Vous êtes sur la page 1sur 1

Ce livre a paru en 1974.

Le lecteur qui le découvre aujourd'hui trouvera dans la préface


rédigée alors l'explication des circonstances qui m'ont amené à le publier. Mais sans doute
aura-t-il besoin de restituer ces circonstances elles-mêmes est d'abord l'angle théorique et
politique que représentaient alors le nom et les textes de Louis Althusser. Ce dernier est
aujourd'hui une figure parmi d'autres dans la courte histoire du paradigme structuraliste ou
dans la longue histoire des théories marxistes au XXe siècle, et l'on peut le confronter
paisiblement à tel ou tel autre représentant de ces deux traditions, en prenant en compte
l'ensemble de ses publications. De telles évaluations ont certes le mérite de produire des
appréciations globales et équilibrées sur le développement des penseurs et de leur travail.
Mais elles conduisent aisément à oublier la dynamique propre le contexte intellectuel et
politique dans lesquelles leur pensée s'est formée et a fait effet. Mon livre était, à l'inverse,
une intervention qui s'attachait à mesurer l'effet d'une pensée dans une séquence historique et
politique bien précise. Les figures d'Althusser, de Sartre ou de Foucault, voire, sur les marges
celle de Deleuze, Guattari ou Lyotard y apparaissent dans la lumière où les événements de
1968 et les mouvements et conflits de l'après mai leurs pensées et leurs actes. Le lecteur qui
associe le nom d'Althusser à une théorie des appareils idéologiques d'État sera surpris de voir
critiquer une théorie althussérienne de l'idéologie où cette notion ne joue pas de rôle. Celui là
inspiré le « matérialisme aléatoire » des écrits tardifs trouvera encore moins son compte dans
un livre écrit au début de 1974. Mais mon propos n'est pas, en rappelant cette date, d'excuser
l'absence de références désormais associées au nom d'Althusser. Et il n'y aurait pas eu de sens
à les inclure dans cette nouvelle édition. Je n'avais en effet pas voulu écrire une monographie
expliquant les idées d'un penseur mais étudier la politique d'une pensée, la manière dont cette
pensée s'empare des signifiants et des enjeux politiques d'un temps et définit elle-même par là
une scène et un temps spécifique d'effectivité politique de la pensée.

Vous aimerez peut-être aussi