Causes et conséquences de la migration africaine, la fragilité des pays de départ est plurielle. Pour y remédier, une nouvelle dynamique entre l’Europe et l’Afrique s’impose, mais suffira-t-elle à mettre un terme au diktat de l’Europe sur les politiques migratoires ?
Cheick Tidiane Wade, chercheur
En fait, l’Afrique subit toujours le diktat de l’Europe, suite au manque de moyens financiers et matériels. Mais nous avons un personnel qualifié pour élaborer ces politiques migratoires. Mais pour faire ces politiques et aussi décliner en termes de projets ce qui est identifié à l’intérieur de ces politiques et les mettre en œuvre sur le terrain, il faut des moyens. Il faut aussi un cadre de gouvernance approprié, pas au niveau pays, mais au niveau sous régional.
Daniel Oulaï, directeur général Grainothèque
Mais l’Afrique subit le diktat de l’Europe parce que quand quelqu’un te donne toujours de l’argent, il est obligé de te dicter comment est-ce que tu dois gérer son argent. Aujourd’hui, je pense qu’il est temps qu’effectivement l’Afrique ait ses propres ressources pour gérer ces questions migratoires, donc liées à la mobilité de sa jeunesse. Il est temps que l’Afrique aujourd’hui puisse utiliser ses ressources propres, mais aussi ses compétences locales pour faire face à ces défis qui sont les défis propres à l’Afrique et qui doivent être résolus par les Africains.
Ludovic Beugre, étudiant
L’Afrique subit toujours le diktat de la part de l’Occident pour diverses raisons, parce qu’on part d’abord sur le fait des élections. Les élections ont vraiment… Les Européens, les Occidentaux ont vraiment un impact très considérable dans tout ce qui est choix des politiques, choix des présidents africains. C’est ce qui explique, c’est ce qui expliquerait peut- être le fait que l’Occident a considérablement un impact sur la politique migratoire en Afrique. Abdel Nasser Ethmane, fonctionnaire UA L’Afrique ne subit pas le diktat de l’Europe. C’est une idée reçue. Si nous imaginions seulement le fait inverse de populations qui viennent en masse émigrer en Afrique venant d’Europe, vous imaginez la réaction des Africains qui seraient confrontés à un sentiment d’invasion et qui seraient dans le réflexe de l’auto-défense! Donc on ne peut pas blâmer les Européens de vouloir demander aux Africains de mieux réguler et de les aider à contenir cette vague. Et je dirais, soit dit en passant sur ce sujet, que nous n’en sommes qu’aux prémices. Il y a quelque chose qui est [1] plus profond qui arrive pour des causes endogènes à l’Afrique. [Des réponses régionales]
Cheick Tidiane Wade, chercheur
Je pense qu’il faut partir de l’existant. Il faut partir de l’existant. Il y a la CEDEAO[2], ce que la BAD[3] est en train de faire, partir de ces deux types, voir aussi au niveau des grands bassins migratoires quelles sont les opportunités de développement et construire avec ça. Dans le domaine de l’agriculture, dans le domaine de l’élevage, dans le domaine de la pêche, et dans beaucoup d’autres secteurs. Parce qu’on sait que le secteur primaire marche très fort en Afrique, donc il faudrait vraiment construire avec ce secteur-là.
Daniel Oulaï, directeur général Grainothèque
Pour ma part, aujourd’hui, il est question de, de donner des outils à la jeunesse, à la jeune génération, pour résoudre et régler considérablement la question de pauvreté, surtout en zone rurale, mais aussi créer des opportunités pour les jeunes sur le continent. De plus en plus, l’idée, pour comprendre cette question, il faut savoir pourquoi est-ce que les jeunes partent. Les jeunes partent de l’Afrique, les jeunes partent de nos zones rurales parce que nos zones ne sont plus aujourd’hui capables d’offrir aux jeunes ces opportunités pour se prendre en charge et de vivre décemment. Et c’est ce qu’ils vont chercher. Les jeunes ne partent pas parce qu’ils ne sont pas courageux, les jeunes ne partent pas parce qu’ils ne sont pas suffisamment intelligents, mais ils partent parce que leurs efforts ne payent pas. Et surtout dans le secteur agricole que je connais le mieux, c’est aujourd’hui un cercle vicieux qu’il faut repenser pour permettre à ces jeunes d’avoir des opportunités et de pouvoir vivre décemment de leurs activités en Afrique, sur leurs territoires. Ludovic Beugre, étudiant Oui, c’est une politique commune, en passant par la CEDEAO, par l’UEMOA[4] et aussi par les institutions financières régionales telles que la BAD.
Abdel Nasser Ethmane, fonctionnaire UA
Les solutions régionales pour gérer la migration en Afrique sont largement dépassées, puisque le problème est tellement profond et structurel et qu’il est lié à la démographie – un sujet qui est encore tabou – qu’il est lié au climat, que seule une approche continentale serait pertinente. Et pour ce faire, il faudrait que l’Union africaine réunisse un nouveau Sommet qui s’occuperait exclusivement des questions de population et d’environnement. Ce Sommet n’est pas encore arrivé, et l’idée n’a pas encore germé.
[1] On pourrait dire aussi « quelque chose de plus profond »
[2] la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest [3] la Banque africaine de développement [4] l’Union économique et monétaire ouest-africaine