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Introduction

« L'abus de confiance a une nuance moins odieuse que la perfidie,


mais ne diffère guère en bassesse. »1Citation de Hyppolite de Livry ;
Pensées et réflexions (1808). A la lecture de la citation préalablement
citée, l’abus de confiance constitue un fait indigne et immoral étant donné
que c’est un usage excessif de droit et une exploitation abusive de la
confiance dont on est censé la méritée.
D’un point de vue linguistique, l’abus de confiance est le fait par
lequel une personne détourne au préjudice d’autrui, des fonds, des
valeurs, ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a accepté à
la charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage
déterminé.
Un tel fait assez bassesse a dû poussé le législateur marocain à définir et
incriminer l’abus de confiance aux termes de l’article 547 du code pénal
qui dispose que : « Quiconque de mauvaise foi détourne ou dissipe au
1 Citation de Hyppolite de Livry ; Pensées et réflexions (1808).

1
préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, soit des effets, des
deniers ou marchandises, soit des billets, quittances, écrits de toute
nature contenant ou opérant obligations ou décharges et qui lui avaient
été remis à la condition de les rendre ou d'en faire un usage ou un emploi
2
déterminé, est coupable d'abus de confiance. ». Cette infraction contre
les biens, selon les divisions retenues par le code pénal, consiste en une
atteinte aux biens d'autrui. Cette atteinte se caractérise par le fait que le
possesseur de la chose remise à titre précaire se comporte comme le
véritable propriétaire de celle-ci. Usurpant les prérogatives du propriétaire,
la doctrine classique qualifiait le délit d'abus de confiance « d'interversion
des titres ».
Dans une approche comparative avec les infractions voisines, L'abus
de confiance présente un point commun avec les délits d'escroquerie et de
vol, en ce sens que les trois infractions consistent en des appropriations
frauduleuses de la chose d'autrui (V. Escroquerie, Vol).3 Ces ressemblances
fondent certaines similitudes de régime entre ces trois infractions. Ainsi,
au regard des règles applicables en matière de récidive, les trois délits
sont considérés comme une seule et même infraction; les règles de
l'immunité familiale sont applicables dans les trois cas. Cependant, au-
delà cette ressemblance, les qualifications se distinguent nettement. En
effet, le vol est caractérisé par la soustraction frauduleuse de la chose
contre le consentement de son propriétaire ; l'escroquerie implique
l'utilisation de moyens frauduleux pour tromper la victime et la déterminer
à remettre à l'escroc sa chose. L'abus de confiance est consommé par le
détournement d'une chose que l'agent détient légitimement, à titre
précaire, en vertu d'un contrat ou d'une disposition légale ou encore d'une
décision judiciaire.

2 Code pénal marocain, article 547.

3 C. Mascala, Abus de confiance, Rép. pén., 2003,p.p :17.

2
Historiquement, La répression de l'abus de confiance a évolué au gré
des mutations législatives :

 Droit romain. - Le droit romain ne distinguait pas entre


diverses qualifications, mais retenait une incrimination
générale : le furtum. Sous cette qualification de furtum, étaient
répréhensibles toutes les appropriations frauduleuses, à des
fins de profit, de la chose ou de son usage. Le furtum
permettait de sanctionner des comportements divers
consistant en des soustractions frauduleuses ou en des
détournements dans un cadre contractuel.4
 Ancien droit. - L'ancien droit est beaucoup moins répressif que
le droit romain, puisque le domaine du furtum est très
restreint. Désormais, cette qualification ne sanctionne que le
vol de possession, mais ne vise plus le vol d'usage. Par
conséquent, celui qui utilise la chose qui lui a été
volontairement remise dans un cadre contractuel,
contrairement aux prévisions du propriétaire, ne commet
qu'un délit civil pouvant donner lieu à l'octroi de dommages et
intérêts.

 Droit musulman. - dans la religion musulmane, la plupart des


doctrines ont affirmé que l’abus de confiance fait partie des
péchés majeurs, vu la gravité du fait, une multitude des
versets coraniques ; les renseignements du prophète
incriminent ce fait bassesse. Le prophète Mohammed que la
paix de Dieu soit sur lui a considéré comme hypocrite la
personne qui abuse de la confiance des autres : il a clairement
dit que la paix de Dieu soit sur lui : « Les signes de l'hypocrite
sont trois: Si il ment, et si il brise une promesse, et si il abuse
de la confiance. ».

4 Ibid. p.p.18.

3
Apparemment le législateur marocain a été inspiré du droit romain
plus que le droit musulman afin d’élaborer un cadre juridique à l’abus de
confiance, résultat, DAHIR N° 1-59-413 DU 28 JOUMADA II 1382(26
NOVEMBRE 1962) PORTANT APPROBATION DU TEXTE DU CODE
PÉNAL, Bulletin Officiel n° 2640 bis du mercredi 5 juin 1963, p. 843. Plus
précisément les articles de 547 à 555.

En outre, d’une approche macroéconomique les investissements


exigent un arsenal juridique solide afin de sécuriser l’ordre des affaires.
Les juridictions financières et les tribunaux de commerce ne sont pas seuls
responsables à stabiliser la vie économique en assurant leur rôle
fondamental qui se manifeste dans la rapidité et l’efficacité, mais aussi
c’est l’implication de la juridiction répressive donne la mesure de
détection ; d’incrimination et de répression des faits et infractions
susceptibles à porter atteinte à l’ordre économique. Un climat d’affaires
non sécurisé est un climat fragile, ou il y a moins d’investissements, plus
de chômage et encore plus une atmosphère sociale délicate. De ce fait le
système juridique réclame la nécessité de développer une justice qui
privilège la protection et la conservation du flow économique.
La raison pour laquelle une nouvelle branche de droit pénal fut
émerger : le droit pénal des affaires, qui se défini comme étant l'ensemble
des règles de droit concernant les infractions susceptibles d'intervenir
dans la vie des affaires et dont la finalité est d’incriminer et sanctionner
les infractions susceptibles à porter atteinte à l’ordre économique.

Relativement à cet approche, et comme étant classifié par le


législateur marocain sous le volet des atteintes aux biens, dans quelle
mesure l’abus de confiance peut être qualifié comme étant une infraction
faisant partie de la branche du droit pénal des affaires ?

4
Afin de débattre cette problématique d’un point de vue à la fois
descriptive et analytique, il nous semble opportun de proposer le plan
suivant :

 D’une part, une représentation et une mise en contexte de


l’abus de confiance comme étant une atteinte à l’ordre
économique.
 D’autre part, l’essaye du législateur marocain afin de stabiliser
le climat des affaires et les critiques à approcher au régime
répressif de l'abus de confiance

5
Partie première : l’abus de
confiance : une atteinte à l’ordre
des affaires.
Il a été vu que les atteintes aux biens et à l’ordre des affaires
peuvent être frustes et réalisées simplement par soustraction « vol » ou de
manière plus astucieuse par tromperie « escroquerie ». Mais ces atteintes
peuvent aussi être réalisées par faiblesse, par des individus à qui une
chose ou un bien a été confié et qui vont se laisser tenter et détourner ce
bien. L’abus de confiance est le prototype des détournements, c’est une
infraction qui consiste, pour le coupable, à détourner ce bien en
connaissance de cause. Il convient de préciser d’abord les conditions
préalables avant de définir les éléments constitutifs proprement dits.

Sous-partie 1 : les conditions préalables.

L'abus de confiance est puni par l'article 547 en ces termes :


« Quiconque de mauvaise foi détourne ou dissipe au préjudice des
propriétaires, … soit des effets, … écrits de toute nature …, est coupable
d'abus de confiance et puni de l'emprisonnement de six mois à trois ans et
d'une amende de 120 à 2000 dirhams ».5

5 Code pénal marocain, article 547.

6
Le délit d'abus de confiance suppose l'existence d'un contrat « l’acte
de remise » en vertu duquel « la chose objet de la remise » est remise.
Seules certaines choses sont énumérées par l'article 547. La remise de la
chose est détournée, dissipée avec l'intention de nuire à autrui.

Section 1 : l’acte de remise.

L’article 547 énumère le louage de choses, le dépôt, le mandat, le


nantissement, le prêt à usage, la remise en vue d'un travail salarié ou non
salarié. (Contrats régis par le DOC)
Il y a abus de confiance chaque fois que l'une des parties à l’un des
contrats suscités, a enfreint ses obligations envers l'autre.
Seuls ces contrats nommés par la loi sont concernés par le délit d'abus de
confiance. L'article 547 énumère de manière précise les choses objet du
contrat.
En revanche, cet accord de volontés entre les parties, l'une qui remet la
chose, l'autre qui l'accepte à charge de la restituer, peut s'exprimer dans
un cadre contractuel ou extracontractuel, entendu au sens de légal ou
judiciaire.

Sous-section 1 : la remise contractuelle.

La définition de l'infraction d’abus de confiance par le législateur


marocain ne sanctionnait que le détournement de choses remises « à titre
de louage, de dépôt, de mandat, de nantissement, de prêt à usage ou
pour un travail salarié ou non salarié »
Pour être caractérisé, le détournement doit porter sur une chose remise à
titre précaire dans un cadre contractuel. Il faut donc un accord de volonté,
entre le propriétaire et l'agent, par lequel ce dernier doit lui restituer la
chose confiée ou en faire un usage déterminé.6
6 W. Jeandidier, J.-Cl. 2004. fasc. 20. 40 ; v. égal. C. Souweine, Le domaine de
l'abus de confiance dans le nouveau code pénal, Mélanges Larguier, 1993, p48.

7
Sous-section 2 : la remise extracontractuelle.

L’article 547 du code pénal, implique que la chose objet du


détournement ait été remise dans le cadre d'un contrat. Il faut seulement
que cette chose ait été remise à titre précaire au détenteur qui l'a
acceptée en connaissance de cause. Cependant, le législateur n’a pas
évoqué la remise extracontractuelle, y’a-t-il une négligence de sa part ?
La remise extracontractuelle consiste sur des fonds peuvent être remis
dans le cadre d'un avant-contrat et il est convenu qu'ils seront restitués si
le contrat définitif n'est pas conclu. Cela concerne, par exemple,
l'hypothèse d'une promesse de vente, conclue sous la condition
suspensive de l'obtention d'une autorisation, et des fonds sont versés par
le bénéficiaire au promettant. Si la condition suspensive défaille, le
promettant doit restituer les fonds versés par le bénéficiaire. Si ces fonds
ont été détournés, ce qui rend leur restitution impossible, l'abus de
confiance peut être consommé. Le code pénal ne réglemente pas ce
champ d’application, cependant, on se demande si le code pénal évolue
vraiment dans le monde économique.

Section 2 : la chose objet de la remise.

L'article 547 énumère les choses mobilières remises, à savoir « des


effets, des deniers ou marchandises, soit des billets, quittances, écrits de
toute nature contenant ou opérant obligations ou décharges ».
Ces choses ont été remises à la condition de les rendre ou d’en faire un
usage ou un emploi déterminé. Chaque fois qu'il y a détournement ou
dissipation de la chose remise, il y a abus de confiance.
Il faut une remise certaine, volontaire et précaire de la chose par le
propriétaire, volontaire, puisqu'une remise involontaire constitue un vol ou
une extorsion et non un abus de confiance. Une remise précaire puisque le

8
contrat ne doit pas emporter transfert de propriété. 7 Par exemple un
contrat de vente ne peut pas être un contrat concerné par ce délit puisque
la remise de la chose est définitive, la vente étant un contrat translatif de
propriété. En ce qui concerne la vente avec clause de réserve de propriété,
il n'y a pas de solution jurisprudentielle mais il semblerait que l'esprit de
cette clause soit de paralyser l'effet translatif de propriété, ce qui
permettrait d'envisager un abus de confiance.

Sous-section 1 : L’existence d’un lien d’obligation.

L’acte est le lien d’obligation, prouvé selon les règles du droit civil ou
commercial, constituait une condition préalable à la qualification du délit,
tel que les actes de louage de choses, le dépôt , le mandat, le
nantissement, le prêt à usage, la remise en vue d’un travail salarié ou non
salarié… Le contrat de vente est exclus de cet énumération, car
l’acquéreur qui a reçu la chose du vendeur ne peut être poursuivi pour
abus de confiance même au cas où il n’honorerait pas ses engagements
de payer, il ne va pas de même de la situation inverse : Le vendeur qui
détient la chose en qualité de dépositaire lorsque l’acheteur l’a laissée
volontairement entre ses mains commet un abus de confiance s’il revend
la chose.
Mais qu’en est-il de détourner des informations ou idées ? Faut-il
obligatoirement que les détournements portent sur le support matériel ?

Sous-section 2 : l’objet de la remise.

Les biens dont le détournement ou la dissipation donne lieu à l’abus


de confiance sont :
Des effets : des effets de commerce, actions et obligations..
Deniers : des fonds, des moyens fonciers…
7 Ibid. p84.

9
Marchandise : choses susceptibles d’être vendues, des biens mobiliers.
Sont exclus les notions de services ou de droits qui ne peuvent faire objet
d’une remise, seul le titre constatant un droit pouvant être retenu.
 Billets ;
 Quittances ;
 Ecrits contenant ou opérant obligation ou décharges.8
Il faut toutefois remarquer que s’agissant de l’abus de confiance, la
chose doit avoir été remise en vertu d’un titre et à charge d’être rendue,
représentée ou d’en faire un usage déterminé. Or, cette condition rend
peu probable la situation d’un abus de confiance sur une chose dénuée de
valeur.
Les immeubles sont exclus du champ de l’abus de confiance,
l’incompatibilité de tels biens avec l’abus de confiance étant une règle
classique car la propriété immobilière n’est pas exposée aux mêmes
dangers que la propriété mobilière. D’un point de vue positif, les meubles
sont donc concernés. Les fonds désignent l’argent, les valeurs, les bijoux,
lingots et valeurs mobilières. Quant aux bien quelconque, il s’agit de tout
objet mobilier ayant normalement une valeur marchande mais pas
forcément.
La question se pose ensuite de savoir si l’abus de confiance est
nécessairement limité aux meubles corporels.

Sous-section 3 : L’affectation de la remise

Le texte d'incrimination précise que les choses sont remises « à la


condition de les rendre ou d’en faire un usage ou un emploi déterminé. »
l’idée prédominante est ici celle d’un changement frauduleux de
destination de la chose : celui qui en avait la détention à titre précaire et
auquel une mission particulière a était confiée n’a pas rempli cette mission
et a profité de la confiance qui lui était faite pour donner à la chose une
destination qui n’était pas voulue par le légitime propriétaire : c’est le
cœur même de l’expression « abus de confiance ».
8 C. Mascala, op.cit. p56.

10
Sous-partie 2 : les éléments constitutifs.

Le délit d'abus de confiance comporte trois éléments constitutifs : un


acte matériel de détournement, un préjudice pour le propriétaire ou le
possesseur de la chose détournée, auxquels il faut ajouter l'exigence d'un
élément intentionnel.

Section 1 : l’acte de détournement.

Le détournement est caractérisé par la non-restitution de la chose


remise à titre précaire.9 Sous l'appellation générique de « détournement »,
alors il faut distinguer entre le détournement et la dissipation ; dissiper,
cela peut être détruire, vendre la chose, voire la distribuer s’il s’agit
d’espèces. Détourner alors c’est donner à la chose une destination qui
n’était pas celle prévue.
En effet, le détournement peut consister en une transgression de
l'affectation de la chose, mais également en une aliénation ou une
disparition de la chose. Le délit est caractérisé par le seul détournement
de la chose remise à titre précaire sans qu'une mise en demeure de
restituer soit nécessaire.

A : Usage abusif.

En principe, l'usage abusif de la chose remise à titre précaire ne


constitue que l'inexécution des obligations convenues par les parties au
contrat, ou encore imposées par la loi ou le juge, et ne donne droit qu'à
des réparations civiles.

9 Valérie Malabat, « Droit pénal spécial ». Hyper Cours Dalloz, 3eme édition 2007.
P96.

11
B : Retard dans la restitution.

Le possesseur de la chose est tenu de respecter l'échéance de


restitution déterminée par les parties, la loi ou le juge. Cependant, la
restitution tardive de la chose remise ne constitue pas à elle seule un acte
de détournement, mais l'inexécution d'une obligation contractuelle ou
extracontractuelle.10

C : Refus de restituer.

Le refus de restituer la chose à son légitime propriétaire caractérise,


en principe, le détournement frauduleux puisque ce refus ne peut être le
fruit d'une négligence, il est nécessairement intentionnel. La transgression
de la précarité de la remise de la chose et la volonté de se comporter
comme un propriétaire apparaît clairement dans la manifestation du refus
de restituer.

D : Impossibilité de restituer.

Le fondement de l'impossibilité de restituer constitue le critère de


distinction entre les cas pénalement condamnables et ceux qui échappent
à toute sanction. En effet, lorsque l'impossibilité résulte d'un cas de force
majeure, d'un cas fortuit ou encore d'une négligence en l'absence
d'intention frauduleuse, le détournement n'est pas caractérisé : si l'on
peut reprocher au détenteur de ne pas avoir respecté ses obligations
contractuelles, il n'apparaît pas qu'il ait eu la volonté de se comporter
comme un propriétaire et d'intervertir la possession. Par conséquent, son
attitude ne peut donner lieu qu'à l'engagement de sa responsabilité civile
pour réparer le préjudice causé au propriétaire de la chose.

E : Preuve du détournement.

10 Ibid. p98.

12
Preuve libre, quelle que soit l'hypothèse envisagée, pour que les
poursuites puissent être engagées du chef d'abus de confiance, il faut que
soit rapportée la preuve d'un acte positif de détournement. La seule
constatation de l'absence de tout ou partie des choses remises ou une
présomption de détournement est insuffisante à établir l'existence de
l'infraction.

Section 2 : le préjudice.

L'exigence du préjudice, en tant qu'élément constitutif de


l'infraction, découle du texte d'incrimination (C. pén., art. 547-1). L'abus
de confiance est défini comme un acte de détournement commis « au
préjudice d'autrui ». Le préjudice subi par la victime constitue un élément
essentiel du délit, ce qui démontre que l'abus de confiance suppose
nécessairement qu'un résultat soit atteint et explique que la tentative
d'infraction ne soit pas punissable. Par conséquent, en l'absence de
préjudice, l'infraction ne peut pas être constituée à défaut d'un élément
constitutif.11

Section 3 : l’intention

L'abus de confiance est un délit intentionnel, il repose


principalement sur l'intention coupable du délinquant. Pour ce faire, il faut
que l'acte de détournement ou de dissipation soit intentionnel. Il ne faut
pas confondre l'intention frauduleuse avec le mobile.
L’intention doit être frauduleuse, indispensable à l’exercice des poursuites,
suppose chez l’agent la connaissance de la précarité de la possession et
de la prévisibilité du résultat dommageable de son comportement.
Il a été jugé que l’intention, coupable était réalisée chaque fois que le
prévenu avait disposé de choses fongibles dans des conditions telles qu’il

11 C. Mascala, op.cit. p87.

13
devait normalement prévoir qu’elles l’empêcheraient de restituer en
temps utile.

Partie deuxième : le législateur


marocain : un essaye de régner
l’ordre des affaires.

Sous-partie1 : Répression du
délit

Cette sous-partie sera consacrée à l’étude des modalités de la


répression adoptées par le législateur marocain. Donc d’une part on va
s’arrêter sur le champ d’application, et d’autre part on traitera les
particularités de poursuite.

Section 1 : le champ d’application.

On distingue entre l’abus de confiance simple et aggravé :

Sous-section 1 : Abus de confiance simple.

L'abus de confiance est un délit puni de l'emprisonnement de six


mois à trois ans et d'une amende de 200 à 2.000 dirhams.et si le
préjudice subi est de faible valeur, la durée de la peine
d'emprisonnement sera d'un mois à deux ans et l'amende de 200 à
250dirhams sous réserve de l'application des causes d'aggravation
prévues aux articles 549 et 550 du code pénal marocain dont on va

14
12
discuter prochainement sous le volet de l’abus de confiance aggravé . En
droit pénal français l’abus de confiance est un délit puni de trois ans

d’emprisonnement et une amande de 375.000 €.13Le coupable encourt


également les sept peines complémentaires de l'article 314-10 du code
pénal français, qui seront prononcées - une ou plusieurs d'entre elles - si la
juridiction de jugement l'estime nécessaire. Au titre des peines
complémentaires, peuvent être prononcées :

 L’interdiction des droits civiques, civils et de famille ;


 l'interdiction d'exercer une fonction publique ou l'activité
professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de
l'exercice de laquelle l'infraction a été commise pour une durée de
cinq ans au plus ;
 la fermeture pour une durée de cinq ans au plus des établissements
de l'entreprise, de l'un ou de plusieurs d'entre eux, ayant servi à
commettre les faits incriminés ;
 l'exclusion des marchés publics pour une durée de cinq ans au plus ;
 l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des
chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le
tireur auprès du tiré ou de ceux qui sont certifiés ;
 la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre
l'infraction ou de la chose qui en est le produit, à l'exception des
objets susceptibles de restitution ;
 l'affichage ou la diffusion de la décision.

Sous-section 2 : Abus de confiance aggravé.

12 Code pénal marocain, article 547.

13 C. Mascala, op.cit. p105.

15
Le législateur marocain a retenu l’aggravation en deux cas
clairement mentionnés à la lecture des articles 549 et 550 du code pénal
marocain.

A : l’aggravation aux termes de l’article 549 du code pénal marocain.

A la lecture de l’article549 du code pénal marocain énumère trois


causes d'aggravation distinguées en raison des modalités de commission
ou de la qualité de l'auteur. Dans tous les cas, le coupable encourt
l'emprisonnement d'un à cinq ans et l'amende de 200à 5.000 dirhams.
Ces cas sont :
 Si l’abus de confiance est commis par : Soit par un adel,
séquestre, curateur, administrateur judiciaire agissant dans
l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions;
 Si l’abus de confiance est commis par : Soit par un administrateur,
employé ou gardien d'une fondation pieuse, au préjudice de cette
fondation;
 Si l’abus de confiance est commis par : Soit par un salarié ou
préposé au préjudice de son employeur ou commettant.14

B: L’aggravation aux termes de l’article 500 du code pénal marocain.

A la lumière de l’article 500 du code pénal marocain, on remarque


que la distinction des cas dont la peine est portée au double et le
maximum de l'amende à 100.000 dirhams,est faite sur la base de l’acte
de la remise de la chose objet du détournement, à savoir :

 Le nantissement : est une garantie, une sûreté réelle mobilière


portant sur un bien incorporel (des parts sociales, un fonds de
commerce par exemple). Il s'agit donc d'une garantie pour le
créancier qui obtient un droit sur un bien de son débiteur. Autrement

14 Code pénal marocain, article 549.

16
dit, le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet un
bien meuble incorporel à son créancier pour garantir sa dette.
 Le dépôt : est un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la
charge de la garder et de la restituer en nature.
 Le mandat : est un contrat par lequel une personne, le mandant,
donne à une autre personne, le mandataire, le pouvoir de faire un ou
des actes juridiques en son nom et pour son compte.15

Section 2 : Particularités de la poursuite.

Sous-section 1 : la Tentative.

Le code pénal n'incrimine pas la tentative du délit d'abus de


confiance ; par conséquent, elle n'est pas punissable. En effet, pour que la
tentative de délit puisse donner lieu à des poursuites, il faut qu'elle soit
expressément prévue par la loi, ce qui n'est pas le cas en matière d'abus
de confiance. L'absence d'incrimination de la tentative découle de la
nature de l'infraction : d'une part, l'abus de confiance repose sur une
remise volontaire de la chose à l'agent par son légitime propriétaire
- contrairement à l'escroquerie où la remise est provoquée par des
manœuvres frauduleuses ou au vol où la soustraction est réalisée contre le
gré du propriétaire -, la tentative d'appropriation de la chose n'est donc
pas envisageable. D'autre part, ce qui consomme l'infraction, c'est le
détournement de la chose remise à titre précaire, détournement qui se
manifeste par l'usage abusif ou la non-restitution. Par conséquent, seule la
consommation du détournement permet de constater l'infraction : il est
inconcevable de tenter de faire un usage abusif de la chose remise ou de
tenter de ne pas la restituer. Ou bien le détournement est consommé et
l'infraction est réalisée, ou bien il n'y a pas d'acte caractéristique du
détournement et il n'y a pas de place pour la sanction pénale.

15 Ibid. article 500.

17
Sous-section 2 : l’Immunité familiale

L'article 548 du code pénal étend à l'auteur d'un abus de confiance


le bénéfice de l'immunité familiale, dans les conditions fixées par les
articles de 534 à 536 du même code. En application de cette disposition,
les poursuites pénales sont paralysées lorsque l'abus de confiance a été
commis au préjudice d'ascendants, de descendants ou du conjoint. Cet
obstacle aux poursuites pénales ne bénéficie qu'à l'auteur de l'infraction
qui est lié à la victime au sens de l'article 534 du code pénal marocain,
mais pas aux complices ni aux coauteurs, puisqu'ils ne rentrent pas dans
le cadre familial fixé par la loi.16

Sous-section 3 : le Régime de la prescription de l'action publique

La prescription de l'action publique relative au délit d'abus de


confiance obéit à des règles particulières. L'abus de confiance est un délit
instantané, consommé par l'acte matériel de détournement qui devrait
ouvrir le délai de prescription. La détermination du jour du détournement
est une question de fait qui relève de l'appréciation souveraine des juges
du fond qui doivent permettre à la Cour de cassation d'exercer son
contrôle. Cependant, une jurisprudence constante et particulièrement
souple de la Cour de cassation admet que le point de départ du délai de
prescription de l'action publique puisse être retardé au jour où la victime a
été en mesure de découvrir l'infraction: expertises ou de contrôles
comptables ou fiscaux ou au jour où le délit est apparu et a pu être
constaté

16 Ibid. articles 548 & 536.

18
Sous-partie 2 : critiques relaves
cadre législatif face aux
contentieux abordant

Section 1 : Critiques concernant les auteurs de


l’infraction.

Aux termes de l’article 547 du code pénal, le législateur a utilisé le


terme « quiconque » pour la désignation des personnes susceptibles à
commettre l'infraction, une désignation qui demeure vague abstraite et
qui manque de précision, ce qui pousse à s’interroger à l’intention du
législateur dans l’utilisation de ce terme : est-ce une négligence ou une
généralisation ?
Au droit pénal français Les personnes morales peuvent être
déclarées responsables pénalement des abus de confiance simples ou
aggravés incriminés par les articles 314-1 et 314-2 du code pénal
(art. 314-12).Les peines encourues par les personnes morales sont
l'amende dont le montant est égal au quintuple de celui prévu pour les
personnes physiques, ainsi que l'ensemble des peines mentionnées à
l'article 131-39 du code pénal : dissolution lorsque la personne morale a
été créée ou détournée de son objet pour commettre l'infraction,
interdiction d'exercer une activité professionnelle, placement sous
surveillance judiciaire, fermeture des établissements, interdiction de faire
appel public à l'épargne, confiscation de la chose.17
Apparemment c’est un vide législatif qui a surement un impact sur la
consistance de l’arsenal juridique de notre royaume et la finalité de la
branche spéciale du droit pénal dont l’abus de confiance appartient.

17 C. Mascala, op.cit. p156.

19
Section 2 : critiques compte aux moyens limitativement
énumérés.

Si on fait un test de compatibilité entre le texte juridique marocain


relative à l’abus de confiance, et le flow du contentieux abordant, on va
sortir tous ensemble de deux remarques : soit que le contentieux et les
manières utilisés dépassent la législation, sinon l’arsenal juridique de
l’abus de confiance est primitif face au développement technologique les
façons de détournement.
A titre d’exemple, d’abus de confiance par internet : Le
développement de la société de l'information et de la communication a
conduit à la généralisation des équipements informatiques dans les
entreprises qui ont pris l'habitude de mettre à la disposition des salariés
un ordinateur et une connexion internet pour leurs activités
professionnelles. Pourtant, beaucoup de salariés utilisent également ces
équipements à des fins personnelles, que ce soit par l'envoi de courriels,
la consultation de sites personnels, ou encore la participation à un blog.
Aussi bien que les atteints probables que le support informatique peut
subir en matière de sécurité informatique.18

Section 3 : critiques relatives aux sanctions

Parmi les notions positives que le législateur marocain a élaborées


concernant la répression de l’abus de confiance, est l’aggravation de la
sanction relativement à des contacts d’ordre commercial tel que le
nantissement. Cependant ça demeure inefficace par rapport à l’arsenal
répressif français : en droit pénal français on parle des sept peines
complémentaires de l'article 314-10 du code pénal français, qui seront
prononcées - une ou plusieurs d'entre elles - si la juridiction de jugement
l'estime nécessaire, et qu’on a déjà traité préalablement à titre comparatif.

18 W. Jeandidier, op.cit. p224.

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En outre, on peut ajouter la sévérité des peins à titre comparatif
entre le législateur marocain et le législateur français. A titre d’exemple, la
peine peut être de dix ans d’emprisonnement et une amende de
1.500.000 euros. Alors qu’au Maroc l’emprisonnement ne peut dépasser
six ans avec un plan d’amende de 100.000 dirhams.

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