Vous êtes sur la page 1sur 4

Retrouver l´Orient perdu, chroniques d'un retour au pays natal.

L´auteur relate le retour d´ Adam à son pays d´origine. Il a été exilé à Paris depuis 25
ans et pendant seize jours il essaie de reprend contact avec ses amis de jeunesse, qui
ont été sépares et dispersés par la guerre, pour y organiser une retrouvaille du « club
des Byzantins ».
Certains sont restés dans leur pays natal, d’autres ont émigré comme Adam, en France,
aux Etats-Unis ou au Brésil.

Dans « Les Désorientés » (2012), Amin Maalouf fait une chronique de l´exile d´une
jeunesse sans futur à son pays d´origine, le Liban, où la guerre a éclaté (1982). Une
guerre qui a amené la destruction du pays mais, plus encore, de la c ohabitation pacifique des
communautés religieuses et idéologiques différentes et le triomphe des identités religieuses.

Ce livre est facile à lire, bien que son niveau de langue est soutenu il n´est pas prétentieux et
son lexique est assez accessible; mais il est difficile à comprendre par son niveau de réflexion
idéologique, rien y reste superficiel. Le titre est déjà un jeu de mots, nous parle d´une
génération désorientée, mais aussi d´une génération qui a perdu son Orient, et ne seulement
parce elle l´a du quitter «pour garder les mains propres », mais encore parce que son Orient
(son « Levant ») a été transformé.

La description des paysages et des personnages est superbe et tellement subjective que à
travers de celles-ci, l´auteur nous montre ses sentiments : l´amour à ses amis, la rancune au
traître contre les idéaux qui ont partagé pendant sa jeunesse, la force qui lui donne la nature de
son pays natale, la nostalgie de la patrie, de l´amitié et de la jeunesse perdues et surtout la
nostalgie pour la disparition de toute une civilisation, la civilisation levantine, qui est défini par
Amin Maalouf comme « l’art de vivre ensemble avec d’autres communautés que la sienne », et
qui a disparu à cause d´une guerre d´ identités religieuses, d´ « identités meurtriers ».

L´auteur aborde des nombreux thèmes: sociologiques, philosophiques, politiques et humains.


Mais ce que à mon avis est le plus intéressant c´est son réflexion sur la guerre de
civilisations, une guerre qui a été capable de détruire presque tout de telle sorte « qui a
bouleversé » la vie de cette jeunesse et qui a « empêché L´Occident et l´Islam de se
réconcilier », au point de déclenché « une phase de régression morale plutôt que de progrès».
Et surtout son réflexion sur l´importance de la culture au point de considérer la culture l´ unique
capable « tisser des liens et de combler les fossés» entre les civilisations.

Bref, à mon avis, l´œuvre d´Amin Maalouf n´est pas seulement un roman mais aussi un essai
sociologique et historique qui a été très bien construite et que je conseille de la lire.

Le narrateur et personnage principal, historien

La nostalgie de la patrie perdue traverse le livre de Amin Maalouf. Elle réunit les amis du « club
des Byzantins » dont les rêves et les idéaux ont été brisés par la guerre. Cette génération
désenchantée a cru à une « exception libanaise », une « civilisation levantine » définie par Amin
Maalouf comme « l’art de vivre ensemble avec d’autres communautés que la sienne »

Cela fait vingt-cinq ans qu’Adam n’est pas retourné dans son pays natal. Vingt-cinq ans qu’il vit à Paris, où
il est un historien reconnu.

Une nuit, il est réveillé par la sonnerie du téléphone. L’appel vient du pays où il est né et où il a grandi.
L’un de ses plus proches amis de jeunesse est à l’agonie. Il s’appelle Mourad, et avant de mourir, il
voudrait revoir Adam, avec lequel il est brouillé depuis toutes ces années.

Alors, sans réfléchir, Adam prend le premier avion. Après des décennies d’absence, le revoici au pays de
ses origines, un pays d’Orient aux montagnes couleur de lait. Ce grand intellectuel qui avait choisi l’exil
retrouve soudain les lieux et les gens qu’il avait quittés sans se retourner. Peu à peu, le passé refait
surface. Adam se souvient de Naïm, de Bilal, d’Albert et de Ramez, il se souvient des nuits passées à
débattre passionnément, il se souvient de la guerre.

Il s’installe chez la belle Sémiramis, et soudain, c’est l’heure du bilan. Que sont-ils tous devenus ? De
l’islamiste « fréquentable » à l’ingénieur devenu moine, du magnat des affaires au politicien véreux, les
amis de jeunesse ont suivi des voies différentes, et certains d’entre eux ont à présent les mains sales.
Que faut-il préférer ? La pureté de l’exil ou l’engagement qui corrompt ? Le courage n’est pas toujours là
où l’on croit…

L’amour et l’amitié, les idéaux et les compromissions, la politique, le désir, la trahison, c’est à tout cela
qu’Adam se confronte au cours de ce voyage, avant de rencontrer son destin…

Un quart de siècle plus tard, un homme retrouve le pays qui l'a


vu naître. Il tente de reconstituer sa bande d'amis. Une
chimère ?

Il y a des romans qui continuent de résonner fort en vous longtemps après que vous les
ayez fermé. Les Désorientésd'Amin Maalouf est de ces livres-là. On garde à l'esprit
des phrases entières - «De la disparition du passé, on se console facilement ; c'est de la
disparition de l'avenir qu'on ne se remet pas.» Ou encore: «Le pays dont l'absence
m'attriste et m'obsède, ce n'est pas celui que j'ai connu dans ma jeunesse, c'est celui dont
j'ai rêvé, et qui n'a jamais pu voir le jour.» Adam est le personnage principal de
ces Désorientés, il est exilé à Paris depuis un quart de siècle et reçoit un appel
téléphonique provenant de son pays natal. C'est la femme de son meilleur ami d'enfance
qui lui parle: «Ton ami va mourir. Il demande à te voir.» Il hésite, prend l'avion, et
lorsqu'il pose les pieds sur le sol, il apprend que l'ami vient de mourir. Il finit par rester
seize jours dans le pays qui l'a vu naître. Ce sont ces jours qu'Amin Maalouf raconte.
Dans les 520 pages du roman, le mot Liban n'est jamais prononcé, ni Beyrouth, car là
n'est pas l'essentiel, et c'est l'universalité de ces destins qui prédomine. Les
Désorientés, superbe titre, est un projet de vaste ampleur - brosser le portrait d'une
génération de désenchantés. Depuis Léon l'Africain ou Le Rocher de Tanios(prix
Goncourt 1993) ou ses essais Les Identités meurtrièresou Le Dérèglement du
monde, on savait Amin Maalouf habitué à mener ce genre de projet en grand conteur.
Adam lui ressemble sans doute un peu.

Le droit de partir
Pour ne pas perdre ses souvenirs, il tient un cahier, la chronique de ce retour au pays
natal, l'homme tente de reconstituer la bande qui s'est disloquée dans le monde entier et
dans certaines dérives - dire qu'ils se surnommaient «Les Byzantins»!- et finit par
constater les dégâts de l'Histoire: «Nous étions des Camusiens, des Sartriens, des
Voltairiens… Nous sommes devenus des chrétiens, des musulmans, des Juifs…» C'est
de ses amis, de son pays qu'Adam reçoit les remarques les plus acerbes - la lettre de
Tania n'est pas tendre. Les autres semblent lui dire qu'on ne quitte pas son pays, ses
racines impunément ni sans décevoir. Jalousie? Envie pour ceux qui sont restés de faire
la même chose que celui qui est parti? Les uns parlent d'abandon, les autres vont jusqu'à
évoquer la trahison, comme si partir c'était rejoindre un ennemi. Il y a tout cela dans ce
roman, et beaucoup d'autres choses. Adam, qu'il échoue dans son pays d'accueil ou qu'il
réussisse (c'est pire), n'aura jamais la considération des siens. Il est devenu étranger
partout, et pourtant ne dit-il pas: «Tout homme a le droit de partir, c'est son pays qui
doit le persuader de rester» ?
On a envie de parler de tous ces amis qui sont autant de destins, on retiendra un
personnage inoubliable: Sémiramis, celle qui a décidé de rester et qui accueille Adam
dans son hôtel: malgré le temps qui a passé, elle est restée belle, elle est restée libre. On
voudrait tellement qu'elle soit vraie.
Les Désorientés d’Amin Maalouf relate les seize journées de retour au pays de Adam,
exilé à Paris depuis 25 ans. Il revient à la demande de Mourad, un ami de jeunesse, perdu
de vue et avec qui il s’est disputé, qui l’appelle depuis son lit de mort. Son retour dans
un Liban qui n’est jamais nommé mais que l’on devine progressivement, est l’occasion
pour cet exilé, ce « dés-orienté » de retrouver l’Orient perdu et regretté.
Il reprend contact avec ses amis de jeunesse : Tania, Albert, Naïm, Sémiramis, Bilal,
Ramez et Ramzi, inséparable « club des Byzantins » dans les années 1970 avant que la
guerre ne les sépare et les disperse.
Certains sont restés dans leur pays natal, d’autres ont émigré comme Adam, en France,
aux Etats-Unis ou au Brésil. « Qu’ont encore en commun l’hôtelière libertine,
l’entrepreneur qui a fait fortune, ou le moine qui s’est retiré du monde pour se consacrer
à la méditation ? Quelques réminiscences partagées, et une nostalgie incurable pour le
monde d’avant ».
Chaque Libanais peut trouver dans cette fresque humaine et historique des années
d’avant-guerre, de guerre et d’après-guerre, une part de lui-même ou de son histoire
familiale. A travers les histoires des membres de l’ancien « club des Byzantins » aux
idéaux communs transcendant les appartenances communautaires, Amin Maalouf
dresse un portrait nostalgique d’une « civilisation levantine » disparue, sacrifiée sur
l’autel des « identités meurtrières ».
Le narrateur et personnage principal, Adam, tente de réunir à nouveau ses amis
dispersés : une utopie dans un Liban désormais en proie à des déchirements religieux et
communautaires ?
La guerre du Liban et l’exil
Amin Maalouf évoque pour la première fois, même si elle n’est pas directement nommée, la
guerre du Liban. Elle est vécue différemment par les anciens amis de jeunesse du «  club des
Byzantins ». Il y a ceux qui sont partis et ceux qui sont restés. Certains ont émigré à l’étranger
comme Adam : Naïm, juif, est parti au Brésil, Albert a fui aux Etats-Unis. Mourad et Tania sont
restés au Liban, Mourad s’est « sali les mains » dans la guerre et est devenu ministre. Bilal est
mort aux premiers jours d’un combat qu’il voulait engagement littéraire et intellectuel. Les choix
des uns et des autres ont provoqué des rancunes et des incompréhensions au sein du groupe
d’amis. La plupart reprochent ainsi à Mourad son engagement dans le conflit, son renoncement
à leurs idéaux de jeunesse, sa participation à la machine de guerre. De son côté Mourad et
Tania reprochent à Adam son départ, sa trahison envers son pays, son abandon, et la lâcheté
de celui qui explique : « Nous avons du nous éloigner du Levant pour garder les mains
propres ».

Adam, la narrateur et personnage central du roman, est un exilé. Il se veut détaché d’un pays
qu’il évoque de manière détournée, détaché de l’Orient, « dés-orienté ». Il justifie son exil en
affirmant appartenir au monde et non à un pays : « Naître c’est venir au monde, pas dans tel ou
tel pays, pas dans telle ou telle maison ». Ce pays jamais nommé, « comme s’il s’estompait,
perdu au loin dans le souvenir » est « pourtant obsédant, sans cesse réveillé par la nostalgie ou
le remords » [1]. Par le biais de son réseau de personnages éparpillés à travers le monde, Amin
Maalouf décrit les sentiments et les pensées suscités par l’émigration et l’exil. Il questionne
l’appartenance à un pays et la « citoyenneté du monde ». 
Adam et ses amis n’appartiennent plus à leur patrie natale, mais à une « patrie
intérieure » [2] aujourd’hui disparue : le Liban des années 1970 où leurs idéaux de jeunesse
étaient encore possibles et qui a été sacrifié par la guerre : « Moi je ne suis allé nulle part, c’est
le pays qui est parti », « tout homme a le droit de partir, c’est son pays qui doit le persuader de
rester ». Le thème de l’exil, central au Liban qui compte une diaspora d’environ 10 millions de
personnes, est également au coeur de l’ouvrage de Amin Maalouf.
Le modèle libanais
La nostalgie de la patrie perdue traverse le livre de Amin Maalouf. Elle réunit les amis du «  club
des Byzantins » dont les rêves et les idéaux ont été brisés par la guerre. Cette génération
désenchantée a cru à une « exception libanaise », une « civilisation levantine » définie par Amin
Maalouf comme « l’art de vivre ensemble avec d’autres communautés que la sienne » mais
dont la guerre a signé l’arrêt. Il évoque « la gigantesque, la retentissante débâcle historique de
la civilisation qui est la nôtre ».
Cette civilisation levantine est sacrifiée sur l’autel du religieux décrit par Amin Maalouf par le
biais du personnage de Nidal, islamiste intégriste « fréquentable », et de Ramzi, entrepreneur
enrichi devenu le moine frère Basile sur le tard. L’auteur met également en exergue la
prégnance des appartenances communautaires dans le Liban de la guerre et de l’après-guerre :
« Nous nous proclamions voltairiens, camusiens, sartriens, nietzschéens ou surréalistes ».
Mais, avec la guerre, « nous sommes devenus chrétiens, musulmans ou juifs, suivant des
dénominations précises, un martyrologe abondant, et les pieuses détestations qui vont avec. ».
La guerre a ainsi renvoyé les humanistes du « club des Byzantins » à ce que Amin Maalouf
appelle leurs « identités meurtrières » [3]. Progressivement, le narrateur questionne la réalité
même de ce Liban disparu : « Ce Liban dont l’absence m’attriste et m’obsède, ce n’est pas celui
que j’ai connu dans ma jeunesse, c’est celui dont j’ai rêvé, et qui n’a jamais pu voir le jour ».
Essai politique : le conflit israélo-arabe, la modernité, l’occident
Les Désorientés aborde également des thèmes politiques tels que le conflit israélo-arabe ou le
radicalisme islamique.
Pour Adam, les effets du conflit israélo-arabe dépassent sa génération, son pays et sa région
natale. C’est une « tragédie » par laquelle « l’humanité est entrée dans une phase de
régression morale, plutôt que de progrès » : « C’est ce conflit plus que tout autre qui empêche
le monde arabe de s’améliorer, c’est lui qui empêche l’Occident et l’Islam de se réconcilier, c’est
lui qui tire l’humanité contemporaine vers l’arrière, vers les crispations identitaires, vers le
fanatisme religieux, vers ce qu’on appelle de nos jours « l’affrontement des civilisations ». Il
explique cela par le fait qu’un écart s’est créé et se creuse encore entre la perception du monde
partagée par l’occident et celle des Arabes. En effet, la succession de débâcles arabes face à
Israël « a progressivement déséquilibré le monde arabe puis l’ensemble du monde musulman
(…). Tous les Arabes portent les traces d’un traumatisme profond. » Mais, depuis sa rive
d’adoption, la rive européenne, Adam constate que ce « traumatisme arabe » ne suscite que
« l’incompréhension et la suspicion ». Cet écart a commencé à se creuser au lendemain de la
Deuxième Guerre mondiale alors que l’Occident découvre « l’horreur des camps, l’horreur de
l’antisémitisme, alors qu’aux yeux des Arabes, les Juifs n’apparaissaient nullement comme des
civils désarmés, humiliés, décharnés mais comme une armée d’invasion, bien équipée, bien
organisée. Et au cours des décennies suivantes, la différence de perception n’a fait que
s’accentuer ». Ainsi, « le conflit avec Israël a déconnecté les Arabes de la conscience du
monde, ou tout du moins de la conscience de l’Occident, ce qui revient à peu près au même ».
Le narrateur et personnage principal, historien, porte également un regard sur l’islamisme
radical notamment par le biais de son dialogue avec Nidal, frère de l’un de ses anciens amis
proches mort au début de la guerre, qui s’est tourné vers l’extrémisme islamique et « porte la
barbe ». Il développe l’idée selon laquelle si le communisme et l’anti-communisme ont été les
deux fléaux du XXème siècle, l’islamisme et l’anti-islamisme sont ceux de ce début de XXIème
siècle : « notre époque est marquée par deux calamités majeures : l’islamisme et l’anti-
islamisme radical », signes de la déconnexion opérée entre le monde arabe et l’Occident. Face
à ce fossé, Amin Maalouf affirme que « plus que jamais on a besoin de fiction, parce qu’on a
besoin d’imaginer un monde différent, on a besoin de sortir du monde tel qu’il est pour imaginer
ce qu’il pourrait être demain, ce qu’il devrait être demain. Et ça c’est la littérature qui peut
l’imaginer. Je suis persuadé que nous sommes à une époque où les problèmes sont
profondément culturels. Ce qui sépare les gens, ce qui cause le plus de conflits, c’est les fossés
culturels qui existent dans le monde aujourd’hui. Je pense que c’est dans et par la culture qu’on
peut résoudre ce problème. La politique arrive à ses limites, l’économie arrive à ses limites, là
où on a besoin de tisser des liens, de combler les fossés, c’est d’abord dans le domaine de la
culture » [4].
Les Désorientés aborde de nombreux thèmes : philosophiques, politiques et humains. L’auteur
interroge notamment la réalité et la possibilité du « modèle libanais » de coexistence entre
différentes communautés et traite ainsi d’un sujet aujourd’hui brûlant au Liban alors que la crise
syrienne contamine le pays sous la forme de tensions inter-communautaires, notamment entre
sunnites et chiites.

Vous aimerez peut-être aussi