussi une dimension éthique. Qu'est-ce à dire ? Celui qui découvre
le Dieu des chrétiens et répond à sa volonté, celui qui devient disciple de Jésus et qui se laisse
conduire par son Esprit, en prenant au sérieux l'Évangile, celui-là se trouve transformé dans son
comportement et sa mentalité. En lui et avec lui. Dieu fait son œuvre de conversion. Cette
conversion change son regard sur le monde, sur les autres, sur lui-même, pour le conduire à une
vie de plus en plus évangélique. En répondant à rappel de Dieu, celui qui devient chrétien est
invité à accueillir en lui la vie nouvelle de Dieu, qui se traduit pratiquement par un agir
Conforme aux commandements de Dieu et une obéissance à l'Esprit de Dieu.
Cet agir chrétien découle de la foi en Dieu ; il est l'expression d'une foi en actes : « C'est par les
œuvres que je montrerai ma foi » (Je 2, 18). Il n'est pas le résultat d'une contrainte ou d'une loi
extérieure. Il s'enracine profondément dans la vie de celui qui devient chrétien, comme réponse à
la sainteté à laquelle Dieu rappelle. Le chrétien découvre peu à peu que « garder les
commandements de Dieu », c'est en fait accéder à la liberté, à la vraie liberté (celle de l'Esprit) et à
une vie nouvelle et créatrice :

2718
Cf. Message du Synode des Évêques, 1977, no 8. Jean-Paul II, CT no 19.
5
« On t'appelait catéchumène lorsque tu te trouvais seulement sous le coup d'un écho, entendant parler
d'une espérance sans la voir, de mystères sans les comprendre, des Écritures sans en discerner la
profondeur. L’écho, désormais, ne résonne plus autour de toi, il résonne en toi »
CYRILLE DE JÉRUSALEM, Pro catéchèse, 6.
« La loi de l'Esprit qui donne la vie en Jésus-Christ m'a libéré de la loi du péché et de la mort» (Rm 8,
2). Cette loi libératrice, et créatrice de nouvelles actions, est exprimée particulièrement dans les
béatitudes et le chapitre 25 de l'évangile selon Saint Matthieu.
Dans les premiers temps de l'Église ceux qui devenaient chrétiens et désiraient être baptisés devaient
renoncer à l'exercice de certaines professions 28 . Aujourd'hui, la question du changement de vie est
posée de façon plus vive, et parfois douloureuse, à ceux qui ont commencé leur initiation
chrétienne et qui sont habités par la haine ou encore qui se trouvent dans une situation
matrimoniale non acceptée par l'Église (divorcés remariés, polygamie, homosexualité). D'un point
de vue pastoral, on se souviendra qu'un accueil et un accompagnement dans la foi doivent être mis
en place: l'accueil en Église pouvant être célébré (première étape du Rituel du baptême).
LES DEUX VOIES « II y a deux voies : l'une de la vie et l'autre de la mort ; mais la différence est
grande entre les deux voies.
Voici donc la voie de la vie: Tu aimeras d'abord Dieu qui t’a créé, puis ton prochain comme toi-
même, et tout ce que tu ne veux pas qu'il te soit fait, toi non plus ne le fais pas à autrui... Voici
maintenant la voie de la mort: tout d'abord elle est mauvaise et pleine de malédiction... Veille à ce
que personne ne te détourne de cette voie de la doctrine. »
La Doctrine des douze Apôtres (Didachê), L, 1, 2; 5,1 ; 6,1.
Le Concile de Vatican II a rappelé la dimension morale de l'initiation chrétienne comme expression
de la nouvelle vie que fait naître la foi au Christ.
« Sous l'action de la grâce de Dieu, le nouveau converti entreprend un itinéraire spirituel par lequel,
communiant déjà par la foi au mystère de la croix et de la résurrection, il passe du vieil homme au
nouvel homme qui a sa perfection dans le Christ. Ce passage, qui entraîne avec soi un changement
progressif de la mentalité et des mœurs, doit devenir manifeste avec ses conséquences sociales et
se développer peu à peu pendant le temps du catéchuménat »2029
Devenir chrétien induit donc des comportements et des prises de position, qui, par fidélité à
l'Évangile, engendrent des ruptures avec (l'esprit du temps». Le chrétien doit agir en faveur du
respect de tout homme, quel qu'il soit, et refuser toute forme de discrimination; il se doit aussi
d'être le défenseur de la vie, l'artisan de la paix et de la justice, le défenseur de la vérité et des
droits de l'homme, l'acteur d'une plus grande solidarité entre les peuples. Ce qui permet à tout
homme d'être plus responsable, plus libre, plus digne, plus fraternel, est la route que doit
emprunter celui qui devient chrétien s'il veut agir selon sa foi.
« Cet homme est la première route que l'Église doit parcourir en accomplissant sa mission : il est la
première route et la route fondamentale de l'Eglise, route tracée par le Christ lui-même »2130
28 19
Hippolyte de Rome, La tradition apostolique, 16, SC Il, Le Cerf, 1946, pp. 44-46.
29 20
AG 13. Cf. aussi « Les catéchumènes doivent être initiés comme il faut au mystère du salut et à la
pratique des mœurs évangéliques » AG 14.
30 21
Jean-Paul II, Encyclique Le Rédempteur de l'homme, 1979, no 14 ; voir aussi le no 15.

6
Dans la liturgie de l'initiation, les exorcismes que propose le Rituel signifient aux initiés qu'il n'est
pas facile d'être chrétien, qu'il y a des résistances en soi-même, que le combat qu'ils mènent contre
le mal et contre le péché est aussi le combat du Christ en eux. Ils ne sont pas seuls. Le Christ les
soutient dans leurs luttes et l'Église leur apporte le secours de sa prière (RICA 150).
Les scrutins éclairent les catéchumènes sur le sens des ruptures qu'ils doivent assumer, avec
l'espérance de vaincre le mal (RICA 148) et le courage d'être des témoins vigoureux de la foi et de
Dieu (RICA 165, 1, 172,1).
« Vous désirez recevoir le baptême et mériter la grâce de l'Esprit, vous devez d'abord, à l'audition de
la Parole de Dieu, déraciner vos vices habituels et apaiser vos mœurs barbares, pour qu'ayant
revêtu la douceur et l'humilité vous puissiez recevoir la grâce du SaintEsprit ».
Homélie sur Le Lévitique, 6, 2.
d) L'ordre social
Devenir chrétien, c'est entrer progressivement dans l'Église, qui rassemble tous ceux qui croient au
Christ et sont appelés à former un seul peuple saint (cf. LG2).
En pratique, cette entrée dans l'Église se réalise sous le mode de l'accompagnement de ceux qui
demandent à cette Église de devenir chrétiens. « L’initiation des catéchumènes se déroule au sein
de la communauté des fidèles. Avec les catéchumènes, les baptisés... permettent à ces nouveaux
chrétiens de répondre plus généreusement à l'appel de l'Esprit Saint. » (RICA 31). Ainsi,
l'initiation se fait souvent au sein d'un petit groupe, appelé groupe catéchuménal. Ce groupe n'est
pas qu'un moyen pédagogique. Il est déjà une petite cellule d'Église, où des croyants partagent leur
foi et leur quête de Dieu (RICA 44, 103-4).
Grâce à ce groupe, ceux qui deviennent chrétiens découvrent directement les membres d'une Église
concrète, une Église qui a une histoire, une Église qui vit aujourd'hui, une Église diversifiée,
partageant la même foi et la même espérance, et vivant d'un même esprit fraternel.
L'existence d'un tel groupe fait découvrir qu'on ne devient pas chrétien tout seul, mais grâce à
d'autres, dont on reçoit le témoignage. La foi est certes une adhésion personnelle, mais elle n'est
jamais une affaire individuelle.
De plus, c'est l'Église, accueillant ceux qui demandent à être chrétiens, qui est responsable de cette
initiation et qui soutient l'avancée de la foi des candidats. Ce groupe est constitué la plupart du
temps de personnes connues des catéchumènes (des membres de sa famille, des chrétiens proches
du domicile ou avec lesquels ils travaillent).
Au sein de ce groupe le parrain tient une place unique et essentielle.' il accompagne de façon plus
proche ceux qui deviennent chrétiens. Il les aide dans leur chemin d'initiation en partageant
amicalement sa manière de vivre l'Évangile. « Choisi dès avant rappel décisif, il exerce
publiquement sa charge ce jour-là en rendant témoignage au sujet du catéchumène devant la
communauté » (RICA 46). Si le parrain n'assure pas lui-même la catéchèse, il se fait aider par un
catéchète. Le parrain tient une place dans la présentation des candidats aux sacrements de
l'initiation (cf. RICA 8, 131).
Si l'initiation des adultes et des enfants incombe à tous les membres de l'Église, les évêques, parce
qu'ils sont « les premiers dispensateurs des mystères de Dieu et les gardiens de toute la vie

7
liturgique dans l'Église qui leur est confiée » (CD 15), doivent diriger « l'institution catéchuménale
», « admettre les candidats à l'appel décisif et aux sacrements » (RICA 42) et veiller à la
préparation de ces sacrements. En pratique les évêques confient cette charge à un délégué et ils
prennent le temps de rencontrer ceux qui ont été initiés à la foi, au cours de leur préparation, avant
la célébration des principales étapes.
La présence des laïcs dans l'accompagnement ne supprime pas le rôle des prêtres, dont la
responsabilité est importante dans le soutien personnel des catéchumènes, dans le choix des
parrains et des catéchètes, dans leur formation et dans les célébrations, qui jalonnent le chemin
d'initiation (cf. RICA 236, 237, 238).
Dans certaines situations d'isolement ou de dispersion, les candidats ont peu de relations et ne
connaissent pas de chrétiens — c'est le cas dans certains ensembles urbains ou dans certains
villages dépeuplés Souvent l'accompagnement se fait plus personnel. D'ailleurs, même
lorsqu'existe un groupe catéchuménal, il est opportun de maintenir des rencontres personnelles : le
groupe est parfois pesant pour certains, qui découvrent la vie ecclésiale.
« Cette initiation chrétienne au cours du catéchuménat doit être l'œuvre non pas des seuls catéchistes
ou des seuls prêtres, mais celle de toute la communauté des fidèles, spécialement celle des
parrains, en sorte que dès le début les catéchumènes sentent qu'ils appartiennent au peuple de Dieu
». (AG 14).
« Quand l'Esprit Saint, qui appelle tous les hommes au Christ par les semences du Verbe et la
prédication de r Évangile, et produit dans les cœurs la soumission de la foi, engendre à une
nouvelle vie dans le sein de la fontaine baptismale ceux qui croient au Christ, il les rassemble en
un seul peuple de Dieu qui est « race élue, sacerdoce royal, nation sainte, peuple acquis » (1 Pierre
2, 9) » AG 15.
Incorporés au Christ, membres de l'Eglise à part entière par les sacrements de l'initiation, les
néophytes ont à devenir partie prenante de la vie de l'Église, là où ils sont. D'ailleurs, la présence
d'une communauté les soutiendra dans leur foi, les aidera à vivre de la Parole de Dieu et leur fera
vivre les sacrements de l'Église (RICA, 236, 237, 238).
Dans la catéchèse il faut toujours lier et ne jamais séparer la connaissance de la Parole de Dieu, la
célébration de la foi dans les sacrements et la confession de la foi dans la vie quotidienne.
»Cardinal Lorscheider, Synode des évêques1977.

B. LES RITUELS ET LEURS COMPOSANTES


1. TROIS RITUELS
II existe actuellement en France trois rituels du baptême, qui expriment trois façons de devenir
chrétien et d'être incorporés à l'Église du Christ, selon des âges différents.
a) Rituel de l'Initiation chrétienne des adultes
Promulgué le 6 janvier 1972 par la Congrégation du Culte divin, il a été traduit en français. Cette
traduction prend la place de celle qui avait été publiée en février 1972. Ce nouveau Rituel, élaboré
par la Commission internationale francophone pour les traductions et la liturgie, confirmé par la
Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements le 22 février 1996, a pour titre «
Rituel de l'Initiation chrétienne des adultes », référence : RICA.

8
b) Rituel du Baptême des enfants en âge de scolarité
Approuvé par les évêques de la Commission Internationale francophone, le 15 septembre 1976, il a
été confirmé par la Congrégation pour les Sacrements et le Culte divin, le 18 janvier 1977. Ce
rituel est l'adaptation pour les pays de langue française du chapitre 5 du Rituel romain de
l'Initiation chrétienne des adultes (RR 306-369).
c) Rituel du Baptême des petits enfants
Mis en usage à partir du 8 septembre 1969, ce Rituel a eu une adaptation française, qui a été
approuvée par les Conférences épiscopales francophones et confirmée par la Congrégation pour le
Culte divin le 28 octobre 1984.
2. UNE STRUCTURE COMMUNE
Quelle que soit la forme que prend le baptême à l'intérieur des trois rituels, on trouve en eux des
éléments communs et fondamentaux pour toute initiation chrétienne.
1er élément : L'accueil et l'entrée en Église
C'est le premier aspect de toute initiation : l'Église, maîtresse de l'initiation, accueille en vérité et avec
patience ceux et celles qui se tournent vers elle pour devenir chrétiens. Cet accueil prend du
temps, il s'inscrit dans la durée, il est à l'opposé de l'embrigadement. Il a la forme d'un
accompagnement amical, persévérant. Il est adapté à chaque âge. Grâce à lui, l'entrée en Église se
fait librement et progressivement. Les rituels le soulignent.
RICA
L'accueil des premiers moments se prolonge dans la durée (un à deux ans). Il permet une entrée
progressive et adaptée à des adultes parfois éloignés de la foi. Cet accueil est célébré de façon
officielle, lors de la 1èr6 étape baptismale, qui comprend le rite de la signation.
BEAS
I] accueil commence, dès que l'enfant a exprimé sa demande de baptême, avec l'accord de ses
parents. S’étendant sur plusieurs mois, cet accueil se fait au sein d'un d'Église, il est célébré dans
une étape, qui comprend la signation.
BPE
Avant la célébration dans l'église, l'accueil est vécu dans des rencontres avec les parents des enfants.
Lors du baptême, l'accueil est le premier moment, qui s'achève par la signation.
Il faut signaler que si cet accueil est célébré de façon plus forte au moment d'une première étape
baptismale ou au début du baptême (quand il s'agit d'un petit enfant), il demeure une attitude
permanente de l'Église tout au long de l'initiation chrétienne.
2eme élément : La proclamation et l'écoute de la parole de Dieu
La parole de Dieu, proclamée et reçue, ponctue chacune des étapes de l'initiation chrétienne. Les
lectures proposées à chaque étape tiennent compte du chemin parcouru par les catéchumènes dans
la foi, et de la signification de chacune des étapes.
RICA

9
La proclamation de la parole de Dieu a lieu, à la 1 re étape, avant la remise solennelle du livre des
évangiles, à la 2e étape, avant l'appel des catéchumènes par l'évêque, et, à la 3e étape, avant le
baptême d'eau. Des célébrations de la Parole de Dieu sont proposées pendant le temps du
catéchuménat entre la Ve et la 2 A étape (RICA 106109).
BEAS
La proclamation de la parole de Dieu a lieu avant la remise du livre des évangiles, à la 3e étape, avant
les rites d'exorcismes, et, à la 4e étape, avant le baptême d'eau.
BPE
La proclamation de la parole de Dieu a lieu après rentrée en Église, avant la prière d'exorcisme et
avant le baptême d'eau.
3eme élément : Les exorcismes
Célébrés seuls ou à l'intérieur de la célébration des scrutins (c'est le cas pour le baptême des adultes),
célébrés lors d'un rite pénitentiel (c'est le cas pour le baptême des enfants en âge de scolarité) ou
en lien avec une prière d'intercession (c'est le cas pour le baptême d'un petit enfant), les
exorcismes indiquent que toute vie chrétienne est un combat mené à la suite du Christ et avec lui,
et qu'il nécessite le secours et la force de Dieu.
RICA
Des exorcismes, accompagnés de prières pour les catéchumènes, sont proposés entre la Ve et la 2e
étape. D'autres exorcismes sont proposés au cours des scrutins, entre la 2e et la 3e étape.
BEAS
Des exorcismes sont proposés au cours de la 3e étape, après le rite pénitentiel.
BPE
Une prière d'exorcisme est proposée après la prière commune de l'assemblée, avant l'onction d'huile
et l'imposition des mains.
Devenir chrétien, hier comme aujourd'hui, prend toujours la forme d'un apprentissage, d'une initiation
inscrite dans le temps. Le terme d'initiation, utilisé dans le christianisme, exprime avec assez de
justesse ce mouvement personnel où quelqu'un qui demande la foi emprunte un chemin proposé
par l'Église, accueille une parole, un message qui vient d'un Autre (le Christ) et se sent devenir
plus libre, plus lucide, plus homme, en étant mû par une force intérieure.
Être initié chrétiennement à quelque chose d’original : tout en étant introduit dans les convictions, la
tradition vivante et les mœurs d'un groupe — l'Église— celui qui devient chrétien se convertit à
une personne, le Christ, en se laissant séduire par la crédibilité de sa parole, en se laissant entraîner
dans le mystère de sa mort et de sa résurrection, en se fiant au Dieu qu'il révèle et en se laissant
conduire par la force de son Esprit.
Ainsi, l'initiation chrétienne est un acte complexe où s'entretiennent plusieurs dynamismes :
l'intervention de l'Église initiatrice, qui fait entrer en elle de nouveaux disciples et qui, par-là, ne
peut pas s'installer, se figer dans sa fonction initiatrice la liberté et l'intelligence de ceux qui
demandent à devenir chrétiens ; et la grâce de Dieu, sous l'action de laquelle le converti entreprend
l'itinéraire spirituel de la foi.

10
Il n'est donc pas désuet de parler aujourd'hui d'initiation chrétienne. Certaines soifs, certaines attentes
spirituelles des hommes du monde contemporain invitent l'Église à proposer, de façon adaptée et
sous des formes variées, des chemins de la foi chrétienne. En initiant au mystère de Dieu tel qu'il
s'est révélé, l'Eglise fait aussi œuvre humanisante.

BIBLIOGRAPHIE
1. Quelques études générales : On complétera en se reportant aux chapitres suivants, notamment à
celui qui concerne le catéchuménat.
2. P. PARIS, L’initiation chrétienne, éd. Beauchesne, 1944, 166 p.
3. Ce petit livre reprend les « leçons sur le baptême » de celui qui, entre les deux guerres, a ouvert les
voies à la redécouverte de la liturgie baptismale des premiers siècles, avec sa richesse et son
dynamisme.
4. HAMMAN, L'initiation chrétienne, LMD 132 (1977).
5. Ce compte rendu d'un congrès sur la question ouvre, à travers la diversité de ses contributions, des
horizons intéressants. On pourra aussi se référer à :
6. J. LECUYER, Théologie de l'initiation chrétienne chez les Pères dans LMD 58 (1959), p. 5-26.
7. M. L. GONDAL, Baptême, confirmation, eucharistie. Ed. Le Centurion (1989), 120 p.
Du point de vue œcuménique
8. Commission « Foi et Constitution » du Conseil Œcuménique des Églises : Baptême, Eucharistie,
Ministère, Ed. Le Centurion, 1982, 81 p.
9. La Maison-Dieu, 163, Baptême, Eucharistie, Ministère, le document de Lima, 1985.
10. A compléter par la réponse catholique : Baptême, eucharistie, ministère DC no 1954 (1988) pp.
102-119.
Sur les problèmes actuels, confrontés à l'histoire, ou pourra lire :
11. De l'initiation, plusieurs articles dans LMD 133 (1978), p. 121-156.
12. Crise des structures d'initiation, revue Concilium 142 (1979).
13. Jean VERNE'ITE et Henri BOURGEOIS, Seront-ils chrétiens ? Lyon, Le Chalet, 1975, 231 p.
14. Michel DUJARIER, Pour une meilleure initiation chrétienne, dans « Lumen Vitae », 47, 1987/1,
p. 33-40.
15. Revue : « Croissance de l'Église » du Service National du catéchuménat, Devenir chrétien, n°61,
décembre 1981 et l’initiation chez les chrétiens, no 84, automne 1987.

11
LA PREPARATION EVANGELIQUE
Par serge DUGUET
« Dieu a fait tous les peuples pour qu'ils le cherchent, qu'ils essayent d'entrer en contact avec lui et de
le trouver, lui qui, en vérité, n'est pas loin de chacun de nous. En effet, c'est en lui que nous avons
la vie, le mouvement et l'être ; c'est bien ce que disent certains de vos poètes : « Oui, nous sommes
de sa race ». Saint Paul aux Athéniens. Ac 17, 27-28
« Tout ce qui, chez ceux qui ignorent le Christ et son Église, peut se trouver de bon et de vrai, l'Église
le considère comme une préparation évangélique ». Vatican II, LG 16

A. AVANT L'ÉVANGILE

1. Préparer le terrain à la Parole-semence


En rigueur de terme, le champ de la pastorale liturgique est celui de la célébration des mystères du
salut en Jésus Christ. En ce sens, la tâche pastorale commence au moment où un individu qui
désire être chrétien s'adresse à l'Église et devient catéchumène. Là, il écoute la Parole dans
l’assemblée des chrétiens et découvre par eux les signes et sacrements.

Cependant la réalité est moins tranchée. L'homme, créé à l'image de Dieu, aspire de tout son être
-même s'il ne le sait pas- à reproduire en lui ce qui a été manifesté dans le Fils de l'homme. Depuis
les origines, le Verbe et l'Esprit sont à l'œuvre dans la création pour que l'homme devienne ce à
quoi il est appelé.

Dans cet itinéraire, il y a sans doute pour nous, chrétiens, un seuil décisif : la rencontre de Jésus
Christ. Mais il y a aussi l'ouverture progressive du cœur profond qui rendra possible cette
rencontre.
Dans une société comme la nôtre, que l'on dit sécularisée et technicisée, voire désacralisée et
matérialisée, on doit se demander ce qui peut aider un adulte, un jeune, voire un enfant, déjà
travaillé par l'Esprit qui habite tout homme, à s'offrir à la Parole - très largement répandue sous des
formes diverses - ou au contraire le pousse à s'y dérober.
Cette question intéresse déjà la pastorale liturgique parce que le dynamisme profond de l'homme ne
peut croître en foi sans qu'interviennent le symbole et la parole.
2. La foi d'avant la foi

Les gens à qui l'on s'adresse ne sont pas des terres vierges où la Parole viendrait s'enraciner dans une
nouveauté radicale. Nous ne sommes pas les premiers semeurs. Il y a toujours un déjà-là qui nous
précède.
12
L'enfant naît et grandit dans un réseau de significations. Il reçoit un langage qui lui donne une vision
du monde et du sens de la vie. C'est à partir de là qu'il construit à nouveaux frais le sens de son
existence. Les mots lui dévoilent le paysage du monde, mais il devra à son tour s'aventurer sur de
nouveaux chemins. Si le petit d’homme se risque ainsi à vivre au monde, c’est qu'il y a déjà en lui
une certaine foi : il faut croire pour vivre.

Cette foi, qui précède la foi religieuse déterminée, se manifeste dès que quelqu'un se met à faire
confiance au-delà des évidences apparentes, au-delà de l'immédiatement rentable, au-delà du
strictement raisonnable.

Croire, c'est en appeler à ce qui n'est pas encore évident ou visible pour valider le présent. Croire,
c'est prendre appui sur ce qui n'est pas encore. C'est l'attendre en espérant contre toute raison.
Croire à ce niveau, c'est ce qui se passe lorsque quelqu'un se risque tout simplement à refuser de
faire de sa vie un monde borné et clos sur lui-même.

Repérer dans la vie de quelqu’un les mouvements de dépassements, les questions sans réponses
décisives, les moments de recherche en profondeur, le pressentiment d'un appel, c'est baliser le
terrain sur lequel peut tomber et germer la Parole-semence afin de le cultiver.
3. Le chemin d’Emmaüs

Le modèle d'accès à la foi au Christ ressuscité que constitue le récit d'Emmaüs nous montre
l'importance du moment où deux hommes vont passer de la « tristesse » au temps de l'écoute
brûlante, avant de connaître l'illumination dans le geste-signe du Seigneur.

Deux hommes viennent de vivre une suite d'événements marquants pour eux. En fonction de leur
passé, de leurs espoirs, de leurs désirs, ils « relient » entre eux ces événements et les relisent »
comme un échec. Ils orientent leur vie d'une autre façon, puisque du côté de Jésus et à Jérusalem
c'est fini. Alors, ils quittent leur groupe et ils en sont tout tristes.
Quelqu’un se présente à eux, lui-même porteur d'une relecture tout autre. Il commence par les
questionner pour leur faire dire le sens qu'ils ont perçu et dont ils n'ont pas encore saisi toutes les
conséquences pour leur vie à venir.
L'inconnu porteur d'une bonne nouvelle les invite à relire à nouveau les mêmes faits, mais il leur
donne un autre langage pour faire naître un sens nouveau. Comment ces deux disciples pourraient-
ils prononcer une parole nouvelle s'ils n'ont pas le langage des Ecritures pour nommer à nouveaux
frais ce qui vient de leur arriver, un langage qui permette d'appréhender la réalité autrement ?
Cette nouvelle lecture des événements n'est pas démonstration ou explication, mais confrontation,
affrontement. L'inconnu ne s'adresse pas à des récipients vides qu'il suffirait de remplir pour
combler une attente. Il s'agit bien pour les deux hommes, qui ont déjà pris position, d'accepter ou

13
non la nouveauté et de s'y engager totalement. C’est au cœur même de l'existence que se joue cet
affrontement : (Notre cœur n'était-il pas tout brûlant ? »
Don de Dieu, cette révélation appelle une décision personnelle. Bien d'autres gens ont entendu cette
relecture et n'y ont pas adhéré. Ces deux-là acquiescent et invitent l'inconnu à rester. Ils en veulent
plus, n'est-ce pas déjà le signe de leur décision intérieure ? Cependant, s'ils en restaient là, ce serait
continuer à vaquer dans le discours, certes attirant, mais jamais clos, et sans véritable engagement
de leur part.
L'orientation que les deux disciples viennent d'entrevoir pour leur vie doit donc être scellée de
l'empreinte du Christ dans le geste qui symbolise toute son existence et son offrande au Père, le
repas pascal la veille de sa mort : Faites ceci en mémoire de moi ». Par le geste de la fraction du
pain, le sacrement de l'Eucharistie, dirions-nous aujourd'hui, les disciples reprennent pied. Ils
peuvent consentir à l'absence du Christ. Celui-ci a été reconnu, le chemin est ouvert, c'est le temps
de l’Esprit.
4. L’éducation chrétienne du désir

Le dynamisme de la foi se développe sur fond de désir. Jésus vient ressaisir, relancer, guérir et sauver
le désir des disciples en le réorientant en lui ouvrant de nouveaux espaces.

L'éducation du désir semble être une des tâches les plus essentielles de l'accompagnement des «
désirant-croire ». Il s'agit de préparer le terrain où pourra être entendue la Parole de Dieu. Nous
pouvons admirer la façon dont les deux disciples sur la route d’Emmaüs sont amenés à s'interroger
en profondeur. La question : « Pourquoi etes-vous donc tristes ? » amene un dialogue qui fait la
verité dans le cœur des disciples.

Il nous faut chercher des médiations différentes selon que l’on s'adresse à des enfants, des jeunes ou
des adultes : des histoires, des contes, un dialogue amical mais sans concession, des questions
pertinentes... une parabole venant à point, comme celle de Nathan à David.

Tout n'est pas apte à éduquer chrétiennement le désir. Quels que soient les moyens, le but est de
déceler cet être de désir chez l’enfant ou l'adulte avec qui nous cheminons. Les indices sont le
besoin de sécurité le besoin de savoir et d'avoir, et surtout le besoin d'être reconnu. Le désir est
tyrannique et jamais assouvi, jamais comblé, reprenant et imposant continuellement sa demande.
L'homme est ouvert sur l'infini et il cherche à combler cette béance avec des satisfactions finies ou
des amours temporelles. Nous sommes en recherche continuelle, mais cette recherche peut aussi
s'égarer ou se satisfaire à bon compte.

Les choix que chacun fait ne sont pas toujours explicités. Nous agissons et les actes posés révèlent
l'orientation de notre vie. La préparation évangélique se doit de mettre à jour ces choix pour
14
annoncer la Bonne Nouvelle et nous confronter à une relecture chrétienne. La première partie du
chemin d'Emmaüs est l'image de ce temps où l'on pose la question : « Au nom de quoi misez-vous
votre existence ? Sur quoi fondez-vous votre vie ? Quelle est votre ligne d'action ? Ce qui vous
fait choisir, accepter des risques, donner, ouvrir à l’autre... ou au contraire fermer votre porte, vous
défier ? ...»

L'éducation chrétienne du désir pourra alors, comme pour les deux disciples, préparer l'eucharistie, là
où le désir va jusqu'à se dessaisir pour reconnaître l'Autre, Celui qui est déjà là et qui frappe à la
porte.

5. Deux moments de la préparation évangélique

La préparation du terrain en vue des sacrements de l'initiation se présente différemment avant et après
la démarche expresse faite auprès de l'Église pour devenir chrétien et l'accueil de celle-ci.

a) Avant l'entrée en catéchuménat

On peut parler de pré-évangélisation, ou de pré catéchèse, dans un temps de pré catéchuménat. C’est
ainsi que nous avons abordé la question : il existe déjà une pastorale liturgique par la parole et les
signes pour tel pèlerin d’Emmaüs ». C'est en ce sens que Cyrille de Jérusalem avant de
commencer ses catéchèses baptismales qui exposent aux catéchumènes les articles du symbole de
foi, leur fait une pré catéchèse où il s'assure que les valeurs naturelles de l'homme et de la création
sont bien perçues et pourront servir d'appui à la catéchèse de l'histoire du salut.
La pré catéchèse intéresse le temps où on se prépare à entendre la catéchèse proprement dite : elle
vise à créer des dispositions et une attitude d'ouverture qui assureront, autant que possible,
l'accueil du message divin. Cette pré catéchèse se vit avec ceux pour qui la foi chrétienne est
encore à l'horizon. Le rituel du baptême des adultes résume en trois paragraphes la pastorale du
pré-catéchuménat :
« II ne peut y avoir d'entrée en catéchuménat sans que l'Esprit Saint n'ait suscité cette foi et cette
conversion initiales à Dieu par lesquelles chacun se sait appelé à un certain changement de vie et
s'ouvre au mystère divin. Cela suppose que soit assurée une première annonce de Jésus Christ. »

« Pour que mûrisse chez celui qu’a touché l’annonce de la Parole, une véritable volonté de servir le
Christ et de demander le baptême, on s'assurera qu'un certain intervalle de temps sépare le
moment où un candidat s'adresse à l'Église de l'entrée en catéchuménat ».

« Pendant ce temps, en vue de purifier et d'éclairer les intentions du futur catéchumène, on


s’emploiera à lui assurer une préparation qui comporte trois aspects :

- Des possibilités de rencontrer des chrétiens,


15
- Une première annonce de la foi par le témoignage et la parole, — une préparation à la vie de prière
en Église. » (ICA2. 01 ; 2. 02 ; 2. 03).
b) Durant le catéchuménat

Devenu catéchumène, celui qui se prépare au baptême continue un temps de questionnement, de


guérison et d'orientation du désir, d'épanouissement d'une foi avant la foi. La tâche qui consiste à
ressaisir l'homme image de Dieu pour en faire surgir un homme nouveau n'est pas achevée.

La pré catéchèse joue encore son rôle aux moments où le catéchisé est interpellé comme sur le
chemin d'Emmaüs, moment où sont mises en cause les valeurs humaines que le message du Christ
doit ouvrir à un sens nouveau.
On peut même dire que la tâche de préparation du terrain à la Parole-semence n'est jamais achevée. Il
nous faut sans cesse, de sacrement en sacrement, de dimanche en dimanche, de jour en jour,
reparcourir le chemin de la création et des premières alliances, jusqu'à l'alliance nouvelle et
définitive.

B. QUELQUES LIEUX PRIVILÉGIÉS

La préparation évangélique peut se faire à partir de n'importe quel événement de la vie humaine, de
n'importe quel objet, idée, sentiment, désir touchant aux profondeurs de notre existence : la vie et
la mort, la souffrance et la joie, la rencontre et la solitude.

Elle a un rapport avec le sens du sacré », en tant que celui-ci est une certaine capacité à s'ouvrir à la
transcendance des choses. Mais le sacré n'est pas dans les choses. Il peut être dangereux de bâtir
une préparation évangélique à partir de lieux du sacré ». On pourrait bloquer le dynamisme du
désir sur des objets particuliers, oubliant que même le sacrement est ouverture et passage.

Compte tenu de la mentalité contemporaine, nous retiendrons quatre lieux, parmi d'autres, qui
semblent pouvoir aujourd'hui relancer le dynamisme du désir, de la foi, de la transcendance
religieuse : la nature, la sagesse, l'amour, la Bible.
1. La nature
Notre société technicisée et programmée, provoque par réaction le besoin de retrouver un monde où
l'on échappe à l'exploitation rationnelle, sans être manipulé. On aspire au retour à la nature pour
vivre quelque chose d'autre. Veau, le soleil, la montagne, les arbres... sont recherchés pour
retrouver un contact vivant, apaisant, tonifiant. Divers désirs s’y ressourcent et s’expriment : désir
de se retrouver, de s'apaiser, de se réconcilier avec soi-même, de se fondre dans du plus grand.

16
Des espaces insondables nous sont dévoilés par l'astronomie et nous donnent le vertige de l'infini.
L'infiniment petit n’est pas moins séduisant... le monde des cristaux découvert grâce au
microscope émerveille par les formes et les jeux de couleurs.

Des randonnées vers les cimes font paraître comme bien minces les soucis et les tracasseries de la
vie habituelle. On perçoit alors un au-delà du banal et du quotidien.

Le sentiment de notre petitesse sera bien ressenti par une nuit d'orage vécue en montagne ! « As-tu
une fois dans ta vie, commandé au matin ? as-tu pénétré jusqu'aux sources de la mer ?» (Job 38,
12.16). Le silence peut aussi se faire dans l'expérience du désert, ce qui nous amène à nous
retrouver face à nous-mêmes.

Pour retrouver l'harmonie, pour vivre bien dans son corps, se recueillir contre l'agitation ambiante, la
marche peut être régulatrice en permettant de retrouver un rythme contre l’agitation qui nous
emporte, de même que la maîtrise de la respiration.
La rencontre avec la nature joue un rôle de révélateur. Elle nous permet de nous reconnaître, de nous
ouvrir, de dévoiler les ressorts secrets qui nous meuvent.

De telles expériences ne peuvent être exemptes d'ambiguïté, mais elles ne sont pas sans lien avec
l'authentique désir de vivre qui habite tout un chacun.

Ce peut être aussi un puits sans fond, un miroir où l'on peut se perdre dans une pure recherche de soi-
même. On peut se laisser charmer sans aller plus loin. Mais ce peut être également l'arc fascinant
qui nous entraîne au-delà de nos propres désirs conscients et qui ouvre d'autres horizons.

2. La sagesse : une vie spirituelle

Après l'ivresse d'une connaissance scientifique et technique, reviennent des questions qui la
précèdent où la prolongent : d'où... pourquoi... jusqu’où ? Approfondir la sagesse rejoint ce qu'on
appelle communément développer la vie spirituelle.
C'est la vie humaine elle-même qui implique une vie spirituelle. Celle-ci est à l'origine de toutes les
tentatives que l'homme fait pour se comprendre et prendre en main son existence dans le monde.
La vie de l'homme ne peut s'identifier au monde. Il y a une distance, une brèche apparaît. Cette
dimension humaine, fondamentale, nous la retrouvons là où l'homme parle de lui-même, où il
prend du recul par rapport à son existence immédiate, où il débat de sa liberté.

La vie n'est pas une simple adaptation continuelle et automatique au monde, à la réalité donnée. Il y a
toujours comme un décalage, même lorsque l’homme n'en est pas conscient.

17
Mais cette dimension de la vie spirituelle n'est pas nécessairement reconnue comme telle et, surtout,
elle n'est pas toujours prise en charge. Elle peut être réduite ou aliénée ou refoulée.
Notons trois dimensions qui donnent les conditions d'exercice d’une vie spirituelle saine et digne de
l'homme.

a) La transcendance
C’est pour l'homme la possibilité de considérer un au-delà de ce qui lui est immédiatement donné.
L'homme sent qu'il n'est pas identifiable à run des éléments du monde. Il y a en lui plus qu'il ne
peut en dire. Ainsi le visage d’un interlocuteur et spécialement son regard ne sont pas analysables
mais révèlent la profondeur insondable de la personne humaine sur laquelle on n'a pas prise.

b) L'autonomie du sujet
C’est la possibilité de se donner à la fois la ligne directrice de sa propre conduite et celle de sa propre
pensée. Elle est le pouvoir pour chacun de réaliser sa propre synthèse à partir de ses expériences,
pour chercher et trouver la ligne d'orientation qu'il se donne, pour s'investir dans un projet de vie.

c) L'ouverture
Rester à l'écoute et au contact des réalités garantit contre la tentation de vouloir s'abstraire dans les
idées ou se réfugier dans l'imaginaire. Le retour continu du sujet au monde et la possibilité de
dialoguer empêchent de se clôturer sur soi-même, de s'enfermer dans sa tour d'ivoire. Rien n'est
jamais acquis une fois pour toutes. En développant sa vie spirituelle, l'homme condense ses
acquis, ses espoirs, en fonction des contraintes, des appels, des découvertes, et cela dans une
dynamique du provisoire. Il acquiert une sagesse qui le mûrit. Cela suppose qu'on se donne des
lieux et des temps de recueillement et de ressourcement. Tout un travail est à faire, car il y a des
aliénations, des résistances, des refus qui empêchent d'avancer dans cette voie, Ce travail est
indispensable à l'accueil de l'Évangile.

3. L’amour

Aimer et être aimé, c'est entrer dans une nouvelle existence. La vie en couple, l’arrivée d’un enfant
poussent à choisir, à inventer, à nous donner de la peine pour l'autre. Il s'agit de faire de la place et
de s'ouvrir. C’est une respiration : une amitié, un service vécu avec passion nous oxygènent et
nous tonifient. Nous avons la certitude d'exister vraiment, à la fois de donner et de perdre, et
pourtant de recevoir et de créer.

La communion repose sur cette dépendance aimée, acceptée par une liberté qui dans cette soumission
même, se construit et se réalise progressivement.

18
Mais ce souffle de l'amour n'est jamais acquis une fois pour toutes. On peut aussi finir par étouffer,
l'amour a besoin d’air.

a) Présence/absence
Les couples qui se forment ou ceux qui sont déjà liés sont amenés bien souvent à faire l'expérience de
l'absence de l'autre, avec des départs et des retours. Chacun aspirerait à la présence continuelle. La
présence corporelle semble indispensable et l'absence est ressentie comme un vide. La fusion
serait si préférable !

Mais ce n'est jamais le tout ou rien. Il y a des substituts de la présence corporelle à savoir les photos,
les souvenirs, les cadeaux, la valise préparée... C’est le domaine de choses qui en disent long
parce qu'elles sont devenues signes d'une alliance des personnes. On prend conscience que l’on ne
communique pas d'esprit à esprit, mais par la médiation des choses, par les symboles (ce qui
réunit dans l'absence.)

b) Corps/esprit

Cette réflexion peut amener à regarder ce qui apparemment nous rend immédiatement présent, à
savoir notre corps. Mais est-ce bien de lui-même que le corps rend présent ? Le corps,
simplement parce qu'il est là, ne parle pas de lui-même. Il ne communique pas. Il doit être repris
par l'intention de toute la personne. On dit ainsi de certaines personnes qu'elles ont de la présence
».

Ainsi présence et absence ne sont pas une alternance de tout ou rien, mais une présence diversifiée,
un dépassement de la présence physique pour une communion plus grande. Comme dans ces vieux
couples où l’homme et la femme sont l'un à l'autre sans démonstration, où les corps se sont faits
plus transparents, plus accordés et plus parlants.

L'amour vécu aussi pleinement que possible prépare à entrer dans le mystère de la présence/absence
du Christ ressuscité, du mystère pascal et eucharistique.

4. La Bible
II peut sembler paradoxal de mentionner la Bible dans une préparation évangélique puisqu'elle est un
lieu privilégié de la foi chrétienne, mais nous la prenons aussi comme matrice imaginaire de notre
monde occidental. Il y a un intérêt pour la Bible qui peut préparer le terrain pour la recevoir un
jour comme « Parole efficace de Dieu ».
En lisant la Bible, on retrouve sous forme de « récits » toutes les grandes questions des hommes. Le
lecteur entre alors dans les grandes catégories qui structurent le dialogue de l'homme et de Dieu et

19
qui définissent la foi : initiative divine, vocation personnelle et alliance avec le peuple, péché et
jugement, prière et espérance, crainte de Dieu et action de grâce...
Nous ne sommes plus sur un plan de pure raison raisonnante. Nous sommes entraînés au-delà de la
pure sagesse humaine pour entrer dans le dessein de Dieu. C’est par-là surtout que le langage
biblique est divin. C’est un fait pour le croyant : ce dessein, Dieu l'a exprimé dans un langage qui
est celui de la Bible.
Les gestes et les sentiments divins sont pensés et exprimés par analogie avec les pensées, les
sentiments, et les gestes humains :
Dieu nous regarde, se met en colère, s'éveille, appelle...

D'où un langage très humain, très proche du concret.


Le langage symbolique est partout : Dieu est père, il est notre rocher, un bouclier... Jésus est la vigne,
le bon pasteur, il est monté au ciel, assis à la droite de Dieu, descendu aux enfers... Il est la
lumière, l'eau vive, la nourriture, la voie, la vie...
Ce langage est proche des faits et des sentiments personnels, simple et compréhensible par tous. Le
langage biblique s'exprime en fonction de sentiments humains permanents. Il a facilement une
résonance affective puissante, surtout quand il emploie les symboles des profondeurs de l'homme.

La lecture de grands ensembles de l'Ancien Testament est déjà une ouverture et une préparation à la
Parole du Christ.

Ainsi l'éducation au pardon peut commencer avec Cain et Abel, se poursuivre avec la réconciliation
de Jacob et d'Ésaü, de Joseph et ses frères, avant d'écouter l'Évangile, où tous les hommes
deviennent nos frères.
Chaque terrain est particulier. Aider à ce qu'il accueille la Parole semence, c'est d’abord l'aimer,
l'observer, sentir ses « hauts » et ses «creux», ses duretés et ses tendresses, le roc imperméable et
la faille...

Pour l'un ce sera l’art et la beauté, pour l'autre la prière solitaire, pour l'autre la solidarité... partout où
est l'homme vivant la semence peut lever.

« Par la créature, le Verbe manifeste Dieu créateur ; par le monde, celui qui a fait le monde ; par
l'homme modelé, l’artiste qui l'a modelé...
« Dès l'origine, le Fils, qui n'abandonne pas sa créature, révèle à tous le Père, à ceux que le Père veut,
quand il veut, comme il veut » st Irénée, Contre les hérésies 6,6.7

BIBLIOGRAPHIE
1. Voir le ch. précédent et le ch. suivant. Plus spécifique :
20
2. AUGUSTIN d’Hippone, La Catéchèse des débutants (De Catechizandis rudibus), (coll.
(Bibliothèque augustinienne » 11), éd. Desclée de Brouwer, 1949, p. 18-147.
3. Un évêque, l'un des plus grands Pères de l'Église, explique à un catéchiste comment s'y prendre
avec ceux qui commencent à s'intéresser à la foi. Si l'on peut se procurer ce livre, la lecture en sera
passionnante, et fructueuse...
4. E. SCHILLEBEECIO, Expérience humaine et foi en Jésus Christ, éd. Du Cerf, 1981, 146
5. À partir de la genèse de la confession de foi des premiers chrétiens, la recherche des voies pour
une annonce de Jésus Christ aujourd'hui. Un livre simple d'un grand théologien.
6. Marie-Louise GONDAL, Commencer ou recommencer à croire, Lyon, Catéchuménat.

En toute vie le silence dit Dieu,


Tout ce qui est tressaille d'être à lui !
Soyez la voix du silence en travail,
Couvez la vie, c'est elle qui loue Dieu !

Pas un seul mot, et pourtant c'est son Nom


Que tout sécrète et presse de chanter ;
N'avez-vous pas un monde immense en vous ?
Soyez son cri, et vous aurez tout dit.

Il suffit d'être, et vous vous entendrez


Rendre la grâce d'être et de bénir ;
Vous serez pris dans l'hymne d'univers,
Vous avez tout en vous pour adorer.

Car vous avez l'hiver et le printemps,


Vous êtes l'arbre en sommeil et en fleurs ;
Jouez pour Dieu des branches et du vent,
Jouez pour Dieu des racines cachées.

Arbres humains, jouez de vos oiseaux,

Jouez pour Lui des étoiles du ciel


Qui sans parole expriment la clarté ;

21
Jouez aussi des anges qui voient Dieu.
Patrice de LA TOUR DU PIN

LE CATECHUMENAT
Par Philippe GUENELEY

Un nouveau rituel
Le Concile de Vatican II, en prenant la décision de restaurer le catéchuménat des adultes, (distribué
en plusieurs étapes » (SC 64, 66), répondait à la demande de plusieurs évêques et prenait à son
compte ce qu'autorisait déjà le décret romain du 16 avril 1962 (cf. LMD 71, p. 7-13).

Il revint au Conseil de Liturgie (Consilium), créé par Paul VI, de réaliser un rituel qui définisse les
étapes de l'initiation chrétienne. Le travail fut soumis à l'appréciation des Églises locales, Le 6
1972, en la fête de l'Épiphanie, le pape approuve l'actuel Ri l'Initiation Chrétienne des adultes.
Une adaptation provisoire avait été réalisée pour les pays francophones, sous le titre du Rituel du
baptême des adultes par étapes (12 février 1974). L'édition définitive, élaborée par la Commission
internationale francophone pour les traductions et la liturgie a été approuvée par les Conférences
épiscopales du nord de l'Afrique, de Belgique, du Canada, de France, de Suisse, et l'archevêque
de Luxembourg, et confirmée par la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des
sacrements, le 22 février 1996. Cette édition a pour titre « Rituel de l'Initiation chrétienne des
adultes » (RICA).
Contenu du rituel

Ce rituel de l'initiation chrétienne des adultes commence par un Avertissement qui relate des normes
contenues dans les Préliminaires généraux, les Préliminaires de Initiation chrétienne des adultes
et ceux du rite d'admission à la pleine communion du Rituel romain (p. 6 à 8).
- Notes doctrinales et pastorales
I. L’initiation chrétienne. Les notes concernent les trois rituels du baptême.
Ici, le texte est repris du Rituel du baptême des petits enfants (Mame-Tardy 1984), n. 1-35.

II. L’initiation chrétienne des adultes n° 36-64.

- Première partie : Les étapes du catéchuménat et les sacrements de l'initiation chrétienne.


Le temps de la première évangélisation n 65-69.
22
1 ère étape : célébration de l'entrée en catéchuménat, n. 70-102. Le temps du catéchuménat et ses rites
n. 103-125.
2ème étape : célébration de rappel décisif et inscription du nom, n. 126-146. Le temps de la
purification et de l'illumination, et ses rites, n. 147-201.

3ème étape : célébration des sacrements de l'initiation, n. 202-235. Le temps de la mystagogie, n. 236-
243.

- Deuxième partie : Rituels pour les circonstances particulières.

1. Rituel abrégé de l'initiation d'un adulte à l'approche de la mort, n. 244-260.


2. Rituel simplifié pour des circonstances exceptionnelles, n. 261299.
3. Confirmation et eucharistie des adultes baptisés enfants, n. 300308.
4. Rituel d'admission de baptisés à la pleine communion de l'Église catholique, n. 309-339.
Troisième partie : Textes au choix et chants pour les différentes étapes, n. 340-352. Le rituel de
l'initiation chrétienne des adultes distingue trois étapes et quatre temps ou périodes qui ponctuent
le chemin de foi des catéchumènes (cf. RICA 41, 42).

Chacune de ces étapes et chacun de ces temps, dans le rituel, sont précédés de notes pastorales qui
éclairent le sens de ce qui est vécu et célébré. (Le livre comporte donc non seulement la
célébration du baptême, de la confirmation et de l'eucharistie, mais aussi tous les rites du
catéchuménat » (RICA 37), qui ont fait leur preuve dans l'Église ancienne. Des adaptations sont
possibles (cf. RICA 64).

A. VENTRÉE EN CATÉCHUMÉNAT

Avant de célébrer la première étape liturgique, un certain temps sépare la première demande fait à
l'Église et cette étape. Il faut que les candidats aient vécu une période de première évangélisation
(p. 206), au cours de laquelle ils ont mieux découvert le Christ et le Dieu vivant et vrai. Sous
l'action de l'Esprit Saint ils ont ouvert leur cœur à la foi et se sont convertis au Seigneur. Ils ont,
avec des chrétiens, commencé à vivre dans l'Église, heureuse de les accueillir et de leur annoncer
le Christ et son message. (RICA 65, 66, 71).

Le sens de cette entrée

« L'entrée en catéchuménat est de la plus grande importance : dans cette première rencontre
publique, les candidats s'ouvrent à l'Église de leur intention, et l'Église, accomplissant sa mission
apostolique, reçoit ceux qui veulent en devenir membres » (RICA 70).

23
Elle est la première étape liturgique de l'initiation chrétienne. Elle traduit dans un acte liturgique le
premier accueil de l’Église.

Elle ne doit pas être célébrée trop tôt (cf. RICA 71). Elle vient après le temps de la première
évangélisation (cf. RICA 65). « Elle ne doit pas être prématurée » (RICA 53).

La première évangélisation porte sur ce qui est fondamental de la foi chrétienne : la reconnaissance
de Dieu unique et créateur. La découverte de Jésus comme envoyé de Dieu et sauveur de tous. Un
premier accueil de son message, considéré comme source de vie. Un premier contact avec la
Bible. Une première approche de l’Église comme lieu de rencontre avec Dieu et le Christ et
comme un terrain de vie fraternelle.31

L'entrée en catéchuménat signifie « l'amour prévenant de Dieu » la grâce de Dieu (cf. RICA 70) Du
côté du candidat, elle signifie « une conversion initiale..., une volonté de changer de vie et d'entrer
en relation avec Dieu dans le Christ..., un certain sens de l’Église » (RICA 71). Du côté de l’Église
qui agit au nom de sa mission apostolique, « elle donne le signe de leur accueil et d'une première
consécration » (RICA 70).
Il s’agit bien ici de l'entrée dans l'Église. Par cette étape, qui fait partie du sacrement du baptême, le
converti est fait « chrétien », en attendant que les sacrements de l'initiation fassent de lui un
« fidèle » selon le vocabulaire de la tradition. Par cette étape, les candidats au baptême « sont déjà
unis à It Église, ils sont déjà de la maison du Christ »

(AG 14 LG 14). Par cette étape les candidats deviennent « catéchumènes » ; leurs noms sont inscrits
sur un registre (CIC 206,1) ; ils peuvent participer à certains rites prévus pour eux, recevoir
certaines bénédictions et être enterrés chrétiennement (CIC 1170, 1183, 1: RICA 77).

Pour donner tout son sens à cette entrée en catéchuménat, il est important de ne pas la faire de façon
privée. (Il est souhaitable que la communauté chrétienne ou, du moins, une partie, notamment des
amis, des membres de la famille, des catéchistes et des prêtres, prenne une part active à la
célébration » (RICA 73).
Rite d'entrée dans ItÉg1ise et la liturgie de la Parole de Dieu (cf. RICA 75).
1. Le rite d'entrée dans l'Église (RICA 78 à 95).

Il commence par un dialogue, où les candidats se présentent et sont accueillis par le célébrant et les
membres de la communauté. Le dialogue qui s'instaure ainsi doit signifier et actualiser l'amour

3122
À noter que « le début de l'initiation ne coïncide pas exactement avec le début de la foi ou de la conversion » (Henri
Bourgeois, L'initiation chrétienne et ses sacrements, p. 113). En effet la conversion et la foi peuvent naître avant que les
candidats au baptême aient effectué une démarche auprès de l'Église.
24
prévenant de Dieu : ainsi, chaque candidat est appelé par son nom. Par le prêtre, c'est Dieu qui
appelle. On veillera à ce que ce dialogue soit cordial.

ETAPE ET APPELLATIONS
Avant l'entrée en catéchuménat
- On a d'abord à faire à des sympathisants ou « observateurs » qui viennent voir,
s’informer, prier, discerner.

- Lorsqu’ils se décident à demander leur admission, ils deviennent « demandeurs », «


candidats » au baptême.
Après l'entrée en catéchuménat
Une fois « accueillis », les candidats au baptême deviennent proprement catéchumènes.
Une fois marqués du signe de la croix, ils sont déjà chrétiens et membres de l'Église à
leur manière (bien que pas encore « fidèles »),
On distingue traditionnellement deux degrés de catéchumènes :

- Les « auditeurs » (audientes) qui participent déjà à la vie de l'Église, spécialement par la
première partie de l'assemblée dominicale et par les instructions et prières organisées
pour eux.
- Les « appelés » (electi) qui sont entre l'appel décisif (normalement au début du Carême)
et le baptême (si possible dans la nuit pascale). Ce sont aussi des « aspirants »
(compétentes) aux sacrements de la nouvelle naissance. St Augustin voit dans ce nom «
ceux qui unissent leurs efforts pour aspirer et tendre vers un seul et même but » (Serm
216,1).
Après le baptême
- Le baptisé devient un « fidèle » (fidelis, celui qui croit) en ce sens que non seulement il
se « fie » à Dieu, mais que par l'Alliance nouvelle en Jésus Christ, Dieu désormais se «
fie » en lui (St Augustin). Les fidèles constituent le peuple de Dieu et participent à la
triple fonction prophétique, sacerdotale et royale du Christ.

- Les nouveaux baptisés sont de « jeunes pousses » (néophyti) qui ont besoin d'attentions
spéciales et de l'aide fraternelle de l'Église pendant un certain temps. On les nomme
alors « néophytes ».

Célébrant et les membres de la communauté. Le dialogue qui s’instaure ainsi doit signifier et
actualiser l’amour prévenant de Dieu : ainsi, chaque candidat est appelé par son nom. Par le prêtre,
c’est Dieu qui appelle. On veillera à ce que ce dialogue soit cordial.

25
Puis le célébrant fait une brève catéchèse, par laquelle il souligne le sens de la démarche,
qu’accomplisse les candidats. La réponse des candidats est suivie du témoignage de quelques
chrétiens sur leur vie de baptisés. Ils expriment leur disponibilité à aider les catéchumènes “à
découvrir le Christ et à le suivre” (RICA 86). Une prière d’action de grâce conclut l’engagement
de la communauté ; cette prière doit souligner l’initiative de Dieu dans la mise en route des
candidats.
Le rite suivant est celui de la signation. Il est important pour traduire que le catéchumène est devenu
chrétien. “recevez sur votre front la croix du Christ, dit le célébrant, c’est le Christ lui-même qui
vous protège par le signe de son amour. Appliquez-vous, désormais, à le connaître et à le suivre”
(RICA 88).
Le signe de la croix est alors tracé sur le front et sur d’autres parties du corps. La signification de tous
les sens est très expressive. La foi n’est pas une idée, elle doit prendre toute la vie de la personne.
“le Christ doit pouvoir rayonner à travers toutes nos pensées, nos paroles et nos actions”32. Après
ce rite, ils seront bon et remettre aux candidats une croix (et non pas une médaille à, soit une croix
de cou, soit une croix murale, qui sera placée dans la maison (cf. RICA 91). Après une prière, les
catéchumènes sont invités à se déplacer, accompagnés du célébrant et des membres de la
communauté et à entrer plus avant dans l’église pour participer à la liturgie de la parole. cette
procession est à mettre en valeur, afin de mieux signifier que les catéchumènes ont à prendre place
dans la communauté (RICA 95). Il convient donc de situer en deux lieux différents l’accueil des
candidats et la célébration de la parole.
2. La liturgie de la Parole de Dieu
Les candidats, devenus catéchumènes, ayant été accueillis par la communauté, sont invités à
découvrir “la dignité de la parole de Dieu annoncée et écoutée en Eglise” (Rica 96).
La Bible peut être apportées solennellement, “élevée bien haut entre des luminaires, accueillie par un
chant de joie33”, puis encensée. On choisira une ou deux lectures, parmi celles que contient le
Lectionnaire rituel. D’autres passages de la Bible peuvent être lus en lien avec la circonstance.
Après l’homélie, il est souhaitable de remettre aux catéchumènes le livre des Evangiles, ou la Bible,
ou le Nouveau Testament. Le célébrant invitera les catéchumènes à mieux connaître le Christ pour
mieux l’aimer et le suivre.
La prière pour les catéchumènes et l’oraison qui terminent la célébration sont faites particulièrement
pour les catéchumènes. A cause de cela, il vaut mieux que les intentions soient exprimées par les
parrains ou les accompagnateurs.

3223
Michel DUJARIER, L’initiation chrétienne des adultes, p. 43.
3324
Michel DUJARIER, o.c-, p. 45.
26
Le rituel prévoit que l’eucharistie soit célébrée (cf. RICA 75). Les catéchumènes pourront être
congédiés. Si, pour des raisons importantes, ils sont présents, “il faudra bien faire comprendre
qu’il n’y ont pas part à la manière des baptisés34” (cf. RICA 101).
Devenus catéchumènes par l’entrée en catéchuménat, les futurs baptisés sont constitués “chrétiens”.
Leur adhésion au Christ, qui s’accompagne du refus de suivre d’autres voies, est un choix, qui
signifie aussi l’appel de Dieu. Ils sont prêts à avancer plus loin. L’Eglise qui les accueilli dans sa
maison leur montre le vrai chemin, le Christ crucifié et ressuscité. En les marquant du signe de la
croix, elle les entoure comme une mère, afin qu’ils deviennent des fils par le baptême de la
nouvelle naissance.
B. L’APPEL DECISIF
La première étape, l’entrée en catéchuménat, est suivie du temps du catéchuménat, dont la durée est
variable et tient compte de l’évolution spirituelle des catéchumènes. Ce temps est une période, où
s’approfondissent et mûrissent la foi chrétienne et la vie évangélique. La conversion s’approfondit.
La vie en Eglise se développer. La prière est pratiquée. Cette période de formation est marquée par
des célébrations liturgiques adaptées : célébrations de la Parole, prières pour les catéchumènes
(RICA 103, 3, 106 à 109). C’est souvent pendant ce temps qu’ont lieu les traditions : la tradition
du symbole de la foi et la tradition du Notre Père (RICA 56, 120). A noter que ces traditions
peuvent se faire soit pendant ce temps de catéchuménat, soit durant le temps qui précède le
baptême (RICA 56, 175). Ainsi ce temps de catéchuménat n’apparaît pas comme “ un simple
exposé des dogmes et des préceptes, mais une formation (institution) à la vie chrétienne intégrale
et un apprentissage (tirociniumà, mené de la façon qui convient ; formation et apprentissage par
lesquels les disciples sont unis au Christ lui-même” (AG 14).
Le sens de l’appel décisif (RICA 416, 128)
C’est au terme du temps du catéchuménat qu’est célébrée la seconde étape du rituelde l’initiation
chrétienne, appelée l’appel décisif. Considéré “ comme l’articulation de tout le catéchuménat”
(RICA 128), l’appel décisif est cette étape où l’Eglise admet “des catéchumènes jugés aptes, en
raison de leurs dispositions, à participer à l’initiation sacramentelle au cours de prochaines fêtes
pascales” (RICA 127).
Cette étape requiert de la part des catéchumènes :
“-une conversion de la mentalité et des mœurs, et une pratique de la charité : - une connaissance
suffisante du mystère chrétien et une foi éclairée :
-une participation croissante à la vie de la communauté :
- une volonté explicite de recevoir les sacrements de l’Eglise” (RICA 128). Célébrée au terme d’une
préparation plus ou moins longue, cette étape signifie :
3425
Michel DUJARIER, o.c-, p. 35.
27
a) de la part de l’Eglise, “le moment où se cristallise toute la sollicitude qu’elle porte aux
catéchumènes (RICA 130). Elle porte le nom “ d’appel décisif” ou encore “d’élection”, parce que
l’appel, réalisé par l’Eglise, exprimer “une élection ou un choix opéré par Dieu, au nom duquel
agit l’Eglise” (RICA 127). Ceux que Dieu choisit d’appeler aux sacrements, l’Eglise, elle-même,
les désigne. C’est Pourquoi, la part prise par l’Eglise dans cet appel est importante. “il faut
qu’avant le rite liturgique une délibération sur l’aptitude des candidats ait été tenue par ceux qui
sont à même d’en traiter” (RICA 132; aussi RICA 130).
b) l’Evêque admet les candidats à l’appel décisif. “ il faut souhaiter que lui-même, autant que
possible, préside à l’appel décisif” (RICA 47). C’est à lui ou à son délégué qu’il revient de faire
apparaître “le caractère théologal et ecclésiale de l’appel décisif”, et, “en agissent au nom du
Christ et de l’Eglise, de prononcer l’admission des “élus” (RICA 133). Il signifie que le choix
vient de Dieu, actualisant ainsi la parole de l’apôtre Paul dans la letter aux Thessaloniciens (1 Th.
1, 4) et celle du Christ: “ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis” (Jn. 15,
16).
c) les parrains et ceux qui ont assure l’accompagnement et la catéchèse témoignent en faveur des
catéchumènes. En particulier, les parrains “exercent alors publiquement, pour la première fois,
leur fonction” (RICA 131)
d) de la part des catéchumènes, cette étape manifeste “une volonté explicite de recevoir les
sacrements” (RICA 128, 127). Ils ont à répondre à l’appel de l’Eglise, qui leur demande de
franchir une nouvelle étape. Leur démarche personnelle s’exprime en outre, au cours de la
célébration, par l’inscription des noms : “les candidats, en signe de fidélité à l’appel, inscrivent
leur nom au registre des futurs baptisés” (RICA 127). Ce rite remonte aux 4 e – 5e siècle et fut
institué par les évêques pour inviter ardemment les catéchumènes à recevoir, sans attendre, le
baptême à la Pâque prochaine après un temps de préparation intensive. L’appel décisif, dans
lequel l’Eglise, qui appelle, signifie l’appel de Dieu, est une étape, marquée par la dimension
ecclésiale. C’est à l’Eglise – évêques, parrains, accompagnateurs et catéchistes des catéchumènes,
qu’il revient de discerner, si les catéchumènes ont une foi assez éclairée, une conversion
suffisante, une vie de prière réelle, pour accéder aux sacrements. Bien plus, l’Eglise les soutiendra
durant le temps de l’ultime préparation, avant et après le baptême (RICA 44, 4, 46, 130). “le rite
de l’appel décisif aura lieu habituellement le premier dimanche de Carême” (RICA 134, 42, 54).
Ainsi, tous, catéchumènes et baptisés, se préparent à mieux participer au mystère pascal, en luttant
contre le péché et en s’attachant à Jésus Christ, sauveur (cf. RICA 39, 126).
La structure de L’appel Décisif

28
Si l’appel décisif est célébré au cours d’une messe, par exemple, le premier dimanche de Carême, il
prend place après l’homélie. S’il a lieu en dehors d’une messe,il vient après un rite d’entrée et une
liturgie de la Parole, suivie d’une homélie. La célébration de l’appel décisif Proprement dit
comprend plusieurs moments :
1-La présentation des candidats. La plupart du temps, elle est faite par le responsable du
catéchuménat ou par des membres de la communauté chrétienne, qui ont assuré la catéchèse et
l’accompagnement. Cette présentation n’est pas un geste conventionnel : elle exprimer le soutien
quotidien apporté aux catéchumènes par des chrétiens durant le temps du catéchuménat. Elle est
aussi “un invitation à accueillir plus profondément ces personnes désireuses d’accéder aux
sacrements”35. En les accueillant, la communauté des baptisés est invitée à raviver l’appel reçu à
vivre avec Dieu, selon les paroles de l’Apôtres aux Ephésiens : “accordez votre vie à l’appel que
vous avez reçu” (4, 1).
2-La démarche des catéchumènes. Ils s’approchent de l’évêque (ou de son délégué) avec leur
parrain ou leur marraine. Interrogés par l’évêque, les catéchumènes répondent en exprimant leur
volonté de participer pleinement aux fêtes pascal par le baptême, la confirmation et l’eucharistie
(RICA 141). Au cours de cette célébration, des catéchumènes peuvent, s’ils ne l’ont pas fait
auparavant, exprimer comment ils ont découvert Dieu et parler de l’histoire de leur conversion.
Puis l’évêque, en s’adressant directement aux parrains, reconnaît l’aide déjà apportées et demande
qu’elle soit poursuivie.
3-L’inscription des noms et l’admission. Appelés par leur nom, les catéchumènes se présentent un à
un devant l’évêque, qui leur dit quelques paroles. Puis, ils vont écrire leur nom sur le registre,
pendant qu’on chante le psaume 15 ou un chant approprié.
4-La prière litanique. Introduite par l’évêque ou un autre célébrant, cette prière est faite
particulièrement pour les catéchumènes. L’évêque a les mains étendues vers eux au moment de
la prière finale.
Enfin, le célébrant renvoie l’assemblée, si on ne célèbre pas l’eucharistie (cf. RICA 145, // 332//).
Cette étape de l’appel décisif a besoin d’être valorisée, pour qu’apparaisse dans toute sa clarté
l’appel de Dieu. La présence de l’évêque signifie que c’est Dieu qui appelle, que cet appel est
premier, qu’il passe par l’Eglise. La réponse des candidats au baptême, qui est signifiée par
l’inscription : du nom vient en second, après l’appel. En effet, c’est Dieu lui-même qui “a appelé
des ténèbres, à son admirable lumière” (1 P 2, 9 et Préface des dimanches I).
C. LES SCRUTINS
Après l’étape de l’appel décisif commence, pour ceux qui ont été appelés par l’évêque, un temps de
préparation plus intense des sacrements de l’initiation. Au cours de cette période qui s’étend de
3526
Michel DUJARIER, o.c., p. 76
29
l’appel décisif à la célébration des sacrements de l’initiation, lors de la veillée pascale, les
catéchumènes sont invités à s’appuyer davantage encore sur DIEU et sur sa parole libératrice.
Cette période, qui correspond au temps du Carême, est orientée vers la célébration du mystère
pascal, centre de la vie liturgique de l’Eglise. C’est Pourquoi tout la communauté des fidèles se
prépare, elle aussi, à célébrer avec les catéchumènes le mémorial de la mort et de la résurrection
du Seigneur : “les catéchumènes, unis à la communauté locale, se préparent aux fêtes pascales et à
l’initiation sacramentelle.” (RICA 147)
Le sens des scrutins
Les scrutins sont faits “pour purifier les cœurs et les intelligences, fortifier contre les tentations,
convertir les intentions. Stimuler les volontés, afin que les catéchumènes s’attachent plus
profondément au Christ et poursuivent leur effort pour aimer Dieu”. (RICA 148). Le regard
attentive, plein de bonté (latin, scrutari: visiter, rechercher; cf. Ps 17 et 139), que Dieu porte sur
chacun, traduit son initiative: Dieu vient chercher l’homme, dans sa liberté et son cœur; là où il en
est; mais sur le chemin de la foi existent des obstacles, des résistances Intérieures et extérieures
qui sont à surmonter.
Les scrutins “éclairent les futurs baptisés sur le sens de la lute dans laquelle ils se trouvent engages et
des ruptures auxquelles ils doivent contenir” (RICA 148). Les rites supposent de la part des
catéchumènes le désir de la purification et de la rédemption offerte par le Christ. Ils ont à prendre
de plus en plus conscience qu’il n’existe pas de salut en dehors du Christ (cf. Ac 4, 12) et qu’ils
ont à “parvenir à une meilleure et sincère connaissance de ce qu’ils sont devant Dieu. Dans un
discernement sérieux de leurs dispositions et une vraie conversion” (RICA 149).
De plus en plus, comme cela se faisait dans les premiers siècles, la célébration des scrutins rassemble
les catéchumènes. Cela signifie que tous sont appelés à la conversion, “si bien que les baptisés
sont un signe pour ceux qui ne sont pas baptisés : ils sont encore affrontés au mal et n’en ont pas
fini avec le péché.
Inversement, les catéchumènes redisent par leur présence que les baptisés sont appelés chaque jour à
réactualiser en leur vie l’évangile libérateur et le baptême de liberté qu’ils ont reçu.” 36 La
célébration des scrutins s’inscrit alors dans une liturgie pénitentielle des baptisés, “pour que les
fidèles eux aussi profitent de la liturgie des scrutins et intercèdent pour ceux qui ont été appelés”
(RICA 152). Le rituel prévoit aussi que les scrutins se fassent au cours des “messes de scrutins”,
fixées aux trois derniers dimanches de Carême (cf. RICA 55, 153). Ainsi est mieux marquée la
place de la communauté comme lieu d’accueil de la rédemption réalisée par le Christ; ainsi, est
exprimé le lien qui existe entre l’eucharistie et le baptême “pour la rémission des péchés”. Trois
formulaires de scrutins sont proposés. Il est souhaitable d’en célébrer plusieurs, pour approfondir
3627
Henri BOURGEOIS, L’initiation chrétienne et ses sacrements, p. 143
30
le “désir de salut et la découverte de tout ce qui s’y oppose” (RICA 151). Trois textes
évangéliques, liés à la conversion, sont présentés ; ils correspondent à trois évangiles de l’année
liturgique A, au temps du Carême, et ils expriment trois dimensions de la vie nouvelle donnée par
le Christ. L’évangile de la Samaritaine ‘Jn 4, 5-42) fait découvrir que pour “adopter le Père en
esprit et en vérité”, les catéchumènes doivent s’approcher de Jésus, source d’eau vive. L’évangile
de l’aveugle-né (Jn 9, 1-41) invite les catéchumènes à entrer dans le royaume de la lumière qu’est
Jésus, en rejetant l’erreur et l’illusion. L’évangile de la résurrection de Lazare ‘Jn 11, 1-45) montre
que la vie nouvelle avec le Christ leur donne d’avoir part à la résurrection.
La structure des scrutins
Les trois scrutins ont la même structure.

1.La liturgie de la Parole


Chaque scrutin commence par la proclamation de la parole de Dieu, suivie de l’homélie. Ici, la parole
de Dieu a une double signification, un double effet : d’une part, la parole de Dieu apparaît avec sa
force libératrice, avant que soient faites les prières de délivrance : par le baptême, Dieu libère
aujourd’hui du péché et éclaire la vie humaine, comme il l’a fait autrefois par Jésus. D’autre part,
la parole de Dieu prépare à la prière pénitentielle de l’assemblée.
2.La prière silencieuse et la litanique
Après la proclamation de la parole de Dieu, prend place une prière litanique pour les catéchumènes,
où parrains et marraines peuvent poser “la main droite sur l’épaule de leur filleul” (RICA 156), en
signe de communion et de soutien.
3.Lexorcisme
Puis, se situe l’exorcisme, où la prière est d’abord adressée à Dieu, ensuite à Jésus, directement. Le
rite de l’exorcisme exprime que Christ sauveur, qui associe tout homme, par le don de l’Esprit
Saint, au mystère pascal (cf. RICA 150. Cf. GS 22, 5). Les exorcismes ne sont pas des rites sans
signification profonde; au contraire, ils “expriment, à côté de l’enseignement et se l’option, la
troisième, ou plus exactement la première dimension du catéchumènes: la conversion comme don
– don que seul le Seigneur peut nous octroyer et faire prévaloir en nous, à l’encontre de notre
puissance d’égoïsme et des puissances qui nous asservissent.”37.
Plusieurs gestes demeurent possible pour signifier symboliquement cette œuvre de conversion opérée
par Dieu : l’imposition de la main (rite déjà présent dans la Tradition d’Hippolyte); l’onction
d’huile, avec l’huile des catéchumènes que l’évêque a bénie à la messe chrismale. Cette onction
n’a pas la signification de l’onction faite avec le saint-chrême. RICA 121 et note 11.

3728
Cardinal Joseph RATZINGER, Principe de la théologie catholiques, 1982, Téqui, p. 38
31
Cette huile est symbole de vigueur et donne la force aux catéchumènes pour qu’ils s’engagent dans
les luttes de la vie chrétienne (cf. RICA 201)38. On peut aussi faire le rite de l’effatah, si l’on n’a
pas prévu de le faire à un autre moment (cf. RICA 120, 194-196).
4.Réconciliation – Eucharistie
La célébration des scrutins peut être suivie de la liturgie eucharistique, quand elle se déroule au cours
d’une messe de scrutin y, ou bien elle peut se poursuivre par la réconciliation sacramentelle des
baptisés, si cela a été prévu. On se rappellera que la célébration des scrutins prépare les
catéchumènes à découvrir la place du sacrement de la réconciliation39.
D. LES SACREMENTS DE L’INITIATION
Les trois étapes – l’entrée en catéchuménat, l’appel décisif, la célébration des sacrements de
l’initiation qui marquent le catéchuménat des adultes, développement dans le temps ce qui est au
couer de l’acte de foi du chrétien. Elles ponctuent un chemin de la foi qui conduit les
catéchumènes à professer la foi de l’Eglise, qu’ils font leur peu à peu, et à entrer en pleine
communion avec l’Eglise, par l’Esprit de Dieu qui les a dirigés. Ces étapes font partie du
sacrement. C’est Pourquoi “il en résulte que le catéchumènes est tout autre chose qu’un simple
cours de religion : il est une partie du sacrement ; non pas un enseignement préalable, mais une
partie intégrante de celui-ci. D’un autre côté, le sacrement n’est pas un simple rite liturgique, mais
un processus, un long cheminement qui mobilise toutes les forces de l’homme, intelligence,
volonté, sentiment. La séparation a eu ici encore des conséquences fatales: elle a ramené le
sacrement à un rite et la parole à une doctrine, et elle a masque par là une unité qui appartient aux
données fondamentales du christianisme.”40 C’est Pourquoi il importe de respecter ces étapes, d’en
dégager le sens, de ne pas les célébrer de façon trop rapprochée dans le temps et de soigner leur
déroulement.
Le sens de la troisième étape
La célébration des trois sacrements du baptême, de la confirmation et de l’eucharistie constitue “la
dernière étape de l’initiation chrétienne” RICA 202.
Les trois sacrements de l’initiation sont étudiés plus complètement et pour eux-mêmes dans les
chapitres suivants. Ils sont abordés ici dans leur continuité immédiate et leurs rapports directs avec
l’ensemble de la démarche catéchumène. Cette étape suppose :
a) de la part des catéchumènes, la volonté expresse de recevoir le baptême, comme signe et source
du salut de Dieu, et le désir d’être incorporés au corps du Christ qu’est l’Eglise, en participant au

3829
Sur la meilleure place de cette onction d’huile, voir l’opinion de Michel DUJARIER, l’initiation chrétienne des
adultes, Abidjan, ICAO, 1983, p. 90
3930
Cf. sur ce point l’article d’Odette SARDA, “la découverte de la pénitence dans le rituel de l’initiation chrétienne des
adultes”, dans la revue “Croissance de l’Eglise”, n° special “Vivre la reconciliation”, 69, hiver 1983, pp. 16-19
4031
J. RATZINGER, op. cit., p. 36
32
sacrifice et au repas eucharistique. Elle suppose aussi d’avoir été suffisamment instruit des vérités
de la foi et des obligations chrétiennes, d’avoir été éprouvé dans sa vie chrétienne et de se repentir
de ses péchés (cf. CIC, canon 865§ 1). Les catéchumènes doivent être libres dans leur démarche 41.
Après leur première expérience de vie ecclésiale, vécue pendant le catéchuménat, les
catéchumènes doivent être prêts à continuer de vivre avec d’autres chrétiens, en partageant la
parole de Dieu, en priant et en prenant part à la célébration eucharistique 42. On se souviendra que
même après le baptême et la première Eucharistie, les nouveaux baptisés éprouvent parfois des
difficultés à participer à l’eucharistie dominicale. Parrains, marraines et accompagnateurs auront
soin de soutenir la vie sacramentelle des néophytes.
b) L’Eglise, quant à elle, joue un rôle actif dans la célébration de ces sacrements. Comme l’initiation
chrétienne au cours du catéchuménat doit être l’œuvre de toute la communauté des fidèles, il
importe que, lors du baptême, “le peuple de Dieu, représenté non seulement par les parrains, les
parents et les proches, mais encore, autant qu’il est possible, par des amis, des familiers, des
voisines et quelques membres au moins de l’Eglise locale, joue un rôle actif. Ainsi se manifestera
la foi de la communauté et s’exprimera la joie commune avec laquelle les nouveaux baptisés sont
reçus dans l’Eglise” (RICA, notes doctrinales et pastorales, I, l’initiation chrétienne, 7).
c) Au sien de l’Eglise locale, l’évêque, chargé de diriger “d’établir et de diriger le service pastoral du
catéchuménat” (RICA 47), et auquel il appartient de “régler la célébration du baptême où est
donnée la participation au sacerdoce royal du Christ” (RICA, Note doctrinales et pastorales, 12),
est invité à célébrer les sacrements de l’initiation lors de la veillée pascale (cf. RICA, 52, 58)43. A
l’heure actuelle, l’évêque ayant rassemblé tous les catéchumènes de son diocèse lors de l’appel
décisif (la 2è étape), les catéchumènes reçoivent généralement le baptême dans leurs paroisses ou
leurs communautés ethniques ; c’est habituellement un prêtre qui baptise.
d) Dans la célébration du baptême, les parrains, qui ont accompagné les catéchumènes sur le chemin
de la foi et qui ont participé aux étapes précédentes, ont à intervenir “pour attester la foi de
l’adulte qui va être baptisé” (RICA, Notes doctrinales et pastorales, 9). Il s’agit là d’un véritable
acte liturgique.
e) Outre l’évêque, un prêtre ou un diacre peut conférer le baptême des adultes (RICA, Notes
doctrinales et pastorales, 13-15).
f) La célébration des sacrements de l’initiation a lieu normalement dans la nuit de la veillée pascale
(p. 105 et 229). Ainsi est mieux manifesté l’union au Christ mort et ressuscité, célébrée dans le
4132
Concile Vatican II, Déclaration sur la liberté religieuse (Dignitatis humanae), n. 30.
4233
Sur les critères d’admission au baprtême, cf. Albert ROUET, “Baptiser quelqu’un et l’appeler frère”, dans la revue
“Croissance de l’Eglise” n° 76, Automne 1985, pp. 16-20. Cf.Catéchuménat de Lyon, Guide pratiques de l’animateur
catéchuménat, ed. 1991, pp. 169-170.
4334
Le Code de Droit canonique, canon 863, rappelle : “le baptême des adultes, au moins de ceux qui ont quatorze ans
accomplis, sera déféré à l’Evêque diocésain pour qu’il l’administre lui-même, s’il le juge opportune.”
33
baptême ; ainsi est exprimée la joie de la résurrection que procure chaque baptême. “par le
baptême, en effet, c’est vraiment le mystère pascal qui est rappelé et qui est à l’œuvre en tant
qu’il fait passer les hommes de la ; mort du péché à la vie” (Rica, Notes doctrinales et pastorales,
6: cf. RICA 202). Dans le cas où cette dernière étape est célébrée en dehors du temps pascal, il
convient de donner à la célébration un “caractère pascal” (RICA 204).
La structure de la troisième étape
Au cours de la veillée pascale, la liturgie baptismale commence après les lectures bibliques. Dès la
première étape, la parole de Dieu est proclamée (p. 106 et 230) : cela signifie que c’est la parole
qui rassemble les croyants, qu’elle est donnée à l’Eglise comme nourriture (“table de la Pa- s
rôle”), avant que soit reçue la nourriture eucharistique. De plus, en présentent l’histoire de la
révélation et du salut, l’Eglise affirme que le christianisme “n’est pas d’abord un système, mais un
ensemble d’événement dont on peut faire mémoire”44, et qui enracine la foi sur les merveilles de
Dieu. L’acte central de la célébration du baptême, le point culminant, réside dans le rite de l’eau,
qui est préparé par la bénédiction de l’eau et la profession de foi. Celles-ci sont “intimement liées
au rite de l’eau” (RICA 205).
a) on commence par bénir l’eau, après avoir chanté la litanie des saints. Celle-ci souligne le caractère
Communautaire de l’Eglise dans le temps et l’espace et exprimer la communion qui existe entre
tous les membres différents de l’Eglise une et sainte. La litanie des saints indique aussi la vocation
à la sainteté de tout baptisé, à la suite de Jésus-Christ, le seul Saint I I P. 230 I I.
b) par la bénédiction de l’eau est célébré l’amour de Dieu, manifesté dès la création du monde et de
l’humanité. Il y est proclamé que la nouvelle naissance de l’eau et de l’Esprit s’inscrit dans
l’histoire du salut et a sa source dans la mort et la résurrection du Christ (RICA 206) I I p. 233 I I.
“l’eau qui va servir au geste du baptême est donc reliée à l’histoire du salut. Elle est mise sous le
signe de l’Esprit Saint et elle est marquée de la croix du Christ. C’est une eau de pureté qui
marque l’écart constitutive entre la créature et Dieu. Mais c’est aussi une eau de mémoire où
s’actualise l’histoire sainte de Dieu et des hommes. Une eau d’espérance et de certitude où est
attesté le pardon de Dieu pour le péché humain. Et c’est une eau spirituelle qui fait vivre du
mystère pascal”45. Puis vient la profession de foi avec sa double dimension : la renonciation et
l’adhésion, qui constituent un seul rite (RICA 207).
c) la renonciation a une valeur importante : être baptisé, ce n’est pas seulement dire “oui” à Dieu, ce
n’est pas seulement adhérer à la promesse du Christ et au mystère de la Trinité ; être baptisé, c’est
aussi dire “non” au mal et au péché, à tout ce qui est contraire à l’Esprit libérateur. Cette
renonciation est dans le droit fil de la célébration des scrutins et de l’onction d’huile des

4435
Henri BOURGEOIS, l’initiation chrétienne p. 126.
4536
Henri BOURGEOIS, o. c., pp. 146-147.
34
catéchumènes ; mais ici, on exprimer par des paroles qu’on est libéré du mal dans la mesure où
l’on y renonce. Le baptême, comme toute la vie chrétienne, est un arrachement, une lutte pour
s’attacher au Christ et devenir un être nouveau enfanté à la vie divine II p. 230 II. La renonciation
se présente sous la forme de trois réponses à trois questions ; il convient de maintenir cette forme
de dialogue, tout en sachant qu’il est possible d’actualiser les réponses. Le rituel propose trois
formules (cf. RICA 218).
d) la profession de foi signifie ouvertement, publiquement, que “le baptême est le sacrement de cette
foi par laquelle les hommes, éclairés par la grâce du Saint-Esprit, répondent à l’évangile du
Christ” (RICA, notes doctrinales et pastorales, 3) et confirment leur appartenance à l’Alliance que
Dieu propose I I p. 233 I I. La profession de foi fait partie intégrante du rite baptismal, elle fait
corps avec le sacrement ; en effet, “tout baptême est fondé dans la fidélité du Christ jusqu’à la
mort et proclame cette fidélité. Il se situe au cœur de la vie et de la foi de l’Eglise, et révèle la
fidélité de Dieu, fondement de toute vie dans la foi.”46
La profession de foi se présente dans le rituel avec une structure de questions/réponses. Cette
structure a un sens fondamental. Les catéchumènes ont eu l’occasion de dire leur foi à leur
manière au moment de l’entrée en Eglise ou au moment de l’appel décisif. Ici, ils entrent dans la
foi de l’Eglise, une foi commune à tous les baptisés, une foi reçue, transmises depuis les Apôtres.
Ils n’ont pas tant à trouver en eux-mêmes les mots de la foi qu’à les accueillir des mains de
l’Eglise qui les enfante à la nouvelle par le baptême. C’est Pourquoi l’actualisation d’une formule
de profession de foi ne trouve pas sa place ici. Au moment du baptême, on entre dans une foi
commune et biblique.
La structure questions/ réponses traduit la responsabilité de l’Eglise : c’est elle qui initie, qui
enseigne, c’est elle qui interpelle les futurs baptisés et attend leur réponse pour les admettre dans
la communauté des croyants. Elle se situe en vis-à-vis, face aux catéchumènes qui ont à exprimer
leur adhésion libre et réfléchie à la foi trinitaire de l’Eglise. L’Eglise qui les enfante à la vie divine
et qui les a catéchisés leur demande de dire publiquement leur attachement à Dieu qui les a saisis
et les élève à la dignité de fils de Dieu.
La réponse que donnent les catéchumènes est une réponse personnelle et il est normal que
l’assemblée entende ces affirmations : “Je crois”. Elles sont un signe. Signe de cet attachement par
la foi au Christ Jésus. “par lui, j’accède à l’existence filiale que je tiens du Père qui me crée. Et la
puissance de l’Esprit, en me rendant semblable au Fils, me donne la joie et la liberté des enfants de
Dieu”.47
4637
Commission « Foi et Constitution » du conseil Oeucuménique des Eglises, Baptême, Eucharistie, Ministère, Paris, le
Centurion, 1982, n° 12, p. 20.
4738
Cardinal J. -M. LUSTIGER, Entretien sur Radio Notre-Dame, le 19.03.1986 (paru dans Paris Notre-Dame n° 119, p.
4).
35
On adoptera pour la profession de foi le même déroulement : d’abord le baptisé, puis l’assemblée que
pour la renonciation.
e) Le rite de l’eau, joint à l’invocation de la Sainte Trinité, constitue le sommet du baptême I I p. 232
I I. Il est lié à la profession de foi et aux gestes qui vont suivre, dont la signification est exprimée
dans le rituel (RICA 209). Il doit être mis en valeur. On veillera à prendre le temps, à donner au
geste son ampleur, en évitant les positions disgracieuses des baptisés. Le triple geste de verser de
l’eau sur la tête48 montre bien que le rite n’est pas d’abord un rite de purification; il a un sens
trinitaire (cf. RICA 222). Dieu, dans le sacrement, s’engage, agit, en tant que Père, Fils et Esprit-
Saint. Être baptisé, c’est être plongé dans la vie trinitaire, en participant à la mort et à la
résurrection du Christ49. Au cours de ce rite d’eau, le ministre n’est pas seul à être actif. Parrains et
marraines, présents aux côtés des catéchumènes, sont invités à poser la main sur l’épaule de ceux
qui sont baptisés, en signe de fraternité ecclésiale. Et, immédiatement après le baptême, toute
l’assemblée exprimer sa joie et son action de grâce par un chant.
Les rites dits complémentaires, qui suivent le rite d’eau, sont très significatifs, en ce sens qu’ils
déroulent la signification du baptême et de toute vie baptismale. Le rite d’eau n’exprime pas toutes
les dimensions du devenir chrétien. Ambroise, évêques de Milan, l’exprimait ainsi: “après la
fontaine, il reste encore à rendre complet, quand, à l’invocation du prêtre, l’Esprit Saint est
répondu”50 (cf. RICA 210).
f) fonction post baptismale ou la confirmation qui, selon les situations, suivent le baptême, signifient
la vocation christique du chrétien, appelé à se laisser conduire par l’Esprit dont il est marqué.
L’onction est faite avec le saint-chrême, l’huile parfumée, consacrée par l’évêque à la messe
chrismale. Par l’onction, le nouveau baptisé participe à la triple fonction du Christ dans le monde:
il devient prêtre, prophète et roi. Il est christifié, pour vivre avec le Christ et en lui; ainsi la
vocation du baptisé dans l’Eglise et dans le monde s’enracine dans le baptême et la confirmation51
I I p. 240 I I.
g) la remise d’un vêtement blanc-tunique, cape, châle, aube est souvent bien comprise et désirée par
les nouveaux baptisés. En recevant ce vêtement, ils savent que par le baptême ils ont revêtu le

4839
“Cette relation étroite de l’eau baptismale et de la foi sacramentelle était jadis plus marquée qu’elle ne l’est
aujourd’hui. Au 3è siècle, chacune des trois questions sur la foi était suivie du Amen du catéchumènes et immédiatement
d’un geste d’eau”. Henri BOUR-GEOIS, o.c., p. 149.
4940
Si cela est opportune on fera le rite par immersion. Ce geste s’inscrit advantage dans la pratiques de l’Eglise primitive
(cf. la Tradition Apostolique, 21) et a une forte signification symbolique (cf. RR 221, 222).
5041
Des sacrements III, 8, SC 25, p. 74. On trouve chez Cyprien, évêques de Carthage, la même perspective: “II est
nécessaire que celui qui a été baptisé soit marqué d’huile: recevant l’huile, c’est à dire l’onction, il peut être ainsi l’oint de
Dieu ett avoir en lui la grâce du Christ”. Letter 70, 2, 2.
5142
Lorsque, pour des raisons pastorales sérieuses et fondées, la confirmation est conférée quelques mois après le baptême
(à la Pentecôte, apr ex.), le baptisé a fait l’expérience, plus encore qu’avant son baptême, que la vie baptismale du
chrétien était une vie dans l’Esprit et au sein d’une Eglise diocésaine concrete.
36
Christ (Ga 3, 27). “le vêtement blanc est le symbole de leur dignité nouvelle” RICA 2101 II p. 237
II.
h) enfin, la remise du cierge allumé rappelle que la seule lumière du monde est le Christ et que cette
lumière est donnée pour qu’à leur manière les baptisés soient lumière pour leurs frères : c’est leur
mission (cf. RICA 227) II p. 237 II).
i) ceux qui viennent d’être baptisés et confirmés (ou oints du chrême) “participant pour la première
fois, et de plein droit, à la célébration de l’eucharistie qui achève leur initiation” (RICA 213; cf.
RICA 233-235).
L’eucharistie marque la fin du catéchuménat, comme le sommet de l’initiation et de la vie chrétienne.
Les nouveaux baptisés, appelés néophytes, sont qualifiés pour vivre pleinement l’eucharistie. Ils
peuvent prendre une part active à la prière universelle, apporter le pain et le vin à l’autel et
communier sous les deux espèces. Il est indispensable de ne pas dissocier le baptême de
l’eucharistie, car le baptême prépare à l’eucharistie et l’eucharistie est la manière ecclésiale de
vivre le baptême et de nourrir la foi baptismale. Pendant le catéchuménat, on aura soin de ne pas
omettre la préparation et la catéchèse de l’eucharistie, même si l’approfondissement du mystère
eucharistique se fait après le baptême, pendant la mystagogie.
Tout le temps du catéchuménat a conduit les catéchumènes, étape après étape, à reconnaître l’élection
dont ils étaient l’objet (cf. Ep 1, 3-14), leur vocation de fils de Dieu dans l’Eglise et dans la
société, l’alliance contractée par Dieu avec eux et dont chaque Eucharistie fait mémoire en la
consolidant. Désormais, les nouveaux baptisés sont invités à vivre chaque jour de cette grâce
baptismale. Marqués du sceau de l’Esprit Saint, ils ont à marcher à la suite du Christ, à prendre
une part active à la vie de l’Eglise, à être des acteurs et des témoins de l’évangile. Le
catéchuménat n’est pas un point final, il est un point de départ pour une vie chrétienne pleinement
assume dans la fidélité et l’espérance.
C’est Pourquoi, après le baptême et la première Eucharistie, tien n’est fini (RICA 236-243). Le
temps de la mystagogie, qui n’est pas une institution mais plutôt un temps d’approfondissement de
la foi et des mystères chrétiens (mystagogie), va permettre aux nouveaux baptisés de prendre place
dans l’Eglise et de renforcer les liens qui les unissent à Dieu II p. 292-299 II.
“le baptême ne consiste pas seulement en une expérience momentanée, mais il concerne la croissance
de toute une vie dans la communion du Christ… il y a toujours l’exigence d’une croissance
continue de la réponse personnelle dans la foi” BEM 9, 12 (voir note 16).

37

Vous aimerez peut-être aussi