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UE 1.3.

HISTOIRE ET

ÉPISTEMOLOGIE DE

LA PSYCHOLOGIE
Resp. Thierry Kosinski
Licence 1 – Semestre 1 – Année 2023-2024

« Apports de la psychanalyse à l’étude des maladies mentales »


Enseignante: S. Metidji

Chapitre I. Histoire de la folie, entre philosophie,


médecine et théologie
Chapitre II. Regard épistémologique sur la psychanalyse
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse

Plan général

I. Études sur l’hystérie

II. Lois de l’inconscient

III. Définitions et critiques


Chapitre II. Regard
épistémologique sur la psychanalyse

Brève introduction

Entre les conflits théoriques avec d’un côté, les médecins organicistes
(somatistes ou somaticiens) qui postulent l’origine somatique des maladies mentales,
sans parvenir à la localiser, et de l’autre, les médecins psychistes, qui en donnent une
explication par le pécher commis ou les vices de l’âme, de nouvelles disciplines vont
émerger dans le champ médical à la fin du 19e siècle, notamment la neurologie et la
physiologie, confrontées à une maladie énigmatique, l’Hystérie.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse

I. Études sur l’hystérie

1.1. Sigmund Freud, l’hystérie et l’hypnose

-Né à Freiberg (Autriche), en 1856, ainé d’une famille de 5 sœurs et 2 frères


-Formation de médecin, puis recherches en neurologie et en physiologie

-En 1885, Freud suit l’enseignement de Jean-Martin Charcot, neurologue et chef


de service à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris, dans le cadre d’un stage de 4
mois. Il assiste à la présentations de nombreux cas d’hystéries par J-M. Charcot,
dont la plus célèbre patiente fut Augustine; un film, réalisé par Alice Winocour
(2012) en relate l’histoire https://www.youtube.com/watch?v=bIS9ekzIz9E

-Hypnose: état modifié de conscience par la suggestion.


-La suggestion désigne l’influence de l'hypnotiseur qui induit, par une idée, une
pensée ou un acte chez son patient (ex: vos paupières sont lourdes). C’est un état
de somnolence, associé à des images et des intentions introduites dans les pensées
du sujet, que le sujet croira venir de lui.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
I. Études sur l’hystérie
1.2. Méthode cathartique, prémices de la cure
S. Freud (1856-1939) travaille avec Josef Breuer, un physiologiste, intéressée par
l’hystérie : conflit psychique manifesté par des crises émotionnelles théâtrales, associées à
trouble corporel (paralysie, cécité, mutisme sans lésion organique).
-Anna O, de son vrai nom Bertha Pappenheim est une patiente de Breuer; elle a tout
juste 20 ans et manifeste des symptômes en tous genres : troubles de la vision, paralysie,
hydrophobie, hallucinations visuelles… Sous hypnose, elle fait le récit d’événements du
passé
- de nature traumatique (par ex: le récit du chien de sa nourrice, qu’elle a vu boire dans
un verre, avec dégoût; au réveil de l’hypnose, elle demande un verre d’eau. Breuer pense
que l’hypnose peut libérer les souvenirs enfouis.
Breuer nomme sa technique la « méthode cathartique » (venant du grec "katharsis" qui signifie
purification, purgation, au sens de libération, soulagement). C’est une méthode qui consiste en la
remémoration d’un événement qui a fait choc psychique; la catharsis étant l’évacuation des
tensions internes, qui est ensuite accompagnée d’un soulagement psychique
Freud et Breuer pensent que l’origine de l’hystérie est purement « psychogène » et formule l’hypothèse d’un
événement traumatique dans l’histoire du patient, événement qui a provoqué une émotion pénible. L’origine de l’hystérie
serait liée à ce choc émotionnel, suite à un événement violent que le sujet ne parvient pas à se remémorer. Freud
développe alors sa « théorie de la séduction » en 1895 (Neurotica), selon laquelle à l’origine de toute névrose, il y a un
souvenir traumatique lequel serait de nature sexuelle. Cf « L’invention de la psychanalyse » partie I sur YouTube:
https://www.youtube.com/watch?v=I0jw6tYp0yI
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
I. Études sur l’hystérie
1.3. La réalité psychique dans la théorie du fantasme
En 1897, S. Freud observe et annonce que certains traumatismes ne sont pas liés à des
événements réels mais à des fantasmes, ce qui lui valut l’opposition de ses confrères,
l’accusant de mépriser les patients.
S. Freud abandonne alors la Neurotica (sa théorie de la séduction) pour une nouvelle
théorisation, qu’il nomme la théorie du fantasme ; ce qui compte n’est pas la réalité de
l’événement comme tel, mais la « réalité psychique » du sujet, c’est-à-dire sa perception
personnelle des événements, imprégnée de sa part fantasmatique. La réalité psychique
correspond à sa propre vérité subjective, liée à ses fantasmes.
Dans la névrose, les fantasmes sont qualifiés d’oedipiens (en référence au mythe grec
d’Œdipe) ; le conflit oedipien est une étape du développement psychique libidinal (càd affectif)
chez l’enfant. L’enfant n’est pas sexué psychiquement, sa libido est bisexuelle à l’origine, mais
avec tendance hétérosexuelle ou homosexuelle.
Le complexe d’Œdipe correspond chez l’enfant (vers 4-6 ans) à l’attirance pour le parent
de sexe opposé et rivalité envers le parent de même sexe (ou œdipe dit inversé ou de nature
homosexuelle). L’interdit de l’inceste, posé par les parents, mettra « fin » à ce conflit.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse

I. Études sur l’hystérie


1.4. La relation transféro-contre-transférentielle
1.4.1. Le transfert

La cure analytique est un processus qui retrace l'histoire du patient, à travers un lien
thérapeutique, appelé le transfert. Le transfert est le lieu de la relation soignante où le patient
va rejouer des scénariis anciens avec une figure d’attachement, attachement transféré sur la
personne de son analyste.
« Processus par lequel les désirs inconscients du patient, en lien avec ses attachements
parentaux, vont s'actualiser sur la personne du thérapeute » (Laplanche et Pontalis, 1987).
Le transfert est ambivalent; il comporte des attitudes tendres positives à l'égard de l'analyste,
mais aussi des attitudes agressives négatives.
-1- Le transfert permet le travail de la cure, car grâce au transfert, l'analyste découvre les
affects antérieurs et peut chercher à qui cela s'est adressé autrefois;
-2- mais il peut aussi créer des résistances dans le sens où le transfert empêche le
travail de la cure, si le patient reproduit constamment sa relation d’autrefois avec son
analyste.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse

I. Études sur l’hystérie


1.4.2. Le contre-transfert

Le transfert du patient sur l'analyste appelle en réponse chez l'analyste un contre-transfert. C’est
l’ensemble des réactions inconscientes de l'analyste envers son patient.
Ce transfert de l’analyste sur son patient est qualifié de « contre », non pas au sens d’opposition,
mais au sens de proximité (tout contre le transfert du patient).

L'analyste doit alors, selon Freud, avoir une connaissance suffisante de ses propres motions
inconscientes par son analyse personnelle, pour permettre à la relation thérapeutique d'être à
un bon niveau de communication, et de ne pas se laisser aller à répondre au désir inconscient
du patient (amour, haine…), pour mieux saisir à qui ce désir d’adresse.

Exemples: L’histoire d’amour entre le psychanalyste Karl Gustav Jung et sa patiente Sabina
Spielrein, histoire relatée notamment dans le film Dangerous Method (de David Cronenberg,
2011). https://www.youtube.com/watch?v=7Wy_8R3pkeQ
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
II. Lois de l’inconscient en psychanalyse
2.1. Conceptions freudiennes de l’inconscient
Face à l’impossibilité de saisir l’origine du trouble neurologique de l’hystérique, mais
également des névroses de guerre, Freud propose le terme d'"inconscient" en 1896.
« In- »: négatif, privatif ……………..…« con »: avec …………« scientia » : savoir
Freud reprend le terme d’Incs de deux façons : en tant qu’adjectif pour caractériser les
contenus psychiques non présents dans le champ de la conscience et en tant que nom
commun, pour désigner une "topique" (du grec « topos »), désignant un lieu psychique, hors
de toute localisation cérébrale).
C’est un système psychique qui regroupe les contenus refoulés, rejetés, écartés du système
conscient, car inacceptables du fait de leur nature sexuelle selon Freud (ex: désirs incestueux du
névrosé). L’Incs représente l'ensemble des contenus refoulés, c-à-d les éprouvés dont l'accès a
été refusé dans le système conscient, sous l'action du refoulement, à savoir par la censure.

Freud fait également un usage plus « descriptif » de l’inconscient dans lequel celui-ci
désigne tout ce qui s’oppose à la conscience. « Le Moi n’est pas maître en sa demeure ».

Le refoulement est un mécanisme de défense qui interdit aux représentations inconscientes,


menaçant l’intégrité du moi, de pénétrer dans la conscience. Le retour du refoulé serait à
l’origine des névroses.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
II. Lois de l’inconscient
2.2. L’accès à l’inconscient
Une des patientes de Freud (Fanny Moser) lui reprocha un jour de l'interrompre fréquemment
en séance
Il réalise alors que les questions fréquentes de l’analyste peuvent agir comme une
censure et il développe une nouvelle méthode qui consiste à laisser le patient exprimer ses
pensées librement, telles qu'elles lui viennent à l'esprit, soit à partir d'un mot, d'un chiffre,
d'un rêve..., soit de façon spontanée, pour avoir accès à une part de son inconscient,
permettant la remémoration.
Règle de la Libre association d’idées : « règle fondamentale » de la cure analytique où
l’analysé est invité à dire ce qu’il pense, ce qu’il ressent, tel que cela vient à son esprit, sans
censure, même si ça lui parait inutile ou désagréable (haine, jalousie, honte…).
Y a t-il d’autres voies d’accès à cette part inconsciente? Oui, dit Freud, l’inconscient se dévoile
dans les errements, les lacunes, les « ratés » de la conscience. Les associations libres, mais aussi les actes
manqués (oublis, lapsus…), ainsi que le rêve (activité de symbolisation du psychisme), comme voie
d’accès à l’Inconscient. Dès 1900, il publie « L’interprétation des rêves », rêves saisis comme
accomplissement d’un désir non satisfait dans la réalité.
Freud décrit ainsi deux topiques expliquant selon lui, la complexité du fonctionnement
psychique.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
II. Lois de l’inconscient
2.3. Première topique (1900)
Le fonctionnement psychique se divise en 3 systèmes que sont :
-l’inconscient: lieu des représentations refoulées, des désirs inadmissibles pour la conscience, et
soumis au « principe de plaisir » (qui cherchent la satisfaction immédiate)
-le conscient: reçoit les perceptions de l’intérieur (ressentis) et de l’extérieur (données de
l’environnement) et les traite dans le présent.
-le préconscient: contenu d’éléments inconscients, mais qui restent accessibles au conscient,
sous l’effet d’une première censure, et qui avec l’Incs, participe à la formation des traces
mnésiques et avec le Cs, forme un système d’adaptation immédiate (attention, vigilance,
décision…).
2.4. Deuxième topique (1920)
Le fonctionnement psychique serait aussi composée de 3 instances psychiques que sont:
-le Ça: réservoir des pulsions, ensemble des éléments refoulés, rejetés par le surmoi, qui
entre en conflit avec les deux autres instances.
-Le Surmoi : instance interdictrice constituée de l’intériorisation des interdits parentaux,
agissant comme censeur moral (héritier du complexe d’œdipe), qui répond aux exigences sociales.
-le Moi: gérant les conflits entre les deux autres instances, concilie les revendications du ça
et les exigences du surmoi.
Métaphore freudienne de
l’iceberg
Ce qui apparait au sommet de
l’iceberg (partie émergée),
n’est qu’une part du Moi du
sujet et de ses interdits qui lui
permettent de s’adapter à son
monde environnant. Dans la
partie immergée, on observe
en surface le Préconscient,
puis en profondeur,
l’Inconscient. Le Moi et le
Surmoi sont traversés par une
partie préconsciente et une
partie inconsciente; le Ça est
totalement inconscient.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
III. Fondements et critiques
3.1. Le déterminisme psychique
Il existe un déterminisme inconscient dans notre vie psychique, qui nous pousse à agir et à
penser. Chaque action ou idée que l’on a n’est pas le fruit du hasard, de l’arbitraire, mais
ont un sens inconscient, liée à notre histoire infantile refoulée.
3.2. Deux principes régisseurs du fonctionnement psychique (1900)
-Principe de plaisir : idée émise par le psychologue G. Fechner et reprise par S. Freud
pour décrire l’activité psychique qui sert à éviter le déplaisir (trop grande quantité
d'excitations), et à procurer du plaisir immédiat (réduction de la quantité d'excitations). Les
processus en action sont primaires (ex: chez le petit enfant incapable d’attendre).
-Principe de réalité : principe qui ajourne la satisfaction, en prenant en compte les enjeux
de la réalité. Les processus sont dits secondaires (développement de la capacité à attendre et à
différer son désir chez l’enfant).
Mais de nombreuses critiques lui sont adressées par des médecins psychiatres, au sujet du fait que le
rêve fonctionnerait, pour Freud, selon le principe de plaisir, ce qui n’expliquerait pas le cauchemar de
répétition chez les traumatisés. S. Freud répondra à ses critiques, par un texte intitulé « Au-delà du
principe de plaisir » (1920), dans lequel il reconnait que dans le vécu traumatique, le rêve fonctionne
selon un tout autre principe, la compulsion de répétition, processus dans lequel se rejoue les vécus non
élaborés.
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse

III. Fondements et critiques

3.3. La psychanalyse en trois points

1) Processus d’investigation: démarche ou méthode qui sert à saisir les


significations inconscientes des symptômes derrière la parole et les actes du
sujet.
2) Méthode de traitement: la cure analytique servant à l'interprétation de
l’analyste, comme moyen de compréhension des symptômes, du transfert et du
désir chez le patient.
3) Corpus théorique: ensemble des théories psychologiques et
psychopathologiques acquises par les données « cliniques » (fondées sur des
cas spécifiques de patients) que Freud nomma « Métapsychologie ».
Chapitre II.
Regard épistémologique sur la psychanalyse
III. Définitions et critiques
3.4. Critiques
-La psychanalyse serait une pseudo-science, car pas de preuve expérimentale selon
le professeur de psychiatrie J. A. Hobson.
-Il y a une absence de falsifiabilité selon le philosophe des sciences et
épistémologue K. Popper; la psychanalyse n’est pas réfutable, donc ne peut être
scientifique selon lui.
-Elle est décrite comme une « science de la subjectivité » pour le psychiatre D.
Widlöcher.
-Certains anthropologues remettent en question l’idée de l’universalité du
complexe d’Oedipe émise par S. Freud, tq l’anthropologue britannique B;
Malinowski. L’ethnologue G. Roheim rédigea une thèse pour attester de
l’existence d’un complexe d’Œdipe universel, présent également dans les sociétés
primitives en Australie, en Papouasie, en Amérique du sud… L’anthropologue G.
Devereux sera le fondateur de l’ethnopsychanalyse.
Conclusion

 La psychanalyse tient ses fondements à partir des impasses théoriques de


l’époque concernant l’hystérie, et plus largement le traumatisme, et postule
l’existence d’un inconscient au fondement de notre vie psychique.
 Théories basées sur les cas d’études, pensés sous l’angle de l’interprétation
par un analyste aguerri.
 La psychanalyse est encore aujourd’hui controversée par les sciences car elle
se penche sur la subjectivité comme objet d’étude, alors même que les
sciences se définissent par le souci d’objectivité.
 En psychanalyse, on considère que l’on peut analyser objectivement la
subjectivité du sujet (sa réalité psychique), qu’en tenant compte de la propre
subjectivité de celui qui analyse.
 La psychanalyse continue d’intéresser de nombreuses autres disciplines au
sein d’une démarche transdisciplinaire, notamment la phénoménologie,
l’anthropologie, la psychiatrie, l’ethnologie, et influence la psychologie
clinique qui y puise ses fondements.

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