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montrer que l’hystérie est influençable 

: qu’on peut provoquer des convulsions et en enlever. Pour cela il suffit de


recourir à l’hypnose, et sous l’hypnose de donner des ordres. Le sujet est à ce moment dans un état d’hypovigiliance
et donc de réceptibilité plus grande aux ordres du médecin. Il peut alors montrer des symptômes spectaculaires.
Possibilité de faire retomber le comportement hystérique sous hypnose. L’hystérique semble se comporter comme
ça à son insu, sans le savoir : état second dans l’hypnose. Charcot restait convaincu qu’il devait y avoir une cause
organique dans l’hystérie. D’autres médecins utilisent l’hypnose à des fins thérapeutiques (école de Nancy par
exemple : Bernein, etc.). C’est de l’école de Nancy que Breuer s’inspire quand il traite Anna O. Il échange beaucoup
avec Freud à ce sujet, ce qui amènera Freud à aller lui-même vers la fin de ses études de médecine à aller à Paris
chez Charcot, pour en savoir plus sur l’hystérie et l’hypnose.

Dans les moments d’hypnose Anna se mettait à divaguer et à raconter des histoires un peu bizarres, pas toujours
compréhensibles. Freud s’inspire de ce qu’elle dit dans cette espèce de demi-sommeil pour choisir les suggestions
qu’il va lui faire : les suggestions qui vont venir contrecarrer les fantasmagories d’Anna. Anna parlera elle-même de
cette expérience en disant que c’était sa cure de parole. Breuer parvient à améliorer la situation d’Anna, notamment
autour d’un symptôme très spectaculaire : un jour dans son sommeil hypnotique elle raconte une histoire qui l’avait
beaucoup bouleversée. Elle avait demandé à sa gouvernante de boire de l’eau, et la gouvernante lui tend de l’eau
dans laquelle le chien venait de boire, ce qui l’a profondément dégoûtée. Elle raconte ce souvenir et demande à
Breuer un verre d’eau, et elle se réveille avec un verre d’eau à la main : et elle établit un rapport entre son souvenir
et l’ici et maintenant. Le souvenir traumatique qui refait surface. Dans l’évolution de ce traitement à un moment
donné, et c’est ce qui a provoqué l’interruption du traitement de Breuer, elle est venue lui dire qu’elle était enceinte
de lui : c’était trop pour Breuer. Il était en train de faire l’expérience de ce qu’on appellera plus tard le transfert. Il
s’est dit qu’elle était folle. Freud se dit qu’on ne peut pas en rester là : il y a un phénomène qui fait partie de la
maladie et il faudra revenir dessus. Le cas d’Anna est pour Freud plein d’enseignements. Puis cela reste dans l’esprit
de Freud, cela chemine.

Quelques années après Freud va chez Charcot pour en savoir plus sur l’hystérie et l’hypnose. A Paris se passe une
chose importante du point de vue scientifique : Charcot lui demande d’écrire un article dans lequel on compare les
paralysies d’origine organique et celles d’origine hystérique. Ce texte ne paraitra qu’en 1893 (écrit en 85). Freud part
du savoir médical, il dit « nous connaissons deux grands types de paralysies organiques : soit une atteinte de la
moelle épinière, soit une atteinte cérébrale (corticale) et ça provoque d’autres types de paralysies. Ces paralysies
sont très contrastées dans leur manifestation et un bon neurologue ne les confond pas. Les paralysies périphériques
sont bien circonscrites (exemple de la poliomyélite). » La paralysie d’origine cérébrale est toujours diffuse et tend
vers l’hémiplégie. Lorsqu’un AVC survient suite à un choc, si le traumatisme est important on aura une paralysie qui
va s’étendre jusqu’à donner une hémiplégie. Si c’est un micro traumatisme les séquelles vont être réduites. Pour les
paralysies hystériques, Freud « je constate que les paralysies dans l’hystérie mélangent ». Par exemple on rencontre
une paralysie du bras dans l’hystérie : de l’épaule aux doigts. S’il s’agissait d’une paralysie cérébrale on devrait
trouver des séquelles au niveau de la face, mais non, seulement le bras est paralysé : c’est circonscrit. Ca contrevient
à ce que la neurologie enseigne : on a des paralysies très intenses et néanmoins délimitées : ce n’est pas normal.
Exemple : Freud parle de la cécité. On peut rencontrer dans l’hystérie des cécités  : ne plus voir, ou d’une manière
extrêmement brouillée. On connait des cécités d’origine organique, neurologique, l’une d’elle est intéressante et
due à la particularité du système nerveux. Décussation pyramidale : une partie des fibres nerveuses passent dans
l’autre hémisphère, et une partie reste dans le même hémisphère : division donc. Si vous avez une atteinte au niveau
du chiasma optique : une cécité, mais qui va produire comme symptôme la perte d’un hémi champ visuel. Or ce
symptôme ne se produit jamais dans l’hystérie. Conclusion donc pour Freud : l’hystérie dans ses troubles pseudo-
neurologique se comporte comme si elle ignorait l’anatomie. Le corps qui est en cause dans l’hystérie n’est pas le
corps anatomique mais un autre corps. C’est la conclusion à laquelle on aboutit par un raisonnement médical, d’un
neurologue.

Freud à ce moment là marche sur des œufs. Charcot disait de l’hystérie que c’était une lésion, mais pas comme les
autres, une lésion dynamique : qui se produit et peut disparaitre. Comme une hypotrophie momentanée du cerveau.
Freud dit « admettons une lésion dynamique », mais elle a beau être dynamique, elle ne correspond pas à la
structure du système neuro-anatomique. Freud dit dans cet article qu’il faut rompre avec une lecture neurologique,
et qu’il faut passer dans un autre registre pour comprendre. Et il dit que ce n’est que par la psychologie qu’on peut
comprendre. Il prend des exemples pour suggérer dans quelle direction on peut chercher à comprendre ce qu’il se
passe. Il prend des exemples dans la vie sociale : au moyen âge le roi était réputé pour soigner les manants en les
touchant. Le roi touchait une personne, et celle-ci disait qu’elle ne se laverait plus : pour ne pas perdre la vertu
thérapeutique. Exemple du verre qu’on casse au mariage avec le toast. Il y a une telle charge affective dans ces
situations là qu’on voudrait qu’elles restent telles quelles, qu’elles s’éternisent. Fixer une situation bénéfique. Mais
pourquoi ne pourrait pas se fixer une situation maléfique dit Freud ? Un choc émotionnel n’est pas nécessairement
positif, il pourrait être négatif, et il se pourrait que le sujet reste collé à ce choc émotionnel. Est-ce qu’il n’y a pas des
traumatismes psychiques qui ont une telle puissance d’attraction que le sujet le fixe  ? Est-ce qu’il n’y a pas une
surcharge affective qui enracine le corps dans une certaine disposition ? Ce n’est pas le corps de neuro-anatomie,
mais un corps tel que le sujet se le représente spontanément : c’est le corps qu’il met en œuvre tous les jours. Corps
vécu vs corps anatomique. Nous comprenons mieux pourquoi sous la violence de certains chocs émotifs, quelqu’un
comme Anna O peut soustraire des évènements vécu à son image du moi.

Imaginons un des interprètes d’un groupe malade, qui maintient sa prestation. Tout va bien et à un moment donné il
fait une faute, le doigt glisse sur le clavier, fausse note, etc. Imaginons que cet interprète ait une propension à
l’hystérie, il se peut très bien que dans les concerts à venir il ressente une douleur dans le poignet, dans les doigts,
donc il annule un concert. Mais 6 mois plus tard, un an plus tard, l’interprète se trouve dans l’impossibilité d’assumer
sa prestation. Passe des examens médicaux : rien. Le choc émotionnel ne se voit pas au scanner. C’est quelque chose
qui a peut-être été aussitôt étouffé par le sujet : symptôme hystérique qui s’installe, et ce d’une manière
inconsciente. Le sujet n’a pas réalisé que là il était en train de refouler, de mettre de côté, un désagrément que le
touchait. Mais il va en subir les effets. On voit bien que le corps en jeu n’est pas anatomique : c’est le sujet qui est en
jeu, c’est l’image de soi. La représentation que nous avons de nous-même comporte notre silhouette. Forme
d’amputation psychique : vous coupez dans la représentation que vous avez de vous un secteur dont vous ne voulez
plus avoir apparaitre la manifestation, quitte à ce que dans cette coupure soient emportées les activités trop
attachées à ce secteur. La psychanalyse est née de tout cela.

On considère que les études sur l’hystérie forment le premier ouvrage sur la psychanalyse. Les positions de Breuer et
Freud ne sont pas tout à fait sur la même ligne. Breuer pense que ce qui se passe dans l’hystérie est une défaillance
de la synthèse mentale, le sujet tombe dans un état hypnoïde, et des évènements peuvent se produire qui
affaiblissent le sujet : pour Breuer l’hystérie est une faiblesse psychique. Lorsque l’hystérique est dans cette espèce
d’autohypnose il est plus fragile face aux évènements et subit leur impact de façon plus forte. Ce sera aussi la théorie
de Pierre Jamet. Sujet amoindri, plus faible. Freud va dire, et c’est une démarcation, que dans l’hystérie la défense
est trop forte. Et c’est pour cela que l’hystérique parvient à tenir à l’écart une représentation traumatique, une
représentation qui vient blesser son image de soi. Ce n’est pas une faiblesse mentale mais au contraire une force
psychique mal employée. C’est une force qui s’accompagne d’une grande sensibilité. Il y quand même un impact.
Mais est-ce qu’être sensible est une faiblesse ? Ca peut être aussi une richesse. Mais quand cette sensibilité
s’accouple avec un mécanisme de défense, un refoulement capable de tenir à l’écart une représentation qu’on juge
désagréable, on peut alors devenir victime d’un symptôme hystérique. Cette théorie du refoulement suite à un choc
affectif, Freud va l’élargir et comprendre qu’il s’agit de ça aussi dans d’autres manifestations : névroses, phobies.
Symptomatologie différente de l’hystérie. Les phobiques n’ont pas des paralysies ou des anesthésies mais ils ont
peur de certains objets dont ils évitent à tout prix la rencontre : ils mettent leur angoisse dans un objet, et tant qu’ils
ne le rencontrent pas ça marche. Pour comprendre tout cela Freud va pouvoir s’armer de quelques concepts qu’il
aura forgés grâce à l’hystérie. A travers la petite lunette de l’hystérie, Freud découvre un nouveau monde.

La psychanalyse est née dans le berceau de l’hystérie. Au départ on disait de l’hystérie qu’elle était une maladie
gynécologique. On pensait que c’était spécifiquement féminin. Conception de la médecine liée avant à une
atmosphère religieuse, sacrée (grecs – égyptiens) : la thérapeutique va essayer de coller aux manifestations
symptomatiques. Si on avait mal au foie c’est que la matrice remontait vers là, etc. On pensait qu’en fonction des
pérégrinations de la matrice cela produisait des symptômes. On faisait respirer des parfums à la malade, dans un
contexte sacré. Par exemple brûler des statuettes sacrées. Toujours pris dans une symbolique. Non pas une atteinte
physique de la matrice, mais c’est la matrice en tant qu’elle est le lieu, le vecteur du désir sexuel, de la reproduction.
Tout ça vient dans un contexte socio-culturel. Au début de notre ère le contexte socio-culturel change radicalement,
avec la chute de l’empire romain, et le christianisme qui devient sous Constantin une religion d’état, de l’empire
romain. Essor du christianisme et de l’idéologie chrétienne qui s’impose dans l’Europe et le bassin méditerranéen.
« Le royaume – Emmanuel Carrère ». Cette petite secte dissidente juive a donné naissance à la chrétienté. Et dans
l’idéologie chrétienne on attendait la fin du monde, le retour du Christ, et ça ne venait pas, et il a fallu allonger le
terme de la parousie. Dans ce contexte là, puisque cette idéologie chrétienne avec tout ce qu’elle charrie, dans ce
climat, on se dit qu’il y en a pour plus longtemps qu’on ne le pensait (avant que la parousie arrive). Comme la
religion se répand, il devient important de la codifier. Trier les évangiles, dans les sources, faire un travail d’historien.
Et quelle est la théologie qu’on peut dégager des évangiles. On voit apparaitre alors les premiers théologiens,
notamment Saint Augustin. Il établit sa doctrine. C’est quelqu’un qui dans son histoire personnelle a été influencé
par de doctrines très dualistes. Dans ce contexte là, les maladies, psychiques plus particulièrement, sont attribuées à
une faute morale. C’est parce que l’homme est dans le pécher, c’est parce qu’il refuse le salut qu’il y a le mal,
physique et moral. L’hystérie en fait partie. C’est une possession diabolique. Elle se prête bien à cette idée de la
possession par des esprits mauvais. Et cela va trainer pendant tout le Moyen âge. Plusieurs siècles où l’idéologie
chrétienne dans l’essentiel n’a que peu bouger. Et cette idée de la maladie va perdurer, jusque dans les années 1400.
Cela va entrainer des procédures dramatiques : sorcières sur le bucher. On les supposait posséder par le diable et
être une menace pour l’ordre social. Ordre extrêmement patriarcale à l’époque. Le féminin d’une façon générale
apparaissait comme dangereux. A la Renaissance se passe quelque chose d’important, le monde «  craque ». On
change. Beaucoup de choses viennent converger. L’essor des villes et du commerce, création d’entités nouvelles. Le
monde du Moyen Age était terrien, agricole. Il n’y avait pas des concentrations de grandes cités commerçantes
qu’on voit apparaitre à la fin du Moyen Age. Le pouvoir des villes vient contester le pouvoir royal traditionnel, c’est
un élément de changement très important. Découverte aussi du nouveau monde, Christophe Colomb. Début des
colonisations, du commerce triangulaire, de la christianisation. Le pouvoir change de mains. C’est aussi le début des
contestations critiques. La science au sens moderne est en train d’émerger : Galilée, etc. Galilée donne un choc aux
représentations que nous nous faisions du monde. Voilà qu’un astrophysicien vient nous raconter que c’est nous qui
sommes en train de voyager dans l’univers, que l’on tourne autour d’une planète plus importante que nous  : tout ça
vient contredire le savoir des sciences de l’antiquité. Mais surtout le savoir des saintes écritures. Dans la Bible on
nous dit que Josué veut faire le siège de Jéricho, et qu’il dit « stop » au soleil et que celui-ci s’arrête : si Galilée vient
raconter que tout ça ne tient pas la route, que c’est pas le soleil qui tourne autour de nous. Si on commence à
désacraliser, où va-t-on s’arrêter ? L’autorité de l’Eglise tombe progressivement en morceaux. Le mouvement
d’émancipation qui inaugure la science moderne est inarrêtable. Par exemple De Vinci qui a ouvert des cadavres,
pour voir comment c’était. Ce n’était pas le seul. Vésal a écrit un livre «  De fabrica corporis humani », un des
premiers ouvrages d’anatomie. Varole a aussi pratiqué la dissection. Le savoir se désacralise. Descartes vient
sanctionner ça d’une façon définitive. Descartes commence par le doute hyperbolique, c’est-à-dire le doute radical :
on m’a enseigné des tas de choses, qu’est-ce qui me prouve que c’est vrai ? Mes sens, toucher, voir, sentir, m’ont
déjà trompé plusieurs fois. Descartes nettoie systématiquement toutes les portes traditionnelles du savoir, y compris
la perception des sens. Finalement il lui reste cette simple idée : pour que quelque chose se passe, fût-il que ce
quelque chose soit trompeur, il faut que ce soit porté par un « cogito » : pour qu’il y ait le moindre réel il faut que ça
vienne toucher, impacter, un sujet qui le pense. De là Descartes tire la certitude de son être, de son existence : je
pense, donc je suis « cogito ergo sum ». Il accepte définitivement l’idée qu’on ne peut pas faire confiance à la
tradition, qu’on ne peut pas faire confiance aveuglément à la transmission des savoirs, et même pas confiance
forcément à ses sens. C’est une rupture avec le Moyen Age et l’antiquité. On prenait le savoir dans l’autorité
ecclésiastique et on se basait sur des théologiens éclairés (Saint Thomas d’Aquin), Aristote : relu par les théologiens
chrétiens. Et voilà qu’il arrive dire « La Bible, et même Aristote, ça ne fait plus autorité », et c’est pour ça qu’il faut
aller voir, ouvrir des cadavres, faire des calculs, des mathématiques, de la physique. Un monde absolument nouveau
s’ouvre donc. C’est un monde qui nait, et à certains regards renoue avec des savoirs de l’antiquité. Ce n’est pas
seulement la récupération de la science des grecques, c’est aussi une science nouvelle. La science ancienne était très
spéculative. La science nouvelle se confronte à l’expérience.

Il est évidemment donc que la conception des maladies, de l’hystérie, va en prendre un coup. Quand vous allez voir à
l’intérieur du corps comment c’est fait, vous découvrez des choses. On se précipite vers la découverte la plus récente
en lui attribuant toutes les solutions à nos problèmes. Donc en découvrant les ventricules cérébraux, on a voulu
expliquer l’hystérie. La science, tout en avançant, n’est pas à l’abri de certains errements, certaines illusions, qui
entourent son savoir. Il n’y pas de science pure.

Comment pouvons-nous exercer le savoir ? Il y a deux modes fondamentaux d’intentionnalité. Si nous visons l’objet
avec une volonté scientifique, nous allons chercher à façonner le langage (car la science est un langage, une façon de
dire), de telle sorte qu’il soit le plus univoque possible : qu’il lève les ambiguïtés, on recherche le langage le plus
logique, le plus précis, le plus mathématique. Cette visée scientifique n’est pas un phénomène récent. Elle vient de

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