Vous êtes sur la page 1sur 4

Analyse

CENTRE D’ÉTUDES
ET DE PROSPECTIVE
— 10
n° 15 - Avril 20

Le marché des engrais minéraux :


état des lieux, perspectives et pistes d’action

L’exceptionnelle augmentation des prix des engrais minéraux au cours des dernières années, en particulier
en 2008, a mis en évidence la forte exposition économique des agriculteurs au prix de ces intrants, surtout
en période de prix agricoles bas. Une étude1 commanditée par le Centre d’études et de prospective a permis
d’analyser le marché mondial des engrais, de mettre en évidence les tendances et facteurs de changement,
et d’identifier les répercussions sur le marché national et l’agriculture française. Malgré de faibles investis-
sements au cours des vingt dernières années, ce secteur connaît un déplacement de la demande vers les
pays émergents et de l’offre vers les pays disposant des matières premières nécessaires (gaz naturel, phos-
phate naturel et sel de potassium). Le poids de la France sur les marchés mondiaux, en tant qu’acheteur
comme en tant que producteur, diminue de manière tendancielle tandis que les exigences environnemen-
tales et la réduction des risques industriels se font de plus en plus fortes. Le rapport se conclut par des pro-
positions d’actions dans le secteur des engrais en cohérence avec les objectifs agro-environnementaux.

L
a forte hausse du prix des structurels de la hausse des prix de ments, alors que pour les éléments
engrais minéraux en 2007 et 2007 et 2008. Des orientations straté- phosphate et potassium, les apports
2008 et sa répercussion sur les giques et des pistes d’action proposées peuvent être réduits sur plusieurs
coûts de production ont montré l’expo- dans l’étude, aux niveaux français et années sans trop affecter les cultures.
sition économique de l’agriculture aux européen, concluent cette analyse. C’est ainsi que la consommation des

1 - Le marché des engrais et


prix de ces intrants. Le lien étroit entre unités fertilisantes minérales phospha-

matières premières
ces prix et celui du pétrole est souvent tées et potassiques a baissé de 60 % par
considéré comme la cause principale rapport au début des années 1990, alors
de cette flambée. L’analyse du marché La France est le 7 e consommateur que le volume de la production végé-
mondial des engrais minéraux, avec la d’engrais minéraux dans le monde 2 tale s’est accru de 11 %. Néanmoins, la
description de leur organisation et des avec environ 3,5 millions de tonnes fertilisation minérale, en particulier
déterminants de leur évolution, permet d’éléments fertilisants consommés cha- azotée, reste un facteur substantiel de
de replacer cette hausse des prix et ses que année, représentant environ 2 % compétitivité de l’agriculture française,
répercussions en France dans un du marché mondial. En 1980, elle était notamment en grandes cultures.
Graphique 1 - Prix mondiaux et français
contexte plus général de tensions entre le quatrième pays consommateur et
pour les engrais azotés
l’offre et la demande en engrais. représentait 5 % du marché mondial
Cette note synthétise les principaux avec un volume alors supérieur à 2006.
Évolution du prix des engrais azotés, base 100
résultats d’une étude sur le marché des Le prix des engrais payé par les agri- Prix France : IPP engrais simples/Prix mondial : urée
engrais commanditée par le Centre culteurs français connaît des évolutions 300

d’études et de prospective du ministère corrélées mais amorties par rapport 250


de l’Alimentation, de l’Agriculture et de aux prix mondiaux (voir graphique 1,
la Pêche, confiée au cabinet GCL Déve- où l’indice de prix à la production (IPP) 200

loppement durable. Le marché mondial des engrais simples est considéré 150

des principales matières fertilisantes comme une bonne approximation du 100


ou intermédiaires est d’abord présenté prix des engrais azotés).
50
puis les acteurs de ces marchés et leur L’agriculture française ne dépend pas
évolution sont décrits. La troisième par- uniquement de la fertilisation minérale, 0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
tie analyse les enjeux environnemen- puisque celle-ci ne représente que 45 % Prix Mondial IPP Engrais simple

Sources : Insee/British sulphur


taux du secteur des engrais minéraux, de la fertilisation totale contre 55 % pour
sources d’incertitudes mais aussi les fertilisants organiques. Par ailleurs,
moteurs d’évolutions technologiques. les dépendances à chaque élément ferti- 1. http://agriculture.gouv.fr/sections/publications/etu-
des/etat-perspectives-enjeux/view
La quatrième partie aborde la question lisant sont hétérogènes. L’élément azote 2. D’après l’International Fertilizer Industry Asso-
des déterminants conjoncturels et est nécessaire au maintien des rende- ciation (IFA), 2006, World Statistics by Country.

LES PUBLICATIONS DU SERVICE DE LA STATISTIQUE ET DE LA PROSPECTIVE – CENTRE D’ÉTUDES ET DE PROSPECTIVE


La France dispose encore d’une indus- un prix compétitif et d’optimiser la prix (graphique 1). Elle conclut qu’une
trie de production d’engrais importante, chaîne de fabrication, la production disparition progressive du parc indus-
comme le souligne l’étude. La part des d’engrais minéraux s’oriente vers une triel français pourrait induire une plus
engrais non importés représente 44 % délocalisation à destination des pays- grande exposition aux fluctuations des
du marché français d’après l’Union des ressources. L’influence des pays déte- prix mondiaux.

2 - Les acteurs et marchés


industries de la fertilisation (UNIFA). nant les matières premières devrait

aujourd’hui et demain
Mais ces industries doivent importer la ainsi se renforcer à l’avenir.
quasi-totalité des matières premières YARA (société norvégienne ancienne-
nécessaires. Le développement d’uni- ment liée au groupe énergétique Norsk L’évolution du marché des engrais est
tés industrielles de production dans les Hydro), GPN (filiale du groupe Total, marquée par une augmentation de la
pays disposant des matières premières anciennement Grande Paroisse) et le consommation globale, tendance qui
de base et de plus faibles coûts de main- groupe familial Roullier sont les princi- devrait perdurer d’après la FAO. Au
d’œuvre a pour conséquence l’augmen- paux industriels sur le marché français début des années 1980, les États-Unis
tation des importations en provenance des engrais. En outre, les nouvelles sour- et l’ex-Union soviétique étaient les deux
des pays tiers. ces d’engrais organiques font apparaître premiers consommateurs mondiaux de
Le gaz, le phosphate naturel et le sel de nouveaux acteurs, extérieurs au produits fertilisants. Aujourd’hui, la
de potassium représentent en effet les monde agricole. Ces acteurs sont issus Chine (30 % du marché mondial) et
trois ressources de base pour la produc- des métiers de l’environnement (traite- l’Inde (13 %) sont les principaux consom-
tion des trois éléments fertilisants prin- ment des déchets et des eaux). Les dis- mateurs mondiaux d’engrais minéraux.
cipaux : l’azote (N), le phosphate (P) et tributeurs, essentiellement des structures La Chine et l’Inde ont une politique
le potassium (K). De manière générale, coopératives, ont fortement investi dans fondamentalement orientée vers la
la rareté et la distribution inégale des des outils de mélange leur permettant satisfaction de leur consommation
ressources caractérisent ces matières de fabriquer leurs propres engrais interne. C’est la raison pour laquelle ces
premières. L’étude rappelle que le pro- composés. D’après l’étude, ce procédé deux grands consommateurs ne se
blème des ressources naturelles ne se industriel devrait continuer à se renfor- démarquent pas comme exportateurs
pose pas seulement en termes de dis- cer compte tenu de la délocalisation des au niveau mondial, en dépit de leur
ponibilité mais également en termes de unités industrielles dans les pays dispo- capacité de production élevée. Trinidad
conditions économiques d’exploitation. sant des matières premières de base. Ce et Tobago, et la Russie, sont les princi-
Ainsi, la localisation des nouveaux gise- développement des unités d’engrais de paux exportateurs de produits azotés
ments, leur qualité variable et de nou- mélange (principalement sous forme tandis que les États-Unis sont les prin-
velles exigences environnementales ont d’unités de granulation) conforte l’in- cipaux importateurs. Concernant l’élé-
considérablement augmenté le coût de fluence grandissante des traders-négo- ment phosphate, le Maroc est le leader
revient des engrais, ce qui rend incer- ciants en tant qu’intermédiaires. incontesté des échanges internationaux.
tains de nombreux projets d’investisse- Le prix des matières premières consti- En plus de ces acteurs, ce seront les
ments à moyen terme. En conséquence, tue une part prédominante du coût de pays producteurs fortement exporta-
seuls des investissements d’État ou à production des engrais. Pour l’azote par teurs qui pèseront sur le marché des
court terme sont aujourd’hui réalisés exemple, le gaz naturel représente 80 % engrais demain. Il s’agit de l’Afrique
(phosphate Ma’aden saoudien, Afrique du coût de fabrication de l’ammonia- du Nord (Maroc), du Moyen-Orient, de
du Nord). L’auteur de l’étude souligne que, produit intermédiaire dans l’ob- Trinidad et Tobago pour l’azote et le
que les réglementations environnemen- tention d’engrais. L’étude souligne que phosphate, du Canada, de la Russie et
tales qui se mettent en place dans les l’accès direct aux gisements est donc de la Biélorussie pour le potassium.
pays développés (quotas d’émissions de un facteur majeur de compétitivité, ce L’étude souligne que malgré leur
CO2 principalement) rendent très diffi- qui désavantage fortement les indus- baisse attendue de consommation,
cile la réalisation de nouveaux investis- triels français au profit d’acteurs privés l’Europe et les États-Unis devraient
sements sur les sites de production. ou publics dans des pays disposant accentuer leurs importations nettes. À
La Russie, l’Iran et le Qatar se parta- d’importantes ressources naturelles. Ce l’inverse, l’Amérique du Sud devrait
gent plus de 53 % des ressources prou- facteur contribue à la baisse tendan- diminuer son profil d’importateur grâce
vées de gaz naturel, la Chine et le cielle des parts de marchés des indus- au développement de plusieurs projets
Maroc détiennent 69 % des ressources tries françaises. De plus, les risques industriels et miniers.
mondiales de phosphate naturel, tan- industriels liés à ce type d’industrie Le marché de l’azote reste relative-
dis que plus de la moitié des réserves lourde (accident de l’usine AZF par ment peu concentré et dominé par les
de potassium se trouvent au Canada. exemple) seraient un vecteur supplé- acteurs privés. Il s’agit d’un marché
On observe donc une distribution iné- mentaire d’incertitude pour le secteur. fortement libéralisé, essentiellement
gale des ressources dans le cas du gaz Malgré ce contexte défavorable, et en basé sur des contrats spots et, par
naturel et un fort degré de concentra- comparaison avec d’autres pays euro- conséquent, plus exposé à la volatilité
tion des ressources pour le phosphate péens, la présence encore importante des prix. Les échanges de produits de
et le potassium. L’instabilité de certains d’acteurs industriels sur le sol français première transformation concernent
de ces pays producteurs de matières peut être considérée comme un atout en particulier l’urée (graphique 2) et
premières et des facteurs d’ordre géo- pour l’agriculture. L’étude conduit en dans une moindre mesure l’ammonia-
politique vient encore accroître les effet à penser que l’industrie des que. On observe deux types d’acteurs
incertitudes ou les tensions en matière engrais peut assurer un service de sur ce marché : de grandes entreprises
d’approvisionnement. Afin d’assurer proximité et un rôle de modérateur des internationales, le plus souvent privées,

2 ■ CENTRE D’ÉTUDES ET DE PROSPECTIVE Analyse N° 15 - Avril 2010


telles que YARA, Transammonia ou un renforcement de l’offre par le sou- Les émissions de gaz à effet de serre
PotashCorp, et de nouveaux acteurs, le tien aux industries nationales de pro- (GES) du secteur agricole représentent
plus souvent publics ou para-publics, issus duction d’engrais. La forte implication environ 20 % des émissions totales en
des pays producteurs de gaz naturel. de l’État dans le développement des France. Près de la moitié de ces émis-
Le marché du phosphate naturel est capacités de production a ainsi permis sions est due à l’utilisation des engrais,
plus concentré et composé principale- à la Chine de devenir le premier produc- auxquelles il faut ajouter les GES émis
ment d’acteurs étatiques : OCP (Maroc), teur mondial de produits azotés et phos- lors de leur production. Au total, on
GCT (Tunisie) et Ferphos (Algérie), phatés. L’Inde subventionne également estime que l’azote représente environ
Gecopham (Syrie). À l’avenir, les très fortement le prix des engrais sur le tiers du bilan énergétique et des émis-
acteurs majeurs de ce marché devraient son marché intérieur. Lors de la crise sions de GES de la ferme France3.
être l’Arabie Saoudite et l’Égypte. Le alimentaire de 2008, de nombreux pays L’enjeu en termes d’émissions est donc
marché de la potasse connaît quant à (la Chine notamment) ont mis en place considérable. À l’échelle mondiale, selon
lui une situation oligopolistique. des taxes prohibitives à l’exportation l’IFA, l’industrie des engrais contribue
PotashCorp (Canada), Belaruskali d’engrais pour favoriser la satisfaction pour 2,5 % des émissions globales de
(Biélorussie) et Mosaic (Canada, États- de la demande interne. Cela a privé le GES. La mise en place de politiques de
Unis) sont les principaux acteurs indus- marché mondial de quantités considé- lutte contre le changement climatique
triels. Historiquement, les contrats sur rables d’engrais et provoqué une aug- est actuellement le principal facteur qui,
les éléments phosphate et potassium mentation sensible des prix. La Chine à moyen et court termes, pourrait impo-
sont annuels ou semi-annuels. L’étude restera un acteur majeur au niveau des ser des contraintes significatives au mar-
indique que ces deux marchés sont matières premières minérales et éner- ché des engrais minéraux.
donc plus stables et beaucoup moins gétiques, en particulier parce qu’elle est À partir de 2013, les industriels de
ouverts que le marché de l’azote. autosuffisante pour les engrais azotés l’azote européens et donc français (GPN,
De manière générale, le transfert de et phosphatés (contrairement à l’Europe), YARA) seront soumis au système du
la valeur ajoutée des industries de et qu’elle dispose d’importantes réser- marché européen des quotas carbone
deuxième transformation vers les indus- ves de charbon qui sont utilisées en pour la production d’ammoniaque et
tries de première transformation est remplacement du gaz naturel pour la d’acide nitrique. Cette situation pour-
considéré comme une tendance lourde. production d’azote. rait induire des hausses de prix et dimi-

3 - Les enjeux environnementaux,


Sans innovation et volonté de dévelop- nuer la compétitivité économique de

sources d’incertitudes et
pement, l’étude conduit à penser que certains acteurs. La mise en place d’une

d’évolutions technologiques
les industriels français, qui ne maîtri- contribution carbone aux frontières de
sent pas la matière première, pourraient l’Europe pourrait en partie compenser
se trouver isolés avec une compétitivité L’impact environnemental de la fer- cette contrainte vis-à-vis des pays tiers.
affaiblie à moyen terme, voire évoluer tilisation est significatif, ce qui entraîne En revanche, l’introduction d’une éven-
vers de simples activités de logistique. des interventions publiques autour de tuelle taxe carbone n’affecterait pas
L’agriculture est considérée comme un trois enjeux principaux : la pollution directement les producteurs industriels
secteur stratégique dans de nombreux des nappes phréatiques et des eaux de et n’aurait qu’un impact marginal sur
pays, et l’on observe en conséquence surface, la pollution de l’air et les émis- les agriculteurs via la consommation
deux grands types d’interventions publi- sions de gaz à effet de serre (principa- d’énergie fossile lors du transport et de
ques en matière d’engrais : d’une part lement de N2O lors de l’épandage). l’épandage. D’autres réglementations
un soutien de la demande par des sub- L’élément azote constitue la principale auront probablement une influence
ventions aux agriculteurs, d’autre part source de ces impacts. croissante sur la réduction des quanti-
tés utilisées, comme la Directive Nitrate
Graphique 2 - Intensité des principaux flux d’urée en 2008
(1991) qui impose des seuils maxima
(les pays importateurs net sont en vert foncé et les pays exportateurs net en vert clair)
d’azote à épandre.
Des gains significatifs de productivité
sont attendus avec l’amélioration crois-
sante des processus industriels entraî-
née par le renforcement des politiques
environnementales. Selon l’IFA, des
investissements industriels pour utiliser
les technologies les plus propres ainsi
qu’une meilleure gestion environnemen-
tale permettraient de réduire d’environ
25 % les émissions de GES liées à la pro-
duction. L’industrie des engrais devant
être soumise au système communautaire
d’échange de quotas d’émissions (SCEQE),
sur une partie de sa production à par-
tir de 2013, de tels investissements

Source : International Fertilizer Industry Association (IFA) - Cartographie par GCL


3. Prospective Agriculture Énergie 2030 pilotée par le
Centre d’études et de prospective du MAAP.

CENTRE D’ÉTUDES ET DE PROSPECTIVE Analyse N° 15 - Avril 2010 ■ 3


pourraient alors se réaliser rapidement. cielle du prix des engrais doive se pour- rait passer par le maintien de grands
En effet, l’extension du marché des cré- suivre à moyen terme principalement groupes industriels sur le territoire
dits carbone au secteur devrait consti- à cause d’une demande croissante d’en- national ou européen, ainsi que par le
tuer une forte incitation pour investir grais minéraux insuffisamment suivie renforcement de grandes coopératives
dans ces technologies propres. par des investissements dans de nou- d’approvisionnement, faisant jouer la
La hausse des prix de l’énergie et des velles capacités de production. concurrence sur le marché mondial et
matières premières, et le renforcement passant des contrats à moyen terme
des politiques environnementales, * * avec les producteurs d’engrais. La
devraient favoriser le développement * réduction des impacts environnemen-
de nouveaux produits. L’étude cite taux liés à la fertilisation devrait éga-
notamment les matières actives facili- La période de transition que traverse lement être recherchée, en mobilisant
tant l’assimilation par les plantes, les actuellement l’industrie des engrais est des leviers agronomiques ainsi que
engrais à effet retard (permettant d’al- source de fortes incertitudes, avec des technologiques.
longer la durée de fertilisation) ou les répercussions possibles sur le prix des Les pistes d’action citées par l’étude
inhibiteurs d’uréase qui ont pour objec- intrants pour l’agriculture française. Le pourraient ainsi être développées autour
tif de diminuer les pertes d’azote. déplacement de la demande mondiale, de trois grands axes : une meilleure opti-
L’étude suggère que l’action publique la valorisation des pays et acteurs misation de la consommation d’engrais,
pourrait aider à transformer ces nou- industriels disposant de ressources le développement de fertilisants alterna-
velles exigences environnementales en naturelles ainsi que le renforcement tifs et des actions en faveur de l’innova-
opportunités de marché. de politiques environnementales pour- tion industrielle dans le secteur des

4 - Une hausse des prix


raient aboutir à une disparition progres- fertilisants minéraux. Un mécanisme de

tendancielle
sive de l’industrie des engrais française type bonus-malus carbone intégrant l’en-
au profit de plates-formes logistiques. semble des produits fertilisants miné-
La hausse exceptionnelle des prix des L’étude présentée ici précise que cette raux et organiques pourrait être
engrais entre 2007 et 2009, puis la disparition pourrait engendrer une considéré. Pour favoriser l’émergence et
chute brutale provoquée par la crise éco- exposition plus importante aux fluctua- l’utilisation de produits fertilisants alter-
nomique, mettent en évidence la forte tions des prix mondiaux. natifs, il conviendrait d’encourager des
volatilité que connaît désormais ce sec- Dans ce contexte, la France possède projets industriels de retraitement des
teur. Cette hausse exceptionnelle est cependant des atouts sur lesquels l’ac- sous-produits issus de la méthanisation
due à des facteurs structurels combinés tion publique pourrait s’appuyer : une ou l’utilisation des nouvelles sources
à divers facteurs conjoncturels. bonne maîtrise des techniques cultu- d’engrais organiques issues des déchets
La croissance économique des pays rales et une recherche agronomique de urbains. Ces projets, nécessitant au préa-
émergents, qui a provoqué une hausse haut niveau, d’importantes sources lable une évaluation économique et envi-
naturelle de la demande interne, est un organiques (animales, industrielles et ronnementale exhaustive, devraient être
facteur structurel de hausse du prix urbaines) encore largement sous- conçus en cohérence avec la réglemen-
des engrais. Elle a en effet pu provo- exploitées, une industrie des engrais tation existante (REACH notamment).
quer des tensions sur le marché et qui semble remplir un rôle de modéra- Une réflexion pourrait également être
même une quasi-crise de l’offre. En teur des prix et qui est à l’origine d’in- menée au sujet de la répartition optimale
outre, la transformation structurelle de novations industrielles. entre capacités de production industrielle
l’industrie des engrais a été marquée La fertilisation est un élément majeur sur le territoire français et unités de
par de faibles investissements au cours de productivité de l’agriculture moder- mélange ou de formulation à partir d’en-
des vingt dernières années, qui concou- ne et le restera à moyen terme. Dans le grais minéraux simples importés.
rent également à une faiblesse struc- cadre du Grenelle de l’environnement,
turelle de l’offre d’après l’étude. l’État s’est fixé comme objectif le déve-
Les facteurs mineurs et plus conjonc- loppement d’une agriculture à haute Pierre Cazeneuve
turels expliquant l’épisode récent d’en- valeur environnementale. Le ministère Directeur de GCL
volée des prix sont notamment la de l’Alimentation, de l’Agriculture et de Développement durable
spéculation sur le prix des matières pre- la Pêche a mis en place le plan de per- Thuriane Mahé et Julien Vert
mières, la fermeture de plusieurs usi- formance énergétique des exploitations Centre d’études et de prospective
nes suite à des catastrophes naturelles (PPE) et le plan de réduction des pro-
(ouragans aux États-Unis, tremblement duits phytosanitaires (Ecophyto 2018).
de terre en Chine, inondations de mines D’après l’étude, ces dispositifs pour- Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture
et de la Pêche
Secrétariat Général
de sel de potasse), le développement raient être utilement complétés par une
des énergies alternatives (biocarbu- stratégie et des actions ciblées sur la Service de la statistique et de la prospective
Centre d’études et de prospective
12 rue Henri Rol-Tanguy
rants) consommatrices de produits agri- fertilisation, complémentaires des plans
coles, le retard pris par certains projets et programmes existants. TSA 70007
93555 MONTREUIL SOUS BOIS Cedex
Tél. : 01 49 55 85 05
ou investissements et enfin la mise en Une telle stratégie devrait prendre en
place de politiques publiques défensi- compte à la fois les enjeux de l’offre et Sites Internet : www.agreste.agriculture.gouv.fr
www.agriculture.gouv.fr
ves (taxes, subventions). de la demande en produits fertilisants.
Au-delà des différences entre les mar- Assurer la sécurité et la qualité de l’ap- Directrice de la publication : Fabienne Rosenwald
Rédacteur en chef : Bruno Hérault
Composition : SSP Beauvais
chés de chaque élément fertilisant, il provisionnement constitue en effet un
semble que l’augmentation tendan- enjeu majeur d’après l’étude. Cela pour- Dépôt légal : À parution © 2010

4 ■ CENTRE D’ÉTUDES ET DE PROSPECTIVE Analyse N° 15 - Avril 2010

Vous aimerez peut-être aussi