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CJIANTAL 1\ ~O'\GIS >\ Kir-.

tESA

«L'AGIR PUISSANT DU CHRIST


PARMI LES CHRÉTIENS»

Une étudc cxégético-théo logiquc


de2Co 13. l -4 etRm 14.l-9

Ronrn 20 I O
TESI GREGORIANA
Serie Teologia
~~~~~~- 178 ~~~~~~-

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Vidim11s et upprohamus t;c/ 11or111a111 Stotworum U11iversitatis

Romae. ex Pontificia Universitatc Gregoriana


Die 9 mensis Jun iu, anni 2009

R.P. SCOTT 8 RODEUR

R.P. Al.BERTO VALE TlNI


A ma famille
Avec gratitude

O'= J :· i.

'1:'> 20 10 Grcgonan & Biblica! Prcss


Piazza della Pi lotta. 35 00187 - Roma
books(@.hiblic11m.com

ISBN 978-88-7839- 157-4

Finito di stampare nel mese di gennaio 20 I O


presso Mediagraf S.p.A. Stab. di Roma So.Gra.Ro.
REMERCIEMENTS

Je voudrai s remercier tous ceux qui m'ont permis de réaliser cet tra-
vail. En particulier, je tiens à dire ma reconnaissance â la congrégation
des fi ll es de Notre Dame du Sacré-Cœur - dont je suis membre -
notamment les supéri eurs générales : Srs Mary Ringnalda et Fifyc
d'avoir accepté et encouragé le projet de ma thèse doctorale; l'éco-
nome générale : sr Helen Simpson pour sa bonne compréhension cha-
que fo is que j'ai eu beso in d' une aide financière; les supérieure de ma
province d'Afrique : Srs Dain Mary lnglis et Madeleine Ngoy pour le
outien ; et les sœurs de la provi nce italienne pour leur générosité dans
l"hospitalité et dan le outien matériel offerts durant mes études à
Rome.
Je remercie vivement le P. Scott Brodeur. qui a été le modérateur
pa ionné. exigeant et patient de cette thèse. U r a dirigée avec une di -
ponibilité à la hauteur de sa compétence. Je manquerais à l' un de me.
devoirs de reconnais ancc, si je ne vous remercie pas, cbcrs bienfai-
teurs américains et italiens pour votre grande contributi on en vue de la
publication de cette thèse.
Je remercie enfin Père Dossmann Raymond MSC et tous ceux qui
ont lu avec intérêt toute la thèse.
A tous merci.

......
INTRODUCTION

La question principa le à laquellc celte disscrtation a tcnté dc répon-


dre est, cntre autres, celle de savoir comment le Christ, le Seigneur est
vra imcnt puissanl. En effet. sa façon d'etre puissant nous a particul iè-
rement frappée, d 'autant plus qu ' il a été crucifié et e t mort dans la fai-
blesse (c f. 2Co 13,4). L'on voi t bien qu ' il s'agi t d' un ra isonnemenl
paradoxal. En raison de ce paradoxe révélé par le binòme faiblesse-
pui sance du Christ. nous nous sommes interrogée sur le scns de cette
faib lessc et de cette puissance.
Celle problématique s' inscrit , de fait, dans la cbristologie paulinienne.
Celle-ci constitue le fo ndcmcnt de tous les aspects de la théologie de
saint Paul 1• C'est donc à partir du Christ que Paul arri ve à structurer
toutc sa ré fl cxion théologique. Dans ce travail, nous n ' avons évidem-
ment pas embrassé toutc la gamme thématique que repré ente l'en-
semble de cette chri stologie. Notre étude entend proposcr dcs éléments
de réponsc essentieUement li és au sujet de l' efficacité et de la capacité
du Chri t à produire de grands cffcts. C'cst précisément à travers une
lecture attentive de deux péricopes 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9 que nous
avons dégagé la compréhension de cet agir. Nous 1· avons, bien entendu,
étoffée cn fa isant référence à d'aulrcs textes du NT.

I. La déli mita tion de l' étude


Les recherches entreprises pour I' élaboration de cette thèse ont été
cemées à deux niveaux. Le premi er se révèle au choix dc dcux péri-
copcs bicn précises de l'en emblc du corpus paulinien. Il s'agit d'ex-
traits tiré de 2Co 13,1-4 et Rm 14, 1-9. Bien qu ' ils soient différents au
premier abord, il y a néanmoins des éléments qui se rccoupcnt du point

I Cf. J-N. ALETII, ((Paulinicnnc (Thèologic)», 866.


10 L.AGIR PUfSSANT DU CHRTST PARMTLES CHRÉT!ENS INTRODUCTTON 11

de vue lexicographique et stylistique. Ces aspects significatifs ont dé- gement de comportement. En 2Co 13, 1- 1O, les Corinthiens doivent
terminé notre sélection et délimite le domaine de notre étude. modifier leur attitude vis-à- vis de Paul et de ses compagnons (nous
L · anaJyse lexicographique nous a amené à identi fier notamrnent pensons à Tite et Tirnothée qu i furenl des envoyés de l'Apotre à la
l'emploi répété du verbe 6uva:rE1 I «est puissant». C'est ce dernier qui a communauté de Corinthe) 5 ; en Rm 14. 1- 15, 13. l' iDvitation s'adresse
principaJement motivé l'intéret pour ces passages. l'objet de nos inves- aux Romains à se convertir dans leur relation mutueUe.
tigations. En effet, la forme ouva:rei. à la troisième personne du singu lier Le second niveau relatif à la délimitation de ce travail est celui d'a-
se retrouve seulement trois fois dans tout le NT : Rm 14,4; 2Co 9,8; vo ir abordé !es extrai ts en étude sous un angle exégético-théologique.
13,3. En outre. nous avons noté que ces trois récurrences sont toutes Nous en avons d'abord effectué tme lecture attentive et ensuite une réf-
construites avec un sujet divin : en Rm 14,4 le sujet est KUpLoç I «Se i- lexion théologique. Cell e-ci a eu pour objet des thèmes dégagés de
gneurn; en 2Co 9,8 9e6ç I «D iew> et en 2Co 13,3 XpLcn 6ç I «Christ». cette lecture.
Étant donné que l'orientation thén1atique de ce travai l se veut chri.s-
tologique, nous avons préféré étud ier les textes 2Co 13,3 et Rm 14.42 2. La nouveauté de l'étude
dans lesquels le Christ est le suj et à celui de 2Co 9,8. Ce derni er a com- La contribution spécifique de ce travai l est celle d'avoir réalisé une
me sujet Dieu le père. Toutefo is la difficulté était de savoir si le tem1e étude comparative des passages 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9. Il est bien
KUpLOç en Rm 14,4 est employé pour évoquer le Christ ou plut6t Dieu I.e
connu que ces péricopes onl déjà été séparément anaJysées par des exé-
père. En dépit de l'existence des manuscrits qui lise11t 8e6ç à la piace de gètes. Cependant, à notre connaissance, auctm bibliste n'a ja.mais entre-
KUpLOç et nonobstant l'opinion de ceux qui pensent que KupLOç dans ce
pris un essai servant à établir les ressemblances et les différences entre
verset renvo1e à Dieu le père3 , nous souscrivons, quaal à nous, à la eUes. Ce conslat nous a encouragée à engager une teUe recherche. Ce
position de la majori té qui soutient son all usion au Christ4. Par consé- faisant, nous avons trouvé à travers ces textes des éléments de réponse à
quent, sur les trois récurrences, une fois c'est Dieu qu i est le sujet (2Co certaines interrogations concemant la thématique de la puissance du
9,5) et deux fois c'est Jésus-Christ (Rm 14,4 et 2Co 13,3). Ainsi, les Christ. li s'agit de questions telles que: Qu'esl-ce que la puissance du
deux passages dans lesq uel s Jésus-Chri st est le suj et du verbe ouva:i:e"ì. Christ ? Comment se manifeste-t-eUe dans la vie d'un croyant? Quel sens
nous ont permis de répondre à une problématique de la christologie peut avoir la relation avec cette puissance du Christ dans la vie de chaque
paulinienne, celle de la puissance du Christ. chrétien ? Commenl est-elle perçue, vécue par les chrétiens entre eux ?
Notre enquete Jexicographique a égalemcnt rcndu possi ble la décou- Pour cerner toutes ces questions, nous avons fait référence à d'autres
verte d'autres simiJitudes dans les deux péricopes. Ces ressemblances textes du NT, à savoir les autres lettres pauliniennes et les évangiles.
émergent du binarne «mourir-vivre». Ce demier se présente de la ma-
nière sui vante : en 2Co 13,4 Èamupweri-(i.ì I «est cn.1c.ifié-vit»: 3. La méthode
àcr9EvouµEV-(~ooµEv I «nous sommes faib lcs-nous vivrons», en Rm
14,9 anÉ8a:vEv-E(rioEV I «est mort-est revenu à la vie». La mise en rela- Notre approcbe méthodologique a consisté à app liquer tme analyse
tion de ces termes sou1igne tme di mension paradoxale soit de l'ètre du exégético-lhéologique sur les textes examinés. Nous avons éga lement
Christ, soit de celui du croyant en Christ. Qua11t à l'aspect sty listique, le eu recours à une variété d · instruments diachroniques et syncbroniques.
discours de ces péricopes en examen sont des fonnes d'exhortation. En Ce faisant, nous avons conduit nos enquetes sur tro is volets. Première-
effet, Paul recommande tant aux Corinthiens qu'aux Romains un cban- ment, un exposé a été fait sur le caractère ad hoc de deux lettres : 2Co
et Rm 6 . J1 s'agissait de fai re une lecture socio-historique dc ccs écrits de
2 Le terme KupLoç en Rm 14,4 fait allusion non pas à Dicu le Père mais au Christ.
Pour l'emploi de ce mot. cf. eh. V1. 2.1 Usage paulinien du tenne Kup Loç.
3 Cf. La présence de 0e6ç était probablement due à l'assimilation du mot 0eoç du 5 Cf. La première partie de ce tra vali au poinl 1.3 Relations entre Paul et la co111-
verset précédent (v. 3). Voir J.A. FrTZMYER, Romans. 689-691. 111111w111é.
-i Cf. B.M. M ETZCì ER, A Texwal Cnmmentary, 468; 0. MI CHEL, Der Brie}: 424; 6 Signalons que nous avons étudié les deux lettrcs paulirticnnes en suivant l'ordre
U. WrLCKENS. Der Brief. 83: B. BYRNE, Ro111a11s, 409: D.J. Moo. The Epistle, 840. chronologique. De ce demier, la deuxième correspondance aux Corinthiens fut écrire
12 L'AG IR PUJSSANT DU CHRI ST PARMl LES C ll RÉTIE S IN TRODUCTION 13

Paul. Certe démarcbe a pennis d'exarniner. tout d'abord leur contexce d'appréhender, plus particuli èrement, ses traitS caractéristiques, l'occa-
général , pui~ le type d~ relation qui ex istait entre l 'apò~e Pau l et Ics sion. le lieu ec le moment historique de sa rédaction.
comn:lUnautcs destmata1res de ses correspondances. entin l'état de la Grace à celle étude, nous avons pris connajssance de la composition
quest1on autour de leur intégraLi té. Cet effort de prise de connaissance de 2Co et aussi des opinions des biblistes par rapport à la question de
socio-historique a .é!é po~r .nous l'occasion de réaliscr une cxégèse te- son uni té. En cffet, le problème se pose de savoir si la deuxièmc letlre
nant compte du mili eu ongmal des textes, voire de la penséc théologi- aux Cori nthiens est le fruit d'un selli écrit de Paul, ou bien l'asscmblagc
que de l'apolre des nations. de plusieurs de ses correspondances. li y a à ce sujet deux points de vue.
~ans une ~euxième ~t~de, nous nous somrnes li vréc à une interpré- D' une part, il y a ccux qui affinncnt que 2Co constin1e un eul écril. lls
~at1on analyllque des pencopes 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9, cn plusieurs j ustifient lcur hypothèsc par l' homogénéité du vocabulaire et aussi par
etapes. Nous avo~s ~ ·a~ord ex.a~né chaque verset de façon syntax ique l' unicité des genres argumentatifs7.
et structurclle. Pu~s'. il s est agi d une analyse de dcux ou plusieurs vcr- TI faut noter, cependan t. que la lettre révèle dans son ensemb lc dcs
sets ayant une unite de sens. En fin, nous avons fait l'cxégèse de l'en- lacunes conccmant l 'cnc h ain~mcnt dcs idées; le passagc dc ccrtai ns
semble de la pé~icope. A i~s i , le message de Paul a pu etrc apprébendé, chapitres à d 'autres sont brusques; la divergence dans le style et dans le
notamment ce~u1 d? la ~u1ssance du Christ, tel que l'Apòtre l'a nnonce fo nd également, etc. En raison de ces constatations. ces exégètes aftir-
~ans Ics e;Xtra1ts c1tés c1-dessus. Notons toutefo is que notre approchc ment que son caractère complexe renvoie aux différentes étapes qui 0 111
mterprétat1ve s'est naturellemen t appuyée sur des commentaircs cri ti- marqué sa rédactionR. li y a, d'autre part, l' hypothèse de la majorité qui
ques dc spécialistcs. vo it en 2Co une lettre composite. lls expliquent ce fa it, en particul ier à
Dans .la trois ième et dernière étapc de la méthodc app liquée pour cause de la di fférence de ton et de cooteou entre les eh. 1- 9 et Ics eh.
ce tra va 1I , nous avon~ J?roposé une réflexio n théo log ique. Ell.e porte I0- 13. Cetre diversité prouvera it qu ' iI s 'agirait de deux écrits origina-
sur le message recueal la de la lecture attenti ve de 2Co 13 1-4 et Rm lement séparés9.
I ~· 1-9. Bicn sur, nou avons particulièrcment exposé la c~ mpréh en­ Quant à nous, nous adhérons à celte demière proposition par l' effet
s1on de 1'apòtre Paul au sujet de la pu issa nce du Christ, tcl qu 'ell e de la distinction remarquable de ton et aussi de contenu entre les neuf
résulte des textes examinés. premiers chapitrcs et les quatre demiers. Par ailleurs, nous soutcnons
que 2Co suic le modèle de la rhétorique gréco-romaine. Cene dcmière,
4. La division du travail
menant en évidcncc l'aspcct argurnentatif, a permis d' identifìcr l'har-
La. d.issertation est structurée en trois parties. Lcs dcux prcmièrcs se monie des différents thèmes du raisonnement de Paul. Ainsi. Jes lacu-
subd 1 v1s~nt chacune en Lrois chapitres. et la demière partic en un seul. nes, repérées par l'étude critique historico-littéraire, ont pu etre résolue .
Le premier chapitre de l'étape initiale exposc le contexte dc la deu- Au demeurant, à Lravcrs différentes études de la structurc rbétoriquc dc
xièn~e lettre aux Corinlhiens. A travers certe présentalion, nous avons l'ensemble de la lcttre exposées dans ce travai l. il nous a été facile dc
décnt la communauté de Corinthe et l'expérience de l' Ap6trc au sei n repérer l'emplacement de la péricope 2Co 13. 1-4. Nonobstant la diver-
de cette communauté. La connaissance de celle situation interne nous a
s;rvi no~ seule!11cn1 à sai.sir !es raisons qui ont arnené Paul à y an noncer
I Éva ngilc, mais encorc a connaitre l' issue de son activ ité missionnairc 7 Cf. E.-8. ALLO, Seconde Épifre atLr Cor i11fhie11s, 254-269; W.H. BATES, «Thc ln-
~a~s ~ette ci_té. pc
cettc.façon, nous avons pu comprendrc cc qui a mo- tcgrity of Il Corinth iarnm, 56-69; N. H YDAll L, «Dic Fragc». 289-306; G. Sl7CìAU.A,
<(CocrcnzM. 149- 166; ID.. «Slrullura». 189-2 18: F. MANZI. Seconda lettem ai Cori1i=i.
t1vc I emplo1 d un ccrtain style en 2Co et des différcnts arguments dé- 49-50.
veloppés dans cet écrit. entre autres, celui du Christ puissant. Nou s a- Il Cl: F. M ANZI, Seconda /et/era ai Corin: i, 25-26 ; M. HARRIS. Th e Second Cori11-
vons éga lemcnt présenté une a11alyse de l'épitre, ce qui nous a pcrmis 1hia11s. 50-5 1.
9 Cf. F. WATSO • <<2 Com. 324-325 : G. BARBAG LIO. Seconda lettera ai Corin: i. 97:
J. W1:1ss, Earliest Chrisliani~v. 323-357: R. PESCH, Paulus, 82-84: G. BARBA(ll 10. , _
avant l' épitrc aux Romains. Dans cc travail. voir les poinrs sur l'Occasion. licu et dnte 1 Corin:i, 97: M.E. T llRALL. 11 Criticai ami Exegetica/ Cn111111e11tary . 5-20.35-42:
dc la composi1ion dc chacun dc ses écritS. G . B OR K,\MM. Pau/11\'. 246-247.
14 L'AGIR PUISSANT DU CHRJST PARM I LES CHR ÉTlENS INTRODUCTION 15

gence des opin ions panni les exégètes sur la dispositio de la deuxième Christ à cause de sa faiblesse et sa résurrection par la puissance de Dieu
lettre aux Coriathicns. il y a néanmoins un consensus selon lequel le eh. (cf. v. 4a-b). Notre réflcxion a cs~ayé de d~montre~ ~n ~uoi co~s istent
~ 3, dans leque~ ~e situe le texte de notre travail: 2Co 13, 1-4, appartient la faiblesse et la puissance du Chnst. Sa fa1blesse res1da1t, de fatt, dans
a la macro-unne de 2Co I 0--13. lls admettent également que J'extrait on attitude de dépendance totale à Dieu à travers son incamarion.
2Co 13, 1-4 fonne une unité de sens. Grace au texte de Ph 2,6-1 1, nous comprenons que l' incamation du
Le deux ième chapitre présente une étude détai llée de chaque verset Christ s'est résumée par son dépouillement de sa condition divine pour
du texte 2Co 13, 1-4. Cette ana lyse a eu pour objet de mettre en lumière assumer la condition d'esclave. Cependant, son agir, en tant qu ' homme,
le messagc de l'Apotre au sujet du Christ, reconnu comme puissant était marqué par un sens d' humilité et d'obéissance à l'égard dc Dieu.
parmi les CorintJ1iens. Grace à cette 1ecture attemive nous avons iden- Au suj et de la puissance du Christ, elle se trouve dans son exa ltati on
tifié deux parties : vv. 1-2 et vv. 3-4. Dans la premiè,re fraction fom1ée par la puissancc de Dieu et dans la reconnai ssance de sa Seigneurie par
des vv. 1-2, l 'apotre Paul annonce sa troisième visite auprès dcs Cori n- lous.
thiens, l'objectif de cette vis ite et la façon dont il envisage de l'effec- Le coatenu anthropologico-théo logique découle de l'assertion de la
~er. li entend, de fait, mettre fin à tout ce qui a été dit. 11 le fera sans faiblcsse des croyants cn Christ et de leur espérance à la vie future avec
mdu lgence 10. La deuxième partie de la péricope qui comprend Ics vv. le Christ par la puissancc de Dieu (cf. v. 4b). L'on voit biea quc l'ac-
3-4 expose le motif ou l'explication des propos de Paul. En effet I' A- tion de Dieu le Pèrc est détenninante tant daos la rétlexion christologi-
potre .s ' emp~oie à donner les raisons qui l'ont amené à adopter un~ atti- co-théologique que dans celle anthrologico-théo logique. Ell e constitue
tude mtrans1geante à l'égard des Corinthiens. C'était donc à cause de la cause de la vie du Chri st et celle de tous les croyants, y cornpris Paul.
leur prétcntion à cxiger de lui une preuve attestaat quc le Christ con- avec le Christ.
tinue à agir en lui. Le quatrième chapitre ouvre la deu~i ème partie de la dissertation.
.L' essenticl. d~t trois}èn:e ~hapìtre est une réflexion théologiquc sur les Dans ce chapitre, nous avons exposé le contexte de la lettre aux Ro-
themes recuc1ll1s de I exegese que nous avons faite du texte 2Co 13 1-4. mains. Pour ce faire. les points sui vants ont été présentés : il s'agit en
De cette interprétation analytique, trois thèmes ont été déduit du rai~on­ prem ier licu d' une présentation du caractère ad hoc de la lettre. Dans le
nement de .l'apotre Paul. lls sont de nature ecclésiologiquc, christologi- deuxième moment, nous avons décrit la communauté chrétienne de
co-théolog1que et anthropo logico-théologiq ue. La teneur ecclésiologi- Rome, en présentant les débuts de certe église. ses membres, les impli-
que se trouve dans deux dimensions de la vie communautaire (cf. vv. 1- cations dc l'édit dc Claudc sur cctte communauté et son organisation
2) ..L.a premièrc est celle .qui touche au sens de l'exjgence de la vie interne. Une troisièmc étape a été consacrée à l'examen dc l'cnsemblc
chret1eanc et communautaue après J'adhésìon à la foi en Christ. de la lettre aux Romains. Nous avons essayé de répondre aux préoccu-
La seconde dimension est celle qui se rapporte aux implica tions pations sui va ntes: Dans quel but Pau l - qui. n'est pas le fo ndateu.r de
d' une vie chrétiennc ambigue. Quant à la dimension christologico-théo- cette communauté de Rome - a-t-i l écrit aux croyants de cette ville?
l?giquc, qui a .é~é l'objet principal de la première partic dc la disserta- Qui sont les chrétiens dc certe communauté ? Quels ont été Ics circons-
t1 ~n, ell e est tirce dcs propo de Paul au suj et de l'attìtude des Corin- tances. le lieu et la date de la composi tion de cette letlre '? S'agit-il
th1cns et <le sa proprc réaction face à elJc. En effet, les Corinthiens vou- d'une seule lettre? A quel genre littéraire correspond-elle? Dans quelle
laient avoir la certitudc que le Christ, qui parmi eux, n 'est pas faib le partie de la lettre est si tuée la péricope Rm 14, 1-9 ?
mais puissant, continue à parler en la personne dc J'Apotre. C'est ai nsi La connaissance de tous ccs éléments concemant la lcttrc aux Ro-
quc. pour répondrc à ce comportemcot, Paul a affirmé la crucifixion du mains nous a pcrmis dc mi eux comprendre les réalités socioculture ll es
et communautaires des croyants de Rome. Celles-ci ont servi à saisi r
I ~ Les choses qui onl été dites peuvcnt ctre dc deux réalités différcntes. D' une pari. les raisons pour lesquelles Paul a voulu exposer certains de arguments
ea licn avcc le tcxtc de 2Co 12.20-21. nous avons déduit qu 'clles conccmaicnt Ics présents dans son écril aux Romains, eo particulier celui dc la puis-
m~mbrcs de la communauté qui avaient péché et n'ont pas cbangé leur façon dc vivrc. sance du Seigncur tiré de Rm 14, 1-9.
D aurrc pan, clles pcuvcnt fare en rclation avec le doutc qui planait sur la crédibi lité
de l'apo tolicité dc Paul parmi cenaini. membres dc l'égli e.
16 L"AGlR PUISSA T DU CHRIST PARMI LES Cll RÉTTE S INTROOUCTIO 17

Au cinquième chapitre. une étude attentive a été faite sur la péricope condition humainc et la mort qui est la conséquence de celle condition.
Rm 14,1-9. Elle a consisté à l'ana lyser verset par vcrset. Gràce à cette exé- Cepcndant, il est rcvcnu à la vie, a ét~ cxalté .et rcç~ le. Nom dc Sei-
gèsc. trois parties ont été mises en évidence. Dans la première partie qui !!neur qui dépasse touL nom. Par consequent, il est I ObJel par tous et
comprcnd le vv. 1-4, l'Ap6tre des Gentil adrcssc deux types d' invitation partoul de I ' honneur et dc la recon.nais. an~e dc a Sci.gneuric. Celle
aux membrcs de la communauté. D'abord, une exhortation aux membres eigncurie, rccon.nuc par tous, a. dc~ 1mplt cat1 ~ns sur I.a v1~ de tous ceux
forts à accuei llir ccux qui sont fa ibles dans la foi. Ensuite. celle adressée à qui croient cn lui. Cc. sont c~s 111c1?ences qui ont fat t obJe.t du sec~n~
tous Ics mcmbrcs dc la communauté. Paul les exhorte à abandonner tout a pect dc notrc ré1lcx1on chnstolog1q~~· Nous avons, ?e fa 1L, montre: a
jugement Ics uns les autres. La dcuxièmc partie qu i se trouve dans Ics vv. travcrs des exemples, non seulemenl I 1mpact de la pu1ssance du Chn sl
5-6 expose l'invilation de l'apòtrc PauJ aux croyants. Il leur recommande sur Ics chrétiens, notammcnt sur les faibles, mais encore comment cet1e
d'avoir la ccrtitude que lcur agir est en licn avec le Christ Ieur Maitre, et Seigncurie ou ccttc puissancc se manifeste sur Ics croyan ts. li s'agit, cn
vjse à l' honorer. La troisième pa11ie du texte est composée dcs vv. 7-9. effel. dc l' intcrven tion du Christ en tant que présence qui transforme, il-
Daas ces demiers, Paul énonce deux postulats au sujet de l'agir du chrétien lumine, libère, etc. le croyant. Quant à la dimension théologique, elle se
et dc c~ lui du CJ1rist. En premier lieu, il affirmc que le chrétien, dans tout dégagc dc l'agir de Dicu le Père à l'égard dc tous Ics croyants .
ce qu ' tl entreprend durane son cxistence entièrc, agii non pas pour lui- La troisièmc partic de ccttc dis crtation se compose d' un scu l chap1-
mcme mais pour le Christ son Maitre, et en vue de l'honorer. En second tre - le septième - que nous avon intitulé «le Christ, Seigneur est
lieu, il affirme que le Chrisl est 111011 et rcvenu à la vie cn raison de l'ap- vra imcnt puissanl». Ce chap itre sert éga lcmenl de conclusion à notre
partenancc totale dcs chrétiens à lcur maltrc. travail. Il a cu pour but dc confrontcr le apports tirés dcs rcchcrchcs
Le sixième cbapitre propose une réflexion théologique autour dcs faites dans les deux premières parties de la di ssertation, d'exposer le
tbèmcs recuci ll is de l'exégèse faite dc la péricopc. Ces thèmes rc- message évangéliquc trou vé dans Ics deux textcs cxaminés. dc montrcr
préscntent lrois dimensions. à savoir. les dimensions ecclésiologique. son impact dans J'église congolai e et dc suggércr la pcrspectivc lbéo-
cbri sto lo~ ique et théologique. L'aspect ecclés iologiquc comprend deux logique que Ics rétl cx ions faites sur 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9 ouvrcnt
aspccls d1fférents. 11 s'csl agi d'abord de l'attilude flex iblc et ouve1tc pour la poursuite dcs étudcs paulinicnnes.
d' un rcsponsable de commuaauté. Ensuite, nous avons sou ligné la di- En coacluant celle dissertation. bien enteadu sans la prétention d'a-
mension de 1'accuei l mutue! entrc les membres de la communauté et voir épuisé le sujet en étudc, nous espérons avo ir atte int I'objectif que
leur appartenance commune au Christ. nous nous sommes fi xée en entreprenant cette étude. à savoir élucider
Sous l' angle christologic, objct princi pal de la deuxième section de la spéci ficité dc la pu issaocc du Christ selon la conception paulinienne,
ce travail, notre réfl exion est partie du thème de la Seigneuri e du Christ à la lumière d' une étude com parative de dcux péri copcs 2Co 13.1-4 cl
(cf. vv. 4 .9). 11 s'agi t précisément de dcux aspects li és à sa souvera ineté. Rm 14,1-9.
Premièrement. cette souvcraincté est comprise camme le résultat de a
mort et de son retour à la vie; deuxièmement, I' impact de sa souverai-
nc_té (puissance) cn tant que Seigneur sur les croyants, notamment Ics
fa tblcs dans la foi. Quant au premier aspcct, une ex plication a été don-
née au sujet du processus dc l'incamation. Le Christ a, de fa it, renoncé
à sa conrution divine, pour assumer la condùion de serviteur et devcni r
Seigneur des morts et des vivan ts.
Nous avons, à cet effet, dli. faire appel au tcx te de Ph 2,6-1 1, déjà
mentionné dans la prcmièrc parti c du trava il. Nous l'avons brièvemcnt
repri s en vue de montrer surtout I'a boutissement de ce processus de I'a-
b~i sse ment du Chri st, .c'cst-à-dire son devenir Seigneur à la gioire de
D1cu. En effct, le Chnst a, en toute obéissancc et bum ili té, assumé la
PREMIÈRE PARTIE

2COR 13,1-4
LE CHRIST EST PUISSANT
CHAPITRE I

Le contexte de 2Co 13,1-4

La problématique que nous abordons dans ce chap itre concerne le


contex te de l'extrait en examen. TI sera question de présentcr le carac-
tère ad hoc de la deuxième épltre aux Corinthiens, l"analyse rhétorique
appliquée dans cette lettre et I'étude de la critique textuelle de 2Co
13, 1-4. Cet exposé nous servira à une meilleure compréhension non
seulemenl de l'ensemble de la lettre mais eocorc de la péricope, objet
de nos investigations.

I. Le caractère ad hoc de la lettre


Le travail que nous proposons dans ce chapitre essa ie de recons-
tnrire le contexte soc ia! ambiant de Corinthe: la cité dans laquelle
I' ap6tre Paul a annoncé l'Évangile de Jésus Christ. 11 est précisément
question de rétablir la réa lité hi storique de I' église dans certe ci té
grecque. Cet effort investigateur nous pennettra de découvrir la spéc.i-
fic ité de cette co1111nunauté. Par conséquent, ceci rendra poss ib le une
exégèse qui tient compte du coatexle originai de 2Co et de la pensée
de I' Ap6tre. Nous clécrirons, pour ce fa ire, le moment de la fondati o n
de la cornmunauté de Corinthe, ses membres, la re lation de ces der-
niers avec Paul et l'identité des adversaires dc l 'Apotre, présents dans
cetre église.

I. I Fondation de l 'égfise de Corinlhe


La rencontre de Paul avec I.e Cbrist ressuscité sm la route de Damas
fonda tout son élan apostolique et mi ssionnaire. A certe occasion, le
Seigneur fit de lui ministre de sa nouve lle alli ance à travers plusieurs
22 PARTlE l : LE CHRIST EST PUIS ANT Cl I. I : LI::. CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 23

ci tés (cf. Ac. 9; 2Co 3.6) 1• Fidèle à sa mission, l'apotre des Genti ls ar- Le sccond indice pour la datation de la première présence dc Paul à
riva à Corinthe cn provcnance d' Athènes. Cette demièrc fut une ville Corintbe est celui de la période du proconsulat de Gallion dan cette
rivale de Corinthe à cause de sa grande richesse. Paul en avait certa i- cité. A ce moment-là, J'apotre des Gentils fut amené à comparaitre de-
nement cntendu parler à Athènes avec une connotation dépréciativel. vant le proconsul par dcs Jui fs (cf. Ac 18, 12)6. Cette preuve a reçu le
En effet, la date précise de la présence de J'Apòtre, pour la prcmière conscnsus dc tous Jes spécialistes. Elle est par conséquent considérée
fois, dans la cilé grecque découle d' une déduction des données que Luc comme un élément important pour la chronologie paulinienne7 . En effct,
rapportc dans son li vre des Actes des Apotres ( 18, 1-1 8). De ces infor- la majorité des chercbcurs affi nnent en effet que le moment historique
mations, deux ind iccs importants ont été relevés. Il s'agit de l'édit dc correspondant à la frériode du service de Gallion comme proconsul à
Claude (cf. Ac 18,2) et la période de la charge proconsulaire de Gal lion Corinthe serait du I r juill et 51 au 30 juin 528.
à Corinthc (cf. Ac 18, 12). Le problème est bien entendu d' indiquer Cependant il est admis que Ga lli on n 'avait pas achevé son mandar à
avec cxaclitudc te momcnt historique corresponda nt à l'arrivéc de Paul. Corinthe en raison du climat qui était nuisible à sa santé9 . Etant donné
Le tcxtc de la toi émananl de Claude - quj «ordonnait à tous les Jui fs !es conditions diffi cil es et dangereuses de voyage pendant l' hiver dans
de s'éloigner de Rome» (Ac 18,2) - aurait, de fa it, été signé en 4 1 ap. l'est de la Méditcrranée (cf. Ac 27,9) 10, et que Gallion avait intcrrompu
.J.-C3. Retenons toutcfoi s que la date de 49 ap. J.-C. est ce lle qui est tra- son mandat, il est probablc que sa rencontre avec Paul ait eu lieu au
ditionnellement aeceptée par la rnajorité des spécialistes4. printemps entre juillet et septembre 5 1 ap. J.-C., autrement dit au début
Si nous admenons comme plausible I'année 4 1 ap. J.-C., et que Paul dc la fo nction du proconsul romain 11 . Ainsi, la date de la première vi-
a fo ulé le sol de Corintbe après l'arrivée d'Aquila et de Priscillc, qu i a- si te dc Paul à Corinthc se tixcrait autour 50/51 ap. J.-C 12 • A son arrivée
vaient qui né Rome suite à cet édit (cf. Ac 18, 1-2), alors le momcnl de
la première visite de Paul serait bien antérieure à 49 ap. J.-C .. c'est-à-
dire entre 4 1 et 44 ap. J.-C. Si. par contre, )'on retient la date babituelle d"Aquila et de Pri cillc. Cf. M. CARREZ. la dem:ième épitre, 27; K.P. OONrRlfO,
de 49 ap. J.-C., alors l'Apotre serait à Corintbe dans Ics année posté- Thessalonica all(/ fhe Christianitv: 111 -1 12: J. MURPHV-O"CONNOR. S1. Paul. 157.
rieure à 49 ap. J.-cs. 6 L·endroit où Paul fu t condui1 par Ics Juifs pour ctre jugé scrait le ~Tiµa I «tribune,
tribuna!». Cf. V.P. FURNISll. 2 Cori111hia11s, 26: J. MURPHY-O"Co INOR. Pa11/. llis
Ston•. 95.
1 Cf. D.M. NFUllAllS. <(À la rencontre». 357-358. 1· Cf. M. CARREZ. Lo de1m"ème épilre. 26-27: R.P. MARTIN. 2 Cori11thia11s. xxx:
2 Cf. J. MURPHV-O°CO'INOR, Pa11/. His Storv. 78. A. SACCHI. «La cronologia paolina». 65: J . fl'I EGA , Handbook of Bih/ic:al Chro110/-
3 Murphy-O"Connor pensc quc la date de 41 ap. J.-C. jouit d'une très grande pro- og1-. 3 16-318: J. MURPllY-O'CON OR, SI. Pa11/. 161.
babilité, car cn cc tcmps-là, l"empereur Claude aurait cxpulsé cen.ains Juifs, considé- 8 Cct cnsemble des donnécs est déduitc 3 partir d'une inscription sérieusement en-
rés commc dcs agitatcurs. Cf. SLETONIUS, Clc11ulius XXV. 134: L. L DtMAN . Pa11/. dommagée contenant la lcttrc dc l'cmpcreur Claude. L "inscription aurail écritc à la fin
162-171 : R.P. MARTI 1. 1 Cori111'1ia11s, xxx-xxxi: A. SACCHI, «La cronologia paolina». du prinlcmps ou début dc l'été 52 ap. J.-C. Cf. J. GU'ITHER. Messe11ger Clii(/ Exile,
64: J. MURPllV·O'CONNOR, Pa11/. A Criticai l({e 9-13; lD., St. Paul. 157, ID. Paul. 57. 171: F.F. BRUC'F, Nell' Tesra111e111, 3 1.35; E.M. SMALLWOOD. Jews 1111der Ro111a11
llis Stwy. 84.244, n. 7: K.P. DONPRIED. Thessa/011ic:a a11el the ChrisLia11itv, 110- 11 2. Rule, 213 n. 35; R. J l:.WETI, A Chro11olog1· n.f Patti'.~ /ife, 36-40: LD., Dari11g Pau/'s
4 Cene dmc rcnvoic uniqucmcnt à J'aulorité d' un seul texte ancicn, celui Oro~c Cf. life. 38-40: V.P. FURNISH. 2 Cori11tltia11s, 22-24; R.P. MARTll\, l Corintltia11s, xxx;
In .• llistuires. VII . 15- 16; R. JEWETT. DG1i11g Paul's life. 38; A. SACClll, <<La cro- G. 13ARBACrLIO, 1-2 Corinzi. 15: A. SACCHI, <<La cronologia paolina», 65;
nologia pttolimt». 64: J MURPHY-O'CONNOR. Pau/. A Criricnl l(/e, 9- 13; ID .. St. />aul. K.P. OONFRIED, TltessaloniC'fl tllld rhe Chris1ia11iz1·. 11 2: J . MURPllY-O'CONNOR, St.
158, ID.. Paul. //is Sto11 1• 244, n. 7: K.P. DONFR IED. Thes.wlonica and t!ta Chrisria11it1• Paul. 161-168; A. Prn,\, La seconda leuera ai Corin:::i, 40.
11 0- 112. . -• 9 Cf. V. P. FURN ISII, 2 Cori111hi1111s, 9- 10: J. MURPHV-O'CONNOR. St. Paul, 165;
5 Une qucstiun surgit conccrnant la précision de cctte in formalion vcnant dc Luc. A. PnTA, la seconda leflera ai Cori11:i, 40.
En Ac 18. 1-2. l"autcur du livrc des Actes des Apotres laissc cntcndre quc Paul serait IO Cf. D. CASSIUS, llist<WJ'. VII, 60. 11.2; J. MURPHY-O'CONNOR, St. Pau/, 166.
arrivé à Corinthc tout dc suite après Aquila et Priscille. Ccs demiers venaicnt dc 1"1- l I Cf. J. MUJU>llY-O'CON.NOR, Pa11l. His Story. 95-96: lo.. Sr. Pa11/. 167.
talie suite à l"édit dc Claude qui ordonnait à tous les Juifs de s"éloigncr di.! Romc. C'c- 12 Paul arriva à Corinthc au cours dc son second \'oyage missionnaire. après avoir
pendant. sclon ccnains écrivains. il est accordé quc certe loi conccmait culcmcnt fondé les églises de Philippcs. TI1cssaloniquc, Béréc et un tcmps passé à Athénes (Ac
quclques Juifs agitateurs dc Rome et non tous Ics Jui fs d' ltaljc. Il foudrait donc se 16.12-40: 17.1-34). Cf. V.P. FURMSll. 2 Cori11tltia11s. 22: M. CARRFZ. la deu.xième
dcmander s"il y cut rècllcmcnt un lien entre l'édit de Claudc et le déplacemcnt éµirre, 26-27: R.P. MARTII\, 2 Cori11thicms. xxx: A. SACCIU. <<La cronologia paolina».
24 PARTTE I : LE CHRlST EST PUISSANT CH. I : LE CONTEXTI:. DE 2CO 13.1-4 25

dans la ville grecque, Paul trouva l'hospitalité auprès d' Aquila et Pris- parmi eux. ceux qui joui ssaient d' un haut niveau ,socia1' 5 :_S t~ph~nas .et
cille. lls ava icnt tous le meme métier : celui dc fabricant dc tcntes (cf. sa fam ille étaient responsables de la comnumaute, et auss1 n eta1ent-lls
Ac 18, 1-3 ). C'est à I'occasion de cette première visite à Cori nthe que pas tcnus à un travail journalier pour subvenir au besoin ~limentaire.
Paul fo nda une communauté. li precba d'abord dans la synagogue mafa Cri pus et Sosthène étaient.chefs de la synago~e. o.u ar~/11s.~11agogos.
suite à rhostilité des Ju ifs (cf. Ac 18, 12-17). il quitta la synagogue. et Ce titre indique, pour ccrtams, un responsable JUnd1co-hturg1que dans
continua sa prédication auprès des pai"ens dans un autre endroit : chez la synagoguel6, pour d'autres. un titre d' honneur accordé par la com-
Justus, un converti de Corinthc (cf. Ac 18,5-7). Après une annéc cl de- munauté juive à un membre en signc de reconnaissancc à cause d' un
mic d'apostola!, Paul parti t de Corinù1c cn laissanl derrière lui une don offert a la communauté17. Cela montre qu ' ils étaicnt assez riches
communauté chrétiennc (cf. Ac 18,11.1 7). pour faire un tel ge te et assu~1er une ~h?q~e de ce genre. Ga"ius était
certainement aussi un homme nche car Il ctatl en mesure de rassembler
1.2 l es memhres de/ 'église de Corinrhe et leur positio11 sociale l' église entière dan a maison. . .
n est unanimement admis que les lettres dc Paul constitucnt Ics pre- Phébéc était diaconesse de l'cglisc de Cenchree, protcctnce de Paul
mières sourccs d' inforrnati on pour la com1aissance de la réalité sociale et dc beaucoup de chrétiens. Eraste a assumé la fonction de trésorier
des mcmbrcs dcs communautés pau linieancs. Quanl au li vre des Actes <le la vi lle de Corinthc' K. Aqu ila et Priscille étaient, comme PauL des
des Apòtrcs, il représente aussi ua élément non négligcablc de ren- fab ricants de tentes1 9. Leur standing était moyen mais pas au bas de
seignement en raison de sa crédibilité historique. Toutefois, il est de- l'échcllc sociale. lls étaient en mesure de se déplacer d·une cité à
mandé dc I ' utiliser avec une évaluation nuancécll. rautre et avaient des maisons confo rtab les20 . On le vo il, ce bref por-
Les chrétiens de l'église dc Corinthe étaient, pour la plupart, d'ori- tra it de chaque pcrson nc de la communauté présente une .i"!lage des
gine pa'icnne comme en témoignent les noms de certains, tels que Galus gens ayant un nivcau de vie assez élcvé. Cependant l ~s opm1ons s_ont
(cf. !Co l, 14; Rm 16,23a), Eraste (cf. Rm 16,22-23b) et Titius Justus partagées pam1i les spécia listes autour du statut soc1al des. prem1ers
(cf. Ac 18, 7). Notons toutcfois la préscnce dc croyants d'origine juive : chrétiens. notamment celui des croyants de la communaute de Paul.
Aquila et Priscille (cf. I Co 16, 19; Ac 18,2). Crispus (cf. ICo I , 14; Ac En effct la réalité sociale de l'époque dans !'empire romain corres-
18,8). Sosthènc (cf. I Co I. I : Ac 18. l 7). Jason et Sosipatros (c f. Rm pondai t à une société composée de deux classes sociales : les ricbcs et
16,2 1). Quant à Acba"icus, Fortunatus (cf. ICo 16,17), Lucius (cf. Rm
16,21), Quartus (cf. Rm 16.23 b), Stéphanas (cf. ICo 1, 16; 16,15, 17).
Phcbée (cf. Rm 16, 1-2) et Tcr1ius (cf. Rm 16,22). leur origine n'est pas
déterminéc 14. Concernant la situation sociale dc ccs membrcs, il y avait, 15 Cl'. G. TH!:JSSEN. The Socia/ Set1i11g, 75-76; J. MURPHY-O'CONNOR. Paul. His
Swn·. 85-86.
lé1 Cf. G. THEJSSI 'I. The Socia/ Setting, 7-1 .
17 Cf. J. M URPln -O'Co 'llOR. Paul. His Swry. 85.
66; K.P. Do FRIED. Thessa/011icu oml 1/te Christia11i1r. 112: A. PITTA. la seconda let- tl! Erastc aurai l assumé dcux slatus civiqucs élevés et richcs. 11 fut un officier
tera ai Corild. 40. · importanl dc la cité dc Corinthc et dcvinl par la suite édilc. li était un homme
13 Luc. outrc l"imprécision dans scs récits, est porlé à prcscnrcr les premicrs chré- libre de la ville, dcvcnu nanti grace aux activités commcrcinlcs. Cf. J.H . K ENCI.
ticns commc appanenanl à une clussc sociale élevéc. Cf. R. J EWETI. Oming Pa11/ 's Cori11t'1. Results. 99- 100; J. GAG É. Les classes. 160: G. TH FlSSF.N , Th e Socia/
Lijè. 7.24: M. H F.NGEL, Acts. 6 I -65, J. B ECKER, Pa11/11s. 34-41 : G. L ODEMA N, Pau- Se1ti11g. 75-76: ID.• «Socia! Structure». 78-80: W.A. ME EKS, Tlie First Urban
lus. 301 ; G. BARBAGLIO. 1-2 Corild, 19; A. SACC'lll a/.. lelfere. 37; J. M URl'HY- Cliri:aia11s, 4 .
00CON'IOR. Paul. A Criticai Life. 8: B. CORSA I. la seconda lelfera ai Coriti=i. 15: l'I Cf. W.-H. OLLROG. Pa11/11s. 26 aussi n. I05: W.A. Mt:.EKS. The Firsl Urhan
M. NEUHAUS, «À la renconlrc dc Paul». 357. Cltri,1ia11s. 9: J. M URPllY- O ' CONNOR. SI. Pa11/. 192.
14 li est probablc que certains mcmbres de la communauté de Corinthc avaient des :W ignalons que les convcnis <le Corinthc ne se ras~cmb l ~icn t pa~ en égli~7 ccntra-
esclavc dnns lcurs maisons. commc c'étai1 le cas dc Stéphanas et Crispus. lls ont pro- lisée mais plutòt eo di ffé rentes communau1és domcst1ques a caractc_re l'am1linl. Cclu
bablemcnt adhéré à la foi à suite dc lcurs maitrcs. Ainsi, le nombrc dcs convcrtis cxpliqucrait Ics divisions théologiqucs dans la communauté de Connthc ( ICo 1-4).
serait cstimé d'au moins quarantc mcmbres Cf. J. M URl' llY-O'CONNOR, Paul. Jlis Cf. Cì . TllEISSEN. The Sndal Setti11g, 89-92: J. M URPllY-O'CONNOR, Sr. Paul, I 83-
Story. 88: A. P1 fTA, la seconda h•lfera ai Corilt=i, 42-49 184. Paul. Jlis SIOry. 85: A. PITTA. La seconda leflera ai Corùi=i.
26 PARTI E I : LE CHRIST EST PUISSANT Cl I. I : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 27

les pauvres. Alors qu 'une minorilé vivait dans l'opulence. la majorité suma la fonction d'édile26. La diaconesse Phébée de Cenchrée. quoiq ue
de la population appartenait à la catégorie de nécessiteux21. n'étant pas une ancienne esclave, fut toutefois désavantagée sociale-
De ce constat, certains sont arrivés à souteni r l' bypothèse selon la- ment et poli tiquemcnl du fait d'étre femrne.
qucllc Ics premiers chrétiens étaient des gens pauvrcs, appartenant à Il s'en suit que tous ccs gcns dont l'ex.istence était rnarquée soit par une
une couche sociale basse22 . D'autres, en revanche. affi nnent que Ics origine servile soit par une position sociale de subordination. étaient les
églises de la premièrc chrétienté avaient dans son sein des personnes de micux disposés à accueillir le message paradox.al de la foi en Jésus Christ,
tous niveaux et groupes sociaux. n yen avait qui faisaienl partie de I'é- sauveur crucifié. Aulrcment dit, ils étaient les plus en mesure de comprcn-
lite politi quc locale et d'autres qui étajent en dessous du nivea u de cette dre que <da puissance de Dicu se déploie dans la faiblesse» (2Co 12,9).
première catégoric sociale23 • Les tenants de cette bypothèse sou lignent, Ainsi, compte tenu de la diversité due à l'éducation, aux origines religieu-
toutefois, que la présence des gens de la haute classe était signi ficarive es, aux nivcaux dc vie cl également aux espérances de chacun, la corn-
parrni ccs croyants. Toutes ces pcrsonnes furent tellemenl touchées par munauté de Corinù1e conslituait un ensemble hétérogène. Les membres
la bonnc nouvelle du Sauveur crucifié annoncée par Paul qu 'ell es se étaient unis par le lien de la foi en Jésus Christ27 . Lls étaient très dynam i-
son t converti es à la foi au Christ. Ce message paradoxal rejoigna it, cba- ques dans l'action28 . Jls tàisaient preuve d' un esprit compélilif~ étaient
cun dans sa situation propre. pleins dc fervcur et inspiraient confiance. En vertu de la présence de ces
Les convcrtis de Corinthe vivaient, de fait, dans une situation d' insé- qualités dignes d' une communauté chrétienne, PaLLI aurait-il sous-estimé le
curité existentiell e que la richesse de ce monde ne pouvait combler24 • risquc d'égarement de la pari de ses convertis?
Eraste, par exemple, bien qu' il eOt assumé une fonction importante
dans la cité, qu ' il eCtt acquis la citoyenneté romaine, qu' il eut. gagné 1.3 Relations entre Paul et la commwzauté
assez d'argent, n'en était pas moins marqué par son ancien statut socia! Paul avait quiné Corinthc pour Éphèse peu de temps après sa comparu-
d'esclavel5. Tel étai t éga lemcnt le cas de l'affranchi Gn. Babbius Phili- lion dcvant la juridiction de Gall ion alors proconsul d' Acha'ie. Toutcfois sa
nius, connu comme un des bienfaiteurs privés de Cori nthe, et qu i cn as- mission, durant son premier séjour à Corintbe, fut non seulement fécondc
mais aussi éprouvante.
Le contact avec la communauté de Corinthe se rétablit grace à Apol-
2I Cf. G. Al F0LDY. Rihnische So=ialgeschichte. 124; J.J. MEGGIT. Paul, Poverrv los qui rejoignit Paul à Éphèse vers la fi n de l'été 53, ou vers le début
and s111Til'al. 99. 179. · du printemps 5429. Apollos au rait fait état de la vie communautairc des
22 Engels souticnt quc le message de Paul était bien accucilli par les pnuvrcs parce
membres, notamment un écart significatif entre leur fo i et leur vie prati-
qu'il ne lcur ofTr.iit pas quclquc chosc de nouveau mais plutòt il rejoignait lcurs con- que : certains n'avaient pas abandonné leurs pratiques immorales de
victions rei igieuses. L •origine modeste de Jésus attirait égalcmcnt. bcaucoup dc tra-
vaì lleurs indigcnts dc la cité. Thcisscn fait remarqucr quc le cas d'Eras1e. croyant et leur passé pa'ien. La communauté ne savait pas cornment y apporter une
membrc dc la haulc classe dirigcantc loca le. est une rare exception. Cf. J.J. MFGGIT,
Pa11/, Poverty n11d S11rvival . 99. 179; LD., «Response lo Martin and Theissen». 86-87;
G. TI I l-ISSEN, The Socini Sefli11g, 69: ID., «Thc Socia I Structure», 71 - 75; 26 Sur le monument que Babbius éleva <Ì ses propres frais sur l'agora dc Corinlhc,
A. MA Lllf::RBE. Sociul Aspect, 3 1-59; W.A. MEEKS. The First Urba11, 5 1-53. 73: il munquc le nom dc son père (le patronyme), cela indique qu' il fut un hommc libre.
D . ENCìELS, Ro111c111 Corinth. 70. 105. 107. 108. 114.J 15: R.L. Fox. Tliespread, 293-3 12; Cf. W.A. MEEKS, The First Urhan Chrisrians. 48, n. 264.
D.B. MARTIN. <dustin», 5 1-55 . 27 C[ J. MURJ'HY-O'CONNOR. Pcn!I. lfis Sto1)', 89: A. PITIA. La seconda lelfera ai
23 Cf. G. TllEISSl!N, Socia/ Setti11g, 69-70.95-96. 106: A. MALI IERBE, Socia/ Aspet:I, eorin::i. 47.
3 1; B. WTTHf.RfNGTON lii. Conjlicl. 22-24: A. SACCHl, «Alla chiesa di Corinto», 111 - 28 C f. S. GAROFALO. «Un chef», 580; J. LAM13RECllT. Seco11d Cori111/iia11s, 4;
112: A. PITIA, La seconda lelfera ai Corinzi, 48-49. J. MURPHY-O'CONNOR. Pnul. llis Swrv, 89.
24 Cf. J. MURPll Y-O'CONNOR, Pau/. His Stmy. 86-88. 29 Apollos est un Juif nlcxandrin. · puissant dans les f:c ritures (Ac I l:!,24). Ce-
2S L'abscncc dc son nom de famillc sur l'inscription trouvée près du 1héatrc dc Co- pcndanl il régnail à Corinthc une siluat ion des rivalités entre ses partisans e1 ccux dc
rinthc laisse comprcndre qu'Eraste fui un affranchi. Cf. W.A. MrEKS, The First Ur- Paul (I Co 1, 12; 3.1 -4). Après son séjour à Corinthc, il partii à Éphèse oli il se rctrou-
ba11. 48: D.W.J. GILL. «In Search». 328-329: R.L. Fox. The Spread. 293-3 12: va à còté de l'apòtre des Gentils ( I Co 3.6). Cf. J. MURPHY-O'CONNOR. Paul. llis
J. MURPllY-O'CO'l'IOR, Pa11/. His Story. 87-88. Sr01y , 158: A. SAC:Clll. «Alla chiesa di Corinto», 110.114.
28 PARTIF 1 : LE CHRJST EST PUI SANT Ci l. 1: LF CONTEXTE DE 2CO 13.1-4 29

solution. A lïssue de ce rapport. Paul leur écrivi t une lettre. qui mal- De cette façon, il accueillirent délibérément des opposants de PauJ n.
heureusement n'a pas été conservéeJO. Paul. mi au courant de la situation probablement par Tirnothée 3x qui se
D'autres in fonnations parvinrent à Paul par le canal des gens de trouvait encore â Corinthe lorsque tout cela s'était passé, résolut de 'y
Chloé11 ( 1Co 1, 11 ). Ces derniers revenaient de Cori nthe. et lui rappor- rendre39. Il fi t une expérience triste et humiliante (2Co 7.1 1- 12); son
tèrent les problème qui minaient de la communauté32. L' Apôtre. préoc- autorité rut sérieu ement contestée. Les fils qu' il avait engendré par
cupé par cc qu'il apprenait y envoya Timothée s'enquérir de la situa- l'Évangile ( ICo 4, 15), les Corinth iens, ~e l' avaient pa dé:cn~u aupr~s
tion33. Quelque temps aprè le départ d~ Timothée ( 1Co 4, 17; 16.10-11 ). de c~ détracteurs. L'Apôtre quitta Corinthe pour la Macedome. vra1-
une délégation de Corinthe arriva à Ephèse en visite chez Paul. Elle emblablcment en mi-juillet 54 ap. J.-C.40, espérant toutcfoi y reveni r
comprenait Stéphana . Fortunarus et Achaïcus ( 1Co 16. 15- 17). l ls se (2Co 2, 1). . . . .
eraicnt entretenus sur une série de questions3.i. L'Apôlre ava it, par ail- En Macédoine, Paul reçut un bon accueil. La parttc1pat1on des cro-
leurs. reçu une lettre écrite par la communauté ( 1Co 7, 1). C'est ainsi que, yants de cette église à la co llecte en fa~e11r d~s pauvres dA c Jérusalem en
ayant été informé, il rédigea une autre lettre pour répondre à des ques- était la preuve (2Co 8, 1-4). li rentra a Ephese, vers aout 54 ap. J.-C.,
tions qui se posèrent dans la communauté avant la Pentecôte 54 ( 1Co sans passer à Corinthe bien qu ' il l'eCit souJrnité (2Co 1, 15; 2. 1)41• De là,
16,8). Il s'agit de la lettre canonique reconnue comme la première lettre l'apôtre des nations écri vit une lettre dans laquell e il parle de sa réac-
uux Corinthiens35 . Ce lle-ci aurait été apportée par la délégation à l'église tion au suj et de la dernière visite chez les Corinth iens; il ~ pein é à l' éc-
de Corinthe. Le. réactions fu rent diversifiées selon les groupes que cons- rirc42. Tite en aurait été le porteur (2Co 2, 13: 7.6)43. Quoique cette cor-
tituait la communauté. Le message de la lettre a bles é et indigné une respondance soi t malheureusement perdue, il ex iste cependant as ez
grande partie de croyant . Les partisans de Paul s'en réjoui aient pen- d' indications qui pem1ettent d'en avoir une idée+i.
dant que ceux de Pierre et d'autre membres récri minaient contre lui"'·
J MURPllY·O'CO OR, St. Pa11I. 189-192: Io .. Pa11/. Hi.\ Stun'. 16 7- 168: ID.• Pu11/. A
lO On le ·ait parce que la question s'était encore posée plus 1ard. Cf. A. SACClll, Criflcal Ufe. 273-322.
11Alln chiesa di CorinlO». 11 O; J. MURPllY-O'Co OR. Paul Ili.,· Story. 158; J7 Ce derniers débarquèn:nt à C'on nthc vers la moitiê de l'é1é 54 ap J.-C. Cf.
A. Pl n A, La ,·ecrmdu le11era ai Corin:i. 41. J. Ml RPllY-O'CON OR. Paul /lis Story. 168.
11
Chloé fui une riche commerçante d'Èphè e. Cf. G. THH%1· . The Social Se11i11g, lR Cf. J. MURPllY-O'CoNNOR. Pa11I. /lis Story. 168.
91-95; A. SACnrl. «Alla chiesa di Corinto». 114: J. MURPllY·O'CO 'OR. Pa11I f/i~ 311 Luc ne parle pas de cette viio>itc dan:. le!'. Actes des Apôtres. l:llc est une dcduc-
Storl'. 158-162: A. PITrA. La seconda let1era ai Cor111:i. 42. tion de 2Co 12.14 et 13.2. Par conséquent certains spêcialis1e sout1ennem que Paul
32 Le rapport c.Jc · gen de Chloé di ait probablement que la communauté était divi- ail visite Corinthl.! deux fo is seulement tel que Luc le mentionne (Ac 18.1-18: 19.21:
éc en trois fac11on!'.: de part1!'.ans d' Apollos. de Paul et de Cépha!'. ( ICo 1, 12): lïm- 20. 1-2. o·au1rcs. en revanche. parlent d'une troisième vtslle de Paul à Connihe. ~ài­
moralité sexuelle fobait l'objet d'une profonde satisfoc11on ( 1Co 5.1- ): le membres ~an1 allusion n2Co 12.14 et 13.2. Celle visite aurai1alors eu heu entre le deux v1s11e
de ln communau1é avaient volontiers recours aux j uridic1ion!. païennes ( 1Co 6, l - 11): rapportées par Luc. Cf. B. CORSA r. lu çeconda leuera ai Cori11z1: F.J . MAITRA, Il
ils fréqucn rn1e111 les pro ' Il tuées sou!> prérexte que tout leur était permis ( 1Co 6. 12-20}: Cor1111/11t111~. 16: J. MURPllY·O'CONM>R. Pa11I. A Critical life. 209-291; Io .. St. Pa11I,
leur réunion en commun ~'était scindée en deux groupes, l'un avait à manger el à 17 1- 173. lo .. Pa11I. /lis Ston". 168-169.
boire plui. quïl n'en fa llait. l'autre n'avait rien ( 1Co 11, 17-34) -10 Cf. E. B. ALLO, Seco.11de épître rwx Corinthien.'i. Ylll-X: C.K. BARREll. «'0
3J Cf. Y.P. FUl{N ISll. 2 Cori11t!tlans, 28; J. MURJ>llY-O 'CONNOR, Paul. /Ils Stor\I, nÔLK~oixç (2Cor 7, 12)», 149 n. 2; .1 . MURPllY-O'CONNOR, Parti. His S1m:1•, 17 1-1 72.
161. . 4 1 Cc chungcmcnt fü t le troisième du genre dans ses projets de visiter Corinthe. Cf.
.1 4 Les questions telles que le mariage ( 1Co 7, l - 11 ). la possibilité de manger la J. MURPllY·Ô'CONNOR, Paul. /lis Sl()rv. 171.
viundc offerte aux idoles ( ICo 8 10): la hiérarchie ûes dons spirituels ( ICo 15). 42 <<Oui. c'est dans une grnndc tribulation el angoisse de cœur que je vous ai écrit.
15 parmi bien des lnnnes. non pour que vous soyez auristés. mais pour que vou!> sachie1
Cf. Y.P. FURNI Il. 2 Corinthians. 27: R.P. MARn '. 2 Cori11lliit111\. xxxiv;
A. SACC:lll, «Alla chicsa d1 Corinto», 114: J. MURPllY-O'CONNOR. Paul. lfiç Sum·. l'extrême nffec11on que je voul'.t ponc» C'e!.l la lettre appelée par les exégètes «lettre
162; A. PITI1\, la çecondn l<!llC'ra ai Corin=i. 41 . • des lannes ou lettre des douleurs» (2Co 2.1). Cf. C.K. BARRFTI. «'0 ttOLKÎ)ottç (2Cor
lli La rcla1ion enire Paul et les Corinthiens s'étall détériorée après la réception de 7.12 )»: 149; ID.• E\\'ayço11 Pa11I. 108-115.
ccue leurc ( IC'o). Cf. f . BLOl\,\IUTI. «Paolo ed Apollo», 14-34. C. SNrr. la prt!- 41 Cf. J MLRPHV-O'CO'l'IOR, Puul. 1/1' Ston'. 172.
111/ere épitre. 20-22; P.F BI ATRK E. «Gli avver ari». 23: G. BARBAGUO. 1-2 Cori11:i, +I cr. R.P. MARTIN. 2 Cori11thians. xxxiv: B. WITHFRNGTON Ill. Co11/1ic:t. 330:
93: B. WITllfRl'l(, 101' Il l, Co11f/h:t. 328: A. ACClll. «A lla Chiesa di Connto». 114: J Mt 1RPllY·0'Co t-.OR. Pa11I. Ili.\ Story. 172.
30 PARTIE l : LE CHR IST EST PUfSSANT CH. l : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 31

L'attente de La réponse à cette missive fut un moment de grande agi- pondance se trouve présentement dans les quatre derniers chapitres de la
tation pour Paul (2Co 2,12-1 3; 7,5). L'arrivée de Tite représentait un deuxième épître aux Corinthiensso.
moment d'immense joie (2Co 7,6) et également d' apaisement à cause Quant à savoir comment s' étaient terminés les conflits dans la commu-
des bonnes nouvelles qu ' il apporta. L' Apôtre apprit que les croyants nauté de Corinthe, il semble qu' ils se seraient résolus avec la troisième
avaieot agi en sa favem en punissant l'auteur de l' offense dont il avait visite de Paul. Ceci est d'autant p.l us que, dans les extraits de la lettre de
été victime (2Co 2,5-1 1); ils avaient contribué avec enthousiasme à la Pau l aux Romains, il ressort que l'Apôtre était effectivement reparti à Co-
collecte pour les nécessiteux de Jérusalem45. Tite n' avait au reste pas rinthe (cf. Rm l5,25-26 et 16, l.23-24). Il avait logé chez un des croyants
manqué de signaler que les critiques contre Paul, de la part de ceux qui de cette communauté et avait écrit sa lettre aux Romains étant là-bas. Il
étaient blessés par sa précédente lettre, n'avaient pas tari (2Co L, 12- 14). avait, du reste, envoyé aux chrétiens romains des salutations des croyants
Ainsi, Je Tarsiote p.rit son temps pour écrire aux Corintruens probable- éminents de Corinthe. De plus, la collecte pour Jérusalem était achevée à
ment au printemps 55 ap. J.-C. travers !' Achaïe, quj pourrait inclure Corinthe5 1.
Cette missive correspond aux neuf premiers chapitres de l'actuelle deu-
xième lettre aux Corinthiens (2Co 1- 9). EUe est appelée par des spé- 1.4 l es adversaires de Paul
cialistes «lettre de réconciJiation»46. L ' Apôtre y décrit la souffrance et la
Un groupe des gens venus d'ailleurs ét~it arrivé à Corinthe après que le
faiblesse comme des traits distinctifs d' un responsable de la communauté Tarsiote eût quitté la communauté pour Ephèse52 • Us trouvèrent bon ac-
des croyants. Par là, il visait atteindre notamment de deux objectifs. Le cueil parmi certains membres de La communauté qui étaient déjà en conflit
premier consistait à la rupture entre ses convertis devenus hostiles à lui et avec Paul. Ces nouveaux venus ne respectèrent pas le travail d'évangé-
les semeurs de troubles venus d'ailleurs. Quant au second but, il s'agissait Üsation réalisé par l'apôtre des nations. Ils ont par conséquent soutenu des
de la réconciliation entre Paul et la commuoauté4 7.
croyants de la communauté, dans lems accusations d' incohérence à l' é-
Cependant Paul fut encore infonné de la dégradation de la situation au gard de l' ApôtreS3. Pour eux, Paul ne tenait pas ses promesses; il avait, de
sein de la communauté. Les critiques, d'autrefois proférées contre lui, fait, promis plusieurs fois de leur rendre visite mais il ne l'avait pas ac-
avaient repris de façon très virulente. Les agitateurs se prévalaient de leur
don spirituel et le sous-estimaient (2Co 11,5). Dès lors, discrédité et in-
quiet pour l'avenir de cette égl ise, I' Apôtre envoya encore une lettre vers 50 A partir de la reconstruction des relations entre Paul et ses convertis, il découle
que les chapitres 1- 9 correspondent à la quatrième lettre de I' Apôtre aux Corinthiens,
56 ou 57 ap. J.-C. C'est la lettre reconnue par des bibUstes comme «lettre et q11e les chap. 10-13 à sa cinquième lettre. Cf. V.P. FURNlSH. Il Corinthicms. 41 . 44:
polémique».i8 . A travers le sarcasme, l'ironie, etc., il s'exprima avec R.P. MARTIN, 2 Cori11thia11s, xlvi; J. LAMBRECHT, Second Corintliians, 4; A. PITIA,
grande émotion (2Co 11 ,J9-21)49. Il voulait par là répondre aux reproches la seco11da /ettera ai Cori11zi. 4 1.
reçus. En effet, il l'a fait avec un sens dramatique exceptionnel en vue 5 1 Cf. B. WJTM ERINOTON, Co11jlict. 35 1; A . PITTA, La seconda /ettera ai Corinzi,
d'anéantir les présomptions de ses adversaires (2Co 12,2-4). Cette carres- 41.63. G. Bomkamm a:ffinne, par contre. que rien en 2Co 10- 13 n'amène à dire que
les conflits avaient une fin positive et que la paix était revenue. Voir lo., «The Histo-
ry», 258.
45 La question de la collecte en faveur de 1' Église de JéntSalem ne fajsait pas 1'ob- 52 La majorité des exégètes soutiennent que le dèbat relatif aux adversaires de Paul
jet de la lettre écrite panni les larmes (2Co 2, 1ss). Cela aurait été l' il1itiative de Tite. commença à parti r de l' article de Baur. L'auteur a indiqué la faction des judaïsants c l
qui, probablement, voyant que les reproches de Paul étaient bien accueillis, leur parla celle de Pierre, en opposition aux groupes des partisans de Paul et d' Apollos
de cette collecte. Ce dernier fut un sujet cher à !' Apôtre (2Co 8,6). Cf. J. MlJRPHY- cr. A. SACCHI, «Alla chiesa di Corinto», 11 6. Signalons que le résultat de la recons-
O'CONNOR, Paul. His St01y. 179. truction du confli t à Corinthe est hypothétique. JJ découle seulement de ce que Paul
46 C f. J. M lJRPHY-O 'CONNOR, Paul. His St01y. 179; A. PITIA. La sei:onda lettera relate dans la deuxième lettre aux Corinth iens. Voir M. CARREZ. La deuxième épître,
ai Cori11zi, 3 1.41. 30; O. MARGUERAT, <<2 Corinthiens 10-1 3», 499: J. LAMBRECHT. Seco11d Cori11thia11s.
47 Cf. J. MURPHY-O 'CONNOR, Paul. His Sto1y . 179-184; A. PmA, La seconda 6-7: T. S TEOMAN, The Charac1er. 25-42: A. PlTIA, l a seconda lettera ai Corinz i, 69-
lettera ai Cori11zi, 59-60. 73 .
-18 Cf. A. PITIA, l a seconda lettera ai Corinz i, 31. 5J Cf. D. MARGUERAT, «2 Corinthiens», 499-500; J. LAMBRECHT, Second Cori11-
49 Cf. G. BORNKAMM, «The History», 258; J. M URPHY-O 'CONNOR, Paul. His
thia11s, 5-6; F.J. LONG, A11cient Rheroric, 2; T. STEGMAN, The Character, 1;
St01y, 189- 190; A. PITI/\, La seconda lettera ai Corinzi, 41. J. M URPHY-O'CONNOR.SI. Pa11/, 191-1 92.214.
32 PARTLE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT CH. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 33

compli (2Co 1,15; 2,1). En outre, ils lui reprochaient de manque d' amour posant des idées présentes dans la deuxième lettre aux Corinthiens,
par rapport à eux. Ceci est du fait qu'i l n'acceptait pas leur aide financière eUes décrivent un tableau vague des opposants61.
pour son service, alors qu' il recevait celle des fidèles venus de Macédoine Quant à nous. nous soutenons l'hypothèse selon Laquelle les adver-
(2Co 11,9). saires de Paul seraient des Judaïsants ou des Juifs chrétiens. En effet,
Au sujet de l' identité des semeurs de troubles, une sér]e d' hypothèses I ' Apôtre, lui-même, décrit leurs comportements en affinnant qu ' ils sont
ont été avancées par les spécialistes54 . La première supposition qui a été des ministres du Christ. Cependant, il les considère comme des «faux-
longtemps suggérée est que Les opposants de l ' Apôtre à Corinthe au- apôtres» (2Co 1l.13 ) venant d' ailleurs, prêchant un autre Christ, un
raient été des judaïsantsss. Ceux-ci seraient des chrétiens juifs que Paul Évangil e différent de celui que lui, Paul, a annoncé (2Co 11 ,4-5). En
a rencontrés en Ga latie (2Co 11,4-6; Ga 1,6-9). Certains ont tenté de les plus, ils aiment être pris en charge (2Co 11,7-12), se recommander eux-
identifier aux chrétiens gnostiques56 . Pour d·autres, ces adversaires se- mêmes, se faire recommander et se comparer entre eux (2Co 3,1;
raient des juifs hellénistes57. lis ont des quali tés naturelles importantes. 10.11-12). Ils sont doués en cLiscours (2Co l 1,6), se complaisent dans
préva laient leurs visions et ,leurs miracles. Us auraient été des mission- leurs visions (2Co 12,1-4) et dans leurs miracles (2Co 12,12).
naires visiteurs prêchant l'Evangile en Asie mineur et en Grèce58. Une
autre solut ion est celle suggérée par la position de ceux qu i di stinguent 2. La deuxième lettre aux Corinthiens
le groupe de «super-apôtres» à celui de «faux-apôtres» (2Co 11,5.23; Dans ce point de notre dissertation, nous proposons une étude de l'en-
12, 11 ) 59. Le premier ensemble serait les apôtres de Jérusalem, et le se- semble de l'épîtTe. Cette démarche nous permettra de mettre en évidence
cond se reconnaîtrait dans les personnes hostiles à Paul présentes au le style de la lettre, ses traits spécifiques, les circonstances et le moment
sein de la communauté de Corinthe. Ces derniers s'appuyaient sur l'au- historique correspondant à sa composition. La possession de tels éléments
torité des apôtres de Jérusalem et contestaient la légitimité apostolique servira à cerner la structure de la lettre et des différentes opinions concer-
du Tarsiote. Il y a aussi ceux qu i les considèrent comme les aux pneu- nant sa totalité.
matiques et eoù1ousiastes60. Sans vou loir remettre en cause la plausibi- 2.1 Intégralité de la le/Ire
lité de toutes ces conjectures, remarquons néanmoi ns que. tout en pro-
L'unité de 2Co est reconnue par bon nombre d'exégètes62. Ces derniers
soutiennent que la lettre dans sa forme actuel le équivaut à celle qu i est
54 Cf. N. 1IYDAHL, «The Corinthians», 27; V.P. FURNISH, 11 Cori11thia11s, 49;
J. LAMBR.ECHT, «Paul», 137-138; T. STEGMAN. The Character. 26-40: A. PrrA, l a se-
contenue dans les manuscrits. En outre, ils reconnaissent non seulement le
conda lettera ai Corinzi. 69-73. caractère homogène du vocabulaire, mais encore l'unicité des genres ar-
SS Certains spécialistes, tels que Baur c l Lüdemann, soutiennent qu' il s'agirait des gumentatifs.
judéo-chrétiens restés fidèles à Pierre et aux observations rituelJes de la loi mosaïque. Ils admettent, par ailleurs, que le canevas épistolai re y est respecté, et
Cf. H. WINDtSCIL, Der Zweite Korintherbrief ,23-26; 0.W. OOSTENDORP, A11other que la disposition de la lettre suit le modèle de la rhétorique gréco-ro-
Jesus. 4-5: C.K . BARRETI, «tjJE UÔ<X1îOO• OÀOL», 385.395; Lo., «Paul». 250; Lo., Essoys 011
Paul, 60-86; J.J. GUNTlfER, St. Paul, 299-303; G. LÏJDEMANN. Paulus LI. 5. 130.132-
143; P.W. BARNElT, «Opposition in Corinth», 3; R. PENNA, «La presenza», 11 5.
56 Cf. R. BULTMANN, Der Zweite Brief 132-14 1: W MARXSEN, Ei11leit1mg, 71; 61 Lambrecht se demande si les controverses ne seraient pas motivées par des rai-
W. SCHMITHALS, Die Gnosis, 34-37: P. PERKINS, G11osticism, 74-92. sons ehristologiques. cr. J. LAf!:1RRECHT, «Paul», 133- 138; ro., Second Corimlticms, 7.
57 cr. O. GEORGI, Die Gegner, 80: G. BORNKAMM, «The History». 259: 62 Cf. E.-8 ALLO, Seconde Epitre aux Corinrltiens, 254-269; W.1-1 BATES, «The ln-
N. HYDAll1., «' Parties' and the Crisis». 28; P.F. BEATRICI:, «G li avversari». 22-23; tegrity of li Corinthians», 56-69; A.M.G STEPHENSON. «A DefensC>>, 82-97;
V.F. Fusco. «G li oppositori di Paolo». 261. D. ÛUNTHRIE. Ne111 Testamenr Introduction. 430-439.449: N. HYDAHL, «Die Frage».
58 Cf. J. LAMBRECHT, «Paul 'S», 138; Lo., Second Corinthians, 6- 7. 289-306: P.E. 1-I UGl lES, Paul, XXI-XXXV; G. SEGALLA. «Cocrenza», 149- 166; lo.,
59 Cf. E. KÂSEMANN, <tDie Lcgitimüat», 4 1-48; M.E. THRALl., «Supcr-Apostles», «Struttura», 189-2 18: C. W OLFF. Der zweile Brie/, 1-3: P. BACHMANN, D er ::weite
43-56. Bri<f. 3; S. CIPRIANI. Seconda lettera ai Cori11::i, 246-249; S. VtRGULlN, «Seconda
60 11 s'ag-it de ceux qu.i se font promoteurs de la liberté nouvelle, qui sont enthou- lcttcra ai Corinzi», 522-524; J. LAMBRECIIT, Second Corinthions, 9; F. MANZI. Se-
siastes de l'évangile et qui fuüsseot par ignorer la prédication sur le Christ en tant que conda Lettera ai Corinzi, 25; A. WIKENIIAUSER. Ei11leitu11g in das Neue Testa111e111,
crucifié. Cf. R. .I EWETT, Paul, 40; J. S UMMEY, ldent(fjiing Paul 's Opponenrs , 154-159. 282·283; M.J. HARR1S. Second Corinthians, 4 1-50: T. STEGMAN, The Character. 25.
34 PARTlE 1 : LE CHRIST EST PUTSSANT CH. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 35

maine63. Cependa nt, elle présente globalement des lacunes dans l'en- 2.2 Caractère composite de la lellre. Les théories de partitions
chainement d' idées. entre autres. des ruptures à l'intérieur des chapi-
tres6-l. Le passage de certains chapitres à d'autres sont brusques. Les cas . ~a conclusion à laquelle les bibl iste~ sont parvenus remonte, en fait,
les plus frappants se trouvent principalement en 2Co 2, 1 3- 1 4 ~ 7,4-5 et a 1 année 1776. ~orsque Semler. découvri t dans le texte le deux conjonc-
9. 15- 10,1. En 2, 13, Paul parle d'avoir quitté Troas pour la Macédoine tu~es. La pr~ 1~1ere se trouverait entre les cb. 8 et 9, du fait qu ·un même
parce qu ' il ne trouvait pas son frère Tite. SLIJCt est traite dans les deux chapitres. La seconde jonction se présente
En 2, 14, Paul change de sujetjusqu 'en 7,4. Le thème n'est plus celui entre les ch. 9 et 1O. En effet. Sem Ier constate une différence de ton cl
de son rapport avec les Corinthiens mais plutôt celui de la défense de de contenu entre les ch. 1- 8 et Les ch. 10,1- 13,10. Ainsi, il affirma que
son ministère d'apôtre. De la même façon, à l' intérieur de la secti on la façon de s'exprimer et le contenu de cc derniers chapitres seraient
2, 14-7,4, il interrompt l'appel qu ' il adressait aux Corinthiens. 11 com- co mpré~e ns iblcs, s' ils formaient une lettre séparée des chapilres 1- 8.
mence un autre discours par lequel il avertit ses destinataires de ne pas Un siècle plus tard, et de manière indépendante, Ado lf Hausrath et
compromettre les promesses qu' ils possèdent (6, 14-7, 1)65. En 7,2, James Kennedy soutiennent l' hypothèse de Scmler. lis estiment, par
!' Apôtre reprend l'exposé d'appe l arrêté en 6,13. Il fait de même en 7,5 contre, que les ch. 10-13 auraient été rédigés avant les 2Co 1- 9. Hau-
oli il revient à la narration laissée en 2.13. srath l' identifie à la «lettre des larm es» (2,4; 7,8). Sa proposition porta
Les chap. 8 et 9, aussi, laissent à penser, étant donné que !' Apôtre le nom de <~ 1 '.hypothèse de quatre chapitres»67 et fut soutenue par beau-
traite la question similaire de la collecte dans ces deux chapitres de la cou~ de spec1alistcs6 ti. Quant à Kennedy, il voit dans les ch. 10- 13 une
même lettre (8,4 et 9, l ). Une dernière observation se trouve au niveau parll.c de 1~ l~llre des la.nnes69. Sa conjecture a été plus appuyée par
de la transition entre 9, 15 et 10, 1. Elle porte sur le changement soudain plusieurs b1bl1stes anglais et américains7o. Par conséquent. toutes ces
et inattendu de ton jusqu'au chap. 13. La divergence dans le style et ~y~othèses ont donné. naissance aux théories de partitions. Celles-ci
dans le fond est également remarquable dans les chap. 10- 13 compara- eta1ent devenues la methode prédominante pour expliquer le caractère
tivement aux chap. 1- 9. Le mode d'expression de Paul est posé dans complexe de. 2<;o. Dans c~ t~ava iJ , nous tentons de regrouper en trois
les neuf premiers chapitres pendant que. dans les quatre dern iers, il tendances pnnc1pales les d1fferentes positions des auteurs qui admettent
devient subitement agressif. ce procédé. li _Y a ~ 'abord ceux qui divisent l'écrit de l' Apôtre en deux
En raison de cette preuve, les tenants de l' intégralité de 2Co affir- et placent la redact1on des ch. 10-13 avant celle des ch. 1- 9. Pui ceux
ment que son caractère complexe se justifie par les différente étapes qui soutiennent également la présence deux missives. cepend;nt ils
qui ont marquée sa rédaction par l'Apôtre66 . Toutefois, il ressort de ces upposcnt que la rédaction des ch. 1- 9 a précédé celle des chap. 10-13.
observations que les ruptures, au niveau des passage à l' intérieur de Enfin, ceux .qui vo ient en 2Co plu ieurs correspondances.
l'écrit de Paul, ont soulevé la question de son unité. Ainsi, certains exé- Dans le sillage d~ Hausrath, Je tenants de l'hypothèse de la première
gètes ont été amenés à soutenir l' bypothèse selon laquelle la deuxième t.cn?a.ncc reconstruisent l'événement de la manière sui vante 71 : Paul
épître aux Corinthiens serait une lettre composite. eta1t informé de la détérioration de la situation à la communauté de Co-
rinthe. li fit une visite d' urgence durant laquelle survint un incident
61 C f. F..1 LONO. A11cie111. 2.
6-l C'f. G. BORNKAMM. «The History», 258-264: M . CARREZ, la deuxième épître. _
67
Cf. H.D. B~TZ. 2 Corlntliians 8 and 9. 12; R.P. MARTIN, 2 Cori111/iians, xli ;
15: R.P. MARTIN, 2 Cori11tliia11s, xxxviii-xl; D . M ARGUERAT, «2 Corinthiens», 497- l-. MANZI, Seconda /elfe/'{/, 23-24: T. STEGMAN. The Character, 9: A. PITIA. la se-
498; G. BAIŒAOLIO, 1-2 Corild. 94: B. WITllERINGTON Ill, Cm1/lict, 328-333: cond(! le//ero ai Cori11zi, 20.
A. SACCHI. «Alla chicsa». 123 ; A . PITIA, la seconda /e//era ai Corilt=i. 20-24. 68
. Cf. F. WATSON. «2 Con>, 324-325 ; G. BARBAGLIO. Seconda /elfe/'{/ ai Cori11-
bS Cette périscope (6, 14-7. 1) esl considérée comme un texte non-paulien par plu- ;:1. 97.

30 :~ Cf. J.H. K Fl\NFDY. «Are there Two Epistles in 2 Corinthian ?». 231-238.285-
sieurs exégètes. Cf. G. BuR KAMM. Pmt!us, 248; J.A. FITZMYFR. «Qumrân>>, 271-280;
J. GNlLKA, «2 Kor 6.14-7.l. irn Lichte», 89-99; H. B RAUN. Qumran und das Neue
Testament. 1. 201 -204: D .H . BETZ. «2Cor 6: 14-7: 1: An An ti-Pauline Fragment?», 88- 70 Cf K. LAKI • The Earlier Epistles. 144-175; A. PLUMMER, A Critica/ and E:re-
108: M . CARIU:L. lo deuxième épître, 6. get~~·al Comme11u11:i•, xxii-xxx vi : R.H. STRACllA . The Sec:und Epistle, XIV.
Ml C f. M. HARRI • Second Corimhians. 50-51 . C f. F. M A 'Il l , Seconda le1tera, 24; T. STEGMAN. The Character. 11.
36 PARTIE 1 : LE C HRI ST EST PUlSSANT CH. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 37

entre lui et un agresseur. De retour à Éphèse, il écrivit la lettre des lar- extrêmes. Cec i est du fait qu ' une unité interne de chacune de ces deux
mes présente en 2Co 10-13. L'effet de la missive fut pos itit~ d 'autant mi ssives en 2Co est bien remarquable. Notons en particulier l' emploi
plus que l'auteur de l'offense ava it été puni. Paul , content d ' apprendre du même vocabulaire, notamment celui de l'orgueil78. Nous soutenons,
cette bonne nouve ll e, rédigea la lettre qui se trouve en 2Co l- 972. Selon en revanche, l'opinion de la majorité qui voü en 2Co un ensemble de
les partisans de cette conjecture, la forn1e actuell e aurait été réalisée par deux lettres originellement séparées.
les sc ribes qui avaient rassemblé les orig inaux en plaçant la première Quoi qu ' û en soit, toutes ces conjectures avancées n'aboutissent pas,
lettre à la fin73. c 11 dépit de leur plausibilité, à un résultat satisfaisant79. Le problème qui
La deux ième tendance, par ai lleurs, part de la supposition de Semler resLe et contre lequel toutes les différentes théories de partitions butent
et ne voit qu'une seul.e rupture dans le texte. Ell e divise la lettre en est l'absence d ' un manuscrit et des écrits patristiques qui atteste.raient
deux el affinuent que les ch. 1- 9 ont été écrits avant les ch. 10-13, et que la deuxième lettre aux Corinthiens est une compi lation de plusieurs
que la letn·e des larmes n'a plus existée. Cette proposition bénéficie de lettresso. Vu que l'étude critique historico-Littéraire s'est limitée à pré-
la faveur de la majorité des exégètes74. Ceux-c i présenten t la situation sencer des lacunes Li ées à la question de l' intégralité de 2CoB1 sans pou-
de la façon suivante : Paul, de retour de sa visite à Corinthe pendant la- vo iJ les résoudre, force est de procéder par une autre approche.
que lle iJ a été victime d 'une offense, écrivit d 'abord la lettre de larmes
aux Corinthiens. Cette dernière n'a pas été conservée. Ensuite, à cause 3. Analyse rhétorique littéraire de 2Co
de la .réaction favorable de ses convertis à sa correspondance, il rédigea La méthode qui examine de façon détaillée l'aspect rhétorique de la
la missive qui se trouve en 2Co l- 9. Enfin, à cause de l' aggravation de lettre, que nous présentons ici , se veut une vo ie alternative pour com-
la situation au sein de la communauté, une autre épître fut envoyée aux prendre la cobérence discursive de 2Co. Tl s'agit précisément d ' une
Corinthiens par !'Apôtre. Tl s'agi t des actuels ch. 10-1 3. ana lyse faite sur cette épîtTe dans la forme, telle que nous l 'avons dans
Le troisi.è me groupe de biblistes représente ceux qui voient la pré- les manuscrits et dans la tradition canonique82. En effet, la dimension
sence de plusieurs notes en 2Co. Ce1tains la divisent en tro is 7s. en argumentative constitue l'élément Je plus important de l'analyse rhéto-
cinq76 et d 'autres sont arrivés à proposer une fusion de plus de cinq bil-
rique littéraire. Cette dernière, appliquée à 2Co. pennettra tant de mon-
lets épistolai res p résents en 2Co77. Ces spéc ialistes trouvent des diffi -
cultés pour justifier la forme actue lle de la deuxième épître aux Corin-
thiens. A notre avis, nous trouvons que les positions qui soutiennent 78 Par ailleurs, notons également que le vocabulaire employé dans les deux lettres
l' assemblage de p lus de deux lettres en 2Co représentent des positions révèle leur unité. Bien quïl soit utilisé dans w1 contexte d'apologie dans les deux
écrits. iJ se diffère. néanmoins par le ton. En 2Co 1- 9. nous avons un ton posé, tandis
qu'en 2Co 10- 13 un ton polémique. Cf. A. PrnA, La Seconda le11erc1ai Corinzi, 25.
72 Dans la lellre r Apôtre encouragea les Cçrinthiens à pardonner l' offenseur Cl à 79 Cf F. YOUNG - O. FORD, Mea11i11g, 28-36: F. MANZl. Seconda lettera, 21-22:
reprendre leur préparation pour la quête de l'Eglise de Jénisalem Cf. K. LAKE. The T. STl:.GMAN. The C/1aracter, 42.
Earfier Epis rie. 173- 175: 80 CC P.E. HUGIJ ES, Paul. XX I; F. Y OUNG - D. FORD. Meaning, 36:
73 CC T. STEGMAN, Tite Charac1er, 12. B. WITHERIN GTON ln , Conjlicl, 328-329; F. MANZI, Seconda /ellera, 25; T. STEGMAN,
74 Cf. C.K. B ARllETf, Th e Second Epistle, 20-2 1.243-245; V.P. FURNlSJI, li Corin- The Character, 13.23.
thians, 35; Lo., Tite Thenlngy, 9 n. 16: R.P. MARTIN. 2 Cori11thians. xlvi : 81 Cf. il convient de souligner que la problématique de l'intégralité de l'épître ne
J.L. SUMMJ:.Y. lde11t(fj1i11g Paul, 126: J. MURPHY-O'CONNOR, The Tlteology, 11-1 2; met pas en doute la dimension canonique et inspirée de la lettre. Cependant. elle s'a-
N.M. WATSON. Tite Second Epistle. XXV Ill -XXIX; J.P. SAMPLFY. The Second Le11er. vère importante pour la comprébension de sa stnicture, de son contenu, de la relation
9. 11 -12; B. WrrfTERTNGTON ITI, C01!flicl. 33 1; A. PIHA, La Seconda Le11era ai Corin- entre Paul et les Corinthiens. et avec ses adversaires. Lire F.J. LONG. A11cie111. 4;
2i. 25 . F. MANZI, Seconda leuera ai Corinzi, 25; A. PrITA, la seconda leuem ai Corinzi, 17.
75 Cf. J. WEISS, Earliest Chris1ia11ily. 323-357; R. PBSCH. Paulus, 82-84; R2 En effet, l"Eg(jsc affinne que «c"est le texte dans son état fi11a l f.. .] qui est ex-
G. B ARBAGLIO, 1-2 Cori1i=i. 97: M.E. TllRALL. A Critical and Exegedcal Co111men- pression de la parole de Dieu». Cf. CBP, /111erpré1C1tio11, 34. C'est donc à la forme ac-
1arv, 5-20.35-42. tuelle de 2Co, comme trne seule lettre, que l'analyse est appliquée. Cf. B. W!THER-
/6 Cf. G. BORNKAMM. Paulus. 246-247. IN(JTON ITT. Conjlict. 329: D. AMADOR. «Tbe Uaity». 4 l l.4 13-4 14; Lo ., «Revisiting 2
77 Cf. W. SCllMITHALS, «Die Korlntherbriciè». Corintbians». 93. 108-J 09; T. STEGMAN, The Churacter, 25.
38 PARTΠ1 : LE CHRJST EST PUISSANT CH. 1: LE CONTEXTE DE 2CO 13,1-4 39

trer l' hannonic dans ragencement des djfférents thèmes que d'ex- affinnent également que 2Co démontre son unité dans la mesure où elle
pliquer les reprises des discours dans l'ensemble de la missiveRJ. A cet est interprétée dans cette perspective. Ainsi, pour justifier leur position,
effet, nous exposerons rapidement l'appLication faite de cette méthode ces bibliste se réfèrent à la lettre de Dérnosthène91. En effet, les deux
par certains spécialistes, ainsi que la structure rhétorique de la lettre. discours relatent deux personnes qui sollicitent l'attention de l'auditoire
tout en prenant soin de souligner l' intérêt de ce procédéll4 . à reconsidérer leur cas. li s'agit précisément du rapport de Démosthène
et Paul avec leur communauté respective et du service qu'ils y oot ren-
3. 1 L'utilisation de la méthode rhétorique en 2Co du. Il y a des appels apologétiques dans le sens ancien et propre du
Le retour de 1' usage du procédé analytique rhétorique85 est un fait récent tenne92 . La structure de ces deux lettres est constituée de quatre parties :
dans l'interprétation des textes bibLiques86_ Sa mise en pratique dans les exordium , narratio, probatio et peroratio93.
écrits de Paul a, de fait, donné lieu à une reprise d'intérêt concernant Le travai l de Young et Ford a sans doute contribué à la compréhen-
l'étude des épîtres paulinfonnes. C'est au tour des années 1970 que cela sion de la situation et du genre rhétorique de 2Co. Ceci est d'autant
s'est ressenti. En cette période, l'exégèse de 2Co fut enrichie des aspects plus qu'i l montre une ressemb lance frappante entre la missive de !'A-
significatifs de l'analyse rhétorique. Il s'agit du contexte littéraire et socio- pôtre et celle de Démosthène. Cependant, ces biblistes n'ont pas expli-
culturel du monde gréco-romain87. En effet, la plupm1 des exégètes qui ont ci tement proposé une structure de 2Co selon l'approche rhétorique. li
étudié la deuxième lettre aux Corinthiens d'après ce procédé affirment aura it été plus intéressan t si Young et Ford avaient illustré cette analo-
qu 'elle est composée, selon le modèle rhétorique du genre judiciaire8H. gie en présentant une structure de la lettre selon le style rhétorique. Par
contre, fi s se sont limités à affinner l'unité de la deuxième épître aux
3.1. 1 Différentes approches rhétoriques89 Corinthiens. Cette dernière se révèle essentiellement à travers une ap-
plication de la méthode rhétorique en 2Co94.
a) Approche rhétorique de Young et Ford
b) Approche rhétorique de Da11ker
Les spécialistes F. Young et D.F. Ford soutiennent , dans leur analy e.
que la deuxième épître aux Corinthiens est du genre apologétique90. Ils W. Danker, pour sa part, expl ique l'écrit de PauJ en le plaçant bel et
bien dans le contexte gréco-romain, notamment dans le système helléniste
R3 Cf. o. AMADOR, «Tilc Unity». 411.413-414: Io .• «Re\ isiting 2 Corinthiuns».
93.108-109: F.J. LO G: A11cie111. 4. 91 Démosthëne a écrit sa lettre scion le genre d'un discours apologétique. Il fut un
84 Plusieurs études ont été réalisées au sujet de l'emploi de ln méthode rhétorique exilé à l' ile de Calaurie en 332 av. J.-C. Il s·adressa, par l'entremise de sa missive. au
en 2Co. Il n·est pas question ici de reprendre toutes les hypothèses qui Otll été émises. conseil et au peuple d'Athènes pour plaider en sa faveur. Ccnes. son écrit est anté-
cependant nous allons en exposer certaines qui nous apparaissent crédible. rieur à celui de Paul. Cependant, même si !'Apôtre oc le connaissait pas, ce style d'un
85 Ln rhétorique classique se caractérise par trois genres d'éloquence. li s'agit du discours apologétique ne lui était pas étranger. la deuxième épitre aux Corinthiens en
genre judiciaire (devant les tribunaux). délibératif (dans les assemblées politiques) et témoigne amplement. Cf. D~MOS r!IÈN~. Plaidoyers civils. UI. 61-66: PLUTARQUI:!,
démonstratif (dans les célébrations). Cf. CBP. L 'i11terprétario11. XI1. 35-37. Vies. X II, 2- l 5; F. YOUNCJ D. Fo1m. Mea11i11g, 36-37.
86Le document de la Commission biblique atteste que la méthode. en elle-même, 92 Cf. F. YOUNG - D. FORD, Mea11i11g, 37.
93 L·exurdi11111 est la partie de la lettre dans laquelle l'auteur essaie de gagner ln
n'est pas nouvelle. Le biblistc Pitta. pour sa part, montre que cc procédé était bien uti-
lisé dans l'exégèse patristique. Cependant, dans ce domaine. sa nouveauté se situe au sympathie de l'auditoire ou du public: la narratio présente les poinlS pour ou contre
niveau de l'emploi de certajnes procédures. Cf. CBP. l ï11terprétatio11. 35; A. PITTA, l'auteur el propose une réponse aux accusations proférées contre lui; la prohatin équi-
la seconda letlera ai Cori11zi, 50. vaut â la preuve d' un argumcm ou d·une discussion judiciaire: quant â la peromtio, il
87 Cf. T. STEGMAN, Tlie Cltaracter, 43.55 . ·agit du moment où l'orateur récapitule les preuves et les arguments précédents.
88 Cf. F. YOUNO - D.F. FORD. Meaning. 27-40; G.A. KEN l:!DY, New Testamelll, Cf. DÉMOSTllÈ E. lettres et ji·ag111e111s. 97-104: F. YOUNG - D.F. FORD, Mea11i11g. 27-
86-87: B. WITIŒIUNGTON. Co11jlic1. 338 aussi n. 23: J.W. MCCAN1. 2 Cori11tlti1111s. 13: 28.36-40: T. STFGMAN. The Charul'ter. 47. Cc genre de structure est également pré-
F.J . LONG. A11c:ie11t, 2.4: T. STEGMAN. The Cliaracter, 46-49.328. sent dans les ouvrages d'aulres auteurs antiques vécus bien avant Paul. Ceci montre
89 Les propositions structurelles de 2Co exposées dans ce travail ont reprises dans une continuité des conventions rhétoriques jusqu'à l'époque de Paul. Voir F. Vou G
lesJôrandcs lignes en langue originale des auteurs. D. FORD, Mea11i11g, 38-40.
Cf. F. YOU"'G - D. FORD. Mea11i11g. 27-28. 94 Cf. F. Vou G - o. FORD. Mea11i11g, 39.
40 PARTIE 1 : LE CHRlST EST PUISSANT Cl 1. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13.1-4 41

de réciprocité. Il soutient que les attitudes de générosi té, de bienveillance c) Approaches rhétorique de Witheri11gto11
et de réciprocité constituent les motifs structurels prédominants de 2Co. en B. Witherington, quant à lui, pré ente les caractéristiques d'une rhétori-
particulier dans les neuf premiers chapitres95 . Par contre, i~ voit d~s le que judiciaire et les preuve relatives à cene pratique. Il démontre, par ail-
discours de Démosthène (De Corona) la clé des quatre derniers chapitres. leurs, sa similitude avec la structure de la deuxième épître aux Corin-
Pour le bibliste, tant en 2Co qu'en De Corona. les auteurs recourent au thiens97. Ainsi, il affim1e qu ' une rhétorique judiciaire a pour objet de rela-
système de réciprocité helléniste. En défi nitive. Danker affinne que les ter le faits passés dont la personne dont la personne est inculpée et pour
chap. 10-13 constituent le point culminant de l'usage de Paul du modèle lesquels elle devra être jugée. Ces faits se trouvent au début et à la fin du
de réciprocité helléniste. Celui-ci apparaît déjà dans les chap. 1-9. corps de la lcttrc98. En 2Co, nous retrouvons cette même disposition. En
A notre avis, l'étude de Dank:er entre bien dans la perspective rhétorique elTet, dès l' introduction de la lettre Paul évoque le chef d'accu ation for-
d' interpréter 2Co. Cependant, l'auteur n'offfe pas une dispositio de la let- mulé contre lu i et y revient également à la fin. Dans la narrario, spé-
tre confonne à l'analyse rhétorique. Notre exégète s'est plutôt contenté, cialement en 1, 12, la discussion est principalement au sujet de comment
comme il le souligne lui-même, de montrer la place de cet écrit dans le Paul s'est comport6 dans le passé. Dans la propositio (2Co 2, 17) et aussi
modèle de réciprocité belléniste96 . De cette façon, il semble que le trava il dans l'avertissement final en 13, 1ss, I' Apôtre se concentre sur ce qu'i l a dit
de Danker n'apporte pas une grande contribution à la question de la dispo- précédemment.
sitio. Il présente la lettre de la manière suivante : En ce qui nous concerne. la proposition de l'ana lyse rhétorique de Wi-
1. Introduction ( 1.1- 11) therington nous semble assez significative en faveur de l' unité de la lettrc99.
A. Greeting (1 , 1-2) Nous apprécions, en particulier, sa supposition faite au sujet de la proposi-
B. Themntic Proposition- Triumph over Obstacles ( 1,3-1 1) tio de la lettre. Withcrington a identifié 2Co 2, 17 comme thèse principale
Il. Struggle for a Meeting ofMinds (1,12- 7. 16)
que Paul a démontrée tout le long de son écrit 100. Nous sommes d'avis
A. Facing the Problem ( 1.12- 2. 13) avec le bibliste que, dans cette lettre, !'Apôtre défendait l'apo tolicité de sa
B. Self-affinnaûon (2.14-5.10) mission auprès des Corinthiens. En outre, il a montré qu 'il parle en envoyé
C. Appeal for reconciliation (5.11 - 7, 16) de Dieu 10 •. Toutefois, nous ne partageons pas la dispositio de la lettre qu 'il
Il l. The Collect ion : A Statement ofUni ty in the Gospel (8. 1- 9.15) propose. En effet, il reconnajt lui-même que les résultats qui découlent de
A. Description of Project (8, 1-24) son analyse sont sujets aux corrections, car l'analysc rhétorique dans les
B. Motivation for Completion (9, 1-1 5) écrit pauliniens est une matière qui se fonne102. Il présente une structure
Vl .A Oeclaration ofLoving Concem ( 10.1 - 13, 13)
de cinq parties et la répartit de la man ière sui vante 103:
A. Paul's Claim on the Congregation ( 10.1-18) 1. TI1c cpistolary prcscripr ( 1, 1-2)
B. "Fool's Speech"' ( 11 , 1- 12,13) 2. TI1c epistolary thanksgiving and Exordium ( 1,3-7)
C. Final Protestation of Affection ( 12,14- 13,10) 3. The I Wl'l'(l/ÎO ( 1,8- 2. 16)
O. Closing Words ( 13, 11-14) 4. The propositio (2, 17)
5. The problltio et reji11a1io (3, 1- 13.4)
a. Paul's Charactctization of his ministry and of his anti-sophistic
95 En effet. les vertus sociules. telles que la bonté. la réciprocité. la générosité, et la rhctorical approach (3, 1-6, 13)
gratitude caractérisaient le monde gréco-romain. Par conséquent, l'échange des fa-
veurs représentait un lien très solide des rela1ions dans celle société. Scion Danker, ln 97 Cf. B. WJTl!f.R INOTON 11 1. C01!flic1, 333.353-476. 2.
générosité constitue le Lhème qui lie les différentes parties de la lettre. en cc sens ~ue
Dieu est le suprème bicnlàiteur qui a agit à travers Jésus. c1 que Paul. dans son role 9& Cf. B. Wn Hl:.RIJ\G1'0N 11 1. Co11jlic1. 333-334.
d' Apôtre, se présente comme le bienfa iteur des <;orinLhic~s: il les appelle â être bi~~­ 99 Cf. B. WJTltERINGTON Ill , Co11(lic1. 353-476.
faitcurs aux pauvres de Jérusalem. Dans les dcrrucrs chap1rres de sa lettre. Paul chauc l(lO Cf. B. wm 1ER1NGTON 111. Cv11flic1, 335.371 -374.
les Corinthiens à cause de leur ingratitude à l'égard de sa bonté. Cf. F.W. DA KER. 1111 Cf. 8. WITHERJNGTON Ill. Co11jlic1 , 371 .
Il Cori111hia11s. 20-25: Io.. «Pauh>. 37 1. 102 Cf. B. Wmtl:.RtNGlON lll. Conjlic:t. 39.
96 Cf. F.W. DA Kl-R. Il Cori111/iia11s, 27-28. 103 Cf. B. WITllFRI NGTO~ Il l. Conjlict. 335.
42 PARTLE 1 : LE CHRIST EST PULSSANT CH . 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13.1-4 43

b. A deliberatvc digression (6, 14-7, l) L·approche rhétorique de McCant est intéressante, puisqu 'eUe met en
c. Paul ' dcfen e of the scvere letter (7.2-16) évidence le genre rhétorique judiciaire de 2Co avec un style parodique.
d.A largcly deliberatvc argument conceming Lhe collection (chs. 8 and 9) Quant à affimier que Paul ne défend pas son apostolicité mais plutôt
e. A rhetorical synkrisis (comparaison) of Paul et his competitors in l'édification des Corinthiens, et qu'avec la rhétorique judiciaire l' A-
Corinth, the fa lse apostoloi, with a strong emotional appeal ( 10- 13,4) pôtre veut si mplement réorienter leurs critères d'évaluation relatifs à
6. The peroratio ( 13,5- 10) son mi nistère d'apôtre et de sa prédication évangélique. Par contre,
7. The closing cpistolary grcetings and rcrnarks ( 13, 11-13) nous affimions que le problème en 2Co était la remise en cause de la
créd ibilité apostolique de Paul. L ' Apôtre était préoccupé aussi bien de
d) Approche rhétorique de McCant
sa créd ibilité que de l'avenir de sa communauté. C'est ce qui a donné
L'auteur soutient également que 2Co est conforn1e au genre rhétorique lieu à la rédaction de 2co101.
judiciaire, à l'exception des chap. 8- 9. U souligne la présence d' une plé- Concernant la disposilio de la lettre, McCant présente une structure
thore de genres, figures, métaphores et la prédominance de parodie. Selon en trois parties disposées non pas selon la rhétorique judiciaire mais
J.W. McCant, la deuxième lettre aux Corinthiens n'est pas un écrit d'auto- selon l'ordre de la parodielOS.
défense de l'Apôtre. Car PaLLI était bel et bien un apôtre du Christ par la A Parodie Defense ofBehavior (2Corinthians 1- 7)
volonté de Dieu (2Co 1, 1). Par conséquent, il n'avait pas besoin de défen- 1. Epistolary Greeting ( 1.1-2)
dre sa mission apostol icité. En outre, Je bibliste fait remarquer que 1'atti- 2. A Congratula tory Benediction ( 1.3- 7)
tude des Corinlhiens ne remettait pas en cause cette mission de Paul; et 3. An Ernotiona l Appeal ( 1.8-1 1)
que la rhétorique utilisée par lui dans a lettre ne visait pas une défense 4. Paul's Side of the Story ( 1, 12-2, 17)
pour sa mission en tant qu' Apôtre mais plutôt une réorientation des Corin- 5. Letters ofCommendation (3.1-6. 13)
thiens dans leurs principes d'évaluation au sujet de Paul et de son annonce 6. A Digression for Shame (6, 14-7.1)
de l'Évangile. Toutefois, le désir de l' Apôtre était d'affemiir l'église de 7. Report and Summation (7,2-16)
Corinthel0-1. A Parody of Benefaction (2Corinthians 8- 9)
McCant signale aussi que cette rhétorique a subi des changements à 1. An Exemp!t1111 (8, 1-5)
cause de l'aspect parodique qui traverse toute la lettre. Ainsi elle ne 2. An Appea l to Corinth (8,6-15)
répond pas aux attentes de ce genre rhétorique mais bien à celles d'une 3. A Letter of Commendation (8,16-24)
parodie. Cette dernière fait assumer à la lettre une fo nction «épid icti- 4. A Challenge 10 Honor (9, 1-5)
que» ou démonstrativeios. L'auteur démontre en particu lier que l'or- 5. A Theology of Benevolence (9,6-15)
guei l de Paul devient une imi tation caricaturale. Ceci s'explique par sa A Parodie Dcfcnse of Authority (2 Corinthians 10-13)
connaissance de la nullité de l'orgueil (12, 1). En effet, !'Apôtre met sa 1. A Dcfcnsc of Apostolic Authority ( 10, 1- 18)
van ité dans le Seigneur ( 10, 17); il se targue mais comme un fo u ( 11, 1- 2. The Foolishncss of Boasüng (1 1,1- 12, 18)
3. Paul 's Fina l Word lo Corinth ( 12, 19-13, 13)
12, l 8). En d'autres termes, Paul transpose la place de son arrogance: il
la met non pas dans les choses du monde mais dans le Seigneur; non e) Approche rhétorique de long
pas dans les grandeurs mais dans les faiblesses 1U6.
Le spécialiste F.J. Long présente da ns son ouvrage un certain nombre
de problèmes et solutions au sujet de la deuxième lettre aux Corin-
104 Cf. J.W. MCCANT, 2 Cori11lliia11s, 13. 15-16 thiensl09. li le conclut en faveu r de l'intégralité de 2Co à partir des dé-
Cf. 11. LAUSBERG. Elemcllle. 18; J.-N. ALEITI - al., Vocabulaire. 83.
105
Pour McCant, 10 parodie se trouve non seulement dnns les chapitres 11 12,
106
mais encore clic s'étend sur l'ensemble de la lellre. De fait. l'orgueil de Paul csl déjà I07 Pour les détails de ce sujet. voir dans ce travail les points 1.3 Relalion entre
bien présent dans le premier chapitre ( l, 12). Ce verset constitue, pour l'cxt.!gètc, la Paul et Communauté et 3.2.2 Occasion, lieu et date de la composi1ion de la lc1trc.
proposition de 2Co : c'est le fil conducteur de sa lettre. Le bibliste révèle la nnture IO!l Cf. J.W. MCCANT, 2 Corinthians. 29-172.
parodique de la défense de Paul tout le long de son écrit. Cf. ID.. 2 Corinthicms, 29. 109 Cf. F.J. LONG. A11cie111. 4.
44 PARTIE 1: LE CHRI ST EST PULSSANT CH. 1: LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 45

bats entre les exégètes. Ces dern iers affirment que 2Co est une lettre C. 1,2 1-22 Paul el al. are established with the Corinthians.
uoifiée et correspond au style de l'ancienne rhétoriquei 10. O . 1,23 God is a covenantal witness fo r Paul.
Parmi les travaux qui ont contribué à la compréhension de l'écrit de E. 1,24 Pau l doesn ' t lord over their fa ith.
Paul selon l'analyse rhétorique, Long porte un regard spécial sur celui V. Probatio (2, 1-9,15)
de Witherington 111 . L'exégète accepte son étude de la lettre et sa con- A . 2,1-l l Paul explique pourquoi il n'a pas visité les Corinthien..
clusion concernant le genre et l' unité de 2Co. Cependant, il n'admet Narrative transition : 2.12-1 3: Paul 's brief account of his travels and
pas son hypothèse sur la situation rhétorique et la structure de la let- search for Titus.
B. 2,14-3 ,18 God's triumph in Christ, the giving of Lhe Spirit through
tre 112. En effet, Long parle de 2Co comme une lettre apologétique uni- the prcaching of Christ by Pau l et al. and the greater glory of the
fiée. E lle est conforme à la pratique rhétorique j udjciaire de la culture new covcnant in Christ.
gréco-romaine' 13. C. 4, l-5, 10 Paul's and llis associates' ministry of suffering in the life
En somme, nous apprécions le travail d' investigation de Long au su- of the Spirit.
jet de ! 'ancienne rhétorique et de 1'apologie de Paul. ri apporte une O . 5, 1J-7,l God's reconci liation and Paul 's covenantal exhortation to
grande contribution dans 1'analyse de 2Co selon la rhétorique judiciaire. end idolatrous behavior.
De fait, il présente la di.<rpositio de la lettre conformément à la rhétori- Narrative transition : 7,2- 16 Finding Titus and their joint confidence in the
que' 14 • Toutefois, nous ne souscrivons pas à son hypothèse. Cette der- Corin th.i ans.
nière est app liquée dans la lettre en tant qu ' un seu l écrit. Nous soute- E. 8,1- 9,15 PauJ's Work: the col lection and the Corinthians' faith.
nons, par contre, une structure rhétorique de deux lettres en 2Co. Long Vl. Refutatio (10. 1- 11 ,15): change of tone; Paul addresses and offers
propose une dispositio de la manière sLùvante : various crilicism.
V IL Selj~adu/ation ( 11, 16-12.10) : Paul speaks
1. Epistolary opening ( 1, 1-2)
vm. Peromtio ( 12, 11-13, 10) : Summarizes lctter in inverted order
Il. Prooem ium ( 1,3-7)
l.X. E pistolary closing ( l 3, l 1-1 3)
Ul. Narratio ( l ,8-16)
A. 1,8- ll(pathos) f) Approche rhétorique de Pitta
B. 1,12 (elhos) La proposition de A. Pitta ' 16, en revanche, bien qu 'elle soit conforme
C. 1,13- 16 (logos) aux canons d' une analyse rhétorique, diffère de l'approche des exégètes
IV. Divisio and partitio ( 1, 17-24)1 15 que nous avons présentés ci-dess-us. D'après lui , il n'est pas question de
A. 1, 17 Did Paul make his plans Lo corne to Corinth lightly? l'analyse d'une lettre mais plutôt de celle de deux missives distinctes en
B. l, 18-20 The affi rmation of the preaching of Paul el al. and the glory 2Co. n s'agit de l'épître définie «de réconciliatiom>(1-9) et celle dite
of God in Christ.
«polémique» (10- 13)' 17. li nous semble que l' hypothèse de Pitta ré-
pond à la conclusion à laquell e sont parvenues les spécialistes en faveur
110 Cf. F.J. LONO, A11cie111, 4 . de l' unité de 2Co. Ces derniers affirment que cette correspondance ré-
l tI Long montre que les tenants de la rotalité de 2Co ont apporté des éléments si-
gnificatifs à la compréhension de l' unité de la lellre grâce à l'application de la mé- 11 6 A la djfférence des autres approches rhétoriques analysées, celle de A. Pitta uti-
1bode rhétorique. Cependant, scion lui, ils ont échoué à convaincre la communauté lise une méthode rhétorique-littéraire. Cf. A. P11TA. La seco11dt1 le11era ni Corinzi. 49.
1 Cf. F.J. LONG. A11c1e111, 6-7.
int~1 1fc tuc ll c par manque ~pparenc de preuve conclusive Cl: Io .. A11cie11t, 6-8. Notons que cc procédé consiste d'abord à démonter ou à défajre la façon dont les dif-
férents arguments ont été présentés par !"auteur. Ensuite. elle vise à vérifier l' unité de
l t3 C[ F.J. LONG, tl11cie111, 2. 112- 11 3. Long parle d"un discours judiciaire gréco- tous ces arguments, à en énoncer la ou les thèses (proµositio11es) majeures avant de
romain ayant la structure suivante : exordium, 11arra1io, di visio. partirio, probmio, re- définir le genre rhétorique de l'écrit. Cf. J.-N. A LETTt, «La présenccl>, 7.
jittatin, auto-adulation et perora/io. Cf. lo .. Ancie111. 2- 143. 11 7 Scion Pina. J"analyse rhétorique des lettres confirme les résultats de celle his-
11 4 Cf. F.J. LONG. Ancie111. 143-145. torico-critique. De ce fait. 2Co. telle que la tradi tion ecclésiale l'a transmise, représen-
115 Ces versets conslitucnl pour Long la propositio de la lettre. Cf. lo .. A11cie111. 85- terait en réalité dClL"< lettres envoyées à la même communauté de Corinthe. Cf. ID., Lo
89. çeconda /e11erc1 ai Corin:i, 50.69.
46 PARTIE 1: LE CHRl T EST PU ISSANT CH. 1: LE CONTEXTE DE 2CO 13,1-4 47

vèle une situation rhétorique complexe. Nous pensons que cette com- dans les quatre derniers, I' Apôtre des Gentils veut fai r~ comprendre à
plexité observées par ces exégètes est duc au fait qu ' ils voient en 2Co son auditoire qu ' il est indiscutablement mandaté par Chnst.
une seule missive. Pitta montre, par contre, que les deux formes de Pitta offre la structure de chacune des lettres 123 . Quant à La lettre de
communication ne peuvent pas se ramener à une seule. En effet, il iden- réconciliation présente dans les neuf premiers chapitres, ell~ est en ~é­
tifie les genres rhétoriques de chaque écrit regroupé dans la lettre cano- alité la quatrième correspondance envoyée à la communaute de Conn-
nique 2Co. the124. Elle est structurée de la manière suivante:
Toul en admettant que les deux lettres sont des discours apo logéti- 1. lntroduzione episto lare (1.1- 14)
ques, le bibliste estime néanmoins que la deuxième partie de la lettre A. Praescriplttm ( 1,1-2)
présente en 2Co 1-9 se caractérise par le genre dél ibératif (8, 1- 9, 15)11 8. B. Esordio/benedizione (1.3-11)
De ce fai t, notre exégète offre un modèle à partir de l'analyse historico- C. Proposirioltesi principale della lettre ( 1, 12-14)
critique effectuée en 2Co et présente les différentes dimensions rhétori- 2. La narratio apologetica ( J, 15- 2. 13)
ques. li souligne éga lement l' interaction qui s'exerce enlre la méthode A. La sincerità di Paolo nei recenti di viaggio ( l , 15-22)
historico-critique et celle rhétori.que-liltérairet 19. Celle-ci manquerait de B. L' annullarnento della vis ita ( 1,23- 2,4)
fondement sans l'apport de la méthode historico-critique. De même, C. L'esortazione al pardono verso l'offensore (2,5- 11 )
cette dernière ne saisirait pas le mouvement du texte si elle reste indé- D. L'angoscia di Troade (2, 12- 14 )
pendante du procédé rhétorique-littéraire appliquée à l'ensemble de la 3. La probario apologetica (2. 14-7.4)
structure de la lettre. A. La prima dimostrazione (2, 14-4.6)
Se rapportant à la structure, nous partageons l' hypothèse du bibliste B. La seconda dimostrazione (4.7- 5, 10)
italien. Nous affirmons, à sa suite, que la deuxième lettre aux Corin- C. La terza dimostrazione (5, 11 - 7,4)
thiens est constituée de deux épîtres. La première comprend les neuf 4. Ripresa dell a narrazione e fiducia di Paolo verso i Corinz:i (7,5- 16)
premiers chapitres et la seconde lettre les quatre derniers chapitres. Ce- 5. L'esortazionc all a co lletta (8, 1 9. 15)
pendant, tout en adhérant à cette hypothèse, nous ne soutenons pas sa Concernant la lettre polémique, elle fut le dernier écrit de Paul envoyé
suggestion de la propositio ou thèse principale de la première lettre aux Corinthiens. Cc sont les quatre derniers chapitre de la lettre canoni-
(2Co 1- 9) en 1.12-14. Nous soutenons, par contre, ce lle avancée par que: 2Co 10, 1- 13, 13. Elle serait la cin9uième corTespo~,danc: de !'Apôtre
Witheri ngton, qui nous semble la plus plausible 120. En effet, elon lui, avec ses convertis1 2s. Sa strucnirc e prcscnte de la mamere sui vante :
2Co 2, 17 représente la thèse principale de 1'ensemble de la deuxième 1. Esordio generalc (10,1-6)
lettre aux Corinthiens. Quant à nous, nous sommes d'avis que Paul, en 2. La confutazionc delle accuse ( 10, 7- 18)
écrivant ces deux missives regroupées en 2Co, visait un seul objectif. Il 3. La probatio oil discorso immodcralo ( l l.1 - 12. 18)
voulait démontrer aux Corinthiens - ainsi qu'à ses opposants - qu'il A. Exordium ( 11 , 1-6) con la tcsi principale dei vv. 5-6
est. à juste titre, Apôtre du Christ 121. Une lecture attentive de 2Co mon- B. Probatio ( 11 ,7 12.10)
tre, de fai t, que les critiques auxquelles Pau l répond aux chap. 1- 9 e C. Peroratio (12 , 11-1 8)
sont aggravées et ont donné lieu à la rédaction des chap. 10- 13. Cc sont 4. Apusia-parusia cpi stolare, perorazione final e e postscriptum 12, 19
ces critiques qui, selon nous, constituent le leitmotiv de l'occasion de 13, 13
deux lettres en 2Co 122 • Aussi, tant dans les neuf premier chap itres que
en revanche. qu'il y a plus de discontinuité que de continuité dans ces deux lettres. Cf.
118Cf. A. PITT A. La seconda letrera ai Cori11zi. 59. I D., La seconda lellera ui Cnri11zi. 69.
1llJ C r. A. PITTA, la seconda leueru ai Corild. 50.69. 123 Cf. A. PITIA, La seconda leuera ai Cnrild, 51 .60.
120 Cr. B. WITHERINGTO Ill, Co11jlict, 353-476. 124 Pour ce sujet, voir dans ce travail au point 1.3 Relations entre Paul et la com-
121 Cf. J. CAMBIER, «Le critère». 481-5 15. munauté; et également A. PITTA, La seconda lcttera ai Cori11:i. 50.
122 Nou:, voyons une des preuves de continuüé de ces deux lettres duns la reprise 125 Cf. dans cc travail le point 1.3 Relations entre Paul et ln communauté; et éga-
de la pmpositio (2Co 2, 17) à la lin de la lettre polémique en 2Co 12, l 9. Pitta affirme. lement A. PtTIA. La seconda lettera ai Corin:i. 60.
48 PA RTTE T : LE CHRIST EST PUTSSANT CH. 1: LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 49

En somme, l'exposé des différentes analyses rhétoriques présentées ci- parle suffisamment en 2Co 1,3- 2,13 et 7.5- L6, ainsi que le logm; 133 au-
dessus nous amène à affirmer que ces travaux contribuent, sans aucun quel il se rétëre en 2Co 2, 14-7 ,4. En somme, ce que ! 'on peut retenir de
doute, à la compréhension de la situation et du genre rhétorique de 2Co. ce recours aux preuves intrinsèques est que I'Apôtre accorde très peu
Cependant elles ne présentent pas un consensus de tous les spécialistes StLr d' importance à l'ethos de ses détracteurs, tandjs qu ' il parle plus du lo-
la dispositio unique de la lettre. Chacun l'élabore un peu différemment. gos en tant qu 'i l sert de lien entre son ethos à lui et le pathos de ses
destinata ires.
3.1.2 lnventio ou preuve en 2Co
b) les preuves de la lettre polémique
Notre propos ici se veut un bref exposé sur l'in ventio de chaque lettre.
Nous remarquons que dans cette lettre, il n'y a aucLLne preuve exlrin-
Ce dernier consti tue une des parties de la technique rhétorque i 26 . Elle
sèque directe, excepté deux citations impljcitcs de 1' AT (cf. 2Co 10, 17
permet à l' orateur de recourir aux différentes preuves pour étoffer son dis-
pour Jr 9,22-23; 2Co 13, 1b pour Dt 19, 15) et une all usion (2cf. Co 11 ,3
cours. Il vise à convaincre et à émouvoir l'auditoire.
pour Gn 3,4. 1J)IJ4. Il y manque aussi le fo ndemenr sur le kérygme de la
mort et résurrection du Christ et la tension apocalyptico-eschatolo-
a) Les preuves de la lettre de la réconciliation
g iq ue 135.
Paul uti lise en 2Co plusieur s preuves extrinsèquesl 27 . ll veut par là Les preuves techniques de la rhétorique sont, par contre, bien présen-
donner corps à son apolog ie en vue de la réconci liation avec les Co- tes: l'ethos. le pathos et le logos. Parmi ces trois preuves, contraire-
rintbj eos. fi s'appui e, tout le long de sa lettre, sur l'auto ri té des écri - ment à la lettre de réconciliation, le logos n'y fi gure presque pas 136 . En
tures en faisant des citations directes, indirectes ou simplement des 2Co 1-9, le logos constitua it le lien principal entre les deux autres preu-
a Uusionst 28. ll fail éga lement appel aux fo rmules de kérygrnesl 29; de ves. Cependant, la lettre polémique, cependant, se fo nde principalement
bénéd iction. de remerciement, de doxo logie 130 et aux catégories apo- sur l'affrontement de Paul avec ses adversa ires. Ainsi, l' apôtre de Tarse
ca ly ptico-escha tologiques131. était amené à uti liser un langage immodéré pour se défendre. C ' est ce
Quant aux pre uves intrinsèqu es appropriées à la conuuuni cation qui justifie la prédominance de son ethos, du pathos des Corinthiens et
rhétoriquet 32, nous pouvons évoquer l'ethos et le pathos dont l'Apôtre de l'ethos des opposants.
L' objectif poursuivi par Paul est celui d'éloigner ces derniers et de ré-
12 6 li cupérer sa relation avec ses fidèles de Corinthe. C'est justement la fonction
s'agit d' i11ve11tio, dispositio. elocutio, memoria et pro1111ntiatio Cf. H. LA US-
BERG, Handb11c/1 , 139-1 40; B. MORTARA GARA VELU , Mtm11a/e di retorica, 59.
127 Les preuves extrinsèques ne sont pas constitutives de la rhétorique, mais elles
servent à donner corps à la communication. Cf. H. LAUSBERG, Handbuch. 191 ; B. MORTARA GARAVELLI. Ma1111ale di retorica, 75: A. P llTA, La seconda lettera ai
B. WrnrERGTON Ill, Cnnjlict, 334-335; 8 . MORTARA GARAVELLI, Man11ale di retori- Corild, 54-55 .
ca, 75; A. PrnA, La seconda Lettera ai Corinzi, 49.54-59. 133 L 'ethos vise à établir l'aspect moral. Il s'agit de montrer qu'on agit dans le ca-
128 Cf. A. PITIA, l a seconda l etiera ai Corinzi, 55. dre de la vérité et !"adversaire dans l' erreur. C'est cc que Pau l a fa it à travers 2Co, no-
129 Ce sont des formu les milisées dans les premières communauté concernant la tamment au cours de la première partie. Cela explique le ton réconciliant dans les cinq
mon et la résurrection de Jésus-Christ. Il s'agit des formules pré-pauliennes. Cf. D.E. premiers chapitres. Quant au pm/io1;, le plaideur vise â éveiller l'émotion des audi-
AUNE, The New Testament, 192-194. Ces formules sont présentes en 2Co 1,2-3.5.9. 14: teurs, à prendre pani pour la personne inculpée et à rejeter les accusations de l'ad-
4,5. 10-11.14; 5, 14- 15; 8,9. Cf. A. Pm A, la seconda lettera ai Corinzi. 55-56. versaire. En 2Co, Paul y recom1 particulièrement à la fin de sa lettre où il donne libre
l30 Ces fomm les reflètent une origine liturgique. Ces dernières viennent de la tradi- cours à ses émotions. Il utilise l'ironie, le sarcasme, les questions rhétoriques, etc.
tion juive de la piété. Cf. D.E. AUNE, The Ne111 Testament, 193- 194; elles figurent en enfin le logos consiste â employer des arguments déductifs â partir des exemples.
2Co 1,3.20; 2, 14; 4, 15: 8, 16; 9. 11. 12. 15. Cf. A. PITIA, la seconda l ettera ai Corin- Cf. B. Wm ŒRGTON fJI , Co1!flic1, 334-335; 8 . MORTARA GARA VELU , Mwwale di
=i, 56. retorica, 27; A. PITIA, la seconda l ettera ai Corinzi. 49.54-59.
131 Paul a emprunté ces catégories à l'apoca lyptique juive. Nous trouvons ces caté- 134 Cf. Y.P. FURNISH, Il Corinthians, 569; A PTTTA, la seconda Lettera ai Cori11-
gories en 2Co 1, 14; 2, 15; 3, 18; 4,3 .16- 18; 5, 1-1 0; 6,2. Cf. R. PENNA, «Escatologia». =i , 64.
77- 103; A. PJTl'A, La seconda l e1tera ai Corinz i. 57. 135 Cf. A PITTA, l a seconda l ettera ai Cori11zi , 67.
132 Cf. H. LAUSBERG, Handbuch, 191; B. WITtl.ERGTON Ill, Conjlict, 334-335; JJ<i Cf. A P1TTA, la seconda Lerrera ai Corinzi. 67-68.
50 PARTlE 1: L E CHRIST EST PUl'SSANT CH. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO .13. 1-4 51

que jouent les demandes rhétoriques utilisées par I'Apôtre dans cet écrit compi lation de deux missives originairement distinctes, nous souscri-
(cf. 2Co 1J,7.29: 12, 15.17.18). En effet, 1' Apôtre exprime tout son amour vons à leur pos it ion. Ainsi, nous détemlinerons les occasions, les dates
pour la communauté de Corinthe qu' il a présentée comme une vierge pw·e et les Lieux de leurs _rédactions. Cependant, nous respectons l'ordre tel
Christ (2Co 11 ,2), et pour LaqueUe, malgré son ingratitude de Corinthiens que la tradition de l'Eglise l'a transmis au long des sièclesl41.
(cf. 2Co 11,7-21), il est prêt à se donner totalement (2Co 12, 14b- 15). En effet, la lettre présente en 2Co 1-9 aurait été rédigée dans les an-
nées 55 ap. J.-C., ou moins probablement en 56 ap. J.-C en Macé-
3.2 Avantages et inconvénients de / 'analyse rhétorique
doine 142. Son écriture a été motivée par les bonnes nouvelles que Tite
La méthode d'analyse rhétorique, appliquée en 2Co a abouti, notam- rapporta de Corinthe à Pau l. Dans cette correspondance, !'Apôtre visait,
ment à deux résultats importants. Elle permet de lire la lettre comme une d' une part, la séparation entre les Corinthiens et les semeurs de troubles.
unité Littéraire et d'élucider les rapports entre ses différents arguments 137. et d'autre part, la réconciLiation entre lui et sa communautél43. Concer-
Du coup les passages illustrés plus haut, qui paraissaient être des lacunes nant la date de la missive contenue dans les cb. 10- 13, elle aurait eu
avec la méthode critique bjstorico-littéraire, deviennent compréhensibles lieu un peu plus tard vers l'année 56 ou vers 57 144 . L'apôtre des nations
avec la méthode d' analyse rhétorique. li ne s'agit plus d'une lacune de était, de fait, informé de la dégradation de la situation dans la commu-
style mais plutôt d' une con-élation dans le contexte immédiat 138. nauté: les critiques d'autrefois à son égard avaient repris avec une vé-
Nonobstant les aspects positifs de ! 'analyse rhétorique. signalons, hémence excessive. Par conséquent, soucieux de perdre toute crédibi-
néanmoins, ses désavantages. L'analyse rhétorique risquerait, dans la üté auprès de ses convertis et préoccupé de leur avenir, il leur envoya
compréhension de 2Co, d'en faire une interprétation trop belJénistique une autre correspondance. Cette dernière se trouve dans les quatre der-
et ainsi d'en déformer l'exégèse. Ceci est du fa ir qu' elle reste sur l'as- niers chapitres de 2Co. rt ava it pour objet de ru iner la prétention de ses
pect descriptif et stylistique du textem. Pour cette raison, elJe doit s'ou- adversaires et de récupérer la confiance des Corintb.i ensl45.
vrir à d'autres approches relatives à l'exégèse. Ainsi, eUe pourrait à
juste ti tre être appelée une des opérations de l' étude exégétique parmi 3.4 Délimitation de 2Co 13,/-4
d'autres 140 . L'étude sur la structure rhétorique de 2Co exposée ci-dessus nous per-
3.3 Occasion, lieu et date de la composition de La Lettre
met de repérer l'emplacement de la péricope 13, 1-4. Notons que, nonobs-
tant la dJvergence d'opinion parmj les exégètes sur la dispositio de 2Co,
S'il est vrai qu 'il n'y a aucune preuve aussi b.ien des manuscrits que néanmoins ils admettent tous d' une part que le ch. 13, dans lequel se situe
des écrits pallistique qu i justifient le caractère composite de la deu- la péricope de notre travail (2Co 13, 1-4), appartient à la macro-unité de
xième épître aux Corinthi ens, il est tout aussi év ident que la lettre dans 2Co 10- 13. D'autre part, ils montrent que la péricope 13.1-4 fo m1e une
son ensemble présente des ruptu res. Tenant éga lement compte de l'opi- unité de sens. A la suüe donc de ces biblistes, nous représentons la struc-
nion de la majorité de biblistes qui voient dans le texte final de 2Co une

137 Les terminologies 7tapuKClÀ.-. Kuux-, ÔOKtµ- ; les sujets d'affli ction et d'éloge: l-1 I Ce point a été de façon détaillée exposé ci-dessus. Cf 1.3 Relations entre Paul
comportement nommé Kcttà o&pKa. et le thème de la puissance de Dieu se manifestant et la communauté.
dans la faiblesse. Cf. F. YOUNG - D.F. FORD. Mea11i11g, 166- 185; T. STEGMAN, The l-1 2 Cf. R.P. MARTIN. 1 Cori111/tiam , xxxv. xlvi: B. W ITll ERINGTON. Conjlict, 35 1-
Clwracter, 50. 352. n . 63: J. MURl'l IY-O'CONNOR, St. Paul. 203; A. P1TrA , la seco11do le11em ai Co-
m Cf. F. YOUNG - D.F. FORD. Meaning . 19.22.35: T. STEOMAN, Tite Charac- rin::i. 41 .
ter, S 1. 143 Cf. V.P. FURNISH, Il Cori11thia11s, 42-43.
139 Cf. CB P, L 'i111e1pré1at.ion, XII. 37 ; T. STEGMAN, The Character. 55-56; l4-1 Cf. C.K. BARRETT, «Tite»: R.P. MARTIN, 2 Cori11tliia11s, xxxv.xlvi;
A. PI TTA. La seconda lette!'ll ai Cnrinzi, 50. A .H. MCNElLE- S.C. W ILLIAM S, lnrroduclio11 , 138; D. MARCJUERAT, «2 Corinthiens»,
140 Les différentes opérations du travai l exégélique sont la critique textuelle, les re- 498: B. WITHERIN GTON Ill , Co11jlic1. 35 1-352 n. 63: J. MURPHY-O'CONNOR, Paul,
cherches lexicographiques, l'analyse grammaticale et syntaxique. l'histoire du rexle. /lis S101J1, 179; A. PITTA. La seconda !etfera ai Cori11zi, 4 1.
la détennination du genre littéraire. etc. Cf. R. MEYNET. «E ora scri1 ete», 10.
1 1-1 5 C[ V. P. FUR !Si i, Il Corimhians. 44-46.
52 PARTIE 1 : LE CHRIST EST PUlSSANT C H. 1 : LE CONTEXTE DE 2CO 13. 1-4 53

turc de la lettre de la manière suivante 146 : un exordium général : 10, 1-6; l"orgueil humain1s1. En 12,11-18, l'Apôtre réuni t les raisons qui l'ont
un c01pus : 1O.7- 12, 18 el une conclusion : 12, 19- 13.13 14 7. Cette épître, amené à adopter telles preuves pour adresser un dernier appel à se fi-
ainsi que celle aux Galates (1.6-10). n'est pas introduite par un remercie- dèle de Corinthe. Nou avons dans ces versets un signe man ifeste
ment ou bénédiction. Notons toutefois que !'Apôtre, dans sa rédaction, n'a d'une conclusion apologétique grâce à l' usage de différente demandes
pas suivi exactement le plan schématique habituel d' une communication rhétoriques, et de pathos que l 'Apôtre veut susciter chez le Corinth iens,
rhétorique 1-ts. li a, par contre, interverti l'ordre de la stn1cture rhétorique en plus des thémat iques expliquées dans la probatio.
proposée par le manuel de la rhétorique antique 149. Ainsi, Paul commence La conclusion finale de la lettre en 2Co 12, 19- 13, 131s2 reprend la
par la réfutation des accusations au lieu de procéder d'abord par la proba- thèse principale de toute l'épître, notamment en 2Co 12, 19. En effet.
tio. li organise librement et différemment son argumentation qui est carac- Pau l affirme qu'il ne se défend pas devan t les Corinthiens mais c'est
térisée particulièrement par un ton polémiqueiso. devant Dieu. et que c'est au nom du Chri st qu' il parle pour l'édification
En effet, la dimension polémique de cette lettre est déjà manifeste à l'in- des Corinthiens (2Co 2, 17). De cette façon, l ' Apôtre adresse son der-
troduction généra le (10, 1-6). Paul laisse comprendre qu ' il est accusé d'être nier appel aux destinataires (2Co J 2, 19-2 1); annonce sa prochai ne vi-
faible en présence des Corinthiens, mais hardi dans ses lettres. En 1O.7- 18. site chez les Corinthiens (2Co 13, 1-4) et conclut son écrit avec les re-
il anticipe la réfutation des accusations avancées contre sa personne. li ne commandations et les salutations épistolai res (2Co 13,5-13).
place pas cette réfutation après la probatio tel que la rhétorique 1'exigeait.
L' Apôtre conteste les accusations d' incohérence contre a personne ( 10,7- 4. Texte de 2Co 13, 1-4
11 ) cl également l'orguei l inapproprié de ses opposants ( 10.12- 18).
Après un aperçu sur l'ensemble de la deuxième lettre aux Corinthiens,
Dans la prohatio (1 t,t - 12.l8), l'argumentation de Paul se présente
nous allons, à présent, aborder le texte qui fait l'objet de ce travai l : 2Co
en troi s parties: exordium 11 ,1-6; probatio l l.7- 12, 10: peroratio
13, 1-4. Il s'agira, en premier lieu, de vérifier si la péricope correspond à la
12, 11-18. Paul démontre, notamment dans la prohatio en 11,7- 12,9. à
fom1e originale du texte à travers une étude critique. En second lieu, nou
travers des preuves, la légitimité de sa mission apostolique. Pour cc
pré ·entons une traduction personnelle à partir de l'extrait origina11 5·' . Nous
fai re. il adopte le style de parler de ses dénigreur , qui c t typique de y parviendrons grâce aux manuscrits disponibles. et ainsi nous nous assu-
rerons que le texte en question est plus proche de son original.
146 Pour la structure de cette lettre. voir la di.'lposirio de Pitta présentée dan ce tra- En effet, deux problèmes textuels se révèlent dan cette péricope. no-
vai l ou bien dnn!. son ouvraee. Cf. ID.. La seco11da leuera ai Cori11:i. 60. tamment dan le v. 415-I. Le premier concerne les mots Èv aùn;>' ss. Plu-
1-17 Pttta soutient que, dans le texte original. il devait y avoir un praescrip111111. sieurs manuscrits ont préféré utiliser oùv aùtc;> à la place de Èv aùi:c;> sous
Cf. A PITIA, la seco11da Leuera ai Corin::i. 60. lïnfluence de oùv aùrQ qui vient après 156. Tl s'agit des manusc rits ~ A F G
1-IR clon Pinn, il manque la 11arratio apologétique. li affim1e que la teneur et l'é-
paisseur npologétique de cette lettre ne sont pas en lien avec IH première lettre (2Co 1311 2495 it~r yrP cop00 arab. D'autres, par contre, ont remplacé la phrase
1 9). Elle présente de questions tout à fait nouvelles concernant le componcmcnt de
Paul. Nous aflim1ons. en revanche, dans le sillage de Witherington, que la narratio
aussi bien que Io proposirio restent les mêmes dans les deux l ettre~ présentes en 2Co. 151 Cc dernier n"aboutissc ù rien, il est hors de l"orgueil dans le Seigneur (cf. Jr
fi s'agi t de la 1111/'l'atio et propositio identifiées dans la première lettre (2Co 1 9). Les 9.22-23).
rnisons que nous avons avancées ci-dessus pour la µroµositio valent aussi pour ln 11t1r- 152 cr A Pl ITA. La Sl!l'Ol/da Lel/e/'11 ai Corinzi. 63.
ra1io. Car, dans cette deuxième épitre, Paul continue lu rêOexion commencée dans Io l~J Cf. W. EOGFR. Metodologia del 11110Po Testamento. 2.
première. Evidemment, le ton diffère clans les deux écrits. mai!. l' Apôtrc répond aux 1~ 4 Cf. 8.M. MFTZOI R, A Temwl Co111111e11u1qi, 518-59 1.
critique::. du même genre. Ces dernières sont protërées contre son comportement en l55 Cf. J. LAMURl!Cll I. Seco11d Cori111hia11s, 22 1.
tant qu'Apôrrc. A la dilîérencc du premier écrit. les critiques <lu second sont très vio- 156 Pitta pense que les manuscrits qui lisent oùv m'.r:tï> à la place de fV Ctùni) vou-
lentes. Cependant. pour lui. il n'est plus nécessaire d ·évoquer cc qu ï 1 avu il déjà men- laient montrer la participation à la faiblesse du Christ. Par conséquent. ils sont mis au
tionné clans le premier écrit. Il va droit au but. Cf. B. WI rlll:.RINCHO • Co11jlic1. 335: second plun le dynamisme de Paul sur Io tension entre «l'être en» pour «C:tre avec».
A PITIA. la ~ecmula le/fera ai Cvrin::i, 60-61. Cf. ID.. La seconda fel/era ai Corin::i, 540. Quant à nous. nous soutenons l"hyporhèsc
l'l<J Cf. G. BARBAG LIO. «Les lenrcs>). 73. a' ancéc par la majorité des exégètes selon laquelle ce changement est dû à 1'influence
150 Cf. A Pl rTA. la seconda leuera ai Corin::i. 60. de oiw aù:<\) qui suit. Voir V.P. FUR'llSll, // Cori11tltia11s. 571.
54 PARTI E 1: LE CHRJST EST PUISSANT

oùv aùt w par Êv aÙ'rc.j). C'est le cas des témoins J>46v'dD• 33 itd.s. Cependant,
il est certain que Èv aÙ'rc.j) sont les mots justes du texte comme le soutien-
nent les manu crits B D K P 'I' 0243 33 6 l 4 1739 etc.
Le deuxième problème e situe dans l'incertitude relative au mot avec
lequel cLç ùµâç doiLêtre pris. Est-ce avec ( Î)owev ou bien avec ôuvciµewç
~oû? Quelques manuscri ts. notamment. B D2 itr al, !"ont. de fait, oublié.
Ils ont considéré elç ùµfü; comme un ajout qui gênait. Cependant les pro- Cl IAPITRE 11
blèmes textuel révélés dans le v. 4 ne sont plus comme telle des diffi-
cultés. De fàiL, les biblistes sont tous d'accord que les mots Èv aù:c.j) sont
bien les tennes faisant partie du texte original et non oùv aùtc.j), et que les Une lecture attentive de 2Co 13,1-4
mots elç ûµfü;I S7 ne doivent pas être exclus du texte car iJ y a des manus-
crits qui attestent leur présence dans le texte original.

Le second chapitre de notre travail se concentre sur une ana lyse de


chaque verset de la péricope. A travers cet examen détaillé au niveau
syntax ique, sémantique et structurel, nous voulons saisir le message du
«Christ puis ant pam1i les Corinthiens». Il s'agit de l'enseignement que
Paul a donné aux croyants de la communauté de Corinthe.
L'exposé de l'étude du texte se fera en plusieurs étapes. La première
s'occupera d'une lecture minutieuse des versets en présentant leur syn-
taxe et leur composition. Le deuxième point aura pour objet w1e appro-
che de deux ver ets qui ont une unité de sens. Dans le troisième c l der-
nier stade, il sera question d'étudier globalement tout l'extrai t en vue
d'en recuielli r le mes age évangiliquc.
Par ouci de mieux cemer l'enseignement de I'Apôtre, nous optons
pour une traduction, en grande partie littérale. Notre approche interpré-
tati e 'appuiera, du reste, sur de spéciali tes, notamment ceux de la
matrice rhétorique.
1. 2Co 13, 1
TpLî OV î OÜîO ëpxoµcu iîpoç uµc'iç·
f.Ti t ot 6µ1n oç ôUo µa.p t upwv Ka.t tpLCJ v
o ta9~0H'CH lTc'ilJ p;;µa. .
«La tro isième fois voic i, je viens auprès de vous
Su r la base de la parole de deux témoins ou de trois
cra fixée toute affaire».
1.1 Ana lyse syntaxiq ue du v. 1
- Tp(îOV t oût0 ËpxoµaL îîpoç ùµ&ç. La phrase commence par un ad-
157 Cf. A . PrrrA. La seconda Jettera. 540. jectif numéral ordinal : tp(:ov à l'accusatif neutre singulier. li se tra-
-
56 PARTIE 1: LE CHRlST EST PUISSANT Cl L 11 : UNE LECTURE AITENTNE DE 2CO 13. 1-4 57

duit par «troisième (fois)» et sert de compl ément de temps au verbe relie le terme o:6µa:oç au reste de la phrase et marque la nature du
Ëpxoµ<n . Le ternie toûw est un adjectif démonstratif à l'accusatif neutre rappon qui les unit. Le substanti f neutre 0T6µat0ç se trouve au gén iti f
singulier qui signifie «ce, ceci, cela». Employé avec un nombre cardi- ingulier en rai on de la préposition É1TL Il si.gnifie «bouch ~» mais son
nal ou ord inal, il a le sen d' « à partir de maintenant, maintenant. voi- ens diffère selon le contexte dans lequel t1 est employc 5 . Dans cc
ci» 1. Dan cc contexte. toüi:o déterm ine l'adj ectif numéral ordinal verset. ot6µa-roç a le sens de la bouche comme organe de la parole. De
Tp[wv. Ainsi Tp[tov roûto se traduit par «(la) troisième (fois) voici, fai t. il est utilisé de faço n métonymique. et veut dire «la parole dite
ou (la) troisième (fois) maintenant>>. pa r quelqu ' un, le témoignage de, sur le dire de quelqu' um>6 . Ainsi la
Le verbe déponent Ëpxoµcu est à l'indicatif présent de la première phrase ÈlTL ot6µatoç se tradu it par «sur la base de la parole ou sur la
personne du singul ier de €pxoµcXL et se traduit par «venir, aller, 'en base du témoignage».
aller». D'ordinaire, il peut se construire au sens propre tout com me au L'adjectif numéral cardinal Mo est au génitif masculin pluriel et si-
sens figuré. Dans cc verset en examen, il est empl oyé au sens propre gni fie «deux». ll détenninc le nom µapn'.ipwv et s'accorde avec lu i en
avec un accusati f. Cependant, il y a une nuance dans son acception sc- genre et en nombre. Le substantif µap-r{ipwv, par contre, se trouve au
ion le genre de l'accusatif avec lequel il se construit2. En l'occurrence. génitif masculin plurie l et veut dire «témoin». Signalons que, dans le
~ pxoµcXL est employé avec un accusatif de personne et signifie «venir NT, notamment, dans !'Apocalypse (22 ,20 ) et dans la lettre aux Hé-
auprès de quelqu ' un». Au temps présent de l'i nd icatif, cc verbe traduit breux ( 12, 1), i1a le sens de témoin de Dieu, rnartyr 7 • 11 signifie, dans cc
l' idée d·une action contin ue mais inachevée. cas précis, témoin dans le sens premier ou ordinaire du terme8 .
La préposition 1Tp6ç se traduit de façon différente selon les cas qu 'ell e li détermine, avec l'adjectif numéral cardinal Mo, le substantif
régit dans la phrase. Elle peut soutenir soit le génit if, soit le datif ou ot 6µarnç. La particule KŒL e t une conjoncti on de coordination qui se
encore l'acc usatif. llp6ç est construit avec un accusatif. Cependant, sou- traduit par «et». Son sens se distingue suivant la valeur qu 'elle assume
tenant ce cas, clic assume également des significations variées3 . Elle est, dan la phrase, quand bien mème elle garderai t la traduction de «Ct»11 •
en l'occun-ence, tradu ite par «auprès de» en tant qu 'il marque un rap- Elle a ici valeur alternative comme la conjonction~ qui signi fie «ou. ou
port subjectif, en cc sens qu ' il s'agit d' une relation cnlrc les indi vi dus. bien». Ce fajsant, elle relie deux adjectifs Mo et rpi.wv.
Le mot uµciç est un pronom personnel de la deux ième personne pluriel. L'adjectif numérique cardinal t p1.wv, comme Mo, est au génitif mas-
li e trouve à l'accu atif à cause de la préposition îîp6ç et sert de com- culin pluriel et rendu en français par «trois». Le génüif lu i provient de
plément au verbe fpxoµcu. Ainsi. la phrase Tptt ov -roût o fpxoµai. 1Tpàç la concordance avec le mot µap't'upwv quïl qualifie. Ain i la phrase È1TL
uµâç se traduit par «(la) troisième (fois) vo ici. je viens auprès de VOUS».
- f1TL ot 6µa:oç ôUo µapn'.ipwv Kai. tpt.wv ota0~oCtaL lTcXV pfiµa. La
particule ÉlTL signifie «Sur, dessus» par opposi tion à UlTO «Sous». Elle s Il peut avoir le sens de bouche, soit en tant que partie du corps. soit comme or-
rég it le génitif et marque l' idée de «s'appuyer surn , «prendre pour gane de l'alimentation. soit comme organe de la parole. Cf. A. B AILLY, «ot 6µa ».
point de référence». Ainsi elle se traduit par «sur la base de» 4• Ell e GDGF. 1796.
6 (<lesrimony» (V. P. FURNtSH, If Cori11tlria11s, 569). TOB et BJ le traduisent pnr
«parole».
1 cr. A. BA1u v. «oùroi;». GDGF, 1426- 1427. 7 Cf. A. B A ILLY. «µctpt uc;». GDGF, 1228.
2 Le verbe ëpxoµcH peut Circ construit avec un accusnlif de but, il signifie «aller ou li En tant que tel, il s'agit, soit d' une personne qui voit. qui entend quelque chose et
venir dan . l'm: avec un accusatif de personne. «aller ou venir auprès de quelqu' un»: qui peut évcnlucllemenl lc rapporter : témoin d' un événement: soit personne appeléc.ù
avec un accusat if de direction, «aller ou venir pam. cr. A. DAlLI Y. «i'pxoµcm>, foire connaître en justice cc qu'elle sai1 d' une affaire . Cc sens diffère de ce lu i de t~­
GDGF, 812. moin comme martyr qui veut dire quelqu' un, qui. à travers ses actes, ponc témoi-
3 Avec l' idée de temps, rrp6ç se traduit par «vers»: nvec 1'idée d' espace, de mou- gnage de l'existence de quelqu'un ou de quelque chose : témoin du Christ ou témoin
vement ou de direction. il signifie également «Ver '»: U!.>Sumant 1'idée de rapport!.> de la foi .
d' opposition ou d'hostilité; d'amit ié ou d'entente, un rapport subjectif. il signifie Y La conjonction Kttl peut être une conjonction de coordination copulative avec la
«contre. avec, pour, auprès de». Cf. BDF. A Greek Grammur. §239 aussi n. 5: valeur adversative. consécutive. nhcrnativc, etc. Ayant la fonction de coordination. il
A. B AJLL Y, «npoç». GDGF. 1652 rdie des mots ou des proposition::. de même rôle grammatical et de sens compatibles.
4 Cf. BOF. A Greek Grammar. §234 aussi n. 7; A. B ALLL Y. «errt». GDGF. 736. Cf. BOF, A Greek Grn111111ar. §442. n. 16
58 PARTIE 1: LE CHRIST EST PUISSANT CH. U : UNE LECTURE ATfENTI VE DE 2CO 13, 1-4 59

ot6µatoç ôUo µaprupwv KCXL rp twv se traduit par <Œur la base de lapa- 1.2 Compositio11 du v. I
role de deux ou de trois témoins». Elle complète l'action du verbe
om9~0EîCH. Texte du . 1 Contenu
La fom1e du mot ome~oEîat est un verbe à I' indkatif futur passif à la
V. l.a Tpi:rov îOÜîOlpxoµcu iTpOç uµ<iç L'annonce de la
troisième personne du singu lier du verbe lon1µt. 11 signifie au sens «(La) troisième (fois) voici, je viens auprès de visite
transiti f «placer debout, soulever. fixer»: au sens intransiti f, par «se VOUS»
placer debout, se tenir debout». Dans ce verset, il a !'acception transi-
tive. Le temps futur employé ici exprime un impératif catégoriquelo. v. 1b fTTL or6µatoç ouo µaprupwv Kccl rpLwv Son objecti f
Nous traduisons l'expression o-:cxe~oHat par «soit fi xé». Par ailleurs, la o-ro:9~ornu mill p~µa.
voix passive du verbe fai t comprendre que le sujet subit l'action et que « Sur la base de la bouche de deux témoins et
son compl ément d'agent la réalise. Quant à l'adjectif indéfini niiv, em- de trois sera fixée toute chose»
ployé avec un nom sans article, il a le sens co llectif et se traduit par
«tout entiern ' 1. li est au nominatif en concordance avec le terme qu' il Le verset se compose de deux propositions parallèles : v. la e t v. 1b.
détermine : pfiµa. La première (v. 1a) est composée d' un verbe Ëpxoµcxt qui a comme sujet
Le terme pf)µcx est un substantif neutre. 11 est au nominatif singulier et un je inclus dans le verbe même. Ce je renvoie à L'expéditeur de la let-
signifie «tout ce qu'on dit» tels que «mot, parole. discours, langage, tre, qui est l'apôtre Paul. Son temps présent, exprimant une action con-
phrase» par opposition à ovoµa (mot). Sous l' influence de l' hébraïsme. tinue et inachevée, fait comprendre que l'action de Paul de venir ne
il est rendu en français par «chose» en général' 2. Pour le cas de ce ver- s'est pas encore accomplie. 11 s'agit donc d\m présent avec valeur de
set, pf)µa est employé dans le sens général du tenne en tant qu ' il est pris futur. Le verbe Ëpxoµcx t est construit avec deux compl.éments : îîpoç
dans l'ensemb le de tout ce qui a été dit. li veut donc dire «chose». Ain- l.1µêiç et Tp[tov toûro. Le premier est un pronom personnel pluriel qui
si, la phrase l'Tiiv piiµa signifie «toute chose» 13 et représente le sujet du suppose un groupe de personnes. Ces dernières se rapportent aux mem-
verbe otcx9~oe:cxt. Nous traduisons la phrase Ènl. ot6µatoç ôUo µap bres de la communauté dans la mesure où ils sont les destinataires de la
rupwv K<XL î ptwv m:a9~0E't1Xl niiv pfJµa par «Sur la base de la parole de correspondance de Paul. De fai t. ce complément Tipoç uµiiç dénote une
deux ou trois témoins, soit fixée toute chose». relation entre I' Apôtre et les Corinthiens. Une relation, que nous pou-
vons appeler de père et fils, car il les a engendrés par l'Evangile dans le
Chri st Jésus ( l Co 4, 15). Le second complément 'l'ptrnv rnûrn ex plique
le nombre de fois où il se rend auprès de la communauté de Corinthe. Il
10 Cf. BOF. A Greek Gra111111ar. §362: V.P. F lJRNISll, Il Cori111hic111s, 569: s'apprête à y aller pour la troisième fois. En effet, la première fut celle
P. BAR En. Second Cori11thia11s. 598 n. 25; A. PITIA, La secundo Jettera ai Corin::i. de la fondation de l'église de Corinthe (Ac 18. I ss); la deuxième est
536 n. 57. celle durant laquelle l'apôtre des Gen tils fit une expérience dou loureuse
11 Au singulier, niiv a le sens partitif et signifie «chaque. chacun, tout entier. tout».
Au pluriel, il se traduit par «tOlLS>> et se joint nu moi qu'i l qualifie. Sa conslruction (2Co 7 , 11 - 12): et le troisième temps de sa visite â Corinthe est rappor-
dans la phrase diffère également scion qu ' il est employé avec un substantif sans !"ar- tée en 13, 1.
ticle ou avec l'article. Dans le eus où le nom qu ' il ùé1cnninc est sans l'article. 11ii11 in- La deuxième proposition (v. 1b) est constituée d'un suj et passif miv
dique que le substantiJ est employé au sens collectif, ainsi il se traduit par «tout entier. piiµa. un verbe om9~oemt. et un complément de «référence>> : èTTI.
etc.». Si, en revanche. Je mot qu'il détermine est avec l'article. il y a deux possibilités
de construction. Soit l'article est placé devant le nom. dans ce cas l'adjectifniiv qu'il
o:6µcxtoç ôUo µcxptupwv KIXL tptwv. Etant un verbe au passif, otcx0n-
précède, assume la fonction d'un attribut et a le sens de «tout enticm; soit niiv est oc:cxt doit avoir un complément d'agent. Ce dern ier est sous-entendu.
précédé lui-même de l'anicle et indique alors l'idée de totalité en opposition aux Nous supposons qu ïl s'agit de tous les membres de la communauté. y
parties isolées; il signifie alors «le tout. tout ensemble». Cf. A. BAILLY, «lTâç». compris Paul qui e rendra à Corinthe pour la troisième fo is. Cette por-
GDGF, 1495. tion de La phrase présente les raisons de cette visite imminente de
12cr. A. BAILLY,«pf)µa». GDGF, l7L7.
13 li est aussi traduit par «toute affaire». Cf. TOO et BJ.
60 PARTIE 1 : LE Cl !RIST EST PUISSANT C'H. 11 : UN E LECTUREATfENT1VEDE 2CO 13, 1-4 61

I'Apôtre. LI a à Corinthe afin que toute cho e soit fi xée sur le témoi- voulu sans doute en citant ce texte donner du poids à la mi ssion qu ' il
gnage de deux ou trois personne . s'apprête à réaliser chez les Corinthienst 5 . Il app lique ici la manière de
Bien quïl n'y ait aucune conj oncti on qui pem1enc de voir le genre procéder juridiquement de la culture juive présente dans le Pentateuque.
de lien existant entre les deux partie du verset. néanmoins le contenu Les questions surgissent de savoir le sens du Dt 19.1 5 en 2Co 13.1;
rend possible sa compréhension. En effet. les propositions se rapportent l'intention de Paul en faisant allu ion à ce pas age et l' identi té des
à l'une et à l'autre par la relation de principale et de subordonnée. La personnes auxquelle il pense comme témoins.
phra c Tpi.tov îOûw €pxoµa.L npoç ùµéiç constitue la proposition princi- A ce sujet, les biblistcs se divisent en deux tendances interprétatives.
pale. Dans celte dernière, il y a l'énoncé d' une troisième visite de Pau l Pour les uns, la citation de Dt 19, 15 e t comprise dans le sens judiciaire.
à Corinthe. La proposition subordonnée : ènl. oî 6µa.î0ç Mo µap î upwv lis affirment que Paul , en parlant des témoins, laisse entendre qu ' il in-
Ka!. îpLC~v om9~ocm:L miv p~µa présente la finalité de cette visite c l la tentera un procès à Corinthe pour établir toute affai re et punir les cou-
stratégie que I' Apôtre adoptera pour la réaliser. LI se rend, de fa it, dans pable sans ménagement '"· Pour les autres, ils s'orientent vers un sens
la cité grecque pour fixer toute chose. Pour ce faire. il se référera au allégoriq ue de cc texte et soutiennent que les trois témoins correspon-
témoignage de deux ou trois personnes. dent à ses trois visites dalls la capitale de la province romaine d' Achaïe.
Nous signalons par ailleurs que la phrase Tpi.rnv îoù:o Epxoµcu npàç La prem ière est celle de la fondation de la communauté. Le deuxième
ùµciç e trouve presque à l' identique en verbe et en complément avec séjour est celui marqué par l'expérience doulourcu c de Paul auprès des
celle du v. 14 du ch. 12 : i.ôoù î pLî ov îOÛîO Éi:oi.µwç Ëxw f>..9ü v Tipoç Corinthiens (2, 1). Le troisième moment de sa présence dans la cité
ùµiiç. Dans ces versets, Paul annonce qu ' il est prêt à e rendre auprès grecque correspond à celui annoncé en 13.1 17•
des Corinthiens pour la troisième fois. Ce même désir, il l'exprime éga-
lement en 12.20-21. Cependant i1 ne mentionne pas le nombre de fois
Cependant. nous affinnons que sa pratique était assez connue et répandue dans les
où il se rendra auprès d' eux. JI parle seulement de se rendre à Corinthe. premières communautés chrétiennes. Les autres texte du T la mentionne en effet
Le verbe grec utilisé: Epxoµat est le même dans toutes les quatre men- (Mt 18.6: Jn 8.17; !Tm 5,1 9). Cf. J.W. MCCANT. 2Cori111hir111.'l, 159- 160; F. MANZI.
tions de sa visite à cette communauté. En effet, dans le trois premiers Secondu Le1tera ai Corùd, 306: A . PIITA, Ln seco11d(I Lelleru ai Cori11:i, 536. Nous
6noncés de sa visite ( 12, 14.20-2 1), I'Apôtre relate sa prise en charge pensons aussi que les chrétiens d'origine païenne, comme c'est le cas à C'orinthc, 0111
par lui-même cl ses craintes relatives à cc qui l'attend à Corinthe; par appris à connaîlre cette pratique de la loi en Dt 19. 15. C'est pour celle raison,
probablement. que Paul n' a pas utilisé une fonnul e inrroductivc à cette citation. Pilla.
contre, dans la quatrième déclaration en 13, 1, I' Apôtre exprime préci- quant à lui. parle de La référence au Dt 19, 15 en 2Co 13. 1 comme une mention
sémen t l'objet de a visite à Corin the e l la stratégie à adopter pour le indirecte. tandis que celles de l' AT dans les uutrcs textes comme des citations directes
réaliser. Tant les mots Tpt î OV î OÛîo que le verbe Ëpxoµat montrent le de r AT. Cf. ID.. la seconda Lt!rtera ai Corin:::i. 536-537. Certc prescdption édictée
lien entre la péricope 13, 1-4 cl celles qui la précèdent ( 12, 14.20-2 1). par Dieu en Dt 19. 15 jouait un rôle dans les procédures disciplinaires au sein de la
Sc rapportant à la phrase Élit aî6µa î oç Mo µapt upwv Kat î ptwv communauté de Qumran. Cf. V.P. FURNISll, Il Corin1hia11s, 569 n. 1: A. PrnA. la
.H!c:orula Leuern ai Corild . 536.
ota.9~on1u TTciv pfiµa, ile t question d' une reprise par Paul d' une partie
t5 Cf. H. Van VUET. No Single Testimo11y. 26; A. PrnA. La seconda lettera ai Co-
du texte du Dt 19,15 (LXX) 14 . Connaissant la loi mosaïque, !'Apôtre a r111:i, 535.
16 Pitta affim1e que la citation Dl 19,1 5 joue un rôle capital en ce sens que Paul
prévient. par cette référence. les CorinLhiens qui l' ont jugé de faib le devant eux alors
14 «OUI( ȵµwü µâpniç ttlç µa prupf]o<XL Krmi àv0pWTIO\J KIXîèt 1TÏÎOllV àÔLKLIXV tea i. quï 1 est énergétique et sévère dans les lettres (2Co 1O. 10). Cette foi s-ci. Paul est en
1catèt niiv étµâp-:riµtt KllL K<Xtà nâom1 aµapdm• ~v iiv étµCÎp-=1) f ni. ot6µatoç ôÛo 1rain de leur dire qu ' il ne sera plus faible mais plutôt fo rt à telle enseigne qu'il sol-
µaptûpw11 tee.ci. (ni. <rrOµatoç t pLw11 µaptûpwv ota0~octm nâv pf]µct/ Un seul témoin licitera un témoignage de nature judiciaire. C'f. ID.. La seconda leuera ai Cori11:1, 537.
ne peut uffire pour convaincre un homme de quelque fau te ou délit que ce soit; quel Li re également E.-B. ALLO, Seconde Epître, 335-337; P.E. H UGllES. Paul. 741 :
que soit le délit, c'est au dire de deux ou trois témoins que la cause sera étnbl ie». Nous G. 8ARBAOLIO, «Alla comunità», 741: 8 . WJTt IFRINGTO 111 , Crmflicf, 409.
signnlons toutefois que, pour illustrer ses propos. Paul utilise habituellement l'AT t 7 Danker admet que la référence au texte du Dt 19. 15 indique un ton judiciaire.
avec des fonnul es telles que «scion qu ' il est écrit, il dit en effe t: ainsi que Dieu l'a cependant il afftnne qu'il ne s'agit pas nécessairement de penser à un procès. Le spé-
dtt» (2Co 6,2. l 6b: 8. 15:9.9). Par contre. ici. ce n'est pas le cas. ous admetton . par cialiste fait remarquer le rapport entre le nombre troi des témoins et les trois visites
ail leurs que la règle dëftnjc en Dt 19, l 5 était ignorée dans le monde gréco-romuin. de Paul effectuées à Corinthe. Ainsi il soutient que la première visite de !'Apôtre ser-
62 PARTlE 1 : LE C HRJST EST PUISSANT C H. Il : UNE LECTURE ATTENT IVE DE 2CO 13. 1-4 63

Quant à nous, nous pensons que l' interprétation métaphorique de la aposto lique, !'Apôtre évoque la faiblesse vécue en Cbrist comme signe
citation de Dt 19, 15 est une lecture forcée. De fait, il n'y a rien dans le crédib le de ce qu'il est pour Je Christ (2Co l 2.5.9; 13,4). Cette faiblesse,
texte qui pui sse suggérer une telle approche. Dans Je sillage des exé- ignorée par ses convertis, est potLr lui le lieu de la manifestation de la
gètes qui vo ient dans la deuxième lettre aux Corinthiens une lettre apo- puissance de Dieu en sa personne (2Co 12,9).
logétique confo1111e au genre rhétorique, nous attribuons à ce passage le Quant à savoir qui seront les témoins dans cette procédure ecclésiale,
sens j udiciai re 1ll. Ainsi, Paul se rendra auprès des Corinthiens pour éta- les textes ne donnent pas assez d'informations. Seraient-ils les mem-
blir tout ce qu i a été dit à la manière d ' un procès au sein de la commu- bres de la communauté de Corinthe ? Serait-ce les personnes qui ont
nauté. li fera appel aux deux ou tro is témoi ns selon la pratique judi- informé Paul de ce qui se passait da ns la communauté de Corint be21 ?
ciaire de la loi mosaïque 19 .
La présence des personnes connaissant les faits permettra de résoudre 2. 2Co 13,2
Je problème qui mfoait la vie communautaire. li s'agit précisément du 1TpOELpT)Klt Kltl îîpoAf-yw,
comportement de certains membres qui avaient péché dans le passé et wç mpwv LO ÙEULE pov KCÙ &n~iv vi'n1,
de tous les autres qui vivent dans le désordre (2Co 13,2). Pour y arriver, w1ç np011µap• T)KOOLV KltL w"Lç ÀOLTI01ç nâ.ow,
Paul a besoi n des preu ves afin de concl ure de manière satisfaisante et "OH EltV
'\ "'
EA9W H' Ç LÜ . îTwüV
l.\
OU, ,1, ,
't'HOOµa.L ,
convaincante tous les confüts interne à la communauté. <d 'aï averti et j 'avertis
En Lien avec 2Co 12, J 9, no us affirmons que P aul n'avait plus beso in Lorsque j'étais présent la deuxième fois et je suis absent maintenant,
des témoins pour légitimer sa mission apostolique. Les Corinthi ens quj Ceux qui ont péché auparavant et tous les restes :
devaient le défendre ne l'ont pas fait, alors qu ' ils sont pour lui des si- Si je reviens vers ceux-là, je n'épargnerai pas».
gnes tangib les de son apostolicit:é ( ! Co 9,2; 2Co 3, 1-2; 10, 13- 18)20. 2.1 Analyse syntaxique du v. 2
Cependant, il leur fa it savo ir qu ' il parle devant Dieu dans le Chri st en
vue de leur édification (2Co 12, 19). Quant à la défense de sa ministère - rrpOELPT)KCl Kal. npoÀÉyw. Le verbe rrpOE CpT)Ka qui introduit le v. 2 se
trouve à l' indicatif parfait actiJ: première personne du singulier de npo),Éyw.
Le temps parfait exprime la continuité de l'action accomplie22. Le verbe
virait de témoignage pow· l'évangile, que ce1tains Corinthiens ont transgressé dés npoÀ.É-yw peut se traduire de deux façons différentes, lesquelles dépendent
cette première visite; son de uxième séjour témoignerait de cette violation et le troi- du sens que la préposition rrp6 a dans la phrase23. Dans ce verset, rrp6 a le
sième visera à détern1iner les panies coupables que !' Apôtre avertit au v. 2. Cf. ID..
sens de «auparavant», et le verbe avec lequel il est constmit <<prévenir,
Il Corinthians, 208. Voir aussi J. CHRJSOSTOME, 111 secundam ad Corinthios. 596:
A. PLUMMER. A Crilica/ and Exegetical Com111enta1J•; 372: H. WINDISCH. Der ziveite prédire, avertir». n se construit, donc, avec une proposition déclarati ve
Korintlterhrief, 4 13; J. l-I ÉRINO. la seconde épi1re, 10 1; C.K. BARR ETI, The Second
Epistle, 333: M. THRALL, The Second Epis rle, U, 875-876: M.J. HARRIS, The Second
Epistle, 908. 21 Puissions-nous penser en particulier à T ite el Timothée ? Cr. J. M URPH Y-
IR Cr. 8 . WTTHERINGTON Ill. Co1!flic1. 333; J.W. MCCANT, 2 Cori11thit111s. 13. 15- o·CoNNOR, Pa11/. His Story, 168. 179. et égalemc111 dans ce trava il le poinl 2.3 Rela-
16; F.J. L ONG; Ancien! Rhetoric. 2 . 11 2- 11 3. Dans ce travail, lire le point 4. 1.1 Diffé- tions entre Paul et la communauté.
rentes approches rhétoriques. 22 C f. BOF. A Greek Grammar. §340.
19 Cr. B ARNETT, Th e Second Epistle, 598 ; F. M ANZl, Seconda Le/fera ai Corin- 23 Lorsque ï1p6 signifie «devant» . le verbe auquel il se rattache signifie a lors «choi-
i:i. 306. sir de préférence à d'autres; désigner comme premier, mettre au premier rang». Par
lO En 2Co 3.1-3. notamment, l'apôtre Paul affi rme que les Corinthiens sont sa let- contre, lorsque cette prépositiou a le sens de «auparavant», le verbe avec lequel il est
tre de recommandation dont le Christ est l'auteur. Cette lettre, le Christ l'a écrite avec employé se trad uit dans ce cas par «d ire auparavant». Cependant. constrnit avec la
!'Esprit du Dieu vivant. Donc, les Corinthiens représentent Je témoignage visible de conjonction on, il a le sens de prédire. prévenir, avertir; avec une proposirion infini-
son aposto licité. Signalons que la lenre de recommandation était u11e pratique dans ti ve, il signifie déclarer d 'avance, annoncer sui vi d ' un accusatif. Cr. A. BA ILLY,
!'antiquité qui visait à assurer l ' bonuêteté de la personne recommandée, spêcialcmenl mrp o/,Éyw». GDGF, 1644. En Ga 1. ,9; 5,2 lb, l Th 4,6 nous ttouvons des formules
en voyage ou en visite, auprès des destinataires. Ces derniers pourvoyaient à ses be- semb lables avec le verbe rrpoi..~yc.1. Ce dernier se traduit par «avertirn. Pour Les autres
soins en cas de nécessilé. Pour les détails de cette pratique voir C.W. KEYES, «Tbe cas. en 2Co 7,3 il sign ifie «dire avanb>. en Rm 9,29 «prédire». c r. V.P. F URNISH, Il
Greek Lecter or lnirod uctiom). 28-44; V. P. F URNJSI 1, Il Cori1111tia11s, 192- 196. Corintltians. 569: A. PIITA, La seconda /eu era ai Corim:.i, 536 n. 63.
64 PARTIE 1: LE Cl UUST EST PUISSANT CH. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13, 1-4 65

comme en témoigne la présence de on. Le suj et est inclus dans le verbe ou de quelque chose, être absent>>; soit par «s'en aller, partirn28, etc.
TTpOE Lp11Ka. li est rendu en français par «J'ai averti; j 'ai prévenu, j 'ai pré- Etant relié par une conjonction de coordination : KO'.L avec le verbe
dim. Bien entendu, la conjonction Ka( joue ici le rôle d'w1e coordination mx.pC:iv, et sachant que la fonction d' wie conjonction de coordination est
copulative. Elle reLie deux verbes : 1TpOELpT)KCX et npoÀÉyw, et se traduit par celle de relier des mots ou des propositions de même fonction gramma-
«et». L' indkatif présent actifTipoÀÉyw se trouve à la première personne du ticale et de sens compatibles, nous analysons ct1TWV comme un parbcipe
singulier du verbe 1Tpo).Éyw. C'est le même verbe que la forme 1TpOE[p11Kcx conjonctif correspondant à une proposition temporelle, de même que le
que nous avons déjà analysé. Précisons toutefois qu 'avec le temps présent, participe mxpwv. Dans ce verset, il se trouve à l' indicatif présent parce
Tipo).Éyw indique w1e action continue et incomplète. Son sujet est incorporé qu'i l se réfère à une action en train de se réaliser et se traduit par <rje
dans le verbe et signifie <~'avertis; je préviens». sui s absent».
- wç 1Tapwv -rè &:u-repov Kal. èrnwv vûv . La particu le wç peut avoir la Quant à l' adverbe temporel vûv, son sens varie selon l' usage qu' on
nauire d"tm adverbe ou d' une conjonction24. Elle joue ici la fonction en fa it29. Dans ce verset, vûv est joint au verbe ciTiwv et compl.è te son ac-
d\me conjonction de subordination temporell e et a le sens de «lorsque». ception. Il est tradui t par «actuellement, maintenant». Par conséquent,
mxpwv est une fom1e du participe présent actif du verbe mxpELµL I «être cet adverbe donne une bonne indication pour rendre le participe ciTiwv
présent» 25. A cause de la conjonction temporelle wç qui le précède, au présent. Ainsi la pbrase ciTiwv vûv se traduü par <rje suis actue l-
Tiapwv fonctionne comme un participe conjonctif. Il est équivalent à lement absent».
une proposition ciiconstancie.lle temporelle2 6. ll se trouve au nominatif - îOLÇ 1îpOT)µO:pT11KOOLV KO'.L TOÎ.Ç ÀOL1TOÎ.Ç 1TciOLV. L' article défini TOÎ.Ç
singuli er masculin en rapport avec le sujet de la phrase. Ce sujet est un est au datif rnascu lin pluriel. Il détermine le participe 1Tpo11µcxp·n 1Koow
pronom personnel de la premère personne du singulier i11clus dans le el en précise le genre et le nombre. Le participe TIPOTlµ<XptllKOOLV se
verbe 1Tpoe[pT)KCX. Ce pronom renvoie à l'auteur de la lettre: l' apôtre trouve au temps parfait actif du verbe npocxµaptcivw I «pécher aupara-
Paul. Le participe mxpwv a le sens de «j 'étais présent», du fait qu' il in- vant, antérieurement, dans le passé». 11 exprime la continuité de l'action
dique une action du passé. accomplie à cause de son temps parfait. li est employé comme substan-
L'article défini TO se ITouve à l'accusatif neutre singu lier. n déter- tif30 et déc liné au datif. Tl joue la fo nction d'un complément indirect des
mine l'adjectif ÔEUîEpov ql1i le suit et en précise le genre et le nombre. verbes 1TpOEtpT)KCX. et Tipo}.Éyw. Ainsi, -roî.ç 1Tpo11µcxp-rT)KÔOLV est rendu en
L' adjectif numéral ordina l ÔEUtepov est à l'accusatif neutre singulier. U fra nçais par «aux pécbants dans le passé, ou à ceux qui ont péché dans
peut avoir le sens soit de «second, deuxième» par opposi tion à Tipwwç / le passé».
«premier» et i:p[-roç I «troisième»; soit de «qui vient après»21. Le sens La conjonction KCXL a valeur de coordination, qui relie deux adjectifs
quïl a dans ce verset est celuj de second, deuxième par opposition à substantivés: i:olç 1Tpo11µap-rriKootv et taî.ç ÀOL1Toî.ç. L'article défini
rrpwtoç I «premi er» et tp( TOç I «troi sième)>. Nous traduisons donc les roî.ç est au datif masculin pluriel; il détem1ine l' adjectif Âot1Toî.ç et en
mots rà ÔEUîEpov par «la deuxième (fo is)». La conjonction KO'.L est une précise le genre et le nombre. J\ot1TOÎ.ç est au datif et peut signifier soit
coordination copulative qui joint deux verbes: 1Tctpwv [ .. . ] Kcxl. &nwv. Le «restant, qui reste»; soit «le reste de» avec l' idée de temps. Il a ici
participe présent actif lirrwv est décliné au nominatif masculin singulier va leur d 'Lm substantif pris dans le sens générique à cause de 1TcioLV31 • n
du verbe aTIELµ t. ll est rendu en français soi t par «être loi n de quelqu 'un est complément indirect des verbes TIPOEl.p11Ka et 1TpoÀÉyw. L' adjectif
indéfin i 1T&OLV se trouve au datif masculin pluriel en concordance avec
l' adj ectif r oî.ç /.orno'iç qu ' il détennine. Il est trad ui t par «tous». Ainsi,
24 Cf. A. BAILLy, «Wç». GDGF, 2 189-2 190. rnî.ç ÂOLTioî.ç miow est traduit par «à tous les restants».
25 Son sens difiëre d'après la nature du sujet avec lequel il est employé. Si le sujet
est un nom de personne, il signifie «être préscnc, être aux côtés. assister, secourir, être
venu, se trouver présent» : si c'est un nom de choses. il est traduit par «être présent,
être à la disposition de, etc». Comme verbe impersonnel. il vt:ul dire «dépendre de». 2R Cf. A. B A ILLY. «a1TELµL ». GDFG, 208.
Cf. A. B A ILLY, «rrapHµL» , GDGF, 1483. 19 Cf. A. BAILLY, «vùv», GDGF, 1337.
16 Cf. BDF.A Greek Grammar, §417-4 18. 30 Cf. BDF, A Greek Grammar, § 2 12-2 13.263.413.
27 Cf. A. BMLLY. «Ôf uti:poç». GDGF. 449. 31 Cf. BOF, A Greek Grammar. § 2 12-2 13.263.4 13.
66 PARTIE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT CH. fi : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13, 1-4 67

- on Èètv Uew elç ro lTClÀLV où cjle[aoµ(XL . La conjonction de subor- nier un fait par opposition àµ~. Ce dernier se construit dans une phrase
cli.nation on introduit un di scours direct déclaratif. Elle correspond aux qui nie une possibilité.
deux points du signe de ponctuation. LI s'agit d' un on récitati:f-l2. La Le verbe déponent cPEtooµ1n est à l' indicatif futur de la première per-
particule E<iv / «si, au cas où» est une conjoactjoa de subordination qui sonne du singulier du verbe <Pdôoµa1. I «épargner, ménager». De là
exprime une idée d' hypothèse ou de condition. Elle se construit avec Je vient le sens de «traiter avec ménagement, employer avec ménagement,
mode subjonctif et est employée ici dans un discours directJJ. Elle a s' abstenir de»3s. Le sujet de ce verbe est un pronom personnel, pre-
valeur temporelle. En effet, il ne s'agit pas dans ce verset d' une éven- mjère personne du singulier et se réfère à Paul : l' auteur de la lettre.
tualité mais plutôt d' un moment particulier. Ainsi, elle peut être tra- Ainsi, ljJe(ooµa1. peut se traduire par <~e n'épargnerai personne; je ne
duite par «quand»34. traitera i pas avec ménagement».
Le verbe déponent Uew est un subjonctif aoriste actif de Ë pxoµa ~ /
«Venir». Il se trouve à la première personne du singulier. C'est un verbe 2.2 Composition du v. 2
que nous avons déjà analysé au v. l. Il est employé ici au sens propre
avec ! 'adverbe nci1tv / «de nouveam>35. Ainsi la phrase ËÂ9w [ ... ] naÂtv Texte du v. 2 Moment de
signifie «je reviens». Certes, Je mode subjonctif exprime le doute ou l' action
Péventuali té 36. Cependant, construit avec la conjonction Èciv qui ex-
prime ici un moment particulier et avec Le temps aoriste qui dit une V. 2a 1TPOEtPTJKC! KC!l TTPOÀÉyw, Le passé / le
«J'ai averti et j'avertis»
action limitée dans Je temps, cela suppose que l' action du verbe uew se Présent
réalisera dans un moment bien précis. Le sujet de v.ew [... ] iHXÀLV est v. 2b Wç mxpwv rà ôe,;unpov Ko:l Ù:Tiwv vûv, Le passé / le
un je incorporé dans le verbe. U se rapporte à celui qui écri t : l'apôtre <<lorsque j'étais présent la deuxième (fois) et je Présent
Paul. Ceci montre que l' annonce de revenir de Paul est un acte qui se suis absent maintenant»
produira dans un instant détenniné.
La préposition Elç régit l'accusatif et sign ifie «dedans, dans, vers, à, V. 2c îÔLÇ 1TpOT]µCXpTIJK601.v KC!L Et le passé I et
jusqu 'à». Construite avec un verbe de mouvement: Uew, elle introduit îOLÇ ÀOL TTOLÇ TT<iOLV, le présent
un accusatif de lieu. L' article défini -r6 est employé comme pronom «ceux qu i ont péché auparavant et tous les
restes»
démonstratif. Il assume ainsi la fonction du mot qu ' il remplace37. 11
substitue ici rn'Lç np011µap111K6aw KtÙ rn'Lç ÀOtïTo1ç rrâatv. 11 est donc v. 2d on Éàv ËÀ9w Elç rô TTcXÂLll où QJElooµat , Le futur
traduit par «ceux-là>>. La particule ou est un adverbe qui s'emploie pour «si j e rev iens vers ceux-là, je ne ménagerai
pas»

32 Cf. BDF, A Greek Grammar, § 470; P. BARNETT, The Second Epislle. 600 o. 38;
V.P. FlJRNISH, Il Cori111hians. 570; A. Pm A. la seconda le11era ai Corinzi. 538 n. 68.
33 Cf. BDF, A Greek Grammar, § 371. 38 C' est un terme ulilisé dans le langage militaire et a le sens d'«avoir pitié; ne pas
34 Ct: M. ZERWICK, Biblical Greek, § 320; P. B ARNETT. Tite Second EpLçt/e, 600 n. t11er, être doux, clément, modéré». En 2S 18.5, le verbe est employé dans un contexte
38; V .P . FURNISH. 11 Cori11thia11s. 570; J. LAMBRECHT, Second Corinthians, 22 1.; mi litaire. Le roi David demande à son armée qui va en guerre d'épargner le j etUle
A. PITT/\, la seconda lettera ai Corinzi, 538. Absalon. li est également utilisé dans d'autres contextes tels qu'en 2Co 1,23 , où il est
35 L'adverbe mxÀw possède plusieurs sens. fi peut signifier «en sens inverse, en re- question du rapport entre Paul et les Corinthiens. L'Apôlre affinne que c'est par mé-
broussant chemin, à rebours, en arrière» ou bien «a l'opposé, au contraire, à son tour. nagement pour ses convertis qu' il n'est pas allé à Corinthe. En Rm 8.32, il s'agit de
de nouveau». Pour ce verset. il veut dire «de nouveau, encore». Avec le verbe H0w, il Dieu qui n'a pas épargné son propre Fils. Ce texte évoque Gn 22, 12-16 qui rapp0tte le
exprime un mouvement de retour. fi s'agit de l'action de Paul , qui revient vers les sacrifice d' Isaac que son père Abraham n'a pas épargné. Cf. A. Pm A, la seconda
Corinthiens après les avoir quittés. leuera ni Corinzi. 538 n. 69. Voir aussi C. K. BARRETT, Tli e Second Epistle, 334;
36 Ct: BDF, A Greek Gra111111ar. § 363. P. BARNETr, The Second Epistle, 600 n. 39; J. W M CCANT, 2 Cori111hia11s. 160;
37 Cf. BDF. A Greek Grammar. § 249. A. B AILLY, «<jlE-(ôoµa.L», GDGF. 2058.
68 PARTIE 1 : LE CHRJST EST PUIS A T Cl l. Il : UNE LECTURE A ITENTIVE DE 2CO 13, 1-4 69

Cette structure du verset met en relief d' une part la tension qui carac- La quatrième partie du V. 2 : onUw ËÀ.8w Elç tà 1TcXÀLV où cj>E[ooµcn ,
térise les paroles de Paul et d'autre part les différentes propositions qui c t formée de deux conjonctions de subordination on
et Èav : dont
composent le v. 2. En effet, il ressort de cette compos ition la tension l' une introduit une subordonnée en discourt direct et l'autre une condi-
entre le passé, le présent et le futur. L' Apôtre évoque ce qu ' il avait pré- ti onnell e qui a va leur temporelle. Nous y découvrons aussi deux verbes
cédemment dit à ceux qui ont péché et à tous les autres, lorsqu ' il était U8w et cj>E(ooµa l dont Je second est affecté d'une négation, la préposi-
présent pour la deuxième fo is pam1i les Corinthi ens. Il le répète présen- tion elç qui indique Je mouvement du sujet, et l' att icle îO qui joue le
tement aux mêmes personnes pendant qu ' il est absent, et les averti t de rôle d' un pronom démonstratif.
ce qu 'il envisage de faire ultérieurement lorsqu' il sera chez eux. Cependant, ces quatre partie sont liées l' une à l' autre par la conjonc-
Concernant le contenu du verset, il y a quatre partie qui révèlent cet tion copulati ve KIXL et de ubordination on.Ell es sont composées de
effort de l 'Apôtre à communiquer avec ses convertis. La première : plusieurs propositions. Il s'agit de deux propositions pri ncipales :
lTpOE LPT)Ko: Ko:l npoÀ.Éyw. Elle se compose de deux verbes identiques : trpOELPT)Ka KIXL npoÀ.Éyw / <~'a i averti et j ' avertis»; de deux propositions
lTpoÀÉyw, ayant un même sujet : l'apôtre Paul. Cependant, ils se distin- subordonnées temporelles : wçnapwv i:à ÔflJtEpov Ko:t cinwv vûv /
guent par leurs temps: le premi er est à l' indicatif parfait et le second à «lorsque j 'étais présent la deuxième foi s et je suis absent maintenant>>,
l' ind icatif présent. La conjonction Kal indique que ces verbes ont la Cl d' une proposition en discours direct temporelle: 0'!1. Èètv ËÀ8W El ç '!à
même fonction grammaticale : cell e d' une proposition principale. La lTcXÀ.Lv où Q>el.ooµo: L / «: quand je rev iens, je n'épargnerai pas». Au
deuxième partie : wç napwv -rà ôdmpov 1<0:1. cinwv vûv. Elle comprend demeurant. les verbes des propositions principales ont le même
deux conjonctions : une de subordination (wç) et une autre de coordina- complément d 'objet indirect: rn1ç trponµapt'T)KOOLV KIXL rol.ç Àorno1ç
tion (Kcd), deux verbes de la même racine mais directement opposés rrc'ioLv / «à ceux qu i ont péché auparavant et à tous les restes».
entre eux (mxpwv et à.nwv). et un adverbe de temps (vûv). La particule Pour ce qui est du contenu de ce verset, I' Apôtre y annonce sa
Ko:l. montre qu' il est question de deux propos itions ayant la même fo nc- trois ième visite et relance un appel à l' attention de ceux qui ont pé-
tion grammaticale. li s'agit d' une subordonnée temporelle in troduite ché précédemment et de tous les restes de la communauté au sujet de
par wc;. L' adverbe vûv complète le sens du verbe &:nwv. ce qu ' il prévo it fa ire lorsqu' il sera à Corinthe. Comme lors de sa
La troisième partie: ro1ç lTponµo:ptT)KOOlll Kal i:o1ç ).orno1ç niioLv, deux.ième vis ite, Paul insiste sur la façon dont iJ pense réaliser l' ob-
représente Je comp lément indirect des verbes lTpoe LpT)Ko: et 1TpOÀ.Fyw. jectif de so n séjour à l'égard de ceux qui ont péché et de tous les
Les tennes 11poT)µap-rn1<6ow et À.orno1ç expriment deux catégories de restes. Au cours de la troi sième visite, il les prévient qu ' il ne traitera
personnes auxquelles le message de Paul s'adresse. Il est question de pas avec tac t.
ceux qui ont péché auparavant (lTponµap'!T)KOow) et de tous les restes
{ÀotlTol.ç). Quant à leur identité, Paul en parle en 2Co 12,20-2 1. Les
membres qu i ont péché seraient ceux qui ont commis dans le passé des
actes d' impureté. de fo rnication et de débauche et ne se sont pas repen- des péchés avant et au temps de la deuxième visite de Paul. Quant à «tous les res-
tes», ils sont ceux qui persistent dans le péché. Cf. Lo., 2 Corinthia11s. 160. D'autres
tis de leurs péchés (cf. 2Co 12,2 1). Le groupe appelé «tous les restes» spécialistes affi rment que par «tous les restes», il s'agit des personnes qui ont sou-
correspondrait aux croyants qui vivent dans les désordres, la discorde, tenu ou toléré ceux qu i ont péché. Cf. 11. WINDISClt, Der zweite Kori111herhriej; 41. 5;
la jalousie, les animosités, les disputes, les ca lomnies, les commérages, P. B A l~Nt;TI , The Second Episrle, 600; Y. P. FURNI SH. Il Cori11thir111s, 570.576. A
les insolences (2Co 12,20)311. notre avis. nous pensons que Pnul a bien distingué ces membres pécheurs de
l'ensemble de la communauté. Par ai lleurs. l'emploi des prépositions npoç au v. 1 et
d ç au v. 2 permet de voir certe di fférence. Au v. 1. l'ApôtTe s'adresse â l'ensemble
39 Scion Pitta, même si, à première vue. que Paul distingue les personnes qui ont de ln communauté en disant : <~ e viens auprès de vous»: et nu v. 2, il précise en
péché antérieurement du reste de l'ensemble de la communauté (2Co 12.20-21 ). affirmant : «si je reviens vers ceux-là». Ceci nous mène à affinner qu'en 2Co
cependant !'Apôtre s'adrc se à toute la communauté. du fai t qu'elle ne l'a pas sou- 12,20-2 1. Paul identifie avec précision les personnes qui ont péché dans le passé et
tenu contre ses détracteurs. Cf. Lo., La seconda /euera ai CoriTd. 538. McCant tous les restes de l'ensemble des membres de la communauté. Voir aussi
nffinne par contre que les avcnissements de Paul ne concerne pas toute la commu- J. LAMBRECllT, Second Cori11thic111s. 221 ; M.J. HARRIS. The Second Epistle. 909:
nau té. Il identi fie les croyants qui ont péché dans le passé à ceux qui commettaient F.J M A ri' RA. Il Cori111'1ia11s, 306.
70 PARTIE J : LE CHRIST EST PUfSSANT CH. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13.1-4 71

2.3 Le lien structurel entre les vv. 1-2 geant à l'égard de ceux quj ont péché et de tous les restes (v. 2d).
L' intégralité de ces versets est également attestée par les mots em-
Texte des vv. 1-2 Moment de ployés. Paul annonce sa visite eo ces termes: rp[rnv roûto €pxoµat
l'action
rrpoç ùµéiç I <<Voici la troisième fois, je viens auprès de vous» (v. la);
v. 1a Tp (-.ov toûro Ëpxoµctt rrpOç ùµâç- Le présent
WÇ napwv îO ÔfU!Epov Kal ànwv vûv [ ... ] on Èàv Uew Etc; :à lTUÀLV
«La troisième (fois) voici, je viens auprès de ou cj>E(aoµa t I «lorsque j'étais présent la deuxième fois et je suis absent
VOUS»
mai ntenant, [... ] si je reviens vers ceux-là» (v. 2b-d). li s'agit bel et
bien de la troisième visite. car la deux ième a déjà eu lieu. En effet,
v. Jb hl otôµcnoç Oûo µaptupwv Krti. rpLwv Le futur !' Apôtre parle d'être absent maintenant mais il envisage de revenir.
om0~oEt<H rrâv pfjµa. Notons une nuance dans l'emploi des prépositions et des pronoms.
«Sur la base de la bouche de deux témoins ou Au v. 1a, notamment, i1 est question de venir Trpoç ùµêiç I «auprès de
de trois sera fixée toute chose» vous» et au v. 2d, de revenir Elç ro / «vers ceux-là». De l'analyse faite
V. 2a TTpOELP11KCt
' KCtl\ rrpo )..'Eyw, Le passé / le du verset, nous avons remarqué que la préposi tion np6ç exprimer un
«J'ai averti etj 'ave1tis Présent rapport d'amiti é quand bien même il traverserait un moment de crise.
N'oubli ons pas que l ' Apôtre considère les Corinthiens comme ses fils
V. 2b <..)ç TTttpwv îO ÔflJ7Ep011 KCX l ctTTWV vûv' Le passé / le qu'il a engendrés par l'Ëva ngilc dans le Christ Jésus ( ICo 4, 15). Nous
«Lorsque j'étais présent la deuxième (fois) et je Présent pouvons à juste titre dire qu ' il y a un rapport de père et fils.
suis absent maintenant» Quant à la préposition du v. 2 Etç t6, construit avec un verbe de mou-
vement, elle indique un accusatif de lieu. Notons combien est intéres-
v. 2c toi.ç rrpo11µcxpt11K6atv KCXL 1otç Àornoi.ç TT<Ï.OLV, Et le pa é /
«Ceux qui ont péché auparavant et tous les
sante cette variation subtile dans l'emploi des préposition qui montre
restes» et le présent les deux différentes attitudes de Pau l. Au v. l, Paul annonce sa visite â
toute sa communauté de Corinthe, il se sent pour ainsi dire en lien ami -
V. 2d on è:à.v V.0w ELÇ îO TTtXÀLV où <f>daoµm , Le Futur cal, fraternel avec toute la communauté; d'où l'expression «je viens
«Si je viens vers ceux-là de nouveau. je ne auprès de vous». En revanche, au v. 2 avec l'accusatif de Lieu elç t6, il
ménagerai pas» définit en quelque sorte l'endroit de l'action de son séjour. On a
l' impression que I' Apôtre prend une certaine distance par rapport à ce
Les deux versets de la péricope forment une unité de sens. Cette der- lieu. Ce dernier n' indique pas un lieu géographique mais plutôt des
nière se justifie aussi bien par la tension entre les modalités temporelles personnes bien déterminées, séparées de l'ensemble de la communauté
avec lesquelles Paul décrit ses actions que par les mols qu 'il utilise. Au en raison de leur comportement. Ainsi, Pau l se contente seulement de
v. 1, l' Apôtre annonce au présent sa visite (v. 1a) et son action qui se dire «vers ceux- là». LI s'agit, d' une part de ceux qui ont péché et qui
tiendront dans l'avenir (v. 1b). Au v. 2, il évoque d'abord ses paroles continuent de le faire ( 12,2 1) ; d'autre par de tous ceux qui vivent dans
dites au passé et les répète ensuite au présent (v. 2a-b) el enfm iJ les désordres, la jalousie, les animosités, di sputes, calomnies, com-
s'adresse rnainteoaot, comme da ns le passé, aux mêmes personnes mérages et insolences ( 12,20).
(v. 2c) de ce qu ' il envisage de faire dans l'avenir (v. 2d). En gui se de co nclusion, nous retenons qu ' une lecture attentive de
Cela condui t â comprendre que ce que Paul est en train de dire n'est ces deux versets mène à dire que les membres que l'apôtre Paul a pré-
pas tout à fa it nouveau pour les Corinthiens car il leur en avait déjà par- venu dans le passé n' ont pas changé leur façon de se comporter. 11 les
lé. li exprime l' unique nouveauté de son propos au futur lorsqu ' il ex- avertit cette fois-ci qu'i l ne traitera plus avec ménagement lei qu ' il le
plique de la manière dont il prévoiL réaliser l'objectif de son voyage. 11 faisa it auparavant. De cette déclarati on, nous pensons que le Tarsiote
le fera en tenant compte du temoignage de deux ou trois personnes pour traitait habituell ement les problèmes des Corinthiens de faço n indu l-
résoudre le problème communautaire (v. 1b). Il e mont rera intransi- gente. Il affi nne maintenant que, lors de sa troisième visite, il fera
72 PARTLE 1: LE CHRIST EST PU ISSANT CH. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13.1-4 73

plutôt appel aux témoins pour établir toute affaire. Nous avons ici le La préposition Èv / «en, dans» se construit avec un datif marquan t
portrait d' un Paul déterminé à mettre fin aux problèmes de la commu- l'idée de lieu ou de temp . Par contre, il est employé ici dans un sens
nauté de Corinthe. instrumental et signifie «au moyen de, parn41. n relie la phrase mû
De l'exégèse fai te des vv. 1-2, il émerge indubitablement de aspects ÀaÀoûvroç Xplotoû au pronom personnel ȵot et montre la nature du
ecclésiologiques. li s'agit précisément du comportement ambigu de cer- rapport qui ex iste entre eux. Le pronom personnel ȵot est au datif
tains membres de la communauté. Au ch. lll, nous essayerons de livrer singulier à cause de la préposition Èv qui le régit. Avec cette particule, il
quelque réflexion à ce suj et. En guise de conclusion, le message extrait a le sens de «par moi». Il est l' instrument de l'action de -:oû ÀcxÀoûvtoç
de l'analyse du v. 1 met en évidence une dimension ecclésiale des XplOtOÛ.
croyants en Christ. Elle est perçue à travers leur vie individuelle et Le participe présent actif ÀaÀOÛVTOç est au génitif masculin singulier
communautaire. de même que ! 'article mû, son déterminatif. Il vient du verbe MÀiw qui
se traduit par «prononcer des sons inarticulés, bavarder et, par exten-
3. 2Co 13,3 sion, parler». Il est connu que le mode participe est une fo rme adjecti-
Èm=i. ÔOKLµ1)v ( T)tEÎ.tE toû Èv ȵoi. i\cc>..oùvtoç XpLotoù,
vée d' un verbe. Pour le cas de ce verset, Àcc.Àoûvrnç assume évidemment
OÇ Elç uµ&ç OÙK cX00EVEÎ. ciUQ: ÔUVIHEL Èll Ûµîv. la nature d' un adjectif mais substaati vé43. LI est de fait construit avec un
«Puisque une preuve vous cherchez par moi du Chri st parlant article. XpLoîOû est un substantif masculin génitif singulier et signi fie
Qui. en vous, n 'es1 certes pas faible mais est puissant parmi vous» «du Chri sl»44 . li a le même cas el la même fonction que les mots toû
[.. . ] ÀaÀoûvtoç. Ainsi les mot mû[ ... ] lcc./-oûvrnç Xpwrnû se traduisent
3. 1 Analyse syntaxique du v. 3 p~ r «du Christ parlant ou du Christ qui parle». Ils sont complément
déterminatif du mot ÔOKLµDv «preuve». De l'exégè e fa ite, la phrase
- ÉTIEL ÔOK lµ~v (11tün mû Év ȵoi. ÀaÀoûvrnç XpLoîOû. Ce verset È-TIEL ôoKtµ~v (T)tfÎ.îE roû Èv È:µol ÀaÀoûvrnç Xpwrnû peut être rendue
est introduit par une conjonction Ènel. / «puisque, carn. Elle exprime une en frança is par «pu isque vous cherchez une preuve du Christ parlant
continuité dans Je raisonnement mené par Paul et marque une propo- par moi».
sition subordonnée de cause 40 • Le substanti f fémin in ôoKLµ~v / - OÇ ELç uµiiç OÙK ào0EVEÎ. àUà ÔUVCHEL Èv ùµl v. Le pronom relatif
«preuve» 41 est décliné à l'accusatif et assume la fonction d'un complé- ma culin nominatif singulier oç substitue le mot Xpwwû et le met en
ment d·objet direct du verbe (11~E1:E. Ce dern ier se trouve à l'ind icatif relation avec la proposi tion suivante. Par conséquent, il introduit une
présent de la deuxième personne du pluriel de (11tÉw I «chercher». Ainsi proposition relative et joue le rôle du sujet des verbes ào8E11El et
la forme (T)tE'iîE ignifie «vous cherchew. Il s'agit d' une action conti - ôuvrttEî.. La préposition Ei.ç, soutenant l'accusatif de lieu, est habituel-
nue à cause du temps présent. L'article défini ma culin roû est au gén i- lement construite avec un verbe ou un substantif de mouvement.
tif singulier. 11 détermi ne le participe présent ÀaÀoûvroç. Par conséquent, Cependant, il est employé ici sans l' idée apparente de mouvement. Il
il en indique le genre et le nombre. 11 est tTaduit par «du». est, par conrre, synonyme de la préposition Èv et signifie «parmi»4S.

°
4 Cf. Y.P. FURN ISH, Il Cori111'1ic111s, 570; A. PITTI\, La seconda le/lem ai Corim:i,
538 n. 7 1; A. BAILLY, «ÈlTE(», GDGF. 726-727.
-1 2En voici les équivalentes traductions en anglais cl italien: «by means ofo,
«lhrough» (V.P. FURNISll , Il Corinthicms. 570); «pcr mezzo dil> (A. PITTA, La sec-
4 1 Le mot ôoKtµ~ «preuve» se trouve également dans d'autres passages de 2Co, tel onda /el/era ai Corin:i. 538 n. 73). Au sujet de l'emploi de la préposition. cf. BDF.
qu'en 2,9: 8,2; 9, 13. Dans ces derniers. ce sont les Corinthiens et aussi le:'.> égli!.es de «ln the gcnuinely Instrumental ense»: § 195; M . ZERW JCK, Bihlical Greek. § 64:
Macédoine qui ont passé le test comme signe de confiance envers Paul. En 2Co l 3,3a, A. BAILLY, «(v», GDGF, 664-665.
43 Cf. BDF, «Substantivizcd adjectives wiû1article»,§ 138.
les Corinthiens cherchent dans l'apôtre Paul une preuve. li est aussi employé comme
verbe ÔOKLµti(w <<éprouver. mettre a l'épreuve» (8,8.22: 13,5): comme adjectifôÔt<Lµoc; 44 Le mol XPL<noc; vcul dire oint. qui a reçu l'onction sainte (ls 45, 1). Cependant le
«éprouvé, reconnu>l ( 10.18: 13.7); et son antonyme ttOOt<tµoc; «San valeur» ( 13.5-7). ubstantif à · ptot6i; signifie l'oint du eigneur. Jésus-Christ (Mat 1.16; Le 2,26). Cf.
Cf. Y.P. FURJ\ISll. Il Cori11tliia11s, 570: R.P. M.ARTLN. 2 Corimliia11s, 473: P. BARNcll". A. ÜAI LL Y, «XPLCJtÔi;», GDGF, 2155.
The Second Ep/\'t/e. 600 n. 46. 45 Cf. A. BAI LLY.<« te;», GDGF. 596-597.
74 PART IE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT CH. Il : UNE LECTURE AITENTIVE DE 2CO 13,1-4 75

Le pronom personnel ùµâç est à l' accusatif pluriel en rai son de la la re lation entre le pronom personnel ùµlv et le verbe ôuva"tEî.
préposition elç. Il sert de complément de lieu au verbe cio0we"i. Les Au trement dit, il révèle l'endroit où le Christ est reconnu puissant. JI
mots elç ùµciç se traduisent par «parmi vous, chez vous». L'adverbe de s'agit du pronom person nel ùµ"iv / «vous». Ce derni er se trouve au
négation oÙK est construi t avec Le verbe cio8evel. Il pennet ainsi de nier datif à ca use de la préposition Èv et sert de complément de lieu au
le fait de l'action du verbe ào9EVe"i. verbe ôuvanl.
Le verbe ào9eve"i est conjugué à l' indicatif présent actif de la troi- Nous trad uisons la proposition oç ei.ç ùµ&ç ouK &o9evü à:Uà
sième personne du singulier de ào9evÉw / «être fa ible; être malade; être ôuvare"i Èv ùµl v par « qu i chez vous n'est certes pas faible mais est
impuissant». Rattaché au verbe ôuva-re1, il a bien le sens d'être faibl e, pui ssant parmi vous».
d'être impuissant46. Son sujet est représenté par le pronom relatii oç qui
remplace le mot XpLo-roû. Nous traduisons oç ( ... ) oùK ào8eveî. par «qui 3.2 Composition du v. 3
[.. .] n'est pas faible ou n'est pas impuissant». La conj onction adver-
sative àUa se traduit par «mais». :n y a, cependant, des nuances rela- Texte du v. 3 Contenu
tives au sens qu ' elle assume dans la phrase. En l'occurrence, placée
après une propositi on négative, elle signifie <me certes pas ... mais»47 . V. 3a ÉTTEL ÔOK Lµ~v (11îfÎîE îOÛ Èv Preuve
La fo rm e verbale ôuva"t"EL se trouve à l' indicati f présent de la èµol. À<XÀoûv-roç Xp Loroû,
troisième personne du singu lier de ôuvaîÉW. Elle se tniduit par «il est «Pu isque vous cherchez une preuve du Christ
puissant ou il est fo rt»48. EUe a comme sujet le même pronom relatif parlant par moi»
oc; qu i renvoie au XpLoroû / «du Christ». La prépos ition Èv a la
même nature que dans la proposition précédente du v. 3 déjà analy- V. Jb ()) 0ç Elç ùµâç Qualité
sée. Cependant ell e a ici l'acception de «parmi », en ce sen qu 'elle (b) oùK âoeevet
(b ') àUà ÔUV<XtEL de la
indique non pas un instrument mais un lieu. Son rô le est de montrer
(l')fv ùµ'iv. preuve
«qui, chez vous,
46 A la difTérence des écrits du NT où soit le verbe ào9cvéw / «êLre faible: êLre ma- n'est certes pas faible
lade; être impuissano>, soit son substantif àoaivna / «manque de vigueur. maladie. mais est pui sant panni vous»
gène. pauvreté» sont employés dans le sens d°<<être physiquement malade» (Le 5.15 ;
8,2; 13.1 1.12; Jn 5,5: 11,4 aussi Ac 28.9), Paul. par contre, les utilise principalement Le verset comprend deux propositions subordonnées causale et rela-
dans le sens d'<c être faible. d'êLre impuissant» en faisant aJlusion à la condi1ion fra- tive. La propos ition subordonnée de cause est introduite par la conjonc-
gile de l'homme surtout lorsquïl est ranaché à l' expression <epuissance de Dieu»
(2Co 11,30: 12.9.10; 13.4; ICo 2,3; 15,43). Cependant, U l'ut ilise seulement dans tion Ène L. Elle comprend un verbe (1,-rELîE dont le sujet est sous-entendu
deu:< cas avec le sens de maladie physique (cf. Ga 4, 13 et en 1Tm 5,2). et renvoie aux membres de la communauté de Corinthe ; un complé-
Cf. J. CAMBIER, «Le critère>1, 489-490: D.A. B LACK. «Weakness», DPL 966: ment d'objet direct ÔOK L µ~v et d' un complément d' instrument Èv ȵo[
F. MAN7.I, Seconda /ettera ai Corin:i. 29 1 11. 90-9 1: A. PtTrA. La seconda /ettl'ra ai qui se réfère à l' apôtre Paul. Il faut auss i signaler le complément déter-
Cori11::i. 50 1 n. 136- 138. minatif roû ÀetÀ.oûvroç Xp Loroû. Ce dernier définit la nature de la
47 Cet emploi de ouK ...a.U.!i veut également dire que le premier élément de la
phrase n'est pns loul à fai t nié mais qu'il s'agit seulement d'une atténuation de sa né- preuve que les Corinthiens cherchent. En effet, ils veulent établir la
gation. Tels sont les cas en Mt 10.20; Mc 9.37: Jn 12.44. cr. BO F, «à.l..l.!i», *448 n. 1; vérité au suj et de !'Apôtre, notamment de sa mission apostolique. Pour
A. B AILLY. «tH..l.!i)), GDGF, 82. Pour notre verset, nou pensons qu'il s'agit bien ce faire, ils ex igent de lu i un signe qui atteste que le Christ continue à
d'une négation totale de l'action du verbe ào6Evet. parler par sa personne.
4R Notons, toutefois, que cc verbe à l' indfoatif présent, troisième personne du sin- Dans cette propos ition subordonnée de cause, Paul poursuit son dis-
gulier se retrouve seulement trois fois dans tout le NT. Ces trois récurrences sont cours des versets précédents (vv. 1-2) et donne la raison pour laquelle i1
toutes dans les lettres proto-pauliennes : Rm 14.4: 2Co 9.8: 13.3. Cf. V.P. FURNISl l , li
Cori111hia11s. 570: R.P. MARTI , 2 Corùuhians. 474; P. BARNETr. The Second Epistle. se comportera comme il l'a annoncé. Il adoptera des attitudes décrites
603.
76 PARTI E 1: LE CHRI ST EST PUISSANT Cl 1. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13.1 -4 77

en 13, 1-2 parce que les Corinthiens cherche un indice qui prouve Contre toutes ses attaques, Paul 'est défendu en démontrant quï l est
l'authenticité de son ministère. incontestablement apôtre du Christ. C'est cela même qui constitue sa
La deuxième proposition a une structure en chiasmc-19. Elle est com- thèse princi pale développée dans sa deux ième épître aux Corinthiens
posée d' un pronom relatif sujet oç qui renvoie précisément au Christ. (2Co 2, 17)53. L'exégèse fa ite du v. 3 met en évidence une dimension
Nous y trouvons deux verbes directement opposés ent re eux : ào9fvf1 importante de la vie de celui qui embrasse la foi. La quali té de sa vie
et ôuvau t. Le premier porte une négation : oÛK. Dans cette même dépend de son engagement continu. Cet aspect de la vie chrétienne fe ra
proposition est présente la conjonction &Ha qui marque une opposition également objet du chap. lll.
entre les deux verbes et deux compléments de lieu : ELÇ uµ&ç et Èv uµlv.
Ceux-ci représentent les destinataires de 1'écrit. Dans cette phrase, I'A- 4 . 2Co 13,4
pôtre décrit la qualité du portrait du Christ selon la conception des K1ù yàp Ëotcrnpweri fç &o0Evdaç,
Corinth iensso. Ceux-ci affirment que le Christ, parmi eux, n'est pas ciUà (û ÉK ôuvciµHJÇ 9rnû.
faib le mais puissant. C'est donc ce Christ pu issant qu ' ils cherchent K<XL yàp ~µEi.Ç cio0f11oûµfl1 f V <XÙt<i),
chez Paul. ciUèt ( ~aoµEv oùv aùtQ ÈK ôuvaµEwç 0foû Elç ùµiiç.
L'analyse de ce verset nous amène à nous interroger pourquoi les Et en effet, il a été cruci fié à cause de la faiblesse
Convertis de Corinlhe veulent s'assurer que le Christ continue à parler mais il vil à cause de la puissance de Dieu.
Par le biais de Paul. En effet, nous savons que l' une des questions fo n- Et en effet, nous, nous sommes faibles en lui
damentales de la deuxième épître aux Corinthi ens concerne la crédibili- mais nous vivrons avec lui à cause de la puissance de Dieu parmi vous.
té de la mission apostolique de l' ApôtreS'. A l'origine de cc discrédit
jeté sur l'apôtre des nations se trouve un groupe de personnes étrangè- 4. 1 Anazw1e syntaxique du v. 4
res â la communauté. Elles ont sous-estimé le travai l réa lisé par Paul et - Ka't. yàp Èotaupw9T) È~ cio9eve[aç, àH.à (ij ÈK ôuvciµewç 9f0û. Le
ont exalté leur propre qua Lité spirituelle (2Co 10, 10: l l ,6- 11.12-2 1). quatrième verset de notre péricope s'ouvre avec la particule K<XL Et ce
Encouragés par ce gens, certains membres de la communauté l'ont n·est sans doute pas une collocation aléatoire. En effet. utilisée seule
accusé d' incohérence et d'ambiguïté par rapport à on comportement comme adverbe, elle a le ens d'«aussi. même». Cependant dans ce
d' Apôtres2. C'est ainsi que les Corinthiens voulaient une preuve qu i at- verset, employée avec la conjonction yap, elle se tradu it plutôt par «et
testerait que le Christ continue à parler par le canal de Paul. en effet». Elle relie immédiatement ce qui suit pour justifier l'affir-
mation implicitement contenue dans ce qui vient d'être dit54 . La fo rme
-19 Cf. V.P. FURNt H, Il Cori111/Jians, 570: A. P11TA, la seconda leuera ai Cori11- fomupw9T) est un ind icatif aoriste passif à la troisième personne du sin-
:i, 539. gulier du verbe omup6w / «élever une palissade, crucifiern s.s. Évidem-
50 Paul décrit ici l'altitude prëtcntieuse des Corinthiens comme il le dit dons cer-
tains passages de ces écrits ( 1Co 4.8. I 0: 2Co 13.9). Voir aussi H. WtNDISCll . Der
::weiter Korintlwrbriej; 4 18; V.P. FURNISH, Il Cori11thit111s. 576. tai ls que Paul donne pour démontrer le doute qui planait sur la légitim ité de sa mis-
51 Cr. E. KÂSEMi\NN. «Die Legitimillil», 33-71; V. P. FURNISIt. Il Cori111hia11s. 576: sion d'apôtre du Christ. En effet, !"apôtre des Gentils a été critiqué par rappon à l'es-
R.P. M t\RTIN, 2 Cori11tliia11s, 473; J.W . M CCt\NT, 2 Corinthians, 160- 161; F. MANZt, sence même de sa mis ion, car celle-ci, fruit de sa rencontre avec le Seigneur sur la
Seco11da lettera ni Cori11:i. 308. route de Dam as, se trouve remise en cause.
52 C'est pour celte raison que Paul . dans sa lettre reconnue comme «lettre polémi- 53 Il y a lu reprise de cettepropositio dans la conclusion fin ale (2Co 12, 19- 13, 13).
qu~» (2Co 10-12) s'était particulièrement concentré à répondre aux crit iques qui l'a- A trnvcrs ces textes, !'Apôtre nflim1e quï l se défend deva111 Dieu et qu' il parle au
v111en1 offensé en tant que apôtre du Christ. Voir, duns cette partie du travail. les nom du Christ pour l'édi fi cation des Corinthiens.
points 1.3 Relations entre Paul et la communauté et 1.4 Les adversaires de Pau l. Par 54 Cf. R. K Oll NëR B. GERTH. Ausiiberliche Gra11111w1ik, § 545.8 n. 1:
contre, Pilla, expliquant la raison pour laquelle les Corinthiens cherchent une preuve. R. B U! TMANN, Der :H"eire Brie(. 246: A. BAlLLY. «Kat». GDGF. 998. BDF montre
soutient que les Corinthiens avaient remis en question la capacité de I'Apôtre de qu'en 2Co 13.4 Kttl yi:r.p serait plus correct s' ils éraient précédés par et. Cf. ID.,
communiquer I" Evangile {2Co 10. 10-11 et J 1,5-6). Cf. ID.. La seconda le11era ai Co- «Concessive conjunctions». §457. Voir aussi R. B ULTMt\NN, Der ::weire Brie[. 246.
ri11:i, 538-539. Quant à nous, nous estimons que la critique adressée à Paul était plus 55 Notons que cc verbe ITTavp6w. bien qu'il soit une parole clé chez P11ul, est asse1
profonde qu·unc simple auaque à a capacité rhëtorique. Celle dernière est un des dé- rare : quarante-six fois dans le NT. dont neuf fois dans le corpus paulien. Toutes ces
78 PARTIE 1 : LE CHRlST EST PUISSANT Ci l. Il : UNE L ECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13. 1-4 79

ment, le sens qu ' il a dans ce verset est bien celui de «Crucifiern puis- la relation causale ex istant entre les deux tennes. Elle suggère l' idée du
qu'il s'agit du Christ. Son sujet se réfère, de fait, au XpLotoû du v. 3. Christ vivant par l'effet de la pu issance de Dieu (ôuvaµewç 9eoû). L'ex-
Ainsi Ëo:aupweTJ se tradui t par il «a été crucifié». Il est question de pression ôuvaµewç se trouve au génitif féminin singulier à cause de la
l'action passive du Christ crucifié à un moment bien précis de l'histoire préposition È:K qui le précède. Elle est rendue en français par «puissance,
à cause du temps aoriste du verbe Èaro:upw91'). La préposition ÈÇ vient de pouvoir, force»s1 et constitue le complément de cause.
ÈK et signifie «de, en partant de, hors de, en venant de». Elle régit te Le nom masculin au géniti f 9eoû détermine le mot ôuvaµewç. Il signi-
génitif et peut marquer l' idée de mouvement, de cause, d' instrument~ fie «Dieu». La phrase È:K ôuvaµewç 9eoû se traduit alors par «à cause de
etc. Pour le cas de notre verset, elle indique l' idée de cause et se traduit la puissance de Dieu». Elle est le complément de cause du verbe (fi, en
par «à cause de, par suite de»56. ce sens que l'action de vivre du Christ est l'effet de la puissance de
La particule ÈÇ relie Je verbe Êataupweri avec le substantif &.a9fve[aç Dieu.
pour montrer la nature du rapport qui les unü. Il s'agit d'un lien de Conformément à la structure syntaxique ci-dessus analysée, la phrase
cause. De fait, le terme &oeeve[aç est la ra ison déterminante de l'action Kat yàp €ota.upw9TJ ÉÇ &:oec:veta.ç, &nà (ij ÉK ôuvaµEwç 9E:-oû se traduit
du verbe Èotcwpw9T). Le cas gén itif du substantif féminin si ngulier par «Et en effet, il a été crucifié à cause de la faib lesse mais il vit à
&:o9eve[aç est exigé par la préposition ÈÇ qui le soutient. Il signifie cause de la puissance de Dieu».
«manque de vigueur; fa iblesse; maladie; gène; pauvreté». Avec la pré- - Kat yàp ~µE1ç &:oeevoùµev Èv aÛîc.\), &:/.J.à. (Î)ooµev aùv aùtc.\) ÊK
position ÈÇ, &.o9eve(aç joue la fonction d'un complément de cause et se ôuvaµewç eeoû Elç ùµciç. Comme dans la proposition précédente, les
tradu it par «à cause de Ja faiblesse». La conjonction adversative &>..Mi J mots Ka.L yap sont employés ensemble. lis ont le même sens et jouent la
«n:iais» marque une opposition entre la phrase précédente et celle qui même fonction : ils visent à justifier l'affirmation implicite con tenue
SUll. dans le v. 3. Le pronom personnel ~µe1ç décliné au nominatif pluriel n'a
Le verbe (f.l est un indicatif présent actif de la troisième personne du pas valeur d' un sujet dans cette phrase. Il sert d'emphase à l' idée qu ' il
singu lier de ( aw. Tl est traduit au sens intransitif par «vivre» et au sens exprime. En effet. il évoque une insistance particulière sur le pronom
transitif par «faire vivre». Il a, en l'occurrence, le sens intransitif. La nous, inclus dans le verbe &o9evoûµev.
forme (f.l signifie donc «il vit». Son sujet est incorporé dans le verbe et La forme &:o9evoûµev est un indicatif présent actif à la première per-
renvoie au XpLotoû du v. 3. Le temps présent de ce verbe nous autorise sonne du pluriel du verbe àa9evÉw / «être faible; être malade». Nous le
à croire qu ' il est question d' une action continue. La préposition ÈK, ici, rendons en français par «nous sommes faibles». Son sujet se trouve
met en hcn le verbe (f.l avec le substantif ôuvaµewç. Elle assume le dans le verbe et renvoie à un groupe de personnes, dociles à la pré-
même rôle que la préposition ÊK précédente qui est celui de manifester dication de Paul , y compris l'apôtre lui-même5 8. L'action de ce verbe
n'est pas encore accomplie. Cela signifie que ces personnes continuent
à être faibles. La préposition Èv est employée ici de la même faço n
récurrence ne se réfèn.:nt pas uniquement au Christ excepté en 1Co 2,2.8; 2Co 13.4. qu 'au v. 3, c'est-à-dire sans l' idée de mouvement. Elle sert plutôt de
Toutefois, dans sa forme de Écmxupw9n. il se trouve seu lement en 2Co 13.4. Les autres
récurrences de cc verbe o•aup6tü se trouvent en 1Co 2,2.8; Ga 3. 1: 5.24; 6, 14 et son
substantif omup6t; en ICo 1,17.18: Ga 5. 11 ; 6. 12. 14, erc. Ct: V.P. FURNI 11.
Il Cori111hia11s. 57 1; P. BARNETI. The Second Episrle, 603: A. Pt ITA. Lo «scandnlo>>, S7 Cf. A. BAIL! Y. «ôUvcxµLt;», GDGF, 542. Nous notons égalcmcnl la présence
7; ID.. la S(!c·o11da /e11era ai Corinzi, 540. d'autres mots synonymes à ôUvcxµ Li;. Ce dernier est le substantif le plus utilisé par Paul,
56 «à cause de: en raison de» \E.-B. ALLO, Seconde êpùre, 339); «by lhe rcason of» comparativement aux termes loxui;, Kparnç et fÇouotn. Tous ces tennes peuvent êlre
(F.J. M A1tRA, 11 Co1·i111/iia11s. 307): «by the rcason of, ns a resulr ofü (T. STEGMAN, rendus par puissance, force. capacité. Cependant, loxuç el Kp<i:oç expriment la capaci-
The C'.wracter. 207-208): «en raison de» BJ. Il y a, cependant. des exégètes qui ne re- té inhérente ou dérivée. è~ouo(a est utilisé par Paul dans le sens du droit ou ùe l'au-
connaissent pas en èK une valeur causale mais plutôt une valeur démoni.trative. Par torité à exercer. Ct: C.E. ARNOLD, «Power». DPL, 723.
conséquent, ils la traduisent par «in accordance with». Cf. V. P. FURJ\ISll. Il Cori11- S8 Cenes, le pronom personnel «nous>1 se réfère d'abord à Paul mais également à
1hiu!1s~ 57 1. 11 ~a d'autres quj soutiennent que la préposition a été utili ée pour raison ses associés. ainsi l'affim1c Fumish. Cf. ID., Il Cori111hia11s. 571. A la suite de Barrel!
sryh uque en hen avec le second. Cf. R. B ULTMANN. Der ::weiter Brief. 245. Pour et Pitta. nous soutenons quïl s'agit aussi de rous les croyants en Jésus-Christ. Cf.
l' emploi de la préposition. voir A. B AILLY, «fK», GDGF, 606-608. C.K. BARRETI, The Second Epistle, 337: A. PITTA. La seconda /etlera ai Corili=i. 540.
80 PARTIE 1 : LE C HRIST EST PUISSANT C H. II: UNE LECTURE ATTE TI VE DE 2CO 13. 1-4 81

corrélatif entre le verbe èw9EvoûµEv et le pronom aùtQ. Celui-ci est un l'accusati f de lieu60 • Le pronom personnel pluriel uµéiç est un accusatif
pronom personnel à la troisième personne du singulier. Il est décliné au à cause de la préposition ei.ç et assu me la fonctio n d' un complément de
datif en raison de la préposition Èv qui le régit. Tl se rapporte au verbe lieu du verbe (~ooµEv. C'est donc l'endroit où l'action de ce verbe
à.o9EvouµEv dans une relation de complément de lieu. En effet, il est le demeure. Ainsi défini, ùµâç se réfère aux Corinthiens. Ainsi, nous tra-
1ieu dans lequel ! 'action du verbe à.o9evoûµev rés ide. Ainsi la phrase K<XL duisons Elç ùµéiç par «parmi vous»<i1.
yàp ~µE1ç <Xo9evoûµev èv aûrQ se tradui t par «et en effet, nous, nous Au regard de cette enquête grammaticale, l'ensemble de la propo-
sommes faibles en lui». si tion Kal y&:p ~µE1ç à:o9evoûµcv Èv aùtQ, à:l..>..à: (~ooµev oùv aùrQ ÈK
La conjonction adversative à:lli introduit naturellement, comme ôuvciµewç 0eoû elç ûµéiç est tradui t par «el en effet, nous. nous sommes
dans la proposition précédente, un contraste entre les deux phrases dont faibles en lui, mais nous vivrons avec lui à cause de la puissance du
elle sert de corrélatif. La forme (~ooµev représente un indicatif futur Ch rist en vous».
actif à la première personne du pluriel du verbe (aw. Nous Lrndu isons
(~ooµEv par «nous vivrons». Le futur empl oyé ici exprime seulement le 4.2 Composi1io11 du v. 4
moment où l'action de vivre aura lieu. Cette dernière est placée dans un
contexte d'avenir59. La prépos ition ouv se construit avec le datif el si- Texte du v. 4 Temp Agents
gnifie «avec». El le indique ici une idée d'ensemble et relie le verbe
(~ooµev avec le pronom aùtQ. Ce pronom personnel masculin singu lier A Kcxl yà.p Èo wupweri È'~cio9f vfLaç, Passé Christ
aù:Q sert de complément au verbe (~ooµev. Son cas datff est exigé par «et en effet, il a été crucifié à cause
la préposition ouv. Il signifie «à lui». La préposition ÈK joue exactement de la faiblesse»
la même fonction que dans la proposition précédente; elle relie le verbe B c:Xi..M! ( fi ÈK ôuvâµH.>ç 9coû. Présent
(~ooµt:v au substantif ôuvciµewç dans un rapport causal. De fait, ôù
«mais il vit à cause de la pu i sancc
de Dieu»
vciµewç est au génitif féminin singulier suite à la préposition ÈK qui le
soutient. Il représente le complément de cause du verbe (~ooµev. A' Kat yèt.p ~µE1.ç &o9Evoûµçv êv cxut e,\>. Préscnl Corinthiens
Le terme masculin singulier 9EOû quali fie le substantif ôuvciµ<'wç. «Cl' en effet, nous, nous sommes et Paul
C'est ainsi qu'i l se trouve au génitif. La phrase ÊK ôuvciµewç 9eoû se fa ibles en lui»
traduit, de la même façon que dans la proposition précédente, par «à s· ciH.à. (~ooµEv oÙv <XÛîy fK ôuvaµfWÇ Fun1r
cause de la puissance de Dieu» et joue également la même fonction de 9EOÛ Elç Uµâç
complément de cause du verbe ( ~ooµev. Ainsi, la pu issance de Dieu «nous vivrons avec lui, â cause de la
constitue la raison déterm inante de l'action de vivre du pronom pu1 ancc de Dieu en vous»
personnel «nous», qui représente Paul et les Cori nthiens fidèles à l'en-
seignement de I' Apôtre. La préposition elç est utilisée ici comme syno- Le verset est constitué de deux propositions parallèles : AB et A' B '.
nyme de la préposition f.v et veut dire «pam1i». En outre, clic ne Une lecture soutenue nous révèle qu'e lles obéissent à une construction
marque pas l'idée de mouvement, quand bien même elle souti endrait ' yntaxique identique et assument, toutes les deux, la même fo nction
expli<.:ali ve. Elles sont, de fa it, introduites par les mêmes particules Kal
ycip. Cette ex pression permet à 1' Apôtre d'expliciter son affirmati on
59 Certains exégètes voient dans (~ooµi:v un futur logique ou un futur proche. Cf. précédente au v. 3. En outre, les deux phrases contiennent des asser-
H . WINDISCll, Der =weite Kori111he1·hrief. 419: R. BULTMA • Der zweite Brief. 246:
G. BARBAGLIO, li pe11snre del/ 'aposrolo Paolo. 305. Nous, en revanche, soutenons le
tions paradoxales. Ces dernières sont mises en évidence tant par l'em-
furur eschatologique qui nous semble correspondre au propo de Paul en Rm 8.19-23.
En efTet. ('Apôtre et Ici. fidèles de Corinthe vivent dans l'ancntc d'être libérés de leur
faib lesse présente et de vivre avec le Christ à cause de la puissance de Dieu. Cf. 60 Cf. A . BAILLY. «E:Î.ç», GDGF, 596-597.
E. FUCHS, «La faiblesse»; A . COLACRAI, For=a, 447; F.J . M ATERA, Il Cori11tltit111s. 6 1 V.P. Fumish parle de d e; Uµâç / <cpam1i vous» comme position emphatique à la
308. lin de la phrase. Cf. to., ff Cori11tltin11s, 57 1: P. BARNETr. Tite Second Epist/e, 603.
82 PARTIE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT C H. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13. 1-4 83

ploi de la conjonction adversative 1H.Mi que par celui des expressions fi sance 66. La deuxième proposition A ' B' est structurée de la mème
qui constituent ces propositions. Signalons toutefois que les actions faço n que la première. Elle est constituée de deux verbes : &:o8EvoûµEv
décrites dans ces propositions se déroulent en trois dimensions tempo- et Criooµ Ev. Le premier a un compl ément Èv cx.Ùrt\) et une emphase ~µElç.
relles différentes : le passé, le présent et le futur6 2, et que le Christ, Paul Le second, par contre, connaît trois compléments : oùv cx.urt\); ÈK
et les Corinthiens en sont les protagonistes. ôuvaµEwç 9Eoû et ti.ç ùµâç. De la même façon que la proposition AB,
La première proposition AB est composée de deux verbes : avec Kal. ycip, Paul introduit dans la proposition parallèle A ' B' l' image
€ornupw9Tl et Çfl, de deux prépositions semblables, de la préposition ÉK, d·ensemble, cette fois-ci, des croyants cori nth iens et de lui-même en
de deux substantifs antithétiques &:o9EvEi.aç et ôuvaµEwç, ainsi que d' une rapport avec celle du Christ. li affinne donc qu ' ils sont faibles en lui
conjonction adversative ii:ÀÀci et d'un complément détennjnati f 9Eoû. (Christ) mais ils vivront avec lui par l'effet de la puissance de Dieu qui
Notons, par ailleurs, qu 'à l'aide des particules Kal ylip, Paul introduit habite panni les Corinthiens.
son discours sur le vra i portrait du Chri st qu ' il connaît et affinne que le Cependant, nous avons la même difficulté, aussi dans cette proposition,
Christ a été crucifié en raison de la faiblesse mais vit à cause de la à comprendre Je contraste marqué par l'adverbe 6:U.ii entre les deux verbes
puissance de Dieu. Néanmoins, la question se pose de savoir pourquoi qui ne s'opposent pas à première vue. Il s'agit de &:o9evoûµE:v / «nous
Paul met en contraste deux verbes qui ne sont pas, au premier abord, sommes faibles» et (~ooµEv I nous vivrons. Et pourtant, l'opposé de vivre
opposés? est bien entendu mourir. PotLr sortir de cet impasse, soulignons que la
En effet, l'acte de crucifier quelqu'un dans 1' Antiquité conduisait à la raison déjà évoquée pour justifier le contraste précédent vaut également ici.
mort. Nous savons également que Je Christ dont Paul parle au v. 3 a été En effet, l'Apôtre laisse sous-entendre un verbe qui traduirait le fait de
crucifié et mis à mort (cf. Mt 27,35.54· Mc 15.24.37; Le 23 18.46; Rm mourir, par exemple, 8a:vœt6w / «mettre à mort» 67 Ainsi, nous com-
14,9; ICo 15,3, etc.). Certes, l' Apôtre ne mentionne pas explicitement prenons que Paul entend par là que les Corinthiens et lui-même continuent
sa mort mais le sous-entend. C'est ainsi qu'il oppose le verbe à être fai bles et mjs à mort en Christ. Ils vivront néanmoin avec Lui à
Éomupw9Tl / «il a été crucifié»6J au verbe (û / il vit6-1. Paul est donc en cause de la puissance de Dieu. Il compare pour ainsi dire le sort de ses
train de proclamer que le Christ fut cloué sur une croix et mort dans la convertis et le sien propre â celui du Chrisrs. Car, à la manière du Christ
:faiblesse à un moment bien préc is de l' histoire. Cependant, il continue mort par la faiblesse et ressuscité par la puissance de Dieu, Paul et les
paradoxalement à vivre grâce à la puissance de Dieu65 . En effet, parlant Corinthiens sont faibles. lis meurent en lui, mais vivront avec lui (2Co
de la faib lesse du Christ, Paul souligne la dimens ion de sa nature hu- 4, 10-12; Rm 6,6; Ga 6, 14).
maine à travers son incarnation. Les passages des épîtres aux Philip-
piens (Ph 2,6- 11) et aux Romains (Rm l ,3b-4a) le montrent à suf-
66 T. Stegman souligne plutôt la dimension éthique de la faiblesse du Christ. en ce
sens que a faiblesse s·est révélée par sa façon douce, humble et par sa volonté d'ac-
cepter la soufTrance et les épreuves à travers le sacrifice de lui-même pour les autres.
Cf. J. LAMllREC'llT, Second Col'illlhians, 224: A. COLACRAI. For:a. 437.
62 Cf. Io., Th e Character, 207. En ce qui nous concerne, nous soutenons l'aspect naturel
La crucifixion fut une peine êpouvanLablc à éviter. Elle fu t représentée comme
63 de ln faiblesse du Christ. c'est-à-dire. celle qui lui est reconnue du fait d·avoir partagé
l'extrême humiliation. Elle étuit généralement infligée nux gens de la basse classe. la condition humaine en toute chose excepté le péché (Ph 2.6-8). et: A. Pl'ITA, la se-
Les citoyens romains en étaient épargnés. Pour les j uifs. mourir sur la croix est une co11da le11era ai Cori11;:i, 539-540; F.J. MATERA. li Cori11il1it111s. 307.
malédiction (Dl 2 1.22-23: Ga 3, 13). Paradoxalement. cet acte d'extrême humiliation 67 Nous avon~ préféré employer le verbe 9a.vat6w plutôt que son synonyme
et de malédiction constitue chez les chrétiens le cœur de leur profession de foi ( 1Co àno91ni0Kw parce qu ' il permet de bien saisir la ré:il ité de l'événement de lu crucifixion
1, 18-25). Cf. J.B. GREE , «Crucifixion». DPL, 197-198; A. PITIA, «Lo "scandalo" et de la mort du Christ. Le Christ a été condamné à mort (Mt 26.4: Mc 14.1 : Le 22.2).
». 5. en effet, 9a11at6w signifie faire mourir. condamner à mon. être mon. Le verbe
64 A. Colacrai parle du v. 4b comme une antithèse anonnale. Cf. ID.• For:a, 446. à no011~0Kw veut, en revanche, dire mourir de quelque chose. Cf. A. BAILLY.
65 En rappon avec le texte de J Co 1.1 8-3 1 ou nous avons l'expression évidente de «<ino9viioKw». GDGF. 224: Lo.• «9avat6w». GDGF, 9 16.
la puissance de Dieu. le texte de l 3.4a présente la puissance du Christ comme la rai- 6 8 Cf. G. BARBAGLIO, // pe11sare del/ 'apostolo Paolo. 305: A. Prrrn. ltJ seconda
son déterminante du dépassement de la faiblesse du Christ dans la croix en vue de la leuera ai Cori11:i, 540-541. J . Lambrecht soutient qu'il s'agit d' une comparaison qui
vie. Cf. A. PITIA, la seconda /eltera ai Corin;:i, 540. n'est pas stricte. Cf. ID., Seco11d Cnri111hia11s, 223-224.
84 PARTΠ1: LE C HRJST EST PUISSANT CH. li : UNE LECTURE AlTENTJVE DE 2CO 13. 1-4 85

Fort de l' idée que !'Apôtre faü allusion aux fins dernière de l' hom-
me et à la transfonnation du monde (Rm 8,23; Ap 21,5), nous v. 4b KŒL yècp ~µelç àoecvoûµcv Év 1rù-rc;>. Les affirmations
pouvons par conséquent affirmer que la cond ition de faiblesse que les àJ..Àà (~ooµw oùv Œtr:y èK ôuuaµewç 0Eoû ei.ç paradoxales de
ÙµiXç. Paul au sujet des
croyants connai sent dans le présent ainsi que leur espérance dans la «et en effet. nous. nous sommes fa ibles en lui, Corinthiens y
vie future découlent de leur adhésion à la foi au Christ. De plus. iJ est Mais uous vivrons avec Juj à cause de la compris Paul.
intéressant de noter l'emploi des pronoms personnels ~µE'î.c; / <mous» puissance de Dieu en vous» lui-même.
et uµâc; / «vous». Ils montrent une certaine distance entre Paul et les
Corinthiens. Car le «nous» renvoie aux membres de la communauté el L'uni té des vv. 3-4 est mi se en évidence aussi bien par les expres-
leur Apôtre, y compris. Quant au pronom «VOUS», il représente U;11Ï- sions qui les constituent que par son argument. Les expressions em-
quement les Corinthiens. Il s'en suit, d'une part, une commun ton ployées sont identiques pour certaines et pour d'autres elles provien-
entre les fidèles de Cori nthe et l'apôtre Paul (A'), et d'autre part, une nent presque de la même racine. Autrement dit, elles appartiennent aux
séparation entre eux (B ' ). La communion se trouve dans la faiblesse mêmes champs sémantiques de fai blesse et de puissance6!1. li s'agit des
qu ' il partage en Chri st. La di stance entre les Corinthi ens et Paul mots cio8eve1 (v. 3b); cio8eve(cxç (v. 4a); cia8evoûµev (v. 4b); ôuvcxîEl
rés ide dans l'attitude préso mptueuse des Corinthi ens qui n'est pas (v. 3b) et ôuvaµEwc; (v. 4a-b).
celle de Paul. De fait. Paul affi rme au v. 3 que les Corinthi ens veul ent Au nj vcau du contenu, le lien se manifeste dans l'agencement de
avoi r la certitude que c'est vraiment le Christ qui parle par lui . Cc l'argument. Paul présente au v. 3 le désir, mi eux encore, l'ex igence des
Chri st, qui n'est pas faible mais puissant parmi eux les Corinthiens. Corinthi ens à son égard. Ils veulen t trou ver une preuve que le Chri st
Cela montre le comportement vaniteux de Corinthiens ( 1Co 4,8. I0; con tinue de parler à travers lui. Au v. 4, il est question de la suite du
2Co 13.9) que Paul ne manque pas de fustiger. Lev. 4 constitue donc raisonnement de I'Apôtre qui dépeint, d' une part, le portrait du Ch rist
pour Paul, la réponse à la requête de preuve des Corinthi ens pour selon les Corinrh iens70, et d'autre part. celui des Cori nth iens y compris
légi timer son min istère apostoljque. lui-même. Paul. selon son appréhension.
4.3 le lien structurel entre les vv. 3-4 4.4 l e lien structurel de la péricopell
Texte des w. 3-4 Contenu L'étude de la composition de l'ensemble de la péricope e veut une
récapitulation de l'analy e faite ci-dessus pour sortir l' unité de 2Co
v. 3ûnft ÔOKLµ~v ( rrrchE roû Èv ȵo't ÀlXA.oûvtoç Preuve 1J, 1-4 et son argument de fond.
Xpto·roü,
«Puisque une preuve vous cherchez par moi du v. 1 'l'p[rn11 rnûro fpxoµŒL npoç ~ · ~ ni. arôµcno ç ôUo µ1rpnipc.i11 KŒL
Christ parlant» :plW\I aw9~0Hlll TTiXV p~µll.
V. 2 rrpOELP11KCX KllL TTpOÀfyw, WÇ mxpwv ro ôet'.mpov KO'.L àn.c!>_v vûv, rolç
V. Jboç dç ÙµiXç OÙK ào9EVEl <iUèc ÔU\/r.m=l ÈV uµlv. Quai ité de la rrpo11µ1rr11KÔOLV KIXL TOLÇ l.OLnolç niXaw, on Èàv H9c.l ~J~: TO miÀ.LV
«qui , chez vous, n'est certes pas faib le mais est preuve scion les où cjlf(ooµc:u ,
puissant parmi vous» Corin thiens
V. 3 ÈTTEL [ . ..
V. 4a KCÙ yècp ~ora.upwe11 è-Ç d.o9EVELOCÇ, à:Uèc (ti È-K Le affirmations
ôwciµewç eeoû. paradoxales de
«Cl en effet. i1a été crucifié à cause de la fai Paul au sujet de 69 Le binôme faiblesse et puissance se trouve réuni en 12.5-10; 13.3-4.9. C'f.
blesse. mai il vit à cause de la puissance de la preuve P. BARNITT. The SPcond F.pistle. 607.
Dieu» 70 Cf. J. CAMBIER. «Le crilère». 4 8 1-518.
71 Étant donné que la traduction de celle péricope cs1 déjà connue. nous préférons
ici. en réécrivant Je texte pour <;ouligner a tructure, ne reprendre que le tex1c grec.
86 PARTIE 1 : LE CHRJ ST EST PU ISSANT CH. Il : UNE LECTURE ATTENTIVE DE 2CO 13. 1-4 87

V. 3 ... J ÔOKtµÎ)v ( TFEÎ.t€ 'tOÛ Év eµot ÀaÀOÛVtOÇ Xp LOTOÜ, oç ~!5: ~ lorsqu'il évoque dans son argumentation l'expérience de la cmc ifixion du
OÙK &oeewl &.Uèt ÔUVIXtEL Év ùµlv. Christ dans la faiblesse et de sa résurrection par la puissance de Dieu.
V. 4 KIX°L yàp Èornupw011 ÉÇ ao9EVELIXÇ, &.i..>..à (ii ÈK ôuvaµEWÇ 9EOÙ. KIXL Quant à la teneur antbropologico-théologique, eUe se trouve dans l'as-
yètp ~µElç &oeev_~Qµev f:v a.utQ, &Uà (~ooµEv oùv ttûrQ ÉK sertion de la faiblesse de Paul et tous les croyants en Christ et de leur vie
ôuvciµewç eeoû Elç:
, _ - :t
~. futu re avec lui par la puissance de Dieu. On voit bien que dans les deux
derniers aspects de la pensée de Paul, la note théologique se dégage dans
L' intégrité de la péricope se trouve à deux niveaux : syntaxique et la mise en rel ief de Ja puissance de Dieu comme cause de la vie du Christ
sémantique. la syntaxe de ces versets met en évidence l' unité de sens et celle de PauJ et de tous les croyants avec le Christ Ces trois dimensions
du texte à travers la conjonction de subordination ÈTIE(, les pronoms de la réflexion de Pau.! seront abordées au chap. III, lequel se veut être une
personnels ùµliç et la préposition dç. La particule ÈTIEL sert de corrélatif réü exion théologique de notre péricope 2Co 13, 1-4.
entre les vv. 1-2 et .les vv. 3-4 et introduit une proposition de cause. Le
pronom personnel ùµciç se trouve au v. 1 et au v. 3. Dans les deux cas il
se réfère aux Corinthiens. Cependant, les prépositions avec lesquelles il
est constmit lui apporte une nuance ctifférente dans chacun de ces ver-
sets. Au v . .1 , notamment, il est employé avec Tipoç qui marque un rap-
port d 'amitié entre le ùµciç et l ' Apôtre. Par contre, au v. 3, la préposition
Elç indique simplement un lieu. Ainsi ùµciç est considéré comme
l'endroit où s'exerce la puissance de Dieu. Cet espace représente les
Croyants de Corinthe.
Quant à l'aspect sémantique, L'extrait 2Co 13, 1-4 se divise en deux par-
ties: les vv. 1-2 et les vv. 3-4. La première partie (vv. 1-2) présente l'an-
nonce de la troisième visite de ['Apôtre, l'objectif de cette visite et la façon
dont Paul envisage de le réaliser. En effet, Patti se prépare à rendre visite
aux Corinthiens pour mettre fin à tout ce qui a été ctit sur certains membres
de la commw1auté qui avaient péché et continuent à vivre dans le péché
(2Co 12,21 ), sur tous les autres qui vivent dans le désordre (2Co 12,20), et
aussi sur lui-même étant donné que sa mission apostolique a été remjse en
question. Il le fera en présence des témoins, promet-il, et il ne sera pas
indulgent. La deuxième partie montre une suite dans le propos de Paul. TI
est question de l'expLication de son comportement intransigeant vis-à-vis
des Corinthiens. Il l'adoptera à cause de leur exigence de chercher tme
preuve que le Christ est encore à l'œuvre à travers ses paro.les.
De toutes ces considérations précédentes, no us déduisons trois di-
mensions caractéristiques du raisom1emenl paulinien. Elles sont de na-
tuJe ecclésiologique, christologico-théologique et anth ropologico-théo-
logique. La réfl ex ion de Paul renfenne indiscutablement une teneur
ecclésiologique à deux versants. li s' agit premj èrement des exigences
relatives à la vie chrétienne indi vidue lle et communautaire, et des con-
séquences d' une vie chrétienne ambivalente. Se rapportant à la dimen-
sion christologico-théologique, elle se dégage de l'afürmation de ['Apôtre,
CHAPITRE 111

Réflexion théologique sur 2Co 13,1-4

La lettre canonique 2Co, écrite en des situations di fficiles de tensions


entre l'apôtre Paul et ses convertis de Corinthe, présente la vie de !'A-
pôtre et sa passion apostolique pour l'édifi cation des Corinthiens 1• La
richesse de cette épître est telle qu'clJc ressemblerait à une diatribe, à
un enseignement d'ordre discip lina ire, à un exposé doctrinal, etc. Cer-
tes, nous y trouvons tout cela, cependant elle constitue pri ncipa lement
un éc rit où Paul essaye de légitimer, à travers différents thèmes, sa mis-
sion comme apôtre du Chri st. Ce souci de rendre crédible son min istère
apostolique représente la thématique principale de sa correspondance,
vo ire sa motivation pri mordiale. Cependant nous en dégageons égale-
ment d'autres thématiques importantes qui entrent bien dans la perspec-
tive de cette tâche reçue du Christ. Il s'agit notamment du sujet de la
collecte en 2Co 8-9 et celu i de la faiblesse, particulièrement en 2Co
12,5- 10 et 13,42.
En effet, en 2Co 13. 1-4, I' Apôtre donne un élément de la défense de
la créd ibilité de son ministère. li parle de la fa iblesse - qui était objet
de discrédit de sa mission apostolique de la part de ses adversaires -
comme raison de son orgueil et preuve de la plausibili.té de son aposto-
lat ( 13.4). Car c'est cette faibl esse qui constitue pour Paul le lieu de la

1 La deuxième le1trc aux CorinLhiens constirue une letLrc personnelle et autobio-


graphique de Paul. Voir S. V1RGUL1 . Seconda Lattera ai Coritd, 525; F.T. FALLO .
2 Cori11thia11s. 1: F. MANZI. Seconda Lettera ai Curin:;i. 32 l.
2 Cf. J.P. SAMPLEY, Tlle Second l~etter. 22-29: F. MANZI. Seconda l ettera ai Co-
ri11:;1. 321-354; A. PITIA, la seconda /ettern ai Cori1i=i. 558-517.
PARTIE 1: LE CHRlST EST PUISSANT CH. 111 : RÉFLEX ION THÉOLOG IQUE SUR 2CO 13,1-4 91
90

manifestation de la puissance de Dieu (12,9)3. Dès lors toute son apolo- peut se poser de savoir comment celui qui a adhéré à la foi en Jésus-
gie va s' articuler autour de sa compréhension en rapport avec celle du Christ arrive à manifester une certaine ambivalence dans son agir ? Un
Christ. élément de réponse à cette interrogation peut nous être suggéré par
Dans cette partie du travail, nous voulons, de fait, proposer une réf- l'observation de Jésus à la Samaritaine, quand il lui fait remarquer que
lex.,ion théologique. Celle-ci portera, entre autres, sur la compréhension le vrais adorateurs sont ceux qui. désormais, adoreront Dieu en Espri t
paulinienne de la faiblesse-puissance tel qu ' il résu lte de l' analyse exé- et en Vérité (cf. Jn 4,23). Jésus montre, par là, une nouvelle façon de
gétique de la péricope 2Co 13, 1-4. Les résultats de cette étude nous ont vivre le rapport avec Dieu, lequel correspond à la sai nteté vou lue par
permis de mettre en évidence trois thèmes : les exigences de la vie Dieu.
chrétienne, le rapport paradoxal faiblesse-puissance dans la vie du Nous pouvons aussi évoq uer les invectives de Jésus contre les phari-
Christ et du croyant. n s'agit précisément de l' aspect ecclés iologique, siens. li les compare aux sépulcres blanchis mai s pleins de pourritures à
christologico-théologiquc et anthropologico-théo logique. l'intérieLLr (cf. Mt 23,27); ou encore cette autre précision de Jésus au
suj et des conditions d' accès au Royaume: la disponibilité à fa ire la
1. Dimension ecclésiologique volonté de Dieu (cf. Mt 7,2 1). Cela veut dire qu ' i1 ne suffit pas seule-
ment d'accueill ir la paro le de Dieu et de se dire chrétien pour vivre en
Le premier vo let de ce chapitre s'articu lera sur troi s axes. Il sera d'a- enfant de Dieu. Bien plus, il faut un engagement personnel et constanl.
bord question d'une réflexion autour du comportement chrétien. En- Si cette implication venait à manquer, le chrétien pourrait bien être re-
sui te, nous allons exposer le rôle du responsable de communauté et en- connu comme tel , néanmoi ns son existence ne refléterait plu la réalité
fin les conséquences d' une vie chrétienne ambiguë. authentiquement chrétienne. C'est alors que l'on peut parler de l' ambi-
1.1 Le comportement chrétien ambigu guïté dans le comportement du croyant.
Cette équivoque correspond à une manière d' être désordonnée. com-
Les vv. 1-2 nous offrent des éléments importants à l'égard de la vie de me celle qu ' a été le cas pour certains membres de la communauté de
ceux qui ont cru en Jé us-Christ. La réalité communautaire des convertis Corinthe. A ce sujet, Jésus a justement eu raison de prévenir ses audi-
corinthiens montre que l'être chrétien n' est pas immunisé contre les er- teurs d' une éventuelle retombée de la vie de foi, qui entrainerait un
reurs. En effet, l'apôtre Paul nous apprend, à travers sa lettre, que les retour à la s ituation antérieure à la conversions.
Corinthiens malgré l'enthousiasme avec lequel ils ont accueill i l'évangile,
ne faisaient pas tous preuve de cohérence dans leur faço n de vivre les 1.2 Le rôle du responsable de communauté
exigences de la vie chrétienne. De fait, ils vivaient dans l' immoralité
(c f. 1Co 5, 1), les désordres, la jalousie, les animosités, les disputes, les Un deuxième élément de réflexion du message des vv. 1-2 concerne
calomnies, les commérages, etc. (cf. 2Co 12.20-2 1). Par ailleurs, soute- la fonction de celui qui exerce et assume une autori té dans la commu-
nus par les opposants de Paul , ils sont allés jusqu 'à douter de la crédibili- nauté chrétienne. L'apôtre Paul nous en donne un bon exempl e à imiter.
té de celui qui leur a annoncé la bonne nouvelle de Jésus-Christ4. En effet, l'apôtre des Gentils a vécu avec amertume la situation qui pré-
Ce malheureux constat relatif aux comportements des croyants corin- va lait dans l' église de Corinthe. li y régnait un style de vie impropre
thiens nous .instruit suffisamment sur ! 'ambiguïté qui peut faci lement se aux ex igences chrétiennes. De plus, Pau l était aussi navré par l'attitude
glisser dans la vie d' un chrétien et y demeurer. Toutefois, la question de certains membres de la communauté de Corinthe, qui continuent à

5 «Lorsque l'esprit impur est sorti de l' homme, il erre par des lieux arides en quête
Les passages de Paul, notamment 2Co 4,7- 15; 6.3- l 0; 11 ,23-33; 12,9- l 0 décri-
3
vent la vie de I' Apôtre. Celle-ci est une imitation et une continuation de la vie du de rep9s. N'en trouvant pas, il dit : Je vais retourner dans ma demeure. d'où je suis
Christ et de sa destinée : Christ souffrant et glorieux. Cette destinée est vécue dans sorti. Etant venu, il la trouve balayée, bien en ordre. Alors il s'en va prendre sept
l'espérance pour la vie future. C'est cette espérance dans la foi qui produit la joie dans autres esprits plus mauvais que lui: ils reviennent et y habitent. Et l'état final de cet
l'A.fôtre (cf. Rm 8,23; Ga 5.5). Cf. J. CAM1311:.R. «Le critère». 49 1. homme devient pire que le prcmiem (Le 11.24-26).
Pour cc sujet, voir ehap. 1. le point 2.4 sur les adversaires de Paul.
92 PARTI E 1: LE CHRI ST EST PUISSANT CH. IH : RÉFLEXlON Tl-lÉOLOGlQUE SUR 2CO 13.1-4 93

mettre en doute la crédibili té de son ministère . Autant de motifs qui ont 2, 10). Certes, il en avait reçu la recommandation de la part de Jacques,
été des sources d 'ennuis pom lui. En raison de cette situation, l'Apôtre Céphas et Jean (cf. Ga 2,9- 10), qui sont les notables, les colonnes de
est interven u maintes fois tant par des lettres que par des visites. 11 vou- l'église. Cependant en 2Co 8- 9 l'apôtre des Genti ls donne le sens pro-
lait. par là. les aider à vivre en bons croyants et continuer à lui fai re fond de cette action charitable. Nous en dégageons tro is fondements sur
confiance comme apôtre du C hrist. lesquels Paul s'appuie pour motiver !' agir des Corinthiens. Il s'agit des
Ce faisant. L'apôtre des nations s'est montré un res ponsable inlas- aspects théologique, ecclésio logiquc et christo logique9.
sable pour la cause de ses convertis, pour leur édification personnelle et L'élément théo logique s'explique par l' intervent ion de Dieu , en ta:nt
communautaire (cf. 2Co 12.19). Te l est, du reste, le rôle d ' un vra i ani- qu' il est pui ssant, pour rendre les Corinthiens capables d ' agir de façon
matew· et guide de communauté. 11 consiste à assurer la croissance des généreuse. Ainsi, si ces derniers sont appelés à répondre à l' initiative de
va leuJ"s iDdi viduelles et communauta ires. Paul ne s'était pas seulement solidarité pouJ" les pauvres de Jérusalem , c'est en vertu de la grâce de
contenté de rappeler les Corinthiens à l'ordre en mati ère de leur condui- Dieu (cf. 9,8-9). Par conséquent, la coll ecte poLtr l'église de Jérusalem
te, mais il les a encore encouragés à fa ire preuve de généros ité à l'en- constitue une bonne action qui déri ve de la générosité des croyants 10 .
droit des communautés sœurs. Cet engagement soutenu de l'apôtre n'a Dans la vision théologique paulinienne, cet acte de solidarité n'est natu-
pas manqué de porter du fruit, car les Corinthiens avaient achevé la co l- rellement pas l'expression de la philanthropie mais le fruit de la grâce
lecte in itiée en faveur de l' église de JérusaJem. C'est cette quête géné- divine. Vo ilà pourquoi, en retour, de cet acte généreux jaillit de la part
reuse que Paul a amenée avec lui à Jérusalem (cf. Rm 15,25-26)6 . de ceux qui. en bénéficient l' action de grâce à Dieu, source de tout bien
En effet, s'agissant de la quête d 'argent, les chap. 8- 9 de la deuxième (cf 9 ,11 - 15) 11.
lettre aux Corinthiens montrent la façon dont Paul a exercé sa fonction En somme, par la dimension théologique de l'initiative de la collecte,
de responsable de communauté 7 . LI a exhorté ses fidè les à prendre part à Paul soutient que cet acte ex prime la solidarité di vine envers les pau-
l' in itiative qu' il a proposée à toutes ses communautés. Les Corinthiens, vres de Jérusalem; car ceux qu i donnent sont conscients que tout vient
comme tant d'autres convertis de Paul (cf. 2Co 8.1-5: 9,2-5 , Rrn 15.26). de Dieu. De même, ceux qui reçoivent ce don reconnaissent également
ont été éga lement in vités à réaliser l'œuvre de so lidarité pour les pau- que cela est l'œuvre de Dieu à travers les hommes. Le deuxième aspect
v res de Jé rusa lem. Pour ce fai re, !'Apôtre leur a présenté le modèle de fo ndamenta l de la collecte se situe au niveau ecc lés ia l. Etant donné que
ceux qui ava ient déjà achevé une telle œ uvre de so lidarité. Ainsi, il la collecte représente un service communautai re en faveur des croyants
évoque l'exemple du Christ et celui des croyants de MacédoineR. pauvres de Jérusalem (2Co 8,4; 9.1.1 2a. 13; Rm 15,25.27), il est plus
L'exhortation à la co llecte pour les pauvres de l'église de Jérusalem qu'une aide financi ère ou matéri elle (cf. Rm 15,26; Ga 2, IOa) .
était, de fait. pour l'apôtre Pau l, un proj et qu' il lui tenait à cœur (cf. Ga
9 Pour la LhémaLique de la collecte, cf. A. WODKA, Una teologio. 118-1 19.130-
6 A l'exemple de St Paul, le responsable d' une communauté chrétienne est celui 131.298-304; F. MANZJ, Seconda Jettera ai Corin::i, 339-346.353-354; A. PtTTA, La
qui reste fidèle à sa mission d'aider et de veiller sur la bonne marche de la vie com- seconda Jettera ai Corùd. 573-574. Voir aussi D. GEORG !. Die Geschic:hte, 58-78:
munautaire et de la croissance spirituelle de chaque membre en particulier. Les difli- E. WALTER, la deuxième épitre. 63-75; J. L AMBRECHT, Second Cori11thiw1.\', 140-1 43.
cultés évidentes qu'il aura à afTTontcr ne doivent pas être l'occasion d·abandonner sa 10 Notons, toutefois, que Pau l n'appelle pas. dans toute la section, la collecte par le
responsabilité. Ainsi donc, à la suite de Jésus, il doit être .l e bon pasteur des brebis qui nom de récolte (cf. ICo 16, 1-2). Il utilise d' autres tcm1cs, tels que largesse (cf. 9.5-6);
donne sa vie pour elles. qui sait les défendre lorsqu'elles se trouvent en danger (cf. Jn libér.:1lité (8.6. 7. 19): gënérosité. participation. communion (8.4; 9.13): service (8.4:
10, 1-1 6), qui les rassemble, qui cherche celle qu i est perdue et la ramène au bercai l, 9, 1. 12. 13); action de grâce (9, 12); charité ( 8,8.24 ); etc.
qui panse celle qui est blessée. qui fortifie celle qui est malade c l veil le sur celle qui 11 L'net ion de grâce dont il est ici question est une anirude à deux versants: elle
est bien portante (cf. Ez 34. l6). doit s · cffe<.:tucr dans un mouvement verticaJ el horizontal. Dans un mouvement ver-
7 Pour le commentaire de 2Co 8-9 cf. J. LAMBRECHT. Second Cori11fhia11s, 134- tical. elle se veut une reconnaissance à Dieu très bon. source de tout bien. En hori.wn-
135; A. PITIA, la seconda leltera af Corinzi, 325-390. tal, elle est un acte de gratitude vis-à-vis des hommes pour autant qu'ils soient capa-
8 Cf. D. GEORGf, Die Gesc/Jic/Jte. 51-66; R. P ENNA, «Le collette>>. 179- 190; bles de générosité. Toul compte fait , les deux mouvements sont une double expres-
.1. LAMBREC'I IT, Second Cnrimhians, 14 1- 142; A. P1rrA, la seconda l eflera ai Cori11- sion d'une seu le attitude, à savoir, l'action de grâce que l' homme est appelé à rendre à
=i. 328. Dieu. unique source du bien.
94 PA RTI E 1 : LE CHRlST EST PUIS ANT CH. W : RÉFLEXION T HÉOLOGIQUE SUR 2CO 13.1-4 95

Il est fondamentalement une expression concrète de communion en- Jérusalem (cf. 2Co 5, 14- 15; 8,9; Ph 2,5- 11 ). Pour rendre efficace son
tre les différentes communautés des croyants en Jésus-Christ. En effet, exhortation, Paul, en qualité de responsable de communauté, motive
cette communion est ex primée, éga lement, à cause de la reconnaissance l' invitation à la collecte en évoquant l'exemple des croyan ts de Macé-
de la part du groupe elhnico-cbrétien, qui se sent redevable à l'église de doine. Bien que le Christ soit le modèle de solidarité pour les croyants,
Jérusalem. Car c'est de cette église qu'i ls ont reçu les biens spirituels, !' Apôtre apporte un autre élément pour montrer la faisabi lité de son
en cc sens que l'Evangile du Christ est prut ie de cette église de Jérusa- exhortation. Ainsi, il fait appel à l'œuvre de solidarité réalisée par les
lem pour arri ver chez eux. Pour ce fa ire, les croyants d'origine païenne croyants de Macédoine (cf.2Co 8. 1-4). Ces derniers ont pu la réaliser à
(de Macédoine et d. Achaïe), étant matériellement forts, ont donc ex- travers l' imitation du Christ obéissant à la volonté salvifique de Dieu
primé leur gratitude envers les judéo-chrétiens de )'église mère, qui se (cf. Rm 5, l 9b; Ga l ,4c; Ep 5.2d; Ph 2.8b) et son être solidai re à l'égard
trouvaient dan une situation économique faible, à travers la collecte des autres hommes (cf. 2Co 5,2 1b; Ga l ,4a; 2.20; Ep 5,2bc: l Tm 2,6:
d'argent (cf. Rm 15,25-27). Tt 2, 14a).
Cette express ion de communion est conforme à l'esprit qui a caracté- En d'autres termes, le Christ s'est livré par amour en acceptant de
ri sé la vie des premières communautés chrétiennes; telle qu 'elle nous mourir pour les hommes (cf. 2Co 5, 14 - 15) afin d'être confo rme à la
est décrite dans le livre des Actes des Apôtres (cf. Ac 2,44-47). L'œu- volonté de Dieu. Cette volonté était de réconcilier les hommes avec lui
vre lucanienne rapporte la vie des premi ères communautés chrétiennes (cf. 5, 18-19). Paul monlre que, pous és par la même charité du Christ
comme le modèle d'une vie où tout le monde se souciait de tout le (cf. 5, l 4a), les Macédoniens ont offert tant leurs biens qu 'eux-mêmes
monde et où personne ne vivait pour son seul compte. Ils rnellaient, de (cf. 8,5b). Encouragés. voire provoqués par l'exemple de générosité des
fait, tout leur avoir ensemble en vue d'en assurer une distribution et une Macédoniens évoqué par Paul, les croyants de Corinthe et d' Achaïe se
jouissance équitable. La finalité d'une telle pratique était qu'aucun sentent à leur tour invités à achever la collecte qui avait été commencée.
membre de la com munauté ne devait se retrouver indigent. Car celle-ci sert pour eux de moyen pour être en communion avec les
Par ailleurs, cette expression concrète de communion ne découle pas autres communautés chrétiennes (cf. 9,13). Ainsi, comme le Christ, les
d'une obliga tion quelconque en vue d'atteindre une situation sociale Corinthiens s·appauvrissent pour enricllir leurs frères (cf. 8, 14).
égale entre les croyants. Elle est plu tôt un acte libre, lequel est motivé En définiti ve, nous disons que l'exhortatjon de 2Co 8- 9 a atteint
par le modèle du Christ qui, de riche, est devenu pauvre pour enrichir l'objectif visé par l'apôtre Paul , car les communautés ont participé el
l' humanité de sa pauvreté (cf. 2Co 8,9). Par conséquent, cet acte de achevé la co ll ecte (cf. Rm 15.26-27). Dès lors, par ce geste de solidarité,
solidarité est une des conséquences de l'adhésion des croyants à l'en- l'église de Corinthe a pu s'ouvri r aux églises sœurs, et a su éviter le
seignement du Christ par la foi. risque de se refermer sur elle-même en une forme sectaire et égoïste.
Evidemment. ceux qui reçoivent ce secour n'ont rien à donner en re- Agissant ainsi, l'église de Corinthe était devenue. selon l'expression du
tour, car ils sont indigents. Ils reconnaissent. toutefois, la communi on Vatican Il, «sacrement, c'est-à-dire à la fois le signe el Je moyen de l' u-
dont témoignent leurs bienfaiteurs à leu r égard à travers cet acte so li - nion intime avec Dieu et de l' unité de tout le genre humain» (LG 1).
daire. Ainsi, ils leur offrent, à leur tour, un bien spirituel exprimé par
des prières d'action de grâce à Dieu (cf. 2Co 9, 12- 14). De cette façon, 1.3 Conséquences d 'un comportement chrétien ambigu
il y a un échange affectueux des dons matériels et spirituels entre les Notre rénexion dans cette section, part de l'affirmation de Paul au
communautés fondées dans la foi au Christ. v. 3. L' Apôtre s'adresse aux Corinthiens en dévoilant leur pensée à soa
Le tro isième fo ndement de la solidari té exprimée par la collecte en égard. En effet, les Corinthiens veulent avoir la certitude que Paul
faveur des pauvres de Jérusalem est de nature christologique, en vertu
continue à être l'apôtre du Christ. lequel n'est pas faible mais puissant
de l'action salvifique du Christ. En effet, comme nous l'avons évoqué parmi eux. Selon les Corinthiens, le Christ est certainement fort et ca-
ci-dessus, le Chri st, de riche qu 'il était, s'est fait pauvre pour enrichir
pable, du fa it qu ' il est ressuscité (cf. ICo 15,4); c'est tout ce qui com-
les hommes par sa pauvreté. Cette pauvreté volontaire du Christ et sa pte pour eux. Ils ont cependant oublié l'autre réalité du Christ qui est sa
charité constituent la raison ul time de la collecte pour Les pauvres de
fa iblesse. laq uelle fut illustrée par sa crucifixion. Pau l ne nie pas leur
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96 PARTIE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT Cl-1. Ill : RÉFLEXION THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13.1-4 97

affirmation. Mais il en dénonce l'insuffisance et met à nu leur attitude De même tout chrétien qui s' éloigne de la foi adopte des compor-
prétentieuse (cf. 1Co 4,8. I 0: 2Co 13.9). Du reste, cette prétention tra- tement sans fondement en Christ. Une telle vie chrétienne comporte des
duit l'ambivalence de leur vie chrétienne. conséquences, tant sur la communauté elle-même que sur les non-
Etant en contact avec les adversa ires de Paul quj faisaient préva loir croyants. Au sein de la communauté, l'exi stence chrétienne ne sera plus
leur qualité spirituelle, et encouragés par eux, les Corinthiens ex i- une présence visible du Christ panni les croyants eux-mêmes mais plu-
gea ient de Paul les mêmes qualités. Autrement dit, ils voulaient retrou- tôt un signe de scandale; une occasion de mépris les uns envers les au-
ver chez lui le comportement identique orgueilleux que celui de ~s tres. etc. Au regard du monde. la réali té chrétienne deviendra un non-
opposan ts. Ceux-ci se vantaient de leurs visions reçues et de leurs mi- ens pour ceux qui ne croient pas. Une telle situation ne peut-elle pas
racles accomplis. Cette attitude des Corinthiens est la conséquence de être évitée ?
ce qu'ils n'ont pas intériorisé les enseignements de !'Apôtre. Pa~ consé- En effet, la lettre aux Ephésiens (notamment dans la section 4 J 7-
quent, il ne s'est pas opéré de changement radica l dans leur vie anté- 5,20) rapporte la façon dont doit être vécue la réalité quotidienne d' un
rieure et celle qu ' ils commençaient à mener dans la foi en .lésus- chrétien, en vue d'éviter l'ambi valence dans sa vie 13. Les chrétiens ne
Christi i. Bref, les Corinthiens sont incohérents. doivent pas se comporter à la manière des païens (cf Ep 4, t 7- 19). lis
En effet, le manque de cohérence avec la fo i chrétienne conduit le sont invités à une façon de vivre et d'agir qui louche non seulement la
croyant à devenir superficiel dans son agi r. Etant superficiel. il se laisse sphère de la fo i mais encore tout le domaine éthique. li s'agit d'une
attirer par l'apparence en vue d ' une certaine gloire. Cet appétit de la in vitation à une vraie conversion : moment où la personne renonce et
gloue pousse le converti à chercher à récupérer tout ce auquel il avait rejette le comportement païen.
renoncé: les honneurs. la reconnaissance, l'orgueil, la puissance, etc. Par conséquent, elle accepte la vie selon l'exigence de la foi à la suite
(cf. Le 11.42-44). Au demeurant, il se veut exigeant à l'égard des autres du Christ. Cela advient à travers son adhésion à la foi chrétienne. Grâce
jusqu 'à sombrer dans le forma lisme, voire le triomphalisme. Dés lors, il à cet engagement, le croyant n'est plus étranger à la vie de Dieu, car i1
est prêt à juger à partir des apparences (cf. Mt 7. 1-5). C'est ce genre de connaît, dorénavant, une autre réalité: ccUe des fils el fi lles de Dieu.
comportement que Jésus qua lifie d' hypocri te (cf. Mt 6, 16: Le 6,4 1-42). Ce fai sant, il ne vit plus dans les ténèbres du péché mais dans la lu-
Nous pouvons donc comprendre dans ces observations de Paul , par mière cl dans la vérité (cf. Jn 3,2.1 ). C' est justement ce que dit Jésus
lesquelles il sti gmati se la conception que les Corinthiens ont du Chri st, aux Jui fs qui ont cru en lui : «Si vous demeurez dans ma parole, vous
qu ' il y a bien de l'ambiguïté dans l'être croyant de certains membres de êtes vraiment mes disciples, et vous connaîtrez la vérité et la vérité
la communauté de Corinthe. Car ils n' ont mis à la première place que vous libérera>> (Jn 8,3 1-32). Le croyant qui demeure fidèle à la bonne
l' aspect glorieux du Christ. Par contre, ils ont fa it ab traction de son nouvelle de Jésus-Christ ne se livre pas aux œuvres des ténèbres, car
humi liation par la mort sur croix. Cette dernière ne peut être acceptée Dieu, en luj, opère des œuvres de lumière. A ce sujet, nous pouvons
que dans une attitude vraie et cohérente de la vie chrétienne qui appelle évoquer l'exemple de beaucoup de chrétiens qui ont persévéré dans
à l'bumiLité. Cest ains i que l'apôtre Pau l les rappelle au v. 4 l'autre leur foi en Christ en se conformant à son message. De fait, leurs actions
aspect du Christ (sa faib lesse). li leur présente le Christ puissant. bien ont témoigné qu ' ils connaissaient la vérité et étaient libre 14
entendu, mais il ne s'abstient pas de souligner que cc même Christ a
aussi été faible en assu mant la nature humai ne. en toute chose excepté
Je péché et en souffrant la mort sur la croix (c f. Ph 2.6-8). Cette dime~­ 13
sion de la faib lesse du Christ passe narurellement pour scandale et fo lie Pour notre sujet. nolL'> nous occuperons surtout du chap. 4. 17-24. Nous nous
-;01~1mcs ~crvi du commenlairc de R. Penna. Cf. ID., La l ettera ugli Ejësini. 200-207;
envers ceux qui ne croient pas en lui (c f. !Co 1,23). vmr aussi ~ · Z ERWlCK, Der Brie/ (lit die Epheser. 131-148; J. CAMAI FR. Vie chré-
1ie1111e en Eglise. 135- ! 52; J.-N. A LETII. Êpitre aux Éphé.\·ums, 228-264; H. W.
HOEIINI· R. Ephesia11s. An Exegetica/ Comme111a11•. 581-65 1.
14
12 En effet. Paul avait appris que certains membres de la communauté de Corinthe Nous citons en particulier la vie de St AugÙStin; St François d' Assise: St Ignace
n'avaient pas abandonné leurs pratiques immorales de leur passé païen. Cf. le chap. 1 de Loyola: Ste Thérèse d'Avila; St Jean-Bosco; Ste Thérè c de Lisieux; Ste Thérèsc-
de ce travail au point 1.3 Relation entre Paul et la communauté. Bénédicte de la Croix, etc. C'cs personnes on1 vécu dans la connaissance de Dieu, dans
98 PARTIE 1 : LE CHRIST EST PUISSANT CH. U1 : RÉFLEXlON THÉOLOGIQUE UR 2CO 13.1-4 99

L'adhésion à la personne du Christ amène le croyant à apprendre les etc. Ainsi le croyant, libérant sa vie de toute ambiguïté avec la grâce de
bonnes indications qui lui permettent de bi.cn vivre, de bien agir. Ces Di~u, ~eu~ être en mesure de faire de sa vie une offrande digne qui
directives comportementales sont le fruit de la connaissance du Christ, plaise a Dieu. Car cette offrande représente un authentique culte spiri-
laquelle surpasse toute connaissance et pennet au croyant d' entrer plei- tuel rendu ~ Di eu. Voilà pourquoi il doi t éviter de prendre pour modèle
nement dans toute la plénitude de Dieu (cf. Ep 3, 19). En d'autres ter- de .conversion le monde présent. car le renouvellement de son j ugement
mes. cel ui qui vit dans l'amour du Christ, et qui par conséquent le doit l'amener à une transformation et à un discernement en vue de sa-
connaît. parvient au plein épanouissement de l'intelligence. Celle-ci le voir quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon. ce qui est prufait bref
fe ra pénétrer le mystère de Dieu (cf. Col 2,2-3). ce qui lui plaît (cf. Rm 12, 1-2). '
Cependant, la question se pose de savoir comment celui qui se met à Après cette exhortation au changement rad ical de vie, Paul présente
la suite du Christ arrive à une telle connaissance du Christ. En guise de aux chrétien le modèle à sui vre: le Christ. lis doivent suivre la voie de
réponse, disons que cette intelligence du mystère di vin lui est procurée l'arno.ur à !',exemple d.u c.hrist qui les a aimés j usqu 'à se livrer pour eux.
par l'écoute att.enti vc de la parole de Dieu. Néanmo ins, l'écoute seule Ce faisant, 11. a o ffe~ a Dieu une offrande d' agréable odeur (cf Ep 5, 1-
ne suffit pas pour le connaître, quand bien même eUe jouerait un rôle 2). Les chrétiens doivent, donc, concrètement rejeter la vie désordonnée
important, en ce sens qu ' elle doit conduire la personne à donner une qui ne leur permet pas de vivre pleinement en enfants de Dieu (cf. Ep
réponse, comme express ion de son acte de fo i1 5. Par ailleurs. cet acte de 5,4). Car tous ceux qui vivent dans le péché n'ont pas droit à l' héritage
foi , comme réponse au message entendu, devient suffisant dans la me- du Royaume de Dieu (c f. Ep 5.5).
sure où le croyant réussit à !'approfondir à travers la mise en pratique
des enseignement du Christ. Pour ce fa ire. il se mettra à l' école du 2. Dimension çhristologico-tbéologique
Christ en vue d'apprendre non seulement son enseignement mais en-
Le deux ième volet de cc chapitre traitera Je thème du rapport para-
core le Christ lui-même (cf. Ep 4,20). Car la vie du croyant doit devenfr
doxal de la fai blesse et puissance du Christ, tel que 1'apôtre Paul l'an-
une continuelle imitario Christi par un effort de reproduction authenti -
que de ses attitudes et de son style de vie (cf. Ph 2,5). Voi là pourquoi nonce en 2Co 13,4a. li s'agira exactement d'exposer l.a crucifixion du
Pau l proclame qu ' il n' a rien voulu savoir parmi les Corinthiens, sinon Christ dans la faiblesse et sa vie glorieuse par la puissance de Dieu.
Nous nous servirons des autres tex tes du NT pour faire ressortir la ri-
Jésus-Cltrist crucifi é (cf. 1Co2,2).
chesse théo logique de l' affi nnation de PauJ. Cependant, avant de nous
La conséquence de cet art de l'imitation du Cbr1st est que le chrétien.
consacrer à cette réflexion. nous présenterons d'abord le sens que sug-
en tant que disc iple, une fo is assimi lé l'enseignement du Christ, son
gèrent les termes faib lesse-puissa nce. tels que l 'Apôtre les a utilisés
maître, ne peut qu 'abandonner le vieil homme avec ses œuvres de ténè- dans leurs différentes catégories grammaticales.
bres (colère, emportement, malice, outrages, vi lains propos, etc.; cf.
Col 3,8). Car il a désorma is revêtu l'homme nouveau, et ce faisant, il 2.1 Usage paulinien des termes aqfJ/vfla et ôuvaµtç
s'est renouvelé dans la connaissance selon l' image du créateur (cf. Col
3,9- 10). L'apôtre donne une bonne raison pour s'éloigner complète- Les mots aaSÉvELa / fa iblesse et ôûvaµLç / puissance sont deux termes
ment du vieil homme, parce que celui-ci corrompt, il se décompose «au antithéLiques. L 'Apôtre a, de fa it, utilisé cette antithèse dans sa variante
fü des convoitises décevantes» (Ep 4,22). d'oxymore 16, lequel traduit l'affirmati.on paradoxale de l'apôtre Paul au
li s'agit donc d' une vraie transfonnation de la personne qui est deve- sujet du Chri st et de tout croyant. Ces termes constituent, par ailleurs,
nue chrétienne. Une conversion qui implique toute sa personne : esprit, les express ions-clés avec lesquelles Paul a exprimé le message des
menralité, disposition intérieure, vision du monde, jugement des valeurs, vv. 3-4. li les a employées tant comme verbe que comme substantif.

la vérité de l'Evangile et leur vie était dans la lumière. C'est pourquoi ils ont pu ré- 16 Oxymore ou oxymoron est une figure de style. représentant un paradoxe intel-
pandre autour d'eux la lumière de Dieu. lectuel entre deux membres ant ithétiques, lesquels sont paradoxalement unis.
15 Comme le démontre bien l'apôtre Paul : «Ainsi la foi nait de la prédication et la
Cf. H. LAUSBERG, Elememe. § 386.389: 8. M ORTARA GARAVELLI, Ma1111a/e di refori-
prédication se fnit par la parole du Christ>> (Rm 10. 17). ca, 245.
100 PARTIE 1: LE CHRJST EST PUISSANT CH. Ill : RÉFLEX ION THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13.1-4 101

En effet, le tenne faiblesse est assez ut ilisé dans le NT 17• Cependant, En effet, parlant de la faiblesse du Christ, Paul se réfère à son l'in-
son sens diffère dans la plupart des écrits de Paul et dans la lettre aux carnation : moment où le fils de Dieu a accepté délibérément la condi-
Hébreux, comparativement à d'autres passage du NT. Selon l' usage 1ion humaine21. A ce sujet, surgissent des questions, entre autres, celles
paulinien, aussi bien le mot ào9ÉvHa que le verbe &oeevÉw renferment de savoir comment le Verbe de Dieu, le Christ, a assumé cette condi-
un ens pirituel. Ce dernjer est en rapport avec la foi en la pu issance de tion et comment il l'a vécue. Nos interrogations trouveront des élé-
Dieu; laquelle se déploie dans l' homme lorsqu ' il reconnaît devant Dieu ments de réponse dans un passage de La lettre aux Philippiens (cf. 2,6-
a faiblesse, ses li mi tes (cf. 2Co 12,5- 10) 18 . Cette conception pauli- 11 )22.
nienne de la faiblesse invite à voir l' homme comme un être limi té et Nous apprenons, à travers cc texte, que le Christ s·est dépouillé de sa
désireux de la grâce de Dieu 19. Quant au mot puissance employé com- condition divine, laquelle l'égalait à Dieu (v. 6). Il a, pour ce faire, ac-
me verbe ÔUV<XîÉW «être puissant» OU comme substantif ouvaµLÇ «puis- cepté la condition d' un csclavc23. Il est, par conséquent, devenu esclave
sance», il exprime l' idée de pouvoir, d'être capabl e. de Dieu et soumis à sa volonté. Ce faisant, le Christ a partagé la condi-
Après avoi r exposé les imp lications des idées de faiblesse-puissance tion de l'homme créé à l' image de Dieu. De fait, il est devenu sembl a-
dans l'entendement paulinien, nous allons à présent l'expliciter dans la ble aux hommes et reconnu homme par son comportement (v. 7). Ce-
double dimension paradoxa le de l.a faiblesse et puissance tant du Chri st pendant, le Christ ne s'est pas limüé à l'aspect apparent de son dépouil-
que cell es des chrétiens (cf. 2Co 13.4). Ceci est pour bien comprendre lement ou de sa kénose, mais a manifesté cette attitude à travers ses
ce li en paradoxal de la faiblesse-p uissance dans la vie du Chri st. actions quotidiennes caractérisées par l' humili té24 et l'obéissance. C'est
ce comportement qui lui a valu la mort sur la croix (v. 8); mais Dieu l'a
2.2 Rapport paradoxal de /a faiblesse el p11issance d11 Christ exalté 25 en lui donnant le nom qui est au-dessus de tout nom (vv. 9- 11 ).
Ce point de la question traitera deux éléments importants de la chris-
tologie paulinienne, te lle qu'elle émerge de l'exégèse de la péricope
analysée (2Co 13.1-4). Nous présenterons en premier lieu le processus 2I Cf. 2Co 11 ,30: 12.9-10: !Co 2,3; 15.43; aussi J.C. CAMBIER, «Le critère». 12- 13;
D.A. BLACK. «Weakness». DPL 966: F. MANZI. Seconda lettera ai Corim:i, 291 n.
de la kénose du Christ jusqu'à son assomption de la nature humaine20. 90-91; A. PllTA, la s econda leuera ai Corin::i, 50 1 n. 136-138.
En second lieu, nous exposerons le caractère concret et vécu du Christ 12 Pour le commemairc de cet extrait voir J. GNl1-KA. Der Brie/ 40-46: G.D. FEE.
en tant qu ' homme. Philippia11s, 174-228; R. FABRI , Filippesi, 126-147; R. PE A, I rirrorti, Il , 12 1- 137;
A. Prr rA. «Lo scandalo della croce». 12-13: J.-N. ALETn. Saint Poul. épitre mu:
2.2. I Le processus de l'abaissement du Christ Philippiens, 137- 176.
23 L'esclave es1 celui qui est entièrement assujeni ou soumis aux ordres ou à la vo-
La thèse que nous nous apprêtons à développer découle de l'affir- lonté de son maître, celui qui est contraint aux formes de servitude humaine. li est
mat ion de l'apôtre Paul au sujet d11 Christ. L' Apôtre proclame que la considéré comme la propriété de son maître.
24 L"cmploie du terme tannvcxjipoouvri «ht0nilité» est rare dans la linér:Hurc grec-
cruci fixion du Christ s'est accomplie en vertu de sa faib lesse et que sa
vie est l'œuvre de la puissance de Dieu (cf. 2Co 13,4a). que non biblique et a une connotation péjorative. li y dénote une faib lesse dont on
devrait avoir honte. C'est l'altitude de ceux qui ne peuvenl pas se montrer forts . Le
tem1e n'est pas ULilisé dans la LXX : par contre, son adjectif ranHv6ç «de basse condi-
17 Cf. J. CAMBIER., «le critère>), 488-490. tion, humble» est très uti lisé. Il désigne ceux que Dieu exalte (Ps LXX 9,39; 18,27;
l 8 Cc mot a le sens de la faiblesse morale en lien à la natt1re humn ine chez les phi- 34. 19). CC J.-N. ALFT!l. Saint Paul, épître aux Philippiens, 130.
losorhci. grecs. Dans l' AT (LXX). il a le sens spirituel proche de Paul nonobstant son 25 Nous constalons que dans le passage de Ph 2,6- 11 , le tennc «résurrection d'entre
lien étroit avec la maladie corporelle el la pauvreté matérielle (cf. 2M 9,2 1: Qo 12,4; les morts« n'est pas utilisé, c'est plutôt le terme «exalté» ou «exaltation». En effel, le
Jr 18,8). Cf: J. CAMBlliR. <<Le critère)), 490. lcm1e «résurrection d'entre les morts» représente le langage habituel de l'Église pri-
l9 Le passage de Ga 4, 13 en faji exception, du fait que le sens de cio9(vCLa est celu i mitive. en particulier de Paul. AleUi aflinne que cela esl dû à une question mé1hodo-
de la maladie corporelle. logiquc et que le mol «exaltation» inclut de façon implicite la résurrection. Cependant,
20 Le mot kénose vient du grec KÉvwmç qui est traduit par «vacuité, état d'un corps pour permettre au lecteur d' appréhender la logique qui dirige le développement sé-
vide, évacuation. déjection>>. Cf. A. BAILLY. «Krvc..xHÇ)). GDGF, 1079. Pour le cas de mantique cl 1héologique. l"auteur a employé le mo,dèle conceptuel biblique de l'abais-
Ph 2.6-1 1. il veut dire «renoncement total». Voir J.-N. Au:n1 al.. Vocahuloire. 131. sement I exaltation. Cf. J.-N . Al Fm , Saint Poul. Epitre 01L"< Philippiens . 168.
102 PARTIE 1: LE CHRLST EST PUISSANT CH. ITJ : RÉFLEXJON THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13.1-4 103

Lev. 7 offre une première clé de lecture de l'argument de Paul sur la de l'aspect salvifique se justifie par la finalité que I' Apôtre voulait at-
fa iblesse du Chris t qui est la cause de sa cruci fi xion en 2Co L3 ,4a. Tl te indre à travers ces deux passages. En effet, Paul visait à exprimer en
laisse vo ir, à travers la phrase E:autov ÈKÉvwoEv / « il s'est vidé Ju i- Ph 2 6-1 1 et 2Co l 3,4a une chri sto logie non pas sotériologique mais
même», que Je Christ a accepté vo lontairement et librement de reno ncer rhéo l~gique29. De fait, il n'entend pas démontrer la fon ction de la faj-
à sa condition div ine pour assumer la condition humaine, vo ire celle blcssc ou de l'abaissement du Christ qui est de sauver les hommes,
d 'esclave. Une deuxième clé de lecture présente la manière dont Je mais un objectif bien précis pour les croyants, à savoir, mettre en évi-
Christ a vécu sa kénosc. C'est préc isément à lravers une attitude hum- dence l'action pu issante de Dieu. Toutefois, dans chacune des périco-
ble et obéissante (v. 8). pes. I'Apôtre vise à un but particulier. En Ph 2,6-1 1, Paul a l' intention
Par ailleu rs, il ressort de ces éléments deux dimensions importantes de présenter Christ comme modèle pour les croyants et en 2Co l 3,4a,
traduisant la faiblesse du Christ. U s'agit des aspects ontologique et comme signe probant, la preuve de la crédibilité de a mi ssion aposto-
morale. Le premier relève de l'être-homme assumé par le Christ. Le se- lique que les croyants corinthiens cherchent dans sa personne.
cond point met en exergue les moda lités de l'agir humain du Christ. En se rapportant à la manière dont le Christ a vécu concrètement sa
Ainsi, nous pouvons affirm er que la faiblesse du C hrist s'exprime dans condition humaine, le passage de Ph 2,6- 11 ne donne aucune informa-
ces deux dimensions qui constituent une seule réali té de la vie terrestre. tion. Ce la nous pousse à une lecture attentive de certains récits des
En lien avec l'énoncé de Paul en 2Co 13,4a, nous comprenons que le éva ngi les dans l'espo ir d 'y trouver des détails de la vie concrète du
Christ a été crucifié dans la fa iblesse en tant qu'un être humain hum ble Christ. Ces données nous permettront, espérons nous, de bien appré-
et obéissant à la volonté de Dieu, son Père. Cependant cette crucifixion hender le sens effectif de la faiblesse du Christ. Nous nous intéresse-
se mani feste comme conséquence de son acte volontai re, en ce sens que rons, pour ce faire, à l' aspect concret de l'humanité du Christ.
le Christ ne l'a pas subie mais l'a assumée26 . En retour, il a reçu de la
part de Dieu la v ie (cf. 2Co l 3,4a), l'exa ltati on, l' honneur et la g loire 2.2.2 La dimension concrète de la nature humaine du Christ
(cf. Ph 2,9- 11 )27. Nous avons là deux extrai ts de g rande portée christo-
logique, car ils permettent de comprendre le processus de l ' incamation Cc point sera consacré à l'exposé de ce que fut l'agir de Jésus-Christ.
du Chri st, la modal ité de son agir et les conséquences de son incarna- Nous aborderons la question sur deux aspects qui ont caractérisé ses rela-
tion. tions. Dans un premier temps, il sera question du rapport de Jésus-Christ
Nous savons que Dieu a envoyé son Fils dans le monde pour Je salut avec Dieu. Le second moment s'occupera de son lien avec les hommes.
de tous les hommes. Cependant, nous constatons que les deux périco-
pes (2Co 13,4a et Ph 2,6- 11) ne mentionnent pas ! 'aspect salvifique de a) le rapport du Christ envers Dieu
la mission du Christ. De prime abord, il semble étonnant que l'apôtre L' acte volontaire d u Christ de se déposséder de sa cond ition divine et
des nations n'y ait pas fai t allusion28. Et pourtant, la composante sa lvi- d 'assumer la condition d ' un esclave a fai t de lui un être de besoin, corn-
fique constitue un élément propre à la pensée christologique pauli-
nienne (cf. Rm 5,6-7; ICo 8, 11 ; 15,3; 2Co 5, 15; ITh 5, 10). L 'absence
29 J.-N. ALFTTI. Saint Paul. Êpitre aux Philippiens, 174. Nous entendons par w1e
christologie théologique, ce discours sur ln personne du Christ, duns lequel est mis en
évidence, en l'occurrence, l'action de Dieu comme cause ou raison déterminante du
26 Notons que la faiblesse du Christ (ào8ÉvHa) ne se situe pas <.!ans l' absence de résullal positif de la kénose ou de la faiblesse du Christ. La christologie sotériologique.
contrôle, ni de maitrise de soi (aKpaota). car le Christ a vécu cette situation de façon par contre, révèle la fonction ou le rôle de la mission du Christ qui est .cc ll~ d~ sauver
consciente et clairvoyante. Il ne l'a donc pas subie mais l'a assumée. les hommes. Cf. G.L. M ÜLLER. Katholische Dogmmik. 256-257. A. Pilla Jusufie, par
27 La christologie de ces deux passages, bien que présentant une réalité semblable. contre. t'ab cnce de la dimension sotériologique par le caractère répugnant qu' avaü la
est toutefois articulée différemment à travers l' usage <.les rennes employés. En 2Co mort en croix dans le monde juif et gréco-romain. Elle repré entait une malédictjon
13.1-4. il y a le binôme faiblesse-puissance. mort-vie: en Ph 2,6-1 1. en revanche, le pour les uns et un scandale pour les autres ( 1Co 1,23). C'est ainsi que A. Pilla estime
schéma Lraditionnel humiliation-exaltation. que les chrétiens étaient réticents de parler clairement de la portée sotériologique de la
28 Cf. A. PITTA, «Io scandalo della croce». 13: J.-N . ALETTI, Saint Paul. Épître aux «mort en croix»: ce qui serait un non-sens. voire une co111radicrio in temrinis. Cf. Io.,
Philippiens, 175. «Lo scandalo della croce», 13.
PARTLE l : LE C'HRlST EST PUISSANT Cl 1. Ill : RÉFLEXION THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13. 1-4 105
104

me tout humain et l'a placé dans un rappon de subordination avec Dieu. s'étaient insurgés contre lui et ont voulu, à tout prix, sa condamnation
En d'autres tennes, en acceptant de se faire serviteur. le Christ était et son exécution. A cc suj et, quelques extraits des évangiles, notam-
oumis à un maître et à qui il devait l'obéissance. De fai t, durant sa vie ment les Synoptique , nous permettront de rentrer dans le détai l des
terrestre, Jésus-Christ s'est montré totalement dépendant de son maître, actions du Christ, les réactions qu 'elles ont susci tées et les controverses
Dieu. Il était animé d'un désir ardent d'être toujours en communion quj en ont découlé.
avec lui. Cette commun ion rendait possible l'accomp lissement de la En effet, les évangélistes relatent le refus que Jésus a rencontré au
mission qu 'il avait reçue du Père. En effet, le Créateur du monde a vou- cou rs de la réalisati on de sa mi ssion. Un désagrément qui l' a accom-
lu dans sa bonté infinie racheter l' homme de sa condition de péché. pagné tout au long de son ministère. Bien entendu, il n'est pas question
Jésus-Christ, le Verbe fa it chair, a adhéré à celle volonté du Créateur à dans cc travail de nous étendre sur tous les détails de l'at1itude du rejet
travers l'assomption de la nature humaine dans l'obéissance et l' humi - de la pa11 des hommes. Cependant nous voulons en exposer les grandes
lité. Cependant, son désir de communion avec Dieu s'est particulière- li gnes. Cela servira à éclairer davantage notre compréhension de la si-
ment révélé dans des moments de prière. Plusieurs textes des éva ngi les tuation que le Christ a dû affronter et comment .il l'a vécue dans sa fa i-
sont éclairants à ce sujet. blesse. Nous regroupons, pour cc fa ire, ces situations en trois moments
Nous apprenons, en effet, que Jésus-Christ pri ait, so it avant d'accom- selon les différents groupes des personnes.
plir une action (cf. Mt 14,19; Mc 6,4 1; Le 9, 16; Jn 6, 11 ; 11 ,4 1), soit En premier lieu, Jésus a bravé, par son enseignement nouveau et ses
avant de prendre une décision importante, d'affronter les moments cru- actes origin aux, les indignati ons des autorités de son peuple (les Phari -
ciaux de sa mi ssion. notamment la passion et la crucifixion (cf. Mt iens, les Scribes et le anciens). Cette nouveauté s'est mani fes tée, en-
26,3 6-45 ; Mc 14,32-39; Le 22,41-44). Toujours da ns cc dési r de com- tre autres, par son interprétation originale de la loi de Moïse. Cette in-
munion avec Dieu, Jésus-Christ savait également se retirer dans les terprétation est particulièrement visible sur les thèmes fondame ntaux de
lieux déserts pour prier Dieu, son Père (cf. Mc 6,46; Le 6. 12; 9,28). A la loi, tels que le pardon des péchés, le repas avec les pécheurs, le jeûne
travers ces moments de communion, Jésus exprimait. entre autres. sa et le précepte du sabbat. Jésus, le Verbe incarné, malgré le sentiment de
reconnaissance pour les merveilles que Dieu réalisait par le biais de ses colère et de mépris des pharisiens, a pu montrer concrètement au peu-
apôtres et il lui en rendait grâce (cf. Mt 11 ,25; Le 10,2 1). Tous ces ins- ple ce qui étai t absolument nécessaire et urgent à faire dans la loi.
tants de prière laissent voir la réalité de la condition humaine du Christ Voilà pourquoi, outre la guérison physique, il a remis le péché à un
dans son rapport avec Dieu, un rapport marqué sous le signe de la dé- paralytique en vue de montrer à ses détracteurs qu ' il en avait le pouvoi r
pendance compl ète. Cette dépendance était !'expression de sa faiblesse. (cf. Mt 9, 1-8; Mc 2, 1- 12; Le 5, 17-26). li a mangé avec les pécheurs
pour affirmer le besoin impérieux que les personnes malades ont de
b) le rapport du Christ avec les hommes chercher le médecin à la différence des personnes bien portantes (cf. Mt
9, 10- 13; Mc 2, 15-17; Le 5,29-32). LI a guéri le jour du sabbat afin de
Jésus, le Messie envoyé par Dieu, avait naturellemen t la mission de proclamer que cc jour est fait pour l'homme e l non ! 'homme pour ce
sauver l' human ité de son état de péché. C'esr à travers son aba issement, jour, et dont il s'est, du reste, déclaré le maître (cf. Mt 12. 1-8.9- 14 ; Mc
son inca rnation - comme nous l'avons précédemment souligné - 2,23-28; 3, 1-6; Le 6, 1-5.6- 1 1). Il a également ense igné sur le jeûne
qu ' il s'est fait chair et a pris sa demeure parmi les hommes (cf. Jn (cf. Mt 9, 14 - 17; Mc 2, 18-22; Le 5,33-39). Par cette faço n d ' agir hors
1, 1. 14) en vue de réa liser sa mission. du commun, le Chri st appara issa it devant les Pharisiens comme un
A travers les écrits du NT, en particulier les évangiles, nous savons élément subversif par rapport à la loi, d' où la décision de le mettre à
que le Chri st, durant sa vie terrestre, a fai t beaucoup de bi en et opéré mort.
des prodiges au milieu de gens, surtout parmi les nécess iteux. De ses A travers le refus de cette première catégorie de personnes, nous
actions bienveillantes surgissaient djverses réactions parm i le peuple. voyons que la faiblesse du Christ n'était pas du tout une situation com-
Au début. certains s' indignaient, notamment les autorités (Pharisiens et parable à celle d' un esclave social. Ce dernier est soumis à un maître
Sc ribes, etc., cf. Mc 2,6-8. 16-17: 3,6). d'autres, par contre, l' admi- qui est un homme comme lui et ne peut agir que sous l' ordre de son
raient (cf. Mc 1,22). A la fin. presque tous, surtout les responsables,
106 PARTIE I : LE CH.RIST EST PUI SSANT Cl 1. 111 : RÉFLEXION THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13. 1-4 107

maître. Jésus, par contre, s'est montré une personne totalement libre 6, L-6a: Le 4, 16-38). Les païens, qui de par leur nature sont mécréants,
dans ses actions. Cette liberté atteste que, eo tant qu 'homme, il est n' ont pas hésité à manifester leur méfiance envers Jésus. Devant le
soumis non pas à un maître humain mais plutôt à un maître divin : à prodige accompli par le Fils de l' homme, en libérant leur région de
Dieu. li recevair de lui l'ordre de faire du bien, de libérer l' homme pé- l'emprise démoniaque, les habitants, pris de peur, lui demandent de
cheur, d'accomplir sa mission. En second lieu, le Christ a affronté non s'en aller (cf. Mt 8,28-34; Mc 5, 1-20; Le 8,26-39). C'est une réaction,
seulement le refus des Pharisiens, Scribes et anciens ma is encore l' in- en quelque sorte paradoxale, par rapport au résultat de l' acti on qu ' ils
compréhension de ses proches. En effet, face aux propos et actes insai- ont sous les yeux. Ainsi, Jésus, respectueux de leur liberté et de leur
sissables, les siens ont cru qu ' il était devenu fou. Aussi voulaient-il s se déc ision, s'en est allé sans opposer résistance.
saisir de lui (cf. Mc 3,2 1)30. Quant aux scribes, ils ne pouvaient plus le Nous pouvons dire, comme dans les deux premiers groupes, que la
supporter. Le Christ leur devenait de plus en plus antipathique, au point fa iblesse du Chri st n'a subi aucun conditionnement humain. Jésus se
qu ' ils l'ont traité de possédé par Béelzéboul (cf. Mt, 12,24; Mc 3,22; savait libre et respectueux des opinions des autres. fi leur a présenté le
Le 11, 15). Cependant, les foules continuaient à le suivre et à 1'ad rnirer message du salut, mais n'a contraint personne à y adhérer. En effet,
(cf. Mt 13,2; Mc4,J ; Lc8, l4). nous constatons qu'à la progression de la puissance opérante du Chri st
Le rejet et 1' incompréhension auxquels Jésus deva it souvent faire correspondait une opposition croissante contre lui. Ses auditeurs, les
face ne l'ont nullement empêché de s'exprimer et de continuer son œu- Pharisiens, les scribes, les anciens, ses propres disciples, ses compa-
vre de salut. En tous les cas, il ne s'est jamais laissé intimider par ses triotes et sa famille ainsi que les pa'iens se sont montrés, d'une mani ère
adversai res (cf. Le 13.3 1-33). Bien au contraire, il se permettai t même ou d' une autre, imperméables au message salvifique apporté par lu i.
de dénoncer les incohérences de leur rai sonnement et de leur agir jus- Toutefois, comme nous l'avons déjà dit, cette résistance à reconnaître
qu 'à prononcer leur condamnation (cf. Mc 3,29). La qualité de ses rela- et à accepter Jésus comme le Messie envoyé par Dieu, n'a en rien en-
tions avec son entourage nous offre davantage les éléments pour saisir travé sa détermination à accomplir sa mission. Les évangiles laissent
concrètement comment Jésus a vécu sa condition de faiblesse. Jésus voir comment, nonobstant le refus rencontré, le Christ a intensifié les
jouissait d' une grande liberté envers tous. Aucun lien, même pas fam i- activités missionnaires, parcourant les villages pour enseigner. Le mo-
lial, ne l'a détourné de son objectif qui était l'accomplissement de la ment venu, il a associé se disciples à cette mission (cf. Mt 10,1.9- 14;
volonté de celui qui l'avait envoyé. Mc 6,6b- l 3; Le 9, 1-6). Dans ce climat d'opposition faro uche à sa per-
En troisième lieu, Jésus a dû faire face au manque de foi et à 1'in- sonne, Jésus, conscient de ce qui va lui arriver, en prévient ses disciples.
compréhension de es propres disciples, des gens de sa patrie : Naza- Il leur annonce sa passion et sa mort (cf. Mt 16,2 1-23; Mc 8,3 1-33; Le
reth et des païens. li est curieux de vo ir que même ses disciples et ses 9,22), ainsi que sa résurrection.
compatriotes ont éga lement butés contre lui. En effet, les disciple qui, Eo somme, nous affi rmons que ces extraits décrivent un Jésus lucide et
en particuli er, ava ient le pri vilège de suivre assidûment l'enseignement conséquent devant son sort. Tl ne cherche pas pour autant à l'éviter, bien au
du maître, ne semblaient plus lui faire confiance. De fait, devant l'ac- contraire, c'est en toute liberté qu 'il va au-devant de son inéluctable destin.
tion de Jésus qui apaise la tempête, ses disciples sonl déconcertés et Car il savait que cela était la volonté de son Père à qui il deva it obéissance.
s' interrogent sur son identité. D'où la question : comment est-ce possi- Par ailleurs. nous pouvons également affim1er que la mort du Christ était
ble que eux qui avaient vu beaucoup de mervei lles accomplies par leur la conséquence de sa faibl.csse, non pas en tant qu ' une soumission aux
maître demeurent si incrédules (cf. Mt 8,27; Mc 4,40-4 1; Le 8,25) '? pouvoirs des hommes mais en tant que manifestation de sa totale dépen-
Quant aux compatriotes du Christ, ils se sont montrés sceptiques à dance à la volonté de celui qui l'a envoyé. Jésus s'est donc librement et
l'égard de l'autorité et de la sagesse avec lesquelles il enseignait. De- volontairement conformé au projet de Dieu. son Père3 1•
vant cet état d'esprit, Jésus conclut qu ' un prophète n'est méprisé que
dans sa patrie, dans sa parenté et dans sa maison (cf. Mt 13,53-58: Mc .3 1 Bien que la mort du Christ ait été conforme au dessein de Dieu, elle a toutefois
été uo moment de souffrance et de profonde ignominie: l'abandon de ses disciples
(cf. Mt 26.47-56). le reniement (cf. Mc 14,66-72), la maltraitance et la crucifixion
30 Cet épisode est raconté seulement par l'évangéliste Marc. (cf. Le 22.54.63- 23.5).
PARTl E 1 : LE CHRJST EST PUISSANT
CH. Ill : RÉFLEX ION THÉOLOGIQUE SUR 2CO 13.1-4 109
108

3. Dimension anthropologico-théologiq ue proclamer sa mort à la loi par la loi pour vivre à Dieu ou passer à Dieu,
étant dès lors crucilié avec le Christ (cf. Ga 2, 19).
Dans le troisième volet de ce chapitre, notre réfl exion s'occupera de Paul est bien conscient d'être mort en luj-même et de ne vivre que
l'énoncé paradoxal de l' apôtre des Gentils en 2Co 13,4b. Le texte par et pour le .Cbri~t : d~sormais «C~ n~ est plus i:noi qui vit'. m.ais Christ
contient une afrirmation de Paul selon laquell e les croyants, y compris qui vit en mom, d1ra-t-il avec conv1ct1on..Auss~ affirm~-t-11 e.g~le~en~
lui-même, sont faibles en Christ mais qu ' ils vivront avec lui en vertu de que sa vie dans la chair, il la vit dans la foi au Ftls de Dieu q~1 1 a .au:n~
la puissance de Dieu qui habite pam1i les Corinthiens. Dans son as- et s'est livré pour lui (cf. Ga 2.20). De cette façon, tout ce qu t1 a realtse
sertion, I'Apôtre établit une comparaison entre le Christ crucifié dans la comme apôtr~ ~u Chri.st, il ne l'a pas fai t a~ec la fo~ce des~ volonté.' e~
faiblesse, mais qui vit par l'effet de la pu issance de Dieu, et l'état de tant que phans1en, mats avec celle de la gra~e ~e Dieu en Jesus-C_!rrist3-.
faiblesse des croyants ainsi que leur espérance en la vie avec Chri st, En somme, l'expérience de Damas a permis a Paul de reconnaitre sa
ceuvre de cette même puissance de Dieu. faiblesse et de s'ouvrir à la grâce de Dieu, qui devient dorénavant sa
ns'avère important, avant de rentrer dans le vif de l'argument de no- fo rce. JI s'agit pour ainsi dire de l'expérience d 'adhési~n de Pau~ ~ la
tre rétlexjon, de donner le présupposé théolog ique sur lequel. PauJ a suite du Christ~ ce Christ qui était devenu la seule et umque finalite de
fondé sa thèse. En effet, la faiblesse des croyants dont parle I' Apôtre sa vie.
est une condition vécue par ceux qui ont accuei lli dans la foi la bonne Nous pouvons éga lement nous référer à l'exemple de l'apôtre Pierre,
nouvelle du salut apporté par le Christ. Cette condition, comme l'a ex- dont la vie a connu une Lransformation radicale après la résurrection du
périmenté le Christ. met le croyant dans une attitude consciente de sa Christ. Cette mutation qui s'est opérée dans la vie de Céphas est bien
nature limitée et nécessiteuse. Ainsi, il peut s'ouvrir à la relation con- cnlcndu fruit de son adhésion totale au Christ. De fait, avec la force de
fiante en Dieu et à sa volonté. Ce rapport e t ou tenu par l'espérance l' Esprit Saint envoyé par le Christ, Pierre, qui, par peur, .avait re~é le
d' une vie avec le Chri st toujours grâce à la pu issance de Dieu. Christ, annonce courageusement le message du salut en Jesus-Cbr1~t au
La question peu t se poser de savoir comment l' homme adhère à cette peuple de la Judée (cf. Ac 2, 14-36). L'attitude co.urageuse de .Pierre
bonne nouvelle du salut annoncée par le Christ. L'histoire de tant hom- dénote qu 'en lui s'accomplissait l'action de la puissante de Dieu en
mes venus à la foi nous enseigne que cette adhés ion s'obtient à partir Jésus-Chr1 st en lui. Autrement dit, ce qui se réalisait ne venait pas de sa
d' une expérience personnelle avec le Christ. A ce suj et, nous pouvons propre capacité mais plutôt d' une fo rce extraordinaire de Dieu en Jés~s,
citer l'exemple de beaucoup de croyants qui ont vécu de moments le Ressuscité. Pierre le dira, d'ailleurs, aux gens de la Judée stupéfaits
forts de rencontre personnelle avec Jésus-Christ. A partir de leur expé- de la guérison d'un impotent accomplie par lui : c'est par la foi au nom
rience, ils se sont mis à la suite du Christ en acceptant librement de de Jésus-Ressuscité que cet impotent a été rétabli en pleine santé. Ainsi,
partager sa vie. La motivation de leur adhésion n'est rien d'autre que la nous constatons que l'annonce de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ
découverte du Dieu d'amour, de miséricorde, de paix, de justice, de représentait pour l'Apôtre l'essentiel de son ~xist~ncc à partir d~ mo-
compassion, etc. ment où il a reçu la grâce libératrice de l' Espnt Samt. 11 ne pouva it plus
TeUe fut éga lement l' expérience de Paul avec le Ressuscité sur la se taire même devant les risques évidents d'être incarcéré, vo ire de per-
route de Damas, et aussi cetle de beaucoup d'a utres chréti ens. En effet, dre sa vie (Ac 4, 18-2 1.).
à propos de l'apôtTe des Genti ls, nous savons que, dès sa rencontre avec Ces deux modèles d'adhésion au Chri st sont des signes de la grâce de
le Ressusc ité, il a accueilli pleinement le Christ comme le Maître de sa Dieu dans la vie des apôtres, et aussi de tout croyant qui se laisse guider
vie. Par conséq uent, tout cc qui, humainement parlant, était pour lu i par Dieu en Jésus-Christ. On peut à juste titre se demander comment la
motif de gloire, il l'a désormais considéré comme des choses sans va- force de la grâce de Dieu - qui an ime tous ceux qui embrassent la foi
leur par rapport à sa nouvelle expérience dans Christ. A cause de lui, il en Christ - peut paradoxalement apparaître comme une faiblesse. No-
a également consent i à s'avouer faible devant les hommes, d'autant
plus que tous les avantages qui faisaient de lu i quelqu ' un de fort aux
yeux du monde, il les a librement et délibérément perdus (cf. Ph 3, 7- 11 ). 32 Nous déduisons la force de volonté de Paul à travers son récit dans lequel il re-
Ainsi, il se confia totalement au Christ, à telle enseigne qu ' il pouvait late s:.i vie antérieure à celle d'Apôtrc. Cf. Ph 3,4·6.
CH. Ill : RÉFLEXION THÉOLOGlQUE SUR 2CO 13.1-4 111
110 PARTIE 1 : LE CHRJSTEST PULSSANT

tons que, comme pour Je Christ, la fai blesse du croyant n'a rien avoir et morales (cf. Ph 2,3)3 5. Les évangiles sont assez instructifs sur ce sujet,
avec son vécu réel par rapport à une quelconque position sociale. LI notamment Je passage où le Christ invite les disciples à éviter tout es-
s'agit plutôt de la condition d'une personne qui, en tant qu'être de be- prit de domination propre aux chefs des nations, lesquels font sentir
soin, e reconnaît totalement dépendant de Dieu. Les croyants authen- leur pouvoir sur ceux dont ils ont la responsabilité. Il leur apprend éga-
tiques sont, de fait, ceux qui ne peuvent pas agir en dehors de la grâce lement que la grandeur se trouve dans le service tel que lui-même l'a
de Dieu, laquelle traduit la volonté de Dieu dans leur vie. Cette vo lonté vécu; lui qui est venu non pour être servi, mais pour servir (cf. Mt
de Dieu consiste à avoir la vie éternelle par la foi en Christ (cf. Jn 6,40). 20,25-26; Mc 10,41-44; Le 22,24-27).
Ceci nous amène, au demeurant, à nous interroger sur Je sens d' une Comme nous l'avons sou ligné précédemment. le com portement du
vie à la suite du Chri st. et sur la façon dont un chrétien doit se compor- Christ a suscité des réactions controversées auprès de ses multiples au-
ter afin de vivre conformément à la volonté de Dieu. Disons que, pour diteurs. Comme le Christ, Je croyant est appelé à vivre la même expé-
tout disciple appe lé à suivre l'enseignement et l' exempl e de son maître, rience de contradiction, voire de rejet et de mort, dans la mesure où il
la vie terrestre du Fils de Dieu constitue pour lui un modèle pour une demeurera fidèle à la foi en Chri st. Cette fidélité vécue dans la totale
vie dignement chréti enne. Voilà entre autres pourquoi les attitudes dépendance à Dieu peut être et a souvent été source de tribulation de
d' bumilité et d'obéissance qui ont accompagné le Christ dans sa rela- tout genre36. C'est à juste titre que Paul, reconnajssanl la grâce de Dieu
tion avec Dieu et dans l'accomplissement de sa mission doivent devenir en lui et aussi dans toutes les personnes qui croient réellement en Christ,
celles d' un croyant. parle de Ia faiblesse, mi eux, de la fragiU té de leur corps qui porte le
En ce qui concerne la qualité des rapports des uns envers les autres, trésor, à savoir la grâce de la foi en Christ, ou mieux la personne même
l'exhortation de l'apôtre Paul en Ph 2, 1-5 offre des indicati ons précises du Christ (2Co 4,7- 12). L'Apôtre sait pertinemment que cela est œuvre
et concrètes33. En effet, l 'Apôtre invite les chrétiens à adopter dans leur de la puissance de Dieu, laquelle se révèle dans la faiblesse (2Co 12.9).
relation avec les autres les mêmes sentiments que ceux qui ont an imé le En effet, cette fragilité corporelle des croyants est donc perçue à travers
Christ, tels que l' hum ilité, la charité, la bienveillance. Ces sentiments les difficultés qu'i ls rencontrent (cf. 2Co 4,8- 10). Cependant, clics ne
doivent servir de fondement à leur vie, et de repère dans leur conduite. portent pas atteinte à leur espérance de vivre avec le Christ à cause de
Certes, il est normal que leurs conduites ne puissent pas être un ifor- la puissance de Dieu (2Co l 2,4b).
mes, étant donné qu ' il y a une diversité dans la manière dont chaque Toutes ces tracasseries ont, de fait, pour but de manikster aussi bien
croyant vi t les exigences évangéliques. Toutefois, il y a moyen de ten- la vie de Jésus dans Jeurs corps (cf. 2Co 4, 10- 11) que la pu issance de
dre vers l' unüé, voire vers la communion dans !'agir, à condition que Dieu en eux (cf. 2Co 12,9). Il s'agit justement de la faiblesse vécue à
tous les croyants s'engagent à fonder leur agir sur les ent iments du cause du Christ qui révèle la présence puissante de Dieu dans la vie des
Chri st34 • Ce fai sant, ils éviteront toute attitude contraire à la vo lonté de croyants. C'est pourquoi les croyants ne doivent pas c décourager, ni
Dieu, telle que! 'orgue il, la jalousie, la rivalité, etc. Ainsi, ils estimeront, tomber dans la frustrati on face aux difficultés qu 'ils rencontrent tou-
comme le dit l'apôtre Paul, les autres supérieurs à eux-mêmes. Bien jours et partout. Ainsi. conscient de cette réalité, Paul se vante et se
entendu, il est question d'une supériorité relative aux qualités humaines complait surtout de ses faib lesses endurés pour le Christ. Et il peul sans

33 Pour le commentaire de ce passage, cf. J. GNILKA. Dl.fr !Jrie/, 38-40; G.D. Fhc, 35 Certains biblistcs ont préféré traduire la phrase de cc verset à)J..èc î1Î '!am wo
Pliilipµian s. 174-200; R. F BRIS, Filippesi. 117- 120: J.-N. ALErn. Saint Paul. épitre 4>poou1111 iû.À.~Àouç ~youµ.:voL lmepÉ;i:ovrnç Ècrnrwv par «mais par humi li té. considère
aux Pliilippicns, 118- 136. les autres comme meilleurs que vous-mêmes». Cf. NRS; voir J.-N. ALErn. Saint Paul.
34 Ceci esl bien manifeste dans la façon dont les chrétiens vivent dans le concret le Épitre m1x P/Jilippiens. 131: par <<but in humility consider others better than yourscl-
don reçu de Dieu. Les uns ont attirés par w1e vie de rauvreté en vue d'aider les plus vcs>>. Cf. G. FEE, Philippians, 189; Aussi RSV; NIV.
démunis cl d'autre. sont ponés vers !"enseignement. ver la jeunesse, vers les malades, 3<> Signalons toutefois que le Christ a averti ses disciples des situa lions de per •écu-
ver la prière, la liturgie. etc. Toutes ces façons de mettre en pratique les valeurs évan- lions au,xqucllcs ils seront afTrontés et leur a appris comment se présenter au milieu
géliques héritées du Christ sont des expressions concrètes des sentiments qui furent des gens. Ils doivent se monLrer «prudents comme les serpents et candides comme les
ceux du Christ. colombes» (cf. Mt 10.16; Le 10.3).
11 2 PARTIE r : LE CHRfST EST PUISSANT CH . Lll : RÉFLEXION THÊOLOGJQUE SUR 2CO 13, 1-4 113

gêne affirmer: «lorsque je suis faibl e, c'est alo rs que je sui s fort» (cf. du Ch rist, par la puissance de Dieu, témoigne de la li berté de la part du
2Co 12,10). Signalons aussi que l'espérance de Paul en la puissance de Christ d 'assumer sa faib lesse, car il se sait soutenu par la volon té de
Dieu affermit sa fo i, de telle sorte qu ' il peut proclamer que les tribula- Dieu. C'est cette même action de Di eu qui, chez le croyant, constitue la
tions de tous genres ne peuvent pas séparer les croyants, ni lu i-même, raison de son espérance. Ainsi, quand bien même il vivrait dans les tri-
de l'amour du Christ. Il sa it qu ' ils sont vainqueurs par Jésus-Christ qui bu lati ons, il pourrait demeurer confiant et persévérant.
les aime. L' Apôtre a, du reste, la certitude que rien ne peut les séparer
de cet amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus leur Seigneur (cf.
Rm 8,3 1-39).
En définiti ve, notre réfl exion au sujet de la réalité paradoxale des
chrétiens nous pennet d'affirmer que la faib les e dont il est ici question
constitue une situati on inéluctable, voire inhérente et donc no n étran-
gère à la vie de tous ceux qui adhèrent au Chri st. Cependant, ils accep-
tent de se mettre à sa suite de façon libre et déli bérée, car ils sont ani-
més d' une grande espérance : celle de vivre éterne llement avec le
C hrist par la puissance de Dieu.
De fait, l'action pu issante de Dieu est présentée par l' apôtre comme
la raison déterminante de la conséquence positi ve de la fa iblesse, aussi
bien celle du Christ que celle des croyants dans le Christ37. Il s'agit,
pour le Christ, de la vie à cause de la puissance de Dieu et pour le cro-
yant, de 1·espérance en la vie avec le C hrist par le fait de cette même
puissance.
En guise de conclusion de notre propos sur les dimensions christolo-
g ico-tbéologique et anth ropo logico-théologique, nous disons que l'ac-
tion de Dieu est déterminante dans ! 'accomplissement de la mission du
Chri st, ainsi que pour! 'espérance du croyant. En d'autres tennes, la vie

37 ous exposons brièvement le sens profond de la puissance de Dieu. En effet, la


puissance de Dieu manifeste sa présence et son unicité (cf. Ex 15, l l ). Face a lui, les
autre divinité sont une nullité (cf. Jr 10.3-6). car il est le seul puissant (cf. Ps 62.12).
Dieu démontre sa puissance par ses œuvres (cf. Ps 77,12-14). Cette révélation divine
vise a révéler la volonté de Dieu dans son action (cf. Ps 77, 15). Nau trouvons, en
particulier. dans cette puissance de Dieu trois réalités. D'abord. Dieu est puissant dans
la création, en tant qu ' il créa le ciel et la terre par sa puissoncc (cf. Jr 10. 12; ls 40,26).
Ensuite, Dieu démontre sa puissance dans l'histoire. La libération du peuple Israël de
l'esclavage en Egypte représente un événement central de la puissance de Dieu (cf. Dt
26.8ss). Dieu est également celui qui intronise le roi et le destitue (cf. On 2,2 1); qui
édi fie et détruit les empires de la terre {cf. Jr 18,7); qui domine comme roi des rois.
comme Seigneur de ses armées célestes (P 24,7- 1O: 47). Enfin, Dieu révèle sa puis-
i.ancc en chaque personne. En effet. l'homme est semblable à la terre glaise dan la
main d' un potier (cf. ls 29. 16). il doit donc se confier au puissant (cf. ls 63, 1).
L'homme désire la manifestation de la puis ance de Dieu (cf. Ps 63.3), qu'il reconnait
comme puissance salvifique (cf. Ps 118,14). Cf. VTB, «Puissance». 1060-1063; GE/8,
«La potenza di Dio», 129.
DEUXIÈME PARTlE

RM 14,1-9
LE SEIGNEUR EST PUISSANT
CHAPITRE IV

Le contexte de Rm 14,1-9

Dans ce chapitre de la dissertation, nous exposons trois réalités im-


portantes de la le ttre aux Romains. li s'agit de La communauté de Rome;
des questions au tour de !"épître e lle-même et de l'étude textue lle de la
péricope en examen. Cette présentation vise à déblayer le terrain de
notre an alyse du texte Rm 14, 1-9 en vue d'un travail exégético-théo-
logique. qui o it le mieux adapté au contexte des chrétie ns roma ins.

1. Le caractèr e ad /1 oc d e la lettr e
La reconstruction de la vie communauta ire de Rome ·avère néces-
aire. Elle permet de bien appréhender certaine thé ma tique déve-
lo ppées dans la lettre de Pa ul envoyée aux c royants de cette ville. Nous
pensons particulièrement à celle de la pui ssance du Christ, l'objet de
notre étude (cf. Rm 14.4-9). JI sera en effet question d 'exp oser J' orig ine
de La communauté de Rome; nota mment ses membres; les effets de
!"édit de C laude sur la communauté et de son organi sation inte rne.

L 1 La fo11datio11 de la communauté de Rome


Elle est évide nte la difficulté d 'étab lir avec certitude les ci rconstan-
ces de l'orig ine du christianisme à Rome. Cependant, il est, toutefois
ûr que les c royants en Jésus-Christ se trouvaient déjà dans la c ité lors-
que Paul rédigea a missive pour la communauté roma ine. Cette déduc-
tion découl e, entre autre, de certains ex traits de la lettre de Paul aux
Roma ins. En Rm 15,23. 1·Apôtre exprime le dés ir qui ! ' habita it de isi-
ter la communauté chrétienne de Rome. Par a illeurs, Suétone rapporte
que Claude avait expul é les Juifs de cette c ité à cause de émeute fré-
11 8 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV: LE CONTEXTE DE RM 14,1-9 119

quentes au sujet de «Chrestus» 1 en 41 av. J.-c2. Ces troubles venaient personnes qui n 'onl pas été apôtres, mais que Paul mentionne dans sa
des désaccords entre les Juifs croyant en Christ, les Gentils appelés correspondance. li s'agirait fort probablement d ' Andronicus et Junias
«craignant-Dieu» et les Jujfs indifférents au Chris t (Ac 28.22)3. Cet (cf. 16, 7)5, Priscille et Aquila ( 16,3 -4). Us étaient des Juifs. Deux hypo-
événement constitue davantage une preuve, que la présence des cro- thèses cxpliqueraienl leur présence à Rome el leur contact avec la fo i en
yants était significative à Rome avant la fin de l'année 40 ap. J.-C. Jésus-Christ. La première serait que ces Juifs avaient déjà embrassé la
Aussi ! 'écrivain Tac ite relate leur persécution survenue dans la capitale foi chrétienne en Palestine ou dans une ville de la diaspora. Ils se trou-
de l'Empire par Néron en 64 ap. J.-C.4 • Ceci montre bien que la pré- vaient à Rome soit pour des raisons personnelles, telle que le commerce.
sence des chrétiens était significative et facil ement repérable. soit pour des raisons politiques : la captivilé. Dans la deuxième hypo-
Quant â savoir qui fut à l'origine de la communauté de Rome, et thèse, il aurait été ques tion des Juifs résidants de Rome. Dans cc cas, ils
quelles furent les circonstances de sa fondation, le ch. 16 de la lettre auraient accueilli la foi en Christ lors d ' un pèlerinage effectué à Jérusa-
aux Romains nous fournit quelques éléments de réponses. Tl est proba- lem . De retour à la capitale de l'Empire, ils se serai ent engagés à pro-
ble que le premier moment de l'évangélisation soi t attribué à d'autres pager à leur tour cette foi 6.
La ques tion surg it de savoir de quelle mani ère ou selon quelle moda-
1 SlJËTONE, Claude XXV; S. BENKO. «The Edicl». Lire également J.D.G. DVNN, lité ces Jui fs convertis au Christ ont répandu le message de foi qu'ils
Romans, 1, xlix; J.A. FITZMYER, Romans, 31-32. Cependant, Cassius Dio rapporte venaient de recevoir. La réponse à cette interrogation demande de tenir
qu ' il étuil impossible de chasser de Rome une telle multitude de Juifs, et que Claude d'abord compte de plus ieurs aspects, qui pem1ettaient Je contact entre
se limita seulement à leur retirer le droit de se réunir. Cf. ID., Roman Hi.1·tory. 60.6.6-7. Rome et Jérusalem. Sous l' Empire, Jérusalem et Rome entretenaient de
Quant â . Légassc, il parle d'une fenneture temporaire de synagogues, et d'une ex- bon rapport à travers notamment la bonne collaboration entre Hérode
pulsion qui concernait seulement les responsables des communautés. C'est ainsi que Agrippa 1 et la famille impériale. Les voyages d 'affaires des Juifs à
le silence dont témoigne Josèphe trouve une explication. Il soutient également que la Rome étaient donc possibles et fréquents. Nous avons l'exemple Pris-
mention de l'expulsion totale des Juifs par Luc dans le second volume de son ouvrage:
les Actes des Apôtres ( 18,2). justifie l'exagération qui est propre à Luc. Voir ID., ci lle et Aquila. Nous savons également q uelque chose de l' institution
/'Epitre. 34-35. Le pécialiste W. Wiefel soutient le texte de Suétone qui rnpporte des taxes perçues à Rome pour le maintien du temple à Jérusalem.
l'expulsion de tou. le Juif]. du fait que Luc le ment ionne en Ac 18,2. Cf. ID.. «The Il su ffit aussi d' évoquer le témoignage au sujet des v isites des Rab-
Jewish Community», 93. Quant au mot «Chrestus», ce fut une déformation du nom bins responsablcs 7• Tout cela porte à croire que le contact entre Rome
«Christ)). Toutefois, au sujet de ce Chrestus, plusieurs hypothèses ont été avancées en et Jérusalem était fréquent. Par conséq u ent~ il apparaît normal et logi-
vue de savoir à quoi ce mot e référait. Certains pensent que, comme Chrestus était un
nom commun donné aux esclaves, aux affranchis du monde romain, Suétone aurait que que les Jui fs de Rome pouvaient facilement être mis au courant de
confondu l'appellation Christ à celle de Chrestus. Car il n'était pas familier au nom la nouveauté de l'Évang ile apportée par le Christ. De ce présupposé
Christ mais plutôt à celui de Chrcstus. Tacite a également commis une erreur sembla- découle l' idée selon laquelle la foi en Jésus-Christ était accueillie à
ble lorsqu' il décrivit l' incendie de Rome. fi appela les chrétiens par le mot Chrestia-
nos au lieu de Chris1ic111os. La première lettre de Pierre présente aussi une telle faute
d'orthographe. en ce sens que le l est remplacé par ri : cL fycuocxo9r on XPT]O:oç ô 5 Il y a des spécialistes qui soutiennent qu' Andronicus et Junias seraient les fonda-
KÙ(HOÇ ( 1P 2,3). Cf. TACITE. Annales. 15,44.2-4: S. BENKO, «The Edict», 410; teurs de la communauté chrét ienne de Rome. lis seraient des Juif.'> croyants venus de
W.L. LANI:.. «Social Perspectives». 204-205: R. PEN A. l<!trera ni Ro111(111i. l. 23; Jérusalem. Cf. J.A . FITZMYFIC Ro111a11s, 29-30 ; c. CARAGOUNIS, «From Obscurity».
E.M. SMAU WOOD, Tite Je111s, 2 10-2 16; P. LAMPE, Die Stadtrü111ische11 Christen, 6-7: 250 ; R. PJ:NNA, l euera ai Romani, l. 23. aussi n. 18-19. En effet, Ambrosiaslcr rclnte
R. BRÂNDLF R.W. STFOEMANN. <<TI1e Formation», 11 7- 11 8. que les Romu ins avaient accueilli la fo i chrétienne sans voir vu de!. signes, ni miracles
2 Cf. S. BENKO, «The Edict», 407-410: D. SLINGERLAND. «Suctoni us». 306-322: et ni même la présence des apôtres. Cf. ID., Com111e1110 alla Jettera ai Ro111n11i, 38.
R. JPWI rr. C/1ro11ology, 36-38: P. LAMPE, Die SfCldro111ische11 Christen. 7-8: L'affim1ation d'Ambrosiaster semble plausible, du fai1 qu'il y a eu bien d'autres com-
E.M. SMALLWOOD. The Jews. 2 11-216: W. WIFFEL, «The kwish Community». 93; munau1és chrétiennes dont l'origine ne fut pas l'œuvre d'un apôu·e. Tel fut le cas des
R. Pr: NNA, Romani. 1, 24-25. églises de Damase. Antioche de Syrie et celle d'A lexandrie. Lire J.A. FrTZMYER.
3 Cf. MOMIGLIANO. Claudio 66-77: E.M. SMALLWOOD. The )ell's. 2 10-2 15; Romans. 30.
P. LAMPE. Die stadr6mische Christen, 6-7; S. LÉGASSE, l'épitre. 34 ; J.A. FIT7.MYER, 6 Cf. J.A. FITLMYER. Ro111(J11S, 29; R. PENNA, Leuer(J ai Romani, 1. 23. Aussi
Romans. 3 1: $. BFNKO, «The Edict». 409. R. BRANDLE - R.W. STEGEMAN ,«The Fommtion», 117-127.
4 Cf TJ\CITE.Amwles. XV.XLIV. 7 Cf. PHn_o IS, l egatio ad Gt1i11111 156; J.A. FITZ:MYER. Romans. 29.
120 PARTI E Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT Cl 1 rv : LE CONTEXTE DE Rl\11 14.1-9 121

Rome par les Juifs un peu de temps après ses débuts à Jérusalem, jus- Par ailleurs. nous savons aussi qu'une bonne fra nge des croyants de
tement en vertu de l'existence des muJtiples contacts cl particulière- cette communauté était constituée en grande partie des e claves et des
ment grâce aux voyages des commerçants. affranchis. Cette idée nous est suggérée par le ch. J6 de l'épître, dans
S'agissant des Lieux de rencontres, nous pouvons admettre que les sy- lequel au moins quatorze des personnes citées et saluées par Paul pos-
nagogues de Rome étaient des lieux pri vilégiés où la foi dans la nouvelle séda ient les noms d'esclaves 14 • Les gens aisés dans cette communauté
religion, du moins dans ses débuts, a pu être annoncée et accuei llie!(. Ceci devraient représenter un petit nombre. En plus, dans la liste des noms
tient surtout à la présence des convertis qui venaient soit du judaïsme, trouvé dan les catacombes figurés très peu des noms romains et plus
soit du paganisme. Les croyants d'origine païenne étaient des sympathi- des noms latins. Par conséquent, Paul aurait com1u très peu des
sants de la religion juive. Luc. dans le second volume de son ouvrage, croya nts locaux à Romets.
rapporte plusieurs passages où les apôtTes fréquentent les synagogues (cf. Nous apprenons éga lement de ce même ch. 16 que les croyants de-
Ac 13,5. 14; 14, 1; 17, 1.1 0. 17; 18,4. 19.26; 19,8). vraient se réunir dans des égli es maisons. C'est le cas de la ma ison de
En effet, les synagogues, notamment cell e de la diaspora , attiraient Priscille el Aquila (v. 5), de deux groupes cités aux vv. 10-11 et aux
beauco up des Gent ils. Ceux-ci devenaient par la suite sympathi sants vv. 14-15. Ces derniers groupes seraient composés d'esclaves et d'af-
du judaïsme. Cet attrait s'exerçait non seul emen t sur les couches franchis qui se réuni ssaient probablement dans Les grandes maisons. JI
modestes de la population mais encore sur celle aristocrate9 . To utes est possible qu ' il ait eu plusieurs autres maisons que Paul, en personne,
ces personnes étaient intéressées à la coutt11n e juive, notamm ent au n'a pas connues1 6.
sabbat. à la circoncision et aux règles ali mentaires 10. Ce phénomène Nous aimerions signaler un autre fait important qui a accompagné les
d'attrait au judaïsme de la part de non-Jui fs . 'était aussi vérifié à communautés chrétiennes de Rome. Tl s'agit de leur identification aux
Rome''· Par conséquent, la prédication des disciples du Christ dans autres groupes. En effet, les mouvements des croyants en Christ étaient
les synagogues représentait un moyen excell ent pour diffuser la assimilés pendant un bon moment soit comme un groupe secondaire
Bonne nou vell e aussi aux Gentils intéressés aux synagogues 12. dépendant de la communauté juive ou du judaïsme so it comme une
nouvelle ecte' 7 . Comme le communautés juives de Rome n'avaient
1.2 les membres de la communauté chrétienne de Rome pas une structure spéciale de contrôle pour défendre leurs droits, et que
La lettre de l'apôtre Paul à cette com munauté représente une source chaque synagogue était une entité indépendance ttl , les Ju ifs se trou-
importante d'information pour connaître ses membres. En effet, à la vaient donc dans une situation politiquement vulnérable. Celle-ci ne
suite de ce qui vient d'être exposé ci-dessus nous estimons que les leur permettait pas d'empêcher les lois édictées contre les ectes et les
ch rétiens de Rome étaient composés des deux groupes de provenance collegia. Etant donné que les as emblécs des convertis en Christ étaient
confessionnelle différente, à savoi r, le judaïsme et paganisme. Il s'agis-
sait donc des Jui fs convertis à la foi en Jésus, Je Messie, et des païens riquc qui esl sortie des Gentils. Ceux-ci avaient d'abord sympathisé avec le judaïsme.
sympathisants du judaïsme, appelés les «craignant-Dieu» 13• cl étant judaïsés, ils ont accueilli l'évangile. 11 s'agit des chrétiens d'origine païenne
mais de marque du judaïsme. Le biblistc italien soutient donc que les croyants de la
cité étaient tous des <~jui f.-;-c hréticns» avec des provenances soit juive, soit païenne. Cf.
R Cf. W. WIEFEL, «The Jewish Conununity», 89; J.D.G. DUNN, Romans 1- 8, xlvi- R. PtsNNA, lmern ai Romani. 1. 3 1.
xlvii. 14 Cf. P. LAMPE. Die stadro111isclie11 Cliristen. 141-153.226; B. WI 11 llZRINGTON Il 1.
9 Parmi les aristocrates qui ont été amené au judaïsme, nous pouvons citer Flavic. Paul. 8- 11 : J.S. JFl:i;ERS, <dews», 138-150: A. PITIA. leflera ui Ru111a11i, 26.
l'épouse du sénateur Saturnin cl Pomponia Graccina. Voir F. JOSÈPHE, A111iquirés 15 Cf. J.D.G . DUNN, Romans 1- 8, 1. lii.
j11d(lïq11es XVIII, 8 1-84. 16 Cf. J.D.G. DUNN, ffo111a11s 1 ~8, 1. lii. Ce fait de se rassembler dans les maisons.
10 Cf. W. Wtl::FEL, «The Jewish Community», 88-89. et de fonner des églises maisons fai t comprendre que les convertis de Rome étaient
l l Cf. P LUTARQUF, Cicéron 7.6; CASSIUS D IO, Roman HislOIJ'. 67. 14. 1-3. très nombreux cl ne pouvaient pas se réunir dans une seule maison.
12 Cf. J.D.G. DUNN, Romans J- 8, xlvii-xlviii. 17 Cf. SUÉ t ON!::. Néro11 XV I: A. Pt ITA. lettera ai Roma11i. 25.
13 Cf. J.A. FtTZMYER. Romans, 29. R. Penna trouve que cette distinction de deux 18 Cf. W . WIEFl- L, <ffhc Jcwish Community». 91-92: P. RtCl IARDSON. Eurll' .~\'llll­
groupes au sein de la communauté de Rome n'est pas correcte. li parle d'une catégo- gogues, 90-109; A. PITIA. Leuem ai Roma11i. 26.
122 PARTIE Il : LE SEIGNEU R EST PUl SSANT CH IV: LECONTEXTE DERM 14, 1-9 123

confondues tantôt comme une ramification j ui ve 1antôt comme une Les Juifs, par contre, se seraient trouvés dans une position faible, du
nouvelle secte, elles se trouvaient également dans une position politi- fait qu ' ils devaient s' identifier avec les églises maisons des gentils, et
quement faib le. Le langage de Paul dans sa lettre aux Romains atteste, que la séparation avec la synagogue devenaü de plus en plus évidentc22.
d'ailleurs, que les chrétiens de Rome faisaient partie de la grande Cette démarcation entre les deux groupes confessionnels était prévisi-
communauté j ui ve (cf. Rm 4, 1.1 2; 7, 1). ble. Elle a fi ni par conduire les croyants en Christ présents dans la cité à
affirmer leur propre identité par rapport à la communauté juive d'où ils
1.3 Conséquence de l 'édil de Claude sur la communauté étaient issus. Paul montre, de fa it, que les chrétiens. notamment les
Genti ls, n'étai ent pas sujets à la circoncision (2,25) bien qu ' ils aient dû
Nous avons précédemment évoqué que les Chrétiens de Rome étaient penser à Abraham comme leur père dans la foi (4, 1.12) et qu 'i ls soient
cons.idérés comme fa isant partie de la communauté juive. De cette façon, devenus experts de la loi (7, 1). Car cette pratique était l' apanage des
la loi promulguée par Claude en vue de chasser de Rome les Jui fs Juifs proprement dits. Les éléments ci-haut évoqués nous conduisent à
concernait aussi les Juifs chrétiens. L'on se rappell era le cas de Priscille nous inte1Toger sur la configuration de la conununauté chrétienne de
et Aquila, ce couple juif chrétien qu.i a dû quitter suite à l'expulsion qui Rome. En plus de la présence de deux ethnies qui forma ient la commu-
décou lait de l'édit de !'Empereur (Ac 18,2). Si nous nous en tenons au nauté de Rome, il y avait également deux factions relatives à la pratique
tex te de Suétone et au récit de Luc (Ac 18,2), nous souscrivons à l' hy- de la foi. Notre affirmation découle de ce que l' Apôtre décrit dans la
pothèse selon laquelle l'expulsion de beaucoup de Jui fs par Claude a fait section 14, 1- 15,13. Il s'agit précisément du groupe des chrétiens dits
que les églises maisons étaient majoritairement composées des Gentils 19• faib les et de celui des forts dans la foi.
Par ailleu rs, nous pouvons supposer que ces Gentils ont dû attirer La question qui se pose e t celle de savoir a quelle ethnie appartenait
d'autres personnes d'origine pa'.ienne. Cependant, les Jui fs chassés de la faction des faibles. A ce sujet, les positions des biblistcs se placent
Rome y étaient retournés en grand nombre après la mort de Claude en dans trois perspectives différentes. La première est celle suggérée par la
54 ap. J.-C. Parmi ce Juifs rentrés, figuraient Priscille et Aquila, An- majori té des exégètes selon laquelle les fa ibles dans la foi seraient des
dron icus et Junia et d' autres Juifs dont Paul parle au ch. 16. Toutefois judéo-chréticns2.l. Ces dcm iers seraient restés lier à l'ob ervance de la
la convivia lité entre le groupe judéo-chrétien de retour à Rome et les
et hnico-chrétiens qui y étaient restés n'aurait pas été faci le2°. En effet,
le fait qu'à leur retour à Rome. Priscille et Aquila avaient établi une pées en dehors de la ynagogue. Paul aurait donc êcrit à ce nouveau type de commu-
nouvelle égli e maison serait un indice de ce rapport difficile entre le nauté, où les j uifs-chrétiens étaient minoritaires pour exhorter l~s eUmico·c h~ét icns à
vivre en hannonie avec les juifs-chrétiens. Cf. Lo.. «The Jew1sh Community», 96:
différents groupes ethn iques qui composaient la communauté de Rome. aussi P. STUllLMACll ER, «The Purposc of Romans», 235. R. Penna, pour sa part, fait
Cette ituati on diffici le dont les Juifs étaient victime justifierait les pro- ob crver que cette hypothèse. scion laquelle la communauté chrétienne de Rome
pos de l'A pôtre en 11 ,17-2 1. Dans de ce passage, Paul a voulu mettre serait majoritairement composée des GentHs, est discutable. Pour réfuter cette hypo-
en garde les Gentils contre tout sentiment de supériorité envers les frè- thèse, le bibliste italien évoque le témoignage de deux écriva ins antiques. Josèphe et
res Jui fs. Il sied. en outre, de noter que les éthnico-chrétiens seraient Dio. Il affinne que Josèphe ne fai t pas allusion à l'expulsion des Juifs; Cassius Dio,
maj oritaires lorsque Paul a écrit à la communau té de Rome21• quant à lui. rapporte qu ' il s·agissait seulement <le l' interdiction de se rassembler. En
ce qui concerne le récit de Luc en Ac 18,2, où l'auteur du troisième évangile et des
Actes des Apôtres parle de l'expulsion de «tous les Juifa». Penna aflirm c que cela
19 Cr. W.G. KüMMPL. /11troductio11, 309-3 11 ; B.E. 0ROWN, An /111rod11ctio11. 109; relève ~i son style hyperbolique. Il soutient donc que la communauté de Rome était
G. BORNKAMM, <ffhc Lettern. 18-19; P. STUllLMACllER, «The Purpose of Ro- composée des Jui fs-chrétiens. Car, bien qu' ils soient venus des cultures différentes
mans», 235 . (païeDne et juive), leur foi en Jésus-Christ possède la même matrice, à savoir le ju-
20 Cr. W. WI EFEL, «Tbc Jewish Community», 94-95. daïsme. Il s'agit par conséquent d' un seu l groupe du point vu de la foi dans celle
21 Le spécialiste W. Wiefcl est de ceux qui soutiennent cette hypothèse. Il anirmc, communauté. Cf. ID., l ellera ai Romani. 1, 26-3 1.
premièrement, que l"édit de Claude consistait à expulser tous les Juifs de Rome, y 22 Cf. P. LAMPE, Die S1ad1romische11. 8-9; W . WlEFEL, «The Jewish Community»;
compris les chrétiens juifs: deuxièmement. que Néron avait révoqué les mesures de 93-96; J.D.G . DUNN, Romans 1- 8. liii.
Claude; ce qui a pennis aux Juifs de rentrer à Rome. Cependant. les croyants d'ori- 23 Cf. 0. MICHI 1. Der Brief. 334; R. JEWE1T, Paul, 42-46; E. KÂSF\1A \N, Co111-
gine païenne étaient devenus plus nombreux et leurs communautés se ont dêvelop- 111em01y, 368-369; U. WILCIŒNS. Der Brie[. 109-11 5; F. WATSON, Paul, 94-98;
124 PARTΠIl : LE SEJG~EUR EST PUISSANT Cii iV : LECONTEXTE OERM 14, 1-9 125

loi de Moïse. Concernant la deuxième hypothèse, les faibles feraient En conclusion, nous retenons brièvement les caractéristiques sui vantes
partie des ethnico-chrériens. Les tenants de cette position affinnent que pour la communauté de Rome. Elle n'était pas le fruit du travail d' un
ces chrétiens païens ne se seraient pas éloignés de leur pratique précé- apôtre, comme ce fut le cas pour d'autres communautés pauliennes. Elle
dente des religion mystérieuses gnostiques et hellénistcs 24 . La troi- était constituée des difTérents groupes d'autonome. tout en étant tribu-
sième perspective est celle proposée par ceux qui affinnent que les fai- taire de la doctrine judéo-chrétienne27 . Elle ne tenait plus ses assemblées
bles de la communauté de Rome seraient des membres provenant de dans les synagogues mais plutôt dans des maisons privées (cf. ch. 16).
deux ethnies: judéo-chrétiens et cthnico-chréticns 25. Cc spécialistes Lors de l' incendie de Rome en 64 ap. J.-C., les responsables de cet acte
s'appuient sur le lieu où ces chrétiens païens ont accueilli la foi. C'est à étaient cherchés et condamnés non pas parmi les Juifs mais panni les
travers leur relation cordiale qu' ils entretenaient avec le judaïsme. A chrétiens de RomelB. Cela montre à suffisance combien la distinction
partir de cette relation, ils ont eu connaissa nce de la loi mosaïque et entre ces deux différents groupes rel igieux était bien manifcs tc29.
qu ' ils aura ient continué à observer étant chréti ens.
Quant à nous, notre position s'insère dans cette dernière hypothèse. 2. La lettre aux Roma ins
Nous affirmons à la suite de ces biblistes que les croyants faibles au Après la présentation des événements qui ont caractéri sé la com-
sein de la communauté de Rome seraient auss i bien des judéo-chrétiens munauté ch1·éticnnc de Rome, notre effort d'investigati on se concentre-
que des ethnico-chrétiens. ra. à présent. sur l' ana lyse de l'ensembl e de l'écrit de Paul. Pour ce
faire, nous procéderons par exposer d'abord l' auteur de l'épître, ensuite
1.4 la structure interne de la communauté ses destinata ires, sui vi des circonstances qui ont favorisé sa rédaction,
L'église de Rome était constituée de plusieurs groupes internes. de la date de sa rédaction. de la question de son intégralité et enfi n de
Etant de provenance hébraîque. chaq ue groupe reflétait en quelque sa structure. La connaissance de ces éléments nous permettra d'élucider
sorte le modèle d'organisation interne d' une communauté juive. Le davantage l'écrit de Paul aux Romains. Ainsi nous pouvons bien déli-
moin · que l'on puisse dire, en défini tive, au uj et de cette structure in- miter l'emplacement de la péricope de notre étude (Rm 14.4-9) dans
terne, c'est que les croyants de Rome se rassemblaient dan des mai- l'ensemble de la lettre.
ons pri vées. Le président devrait être le chef de la fami lle de la maison
qui les accuei ! lait. Comparativement à l' organisation interne de la com- 2. 1 Destinateur de la lettre
munauté juive, surtout par rapport à son gouvernemen t, la structure L 'apôtre Pau l a écrit sa lettre aux chrétiens de Rome, qui étaient
chrétienne était plus souple. [J y a certes quelques ressemblances mais constitués de deux groupes ethniques différents. li s'agissa it des chré-
plus des divergences. Ceci s'expliquerait du fait que la communauté tiens d'origine juive: les judéo-chrétiens, et ceux d'origine païennes :
des convertis constituait un groupe moin. nombreux rela ti vement à les ethni co-chrétiens. A travers certains passages de sa correspondance
ce lle juive. Une autre rai son, la plus importante, à notre humble avis, avec cette communauté, il apparaît clairement que Paul avait une idée
est ce lle de la grande ouverture et di sponib ili té à l'action de !'Esprit claire de la composition des chrétiens dans la capita le de l'Empire ro-
Saint (cf. 12, 11 )26. main. Cela se révèle à travers le message même de la lettre.
D' une part, Pau l s'adresse aux Gentilli, notamment en 11 , 1J-32 et
15.7-1 2. D'a utre part, il parle à toutes les deux composantes de la com-
J.0.G . O UNN, Romanos 9- 16. 795-800; P.J. Î UMSON, Patti, 195.244-245 ; munauté, lorsqu' il aborde particulièrement les questions concernant la
J.A. FTT7MYrR. Romtms, 687: J.M.G. BARCLAY. «Do Wc Undcm1inc lhc Law». 287- relation entre les deux groupes ethniques (cf. Rm 1, 16), la compréhen-
308.
24 Cf. W.G. K OMMl:'. L !ntrod11ction, 3 10-33 1: S . K. TOWERS, A Rereading, 3 17-23.
25 Cr. M.-J. LAGRANG E, Romains. 338-339; J. HUOY, Saim Paul. 453; S. LYON rET.
l es Epitres, 126; A.J .M. WEDDERB UR?-.. The Reaso1t~. 30-35: J. ZIESI ER, Paul, 324- 27 Cf. R. PE:'llNA, Leuera ai Romani. 1. 38.
327. 28 cr. TAC I rE. A1111. XV, X LIV.
26 Cr. R. P ENNA, lenera ai Romani. 1. 38. 29 Cr. J.C. W AI f FRS, «Romans». 179-182 .

......
126 PARTIE CJ : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE RM 14. 1-9 127

sion de l'Évangi le qui ne concerne pas seulement les Juifs (Rm 2- 5) tes, Paul aurait écrit sa lettre aux Romains pour s'occuper d'une situa-
mais aussi les Grecs. Ceci est dans l'espoir que tous les deux peuples tion concrète dans la communauté de la capitale de l Empire romain34.
puissent ensemble glorifier Dieu (cf. Rm 15,8- 12). Pour d'autres. la rédaction de la lettre serait motivée par 1.a situation
Toutefo is, la question se pose de sa voir comment Pau l a pu connaître personnelle de I' ApôtreJ5.
la réalité interne de la communauté, alors qu ' il n'en était pas le fonda- Si nous nous en tenons à la première approche, la question se pose de
teur et qu' il ne l'a même pas en,core visitée. La réponse à cette interro- savoir comment l'apôtre des Genti ls était info rmé de la situation con-
gation est d'ordre conjectural. Etant donné qu ' il y avait des personnes Oictuelle de la communauté qu ' il n'avait ni fondée et moins encore
qui voyageaient pour Rome en passant par Corinthe, il est probable que visitée. En effet, sa lettre ne dit rien au sujet de ceux qui l'auraient in-
Paul ait reçu des nouvelles de la part des voyageurs chrétiens30. Quoi- fom1é de la vie communautaire à Rome. Cependant, nous pouvons pen-
qu' il en oit. cette question en suscite une autre: ceUe relati ve aux mo- ser que Pau l aurait été mi s au courant par ses amis et connaissances36.
tivations qui auraien t condui t Paul à écri re cette épître. Ceux-c i pourraient bien être, soit des Juifs chrétiens qui ont dû quitter
Rome suite à l'édit de Claude, en l'occurrence le coupl e Prisci lle-
2.2 Occasion de la lettre Aquila, soit des voyageurs chrétiens qui faisaient de navetles entre Co-
li est difficile de détermiDer avec beaucoup de certitudes les raisons rinthe el Rome. Ceux-ci lui auraient, pour ainsi dire, raconté, non seu-
qui ont amené l'apôtre des Gentils à rédi ger l'épître aux Romains. Cette lement la situation interne de la communauté mais encore les critiques
difficulté est due au fait que cette lettre, comparati vement aux autres de ses adversaires contre lui et son évangile. Il est, donc, fort probable
écrits authentiques de Paul, ne s'explicite pas par elle-même les moti-
vations de !'Apôtre à la rédiger3t. En effet, les investigations à ce sujet 34 Les exégètes tenants de ccne hypothèse soutiennent, en effet. que le retour des
se trouvent dans un état de confusion32. De toutes les solutions qui ont chré1iens juifs à Rome, après avoir été expulsés par Claude. avail soulevé le problème
été proposées pour résoudre cette aporie, aucu ne ne semble se recouper de convivialité au sein de la communauté chrétienne entre les ethnico-chrétiens dits
avec l'autre, ni donner pleinement sati sfaction. Cependant, l'état actuel les forts, et les Jui fs chrétiens tenus pour des fa ibles. 1- 'apôtre Paul leur aurait écrit
de la recherche présente deux approches plausibles pour répondre à pour les exhorter au respect et o lu communion réciproque (Cf. 14, 1- 15, 13). Cf.
P. MINEAR, Obedie11ce, 1-2; W. WI EFEL, «Jewish Community», 94-95;
cette question ép ineuse de l'occasion de la lettrc33 . Pour certains exégè- K.P. DONFRIFD, «False Presupposi1ions», 105; R. PENNA.• lettera ai Romani, I, 46.
35 Il est de ces spécialistes qui voient dans la lettre un rel1et de la situation de
l'Apôtre. Ce dernier relate au ch. 15 d'avoir achevé la mission qui lui a été confiée
30 Cf. J.D.G. DUl\N, Romans 1- 8, 1. xlv. dans la partie est de l'Empire romain. Il était donc en mesure de réaliser son projet de
31 cr. G. KLEIN. «Pau(') Purpo C». 29. P. Stuhlmachcr pense que la question reste visiter Rome et d' aJler en Espagne. Cependant. il devait avant tou1 se rendre à Jéru a-
irrésolue en raison de propo apparemment contradictoire de Paul en 1, 15 et 15.20. lcm pour apporter l'argent des églises de Macédoine et d·Achaïc en faveur des chré-
D' une pan. !'Apôtre parle de son empressement à annoncer l'évangile à Rome (1.15). tiens pauvres de l'église mère. Paul était néanmoins inquiet du résultat de on voyage.
D'autre part. il tient à limiter son activité apostolique aux régions où le nom du Christ li craignait qu ' il ne soit pas accueilli et que cette ajde financière ne soit pas non plus
n'était pas encore évoqué. Il veut par là éviter de bâtir sur des fondation posées par acceptée par l'église de Jérusalem. Aussi demanda+il aux chrétiens de Rome de le
autres ( 15 ,20). Stuhhnachcr affinne que la solution à cette question se trouverait dans outenir dans leur prière (cf. Rm 1, 1- 15; l 5, 14-33). Cf. W. MARXSEN, Ei11/eiru11g, 85-
la mesure où une explication sa1isfaisante de la relation entre les propos de Puul en 88; G. BORNKAMM, «The Lettern, 17- 18; J. JERVELL. <<Letter 10 Jcrusalem». 56-60;
1. 15 et 15.20 sera il donnée. Lire ID., <<The Purposc of Romans». 234. Quanl à nous. C. 11. Dooo. Ro111a11s. XXV: U. VANNt, «Lettera ai Romani», 1377. Soulignons que,
nous souscrivons o l' hypothèse de ceux qui pensent que les raisons qui se trouvent en dépit de l' incertitude du climat d'accueil qu'il trouverait à Jérusalem, Paul tenait à
dans la lettre ne suffisent pas pour justifier l'occasion Je sa rédaction. Il y a eu proba- s'y rendre en raison de l'accord qu ' il avait avec les colonnes de l'église mère. Ce
blement d' autres raisons, que nous ne saurons peut-être pas à cause de la pénurie d'in- contrat consistait à songer aux chrétiens de Jérusalem (cf. Ga 2. 10). Certains spécia-
formation . Voir aussi K.P. DONFRIED. The Romans Dehare. lxx: S. LÉGASSE. l 'épître. listes favorables â cette interprétation pcnscnl que Paul, à travers a lettre, visait à
38; R. PEN:-JA, leflera ai Romani. l, 46. impliquer les chrétiens de Rome dans son travail missionnaire. Cf. G. BOR KAMM.
32 Cf. S. Luz. c<.Zum Aufbau von Rom 1-8», 165; K.P. Do FRŒD, «False Prcsup- «The Leucm. 17: aussi G. SCHRENK. «Der Rômerbrief». 8 1-106. D'autres. par contre,
positions», 102: W .S. CAMPBELL. «Romans lll». 25 1. croien1 que la lettre aux Romains serait envoyée à plusieurs communautés. Voir
33 Cf. K.P. OONFRll::D. «false Presuppositions». 102: G. KLE11 . <<Paul 's Purpose». R. JEWETT, A111'1ropological Term. 4 1-48; T.W. MANSON, «SI. Paul's Lettem. 15.
29-30; S. LÉGASSl, l'épître. 38-39. 36 Cf. S. LÉGASSE, l ·épître, 40. R. PENNA, l ettera ai Romani, 1, 4 5.
128 PARTLE li : LE SEJGNEUR EST PUISSANT CH TV : LE CONTEXTE DE RM 14.1-9 129

que, les prises de positions des amis ainsi que des adversaires de Paul de Macédoine et d' Achaïe avaient achevé la requête d'argent pour l'é-
aient influencé en quelque sorte son écrit37. glise de Jérusalem. De cet indice, il ressort que r Apôtre se trouvait en
A partir des nouvelles en sa possession, Paul attrait craint que les Grèce. En effet. Luc raconte que Paul s'était rendu à Jérusalem pour
conflit qu ' il a connus en Galatie, aux Philjppes et à Corinthe avec les mis- apporter des aumônes des croyants de la Grèce (cf. Ac 24, 17). C'était
ionnaircs jui fs chrétiens puissent se propager à Rorne38. Ainsi il serait donc à pamr de la Grèce qu ' il était parti (cf. Ac 20,2).
devenu impossible pour lui de se rendre dans la communauté de la métro- Néanmoins, il reste à préciser la question au sujet de la ville grecque
pole. dans laquelle Paul se trouvait. Nous tirons les éléments de réponse à
Si cette hypothèse est plausible. alors la compréhension des diverses in- partir des trois. noms mentionnés au ch. 16 de la lettre. li s'agit de Phé-
terrogations et affirmations de Paul dans la lettre devient facifo39. L'on bée, Gaïus et Eraste. Phébée fu t une diaconesse de l'église de Cenchrée
comprendra bien que Paul pu isse exposer les arguments bien détaillés en (cf. 16, 1-2). Cenchrée était un des ports de la ville de Corinthe et il se
vue de dissiper les propos calomnieux de ses opposants avant qu' il trouva it à l'est de la ville. Gaïus accueillait Je rassemblement de toute
n'arrive à Rome. Etant donné que la communauté de Rome était constituée l'église de Corinthe dans sa maison (cf. 16,23a). Éraste était le trésorier
de plusieurs groupes qui se réurussaient en église-maison, la lettre de Paul de la cité de Corinthe ( 16,23 b). Par conséquent, la ville de Corinthe est
aurait circulé dans chacune des ceLiules. Les chrétiens auraient éga lement le seul endroit probable qui serait reconnu comme le lieu où Pau l a écrit
entendu parler de l' histoire de Paul avant et après la conversion : du persé- sa lettre aux Romains et l'aurait envoyée par Pbébée ( l 6, 1)40.
cuteur des chrétiens à l'apôtre du Christ. Priscille et Aqu ila leur avaient En se rapportant à la date de sa composition, les spécialistes partent
certainement parlé de sa P.rédieation et sa mission. Car ils avaient travai llé de l'année du décès de Paul. Ce dernier serait survenu entre les années
ensemble à Corinthe et à Éphèse (cf. Ac 18, 1-4.18). qui vont de 58 à 68. Cc résultat découle de deux sources anciennes :
celle de Jérôme et cell e d'Eusèbe qui relatent le temps de la prison de
2.3 lieu et date de la composition de la lettre l'apôtre des nations. Selon Jérôme, Paul serait prisonnier à Rome dans
Nous pouvons affirmer avec plus de probabilité le lieu de la rédac- la deuxième année de Néron41 • LI s'agirait d'octobre 55 à octobre 56.
tion de l'écrit de l'apôtre des nations aux fidèles de Rome à partir de Ai nsi, les deux années de prison de Paul correspondrait à 58. Cette an-
quelques indices. Ces derniers se trouvent dans la lettre même aux Ro- née serait aussi 1'année de sa mort.42 . D'après Eusèbe, la mort de I 'A-
mains et dans le econd volume du livre de Luc. En Rm 15,25-26, nous pôtre serait passée en quatorzième année de Néron. Celle-ci se situerait
apprenons que Paul s'apprête à se rendre à Jérusalem, car les croyants entre octobre 67 et octobre 6843. Par conséquent, la date de la rédaction
de la lettre aux Romains serait vraisemblablement en fin 54 et début 55
ou bien en fin 57 et début 5844 . Car nous ne devons pas perdre de vue
37 Rnppelons à ce propos que les détracteurs de Paul semient ces Juifs chrétiens
mécontents. qui n'étaient pas d'accord avec sa prédication et sa mission. Cc désagré-
ment aurait commencé depui l'assemblée apostol ique de Jérusalem, durant laquelle
!"Apôtre a défendu la cause des Gentils par rapport à leur adhésion à la foi en Jésus- 40 Cf. G. OORNKAMM, «The Letter», 16; P. STUllLMACl lER, «The Purpose of Ro-
Christ. et surtout sa réaction envers l'attitude ambiguë de Pierre à Antioche (Ga 2. 11 - mans», 236: D.J. Moo, The ,Epistle. 3; R. PENNA, Leu era ai Ru111a11i, 1. 5 1; A. PrrrA,
14). La déduction au sujet de la présence des opposants de !'Apôtre dans la commu- Letlera , 2 1; S. LÉGASSF.. L 'Epître, 940: R. J EWETT, Romans. 18.
nauté de Rome découle de certains extraits de la lcllre. En 3,8, par exemple. nous 4 1 Cf. R. PllNNA. leftera ai Romani. 1, 51.
lisons que Paul, exaspéré à cause des diffamations de ses <lênit,rreurs, déclure qu'ils 42 Cf. R. Pr!NNA, Lettern ai Romani. !, 51.
sont dignes de condamnation de Dieu. En 16.17-18. Paul invite les chrétiens de Rome 43 Cf. EUSÈBE. Cltro11ic:o11 2: R. PE NA. Lettera ai Romani, 1, 5 L.
à la méliance envers ceux qui s.èment les discordes, du fai t quïls s"opposcnt <l l'Évan- 44 Cf. R. Pr A, Leftera ai Romani. l. 51: A. PtTTA. leftern. 20. Les tenants de la
gile qui a êtê prêché là-bas et que Paul était cntiérement d'accord. Cf. J.D.G. Du N, date 55 pour ln rédaction de lu lettre : voir L. MORRIS, Tite Epistle. 6-7: C.K. BAR·
Rv111a11s 1-8. '· xlv: P. STUl lLMACllER, «The Purposc or Romans». 236: S. LÉ.GAS E. RETr. A Co111111e11tary. 5. Ceux qui la placent en 56: cf. M.-J. LAGRANGE, Saint Pt111/,
L 'é~irre. 40. xx: D. ZELLER. Der Brie/, 15: 1. H EIL. Pau/'s Letter, 6: J.D.G. DUNN, Romans, 1, xli ii.
8 Cf. J.D.G. DL. N. Romans 1-8. 1. xlv: S. LÉGA SF, L'épitre. 40. U y a également ceux qui sout iennent la date de 57 : lire F.F. BRUCE. Tite Epistle, 15-
39 Par exemple les assenions et demandes en Rm 1, 16: 2, 16: 3.3 1: 4.1; 6. 1. 15: 16: B. BYR E, Recko11i11g witlt Romans. 17. Quant à raonée 58 comme date de la
7.7. 12. 1-t rédaction de la lettre aux Romains, cf. W. SA. DAY - A.C. liEADLAM. A Critica/ and
130 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE RM 14.1-9 131

que, d 'une part, }'Apôtre a dû écrire quelque temps avant de partir de Par aill eurs. il s'est aussi posé la question de l'origine de ces interro-
Corinthe à Jérusalem, el, d 'autre part, il est resté comme prisonnier à gations. Selon toute probabi lité, ces dernières décou lent de la diversité
Rome pendant deux ans. des fo nnes textue lles qu 'a connue la transmiss io n de l'épître aux Ro-
Il y en a également ceux qui suggèrent comme date de la rédaction la mai n . Marcion serait à l'origine de cette divers ité. En effet, en croire
dernière moitié de l'année 50s. Jewett, quant à lui , affim1e que si nous Origine, Marcion avait supprimé les deux chapitres de la fin , car il vou-
partons de l'éd it de C laude, il y a une grande probabilité que la date de lait. que la lettre soit tem1inée avec le ch. 14 ( 14,23). Ce chapitre serait
la composition soit en hiver 56-57 ou le printemps 5745. pla isant et conforme à sa théologie51 • Ainsi, nous pouvons comprendre
q ue la lettre aux Romains soit transmfae à travers une diversité des
2.4 L'intégralité de la lettre fonnes textuelles et que certai ns textes contiennent seulement les ch.
L'unité de la lettre de Paul aux Romai ns est acceptée par bon nombre 1, 1- 14,23, 16,25-27 et que d 'autres puissent avoir le passage de 16,25-
des biblistes 46. Ces exégètes voient une cohérence dans l' argumentation 27 dans dif!"é~eates placess2. Par conséquent, l"hypothèse selon laquelle
de L' Apôtre. Cependant, la question de la totalité de cet écrit te l que la fo~ne on gmale de la l~ttre aux R omains sera it constituée des quinze
nous l'avons dans nos bibles a déjà posé problème j usqu 'aux années chapitres sans la doxologie ne peut plus tenir53.
19704 7• C'est à partir de cette période que des tentatives des réponses .Quant au problème relati f à l'aspect li ttéraire i11 terne de la lettre, cer-
avaient été amorcées en termes d ' hypothèse. Il s'agissait des questions tams exégètes mettent en doute l'intégra li té de la forme actuelle de la
liées à la fonne du texte tel qu'il a été transmis et à l'aspect linéraire lettre aux Romains. Sur que l é lément fondent-i ls leur doute? En guise
interne. de réponses. d~sons que, d ' une part. ces spécialistes trouvent q u' il n'y
Concernant la forme du texte, le problème se situait au niveau de la a pas d ' hannome enrre le ch. 2 et d 'autres chapitres de la lettre. D' autre
présence du ch. 16 dans la lettre. Beaucoup de spécialistes soutenaient part, ils s' interrogent s ur la fonct ion du ch. 5 dans le développement de
que le chapitre ne faisait pas orig inairement partie de la lettre aux Ro- l'argument général de la lettre. De ces observations, ils concluent que la
mains, et qu 'i l s'est agi ua ajout tardiF~. Ce chapitre serait, par contre,
des salutations envoyées à l'église d 'Ephèse49 . Quant à la doxologie
cette doxologie figure deux fois, après 14,23, 15,33. ou 16,24 . Voir pour cela
présente en 16,25-27. la question éta it de savoir si eUe ne faisai t pas P. ~ AMP I~ . «Zur Texlgesehichtc», 273-277; R.F. COLLINS, «The Case». 293-302.
partie de la fin du ch. 14 ou i sso. 1 ('f. T.W. MANSON. <<Romans». 8-1 1: K.P. DONFRIED. «A Short Note», 49-50;
R. Jewett ~uppose que du tempi. d'Origène. la doxologie se trouverait après 14,23 et
16.23. VolJ' lo .. Roman.ç, 5. 11. Lietzmann a. pour sa part, aflim1é que la doxologie ne
i.e trouvait pas dans la fonne originale de la lettre aux Romains. a prêsence dans les
Exegetica/ Comme111a1:v. xiii; T. ZAHf\, Der Brie(. 20-21: O. MICIŒL. Der Brie{. 27- quatorze versets de la lettre serait réali:.ée ultérieurement par les cercles de Marcion.
28: J.A. FtTZMYER. Romans. . Car 1.a leure manquait de conclusion. Lire Io., Ei11fiihr1111?,, 130-1 3 1; E.J. Err, «The
45 Cf. R. JEWl:.TI. Romans. 18. Mull1valcnce». 262. Cette hypothèse joint l'analyse de Lampe qui représente de la
46 Cf. J.0.G. DUN'l, Romans I . 1, lxii-lxiii; W.S. CAMPBELL «Romans>>, 252: mani~rc su iv~nre La .fo~1e originale de la lettre: l.1 - 16,23 + 16.24. et affinne que
R. J EWEIT. «Following the Argument» 265-272; ID.. Romans. 23-24: R. PENNA. le1- Marcion avait suppnmc les ch. 15-16 et que la conclusion finale en 16.25-27 était
tera ai Romani. 1. 60-76: A. PITIA, Letrera t1i Ro111c111i, 27-28. Signalons que Penna ajouté par la suite. Cf. P. LAMPE. <<Textgcschichte», 273-275. Lire aussi O. TROBISCH.
n'est pas de la matrice rhétorique, quoiquï l souligne l'importance de l'emploi de Die E111s1elw11g. 63-65.
certe méthode ùans la lettre aux Romains. 52
La diversité de!> formes des textes rapportées par les manuscrits de la lettre aux
47 Cf. R. J EWërl . Ro111a11s. 8. Romains pourrait se regrouper en trois versions des textes. Il y a la version compre-
4 !! Cf. J.A. F ITZMY l!R. Romans, 57.
nant quatorze chapitres ( 1 14) attribuée â Marcion par Origine. Elle était très répan-
49 Cf. T.W. MA SON, «St. Paul's Lettem, 13; E.J. ÜOODSl'liED. «Phoebe's Letter of due dans les communnutês de Marcion. Une aulre version est celle attestée unique-
4
Introduction». 55-57. ment par le manuscrit P i;. Elle serait datée au llème siècle et contient les ch. 1-15 et
50 Cf. D.J. Moo. The Epistle. 6-7: R. J EWETT. Romans. 8: W. MARXSFN. Einlei- 16,25-27. La versio~ la plus longu7 est celle qui contient seize chapitres (1-16) et se
ttmg, 99-100: W. SCllMITllALS. Rômerbrief. 138-147. Signalons que. dans un cer- trouve dans notre bible. Cette version est exposée dans les meilleurs codex : Sinaiti-
tain groupe de texte, celle doxologie ne c trouve pas. Dans d'autres, par contre, elle c11s53Vatica11us. etc. Cf. P. STIJlll Mi\ Hl:.R. «The Purpose of Romans», 234.
est placée après 14,23, après 15 ,33. après 16.23, ou après 16,24. Pour certains textes. Cr. R. J EWETT, Rom(lnS. 5 n. 29.
132 PARTLE U : L E SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV : L E CONTEXTE DE RM 14. 1-9 133

lettre aux Romains présente des incohérences internes. Par conséquent, 2.5. J Structure littéraire
ils affim1ent que ces manques de Logique s'expliqueraient si l'on admet
Parmi les tenants de la structure li ttéraire qui trouvent dans l'épître
l'existence de deux ou plusieurs lettres originellement séparées dans la aux Romains une lettre cohérente, nous rapportons ici Je propositions
lettre canonique aux Romaias54 . de Dunn et de Campbell.
Le bibliste W. Schmiù1aJs, ea particulier, soutient que la correspon-
dance de l'apôtre des Gentils aux Romajns serait une combinaison de a) Approche de Du1111
deux lettres originairement séparées. LI présente de la manière suivante Dunn. pour montrer la dimension harmonieuse de la lettre, a mis en
ces deux lettres : la lettre A : 1, 1-4,25; 5, 12- 11.36 et 15,8- 13; la lettre év idence Je fil conducteur de la pensée de Paul59. Il soutient que l' uni té
B : 12, 1-2 1; 13,8- 10: 14,l- J5.4a.7.5f-6: 15.1 4-23; 16.21-23; 15.33 55 . Il de l'écrit de I' Apôtre aux Romains est perçue à travers ce fil conducteur
y a également des exégètes qui ont identifié des interpolations dans le «du Jui f d'abord, puis du Grec» (cf. 1, 16)60 . Ce motif s'entremêle avec
texte. J. O' Neil voit ces interpolations dans les passages tels que 1, 18- l'emphase thématique principale: celle de la justice de Dieu et l'em-
2,29; 5, 12- 2 1; 7, 14-25; 9, 11-24; J0,7- 15, IJ56. M. Schenke, quant à lui , phase thématique secondaire : celle de la loi. De son analyse, Dunn est
est d'avis que les ch; 14, 1- 15, 13; 16,3-20 étaient originairement adres- arri vé à la conclusion que la cohérence structurelle de la lettre se trou-
sés aux chrétiens d' Ephèse57. vera it dans la dimension théo logique de l'argumentation de Paul. Car
Toutes ces hypothèses s'avèrent injustifiées, étant donné que la cohé- Dunn vo it dans cette dimension théologique la moti vation de l'acti vité
rence de la lettre a pu être démontrée à travers les études faites sur sa struc- missionnaire de Paul. Selon lui, I' Apôtre était convaincu que le projet
ture. Pour en savoir plus, nous allons, à présent, exposer quelques unes de de Dieu était de sauver les hommes de leur condition de pécheur. Par
ces analyses de deux différentes méthodes: littéraire et rhétorique. conséquent, cc desse in de Dieu en Christ concernait non seulement les
Jui fs mais encore les Païens. Ainsi, l 'Apôtre affi rme la parité entre
2.5 Str11c1ttre de la lettre Genti ls et Juifs par rapport à la j ustice de Dieu et à l' héri tage qui a été
Cette section de notre travai l s'occupera de présenter les différentes promis à Abraham et Jacob. Cette parité est bien mani feste par l'emploi
manières d'envisager la dispositio (structure) de la lettre aux Romains. de tout/tous qui renvoie à ces peuples : Juifs et Gentils (cf. 1, 16. 18,29;
Nous exposerons ces approches selon deux diverses orientations. Il s'a- 2,9- 10; 3,9.12.20-23; 4,11. 16; 5, 12; 10,4.11-1 3; 12,6)61.
gira de l'orientation relative à l' aspect littéraire de l'écrit et celle rela- Le bibliste anglais justifie son hypothèse à travers le couple thémati-
tive rhétoriques&. que «du Jui f d'abord, puis du Grec» de la maruère sui vante: en 1, 18-
3.20, Paul fait voir que Juif comme Gentil ont besoin de la grâce de
Dieu. En 3,21- 5,2 l , il est montré que Juifs et Grecs, tous deux, fo nt
S<l J. Kinoshit.a parle d'une combùiaison de deux documcms séparés. Cf. Lo., '< Ro- l'ex périence de la grâce de Dieu. Dans les ch. 6-8, !'Apôtre fai t com-
mans», 270-275. R. Scroggs voit en Romains deux homélies distinctes. Il le présente prendre comment les bénédictions, qui autres fo is appartenaient à lsraëL
ainsi : ch. 5- 8 et ch. 1-4.9- 11. Lire l D., «Paul as Rhcloriciam>. 27 1-290. Plusieurs, sont maintenant pour tous. Les ch. 9-11 exposent l'argument de Paul
par contre, ne trouvent pas de lien entTe les ch. 12- 15 et tout ce qui précède. En guise sur les bénédictions d' Israël ouvertes aux Gentils. Dans la dernière sec-
d'exemple, voir J.-N. ALETTT, «La présence», 17.
55 Selon W. Schmithals, les passages. tels que 5. 1-1 1: 13. 1-7. 11 - 14; 16.25-27, sonl
des fragments paulinien. qui ont été ajoutés par le copiste. Cf. ID., Der Ro111erbrie/
210-2 11. 59 L'expression ((fil conducteur» de la pensée de Paul nous est suggérée par Ounn.
56 Cf. J. O'NEJL, Paul 's Leuer, 16. Bultmann suggère un nombre de gloses qui se- lors3u'il parle de «the lntegrating Motifo. Cf. J.D.G. D UNN, Romans 1- 8, 1, lxii-lxiii.
raient njoutécs à la lettre à certaines étapes de sa composition par Paul. Il s'a&ril des 6 Dunn reconnaît le problème du rapport entre l' introduction ( l, 1-15), la conclu-
passages suivants: 2. 1. 16; 5.6-7: 6, 17b; 7,25b; 8,1; 10,17; 13,5. Lire Io., <(G lossen im sion (15. 14-16,23) et le corps de la leLtre ( 1, 16-15.13). Cependant, il affirme que ce
Rômcrbricf», 278-284. problème ne met pas en doute la cohérence de la lettre. li parle. en effet. de 1. 16-1 7
57 Cf. M. SCllENKE, «Aporieru>, 882-888. comme l'apogée de ce qui précède et comme la déclaration thématique de ce qui suit.
SR Nou!> avon~ choisi de présenter quelque hypothèses de chaque méthode. qui. à Cf. ID.. Romans 1-8, 1. 37-49.
notre avis, semblent plausible . 61 Cf. J.D.G. D UNN. Romans 1- 8. 1. lxüi.
134 PA RTI E Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE Rl\114, 1-9 135

tion du corps de l'épître ( 12, 1- 15,6)62, Paul explique le mi lieu adapté B. Abraham as a Test Case (4.1-25)
aux indications fondées sur Je nouveau modèle qui est Christ. Ce milieu C. First conclusions : The New Perspective o f Faith in Relation to the
est composé d'un mélange discret de la vieille sagesse juive, laquelle lodividual and to Humanity ar Large (5. 1-21)
est toujours actuelle, et des nouvelles indications de 1'amour du pro- IV. T he O utworking of this Gospel in Relation to Lhe lndividual (6, 1-8,39)
chai n. Cet amour est vécu sur le modèle du Christ, mort sur la croix63 . A. Does Grace Encourage Sin ? (6, 1-23)
Quant au style de la lettre, le bibliste sout ient qu 'il s'agit non pas d' un B . What Ro le Does Lhe Law Play in Ali this (7.1-25)
genre conventionnel et conformiste mais plutôt du genre éclectique C. The Eschatologica l tension and Fulfilment of God 's Purposc through
(varié) et insti ncli f. the Spirit (8, 1-30)
L'étude de Dunn constitue, sans aucun doute, un apport important à D . Second Conc lusion : The triumph of God- His Failhfu lness and lhe
la question relati ve à l'intégralité de la lettre aux Romains. Cet apport Assurance of Faith (8.3 1-39)
réside dans Je fai t qu'i l a pu percevoir la cohérence de la pensée de Paul V. The Righteousness of God- From God 's Faithfulness :The Outworking
à travers la récurrence de l'expression «Jui fs d'abord , puis Grecs». JI a, of the Gospel in relation to Israel (9, 1- 11 ,36)
de fa it, bien démontré comment l ' argumentati.on de l 'Apôtre tournait au A. What Then of Israel ? (9, 1-5)
tour de cette expression du début à La fin de la lettre. Voici la structure B. The Cali of God (9,6-29)
proposée par Ounnr>'I. C. The Worcl of Faith (9,30-10,21)
D. The Mystery o r God's Faiû1fulness ( l l, 1-32)
1. 1ncroduction 1.1- 17 E. A Coneluding Hy mn of Adoration ( 11,33-36)
A. 1ntroductory Statcment and Grectings ( 1.1-7) VI. The Outworking of the Gospel for the Redefined People of God in Evc-
8 . Persona! Explanations ( 1,8-15) ryday Term (12, 1- 15,13)
C. Summary Statcment of the Letter's Thcmc ( 1, 16-17)
A. The Basis for Responsible Li ving-the Christian's Worship (12, 1-2)
IJ. The Wrath of Godon Man 's Unrighteousness { 1.1 8- 3.20) B. The Body of Christ as the Social Context ( 12,3-8)
A. God 's Wrath on Humankind- From a Jewish Perspective (1.18-32) C. Love as the Nonn for SociaJ Relationships ( 12,9-2 1)
B. God 's Wrath- on Jew First As Weil As Gentile (2, 1- 3,8) D. Live as Good Citizens (13 ,1-7)
C. Conclusion : God's Judgement on Ali without exception {3.9-20) E. Love of Ne ighbor as the Fulfilment of the Law ( 13,8-10)
Ill . God' s Saving Righteousness to Faith (3.21 - 5,2 1) F. The Imm inence o f the End as Spur (13,1 1- 14)
G. The Panicular Problem of Food Laws and Holy Days (14, 1- 15,6)
A. To Faith in Christ Jesus (3,21-31)
H. Concluding Sumrnary: God 's Mercy and Faithfulness- Jews Fi rst,
but a lso Gentile ( 15,7- 13)
62 A la suite d'autres biblistes. notamment Wilckens et Wuellner. Dunn voit dans
l'exposition théologique des ch. 1- 11 la fonda tion théologique des ch. 12 15. Cf. ID., VII. Conclusion ( 15, 14-16.27)
Ro11u111s 1-8, 1, lxii. A. Pau l's Mission and Travel Plans (J 5, 14-33)
63 Toujours dnns l' intention de montrer comment le motif <duif d'ubord, puis B. Fina l Greetings { l 6, 1-23)
Grec» justi fi e la cohérence du discours de Paul en Romains. Dunn allinne quïl y a C. Concluding Doxology (16,25-27)
d'autres indices qui en témoignent, entre autre, le style de la diatribe présent. notam-
ment en 2. 1-5. 17-29; 3,27-4,2; 9, 19-2 1; 11 , 17-24. La fonction de la diatribe utilisée
ici par Paul n'était pas à comprendre comme une polémique contre un opposant mais
b) Approche de Campbell
comme une critique de Pnul envers ses compagnons juifs. Il vise. par là. à les amener W.S. Campbell, quant à lui. explique la cohérence de la lettre aux
à une compréhension correcte de leur héritage juif. Concernant l'avertissement de Roma ins à partir d' un présupposé bistorique : la situation de la com-
11.1 7-25 contre l'orgueil que Paul adresse aux Païens. il s' agit, affirme Dunn, d' une
façon de les prévenir du risque de tomber dans le piège dans lequel sont tombés ses munauté de Romc6s. Car c'est cette siruation qui a été à l'origi ne de la
compagnons (cf. 2.17.23: 3.27: 4,2) : mauvaise compréhension de la grâce divine. Et
en même. cet avertissement lie la section de traité doctrinal à celle d'exhortation
( 12,3. 16 el 14.3). Cf. J.D.G. DUNî'. Romans 1 -8. 1. lxii-lxiii. 65 Notre exposé de l'hypothése de Campbell est tiré de son article intitulé «Ro-
(i-1 Cf. J.D.G. Dt ', Romans 1-8. 1. vii-xi. mansn.
136 PARTI E Il : LE SEIGNEUR EST PU ISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE RM 14.1 -9 137

lettre. et à laquelle Paul, en écrivant à la communauté. a voulu apporter style de la lettre, notre bibliste affirme que 3,2 1-26, et les ch. 5 et 8 ont
une so lution. En effet, selon le bibliste, le problème se posa it d' une part, le style déclaratif kérygmatique, pendant que les ch. 6-7 et 9- 11 sont
par rapport aux Juifs en l, 18- 11 ,36 et d' autre part, à l'égard des Gentils du style de la diatribe.
en 12- 15 ( 16)66. Ainsi, Campbell affirme que la cohérence de la lettre ~e travail de Campbell rejoint en partie l' hypothèse de Dunn, lors-
découlerait de l' harmonie qui serait établie entre cc deux parties de la qu' il démontre la cohérence, du moins dans la première partie, sur la
lettre : 1, 18- 11,36 et 12- 15 ( 16). Pour ce faire, le bibliste montre que le base de l'événement du Christ (la rédemption); lequel a mis fin à la
ch. 3 réalise cette harmonie entre ces deux parties. li voit. de làit, en distinction entre les hommes (Ju if et Grec) et se comprend comme le
Rm 3,2 1-26 le point d'ancrage théo logique et la matrice de l'argument dévoilement du projet de Dieu. De même, Dunn affirme, entre autres,
de Paul dans cette lettre67• Dans ce passage, Paul expose le sens de l'é- que Je dessei n de Dieu en Christ, à savoir la rédemption, concernait non
vénement du Christ. seulement les Jui fs mai s encore les Païens.
A partir de ce présupposé, Campbell fa it vo ir la cohérence de la pre- Par ailleurs, nous trouvons la supposition de Campbell suggesti ve, du
mi ère partie de la lettre (1, 18- 11,36). En 1, 18- 2,29, les distinctions fait q.u' il a mis en évidence la dimension historiq ue pour résoud re la
entre les hommes (Ju ifs et Grecs) sont dépassées suite à l'événement question de cohérence de l'argumentation de Pau l dans sa lettre. Car les
christique. La seule distinction qu i reste est celle de Dieu qui juge tout deux pa1iies qui composent la letb·e expriment, d 'après lui , le problème
le monde à partir de l'évangile68. En 3,2 1.26, Paul insiste sur le présent qui préva lait dans la communauté. Quant à nous, nous pensons juste-
eschatologique. Cette insistance est perçue en 5,9. 11 et 8, I . Par consé- ment qu 'en partant de cette situation concrète, l' ham1onie de la pensée
quent, l'auteur affirme que la similitude stylistique enLre ces sections de Pau l peut être identifiée. Car les écrits de !'Apôtre sont, dans la plu-
suggère que les parties qui suivent représentent le développement et la part des cas, des réponses aux problèmes soit d'une communauté ou
continuation de la section précédente. Ainsi, la compréhension des ch. d'u n groupe des personnes, soit d'un individu. Par conséq uent, Camp-
9- 11 est possible dans la mesure où l'on tiendra compte de l' insistance be ll a affirmé que la cohérence de la lenre viendrait de l'établissement
de Paul dans les chapitres précédents (3, 5 et 8). de l ' hannonie entre ces deux parties. Toutefois, notre bibliste n'a pré-
li montre égaJement L'importance des paroles utilisées par Paul en senté que la cohérence structurelle de la prem ière partie. Quant à la
3,24-25 et en 1,3-4. C'est du reste par ces formu le que Paul démontre cohérence de la deuxième partie et de l'ensemble de la lettre, il n'a pro-
en quoi son évangile annonce la bonne nouvelle de l'accomplissement posé aucune solution pour établir leur harmonie. Sa contribution aurait
des promesses de Dieu à Israël. Cet évangile se fonde sur la rédemption davantage été enrichissante s 'i l était parvenu à résoudre ce problème de
réalisée en Christ, dont l'événement doit être compris comme l'ex- cohérence pour l'ensemble de deux parties.
plici tation, voire l'apothéose du projet divin dans le monde. Quant au
2.5.2 Structure rhétorique
6ti Il y a actuel lement un consensus au sujet du ch. 16 qui le reconnaît comme L'applicalion de la méthode rhélorique dans l'écrit de Paul aux Ro-
fai sant partie de la lettre originale. Cf. H.Y.J. GAMBLE, The Te.x111a/ llistor'.)1, 4 1- mains, fut, pour la première fois, l'œuvre de W. Wuellner69. Il était
55 ; U. W11 CKF.NS. Der Brie/ an die Romer, 24-26; K.P. OON FRll:D, Th e Romans parti de la question que se posa ient les spécialistes concernant l.a fonc-
Debate, lxx. tion des exhortations de I" Apôtre dans 1.es ch. 12- 15. D'a près les uns,
67 En 3.2 lss. l'Apôlre présente le sens de l'événement du Christ comme activité
présente eschatologique de Dieu. Ce Dieu qui a changé le rapport, qui est devenu
ces chapitres étaient en lien avec les onze premi ers chapitres ( 1- J l).
entre les Juifs et les Grecs. Cf. W.S. CAMPBELL, «Romans», 253. Pour d' autres, ils n'y voyaient aucun rapport. Wuell ner a fait voir, par
68 W.S. Campbell voit en 1, l 6ss le thème de la lettre que Paul veut développer. De contre, que la solution à ce dilemme était la mise en pratique de la mé-
cc verset, Paul a mis l' accent s1ir trois éléments de son évangi le. Premièrement, il ne thode rhétorique. li voulait par là dire que la fonction des chapitres à
rougit pas de l'évangi le; deuxièmemenL cet évangile est une force de Dieu pour le l'intérieur de la lettre est perçue si l' on considère que l'écrit aux Ro-
salut de tout homme qui croit; tTOisièmement, il est pour les Juifs d'abord et pour les
Grecs. De cette façon. Campbell soutient que la justification par la foi est la supposi-
69 Cf. R. J EWEIT. «Following û1e Argument>>. 266: J.-N. ALE1TI, Comment Dieu.
tion et la base sur le quelle l'apôtre des Gentils parle de l' échec de ses compagnons à
accepter !"évangile. Cf. ID.. «Romans», 253. 32; R. Pl:N A. Le/fera ai Romani, 1, 59.
138 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT Cii iV : LE CONTEXTE DE RM 14.1-9 139

main est une argumentation confonne à la rhétorique gréco-romaine affirme, par ai lleurs. que chaque unité argumentative est composée de
de l'époque7o. Car avec ce procédé, la difficulté relevée tant pa r les ap- proposirio et probatio74 •
proches littéraires que historiques seront résolues71 . Notons également un autre modèle de composition employé par Paul
En effet, bien que son hypothèse ait été cri tiquée, cependant. beau- qu 'Alett i a pu identifier. Il s'agit du principe du parallélisme qu ' il met
coup de spécialistes en ont emprunté la voie. Nou allons, ici, présenter ensemble aux genres épi tolaire et discursif. Ces deux genres sont bien
l'anal yse faite par certains de ces spécialistes, notamment Aletti, Penna, présents tant dans le petites unités que dans les grandes. Ainsi, la lettre
Pilla et Jewelt. a une composition complexe en forme de ABA'.
Si son hypothèse est correcte, il faut alors reconnaître que l' unité de
a) Dijfére11tes approches71 l'argumentation de Paul n'est évidente que dans les ch.1- 8. Tandis que
+ Approche d'Aletti les ch. 9-11 forment un groupe séparé et pas directement attaché à ce
qui précède mais les suil 75 • Il trouve qu 'il est important d'examiner leur
Dans son étude de la lettre aux Romains, l'exégète français Aletti fo nction à l' intérieur de l'argumentation de Paul.
affirme que cette épître appartient à plusieurs modèles de composi- Nous appréciations !' hypothèse du professew· Aletti par rapport à la
tions 73. Il souli gne en particulier le modèle du genre épistolaire et ce- faço n dont il a essayé de prévenir les exégètes du ri sque de voul.oir im-
lui du geme rhétorique. Concernant le genre épistoJaire, il fait vo ir poser au tex te un modèle de composition. Aletti propose une voie sûre
que cette épître comprend les différentes partie propres à une lettre. pour éviter l'erreur. Il s'agit de procéder par le démontage du méca-
Ell e com mence par une adresse (praescriptum) 1, 1-7 et termine par nisme de l'argumentation en vue de vérifier l' unité et d'en énoncer la
les salutations (cf. 15.33), tout en donnant des nouvelles (c f. 15, 17-32) ou les thèses (propositiones) 76 • Concernant la structure de la lettre qu'il
et des salutations (cf. ch. 16). Dans les ch. 12- 15, Alelti montre que
1'Apôtre utilise un ton de dialogue. Avec ce ton, Paul exprime ses 74 J.-N. Aleui fait voir que l'examen des propositiones dans chacune des pe1i1es
souhai ts, ses requêtes et ses exhortations. Quant au genre rhétorique,
unités argumentatives permet de connaitre ou comprendre cc que !'Apôtre a vou lu
Aletti parle du genre rhétorique discursif qu ' il l' identifie tout le long dire. En effc1. la prnpnsitio principale n'empêche pas les proposi1io11es secondaires.
argument théorique ( 1,18-1 1,3 6). Et comme une lettre de modèle rhé- Ces dernières expliquent la thêse principale et aident Paul à préciser son argumenta-
torique, clic a son exordium (prologue) et son peroratio (épi logue). li 1ion dans une érie d·é1apcs facile a percevoir. Les propo ilions ou le 1hè es se-
condaires sonl appelés en latin s11bpropositio11es. Cf. ID.. «La présence», 9; ID., «Ro-
mans», 1553- 1554.
70 Cf. W. WUELLNER. «Paul's Rhe1oric». 128-129: J.-N. Al r:rn. «La présence», 15 Cf. J.-N. ALFlTI, «Romans». 1554. En outre. nous soulignons qu·Alclli affirme
1-2. que les questions de la structure demeurent jusqu'alors épineuses en dépit du manque
71 W. Wucllncr ne propose pas d.éliminer ces considérnlions li11éraire et historique. de consensus de la majorité des exégètes au tour de La propositio de la lenre en 1.16-
mnis invi1e à étnblir des nouvelles priorilés. Pour cc faire. il propose de remplacer les 17. 11 relève notnmment le problème concernant la fonction des ch. ~ 11 , car ils ne
priorités traditionnelles, basées sur le modèle tradi1ionncl de logique cl dialectique, scmblcnl pas être préparés par le chapilrl! précédent tch. 8), ni n'annonccn1 vrnimcnl
par celle uc 1héologic propositionnelle, basée sur l 'analysc raisonnée syntuxiquc des les chapitres qui suivent (ch. 12- 15). Le bibliste français se demande également si la
phrases. La priorité lilléraire, qui était fondée sur les théories de lillératurc ou poéù- stn1cturc de la lettre n'u pas reçu plus 1ïnnuence du passage 3.1-8 pl u1ôt que de celui
que, doit être remplacée par la nouvelle priorité qui considère la lcllrc comme une ar- de 1 16- 17. Cf: Io .. «La présence», 17.
gumentation. Wucllncr affirme que la lettre aux Romains vue fondamcntalemenl com- 11. Au sujet de la 11t1rmtio, Alcll i fail voir une erreur dans l11qucllc 1ombe bien
me un processus rhétorique, permet d'expliquer les autres dimensions théologique, d'exégètes, laquelle consiste t\ penser que les lettres de Paul obéissent scnipu-
littéraire et socio-historiquc présentes dans la lettre. Ainsi. le bibliste propose une lcusemeni aux règles de la rhétorique. Par conséquent. il faut ù toul prix trouver tous
dispositio de la manière suivante : exordium 1, 1-15; tra11sit11s 1, 16- 17; co11firmatio les linéamcms (grands traits) de la dispositio habituelle, à savoir, e.xordi11111, 11tlf"mtio,
1, 18 15, 13 (en deux part ies: probatio 1. 18- 11 ,36 el tligressio (e.:remp/11111) 12, l- probatio. peroratio. Le biblis1e affirme que la présence de ces éléments dépend de la
15,13);perorario 15,14-16,23. Cf. ID.,«Paul's Rhctoric», 133- 146. question trai1éc Cl de la façon d·y répondre. c·est pourquoi, devant la proposition de
72 Comme dans la première partie de cette dissertation. nous exposons les hypothè- la struc1urc de Jcwett qui voit la narratio en 1.1 3-1 -. il montre que ces versets font
ses de la dispositio de la lettre aux Romains dans les grandes lignes en langue origi- bien partie de l'exordi11111: la partie dans laquelle l'auteur donne les rai ons de son
nale de chaque bibliste. écrit. Le passage 1.1 3-15 expose un fait qui. cependant, ne représente pas un élément
73 Cf. J.-N. ALEITI. «Romans», 1553-1600. à partir duquel l'au1cur cons1ruira sa prohatio (preuve). En 1.13-15. Paul parle de ~on
140 PARTIE fi : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV: LE CONTEXTE DE RM 14, 1-9 14 1

propose, il nous semble ne pas apporter une grande contribution. Car la conclusion. Penna s'oppose à ceux qui voient dans la première sec-
l'exégète français présente une cohérence structurelle qui se limite seu- tion un exordium à la manière rhétorique des discours. Car cela repré-
lement au niveau de la forme du texte. Cependant, au niveau de son sente une façon évidente de forcer le texteso. Paul, dans le corps de sa
contenu , il fait noter que certaines sections ne sont pas directement lettre ex pose la nature et les exigences de l'évangi le. 11 le fait en deux
unies. Sa difficulté de trouver la cohérence de la lettre ne serait-elle pas moments successifs et part, chaque fois d' une proposition principale
due au fait d'avoir identifié plusieurs genres de compositions? différente. Penna voit la première grande proposition générale de la
En mettant en emble les différents principes de compositions. Aletti lettre en 1, 16- 17. En 12, 1-2, il identifie la propositi on concernant la vie
présente une structure de la manière sui vante77 : morale du chrétien.
A partir de 1, 16- 17, Paul développe la grande partie de son écrit des
Address : l , 1-7
Exordi11m: 1.8- 17 qui termine avec une propositio en 1.16- 17 ch. 1.1 8- 1,1,36. li en expose certains aspects importants et fondamen-
A. 1.1 8-4,25 Jew and Greek justified by faith aJonc taux de l' Evangil e : 1. La justice d~ Dieu (cf. 1, 18-3,20); 2. Les impli-
Prohatio B 5-8: New Life and the bope of the baptizcd ca tions mystiques que comporte l'Evangile pour la vie chrétienne sur la
C. 9- 11 : Israel and the Geatiles : the fu ture of fsracl base du baptême et de !'Esprit (cf. 6, l-8,39); 3. Les effets que l'Évan-
Exhortations : 12. 1.- 15, 13 gi le rencontre en contact avec le peuple d'Israël qui en était les pre-
Propositio coveriag alJ the exhortation: 12, 1-2 miers destinatai res (c f. 8, 1- 11,36). La proposition en 12,1-2 ouvre la
Life in the Church and in the World: 12,3- 13. 14 section concernant la vie mora le des chrétiens (cf. 12,3- 15, 13). Cette
(Welcome one another as C hri 1 bas wcleomed you)-thc case o f the section expose la synthèse de Paul sur l' agir moral du chrétien, qui doit
weak: 14, 1- 15,13 se baser sur la charité. En 12,3-2 1; 13,8-14, !' Apôtre offre des précep-
Pcroration for the enüre letter : 15, 14-2 1 tes généraux; en 13, 1-7, il s'agit des préceptes en lien avec l'obéissance
News and final Greeting : 15,22-33 + 16, 1-27 envers les autorités; et en l 4, 1- 15.13 des préceptes sur les questions de
désaccord religieux à l'intérieur de la communauté chrétienne.
+ Approche de Penna Penna reconnait toutefois l' importance de l' application du modèle
Dans son travail d' investigation au sujet de la dispositio de la lettre rhétorique en Rm, ca r il permet une bonne compréhension de la relation
aux Romains, R. Penna fait remarquer qu' il y a plusieurs suppositions entre les différentes panies de l'épître. Cependant cette application ne
qui se diffèrent les unes des autres 78. Cependant, sur certai nes données doit pas être imposée de l'extérieur du texte de peur de ne plus perce-
de base. elles présentent des similitudes. notamment pour le préambule voir son origi nalité81. L'exégète note que la lettre contient une di versité
en J, J - 7, le salutations finales en l 6,3-27 et le corps de la lettre en des genres littéraires. entre autres la diatribe et le midrashs2.
1,16-15, 13, lequel se divise en deux partie : 1,16- 11,36 et 12, 1- 15, 13. L'hypothèse de Penna rejoint dans les grandes lignes celle d' Aletti. Il
Quant à ! ' hypothèse de sa structure, Penna affirme que la lettre appar- soutient, lu i auss i, la présence des genres épistolaire et rhétorique dans
tient au genre épistolaire79 . Comme dans toutes les lettres antiques, la la lettre aux Romains. Sa particularité en rapport avec Aletti se trouve
lcllre aux Romains possède trois sections : une introduction, uo corps c l du fa it qu ' il identifie la cohérence de la lettre uniquement â partir du

désir d a11nonccr !"Évangile aux chrériens de Rome. Cc désir n'est développé qu'en !W Penna pense notamment à l' hypothèse de Wucllncr et de Jcwctl. Cf. ID.• «La
0

partie dons le reste de la lellre. Ainsi, lorsq11'u11e nnolyse port de ln s1n1crure. Alctti questione dello disposilio», 63-67; ID., Lettert1 ai Romani, T. 59.
propose une voie sûre pour éviter dïmposer au texte un modéle auquel il n'obéit pas 81 Concernant l'application de la rhétorique dans les lett res de Paul en particu-
nécessairement. li est important de commencer d·abord par détem1incr les micro- lière. le bibliste italien fa it partie de ceux qui soutieru1cnt la nécessi té de part ir du
unirés de l'argumentanon et les thèses (propositio11cs) qui les soutiennent. Cr. ID.. «ln texte même. de ses figures stylistiques ec de sa dispo ilion (structure) interne afin
présence», 7. d'arriver à identifier le genre et le message. U s'agit donc de la rhétorique littérai re.
77 Cr. J.-N. Al FTII. «Roman ». 1554. 1599. Cr. R. PFN'lA. «La qucstionc della dispositio rlietorica». 65; Lo., lcttera ai Romani.
71! Cr. R. P E A, lettera ai Romani, 1. 60. 1. 60-61 .
79 Cr. R. PtN A. l euera ai Romani, 1. 56.60-76. 82 Cf. R. Pl: 'l!'IA. Leuera ai Ro111a11i, 1. 61.
PARTIE Il : LE SEIGNEU R EST PUISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE RM 14,1-9 143
142

genre épistolaire. Il reconnaît. cependant, l' importance de l' application Paul, il y en a, par contre, qui voit dans la lettre une harmonie entre ses
du modèle rhétorique en Rm. Car il trouve que cc modèle pennet une différentes sections. Notre trava il souscrit à l' hypothèse du second
bonne compréhension de l'ensemble de l' épître. Quant à nous, nous es- groupe qui trouve dans la lettre une logique argumentati ve. Notre adhé-
timons que le travail de Penna n'est pas de moindre importance surtout sion se fonde sur le fai t de savoir que la lettre a été rédigée pour aider à
concernant la question de l' unité de la lettre, en ce sens qu ' il présente résoudre le problème qui prévalait dans la communauté. Dans cc cas, la
une structure où la cohérence de l' argumentation de I' Apôtre est repé- pensée de l'ApôLre devait être cohérente puisqu' il part d'un objectif
rée. Voici la structure qu ' il propose83. précis84 . Nous allon simplement exposer l'étude de deux de ces au-
Il prescritto (o protocollo) ( 1, 1-7) teurs.
li ringranziamcnto inizia lc (o post-protocollarc) ( 1.8-15) + Approche de Pitta
Prima parte ( 1, 16-11 ,36): 1 costitutivi l'èmdamenta li dcll 'idenlità cristiana
li tcma/tcsi (o propositio): l'Evange lo ri veta la giusti7ia salvi lica di Dio A. Pilla, quant à lui , affinnc que l'app lication de la methode rhétori-
pcr Giudei c Gentili ( 1, 16-17) que dans lél lettre aux. Romains est importante à cause de la fonct ion
1. La giustizia di Dio ( l , 18- 5,21) que la lettre assume. Etont donné que c'était la première foi s que Pau l
I. A. 1'anti-tcsi : la giustizia di Dio fuori dcll 'ottica cvangclica ( 1.18- 3,20) se mettait en contact par écrit avec la communauté de Rome, sa lettre
1.B. La giustizia di Dio aonunziata dall'Evangclo c le suc implicalioni avait donc pour but de persuader les chrétiens de Rome en vue de faci-
sotcrio logichc (3.2 1- 5.21) liter la communion entre la communauté et Pau1 85 . Par aill eurs, au sujet
11. li cristiano è inserito in Cristo e condotto dallo Spirilo (6, l- 8.39) du genre de la lettre, le bibliste italien identifie deux genres li ttéraire
Il.A Effctti dcll 'inscrimento in Cristo. mcdiato da! batlismo (6,1 - 7,25) qui se trouvent bien en rclalion86. il s'agit du genre épistolaire et rhéto-
11. B Lo Spirito di Cristo e la Libertà cristiana (8.1 -30) rique. Bien qu'i l ai t mis en évidence le genre rhétorique, l'auteur sou-
11.C Pcrorazione finale (8,3 J-39)
Ill. L'Evangclo c lsraclc (9. l- l l.36)
tient, par contre. que l'épître aux Romains e t avant tout une lettre et
1nrroduzionc su lia digoilà di Israelc (9, t-5) non pas un discours.
111.A Dio elcggc pcr grazia dando spazjo a un «rcsto» (9.2-29) En effet, Pitta perçoit la convergence de ces deux genre dans la fa-
111. B La grazia di Dio si è definitivamcnte rivclata in Cri to (9,30-10,2 1) çon dont r Apôtre a présenté son argumentation. Dans cene dernière. on
111.C La fedcl tà di Dio al suo popolo (l l.l -32) trouve d' une part la tension rhétorique et d autre part celle épistolaire.
Oossologia conclu iva ( 1 1.33-36)
econda pan e ( 12, 1- 15, 13) : La componcntc elica dcll' identità cristiana 84 Ici. nous rejoignons en panie l'idée de Campbell, qui soutient que la situation
11 tema/la tesi (o proposirio) : Esortazione a trarrc adcguatc con cgucnze concrète de la communauté de Rome fu t l'occasion majeure de la lettre.
cliche ( 12, 1-2) 8.5 Cf. A. P11T/\, Leuem ai Romani. 19.
1. L' Agape comc critcrio centrale dell'ética cristiana ( 12,3- 13, 14) 86 Au sujet du genre de la lettre, A. Pilla affi rme que. suivant la disposition rhéto-
Il . Il caso del rapporta tra Dcboli e forti (14.1 - 15,12) rique. la lettre aux Romains ne correspond à aucw1 genre. Elle constitue, de fait, un
Augurio conclusivo ( 15, 13) mélange de plusieurs genres, qui se j ustifie, scion lui, à travers lu relation qui existait
Notizie su i la situazionc persooale di Pao lo ( 15, 14-33) entre les Romains et l'évongilc de Puul. L· ApôLTe expose son évungile pur le biais de
différents types d'argumentations aux croyants qui avaient déjà adhéré â celte bonne
Raccomandazionc di Fcbc (16, 1-2) nouvelle du Christ. l i y u des éléments d'un procès judiciaire \cf. Rm 1.18 3,20), de
Doxo logia conclusiva ( 16,25-27) discours démonstratif ou épidictique de l'évangile paulien (cf. Rm 5, l- 8,39). En Rm
En conclusion. nous pouvons affirmer. à pa1tir de ces hypothèses que 9, I 11.36. Pitta idcntilic éga lement plusieurs genres. à savoir la diatribe. le midl'(ls/t
et l'apologie. La section Rm 12.1- 15. 13 présenterait. de prime abord, les caractéristi-
nous avons présentées ci-dessus, qu ' il y a une diversité de points de vue ques des recommandations épistolaires. Cependant les ch. 14, 1- 15, 13 seraient une
au tour de la structure de la lettre aux Romains. S'i l est des chercheurs démonstration délibérative sur !'accueil des faib les. Rm 16, l-15, constitue la panic
qui ne trouvent pas dans la lettre un exposé cohérent de la pensée de des n:commanùations. En somme. l'auteur estime que la lettre aux Romains est bel el
bien un écrit avec les parties rhétorique de très haut niveau. li parle. d'ai lleurs. de la
lettre aux Romams comme un «évangile épistolaire». Autrement dit. il s'agit d'un
!13 Cf. R. Pl'. '"· Leflera ai Romani. 1. 77-78. évangile transmis par correspondance. Cf. ID.. Lettera ai Romani. 35-36.
144 PARTIE LI : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH 1V : LE CONTEXTE DE RM 14, l -9 145

Selon notre auteur, la tension rhétorique se trouve dans les parties pro- B. La paracles i ( 12, l- 15, l 3)
prement épistolafres, lesquelles sont particulièrement bien développées La tesi (12, 1-2)
par rapport au reste de la lettre. li s'agit du prescrit Rm 1, 1-7 et du post- Il cuho razionale ( 12,l - 15, l 3)
scriptum Rm 15, 15- 16,27. Dans ces parties de la lettre, il y a des anti- La reciproca accoglienza tra i forti e i deboli (14, 1- 15,13)
cipations et des synthèses de certains éléments principaux de la lettre Il poscritto cpistolare (Rm 15. 14-16,27)
(cf. Rm 1,3-4 pour un cas d'anticipation et 16,25-27 pour celui de syn- + Approche de Jewett
thèse). Ceci se justifie. affirme le bibliste, dans la mesure où l'on re-
connaît cette tension rhétorique. Quant à la tension épistolaire dans l'ar- L'étltde de R. Jewetl suit le chemin emprunté par W. Wuellner en af-
gumentat ion paulinienne, Pitta le voit en Rm 7, 1; 10, 1; 11, l 3 et dans la firmant que la lettre aux Romains obéit aux règles de la rhétoriqueRR. JI
partie exhortati ve de la lettre 12, 1- 15, 13. f1 soutient que ces passages y voit le genre démonstratif (épidi ctique)89. Par ailleurs, Jcwell défi nit
confinnent. en partie, qu' il s'agi t bien d' une lettre concrète et non pas la lettre aux Romains comme une lettre ambassadrice. Car il affirme
d' un discours rhétorique. Par ailleurs, Pitta reconnaît en 1, 16-17 la que ce que fait un ambassadeur lorsqu'i l arrive dans un pays, c' est ce
thèse principa le de l'écrit de Paul aux Romains. Il identifie troi s macro- que Paul a fait à travers son épître aux Romains9o. Jcwett a pu vo ir une
unités dans le corps de la lettre en Rm 1, 18-4,25; 5, 1- 8,39 et 9, 1- 11,36 cohérence remarquable dans la lettre aux Romai ns. Il l'a identifiée à
et la partie exho1tati ve en 12.l- 15.14. travers l'applica ti on des catégories argumentatives de la rhétorique an-
Comme Penna, l' approche de Pitta à la question de la tota lité de la cienne91. Cette application laisse voir une harmonie entre Rm 1.1 8-
lettre aux Romains rejoint également, en grande pa1t ie, celle d'Aletti. 4,25 et les autres sections de la lettre.
De même que les deux autres spécialistes. il met en exergue les genres
épi tolai re et rhétorique et admet l' importance de l'a pplica tion de la
méthode rhétorique pour la compréhension de la lettre. Par contre, il se 88 cr. R. JFWI:. rr. Romans. 23 .
8 9 .L~ genre démonstratif ou épidictique consi te à fa ire découvrir et panager les
distingue d'eux du fa it qu ' il a déterminé, dans la lettre, les passages qu i conv1ct1ons sur la grandeur e1 la beau1é d'une idée. d' un message. d·une religion, etc.,
meuent en évidence chacu n de ces genre . Ainsi que Penna, Pitta re- en uti lisanl l"éloge ou le blâme. l"approbation ou la réprobation. Cf. J.-N. Al mr - al..
connaît l' unité de la lettre. Cependant. il n'expl iq ue pas en quoi con- Vocabulaire, 83. Burgess a distingué plusieurs types de rhétorique du genre démons-
siste cette unité, et comment les différentes parties de la lettre qu 'il a trative (épidictiques) qui correspondent au sty le de la lertre aux Romains. Il s·agit.
identifiées se trouvent en barmonie les une avec le au tres. Aussi pen- entre autre, du discours exhonatif. du discours d'ambassadeur. Cf. Io .. «Epideictic
Litcrature». 111 - 113. Voir aussi J.R. CHASE. «Classical Conception of Epideictic»,
sons-nous que son apport à la question de l'i ntégral ité de la lettre aux 293-300.
Romains aurait été plus intéressant si Pitta avait démontré, mieux, ex- 90 Pour un officiel d"un pays envoyé dans une autre nation. pour représenter di-
pliqué cette unité entre les différentes sections de la lettre. Il pré ente la plomatiquement son pays. la première cho e qu ïl fa it est celle de présenter les lettres
structure de la lettre de la manière suivante87 : de créance cl en suite ùe n.:commandcr l'intérêt de sa souveraineté. De même. Paul se
pré~ente lui-même à la communauté de Rome qui lui était étrangère, en tant qu 'il n'en
lntroduzionc cpistolare (Rm l. l-1 7) était pas le fondateur. Ensuite. de faço n diplomatique, il expose les raisons de sa visite.
LI prcscri tto (1 , 1-7) Jewett voit dans l' introduction et ln conclusion l'argument ùiéologique de Paul qui
Ri11graziamcnti-csordio ( 1.8- 15) vise à unir les églises-maisons de Rome. Cette unité leur permettra de coopérer à la
La tesi gcncralc ( 1, 16- 17) mission d'Espagne. La situation relatée dans les ch. 14. I 15,7 au sujet du connit entre
11 corpo cpistolarc (Rm 1.1 8-15.13) les «faibles» et les «fons» pouvait porter préjudice ou nuire à cette mission de Paul.
A. Sczionc dimostrati va ( 1, 18-11 ,36) Par conséquent, Paul recourt à des sub1ilitës diplomatiques propres à un ambassndeur
La rivclazionc dcll' ira e della giustiz ia di vina ( 1, 18-4,25) lorsqu'i l parle de sa visite lant attendue (cf J,9- 15) et de l' aide qu ' il espère recevoir
li paradossale vanto cristiano (5, 1- 8.39) <les chrétiens de Rome (cf. 15,22-29) pour fa ire appel aux diffcrcnts groupes de la
communauté de Rome. cr. R. JFWFTT, «Following the Argument». 266.
La fedcltà della parola dj Dio ( 9, 1- 11.36) 91 Jcweu présente les 1cnnes qui ont été utilisés en rhétorique classique. Il s'agit de
confinnation. amplification. raisonnement. élaboration. exemple, raison, opposition c1
comparaison. Ces tcnne. servaient à décrire le composantes typiques dans le déve-
K7 Cf. A. Prn A, Leuero ai Romani, 32-33. loppemc111 des preuves. Cf. ID., «Following lhe Argument». 269-270.
146 PARTI E Il : LE SEIGNEU R EST PUISSANT Cii iV : LE CONTEXTE DE RM 14.1-9 147

Pour !"exégète américain, l'argument de base de la lettre se trouve la théologie, exposée dans les sections précédentes, et l'éthique déve-
dans les quatre premi ers chapitres. Les autres sections qu i su.ivent re- loppée en 12, 1- 15, 13.
prem1ent les thèmes et les questions des ch. 1-4. Car ces sections fo nt La proposi tion de Jewett représente un apport significatif pour la
partie de la prohatio (preuve) de la lettre, du fait qu 'elles é labo rcn~ la question de 1' unité de la lettre aux Romains. JI a réussi à identifier la
thèse de base développée en Rm 1, 18-4,2592. C'est dans cette section cohérence de la pensée de !' Apôtre à travers l'applicati on de la mé-
( 1, 18-4,25) que Jewett identifie comme co11fir111otio (confirmation) au thode rhétorique. De cette faço n, il offre une solution à la problémati-
sujet de la justice de Dieu. Il démontre que cette partie commence par que soulevée par Campbell. Ce dernier a fa it vo ir que la cohérence de la
le péché des Jui fs et aussi celui des Grec . li continue à proclamer le lettre se trouve dans l'établissement du rapport entre le deux parties
don de la justice de Dieu par la foi en Christ et fin it avec l'exemple ( 1, 18- 11 ,36 et 12- 16) qui la composent. Car clics relatent la situation
d'Abraham com me Je père de tou ceux qui croient. Jewen fait noter conflictuell e de la communauté, à laquelle Paul a donné de directives
que l'on pourrait voir par là l~. structw·~ ?e l'a rgument, ?.ont ~ '.16- 17 pour la résoudre. Le méri te de Jewett est donc d'avoir pu établir le rap-
constitue une thèse. Cette dern1ere est su1v1e par une prem1ere sene des port entre ces deux parties grâce à 1. emploi des catégoriques rhétori-
preuves en 1,18-4,25 qui contim1ent la thèse. ques : co1?firmatio, exomalio, comparatio et exhortatio. 11 a, de fait,
Les tro is autres preuves qui sui vent présentent les dével o p~em~ nt s identifié quatre preuves qui sont en harmonie entre elles. Par consé-
approfondi s de cette thèse, en ce sens qu'ell es répondent a t~ x obJeCtt?ns quent. la partie doctrinale ou théologique de la lettre se trouve bien en
théologiques el éthiques importantes. Elles le fo nt en amplifiant les im- relation avec la partie exhortati ve ou éthique.
plications et thèmes importants.En effet, dans la seconde preuve, Jewctt Quant au ch. 3. qui, pour Campbell, constitue la clé de l'interprétation
voit la catégorie rhétorique d'exomatio (élaboration), l a~u e ll e est asso- de la lettre~ Jewett r a inséré dan son contexte large de 1.1 8-4.25 et
ciée avec l'atLresis (amplification) et raliocinatio (ra1sonnement) 93 . affirme que c'est toute la section qui représente l'a rgumeot de base
L'emploi de ces catégories ous le titre d'élaboration permet à clarifier pour la compréhension de la lertre95. Jewett présente ln structure de la
le lien logique entre 5, 1-8.39 et la section de co1~ftrmatio en 1, 18-4,25. lettre aux Romains de la mani ère sui vante96:
Paul, dans les ch. 5- 8, ex pose une séri e d'objections soul evée contre la
1.. T hcExordium (introduction): 1,1- 12
doctrioc de la justice de Dieu par la fo i. A. The Lnauguration of Paul 's Communication with the Christains in
La troisième preuve est appelée comparatio (comparaiso n)94 • Cette Rome 1, 1-7
catégorie esl identifiée dans les 9- 11 . Dans ces chapi tres, Paul re- B. Thanksgiving and Causa (Issue): 1,8-1 2
prend Je problème d' incroyance d' Israël. Cette sect!on, affi;meAJewett, Il . The Narra rio (Statement of Facts): J, 13-1 5
est bien en harmonie avec les preuves approfood1es de 1 Apotre au 1fi. The Propositio (thesi , Basic Contention): 1.16- 17
sujet de la justice de Dieu. La qua trième preuve que Jewett définit IV. T heProbatio(Proof) : J.1 8 15, 13
d'exhorlatio (exhortation) se trouve dans les ch. 12.1 - 15, 13. Cette A. The First Proof : 1, 18-4,25
section expose les implications éthiques de la thèse princi pale en B. The Second Proof: 5. 1 8,39
1 16- 17 en donnant les directi ves pour vivre dans la justice de Dieu. C. The Third Proof : 9, I 11.36
L'appli~ation de cett.e ca tégo rie d'ex horl ati on aide à voir le lien entre D. The Fourth Proof: 12, 1 15, 13
V. The Peroratio (conclusion) : 15 : J4- 16 :24
A. Rccapitulation of Paul's Missionary Call ing and Stratcgy: 15: 14-2 1
91 Signalons que Jewelt a identifié grâce à l'emploie des cutcgorics ar~u mcntat ives B. The Report on Travel Pan and an Appeal Io Partic.:ipate in Pn.:sent
de la rhétorique quatre preuves: 1.18-4.25: 5.1 8.39: 9.1 - 11.36: 12. 1- 1:>.13. CC ID.. and Future Mis ionary Acti vitics: 15:22-33
«following Lhe Argument». 273; ID.. Romans. vii-i.x. C. The recommendation of Phoebe a Missionary Patroncs : 16: 1-2
93 Cc type d'argument est caractéristique du genre dc.!monstratif ou épidictique. Cf.
11. LAUSBERG, l/a11dh11ch, 123; R. JEWETI, «Following the Argument». 271.
9-1 La comparaison sen à utiliser un exemple ou un cas imaginatif pour démontrer 9 ~ Pour l'évaluation de l"analy e de Jewell, cf. K.P. DONFRIFD. The Romans De-

la supériorité de l' argument ou d'un cas déjà établi. Cf. H. LAUSBERG. Hmullmch. 233; bate. lvii-lviii.
R. J EWETI. «Following the Argument». 27 1. 96 Cf. R. J FWETT, Rn11w11s , vii-ix.
148 PARTIE li : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH IV : LE CONTEXTE DE RM 14. 1-9 149

O. Greeting and Commendations betwecn Ministerial Leaders: 16:3 Ps 3 1, 1. La seconde partie du midrash cite Gn 17,5 et le soutient avec
16.21-23 des arguments en Gn 15,5. En 9,6- 18, un midrash se trouve avec Gn
Tbc First Interpolation : The Church·s Campaign against Heretics 16.17-20 21. 12. lequel est étayé par les textes en Gn 18, 10. 14:25.23; Ml 1.2-3;
The Second Interpolation : The Supersessionist doxology 16,25-27 Ex 9, 16.26; 33, 19. En 9,19-29, Paul fai t appel au texte de Gn 2 1, 12 el
E. The Epistolary Benediction 16,24 l'explique à travers les textes d'l s 29, 16 et Os 2,25. Les paroles identi-
b) lnventio ou preuves en Rm ques en 1S 12,22 et Ps 94,24 sont citées en Rm 11, 1-6. Elles sont sou-
tenues avec des arguments du texte de 1R l9,10.18. En 11,7- 10, il
Dans cette partie du travail, nous voulons présenter l'inventio 97 . 11 'agit là aussi d' un cas de midrash à partir du texte du Dt 29,4 et Ps
s'agit des preuves auxquelles r orateur fait recours pour étoffer son dis- 68,23 IOJ .
cours. li vise à conva incre et à émouvoir l'auditoire. Rappelons, comme Pour ce qui concerne la technique des discours recourant aux person-
nous l'avons décrit dans la première partie de notre travail, qu ' il y avait nages et exemp les, ils sont bien manifestes dans la lettre. Dans le pre-
deux types d' inventio ou preuves : intrinsèque et ex trinsèque98 . En effet, nlier cas, les di scours consistent à présenter un exemp le dans lequel
dans la lett re aux Romains dont le style obéit aux règles de la rhétori - l'auteur invente un personnage. Ce dernier parle comme un acteur dans
que gréco-romaine, toutes ces preuves sont bel et bieo présentes. l.a fiction de l'argument 104 . Ces discow-s sont identifiés en 7,7-12. 13-25;
Les preuves intrinsèques, nous avons les diatribes, midrashim , les 11, 17-2 1. Quant au second cas des discours soutenus avec des exem-
di scours étayés de personnages et exemples, les enthymèmes formels. et ples, ils visent à montrer que ce qui a été vrai pour tell e situation, il
les syllogismes99. La di atribe constitue une technique de la preuve in- l'est aussi pour telle autre situati on semblable 105 . Dans la tertre aux
tri nsèque la plus discutée de l'épître aux Romains. Les anciens rhétori- Romains, Paul utilise ce genre de technique en l .26b-27; 4. 1-23: 11. 13-
ciens voyaient dans ce type de preuve une caractéristique du genre ~é­ 14; 12,4-5; l5,2-3.
monstrati f approprié en vue d·arnéliorer l'etllos qu' un auteur souhaite Se rapportant aux enthymèmes formels et les syllogismes en Ro-
obtenirlll<>. Les preuves de la diatribe se trouvent en 2, 1-16. 17-29; 3, 1- mains, ils y sont également mani festes. Le syllogisme: argument logi-
8.9-20.27-3 1: 4, 1- 12; 6, 1- 14. 15-23: 9,30-10,4; 11,1 -1 0, etc. 101 • Le mi- que de trois propositionsl06 dont deux prémisses et une conclusion. se
drash représente une fo rme argumentative juive. Il consiste à expliquer trouve précisément dans les passages suivants: 7.1-6: 10,14-2 1; 14,7-9.
et interpréter un texte par d'autres textes1 02. Cette preuve se trouve en La technique de preuve intri nsèque enthymème représente un argument
4, 1-25 où il y a un midrasll en deux parties. Dans la première partie, le formel dans lequel une prémisse majeur est quelques fois soutenue par
passage de 4, 1-25 fa it appel à Gn 15,6 et l' interprète par le texte du une prémisse mineu r et d'où une conclusion est tirée 107 . Paul les utilise
en 4, 14- 15; 11 ,6. 12-2 1.28-32.
97 En effet, les cinq parties de la rechnjque rhétorique sont i11Pe11rio (rrouver quoi
dire). dlsposirio (mct1re en ordre cc qui est. ITouvé). elocwio (aj o~tc~ l'omcment des
figu res) et actio (réciter le discours comme un acteur: gestes e.t d1c11on). De ces par-
ties, Îlll'e11tio. disposirio et elocurio sont les plus importants cr. B. MORTARA GARA- 103 Cf. R. J EWFTT. Romans, 27.
VELLI, Mun11ele di retorica. l 3. 10-1 Cf. R. J EWETT. Romans, 27. Lire également R.D.J. A DERSON. Glossary, 106-
98 Cf. La première partie de noire travail. le poinl 3. l .2 /1111e111io ou preuves en 2Co; 107· S.K. S rowERS. «Romans 7. 7-25». 180-202.
voir aussi l l. LA USUFRG, //a11dh11ch, §35 1-426: J. M AR-1IN , 1l11rike Rlietoric:. 97- 11 9. 105 Cf. li . LA USl1hRCi, Handlmcli , §§ 4 12-426; R.0 .J. ANDFRSO , Glossm:1•. 87-88:
99 Cf. R. Jl·WFTT, Romans. 24-30. R. 1FWt'TI . Romali.\'. 27.
100 Cf. G.L. KUSTAS. <<DiatTibe», 7- 11 : R. J EWFTT. Ronums. 25. 106 Cf. 11. LAUSUt::RG. lla11db11c/i . § 37 1; J. MARTIN. Antike Rltetorik, 242-243;
IUI Cf. A. Pl rrA, Lettera ai Romani. 3 1: R . J FWF"rr. Ro111t111.~. 27. J.O. MOOIŒS. Wrestling 11•it/J Ratimwliry ùt Paul. 33-37: R. J FWETT. Romans. 28.
102 Cf. R. J FWFTr, R()fnans, 27. Voir aussi W.R. S 1PGNl·R. «Romans 9,6-2 107 Enthyml!mc est une fom1e incomplète du syllogisme. en cc sens qu'une pré-
Mi<lraslrn, 37-52: M. GERT ER. «Midrashinl». 267-292: G. PORTC>N, «Dcfining misse mineure ou majeure peut êrre supprimée dans l"idée que le destinataire ou l"au-
Midrash», 55-92. R. Jcwett affinne. en outre. que Paul est un maitre en argument de ditcur peut la compléter. Il est court par rapport â un syUogisme et a souvent une force
111idrasli. Il le met habituellement avec les éléments de la diatribe pour pous cr les au- très persuasive. L'cnthymèml.! établit la plau ibilité mais il ne peut pas démontrer la
ditl.!urs ou les de. tinateurs à répondre. Voir ID.• Ro111a11s. 27: aussi A. PITTA. Leuera ai vérité finale d 'un énoncé. Cf. 11. LAU BERG. Handbuclt. § 371: J. MAR1 11 . Antike
Romani. 3 1. Rlterorik: 103: R. J EWlTI. Ro111c111s. 28.
ISO PARTLE LI : LE SEIGNEUR E T PUISSANT Cil IV : LE CONTEXTE DERM 14,1-9 15 1

Concernant la preuve extrinsèque est représentée par le citations du A la sui te de Jewett, nous admettons que cette partie comprend dix
credo de premiers chrétiens, les hymnes. bénédictions, doxologies et les péricopcs y compris l' introduction et la conclusion. 12, 1-2 est la rhèse
citations des écritures. Les fonnules du credo sont citées dans plusieurs qui concerne la motivation et l'appréciation de componement digne
endroits de la lettre. à savoir. en 1,3-4; 3,30; 4.24-25; S,6.8; 7.4: 8,32.34; d'éloges. Le passage en 12,3-8 expose l'élaboration d'évaluation dis-
10,9-10, 14; 11 ,33-36; 14,8-9 IOR . Les éléments liturgique , tels que les crète et d'exercice des dons charismatiques. l2,9-21 présente l'élabora-
hymne , les bénédictions, et les doxologies ont été identifiés en 1.25; 3,25- tion des indicati ons pour un amour vrai, authentique. En 13, 1-7, il s'a-
26a: 6.17: 8,38-39: 11 ,33-36: 13,11-12: 15,6I09. gi t de l'élaboration des directives pour les relations avec le gouverne-
Quant aux citations bibliques, il y a un consensus, auquel les spécialistes ment. La péricope 13,8- 10 nous propose la définition de l'amour en
sont parvenus, qui atteste que les références scripturaires constituent un rapport avec le prochain. 13, 11-14 expose l'avertissement à la vigilance
rôle central dans l'argument de la lettre aux Romains' 10. Au début de la morale dans les dern iers jours. En 14, 1-l 2, Paul donne des directives
lettre, il y a une emphase importante au sujet de l'Évangi le de Dieu qui modèles et rationnelles pour le faible et le fort. En 14, 13-23, il esLques-
avait été promis d'avance par les prophètes dans les saintes écritures (cf. tion des directives modèles et rationnel.les pour une édification mutuelle
1,2). En 1, 17, Paul affirme que la justice de Dieu se révèle dans la foi, car des membres en commtmaut6s hétérogènes. En 15, l-6, nous avons l'a-
il est écrit que le juste vivra par la foi. Le passage de 15,4 expose, toujours vertissement de sui vre l'exemple du Chri st en s'édifiant les uns les au-
au sujet des écritures saintes, que «tout ce qui a été écrit dans le passé le tres. Et en 15, 7-13, Paul présente l'horizon de moti vation de mission
fut pour riotre instruction, afin que La constance et la consolation que don- mondiale et d'unification. Jewelt fa it voir que les théories éthiques et
nent les Ecritures aous procurent l'espérance». LI a'cst cencs pas le cas. ici, les averti ssement<; des ch. 12, 1- 15, 13 représentent ln preuve culminante
d'énumérer toute ces citations. Nous voulons, cependant, noter que de la thèse principale de la lettre.
l'abondance des citations cripturaires dan la lettre aux Romains révèle
un cas unique parmi les lettre de l'apôtre des Gentils. 3. Texte de Rm 14, 1-9
2.6 Délimi1atio11 de Rm 14, 1-9 Après un exposé des questions relatives à l'ensemble de la lettre
aux Romains, nou pouvons, à présent, entamer l'étude proprement
La présentation des structures de la lettre nous a été très ut ile, car elle
dite de la péricope (Rm 14, 1-9) qui est l'objet de notre travail. Dan
nous a permis de trouver l'emplacement de Rm 14. 1-9, qui est l'objet
cette section, il sera question pour nous d'examiner la fo rme actuelle
de notre étude. Cette péricope appartient à la section exhortat ive en
de cet extrait pour savoir si elle correspond à sa forme origi nal e. En
12,1 - 15,13" '· A en croire Jewett, dont nous partageons l'hypothèse,
d'autres termes. il s'agit de procéder à uae étude cri tique ur le texte
clic représente la quatrième preuve de la lettre' 12. Dans celte section
de la péri cope en questi on ' 11 •
I' Apôtre donne des indications pour vivre dans la justice, il développe
Nous interrogerons les manuscrits disponibles pour savoir si le
la preuve fina le de la propositio en l, L6- l7. JI s'agit particuli èrement
texte a connu ou non des modifications au cours de sa transmission.
du v. 17 où il parle du juste qui vivra par la foi.
L'extrait que nous vo ul ons examin er présente quaLre problèmes tex-
tuels aux vv. 4-6.9 114 • Le premier problème se présente au v. 4. Il
1O!l A. P1r r A. Le11era ai Romani. 30. R. .lewetl affim1c que la citation en I .J-4 pose consiste à savoir lequel de deux mots entre Kuptoç (Se igneur) et 9<::6ç
ou donne le ton â toute la lettre, car on y trouve la raison commune mais sous divers (Dieu) était dans le texte origi nal. Du constat des spécia listes, laques-
a~pccb. Cf. ID.. Ro111a11s. 24.
tion s'est posée, du fait que plusieu rs oncia les (majuscules) : D F G L
109 Cf. A. PITT1\. leliera ai Romani, 31; R. .1 EWETT, Romans. 27.
l IO Cf. D.-A. Kurn. Die Schrifl, 88-9 1; R.B. HAYS, lnterrext1wl Echo. 34-83;
etc. et minuscul es : ar b d f g o vg sy'1 etc. lisent 9<::6c; à la place du
J.W. AAG E ON. 1Vri1te11 Also(or Our Sake. 73-127: A . PJTT1\, letlera a1 Ra111c111i, 28: mot KUpLOc;. Cc dernier est forteme nt soutenu par les manusc rits tels
R. J F.WFTr. Romans. 25.
11 1 Cf. J.-N. ALFTI 1. «Romans». 1554.1599: R. PLN A. «La qucstione», 86: lD..
l ellera ai Ro111a11i, 1, 77-78: R. J EWETf. Romans, vii-ix. l 13 Cf. W. EGGl.! R, Met0dologia del 111101 •0 Tesramemo. 2.
l I:? Cf. R. Jrwrn, «Follm"ing tJ1e Argument»: Io .• Romans, 724-900. ..
l t.i Cf. B.M. METZOER. A Textual Co111111e11ta111. . 468.
152 PARTIE Il : LE SE1GNEUR EST PUISSANT CH IV: LE CONTEXTE DE RM 14, 1-9 153

que sp~ 6 K A B CP "P cop~n.bo gotb arm eth a/. 1LS. Toutefois, il est cer- nuscrits suivants : F G 629 vgww etc. C'est manifestement uoe correction
cain que KUpLoç soit le mot original. La présence de 0E6ç était duc à théologique typique de la tradition. Toutefois, il est certain que la phrase
J'assimjlation du mot ec6ç du verset précédent (v. 3). telle qu ·elle e t rapportée par les meilleurs manu crits. faisait partie du
Le second problème surgit au v. 5 et est représemé par l'omission texte originaJ l 111.
de la particule ycip (en effet). Cette omi ssion est attestée par les ma- En effet, les problèmes de la critique textuelle relevés dans l'extrait
nu scrits sui vants: sp46 Kc B C2 D F G 'l' 048 etc. li faut toutefois re- 14, 1-9 ne représentent précisément plus des difficultés. Les biblistes sont
connaître qu ' il ex iste très peu de manuscrits où l'on ne rencontre pas parvenus à en trouver des solutions, à l'exception du problème rencootré
ce prob lème. Nous pouvons à peine évoquer K•A P 104.326 etc. C'est au v. 5. Dans ce dernier, la présence de la conjonction yap est omise par
du reste pour cette raison qu ' il s'avère difficile pour les exégètes de plu ieurs manuscrits, alors que très peu des manuscrits attestent sa pré-
prendre une décision sur la présence ou non de la particule yap , étant seoce dans le texte. Vu la di fficulté de prendre une décision, les spécialis-
donné que les manuscrits qui attestent son absence sont un peu nom- te ont préféré, tout en le mettant entre parenthèse, le laisser dans le texte.
breux que ceux qui en témoignent la présence de la particul e 11 6. Aussi Quant à nous, nous affirmons que a présence ou son absence n·attère pas
est-elle incluse dans le texte mais entre parenthèse pour signifier le le sens du texte.
doute qui règne sur sa présence.
Le troisième problème concerne un ajout d' une proposition para llèle
KCÙ o µÎl Q>povwv ri)v ~µÉpetv Kup[~ où cj>povE"'i «et celui qui ne règle
pas un comportement sur le jour du seigneur ne règle pas». fi s'agit
d' une glo e typique byzantine qui exprime le désir d' équilibrer la dé-
claration suivant le modèle de la proposition plus loin du même verset :
KCtl 0 µ~ eoetwv «el 9}1' il ne mange pas». Cet ajout se trouve dans les
manuscrits, tels que C 'l' 33 ® sy. Soulignons qu ' il y a cependant des
46
manuscnts · ·importants, à savo1r · m
·+-' K A B C'"'d
- D F G 048 etc.. qui.
soutiennent le texte sans cet ajoutl 11.
Le quatrième et dernier problème de la péricope se trouve au v. 9. li
s'agit de la phrase âTIÉ0etvcv Keti. E(11ofv I est mort et vit». Cette ply-a_se est
bien présente dans les très anciens et meilleurs manuscrits dont K A B C
1739 copsn.bo goth arm eth al. Par contre, dans certams manuscrits, sous
l'innuence probablement de 1TI1 4. 14 ('IT)OOÛÇ anÉ0avw KIX.L avÉoîll I Jé-
sus est mort et s'est relevé), le scribe voulant préciser Je sen de E(11oEv, l'a
donc remplacé par le verbe civfo-.11. Ce changement est attesté par les ma-

115 Cf. B.M. METZGER. A Textual Co111111e11rnrv. 468; C.E.B. CRANFIEI n, A Criti-
cal and Exegerical Co111111e11r01:v. 11. 704; R. JEwi::·i r. Romcms. 829.
116 Cr. 8.M. M ETZGLR, A Textual Co111111e11u11y. 46R; C.E.B. CRANFlELD. A Criti-
c:al and Exegetical Co111111e111ary, li. 704; R. JFWFTI, Romans. 830. Mctzgcr affinne
que le copiste aurait enle\é la panicule. car dans ce verset elle exprime simplement
une continuation plutôt qu'une relation de cause. Le copiste ne reconnaissant pa!) cet
emploi paulinien, il l'a carrément enlevée. Voir ID., A Textual Commentw y. 468.
Jewett. lui , fa it voir que syntaxiquement le mot ycip est étranger ou sans rapport dans 118 Cf. B.M. M E'I ZG l, R, A Textual Co111111e11rc11y. 468; R. J EWETT, Romans. 830. Cc
une phrase avec 1·ant ithèse µè.11 ( .. .] ôÉ. cr. 1D.. Romans, 830. dernier affim1e, en outre. qu'il 'agit bien d'une correclion théologique. typique de ln
l r7 Cr. B. M. M ETZGER, A Text11al Co111111e11tary, 468; R. J EWFTT.
,. Romans. 830. tradition reflétée dans les manuscrits F et G ailletLrs dans la lettre aux Romains.
C HAPITRE V

Une lecture attentive de Rm 14,J-9

Ce chap itre sera consacré à une étude descripti ve, verset par verset,
de l'extrait en examen de la lettre aux Romains. Nous procéderons par
tro is étapes. La première s'occupera de l'analyse syntaxique. Celle der-
nière nous pem1ettra de proposer une traduction 1ittérale des versets du
grec en français. Dans la deuxième étape, il sera question de mettre en
exergue la structure de chaque verset. La troisième et dernière étape
servira à étudier imultanément deux ou plusieurs ver et qui ont une
unité de sens. Par cette méthode, nous espéron arriver à mieux appré-
hender le message de l'apôtre au sujet de l'agir pui sant du Seigneur
pamii les chrétiens, tel qu 'i l l'annonce dans la lettre aux Romain , no-
tamment en 14, 1-9.

1. Rm 14,1
Tàv ô(: à.o0woûvra tfJ TT LOTH
npooÀnµpcivfo0t-,
µ~ t-Lç ÔLnKp i.oHç ôtaÀoyLOµwv.
« Qui est faible dans la fo i, accueillez
non pas dans les contestations des raisonnements».
1. J A 1ur~vse .\:v111axique du v. 1
- Tov oè: c.i:o9fvoûvtn: tfl rrlotE:L rrpooAfx.µpâvEo9E. L' article défini
masculin t ôv, avec lequel commence lev. l , se trouve à l'accusatif sin-
gulier. li indique le genre et le nombre de à.o9Evoûvm. La particule ôÉ
peut soit introduire une opposition, soit marquer une liaison d' idées
avec ce qui précède. Dans ce verset, elle sert à marquer le lien entre le
discours précédent et celui qui suit. Dans cc cas, la parti cule ne ·c tra-
156 PARTIE TI : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH. V : UNE LECTURE ATTENTIVE DE RM 14. 1-9 157

duit pas 1• Le verbe &o9fvoûvrn est un participe présent de âo9EvÉw / Le mode impératif, par contre, nous enseigne qu ' il est question. dans ce
«être faib le: être malade: être impuissant». Son emploi au présent verset, d ' une exhortation. Conformément à l' analyse fa ite. la phrase
ind iq ue non pas une action continue. mais plutôt une action qui reste Tov ô~ àoeevoûvra nj n( on:L npoo.l..aµpaveoee peut se traduire par
valide à tout moment. JI s'agi t d·un présent gnomique2• «qui est faib le dans la fo i, accueiUeZ»
Le partici pe àaefVoûvra est décliné à ! 'accusatif en concordance avec - µ~ elç Ôl<XKp(oHç ÔL<XÀ.oyLoµwv. La particule µr) affecte négati -
l'article t 6v qui le précise. JI s'agit donc d' un participe substantivé3 et vement la phrase, en cc sens qu'elle y apporte une nuance qui nie
sert de complément d 'objet direct au verbe npoo>-aµp&vEo9E. Ainsi la l'énoncé. La prépos ition ELÇ est construite dans ce verset sans verbe
phrase 'rov ô~ àa9Evoûvta est traduite par «l' étant faible ou qui est ni substantif qui puisse impliquer un mouvement ou une direction.
faible»4 • L'article défini féminin r'ti se trou ve au datif singu lier. Il est Cependant. elle marque en elle-même cette idée de mouvement. Ell e
constru it avec le substantif tT LO'l"EL dont il détennine le genre et le régit l'accusatif cl se traduit par «dans»s. Le nom féminin pluriel
nombre. Il (oi-EL est naturellement au dat if. Avec son article, il repré- ÔL<XKpLOELç est à l' accusat if à cause de la préposition ELç qui le
sente le complément d' objet indirect du verbe ao9wÉw. Ainsi 'l'ij n Lo't'EL souti ent. Il signifie «séparation, di sso lution, di stance, co ntes tation,
est rendu par «dans la foi ». querell e» 9 • Le terme Ôl aÀoyLOµwv io est éga lement un substantif mas-
Quant au verbe déponenl npooÀaµp<ivEo9e, il se trouve à l' impératif culin pluri el au génitif. li s'agit d' un génitif objectif, d 'autant plus
présent moyen deuxième personne du pluriel du npooÀaµp<ivoµaL 5 / qu ' il est obj et des contestations. li est traduit par «calcul , rai son-
«accueillir, recevoir, prendre à prut», etc. 6 . Son sujet du verbe est un nement, conversation , discussion ». Nous trad uisons donc la phrase
pronom personnel «vous» inclus dans le verbe même. fi renvoie à un µ~ Elç ôLaKp loELç ÔL<XÀoyLOµwv par «non pas dans les contestations
groupe de personnes. Dans ce cas-ci, il se réfère à la communauté de des raisonnements».
Rome. L' action de ce sujet est valide à n' importe quel moment, à cause
de l'emploi du temps présent, dit gnomique. Signalons que l' effet de 1.2 Composition du v. I
cette action retombe sur le sujet suite à l'emploi de la voix moyenne7 .
Texte v. 1 Agent
1 Cf. BAGD. <<fX». 213; BDF. «OÉ». § 447; R. J EWETI. Romans. 833. Quelques bi-
bli:.1cs, no1ammen1 ceux de langue anglaise, le lraduiseni par «but>> (mais). Lire A Tov ôÈ ào0evoûvta rfl TTLOîH Faible
J.D.G. DUN?\, Romans . li. 797: J. MURRAY, The Epistle, 2, 14 1. C.E.B. Cran field sou- «Qui est faib le, dans la foi »
tic111 que la particule oc marque le début d'une nouvelle péricopc. Voir ID.• A Cri1ict1I
and Exegetical Co111111e111cuy, TI, 699. B TTpoo.l..aµj3tivE'o0e, µ~ fLÇ Ôl<X (Fort )
2 Le présent gnomique cs1 employé dans les affinnations des proverbes cl des KpLOHÇ ôux.1..0yLOµwv .
maximes. li a une valeur sans limile dans le temps. Cf. B.M . FANNING, Verbal aspect. «Accuei llez, non pas dans les contestaLions des rai
208-2 17. sonnemcnts»
3 cr. BOF, «The Participle». § 413.
4 Rappelons. comme nous l'avons noté dans la première partie de notre 1ravail, que
Puul u1ilise particulièrement ce verbe ào9wi.'c.>/«être faible, d'ê1rc impuissant» en Le verset comprend une structure parallèle : AB. En A, nous avons
foi sant allusion ù la condi1ion fragi le de l' homme (cf. 2Co 11 .30; 12,9. 10: 13.4; ICo un verbe substanti vé cio9Evoûvta et un substantif n(o't'EL. Le verbe ex-
2,3· 15.43). Cf. le ch. LT n. 4R de cc lravail. prime l'étal de la personne et le nom traduit l'aspect de cet état de la
S rrpoo>..cxµp&voµtn cons1i1ue la forme composée du verbe >..aµp&vw qui signifie personne. En B, il est questi on d' un verbe npooÀaµpcivEo9e et des subs-
«prendre, prendre en possession, recevoir». Cf. A . BAILLY. «Àllµpâ11w». GDGF. 11 67:
C. SPICQ. «TTpoo}.aµpâvoµa L». Hl. 195.
6 Cf. J.-C. tNGëLAERF - al.. mrpoo}.aµJ3clvoµaL». DGFNT. 130. Il existe aussi la 8 Cf. A. BAILLY, m·tç», GDGF. 597.
9
forme 11poo>..aµJ3civw qui se traduit par «prendre en outre,>, <<prendre en a11iran1 à soi». Le substantif ÔLtXKPLOLÇ est moins employé dans le !:,'Tee biblique. Dans l'AT. il se
Oc cc dernier dérive le ens de «prendre sous sa protection». «aider». «assisler». etc. trouve une fo is dans le 1ivre Job (LXX Jb 37, 16) et trois fois dans le NT en Rm 14.1;
Voir BAGD. mrpooi..aµjlcivw», 767; A. BAILLY, «11poo>..aµJ3ci11w», GDGF. 1671: 1Co 12, 10 et l lb 5, 14. Cf. A. PITIA. leuera ai Romani, 463.
C. SPICQ. «11poo>..aµpci11oµarn. UJ. 195.197. IO Soulignons que cc terme est en quelque sorte parallèle à celui présent en Rrn
7 Cf. M. ZrRWlCK, Bihlical Greek, § 234; BDF. «Middle». § 316; J.D.G. OUI\ 1,21. Dam. cc dernier, il a une valeur très négative. Cf. A. PIITA, leuera ai Romani.
Romans, 11. 798; P. E LER. Conjlict. 347: R. JEWETI. Romans. 834. 463 n. 260.
158 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUIS ANT CH. V : UNE L ECTURE ATTENTI VE DE RM 14,1 -9 159

tantifs ÔLO:Kpl.oELç ôLcû.oyLoµwv. Ces derniers décrivent la manière dont En somme, au v. 1, Paul fait un di cours générique qui ouvre la sec-
l' action du verbe doit se réaliser. tion cx hortative de 14,1 - 15, 13 15. Il introduit son exhortation envers les
Concernant le lien syntaxique, c'est npooÀ.aµp<iveo9<: qui constitue le membres de la communauté. li les invite à accueillir ceux dont la situa-
verbe principal du verset. Son sujet est le pronom personnel «vous» tion non pas physique mais morale et reJjgieuse a été fragili sée. Ceux-ci
contenu dans le verbe. li renvoie à un groupe de personnes qui sont les doivent être non seulement acceptés, mais égalemen t reconnus comme
membres de la communauté destinataire de la lettre. 11 ne serait pas membres de la communauté. Pour ce faire, ce geste d'accueil doit être
erroné de outeni r qu'à travers ce verbe. l'auteur invi te la communauté fai t sans aucune polémiq ue.
au sens de l'accueil. La particule ôÉ indique le lien entre toute la section
14,1-15,13 - dans laquelle se trouve la péricope 14. 1-9 de notre étude 2. Rm 14,2
- et la section précédente 12- 13. En effet, les deux sections relatent
les attitudes et comportements des membres de la communauté. Nous oç µfv ITLcrtfUEL <j>o:yüv mxvrr.t,
pouvons notamment ci ter l'argument concernant l'exercice ou le non-
oô(: &oewwv Afixo:va Èo9(EL.
«L' un croit manger tout,
cxercice de la charité 11. L'autre qui est fa ible des légumes mange».
Le compl ément d'objet direct Tàv cio8evoû1rm / «qui est faib le» 12
désigne l'étal de la personne que la communauté doit accueillir. Cons- 2.1 Analyse syntaxique du v. 2
tru it avec l'article défini. le participe &o9cvoûvra indique un membre
bien connu par les autres croyant de l'église de Corinthe. li s'agit bien - oç µÈv TILO'!fl)f L cj>cxyElv navm. La proposition commence avec un
entendu, de celui qu i est dépourvu de force. pronom relatif masculi n nominatif singulier oç. Il ne joue pas dans ce
A la suite de notre enquête syntaxique. il s'avère que le premier com- verset sa fonction ordinaire de représenter un nom ou un adjectif. li est
plément d'objet indi rect :fl n(o-rEL précise davantage le genre de cell~ consrruit avec la particule corrélative µÉv et sen de sujet au verbe mo
faiblesse. fi s'agi t, en fail, d'une fragi lité qui se situe au ni veau de la foi. tEUEL. La particule µÉv qui , dans cette phrase. est emp loyée dans la
Cette dernière est entendue comme adhésion totale et ferven te de la fom1e de oç µÈv [ ... ] 6 oÉ, indique clairement une affirmation à la-
persom1c au Chri st et à a bonne nouvelle. Il n'est donc pas question quelle s'oppose une autre affirmation. Cette construction oç µÈv ( ... ] ô
d' une défa illance en li en avec la réa li té soc iale mais plutôt avec la ré- QÉ. est traduite par «l' un [ ... ] et l'autre» 16.
alité religieuse voire morale13. En d'autres tem1es, ce qui est considéré L' indicatif présent actif du verbe moteuH se trouve à la troisième
comme faib le se dans cette personne, c'est a pratique de la foi. Quant personne du singulier de moîeuw I «croire». JI n'a cependant pas le
au second complément d'objet indirect µ~ d.ç ôuxKptoHç ÔLaÀoyLOµWv, sens religieux de «croire en», mais plutôt celui de «ten ir pour vrai»,
il révèle la façon dont les croyants de Rome doivent recevoir ceux qui d'« estimer comme véritable»l 7• L' action de ce verbe exprime une ré-
sont faib les dans la foi 14 .
de semblable. li invite les Philippiens à agir en tout sans munnures ni contestations.
11 Il y a également une relation avec les on7c premiers. chapitres. Cert~ relation est Cl'. A. P1rrA, le/fera ai Romani. 463 .
mise en relief en particulier à travers le problème d·un1r les deux faction s dans la l5 Cf. E. KASEMANN. Co111111e11tw:v 011 Romans, 364.
communauté: juif-chrétien et ethnico-chrétien. et les att itudes de jugement mutuel. Cf. 11
' Lo constn1c1ion oç µÈ'v [ ... ] 6 ô~ est utilisée par Paul à la place de la fonne o
P.F. ESLER, Co11{lic1. 339-340. µè11 1.. . 1 6 fit. Cf. A. B AILLY. «µfV». GDGF. 1249: BOF, ((0 µfV [ .. .16 Ôf (oç µÈv
12 R. Jewetl voit dans CCL objet direct, qui ouvre la section exhortative, une admO· [ ...~ 0 ôt )». § 250.
nition gnomique. en cc sens qu ' il exprime une pensée d'ordre général concernant l'ac- Voici cles rraducLions possibles pour ce verbe lTLCJTfUH: «to have confidence to
cueil du faible dans la foi . Cf. ID.. Ro111a11s, 834; aus i 11. SCllLIFR. Der Riimerhrief. risk. to fcel cqual to» (BOF, «The Infinitive». § 397 n. 2); J.A. FITZ IYFR. Romans.
402: M. REA O ER. 71ie Strrmg, 48. 688-689): «croire pouvoirn (BJ). Il y a des commentateurs qui estiment que la formu-
13 Cf. G. STÂllLI . «cio0clf1Îi;». TDNT. 1. 492: J. ZMtJEWI KI, «ÙoElEvÎJi;». EDNT. 1, lation ne correspond pas au style habituel de Paul. Ainsi. ils ont paraphrasé la proposi-
171: S. L ÉGASSE. l'épitre. 858: A. P ITIA, la leuera ai Romani. 462; R. J FWl:TI, tion afin qu'elle rejoigne le style habituel de !'Apôtre. Cf. C.E.B. CRA\IFIKD. A Cri-
Roman , 843 n. 3 1. Notons que Saint Paul. dans certains passages de ses écrits. af- tic:al and Exegetical Commemmy. Il. 698; J.D.G. OUNN, Ro111a111". Il. 799: A. PITIA.
tirme cependant que la faiblesse coasti1ue le lieu cle la manifestation de la puissance la lettera ai Romani, 412. R. Jewcu, quant ù lui. pense qu ï 1serait mieux de laisser le
de Dieu. Cf. 2Co 4, 7- 11 : 11.30; 12,5.9-10: 13.4.9. tcxre rel qu'i l est et d 'admettre que Puul a créé. dans ce verset, une paraphrase exagé-
1-1 En Ph 2, 14, même si le contexte n'est pas le même. Paul ntnrme quelque chose
rée en parlant de la position du «fort» dans la communauté. Par ailleurs, il trouve que
160 PARTI E Il : LE SEfGNEUR EST PUISSANT CH. V: UNE LECTURE AITENTIVE DE RM 14.1-9 l6 1

alité générale qui n'est pas limitée par un temps préc i ~. C'~~t une.réalité
v. 2b b ~ âo9Evw11 .l.axava tQfiliiJ Le fai ble
valable pour tout le temps. La forme Q>aye'iv est un rn fin 1trf a~~1 ste .d.u
verbe fo9(w. Il sign ifie «manger, consommern 18. Use trouve à 1 mfinillf «L·autre qui est fai bl e des légumes mange»
à cause du verbe moîEUEL qui l'exige et représente l'objet direct de ce
verbe. L'adjectif indéfini mivrn est décliné à l'accusatif neutre pluriel. Le verset se compose de deux propositions qui sont étroitement liées à
Avec son emploi au neutre pluriel, il est rendu en français par <<tout ou travers la fonne 0ç µÉv [... ] o ôÉ et l'emploi du verbe w9(w. La cons-
toute chose» et exprime une quali té générale 19. truction de ce dernier diffère dans les deux propositions par le mode et
A la suite de l'analyse faite, la phrase oç µÈv moîEDEl Q>ayeî.v naVîa temps. La première comprend un verbe principal monuEL, qui a comme
peut être traduite ainsi «l' un croit manger tout ou toute chose». sujet le pronom relatif Oç et comme complément d'objet direct lï nfinitif
Q>ayeî.v. Celui-ci a, pour sa part, un complément d'objet direct navra. Il y a
-6 ô€ ào9evwv l..axava Éo9LEL. L'article défini o se trouve au n~'!li­ également la particuJe corrélative µÉv qui étabfü un lien d'opposition entre
natif masculin singulier. fi précise le genre et le nombre du parti cipe
les deux propositions. Quant à la deuxième phrase, clic est constituée d'un
présent actif ào9evwv du verbe &aeevÉw. Comme son article, il se trouve
verbe principal Èo9[u, d'un sujet b âa9EVwv, d'un complément d'objet
au nominatif masculin singulier et signifie «étant faible, étant impuis-
direct Mxa.vcx, et d' une particule corrélation ôÉ. Celle-ci indique une simple
sant». LI est empl oyé comme un participe substantivé, expr,imant ~ne opposition sans l'idée de contradiction. Nous apprenons ici l'exhortation
action générale et va lable à tout moment.. Cette n ua n c~ generalc vient de !'Apôtre au sujet de prendre un repas. Il parle, d'une part, de celui qui
du temps présent gnomique avec l eq u~ I il est constrmt.. ~n outre, ce
esri me comme vrai de tout consommer (les forts), et d'autre part, du faible
participe substantivé joue le rôle. du sujet dans. la p ropos1t10n. Nota~, qui c nourri t des légumes21.
toutefois, que l'article est construn avec le ~orrelatif ôf dans la ~o~me oc.;
µÈv [ .. .] 6 ôÉ. De son côte. la particule ÔE marque une o ~p ~s1t1on de
simple correspondance. En effet, il .n'a pas l' id.ée de contradtct!on. . 21 La pratique de manger des légumes pour des raisons rcligieu es ou philoso-
En ce qui concerne le substanti f Mix.ava, Il se trouve à l accusati f phiques était assez connue dans le monde gréco-romain. Cf. J. 81:.HM. «Èo9(c..m,
neutre pluriel. JI sert de complément d' objet direct au verbe Èo~LEL. ~e TDNT Il , 694; U. W ILCKJ:NS, Der Brlef, Ill , 11 2; J. D.G. D UNN. Romans, Il , 798;
dernfo r est emp loyé à l' indicatif présent ~ro i s i è m e pe r~o nne du singulier M. REASONER, The Strong. 75-84; R. JFWETT. Romans, ~37 . Le bibliste Rauer,
partant donc de cc présupposé de Io consommation des légumes, aflinnc que le
de èo9l.w et se traduit par «il mange». Etant construit au présent gno- faible qui mangeait des légumes représentait le groupe des ethnico-chrétiens. Ceux-
mique, èo9i.EL révèle donc d' une action de caractère géné.ral.et est !enue ci vivaient encore sous l'innuence de leur réalité précédente des religions mysté-
pour valide à n ' imyort~ quel .mo,ment. No ~s pouvo~ s ainsi. traduire ~a rieuses gnostiques et hellénistes. Voir LD.. Die Schwachen, 164-169: aussi W.G.
phrase o ô€ &o9evwv Mixa.va. éo0LEL par «I autre qw est faible des le- KOMMl:.L. /111rod11ctio11 10 the Ne"' Tes1a111e111. 3 10-33 1; S.K. STOWERS. A Reread-
gumes mange»20 ing, 317-323. J.D.G. Dunn. pour sa pan. aflinne que Paul. lorsqu'il écrivait sa lettre
aux Romains, avait en tête la loi j uive par rapport aux aliments. Ainsi. il soutient
l'hypothèse de la majorité des biblis1es selon laquelle les faibles étaient des judéo-
2.2 Composition du v. 2 chrétiens. Cf. ID., Romans, Il , 790-802; R. JEWETT, Pail/, 42-46; ID., Romans. 838;
u. WILCK C:NS. Der Brief, 109- 115: D.J. Moo . The Epistle. 829.837; R.L. ÜMANSON,
Texte v. 2 Agent «The 'Wcak'». 107; c. f-I EIL, Ableh111111J!,. 258; N. ELLIOT, «Asceticism». 232-235.
11 est connu, pur ailleurs, que les règlements kashers ou 1ous les règlements qui
V. 2a oç ~ TTLOîEUH ~<IYEÏ.~ mivrn, (Le Fort) obéissent ù la religion j uive n'empêchaient pas de manger lu chair, cependant l'on
«L' un croit manger tout» doit savoir que la situation des membres de la communauté de Rome s'inscrit dans
un contexte de la diaspora. Dans cc dernier. les Juifs évitaient de se contaminer en
consornma111 la viande impure, d 'autant plus qu ' il n'était pas facile de dist inguer la
qualité de la viande. Cf. A. PHILON. legatio 361-362: J.M.G. BARCLAY, «Do We
le verbe iTL<J":fUcù a le ens de «croire que» comme en Ac 15.1 1. du fait qu ' il est suivi Undenninc the Law», 287-308; L.H. FELDMA . Jew and Ge111ile, 123-1 76: S. SAFRAI.
par l'infinitif. Lire ID., Rom(ms. 837. au si O. MICHEL, Der.B_rief. 423 . , . «Home and Family», 746-748: A. PITIA, lellera ai Romani. 464; R. JEWElT, Ro-
18 L'expression «manger toute chose» annonce une réal1tc globale. 11 s agit de 1ou1 mans, 837. A. Pitta affirme que les faibles qui ne mangent que la verdure sont ceux
cc qui est comestible. Cf. R. JEWETI. Romans. 837. qui ont choisi de rester végétariens pour ne pas se contaminer avec la chair impure.
1'9 Cf. BOF, «Gendem, § 138. Cela ne veut pas dire qu'il s'agit des j uifs chrétiens par rapport aux Gentils chré-
20 «The weak only cat lem1cc» (R. JEWETr, Rnmons, 838). tiens, qui seraient des forts. Il j ustifie son affi rmatio11 en montrant que la sect ion
162 PART IE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH. V : UNE LECTURE ATTE TIVE DE RM 14.1-9 163

En relation d'opposition avec l'adjectif indéfini mivrcx, la deuxième taxique, il n'y a pas de lien direct entre les w. l -222. Toutefois, l' unité
proposition se traduit par «l'autre qui est faible ne mange que des lé- de ces deux versets se justifi e tout de même par les termes identiques. li
gumes». Il ressort de ce verset deux composantes au sein de la com- s'agit de &o9evoûvw. au v. 1 et &.oeevwv au v. 2. Ces deux verbes ont
munauté : les forts qui consomment tout et les faib les qui ne se nour- une construction semblable dans les deux versets. l ls sont tous les deux
ri ssent que des légumes. conjugués au participe présent gnomique. Ils expriment tous deux l'état
d' une personne.
2.3 Le lien syntaxique et strucwrel entre les vv. 1-2 Cependant, il y a dans les deux versets des mots qui, quoi que identi-
ques, ou qu 'appartenant au même champ sémantique, n'assument pas la
Texte des vv. 1-2 Agents même fonction ou n'ont pas le même sens. Nous avons premièrement
le cas de la particule ô(. Celle-ci e trouve bien présente dans les deux
A. 'T'ov &: ~oeevoQ!lî~] rij Tito-:n Le faib le versets, mais ne joue pas le même rôle. Au v. 1, ell e sert de liaison ou
«Celui qui est faible dans la foi » de lransition entre la section précédente et la suivanle. En revanche, au
B. 1Tpoo>..aµ[XivEo0E , µ~ etç v. 2, elle marque une simple opposition sans idée de contradiction.
ÔLaKpLOfLÇ ÔLaÀoyLOµWv
(Les forts)
Deuxièmement, il est question du substantif rrl.otH au v. 1 et du verbe
«accueillez, pas dans les contestations des raison
nements»
monuEL au v. 2. Les deux expressions ont la même racine mais djffé-
rent de par leur catégorie gram maticale. nl.orEL désigne Je genre de
B' Oç µÈv nLOî(UEL cpayELV mxv:a, (Le fort) l'état de celui qui est faible, tandis que lTLOtEUEL traduit l'action d' une
«L'un croit manger toute chose» personne. Du point de vue émantique, leur signification se distingue
A· 6 Q: lioeevwïïl Afixava Éo0tH. Le faible également, car le mot TTtonç a un sens religieux 23. U désigne une
«l'autre qui est faible mange des légumes» croyance, comprise comme adhésion intime à Dieu. Par contre, le verbe
TTLO tEuw n'a pas ici le sens de croyance : avoir la foj24. Il sign ifie plutôt
La présentation de cette structure pennet de montrer le lien entre les tenir pour vrai , estimer comme véritable.
deux versets. Remarquons de prime abord que, du point de vue syn- Concernant la composition de ces versets, elle présente un chiasme
(AB B'A') qui met en va leur une opposition. Les propositions AA' se
réfèrent aux faibles dans la foi et celles BB ' s'adressent à une autre caté-
Rm 14, 1-15,13 ne rapporte rien qui va dans ce sens. Le bibListe italien soutient, par gorie des membres de la communauté. Tl s'agit de ceux qui ne présentent
contre. que les faibles peuvent être soit les chrét iens d·origine juive, soit les Gentils pa_s de défaillance, c·est-à-dire les «forts»25. Nous les appelons ainsi, du
qui ont adhéré au christianisme à travers leur contact avec le j udaï me onhodoxe. fait qu ' une exhortation à accueill ir le «faible dans la foi» ne peut être
Io .. lettera ai Rumu11i. 464: <d forti », 407-409. Voir aussi M.-J. LAGRA GE, Ro- adressée qu 'à celuj quj n'est pas dans cette cond ition. Par conséquent, il
mains. 338-339; S. LYONNFT. Les Épitres. 126; A.J.M. WEDDERBURi'll, The Reaso11.
30-35. En outre, Pilla fa it voir que la situation du fa ible qui ne mange que la ver- s'agit des membres forts dans la foi de la communauté de Rome26.
dure est analogue à celle de Daniel {cf. Dn 1.8- 16). Ester (LXX Est 14, l 7), Judith
22
(cf. Jdt 12, l-2) cl Tobie (cf. Tb I , 10-1 2). Ceux-ci s'abstenaient de la viande et du A . Pitla voit le v. 1 comme la lhèsc priocipale ou la propositio de Rm 14.2-
vin à cause de leur foi. pour éviter les aliments impurs dans le contexte de lu dias- 15, 13. Cf. Io., lettera ai Romani, 462. P.J. Tomson parle ùu v. 1 comme un vers
pora. lis craignaient, en effet, de courir le risque de se contttminer. Cf. ID.• lettera inrroductifdc la scène. Voir ID.. Paul. 237.
2
ai Ro111011i. 464: aussi ISSACAR 4.5-6: 2M 5,27: 4M 1.34: F. JOSÈPHE. Vitn 3. 13- 14. ~ J:A. Filzmyer affirme qu ' il s'agit de la fo i chrétienne authemiquc dans le sens
Quant à nous, nous soutenons l'hypoll1èsc scion laquelle les faibles dans la commu- paulinien. Cf. Lo., Roma11s. 688-689. E. Kascmann parle de le «paix». Voir Io., Com-
nauté de Rome étaient non seulement des judéo-chrét iens mais aussi des ethnico- me11t01J• 011 Romans, 365.374.379. C.E. B. Cranfield. mèmc s'i l a traduit rr[o-:EL par
chréticns. Ceci est par la simple raison que la plupart de ces Gentils avaient sympa- «foi». pense toutefoi quïl scrai1 mieux de le rendre par les mots tels que «assurance»,
thisé avec le judaï me. De ce contact. ils avaient naturellement la connaissance de «confiance», comme c'est le cas en Rm 14,22. Cf. Io .. A Critical and uegetica/
la loi mosaïque, entre autre la loi alimentaire et l'observance du abbat (cf. Rrn 7.1 ). Commemary. ll. 697.
Ccst donc bien possible qu·en adhérant au Christ qu'ils aient gardé encore, comme 24 Cf. J.A. FITZMYER. Romans, 688.
25
certains Juifs, cette pratique de la loi. Cependant. les fa ibles judéo-chrétiens étaient Pour A. Pitta, l 'exhona1ion de Paul concerne les forts qui ne sont pas encore ci-
probablement les plus nombre que les faib les clhn ico-chrétiens, du fa it que la loi tés.,explicitcmeot dans ce v. 1. Cf. ID., lellera ai Romani. 462.
6
était l' apanage des ju ifs. - Pour ce qui concerne l'idcntilé des «forts». nous affinnons qu' ils étaient aussi
164 PARTIE Il : LE SEIGNEUR E T PUISSANT CH. V : UNE LECTURE AITENTIVE DE RM 14. 1-9 165

En défi nitive, nous pouvons affinner qu' il ex iste une unité de sens ration générale el valide à to ut moment suite au temps présent. Les
en tre ces deux versets à travers, notamment le verbe cio0EVÉW. En effet, d: ux partic~e~ µ~ affecte~ l ,les 1 vcrb~s èo?(~v-=~ e t ÉÇou0fvd~w par une
il s'avère que lev. 1 sert d".introducLion el q ue lev. 2 d'explicitation de negauon. A ms1 la phrase o rn0twv wv µ11 Eo0 tovta µ~ éÇou0EVE Ltw se
ce qui vient d 'être énoncé. Lraduit par «Que le mangea nt le non-mangeant ne méprise pas».
- 6 ôÈ µn Èo0[wv tàv ÈoS[ovta µn
Kpi.vkw. L'article défini 6 précise
J. Rm 14,3 le genre et le nombre du participe Éo0 1.wv. Ce participe se trouve donc
o ~aetwv :èw µ~ ~o9[oVLa µ~ ÈÇou0n-E(rw. a~ no minatif ~asculin singulier et sert de sujet au verbe KptvÉ•w.
a ôÈ µ~ fo9[wv rôv t.aetovm µ~ KptvÉ:w. o
Comme verbe. 11 est au présent. Avec son article et sa pa rticuJe µ~
à 0Eàç yà.p aù:èw npooEÂ!if3e-ro. qui l'~ffecte par une négation .. Èo8 1.w~ est rendu par « le non-mangeant
«Que le mangeant le non-mangea nt ne méprise pas, o u qu1 ne mange pas». La particule ÔÉ est employée dans la forme ô ôÉ
Mais que le non-mangeant le mangeant ne juge pas. pour marquer la continuation du récit. Il se traduit par «mais le»1s.
Car Dieu l'a accueill i». L'article ~6v est e mpl oyé avec le participe foel.ovta do nt il détermine
le genre et le nombre. Il s sont déc li nés à l' accusatif masculin singulier
3. 1 Analyse sy111a.xique du v. 3 cl assument le rôle du complément d' objet d irect du verbe KpwÉîw.
- b foalwv i:èw µ~ iaatovm µ~ ~Çou0e:ve: L. tw. La phrase commence Comme pour le participe substantivé Èo01.wv, l'action du participe subs-
avec un anic le défini mascuJin singu lier ô. li est décliné au nominatif et tantivé Èo01.ov~a a une valeur d' o rdre général e l donc toujours valide.
détermine le genre et le no mbre du participe fo0 (wv. Ce dernier se tro u- Le verbe principal de la phrase 1<pw Éîw est un impératif présent acti f à
ve au présent actif du verbe Èo8l.w et au nominatif masculin singulier. Il la troisiè m_e personne du ~gu~ier,de Kp(vw. li a ici le sens de «juger ou
s'agit d ' un participe ubstantivé et son action désigne une réa li té géné- mettre_en j ugement» 29 • Il s ag11 d une action exho rtative d 'ordre géné-
rale à cause du présent gnomique. Dans cette phrase, il est ujet du ral qu_1 est valable pour tout le temps pa r l'effet de l'impératif présent
o
verbe ÈÇou0EVfLTW. Ainsi foel.wv se traduit par « le mangeant ou qui gn~m 1 que. Avec .la négation exprimé parµ~. Kpl.vw se traduit par «qu ' il
mange». ne Juge pas».
L'article défini t6v. déc liné à !"accusatif, précise le genre el le nom- A la lumière de l' ana lyse effectuée de la phrase 6 & µn
èoel.wv -rov
bre du participe fo8(ov1"cc Ce dernier est au présent actif ayant le rnêmc èaelovrn µ~ Kpt.vÉ'tw, nous po uvons la tradufre de la manière suiv ante :
genre et nombre que son article. 11 est donc un participe substanti vé et «rnais que le non-mangeant le mangeant ne juge pas».
sert de complément d 'objet direct du verbe èÇou0wd:w. Celui-ci c t - 6 0Eoç yàp aùto11 rrpooEÀtij3Eto. L'article dé fini décliné au nomina-
conjugué à ! ' impératif pré ent troisième personne du sin gulier du verbe ti_f masculin singulier 6 est construil avec le substantif 8EÔç dont il pré-
È~ou9EvÉw. TI signifie «mépriser, avoir peu d 'estime, traiter avec mé- c1 e le genre et le nombre. ·o ~Oc; constüue le sujet du verbe
pris»n. Il s'agit d ' une exhortation ayant, ici également. une considé- npooE.>..âpern. Ce dern ier est un indicatif aoriste moyen à la troisième
personne du singulier du verbe npoo.laµpcXvoµm. Il a le même sens que
celui du v. 1. Avec son sujet 6 9e6ç il se traduit donc par « le Dieu a ac-
bien des chrétiens païens que des chrétiens juifs. Nous osons le dire en nous référnnt cueiIli_». Le temps aoriste ind ique que Cette action a déjà é té accomplie
en Rm 15. 1 où Paul . le juif. se déclare d'être parmi les forts. c·cst-à-dire ceux qui se par Dieu dans un temps bien déterminé. Cependant, nous pensons q ue
sentent complètement libre de tout manger. Comme nous l"avons soutenu quïl y avoit la voix moyenne utilisée ici a va leur active30. En effet, 1'action du verbe
parmi les membres faibles dans la foi non seulement les j udéo-chrétiens mais au i le
elhnico-chrériens, il en est de mëme pour les membres fons dans la foi. lis étaient non ne se rapporte pas à Dieu qui en est le suj et, te l que le suggère la voix
euJemcnt des Oenti ls mais aussi des chrétiens juifs. Ce demiers. en dépit de leur loi,
se sentaient librci. de tout manger â n'importe quel jour de par leur adhi!sion à la foi 111«but he» (BOF. u'O ôf». § 25 1).
.~
9
en Jésus-ChriSl. Cf. A. BAJLLY, «hpi~». GDGF. 11 37. A. Pina trouve que le verbe que Paul
2 7 Ce verbe ê~olAk 1.Cw. que Paul a utilisé pour décrire l"attirudc de ceux qui man- uuhsc pour s'adres _er aux faJblc. e~t moins fort que celui qu ï l emploie pour s'adres-
gent envers ceux qui ne mangent pas. e trouve dans d'autres écrits paulinien. . Paul s:r au,x fo!'S·. Ce n_ieme ~ er?e ~pww ' C trouve en Rm 2.1.3. Cependant en Rm 14. il a
les a utilisés dan les contextes ecclé iau;< (cf. 1Co 6.4; 16. 11: 1Th 5.20). dan~ le dl\ erses s1gn1ficat1ons : t1 signi fie <yuger» en 14.3.4. 10.13a.22; «préférer» en 14,5. Cf.
contextes autobiographiques {cf. 2Co 1O, IO; Ga 4, 14) et dans le contexte kèrygmat i- ID.. lellera ai Romani, 464 n. 268, aussi D.J. Moo. Romans. 837.
que (cf. 1Co 1.28). Cf./\. PITrA, lettera ai Romani. 464. 3U Cf. BOF. «Middle instcad of aclivl!)>. § 3 16.
166 PARTIE li : LE SEIGNEUR EST PUl SSA T C H. V : UNE LECTURE AITENTIVE DE RM 14, 1-9 167

moyenne, mais plutôt à son complément d ·objet direct. LI s'agit de la communauté le droit d'émettre mutuellement un jugement de va-
simplement de l' agir de Dieu envers les membres de la communauté. le ur. Par contre, la troisième proposition est une phrase affirmative
Le pronom personnel aùtôv, se trouvant à l'accusatif masculin (v. 3c), dans laquelle il donne la raison de ne pas se comporter de la
singulier, joue le rôle du complément d'objet direct du verbe ~pom:.>•.cXJkro. sorte. Ceci est dû à l'accue il dont cbacun a bénéfié de la part de Dieu à
Il se réfère aux deux groupes présents dans la comrnunaute de Rome. un moment bien précis33.
Quant à la conjonction de coordination yap, elle introduit une proposition En d'autres termes. ce verset nous apprend que Paul exhorte ses
subordonnée de cause. Elle sert, de fait, à démontrer que ce qu i vieol convertis à s'accueillir de façon réciproque. D'ailleurs, l'emploi des
d'être dit est possible. Elle se traduit par «car, en effet» 31 . Nous articles définis devant les expressions qui décrivent l'état de chaque
traduisons donc la phrase à 9Eàç yà.p autàv npooEÀ.âj3EîO par «Car Dieu groupe - o o
Èo0(wv / le mangeant et µ~ Êo9l.wv / le non-mangeant -
l'a accueilli». font voir que ces deux différents groupes se connaissent. L ' Apôtre
fonde sa recommandation sur )'agir de Dieu, lequel, affirme-t-i l, a déjà
3.2 Composition du v. 3 accueil li chacun d 'eux indépendamment de leur choix de vie.
Texte du v. 3 Agents 3.3 le lien structurel entre les vv. 1-33-1
V. 3a b Èo0(wv îOV µ~ Èo9LOV'HX µ~ ÈÇou9EVELîW, Le mangeant
v. 1 Tov ôfo ~:c!~~!i~~Î~ •û ntorH irpoo~. (ill eiç ôuxKplonç
«Que le mangeant, le non-mangeant ne méprise ÔtaÀoy w µwv.
pas»
Le non
v. Jb ô ÔÈ µ~ èo9(wv -rov Èo9Lov:-oc µ~ KpLvÉîw, mangeant
«Que le non-mangeant, le mangeant ne juge v 3 6 Èo9(wv tov füJ ~o0[ovm µ~ ÈÇou9EvE[:w, 6 ôÈ ~ È_g0 [wv tèw
pas» Ëa9[ovta \;ill KpLVÉ'rw, 6 9eoç yàp ttÙîov ~.
v. 3c 6 9Eè>ç yà.p CtÙtov rrpooe-Àlijkrn. Dieu A travers cette composition, nous voulons identifier le lien entre les vv.
«Car Dieu l'a accueilli» 1-2 et le v. 3. Tl y a, de fa it, une unité évidente qui apparaît par la récur-
rence des verbes tels que ào8EvÉw, rrpooÀIXµpcivoµcu, Êo9[w et la particule
Le verset est composé de trois propositions. Les deux premières
s'adressent aux groupes particuliers de p ersonnes. Au v. 3a, il s'agit de
ceux qui prennent le repas; au v. 3b, de ceux qui ne le font pas. Elles
sont construites avec deux particules de négation. Les verbes de ces 33 Il y a des spécia listes qui voient dans le baptême le momeot où Dieu a accueill.i
tant le mangeant (forts) que le non-mangeant (faibles). Cf. P.F. ESLER, Conflicr and
phrases appartiennent au même champ ém~tique _de ju~er. A~ v: 3a, /den titv in Romans. 35 1; E. KÀSEMAN'l, CommentOI)" on Romans. 353:
nous avons le verbe «mépri sem. Ce deffiler s1grnfte «J uger rndigne J.A. F ITZMYER. Romans, 689. Légasse affmne que le pronom 1ov se réfere seulement
d ' estime ou mora lement condamnable». li insinue une certaine supério- i1 la calégorie de ceux qui mangent tout. Cf. ro., l "épitre, 860: aussi O. M1cna, Der
rité de ceux qLLi mangent par rapport aux membres qui s' abtien~en~ de Brie/, 337: C.E.B. CR.A FIELD, A Critictû and fü:egetical Co111me11tary, Il. 702;
se nourrir. A u v. 3b, Paul emploie le verbe «condamner». Ceci laJsse J.D.G. DUNN, Romans. fi. 803. Face à ces deux hypothèses, nous affirmons que le
moment où Dieu a accueilli tant le faibJe que Je fort précède le moment de leur bap-
entendre le fait de juger coupab le quelqu ' un par décis ion de justice. Les tême en Jésus-Christ. Car le projet de Dieu de sauver !" homme est bien antérieur à la
faibles portent un jugement sur le groupe qu i estime légitime de tout mission rédemptrice de Jê us-Christ. Cette mission découle. en fait, de ce projet d"a-
consommerJ2. Notons, en outre, que Paul utilise la forme négative dans mour de Dieu envers tous les hommes. Cependaot. le baptême constitue le mome nt où
ces deux verbes pour montrer combien il nie à ces deux composantes l' homme adhère pleinement au projet de Dieu à travers sa foi en Jésus-Christ Ainsi,
les fons comme les faibles ne doive nt pas se j uger mutuellemenl d"autant plus que
Dieu les a déjà accueillis tous.
3 1 et: BDF, «yap». § 452: A. B AILLY, «yâp», GDGF. 388. . . . 34 Signalons que dans la présentation des structures qui exposent plus de tro is ver-
32 et: D. Z ELLER. Der Brie[. 225; L. M ORRIS. The Epistle, 479. ELLion me des cri- sets. nous nous limitons à ne reprendre que le texte grec, du fafr q ue leurs traductions
tiques de la pan des faibles dans ces versets. Cf. Lo., <<Asceticism». 238. sont déjà connues.
168 PARTIE Il : LE SEIGNEUR E T PUI AN r C i i V : U l; LECTURE Al TENTJVE DE RM 14.1 -9 169

de négation µ~. Le verbe npooj..aµfXivoµm et la particule µ~ indiquent le d·une part des mangeants et d 'autre part des non-mangecants. La pre-
rapport entre le vv. 1-2 et v. 3. et Ëoetw celui entre les vv. 2-3. mière compo ante correspond aux gens qui manquent de fermeté dans
Au v. 1, Paul exhorte les membre de la communauté à con idérer leur foi. lis ne prennent que des légumes comme repas. L 'ApÔLre re-
comme un de leurs celui qui est dépourvu de forces dan la foi. Toute- commande une attitude d'accuei l de la part des autres. La deuxième
foi . cet accuei l, nous l'avons déjà dit. ne doit pas e faire dan le que- catégorie rcpré ente ceux qui ne manifestent aucune faib le e dan leur
relle . Noto ns q ue. dans ce verset, il est question d'une recommanda- vie chrétienne. Il se nounisent de tout et sont invité à s'ouvrir aux
tion qui ne deviend ra effective qu'à partir du moment où elle sera mise autre . Pour ne pas exa pérer l'anitude réciproque de méfiance. Paul
en pratique. Si au v. 1 il s'agit d ' une exhortation. il n'en est pas de interdit tout pou oi r de j ugement le uns à l'égard de autre . Il leur
même au v. 3 où il e t plutôt question d'un fai t déj à réalisé. En effet, donne comme modèle !'agir aimable de Dieu.
I' Apôtre fait appel à )'agir accueillant de Dieu, qui est déjà accompli .
C'est ce geste divin qui représente, dans l'esprit de Paul , une motiva- 4. Rm 14,4
tion pour les c hrétiens de Ro me à recevoir les membres faibles. Ils doi- où 7{ç cî 6 Kp(11co.>11 1.H.À6t pL011 oi.KÉniv;
vent le faire à l'exemple de Dieu. Au v. 2, Pau l explicite en quo i t Q tôlei> KUPL<.i> oniKcL ~ n(rruv
cons iste, d ' une part, la faiblesse de celui q ui doit êLrc accuei ll i panni ome~ornn ôé, ôuvatü yèxp 6 KUPLOç o7ï;mu aù-r6v.
les membres forts de la communauté, et d·autre part, la force de ceux «Toi, qui es-lu. qu i juge un crvilcur (domestique) d·autrui '!
qu i sont invité à recevoir Je faible. En effet, leur d éfa illance se si tue au pour l'intérêt du maître. lui-même. il e tient debout ou il tombe :
ni veau de leur c hoix d e ne prendre comme repa que de légumes. En il sera soulevé. il Ci>t pui ·ant en effet le Maître pour le oulcvcr».
revanche, la puissance des autres e trouve dans leur li berté de manger
toute cho e. 4. 1 Ana~\ 'Se ynwxique t/11 1•. 4
Notons toutefoi une nuance importante entre le ' . 1 et le . 3. A u
prem ier verset. Paul emble exhorter un groupe à accueillir le faible.
o
- où :l.ç E-L Kpl.vwv à)J,6rptov oi.KÉ-:TJV. Le pronom personnel se ou
trouve au nominatif deuxième personne du singulier et se traduit par
Au v. 3, par contre, il 'adre e à tous en leur recommandant de ne pas «tu». Il c t employé. non pa comme s ujet du erbc El mai comme une
po rter des jugements run à l'égard de l'autre. Cela nou conduit à dire emphase du ujct pour dénoter une insfatance particulière sur le sujet de
que tous ont invité à accueillir dans leur groupe le membre qui. à leur la phra e. En effet, étant donné que le ujet de cette propo ition est in-
regard apparait faible. Il y a une sorte de progression dans l'argument corporé dans le 'erbe cL il ·en uit que le pronom ou est rendu par
de !'Apôtre. li comme nce par exhorter l'accueil de faible cl finit par «to i». La particule :(ç est un pronom interrogatif nominat if ma culin
recommander à tous les c royants de la communa uté l'accuei l mutuel. Si ingulicr dont le en e t «qu i». Elle sert à introduire une interrogation
Paul part de l'invitation à accueillir le faib le, il nous emble que cc direc te. Quant au verbe d, il est mis à lï ndicaLif présent acti f de la
comportement conslituaiL un fait notoire au sein de la communauté, deuxième person ne du singulier du verbe Etµi.. Avec le tcmp présent . il
autrement Paul n 'aurait pas fait une te Ue exhorta tion. indique une action d ' une considérat ion gén érale, toujours valable. I l est
L ' Apôtre sava it certainement que le faib le, qu i éta it refusé, n 'ac- rendu en françai s par «(tu) es». Il constitue le verbe de la propos ition
cepta it pa. non p lus celte attitude. Par con séquent, il refusait à son tou r princ ipale. Ains i lu phrase où t(ç EÎ se traduit par «to i, qui es-tu ?»36.
d 'accueill ir ceux qui le critiquaient. Voi là pourquoi Pau l poursuit sa L 'article défi n i 6 est un nominatif mascu li n s ingu lier. Il déterm ine le
prédication en interpe llant aussi le faible à ne pa~ agi r de la même fa- nombre et le genre du mot KpL11w11 e t e traduit p ar « le». Le verbe
çon. Pour donner du poids à sa recommandation, il fa it appe l à l'action Kp[vwv se trou eau partic ipe pré ent actif nominati f masculin ingu lier
faite par Dieu à l'égard de chacun d'eux. de Kptvw. Étant donné q u ' il est un participe s ubstantivé, il s'accorde
En définitif, deux g roupes se distinguent au sei n de la communauté
de Rome. li s'agit de faib les et des fortS. Paul le désigne par un quali-
fica ti f b ien préci en utili ant le verbe Èo9[w I «manger» '5. li parle 36 La phrru.c où :{~ <l o Kpivwv «toi, qw es-tu. qui Juge '?)> e trouve :iussa en Je
4.12. Nou\ a\ on:. au'"' J cs fonnulation presque semblable c.n Rm 9.29 cl chc7 Épic-
tete (cf E111r , 111, 1.22). Legns e montre que. dans l'écrit d' Epictètc. ccuc phl'll!lc oil
35 : iç cl est S) no nyme de : t ooL µ<i.u '> Cette dernière est traduite par «de quoi te mê-
La récurrence du verbe foeiw mna:ngcn>nous suggère que le problème rés1da11
autour du manger. les-tu ?». C f Io .. l ·~pitre. 6 n. 26.
170 PARTIE li: LE SEJGNEUR E T PUI ANT C ii V : UNE LECTURE ATITh1TIVE DE RM 14.1-9 17 1

avec l'article qui le précède et signifie <~ ugeant ou qui juge». En faiL il qua li fie le ubstantif Kup(~. Ce dernier se trouve également au datif en
'agit d'un présent gnomique qui désigne une considération générale concordance avec l'article:<;> et le mot iôl~. Le mot KUpLOÇ, étant em-
valide à tout le temp . Ainsi, nous tradui on o
Kp(vwv par «le jugeant» ployé ici avec article et e rapportant à des personne. signifie «maitre».
ou bien par «qui juge». Le terme illchpL011 e t à l'accu atif masculin «se igneurn, «Souverain». «empereurn, «maitre de maison». «chef de
singulier et a le sens de «qui concerne autrui», «d'autrui». 11 peut aussi famille», <<maitre d'c claves ou de domestiques», «tuteurn42 • L 'ensem-
e traduire par «d'un autre pays», «étrangern37. Pour ce verset, il a en ble des mots qui constituent la phrase :~ tôt~ Kuptc~ se trouve donc au
quelque sorte la nature d'un adj ectif et est rendu par «d'autru i»3R. Avec datifD. La phrase est donc traduite par <<pour le propre maître».
le substantif q u'i l qualifie, il joue le rô le d ' un complément d'objet di- Le verbe o-r~KH est à l'indicatif présent actif de la troisième personne
rect du verbe Kpi.vwv. du ingulier de ot~Kw. Son sujet est renfermé dans le verbe mais qui
Le !o,Ubstanti f OLKÉTI)V est mis à l'accu atif ma.cul in ingulicr. li cons- renvoie a u mot otKéTI)v. Il signifie « il se tient debout»44 • Nous avons
titue un complément d'objet du verbe Kpi.vwv et est traduit par «habi- encore là, une fois de plus. un présent b1Ilomique. La particule~ est une
tant d'une maison». De là découle le sens tel que «qui fait partie de la conj onction de coord ination disjonctive quj re lie les deux verbes :
fami ll e». « les membres de la famille». (<domestique», «servitcurn 39 . Par OT~KH et 1TLlTîEl el sign ifie «O U».
conséquent, la traduction de la phrase àÀl..chpLov olKÉTI)v est rendue par Le verbe '!T(mCL se trouve à l'indicatif présent actif gnomique, troi-
l' expression « l'habitant de la maison d' aucruiwrn. sième personne du singu lier de ni.ntw 45 . Son sujet est inclus dans le
A la lumière de ranalyse syntaxique faite. la traduction qui nous
semble la plus proche à la phrase où -ri.ç ct b Kpi.vwv â:U.ô:pLov
42 cr. A . BAii 1"· (()(Uf)LOÇ». GDGF. 1154: c. SPICQ. <<>nipLOÇ, l(UplEUw>), 341
01.KÉ-:T)v, est «loi. qui e.-ru, quj juge un erviteur (dome ·tiquc) d'au-
·B Quant à la voleur du dattfutili é dans ce verset. cenains exégètes affirmenl qu'il
trul'?. ». s·ag11 d'un dnuf d'avonwge. Ainsi la phrase ~t;i tôtcy KUPL~ a le ens de «cn l' honneur
- :<;> lôi.~ Kupi.~ o:'ÎJKH ~ lîllr.H' o•a9~oe-:cH ôÉ:. L·aru cle défini î~ du seigneurn. Cr. M Z rRWICK. Bihlu:al Greek, ' §55-56: BOF. «The Dall\e of Ad-
dé liné au datif masculin ingu lier détermine le genre et le nombre des vnntagcn. § 188: \11.-J. LAC1R'\ 'GE. Saillf Paul. 324: C E.8 . CRA 'FLl:.LD. A Cri11cal
terme i.ôi.~ Kupi.~. fi e t traduit par «au». Le mot i.ôi.~ a l'acception de ami E:ccgetico/ Cummentan', Il. 703. S. l~GASSE. L'épitre, 69 n. 35: U. \VIL( lo.l S,
«qui appartient en propre à quelqu'un ou à quelque c ho c» ~ 1 • ous Der Bncf. Ill. 82. R. Jf\\CTI, Romans. 842. D'autre exégètes. par contre. parlent
avons de là vient le en de «propre». «particuliern par oppo ition à d·un datif de rcluuon lb traduisent la phrase n~ i.ôL~ Kt;pL~ avec le sens de «en rela-
lion avec maitre». Voir J.D.G. D~:-. .. Romans 9-16. Il. 804. B. BYRJ\E. Roman.\, 412:
â:U.6-:pLoç «autrui». Tl assume en quelque sorte la nature d'un adjectif et D.J. Moo. The Epwle. 840: T.R. SCllUNl:R, Romans, 719: A. PmA, leuero a1 Ro-
"'""'· 465 n. 270. Nous affirmons. pur contre. que la phrase assume le deux valeurs
37 Cf A. BAii I Y, <ccill6-:pLO.;». GDGF. 6. du da11f : datif de rclouon et d·avantage. Ces deux valeurs dépendent de la foçon dont
3 Cf OJ. . L"'v \S 1:-_ L 't!pure. 868 Io phrase est mtcrprétéc. Elle est un datif de relation en tant que le componcmcnl ou
39 Cf. A. BAILL'. «OLKl 711.;». GDGF. 1355. La distancuon entre oiKé~.; et ÔOÜÀOÇ !'agir du cr.•11eur ou du domc tique e 1 en rapport avec on maitre qu'il en. Comme
est que le premier mot indique un membre inaliénable de la famille. y compri les un da11f d'avantage. du fon que !'agir du erv11eur. qw est en lien avec le maiire. vise
e clave qua ont considéré comme membre de la famille. Par con<;cqucnt olKf711Ç à honorer ce même maitre. Autrement dit. nous affirmons que le datif employé ici a
«domcs11quc ou esclave de mm on» est reconnu comme propriéte c1 ne peut pas être valeur de rclauon lor...quc l'on ·arrête uniquement à !'agir du -.crv11cur. Il a une va-
'endu. Il e!>t attaché à la maison ou à la famille. En :.omme. dison!> que le mot olKhT).; leur d'nvantage lor;;que l'on regarde la finalité de l'agir du erv11eur. Par consêqucn1.
désignait toutes les personnes dans une famille 1ypiquc de la culture gréco-romaine. nous trouvons important de considérer les deux valeurs. Cela permet de découvrir la
Ces personnes, y compris les enfonrs. les domestiques, les personnes libre . les clients richesse du mc~:.ugc de l'apôtre Paul. d'nutan1 plus que le ~ervi 1cur agit en lien avec
cl le. épou~es. dépendent du maitre de la maison. Le deuxiêmc 1enne ôoüÀo.; dé igne son seigneur et dan., le but de l'honorer.
uniqucmen1 le!> cscl:n e!> cl le ervitcurs loués. que cc soi1 dan!> la mn1.;on ou dan un 44 Le verbe o~<., vient du pnrfn11 éo-:1ea. Cc dernier pro\lenl du verbe ·LO-:TJ1L qui
auue service Ce e claves peuvent être rendus libre:. Cf. C SPIC.Q. •<Le \ocabulam:)>. signifie «Se tenir debout». a prê:.encc pour la premiC:rc fois 'c l n!,élê dan-. le'>
204-1 14.21 N-:?20: S. L[vAS E. l 'épitre. 869: R. JE\\ ETI, Romam. 841 -842. difTércnt:. manuscrits de la LXX et dan ~ le :-r. e sentiellcment dans le écnts pauli-
40 cr. •<~Cl"\ ant-; of anolher» ('JRSV: C.E.B. CRA'll If LO. A Crwcul Ufld Exege(l(:al niens en ICo 16,13: Ph 1.27: 4.1 : ITh 3.8. cr. A.BAlLL'I. C(O:iiKW», GDGF. 1792:
Comme111m1•, li. 698: J.D.G. Du ·:-.., Romam; 9- 16. li . 803: D.J. '-1100. ThC' Epi<;t/e, BOF, (cFormauon ofTense». ~ 73: BAGD. «on)Kc.m. 944
839: <<Un servi leur d'autrui» (BJ ). 45 L'emploi de cc verbe dans cc verset est identique à celui de Rm 11 . 11 Dans cc«
.i 1 Le mot veut dire également soi1 «qui a uo caractère ou une nalurc a~oin. «étrnn· deux pa-. age..'>. le \'Crbc ont la même connotation metaphonque. Ils e'<pnmen1 une
geo>. d'où le seru. de ccpanieultcr. ~éparé. distinct. c1c ». oil qui a un carac1ère parti- pcnc d'approbauon d'un -.c1gncur. En 1 1,30. nous a\.on ln rela11on entre w1e pcnc
culier. pmë par opposiuon a 6T)ao.; «public». Cf. A. BAILL.Y, HLOLo.;)), GDGF 957. d'approbation cl la honte qui en découle. En 1Co I0.12. k~ 'erbc -i. ï'.W <Oombc:o; c1
172 PARTIE Il : LE SEIGNEU R EST PUISSANT CH. V : UNE LECTURE ATTENTIVE DE RM 14.1 -9 173

verbe, et renvoie au substantif olKÉtî]V. Le verbe n tmEL signifie «il n'est pas traduisible. Ainsi nous traduisons la phrase te.\) lote.y Kuptc.y
tombe»46. L'indicatif futur passif arn911aErnL est conjugué à la troisième aTÎjKEL ~ nbrrEL · mae~arnn ô~ par «pour l'intérêt du maître. lui-même.
personae du si ngulier du verbe 'Cot11µL47. La vo ix passive employée ici iJ se üenl debout ou il tombe, iJ sera soulevé»
est une voix passive théologique, car le complément d'agent du verbe - ôuvcxtE1 yà.p à KupLOç ot~aa t cxùtév. Le verbe ôuvatEl se trouve à
sous-entendu est le maître en tant que Dieu48. Ce dernier est mentionné l'indicatif présent actif, troisième personne du singulier de ôuveïtÉw /
au verset précédant. Le sujet de ce verbe subit l'action à cause de la «être puissant, être fo rt>>52 . Le temps présent employé dans cette propo-
vo ix passive à .laquelle le verbe est conjugué. En effet, son complément sition diffère des autres présents que nous avons analysé plus-haut. Il a
d'agent qui réalise l'action se réfère au mot KUptoç de la phrase précé- non pas va lettr gnomique mais plutôt continue, en ce sens que son ac-
dente. Il a ici le sens transitif de «placer debout», «soulevern, «pousser tion se prolonge dans le temps et est ininten·ompues3. Le suj et de ce
en avano>.· Le temps futur indique ici que l'action va se passer dans un verbe est 6 KUp loç. La conjonction de coordination yap est employée
avenir historique par opposition à celui eschatologique : c'est-à-dire les ici pour démontrer que ce qui vient d'être dit est possible. Il signifie
fins dernières de l' homme49 . Nous le rendons en français par «il sera «en effeb>, «carn54. L'artic le défini 6, décliné au nominatif masculi n
soulevé»so. Nous avons choisi la traduction «soulever» en lien avec le singulier, indiql1e le genre et le nombre du substantif KÛpLOç. Tl est donc
verbe nt ntEL/tomber. tradui.t par «le». Quant au mot KUpLoç, il est justement au nominatif
La particul.e ôÉ peut soit introduire une opposition. soi t marquer une masculin singulier et assume la fonction du sujet dans la phrase. Ac-
liaison d' idées. Dans ce verset, elle marque une liaison d' idées51. Ell e compagné d' un articl e, il peut signifier «le maître», «le souverain»,
<d'empereur». «le maître de maison», «le chef de famille», «le maître
d'esclaves ou de domestiques», «le t11teurn.
otjKw «se Lenir debout» y sont présents. Cf. R. JEWETI, Romans, 842-843. A. Pilta L' infinitif aoriste actif atfiom vient du verbe '(an1µ1. . Ayant dans ce
parle du binôme TILTTT<iJ «tombem et o~Kw «Se tenir debout» comme un euphémisme verset le sens transitif, il se traduit par «placer debout», «soulever»,
pour indiquer «approbation» et «désapprobatiom>. Cf. ID., Lettera ai Romani. 465 n.
271. «pousser en avant» et a une valeur finaless. Ainsi. nous traduisons sa
46 Le verbe ntmw comprend diverses significations. En sens littéraire et général, il forme en infinitif aoriste actif par «pour soulever». Comme c'est de
veul dire «tomber involontaire». Au sens figuré, il signifie, entre autres, «dcvc11ir règle en grec, le verbe utilisé à l'aoriste traduit une action ponctuelle,
coupable», en ce sens que le croyant perd sa foi et, par conséquence, il se sépare de la en ce sens qu' elle est momentanée ou de courte durée. En tant que
grâce de Dieu. C'est avec le sens figuré que Paul l'utilise notamment en Rm 11 , 11 et verbe transitif, il a un complément d'objet direct, qui est le pronom
14,4; !Co 10.1 2. Cf. W. MICllAELIS. «TILITTW», TDNTVl, 164: E. P ALZKlLL, 1<nLrrtum.
EDNT ITl. 90: C. SPlCQ, «nLntW>>, TLNT Ill , 105 n. 5: R. J EWETI, Romans. 843. personnel m'.rr6v. Celui-ci se trouve nature.llement à l'accusatif mascu lfo
47Le verbe 'lo·r11µ~ peut être transitif et intransitif. Cf. A. BAILLY. «'(on1µrn. GDGF. singulier et se traduit par «le». Ce pronom renvoie au mot olKÉî11v I
982. serviteur ou domestique.
48 Nous parlons d' un passi f 1héologiquc, du fait que la suile de la péricope monlre
Confo rmément à l'ana lyse fa ite, nous traduisons la phrase ôuvateî.
que ce maître est bien un ètre divin : Dieu. en La personne du Christ. Cf. M. Z ERWI CK, y&p à KÛpwç ot~aat œùî6v par «il est puisant en effet le maître pour le
Biblical Greek. § 236: D.J. Moo. The Epistle, 840: R. J bWETI. Romans. 843 . Voir
aussi F. GODET, Co111111en1wy, 445; W. THOSING. Gott. 1. 34-36. Notons toutefois que
soulever».
la voix. moyenne est une possibiHLé si l'on interprète le verbe ota0ilonaL étroitement
avec la proposition suivante. Dans ce cas. Je verbe a le sens transitif et se traduit par
«il se tiendra debout». Cependant la voix passive nous semble logique par rapporl â 52 Nous renvoyons à nos consid0rntions sur cette expression dans l'analyse que
l' argument de l'Apôtre. Voir aussi H. SCllLI ER, Der Rlimerhrie/' Ko111me11tur. 407; nous avons menées en 2Co 13.3 dans la première partie de cette dissertation. La
E. KÀSEMANN, Comme111ary 011 lfomans. 357: R. J EWbl1', Roma;1s, 843 . Parmi ceux forme de cc verbe utilisé dans ces versets (2Co 13.3 et Rm 14,4) esLrare dans le NT.
qui soutienoenl ln voix passive avec un sens .intransitive ou simplement une voix Elle esl Sèulcme111présenle trois fois dan~ les lettres prmo-paulicnncs : Rm 14,4: 2Co
moyenne. cf. F.J. L EE NHARDT. L'épitre. 196 n. 3; J.D.G. DUNN. Romans 9- 16. Il , 804: 9.8; 13. 1-4. Son infi nitif ôuva:tElv vient de ciôuva-rE1v qui es1 une fonne très ancienne.
0.J. Moo. Tite Epistle, 84 1 n. 63: B. BYRNE, Romans, 41 2; A. PITIA. Lettera ai Ro- Cf. la première partie de ce travail, Chapitre LI. 3. 1 Ana~vse synu1xique d11 v. 3; BOF,
mani, 465. «Verbs», § 108. R. Jewett voit dans cc verbe un écho de la Lhèse de la lettre en l , 16.
ID., Romans, 843.
49 Cf H. Sei n mn, Der Rii111erhrie( Komme111ar. 407.
50 «has power 10 cnable him to stàud» (NEB: M. B LACK. Romans. 136: R. .J F.WErr. :3 Ct: BDF, «Cognati ve Present». § 319 .
.'l4 Cf. A. B A ii LV, «yrip», GDGF, 388: M. ZERWICK. Biblical Greek. § 472.
Romans, 843.
5 I Cf. A. B A IL! Y, «ÔÉ». GDGF, 434-435; M. Z ERW!CK. Biblicctl Greek, § 467. ss Cf. BDF. «The rnlinitive». §§ 388.390. .
PARTI E Il : LE SEIGNEUR EST PUlSSAl'l'T Cil V : UNE LElTURE ATIEKTIVE DE RM 14.1-9 175
174

4.2 Composition du v. 4 sujet ou complément d'agent le Kup w ç I «maitre». Par ai lle urs, les ver-
be conj ugués au temps présent gnomique c réfèrent tous au te rme
Texte du' · 4 Agent.li OLKÉ:rJV « erviteur ou dome tique». Cela lai se entendre que cette
exhortation est bien valable tant pour la s ituation du serv ite ur de main-
' . 4a où îLÇ ft oKp[vwv Des membres de tenant dans la communauté de Rome que pour cell e du serviteur d'un
ÙAÂ.Ô'tpLOL' ÛLKF7T1V; temps à venir.
la communauté
«Toi, qui e -tu, qui juge un serviteur Se rapportant aux verbes qui expri ment l'oction du maître, il s e trou-
d'autrui'!» vent à lïndicatif futur passif. à l' infini tif aoriste actif et au présent a ec
valeur cont inu . Le pa if indique que c ' est bien le maître qui accomplit
v. 4b te.\> LOL(\) KUPLC\> O't~KEL Le crvi teur 1·actio n sur le serviteur. Le maitre est donc celui qui oulèvera le servi-
~ -:Th:c v <Tîtt0~oHttL OÉ, te ur qui est tombé. A cause de l 'aoriste qui décrit l'agir ponctuel du
«pour le propre maitre , il se tie nt debout maître. no us compre nons que celui-ci ne tardera pas à soulever son
ou il to mbe : il sera sou levé»
serviteur. Il 'agit d ' un secours prompt. A u suje t d u verbe ôuvcxîEÎ. em-
ployé au tem ps au présent. il n'expri me pas une cons idération générale
V. 4c ouva:cl yèr.p 0 KUPLOÇ Le maître
ori)oaL cdr:ov. mais pl utôt une réa li té bie n précise continue. Il est question de l'état du
« Il est puisant en effet le seigneur (pour) maître, lequel est continu. an limite dan le tcmp . Il est fon cl il rc -
o ulever le» tcra toujoun, fon.
... Si nous comparons ces différents emplois des verbes en lien avec
Dans cc verset, Paul fait recours à la d iatribe pour interpeller les leur ujet. nou osons a ffinn er que l'exhortation de Pau l vaut pour la
membre de la communauté56. Cene apostrophe consis te à défendre aux situation actuelle des chrétien · romains pré e nt dans cette égli c au
chrétiens de Rome l'action de j uger, car, dans le cas d'un ervite ur, moment o ù !'Apôtre écrit sa lettre. fi vaudra également pour des
celle prérogative est reconnue eulement à son propre maître. L · Apô tre croyants e n C hn t de pano ut qui eront pl us tard dans la communautè
urili e une expres ion métaphorique lorsqu'i l parle du erviteur et du et vivront de moment de con flits tels que le Ro main l'o nt connu.
maître ~ 7 • Cependant. l'emploi de verbe par rappon à l'action du maitre fait
La structure de v. 4 nou permet de menre en évidence trois proposi- comprendre que Paul parle de l'agir d'un eul maître. De fai t, ce n·e t
tions: v. 4a. v. 4b e t . 4c. La plupart des erbes se trou vent au pré ent pas de manière forruite que !'Apôtre a utili é le mot KUfJLOç/«maître»
avec valeur gnomique. Cec i porte à croire qu 'i l 'agit de. considéra- o
avec l ' article dé fini : :t;> KUPLCV (c f. v. 4b) et KUpLoç (cf. . -k). Nou
tions générale . qui sont val ides à tout in tant et à n'importe q uelle ci r- avons, en erTct, que l'article défini 'emploi dcvam le no m pour dés i-
con tance. Cependant. nous avons un eul verbe constru it au temps gner un être ou une chose connu du locuteur et de 1·interlocuteur. Par
présent exprimant une action continue et deux eule ment à d 'autres conséquent, en utili ant l'an icle défini devant le ub Lantif maître. Paul
tc mp . Il ~'agi t de ota0~oF:at / «il cra . ou le é». o:f)oat / « oulever» parle du maître que les membre de la communauté et lui -même con-
et ôuvani.. C'est frappant de constater que ce. troi crbe. o nt comme na issent bi en.
Du po int de vue de la séma nti q ue, la premi ère propos itio n e n v. 4a
ex pose l' inccrrogat io n de Pa ul. E lle se porte sur lï dentilé de ce lu i
~ 6 '1l'lU'> Lrouvons une con ... 1ruc1ion semblnble en Rm 2.1.3 où Paul emploie lu dia- qui juge un serv ite ur d 'autrui . La deuxièm e phrase cons i te à présen-
Lnbc 01 r au""' 11. HLll-R. Der Rômerhrie/. 406; O. M1n1r1. Dt•r Bnef. 424:
te r l' é tat de celui qu i e t jugé. Il ·agit d'une situation dans laq ue lle
A. Pt nA. leuero a1 Romam. ...65: R. JFwm. R1111u111, , 84 1
57 S ignalon!. que le substantif OLKfTilÇ déMgnc un domcs1ique (cf. Le 16,13. Ac e t rou e le en ite ur en rappo rt a ec son maitre et po ur o n honne ur.
1O.7: 1Pt 2.1 X). Pour indiquer le patron de la ma1l>on. le tenne approprié est le sub - Par con é qucnt. le servi teur pe ut so it se te nir debout. o it tomber.
1an11 f oiKoO<o1'T6TI1Ç I <unaürc de mai on. chef de famille» (cf. Mt 1J.27) ou bien ôco cela est. bien en te ndu. en li e n avec son maître c l pour l' hon ne ur de
:r6tTtç «maitre de maison» (cf. 1Pt 2.18). Tou1cfois. le mot 1<l'1pLo<; «maitre» esl ce dernier. La dernière phrase e n v. 4b sous -ente nd une phrase. Éta nt
aussi u1ilisé dan-. le contexte dome~tique (cf. Le 16. 13). Cf. A. BAIL l v. «Ô4.01TÔtT1<;>1. donné la prédi cation de Paul e lon laquelle le serv iteur era o u levé.
GDGF. 448. ID.• ~<KVpto..;11. 11 54: Io .• <<0LKo0tor6:T}:;». 1356: A PITT 1\. lettero ai
Romam. 465 nous suppo o n que ce lui-ci era aidé par le maitre lor quï l tombera.
176 PARTIF Il : LE SEIGNEUR EST PUI AN 1 Ci i. V : UNE LECTURE ATTENTIVE or RM 14.1-9 177

C'e t la troisième propo ition (v. 4c) qui nous autorise à le dire. En efîet, o ton que l'unité de cc deux subdivi ions est manifeste par le
Paul atlinne ici que le maître est fort pour oulever le erviteur tombé. verbe accuei 11 i r : npoo.lctµP<ivEo0t ( . 1) et iîpooüaf}f:o (' . 3) et par le
La compréhen ion du sty le métaphorique qui carac térise le v. 4 mode impératif auquel il e t conjungué (cf. . 1 et v. 3). Au v. 1, Paul
po. e q ue lques questions. Ainsi. oou pou von . entre autre. nous in- exhorte le croyam de Rome à accueillir le faib le. Au '. 3. il les invite
terroger ur l'identité du maître et du servi teur dont il est que tion tous à ne pas c juger parce que Dieu les a déjà accueill i . Un autre lien
da n ~ cc ver et. de cohérence de l'e nsemble de vv. 1-4 conceme le contenu de l'exhor-
tation de !'Apôtre. Au . 1, il y a l' invitation à recevoir Je faible. Le
4.3 le lien stmc111rel entre les vv. 1-4 message de v . 2-3 explic ite l'a sertion du v. 1. De cette explicitation
que Paul donne émerge en partie la situation qui prévalait dans la
' . 1 Tôv & ~q~v~~i~ rfl îTL<ï."H 1rpoo~. lill Üç ôuxKptoCLç communauté de Rome. à avoir une séparation interne. JI y a ait d'une
ÔLOCÀOyLoµwv. part le groupe de~ faib le!> qui ne prennaient comme repas que des légu-
mes et, d'autre part, celui des fort qui se no urri saient taut. Ceue d iver-
gence alimentai re a par conséquent conduit au jugement réc iproque. A
traver la diatribe. Pau l j ustifie solidement sa recommandation à ne pas
v. 3 6 ~o9(wv -ràv o
èo9[ovra µ~ ÈÇou9wdrw, & ~ èo9[wv rbv
j uger (v. 4). li montre que chacun d'eux appartient au Maître, le C hri L
io0[ovra Ql] wt: , 6 fkoç yèxp aûrèw ll'pooE.lcipEw.
dont il ert comme serviteur. on componernent est en lien avec son
------------------------·--------------------- Maître e1 contribue à l'honorer. Qu ' un membre reste fi dèle à la foi ou
' . 4 oi1 :[ç fl o kptvwt~ à:U6:pL01.1 oi.Ki :ii11; rc;> i.ôt~ Kup(~ o-:iiKc L ~
nlmH ·crraEhiot :al Of. , ôuva:E.l yèxp b KUpLOÇ a:f)OaL aû:6v. e épare de la foi en devenant coupable. cela ne regarde que son Maî-
tre, le eul qui peut le juger. L' Apôtre intensifie on argument en affir-
Nou identifion dans cette composition la cohérence fom1elle in- mant que, si le serviteur e séparait de la foi, le Christ. le Maître est
terne de ces versets. Elle c t démontrée à travers les cxprc sions ut ili- capable de Je rame ner auprès de lui.
sée . De ces dernière . une subdivi ion en deux partie à l' intérie ure En somme. la structure des v . 1-4 permet de répondre à I'interroga-
des vv. 1-4 e t mise en évidence. L ·unité des vv. 1-2 e t garantie par le tion que nous nous sommes po éc en analysant le . 4. à avoir l'identi-
concept faible se : ào0woûtr:a (v. 1). ào0Evwv (v. 2). Le lien encre les té du Maître et du serviteur.En e ffet, le Christ est bien le Maitre ; cha-
vv. 3-4 est formé par le verbe juger: Kpwfîw (v. 3) et Kp(vwv (v. 4). cun dans la communauté représente le serviteur.
Dans la première unité, le discours tourne au tour du fa ible. Dan la L'exégèse fai te de ces quatre ver cts révèle trois dimensions im por-
seconde, il e t que tion de l'action de juger. Paul exho rte les non- tante de la vie communa utai re. Elles sont des natures ecclésiologiquc,
mangcan1 â ne pas juger ceux qui mangent (v. 3). Au v. 4. avec la dia- chri tologiquc et théologique. Nous voyons l'a pect ecclé io logique
tribe. il interpelle celui q ui émet un jugement à l'égard de l' autre. Un dans l' invitat ion de l'apôrrc Paul à l'accueil mutue l. La r~flexi on chri. -
autre élément de rapport entre les w. 3-4 se situe au niveau de verbes tologique réside dans )'action puis ·ante du Christ pour relever le faible.
dont leur action e réfère à un être divin. Il s 'agit de npooE>..cXl3E•o (v. 3c). Le fondement q ue Paul donne au sens de l' accueil qui doit caractérber
o"ta:0ÎJoEtcn et otf)oix (v. 4). Dans le premier cas, b 0fôc; / «Dieu» est le sujet. les membres des communauté · chré tiennes dénote le versant théo log i-
Quant au second, les deux autres verbe se réfèrent à à KUpLOç / «le Maî- que du message rcceui lli de ces versets.
tre». Que l'action se rapporte à Dieu le Père ou au maître le C hrist Jésus,
elle est en relation avec le membre de la comm un a uté~ 11 • 5. Rm 14,5
"O.:; µ(11 [yàp) KPLV< L fiµf.pcw nap' Î).lf.pav.
ô.:; ôÈ Kp{vH mioav ÎJ.lf.pcxw
SI! Notons que le terme 0<.6.;l«Diem) est utilisé. par PauJ en réforcncc au Père, dan 'iKaa-roc;; fV :c~ LÔL<i> l'OL ïTÀl'IP<>4><>PfLCJ0w.
la plupart de cas. Il y a cependant deux texte:. de l'Apôtrc dont le tcnne remoic aux « L ' un. en erTet. p rffêrc un j our en comparaison d'un (autre) jour
Chnl>I (cf. Rm 9,5 et Tt 2, 13). Quant au mot KUpLo.;/<<Seigncun>. il dél>ignc Chril>I ou
! ' autre préfère chaque j our/ tous les jours
le Fils. à l'excepuon de quelque cas où le tennc fait allu ion au Père Voir G.D. Fn.
Pauline Cliri:uo/og_l, 16-17. 0 . ÜlITllRIE - R.P. \fo.RTI'-. «God». DPL. 357: chacun. dans le propre cœur. soit pleinement convaincu».
L.W. H URTADO. «Lord». DPL. 560-561.
178 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PU I SANT
C H. V: UNE LECTURE AITENTIVE DE RM 14.1-9
179
5. 1 Ana(vse syntaxique du v. 5
simple correspondance sans l' idée de contradiction. Avec le verbe
- ··oç µÈv [yàp] KPLVH ~µÉpav nap' ~µÉpcw. Le pronom relatif oç KpivH, l,a ~ad~ct.i on. de _l'expression oç U est rendue par «l'autre pré-
commence le v. 5. JI est décUné au masculin nominati f singulier. f~re». L ~dJ ~ct1_f ~nde.fi n 1 ~âoav qua lifie le substantif iiµ&pcw. lis sont à
Comme au v. 2, oç ne remplace pas un substantif ou un adjectif. li est,
par contre, employé avec la particu le µ€11 dans la forme oç µt=v [ ... ] Oç
1 a~cusat1,f f~~m _ mgu lter :1
c~nstitucnt le complément d'objet de
KpLV~ L . L ad1ect1 f nao.cxv peut etre 11~te,rprété dans Je sens partitif, car il
ôÉ. Elle csl tradui te par «l'un[ ... ] l'autre»59 • Toutefoi , la fonction de oç S<;>ul.1gne cette .acception au cerme T)µEpav. Son emploi dans ce verset
dans ce verset est cell e de suj et du verbe Kpl.vEL. Ce dernier se trouve à d1ffere d.e e~lu1 dans la phrase précédente, lequel marque une comparai-
l' indicatif présent, troisième personne du singul ier du verbe Kptvw. li ~on63. Ams~, nous trad.uisons rrâocxv Dµ€pav par «chaque jou rn~. JI peut
signifie ici «préférer» san doute en raison de la comparai son - ~µÉpav egale!llent etre compris dans un sens coll ectift>S. Ce dernier se justifie
mxp · i}µipav / «un jour en comparaison d'un (autre)» - qui le suit. En prem,1èr7ment pa.r l'absence d' un article. et deuxièmement parce qu' il
ce qui concerne son temp , comme dans les autres verbes de la péricope, ~e, s agtt pas d une comparaison. Par conséquent, le mots iTéioav
il est un présent gnomique qui traduit une réalité générale. Quant à la 11µ~pav s?nt re_nd,us en français par «lous les jours»66. La phrase &; ôÈ-
particule corrélative µÉv, ell e indique qu' il est question d' une assertion KPLVEL ~aoav T)µ.epav p~ut aJors .ê~re traduite so it par «l'autre préfère
à laquelle s'oppose une autre. chaque JOUr», soit par «I autre prefere tous les jours».
En dépit du doute qui règne sur la présence de la conjonction de ., - ËK<XoToç Èv n\) i.ôl~ vot TTÀllpO<fiope[oew. L'adjectif indéfini
coordination yap dan ce verset. il ne erail pas inutile de l'analyser. EKacr-:oç I «chac~» est décliné au n_ominatif singulier. Il est sujet du
Cette mise au poi nt nous permettra de comprendre non seulement son ve~b~. TIÀllpO<fiopELo0w l~quel . est COI1Jugué à ,l'impérati f présent passif,
rôle dans ce texte, mais encore la raison pour laquelle elle devait y figu- Lro1s1eme personne du singulier de lTÂllPO<t>opEw. Lorsqu 'il se réfère aux
rer ou non. La conjonction ycép / «car, en effeb> inlroduit une proposi- pers.onne , il. est trad~ it, par «être pleinement convaincu», «avoir la
tion subordonnée de cause. EJle confirme que l'a rgument à peine di t est certitude plcme et enuère»67 • Cependan t, quoi qu'au passif, il n'a pas
possible60. Le substancifDµ Épav est un accusatif fém inin singulier. com- son co~plément d'a.gen l dans la phrase. La préposit ion Èv / «dans» se
plément d'objet direct du verbe KpLVH. Il se traduit par «journ en oppo- construit avec le dati f et marque ici un lieu mai sans l' idée de mouve-
sition à la nuit"'· La prépo ition ncx.pa régit ici l' accusatif. Ayant va leur ment.
compararive, elle se traduit par «à côté de». De là le sens de «parallè- Les termes :c;> i.ôl~ détem1incnt le subsLan tif vot et en précise le
lement à». «en comparaison dc,»62. Ainsi. le terme iiµÉ-pav I <tjourn est genre et le no1!1~re. !ls se ~~o~~ent au d_atif à cause de la préposition Èv.
décliné à l"accusaLif à cause justement de la préposition qu i la outient. Quant a~ mot LÔL<.y, 11 a déJa ete analyse au v. 4 et a éga lement le même
li joue le rô le du second terme de la compara ison. Nous traduisons la sens, qui est celtü de «qui appartie~t en propre à quelqu·un ou à quel-
phrase oç µèv [yàp] Kp[vu ÎlµÉpav ncx.p· Î)µÉpav par «l' un , [en effet], que chose». D~ ~ett~ ~xp~ess1on , vient le sens de «propre». «particu-
préfère un jour en comparaison d' un (autre) jour». lier», par opp0Stt1on a aUo-rpLoç «autrui».
- oç ôÈ KPLVH mioa11 nµÉpav. Le pronom relatif OÇ est construit Le .mot vot s_ïgnifie . soit «facu lté de pensée». d"où «lï nlelligencc»,
comme le précédant dans la forme oç µ€v [ ... ] oç Ôf. Tl sert de sujet au «espnt». <<pensee»; sort «âme». «Cœurn, «disposition de l"àme», «VO-
verbe KptvEL . JI est exactement employé com me le premi er dans la
phrase précédente. La particule M, dan cette fonne oç µÈv [ ... ] oç ~,
introduit le econd élément de l'ant it hè ·e. l i s·agit d"une opposition de 63 Cf. A. BJ\lLL Y. <rniiç)). GDGF. 1495.
<<.Jcdcr Tag» ( H. c: 111 IFR. Der Riim f!rhrief. 402: U. W1u K~;-..s. Da Bnef. 81 ):
64
<<eac_J1 day>>CO.J. Moo.
6
me Epistle. 833 ).
o
59 Cf. l' analyse faj ce de !"expression ô; µ<i' [ ... J 6(. au v. 2 de ce chapitre. 66 .. GDGF. 1495 .
' Cf. A. BALLLY. <f"'.rtir».
60 Cf. BOF. «yâp». § 452: A. BAILI Y. «yap», GDGF. 388. D.J. Moo aflim1e que la «aJle Tage>> (0. MICllF' I . Der Brief. 4 l 8); «CVCry dtty» (J.D .G . DUNN. Romans.
796): «a il days» (R. J EWETI. Romans, 844).
préfiosition marque ici w1e force de conrinuité. Cf. Io .. The Epwle, 841 n. 67. 67
1 Cf. A . BAILl Y. «~µipa», GDGF. 899. ~Cf. A. B~ILLY. <nl.11p~opda0<.J». GDGF. 1572. Cc même verbe. employé dans
61 Cf. A . BAILLY. <fnetpa». GDGF. 1~57: BAGD. <cr.apci». 757-758: aussi le merne se~:. a la fonne pas. ive. se trouve également en Rm 4.2 1. Lire G.11. DELLNCi.
R. J rwETT. Roma11s. 845. B.M. EWMA'l propose. entre autre, la traduction de «ratber •mJ~11Po4>o~L09w». TD.VT ~V. 309-3 10: C. PICO. «TTÀfJpO<j>opda0w». TLNT 111 . 12 1.
than» {plutôt que). Voir Io .. A Co11cise GreeJ.-E11glish Dicuonary. 131 . V~1r au ·1J: BF<:~ER, •<Qu1d nA.11pocjlopüo0aL in Rom 14,5 signi ficet» . 11-18: Lo.. «Zu
plcrosphorc1s1hru m Rom 14.5». 36-t
180 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUI ANT CH. V L:'NE LECTURE AlTE.NTJVE DE RM l..t. 1-9 1 1

lonté». «dé irn'' . Aussi pouvons-nous traduire la phra e ËKtto-:oç. Èv :9 communauté à avoir la cenirudc pleine et entière dans on propre cœur ou
~ôl.w, vot 1TÀ11Po<Poptl.o0w par «chacun, dans on propre cœur. sott plei- dan a propre pen ée7°. La question qui se po e e t celle de a oir quel e ·t
nement con aincu» . l'objet de la conviction que Paul conseille chaque chrétien romain à avoir.
En effet, le complément d 'agent du verbe lTÀ11PcxPOpdo0w n'c. t pas men-
S.2 Compo ·itio11 du v. 5 tio nné qui rcpré enterait le but de leur certitude.

v. Sa ··oç µ~v (yàp] ptvE1., Î)µÉpav ïap' iliipav, 6. Rm 14,6


«L ·un, en elTet. préfère un jour en comparai o n d'un (autre) j oum
v. Sb Oç & ~pl.vcL nâoav Îl!É~ ô cppovwv :~v iiµépav KlipL<t> <PpoVE:t· KetL o
cd ·autre préfère chaque jour» èo0[wv KupL<.y èo0[c L,
v. Sc ~Kaowç è11 t<~ tôle.y vot nl11po<t>0pdoew. cùxapiotcl yà.p ·~ 0f~·
«chacun. dun le propre cœur / pensée. soit pleinement convaincu» Keti. b µ~ èo0[wv Kup(cv OÙK èo0LH Keti.
<ÛX<XPLOtE1 î~ 9f~.
Les propositions v. Sa et v. Sb sont étroitement unies, d ' une part p~r la «Le pensant, au jour en l'honneur du Maitre, po urvoit; aussi le mangeant en
l' honneur du Maître mange, il rend grâce. en e fîet, à Dieu,
fonne syntaxique O.; µ~v (... ] Oç ~· ~ellc-~i introduit deux a~~at1ons
aussi le non-mangeant. en 1'honneur du Maitre. ne mange pa .
antithétiques ·an l'idée de contradicllon. D autre pan, elle se JU li fie par il rend grâce à Dieu».
tes Lenne identique · utilisé : Kpl.vH. ÎJ.l(pttv. Les deux phrase se diffè-
rent par le fait que rune e t une assertion comparative, et l' autre ne l'est
6.1 Ana(\•se syntaxique du '" 6
pas. Il e t certain que dans ce \'erset Paul continue à 'a?re er aux d~ux
composante de la communauté. J1 change leur appclat1on comparatwe- - ô Q>po11wv :Tiv ~µÉptt11 KUPLti> Q>povn. Le ver. et c t int roduit par
mcnt aux verset! précédents. lJ s'agit ici de ce~ qui pré~ren_t un j our .à. u~ l'artic le défi ni o,lequel c trouve au nom inatif masculin . ingulier. Il
Q"
autre jour et de ceux qui préfèrent cha~uc JOUr6 L Apo~re .a uult e. est con truit avec le participe Q>povwv dont il précise le genre et le
comme dan le versets précédents, le prc ent gnomique qui lat e com- no mbre. Cc participe présent actif substantivé crt de ujct a u verbe
prendre une réalité d'ordre général et qui reste valide à tout moment. Nous <j>povcL. Cc ~ui-ci_ c t conjugué à l' indicatif pré ent actif. trois ième pcr-
nous trouvons de nou eau devant un style mélaphoriquc qui nou amène à onne du mgultcr. Tant Q>povwv que <J>povEi. sont de présents gnomi-
nous interroger ur cc à quoi ce discours renvoie.? . ques et pro iennent du même verbe de base <j>povÉw. Il ignifie au sens
La propo ition v. 5c n'a pas. de faç?n yntax1quc, de hen .ave~ le . deux intrans itif «avoir la facu lté de pensern. «ètre dans on bon en ».
autres. Il est question d 'une exhortanon a cause du mode 1mperat1f em- «p~n scm ; au sens tran itif. «a voir dans l'esprit». «songer à». «pour-
ployé dans la phrase. L'Apôtre et en train d ' inviter chaque membre de la voir à» 71. Dans ce verset, le participe est employé a u sens intran itif.
et c tradui1 donc par «pcnsanl ». L ïndicatif Q>povct, par conLrc, a
l'acception trans iti ve et veut dire (<il po urvoit à»n . Les termes î~v
68 Cf. A . OAll 1 v, ccv6oç». GDGF, 1332. ~µépo:v I « le jour» sont déc li nés à l'accusatif féminin singulier e t
6'> Scion 1·opinion de ccnain spécialistes. le JOt~r d~t~I .il est question dn1~ s c~ ~~rs,ct
renverrait à l 'ob~erv unce du sabbat ou aux autres les11 v1tcs dans le culendncr JUIL Cf. jouent la fo nctio n du complément d 'objet direct du verbe <f>povtl . Le
D.R. Dt- L\CI Y. «The Sabbath/Suoday Question». 17 1- 172.18 1- 182: J.D.G. D u~N. s ubstantif Kupl.w, c t un datif masculin s ingulier avec va le urs de re la-
Romtms. I l. 805-806: P. . Ml"-lLAR. The Ohedieme. 9: J.M.G. BAR<.Ll\V, «Do Wc
Undcnninc the Ln" H. 297-29 : D.J. Moo. Romum . 8..t2; J.A. FrrlMYtR. Ro111u11s.
690: A. Pin'· l.ellera ui Romani. 467 . o ·autn.~ exégète:. parlent des JOUl'll de chance "O Nou~ f>OU\On nous rélërcni cc que Paul dit au SUJCI de la foi d'Abraham. Sa foi
du calcul astrologique gréco-romain. Lire J. o· l Il. Pa11/. 22..t: E. KA E\lr\V.... Com- Ctall -.an défaillance. am 1 11 ëtn1t com aincu que Dieu étrut pui"unt pour réaliser ..a
me11ton- 011 Ro11ums. 370: O . ZELLFR. Der Brie[. 215: M RI •\ O rR. The Strong. 148 promes e (cf Rm 4.19-21 ). Voir au"'i J BECKER. «Quid nA11poq1op<lo&n m Rom
F J . Lccnhardt ne partage pas l'hypolhêsc elon laquelle r Apôtre c référait au ~abbnt. 14.5 ign1ficct», 11-1 R. ID.. cc/u plëro"phorci thai in Rôm 14.SH. 36..t. A. P1rr \. Let-
li atlim1c. par contre. qu'ai s':1git des prauque-. d' abl>tincnce ou de jeûne fixé à de. ll'ra m Romam. 466.
7
dJtes régulacre . Cc' datci. n'ont pas été pn..~iséel> par le Tar.io~c: d :auta~t plui. qu'il 1 Cf A. B,\ILL'. •<-tipo1!(c,m. GDGF. 209 .
ne ~·agi!>Mllt pa d'apprécier CC!. pratiqu~. L·important pour lui cta11 le Jugement de .,.:! . Bai lly suggère en Rm l..t.6 la Lrnduction uivantc : «poun oir au (be om du)
chacun à partir de -;a con\ 1c1ion inténeure. Voir ID.. L 'i:pitre. 196. jour Cf Ir>.. cclj>pol.C@>. GDGI·. :?098
PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUIS ANT Cl 1 V : U l:. Ll:.CTURE A lTENTJVE DE 1Uv1 14, l-9 183
1 2

tion et d'avantage-l. Il est traduit par «en li en avec le maître et en son 6.2 Compo.\itio11 du ' '· 6
o
honneur». Ai n i. la phrase <jlpovwv ri)v ~µ(pav Kupi.~ <jlpovH e l
v. 6a o $povwv ri\v r,_iipav ~ $poVEî·
rendu par «le pen ant, au jour en Lien avec le maître et en son honneur.
« Le pcn ant, au jour en lien avec le Maitre et son honneur,
pourvoit».
pourvoit:»
Kat oèo0(wv Kup(~ Ëo0tH. La particule Ka[ I «aussi. même» est v. 6b 1eai. b io0[w11 ~ f00LH,
construite ici comme un adverbe. Il ert à relier le éléments du di - «Et le mangcam. en lien avec le Maître et en son honneur. mange»
o
cour de Paul. L ·expression fo0i.wv se trouve au nominatif masculin v. 6c cùxaptanî y<lp te;> M·
ingulier. o tons toutefois que Èo0[wv est un participe présent actif «Il rend grâce, en effet, à Dieu»
substantivé du 'crbe Èo0(w. A ec son article, il constit ue le ujet du V. 6d Kai. 6 µ~ fo0LWV ~ OÙK Éo9[n
verbe fo0i.H. Ce dernier est un indicatif présent actif de èo0(w. Le subs- «Et le non-mangeant, e n lien avec le Maître et en on honneur, ne
tantif Kup(~ est un datif de re lation et d·avantag~ de même que ce:lui mange pa!i»
analy. é ci-dessus. La phrase se traduit par <<aussi le mangeant e n li en v. 6e Ka i. f ùxap Lotcl ttil M·
«El i l rend grâce à Dieu».
avec son maître et en son honneur mange».
- E-ùxapLOnl yà.p t~ 0e~. Le verbe eùxap LOtfl se trouve à l'indi-
La structure du verset présente c inq propositions qui décrivent les diffé-
catif présent actif de Eùxap Lo:Éw /«être reco?llais.sant», «rcnd~e ~râ­
rents comportements de chaque groupe présent dans la communauté. Ce
ces», «témo ig ner sa reconnaissance». La conJonct1o n de coo~~1na t1 on
attitudes. bien qu'elle ne soient pas identiques. e rrouvent toutes pour
y<ip a valeu r explicative et relie la phrase aux autres propos1t1on du
autant en lien avec le Maitre le Chri t. Elles ont toute un cul but, celui
verset74. ous avons de nouveau un datif dans l' expression te.\> 9E<.\) I
d'honorer le Maître. Dan la première propo ition ( . 6a). Paul invite celui
«à Dieu». Ainsi. la phrase peut être traduite par «i l rend g râce, en ef-
qui pen e à le faire en lien avec le Maitre et en son honneur. Le phrase
fet. à Dieu».
(v. 6b-e) défini ent le~ deux réalités oppo ées. li e t que tion de la situa-
K«L 6 µ~ (o0i.wv Kupi.cy oÜK €o0i.EL. L'adverbe Kai. a le même rôle tion de celui qui prend on repas et celle de celui qui ne le fait pru . Les
o
que le précédent. L · expre sion Ëo0[wv est marquée par la né!?ation deux action doivent être accomplie en rappon avec le Maitre et pour
µ~ . Elle e t au nominatif masculin singulier et repré . en te. le sujet ?u rhonorer. En outre. l'Apôtre indique qu·une fois qu'ils ont agi de la !>One,
verbe Ëo0i.H. Ce dernier e t aussi affecté par la négation ouK. Les dif- chacun doit rendre grâce à Dieu, c 'e t-à-dire lui témoigner de la reconnai -
férente~ forme du verbe Èo0i.w ont au présent gnomique. L'un est un ance. En d'autre termes. nou comprenons que l'honneur est rendu au
participe actif ub tantivé et l'autre un indicati f actif. Le mot ~upl.~, Maitre avec qui le serviteur e. t en lien. et que l'action de gnke c t rendue
comme les autres datifs. a simultanément valeur de relation et à Dieu le Père. Ces différentes assertion ont reliées le une aux autre · à
d'avantage. JI e. t rendu en frança is par «en lien a ec le maitre et en travers I' ad erbe K<XL
o
son honneur» . La phrase K<Ù µ~ Èo9l.wv Kup(cy oÛK io0l.H est ren- Il est intéressant de noter que Paul alterne Kuptcy I «Maître» et tQ 0<Q /
due par «aussi le non-mangeant, en lien avec le maître et en son hon- «Dieu» en leur attribuant la mème fonction : celle d'un datif. La seule dif-
ne ur, ne mange pa ». férence se situe au niveau de la va leur de ces datif1 . Le ca. de 1rnptu..i /
Kal <ùxcxpLotcl T~ SeQ. Dans cette propo. ition également la parti- «Maître» a valeur de relation et d'avantage, tandis que cel ui de te.;> ace.;) /
cule Kcx( est un adverbe qui organise l'énoncé de l'auteur. Le rc. te de la «Diew> est régi par le erbe cùxapLotEl. De nouveau la question ~u rgit de
propo ition est identique à celle que nous a ons analysée ci-dessus savoir à qui les tcnncs Kuptcy / «Maître» et rQ ~4> / «Dieu» e réfèrent. Le
dan ce même verset verset n ·offre pas a C7 d'élément pour y répondre.

6.3 Le lien strucwrel e111re le · w. 5-6


- , Cf BDI • «The dall\ c». ~ 18 n. 2. ous rem-oyon-, cgalcmcn1 ù cc que noU:.
a\OO!> affinnc au' · 4 n. 4 7 au sujet du da1if. lequel pouva11 être intcrprcté en considé- ' · Sa "O.; µ(v (yètp] Kp(vCL ~ nap· ~.
mnt le-. dcu'< 'aleur. du datif : de relation et aussi d. a\ antagc. « L ·un. en effet. préfère un jour en comparai on d"un (aultc) jour»
-.i t ~I /1R\\1< "'· 81hlicul Greek. -. ..n1.
4 PARTIE U : LE SEIGNEUR EST PUI A T C l 1. V : UNl LECTl.JRE ATrEt-.'TIVE DE RM 14.1 -9 185

"·Sb ô.; & Kpl11u mioav ~­ tamment celle du jcùne75 . Or. étant donné que le re pec t au jour du sab-
«L 'nutrc préfère chaque joum bat était accompag née avec le lois alimentaire . nou o o ns c timcr
v. Sc cKttoroç iv rc;> i.ôl4> vot 1rl11po4>of>EL09w. que la catégorie de pensant aux jours (cf. v. 5b-e) renvoient aux diffé-
«Chacun. dans le propre cœur pensée. oit pleinement convaincu» rente faction citées aux vv. 2-3 : celle de mangeants et celle de non-
mangeants. Ces derniers rcpré entent les membre qut ne c noums cnt
' . 6a o <j>po11w11 :iiv ~ icupl4> cppo11E-i · que des légume , non par tou le jours mais de préférence pendant le
(< Le pcn am. au jour en ! 'honneur du maitre. pounoit»
moments de fes ti\ ité jujve . en l'occurrence le sabbat76. Le man-
' . 6b Kal o ioelwv KUPL4> ~o0(H, geants, par contre. font a llus ion à ceux qui se sentent libre de consom-
«El le mangeant . en l 'honaeur d u maître. mange»
me r tout à n ' importe quel jour.
. 6c <üxapLo:c'L yàp •9 9fQ·
« 11 re nd grâce, en effet. à Dieu»
Nous percevons d an cc versets l'att itude flexible et ouvene d e Paul
V. 6d K<Ù 6 µ~ èaelwv KUp ll\) OÛK fo9LH envers la di ver ·ité comportementa le des chrétiens romains. En effet,
« hl le non-mangeant, en l' honneur du maître, ne mungc pas» !'Apôtre ne condamne oucu n groupe dans la communauté. Il les in vite
v. 6c Kai. '"ùxap Lotfî. T~i OEQ. s implemen t à se conduire de manière à être toujo urs en accord uvcc
«El il rend grâce à Dieu» leur maître pour l' honorer. L' important c'est la moti vation de cet agir.
Cela cons titue le po int fondamenta l des vv. 5-6. Cette cert itude to tale
Nous constatons dans cette composition une cohérence forme lle in- quj est enracinée dans le Maître et qui permet au c hrétien d'agir en lien
terne enLre les vv. 5-6. Nous la trouvons notamment à travers deux ter- avec lui et en vue de son honneur.
me ·. Le premier e t présent dans les phrases v. 5a-b et v. 6a. Il s 'agit du 11 res o rt de . la compréhen ion de ces versets un aspect ·ign ilicati f
mot ~µépa / «jour». Au v. 5a-b. il y a deux affirmations opposées au pour la vie en Egli. e de. C royant en Christ . JI se dégage dans la façon
tour de ce terme. Paul parle de ceux qui préfèrent un j our par rappon à dont Paul remplit a mission de pasteur. n accueille toutes le. di er-
un autre, et de ceux qui aiment davantage tous le. jours. Dans la ·uite gcnces du componemcnt de chaque membre. En quaJité du mini tre du
de on d iscour.. au . 6a, l'Apôtre présente en quelque son e une condi- Christ, il oriente chacun ver ce qui constitue l"e entie l de l'être chré-
tion qui doit être liée à l' agir de chacun dans la communauté. JI recom- tien : la cenirudc pleine d"agir confonnémenc au Christ.
mande à celui qui pcn c à un jour d 'y pourvoir. Il doi t par là fournir ce
qui e t néce saire pour ce jour, toujours en accord a vec son Maître le 6.4 Le lie11.\ln1t:t11rel emre les V\ '. 1-6
Christ et visant à son honneur. C'est cela même l'objet et la ra i ·on de A
leur com ictaon pleine et entière. v. 1 Tàv & àoawoû1r:a 7tl 1r(o:H npoo).aµp«iVEoEk. µ~ c Lç ôtttKptouç
Le second é lémem d ' unité entre les deux verset se révèle par les
termes KUploç / « Maitre» et 9coç I « Die u». A tra ers ces dern iers, l' A-
______________________________________
ÔLaÀOyLoµ<.~>I' . ,

pôtre indique la finalité du comportement de c hacun dans la commu- v. 2 oç µ(v m onÛ< t <1>nyct11 nâvra, 6 6È ŒoSEvwv l.âxttv« È-o0(H.
nauté. Il les conseil le à se conduire conformément à leur Maître et à
re ndre à Di eu. V. 3 6 (oO(c.w :èw µ~ éo0(011-m µ~ èÇou0EVELTW, 0 & µi) fo9(c,w 't"OV

La parti cularité de v. 6b-e est que Paul n'empl o ie plus le qua lifi catif èo0(ovttt µ~ KpLvÉ'tt.>, 6 9<:oç yàp aû-rov rrpooel.iif.kro.
«pensant au journ pOlLr désigner les chrétiens romains. JI uti lise de no u-
veau l'appell ation « mangeant et non-mangean t». Ce changement d ' ex- 75 Dans d·autre-. pus-.agcs pauliniens. tels qu·en Ga 2.12s: Col 2.16ss, 11 y a aw.si
prcs ion nou conduirai t à croire que Je discours de l' Apôtre 'adrcs c à le genres des 1ens1011s aussi des Jours. C f. R. DEDER'-:. «Ün Estccming One Day». 16-
un aut re g ro upe au sein de cene communauté. et qui diffère de ceux 35: J.D.G. "100. Tht! Evmtlt.!. !<42.
76 !':0ton que dans le contc"c de la diaspora. les Jw fs s ·ab tem11en1 à manger la
dont il est question aux vv. 2-3. Cependant. s i nous admettons que les
viande pour ê\. llCr la contamma11on a' cc les viandes impure:.. ous pensons que. en
jours dont il est que tion dans cene péricope sont en rapport avec la loi lien U\CC le d1scour. de Paul dans cc verset, cette abstinence étau remarquable le-.
mo aïque. Cette dernière préconise r obscrvancc des jours fc ·tif:. no- jour. d~ fëtc:. JUl\C:. 'clon la loi mosaïque et le sabbat en pan1cuhcr. Voir aussi
O. \t!ICHl-L. Dl'r Bril'{. 419-t2 I: J.D.G. Dll'~. Romans 9 16. Il. 805: J.M.G.
S ARCLA 't' . «Do Wc Undcnnme 1he Lmw. 2 9-230: .
PARTIE 11 : LE SE1GNEUREST PUISSA'lT C il V : lJNL LECTURE AlTEYllVE DE RM 14.1 -9 187
6

pre conviction. En somme. il ne serait pas excessif de croire que le


B
verbe Kpl.vw / «juger» montre la centralité du v. 4 de l'en emble des
\ . 4 où :l..; Et 0 tcp(V<a>V Ùllo-:-ptOV oÙ<É-::JV; :~ Î.Ôl~ \!PL~ oTI,cc l Tl vv. 1-6. En effet. le problème qui y est po é constitue un élément ma-
- (rr:H'o:a01)ae:1u ôÉ:. ouva:ü yàp ôt<ûpto.;j o:fjoaL aÙ'rov. jeur du conflit de la communauté relaté au ch. J4 de la lettre aux Ro-
mains.
Du point de vue du contenu, l'unité se révèle dans le fait que Paul
' . 5 "O.; µ( v [yàp) .cp(vu ÎJ.lÉpav nap 'iiµipav. ôç ôè icp(vu nâoav
s'adre se aux Croyants romain clon leill orientation concernant la
Î).lépaw ëKaOToç Èv î~ lôl~ vot n).11poct>op<l.oOw
pratique de la foi. li s'agit d'une part de ceux qui s'ab tiennent de la
-------------·--------------------------·---- consommation de viande à des moments bien précis. et de l'autre part
' .6 o <j>pOl'WI' tiiv ÎJ.tÉpav ~L~ <j>poVE-i 'Kalô fo9(wv ~upl~
de membres qui se sentent libres d e se nourrire de tout à n'impone
èo9(CL, cùxapto-reï. yà.p r~ EK~· Kal ô µ~ Èo9i.wv ~uplU?f oÙK
io0ic l KCÙ ~:ùxap lOTEÎ. îci) 0Eci). quel jour.

Nous voulons à travers cette présentation récapituler l'exégèse faite 7. Rm 14,7


des vv. 1-6 pour montrer leur unité de sens. En effel, les expressions oùôei.c; yàp +,µwv èau-rc~ (û
employée dans ces versets et leur contenu mettent en évidence leur Kat oùôftc; ~aurQ cino9vl)oKH ·
cohérence interne. Nous y trouvons une structure concentrique de trois (<Aucun, en elTct, de nou . pour soi-même. ne vit
et aucun ne meun pour soi-même».
panic (A : vv. 1-3; B : v. 4 et A' : vv. 5-6) et des ternies identiques,
tel que les verbes Èo0(w I «Cnangern. Kp[vw I <tjugern. «préférern el le
7.1 Ana~vse syllfaxique du \'. 7
s ubstantif KVP L~ / «maître».
ous oyons dans le verbe Èo0[w «mangern le mot clé autour du- - où&l.ç yàp iiµwv é-aut~ (fi. Le v. 7 est introduit par le pronom in-
quel Paul organi e son discours (vv. 1-3 et 5-6). Dans les vv. 1-3, il défini oÙÔftç qui veut dire «aucun(e)». Ce dernier est un nominatif ma -
qualifie l'agir de deux factions qui se sont créée au ein de la co~­ culin singulier et en de ujet au verbe (lj I «vio>. Il e l conjugué à
munauté avec les épithètes de mangeant et non-mangeant. Il leur m- l'indicatif pré enl actif, troi ième personne du singulier de (ciw.
terdil de e juger en rai on de )'agir accuei ll ant de Dieu envers tous. Comme dan~ les cas précédents, il est au présent gnomique e1 con truit
En référence à ces deux composantes. l'Apôtre ajoute aux vv. 5-6 une au sens intransitif. La conjonction de coordination ycip a valeur explica-
dimen ion es entietle pour tout chrétien. JI s·agit de se comporter en tive. Le pronom pcr onncl ~µwv joue la fonction du complément dé-
lien avec . on Maître et de avoir rendre grâce à Dieu. Le mot KÛpLO' / terminatif de où&l.ç. li est. de fait. décliné au génitif pluriel. Le pronom
« Maître» rcpré ente un autre é lément qui sert de relation entre le réflexif personnel €aut~ employé au datif a valeur d'un datif d 'avan-
vv. 1-6. Au v. 4, par ce terme, Paul montre le seul juge de chaque tagen . Son rôle dans la phrase est celui d'un complément d'objet indi-
croyant, entendu comme serviteur du Maître. Par contre. au . 6, il est rect. Ain i, la phrase est traduite par «Aucun. en effet, de nou ne vit
utili sé pour indiquer la fin a lité du comportement de c hacun dans la pour so i-même».
communauté. - Kat oùôcl.ç êaut<t> ètnoevuoKH. La particule Kal. est constru ite comme
Quant au verbe KpLvw / «j ugern, il est employé dans les troi s parties un adverbe et assume le rôle de relier les éléments du discours à l' intérieur
de l'ensemble d es vv. l -6 et révèle leur un ité. Dans la première partie, du verset. Le pronom indéfini ooodc; et le pronom réflexif ont la même
nou l'avons traduit par «jugeo> (v. 3). li s'agit de l'in terdiction envcr fonction que les pronoms précédencs. Le verbe de cette proposi1ion :
les non-mangeant de porter un jugement de va leur à l'égard des autres àno0vTioKtL se trouve à l'indicatif présent actif de àno0vt1oKw. li se traduit
qui e nourrissent de tout. Au . 4 de la deuxième fraction. Paul l'utili se par «meurt>>.
lorsqu'il s'interroge sur l' identité de celui qui juge le serviteur d'auLrui .
Il e trouve en revanche dans une phrase comparative et a le sens de
«préférer» dans la troisième partie (v. 5). L 'Apôtre met en évidence la 77 C F.D Moule nffinnc qu'il s'agit d'un daufd'avamage. cependant. 11 pen c que
di versité dan le choix de chaque groupe par rappon au jour. Il déclare le daùf de rclntton ~• mieux approprie. Cf. Lo.. <<Death>>. 151.152.157. R. J t:.\\lTT.
cependant que cette prédilection doit être affirmée à panir de leur pro- Romans. 846.
188 PARTIE Il : LE SEIG EUR EST PUI SANT Ci l. V: UNE LECTUREATTENTJVE DE RM 14,1 -9 189

7.2 Composition du v. 7 «au cas où». Elle est en lien érroit a ec la conjonction :E. Celle-ci se
traduit par «el>>, «en o utre», «d'autre». Le verbe de la pbra e e trouve
Texccdu, . 7 Fait au subjonctif à cause de la particule Mv qui se con truit avec cc mode.
En effet, (WµE:v est conjugué au subjonctif présent actif, première per-
' . 7a oûœ'-'yà.p Î].Lwv Êauf!i> [~fi~ Vivre sonne du plurie l du verbe ba e (aw. La conjonction de coordination yap
(<Aucun, en cfTeL de nous pour soi-même ne vit» a ici valeur explicative. L'expression r~ irup[w est un datif de relaùon el
d'avantage el sert par conséquent de complément d'objet indirect de (WµEv.
oûœ'-'
. 7b Ka\ Ëau-:Q [~~~~~~~} Mourir Le présent de ces verbes exprime une réalité générale. La phrase csl ren-
«Et aucun. pour soi-Même ne meurt»
due par «si et, en effet. nous vivons, pour le Maître nous vivions».
La strncrure du verset montre bien le lien étro it entre les deux propo- - Èav tE ci1To9vt;ioKwµE:v, -r~ Kup[~ à:rro8vtjoKOµEv. La construction
sitions. Il est marqué par J'ernp loi des tcnncs semblables excepté les de eene ph rase est parei li e à la précédente . Le seul cbangemeol réside
verbes : (fi et êrno9vl]oKEL et les particules : yap e t KaL Le verbes (û et dans la présence du verbe àno9v~oKWµEv et ! 'absence de la conjonc-
ci:TTo9v\loKEL. traduisent une réa lité anti thétique. JI s'agit de deux instan- ti on yap. Le verbe 1h o9vt;ioKwµEv se trouve au subjonctif présent actif.
ce · caractéristiques de l'exj tence humaiI1e: la vie et la mort 7î!. Les premi ère personne du pluriel de ànoevi]oKw. L 'emploi du mode sub-
particule yap et KfXL ont chacune sa propre fonc tio n. l'ap expl icite jonctif se j ust ifie par la conjonction hypothétique Mv. Ainsi, no us
l' idée précédemment énoncée en donnant le raison pour lesquelles les rendo ns cette phrase en françai s par «si, et, nous mourons, pour le
assertions du v. 6 doivent êrre vécues. Ka(, par contre. unit les deux Maitre nous mourons».
propositions qui ont la même fonction exp licative. Le pronom per oo- -Èciv TE oùv (wµev Êav :E: èrno9vnoKwµE:v, toû Kup[ou èoµÉ v. La
ne l : ~µc.;>v appare mment absent dans la deuxième pro position, y est conjonction de coordination oùv sert ici à rappeler ce qui vient d 'être dit.
to utefo is, sous-entendu. Ce pronom renvoie bien ûr aux membres de la Elle v ise par là à rapporter l'attention sur le fait énoncé. Dans ce cas,
communauté de Rome. y compris Paul, ! 'auteur de la lenre. elle est tradui te par «donc». «eh bien»79. L ·expression :oû 1rup[ou e
Dans ce verset. !'Apôtre des Genti ls montre que chaque individu trouve au génitif ma c ulin ingulier et signifie «d u maître». La forme
dans la communauté ne vi t pas ou ne meurt pas pour son propre intérêt. verbale ÈoµÉv e t un indicatif présent, première personne du plurie l Ei.µ L
Le fa it de vivre ou de mourir constitue des moments importants q ui Nous avons un présen t gnomique exprimant une réalité va lide à tout
ti s cnt la trame de l'existence humaine. moment. La pbrasc èciv n oùv (wµEv èav :E irno0vijoKwµE-v, :oû
l(l>pLOU ÈoµÉv se traduit par «Si et donc nous vivons. si et no us mouro ns.
8. Rm 14,8 du Christ nous somme »
èriv rc yà.p (WµEv, rc;> Kupt~ (WµEv,
èriv rc àno9vfioKwµEV, rc;> Kup(~ <ino9vljoKOµEv. 8.2 Composition du ' '· 8
Ëriv rc oùv (wµEv i-av n ùno9V\loKwµEv, :oû Kup(ou C:oµÉv.
«Si. et. en effet, nous vivons. du Maître nous vivons. Texte du v. 8 Fa it
Si, et, nous mourons. du Maître nous mourons.
V. 8a fciV TE yà.p (WµfV, rc\) KllpLl.o) (WµEv, Vivre
Si. et, donc, nous vivons. si. et, nous mourons, du Maître nous sommes».
«Si, e l, en effet. nous vivons. pou r le Maître, nous
8. 1 Analyse synwx ique du v. 8 vivons»
- Mv 'tE yà.p (wµE-v, r~ Kup[c.p (wµE11. La conj onctio n Éciv marque la v. 8b Mv n &:no0vl.1oKwµEv, :c.\)trupl.l\.J àno9v'6m<oµfl'. Mourir
phrase d ' une idée d'hypolhèse o u de condition et se traduit par «Sλ, (( i. et, nous mourons. pour Je Maître.

nous mouron »
78 ous tl\On dan · ce verset un mérisme : figure de :.tylc qui consiste à unir des
mol oppo és. Elle vi e â exprimer une totalité à 1rcncrs l'usage des 1cm1cs tels que
jour et nuit. jeunes et vieux. etc. Cf. J.-N. ALETil - al.. l'ocobulaire. 100. Au v. 7.
Paul utilise ici le mérisme :i travers les verbes (wivn!» et «mourio>. 79 Cf. A. B AIUY. «0Ù1m. GDGF. 1411.
190 PARTIE n : LE SEl GNEUR EST PUlSSANT CH. V: UNE LECTURE ATTENTIVE DE RM 14. 1-9 191

v. 8c fttv f f oùv (wµEv Mv :-E â:no9vi;loKwµEv, wû Kup[ou Vivre et L a cohérence formelle à l'interieur de ces deux versets est évidente à
fOµfv. travers les termes uti lisés. To ut le discours tourne autour des verbes
mourir (aw I «vivre» et cinoevnoKw I «mourir». l ls sont conj ugués à la pTe-
«S i, cl, donc. nous vivons, si, et, nous mourons, du
Maître, nous sommes». rrùère personne du pluriel. 11 s'agit donc de to us les membres de la
communa uté et de !'Apôtre. Cependant, cette un ité de sens se subdivise
Nous avons trois propositions dans ce verset: v. 8a, v. 8b et v. 8c. en trois propositions, à savo ir lev. 7. lev. 8a-b et Je v. 8c. Dans lev. 7,
Leurs constructio ns syntax iques sont identiques. Chacune présen te un l'assertion de Paul se rapporte au faü de vivre et mourir de chaque
fa it et sa ra ison d .être. Les phrases de v. 8a-b expose le vivre et le mou- membre de la communauté et de lui-même. L' Apôtre nie, néanmoins
rir des chrétiens de Ro me, y compris Pau l, à cause du pronom person- ces réa lités pour l'intérêt du croyant. Au v. 8a-b, il y a deux phrases
nel «nous». Ces deux moments de l' ex istence humaine sont en lien conditio nne lles qui sont, non pas des suppositions à partir desque lles
avec le maître et pour son honneur. Une dimension importante s'aj oute des conséquences sont envisagées, ma is des énoncés de départ du rai-
au propos de I' Apôtre dans la proposition v. 8c. Il s'agit de l' apparte- sonnem ent logique de J'Apôtre. Ces déc laratio ns supposent une conclu-
nance des chrétiens au Maître. Il affirme que dans la vie comme dans la sion. En effet, Il clôt sa pensée en annoncant l'appartenance de
mort, ils ont tous d u MaîlTe. l'existence humaine des croyants au Maître. C'est ce que nous trouvons
Nous notons par aiulleurs un changement dans l 'emplo i du mot dans la proposition v. 8c.
Kupwç. Au v. 8a-b, il est utilisé au datif: n;> Kupl.c.p et expri me le lien
avec le Maître et l' intérêt de ce lui-c i dans l'agir d u croyant. Au v. 8c, il 9. Rm 14,9
n'est plus question du dalifmais d' un génitif: -roû Kupl.ou. Ce cas mon- Ei.ç -:oÛîO yèxp Xpwrbç &rr€9œvEV KŒL Ë( 110Ev,
tre le lien d 'appartenance au maître. En effet, en utilisant Je verbe vivre 'Lva Kat VEKpWv Kfi'.l (WVî<.ùV KUp lEUo1J.
et mouri r, Paul est en tra in de proclamer que tout ce que l' honm1e- «En ceci. en effet, Christ est mort et reven u à la vie
croyant fa it, non seulement le Lie au Maître, et concourt à l'honneur de afi n que. de tous les deux : morts et vivants. il soit devenu Maître».
ce dernier, mais encore que l'homme-croyant lui appartient.
9. 1 Analyse syntaxique du v. 9
8.3 Le lien structurel entre les vv. 7-8
- dç rnûrn yàp Xp t01:oç Ô:nÉ9etvEv KCÙ Ë(110Ev. La préposition ELÇ se
Texte des vv. 7-8 Fa it constru it avec l'accusatif et marque habituellement une idée de mou-
vement. Par contre, elle est .ic i util isée sans idée apparente de mouve-
v. 7 où&1.ç yàp iiµwv Ècrnn~ ( f.l Vivre ment. E lle est employé comme synonyme de La préposition Èv / <.<dedans,
Ka1. oooùç ê1wr<.\) chro9vi;loKEL · et mourir dans, en» 8o. Le pronom démonstratif 1:0ûro est décliné à l' accusatif
«Aucun, en effet, de nous pour soi-même. ne vil. masculin singu lier à cause évidemment de la préposition E'lç qui la régit.
et aucun, pour soi-même. ne meurt» fi signifie «celui-ci», «celle-ci», «ceci» «Ce». etc. Il se rapporte à ce
qui précède et constitue le complément de lieu. La conjonction de
v. 8 a-b éciv n yàp ( wµEv, n;> trup(c.i> (<JµEv, Mv rE Viv re coord ination ycip a naturellement vaJeur explicative. Quant au substan-
cino9vfloKwµEv, n\) Kup[41 &no0vi;loKoµEv. et mourir tif Xp tor6ç, il est uu nominatif masculin singulier e t j oue l a fo nction du
«Si. el, eDeffet, nous vivons, du Cbrist nous sujet des verbes &:nÉ9ixvEv et Ë(110Ev. Ces derniers sont des indicatifs
vivons, si. et, nous mourons, du Maître nous aoristes actifs de cbro9vi;ioKw / «mourir» et ( ciw / <<Vivre». TI s'agit d'une
mourons)) actio n de cou rte durée pour le verbe &:no9vijoKw / «mourir». Cependant.
! 'aoriste du verbe ( nw / «Vivre» dénote un devenir grad ue l. Ainsi, il esl
V. 8c EaV î f oov (Wµf11 È&.v TE Vivre rend u en français par l'express ion «revenir à la vie»ll1. La conjonction
&:no9vÎ]oKwµEv, WÛ KUPLOU roµfv . et mourir
«Si, et, donc. nous vivons, si, et. nous mourons.
du maître nou sommes» 80 Cf. A. B AIL LY, «Elc;». GDGF, 597.
*
RI Cf. M. ZFRWICK. Bihlical Greek. 250: BOF. «The lngressive Aorisl». § 331:
192 PARTIE Ll : LE SEJGNEUR EST PUI SANT CH. V: UNE LECTURE ATTENTIVE D E RM 14. 1-9 193

de coordination copulative KO:L relie les verbes cinÉ9o:vEv et Ë(T)OEV. Le verset se com pose de deux propositions. Dans la première, nous
Nous traduisons la proposition ELÇ roûto yàp XpLatè>ç cinÉ9o:vEv KO:L a~ons ! 'action ~u Christ qui est mort et reven u à la vie. La préposition
Ë( T)aEv par «en cec i. en effet, le Christ est mort et revenu à la vie». Hç marque le lien entre cette phrase et ce qui précède . .Elle indique Je
- '(va Kal vEKp(~v Ko:l ( wvrwv KUPLEUo'{l. La conjonction de subordi- lieu de l' action du Christ. Le pronom rnûrn / «ceci» renvoie à l'énoncé
nation '[va se con truil avec un su bjonctif et se traduit par «pour ql1e», précé~ent (cf. v. 8). Ce~e pr?pos ition a la force explicative qui est in-
«afin que». La con truction Ko:l. [...] KO:L, équi va lent â la forme te [ ... ] trodwt~ p~r ~a conJo~ctton yap I «en effet». L' Apôtre veut montrer que
KaC relie de mot plutôt que de propos ition . Elle s ignifie «tous les le Christ etrut mon a un moment donné et est revenu à la vie dans un
deux [ ... ] em82 . L 'adjectif ve.Kpwv et le participe présent actif (wvrwv Lieu bien déterminé.
sont décliné au génitif ma culin pluriePB. La forme verbale (wvrwv La deuxième phrase exprime la visée de l' action de mourir el de vi-
vient de (ciw. Son rôle dans la phrase e t celui d·un complément déter- vre du Christ. Elle est in t_roduite par la conjonction '[vcx / «afin que».
minatif du verbe KUpLE ÛOT). Celui-ci est au subjonctif aoriste, trois ième P~ul proclam~e que le Christ est mort et revenu à la vie pour quïl de-
personne du singulier de KupLEuw. L' aoriste de ce verbe a la même va- vienne le Mru tre et des morts et des vivants. En somme, lev. 9 présente
leur que celui de Ë( rJOEv de la phrase précédente. IJ est question d' un l'action du Christ et la fi nalité de cette action.
commencent d'un état. d ' un devenir84. Son sujet est incorporé dans le
verbe et renvoie au Chri st. Il est rendu en français par «être maître de», 9.3 l e lien structurel entre les ''"· 7-9
«avoir plein pou vo ir»~ «devenir maître de» RS. La phrase '[va Ko:l
vc:Kpwv Kat (w1r.:wv trupLEUOTJ est traduite par «afin que, de tous les Texte de vv. 8-9 Agent Finalité
deux : morts et vivant . il oit devenu Maître». de l'agir
9.2 Composition du v. 9 v. 7 o~l.ç yàp iiµwv Éaunj> (fi Ktti. oliôEl.ç Le croyant Non pas
éaui:~ cino0vnoKH' pour soi-
Texte du . 9 Fait «Aucun, en effet, de nous, pour soi- même
même.ne vit. et aucun ne meurt pour soi-
V. 9a Üç roû:o yèxp XpLCT!OÇ an~0CXVEll K<XL E(1')0€V, Vi vre même».
« En ceci. en cffct. Christ e t mo11 et revenu à la Et mourir
vie v. 8a èciv TE yà.p ( WµEv , îQ KUPtl.\> Le croyant Pour le
(wµw, f<iv TE cino0vTI<rKwµEv, •<;> KUPLl\> Maitre
V. 9b '(va K<Xl \lfKPWll Kai.
(W117WV Kl>PL<lion. Finalité de «Si, er, en effet. nous vivons. pour le
afin que. de tous les deux : morts et vivams. il soit vivre et Maître nous vivons, si. Cl, nous mou
devenu Maître» mourir rons, pour le Maitre nous mourons.»
v. 8b âno0111J01<oµEv. èciv rc: oùv (Wµfv èciv n
Ù'.lT00lftlOKWµEV, !OÜ KUptOU ÈoµÉv .
E. KOllL. Der Brie{. 451 : H. SCIILLER. Der Romcrhrief. 410; D.J. Moo. The Episrle. «si. el. donc, nous vivons. si. e l, nous
845 n. 88: A. PITTA. lerteru ai Romani. 468 R; Ji;WfTI. Romans. 849. mourons du Maître. nous sommes))
81 Cf. B AGD . <<KttL)). 495: BOF. <<KttL.Kal». § 444; J.H. MOUI TO - N . Tt RNL R.
A Grammar. 335. v. 9a Ei.ç roü:o yà.p Xptatot; ànÉ0m1t=11 Kal Le Christ Les
3 A notre avis. nous voyons dans l'adjectif l'CKp<iil' et dans le part icipe ~w1r.w11 un
È(T)OEV, Croyants
adjectif et participe sub tantivé. sans anicle. L"absence de l'article ne se j uslilie-1-dle «En ceci. en effet, Christ est mort et
pasJar le rôle qu'ils nssument dans la phrase ?
Cf. D.J. Moo. Tite Epistle. 845 n. 89. Nous outenons quïl s'agit d·un aoriste revenu à la vie.»
qui exprime un de' enir. un commencement d'un é tal. du fait que le Christ a (ré)- v. 9b "Lva Kcxl. vt:Kpwv Kal (wvrwv KuptEOOu.
acqu.is cette seigneurie apr~ sa mort et .bien évidemment avec a ré) urrcc1ion. Voir «afin que, et de Lou · les deux : morts et
aussi M.-J. LAGRAl\ûl:.. Ep11re t11Lr Roma111s. 327. vivants. il soit devenu MaîLre»
R.5 Cf. A. B AILL y. tOCUplCIÎW». GDGF. 11 54 .
194 PARTIE U : LE SEIG EUR EST PUI SA T CH. V UNE LFCTUREAITENTIVE DE RM 14.1 -9 195

La strucrure de vv. 7-9 permet de percevoir leur unité de sen . veut dire quïl est Maître de tous ceux qui pas enl et pas ero nt de la
Celle-ci se manife te à travers les termes identiques et synonymes qui mort à la vie.
le compo ent. Les verbes à:no0vl;loKw I «mourin> el (ciw / «vivre» ont En dé finit if, nous di sons que le v. 8 contient une affirmation du
exactement le mêmes caractéris tiques dans les deux versets. Par contre pré ent hi storique. tand is que le v. 9 celle eschato logique. Pour ce la.
les titres KupLoç / «Maître» au v. 8 et 'ptotoç I «Christ» au v. 9a ont le passage de 2Co 13,4 peut ervi r de preuve à notre hypo lhèse, car
des terme synonymes. Ceci nous conduit à croire que le Maître dont il !"Apôtre affirme q ue le Chri l a été cruci fi é (et mort) dans la fai-
est question et pour qui les chrétiens agissent est bel et bien le C hrist. blesse mai s vit à cause de la puissance de D ieu. De même. les c hré-
Ainsi. nou~ avons ici l" élémenl de répon e à la question po ée ci-dessus tie ns. qui sont fa ibles dans le ChrisL vivront avec lui à eau e de la
concernant l'identité du Maître. Un autre élément qui confirme ce lien pu issance de Dieu.
ynonymique se trouve au v. 9b. Il s'agi t du c rbe KUPLEUw I «devenir Nous déduisons de ccnc analyse effectuée de vv. 7-9 deux versants de
Maître». Il y a également les express ions d u même c hamp émantique, la ré flexion de Paul. Il s'agit précisément de !"aspect ecclésiologique et
à savoir le substantif KupLoç / «Maître)> (v. 8) et le verbe KUp LEUW I christologique. Le prem ier est mi s en exergue à travers le lien
«devenir Maître» (cf. v. 9b). d'apparte nance des chrétiens à leur Maître, le christ. Le second aspect se
Du point de ue é mantique, la cohé rence de ces versets est bien ma- tro uve dans 1'agir du C hrist. Ce dernier est mort et revenu à la vie pour
nifeste. Aux vv. 7-8, il y ~ d 'abord, la déclaration de Paul re lati ve à être le Maître des chrétien morts et des chrétiens vivants.
l'action du chrétien (v. 7) et ensuite a relation et a visée ( . 8). Au-
trement d it, !'Apôtre énonce le postulat de on raisonnement en affir- 9.4 l e lien structurel de la péricope
mant que le chrétien ne fait rien pour lui-même (v. 7). Il continue son A
argumentation en montrant que l' agir du chrétien doit être en accord
avec son Maître, le Chri t et pour son honneur à lui. Ce qui justifie ce ' . 1 Tôv cSÈ: cio0fvoûv:o: tjl TTL<r.H npoo)JxµpâVEo0f, µ~ ci.; OLW<pioHc;
componement est son appartenance au Maitre (v.8). Quant au v. 9, OUXÀOyLCJµWV.
f Apôtrc parle de !'agir du C hrist et de sa finalité. Paul e l en train de
démontrer q ue, dans ce lieu qui est Je lien d 'appartenance des chrétiens
au Chri t, se sont réali é sa mort et o n retour à la vie. Si donc Il est ·----- ---------
mon el revenu à la vie. c'est pour devenir le Maitre et des morts et de . 3 o foetwv •Ôv µ~ to9i.ovTa µ~ Ë.Ço~LTW, b Oè µ~ (o0L(!JV -:011
roetovro: µ~ kpwÉ'tta>, ô 0fè>ç yètp o:ùrô11 npoocMpc-:o.
vivants.
Par afüeurs. il y a une différence significative dans la façon dont Paul B
a employé les verbe à:noGv'UOKw I « mourirn et (aw I «vivre» aux vv. 8-
9. Le verbe (ciw I «vivre» au v. 8 est en première pos ition par rapport V. 4 où ri.:; EL ô icp(~ liJJ..6:plOV 0Ucf7T)V: rw loi.~ i(Upaj OTÎ)KH Ti
au verbe à:no9vnaKw I «mouri r». En revanche, cet o rdre change au v. 9, rri. tr.H ·ora6Î)of:1u ôi, ôuva-:<l yà.p 6KûpLoç; cr.f)oa:L o:ÙTov.
il y a d'abord le verbe èrno0v'UoKw / « mourir» et ( ciw I «vivre». Nous A'
estimons que cet emplacement a été voulu par !'Apôtre pour exprimer
deux réalités di verses. Il indique par là une réa lité d'ordre hi torique et V. 5 "Oç µ(!v [yàp] Kpti..u ~µfpo:v mxp '~µfp1X11, Oç ÔÈ:- icp(VEL TTIXOC(V
~µépa:w Ë1<:cxo•oç iv 1<.j) tôlcv vot n).TJp<><Popeio0w.
celle eschatologique. Aux vv. 7-8. le message s"adresse aux membres
de la communauté qui font partie de l' histoire et sont voués à la mort. ----------·---------------------------·- --------------
v. 6 6 <j>povwv ri]11 ~µÉpo:v ~upl.~ <j>povEi·Kai. 6 fo0(wv ~-~
Ils doi ent encore passer de la vie à la mort et de la mon à une vie e - èoetu, fÙ;(IXpLoTct yèxp :c;i et.c;i· Kai. é µÎ] fo0i.wv ~ùPI(TOÜK èo0lH
chatologique. Par contre, au v. 9, il est que tion de la mort du Christ KO'.L CÛXIXPL<J:cl :<.j) 0t:t;>.
comme pa sage à la vie. En effet. par son incarnation, le Chri t est déjà
pa sé de la vie à la mort. et déjà re enu à la vie. celle que tout chrét ien s·
espère avoir (cf. 2Co 13,4). L'expression revcnfr à la vie uggèrc qu'il v. 7 otJôEL; yàp iiµwv faur~ (fl Ka:i. oûOEi.c; Ëaurc;> cino0V'l)oKH·
re-vit, c·est-â-dirc il a vécu à un moment déterminé. Il est donc Maître
non pa de vi anls et des morts mai de morts el des vi ant . Ceci
---------------------------------------
196 PA RTlE Il : LE SEIGNEUR E T PUI ANT ('Il. V · UNE LECTURE AITENTJVE DE RM 14.1-9
197

To~t bien. co~sidér?, 1',analy~e faite de la péricope Rm 14, 1-9 nou a


pe~ de .dcdu1re Lro1s d11nens1ons dans la prédication de Paul. Il s'agit
des rcflex1on par rappon â la théologie, christologie et ecclésiologie.
- -------------------------------- La teneur théologique se dégage de l'accuei l que Dieu offre à tau le
( (A>l''tWI'
1
v. 9 c~ç :oûro yO:p X~Loràç àrrÉElavw Kat ((TJO~V. '(va Kat l't-Kpwv Kai.
Up LC UO IJ. croyants et de 1'~et ion de ~âce qui lui e t rendu. La pensée christologi-
que .se tro~vc n deux n~veaux. En premier lieu. il est question de
La composition de 1'ensemble des vv. 1-9 permet de reprendre les 1 ac~1on pu1~sa1.n c du Chnsl. Seigneur qui soul eve son serviteur en si-
points principaux de l'exégèse fa ite. Elle présente une structure para l- ?e
tua11on .d ~ fa1llanc~. Dans la seconde étape, aolre réflexion se portera
lèle de quatre parties: ABA ·s·. Son unité est justifiée par la récurrence sur la realite du Chnst mon et revenu à la vie pour devenir le Maître
du mot KupLOç à travers tous les neuf versets. En effet, cc terme se trou- de morts et des vivants.
ve neuf fois dans toute la péricope. Il y a huit substantifs et un verbe. . Q~ant. à l'a. pcct ecclésiologiquc du raisonnement de l'apôtre des
De ces huit, sept se trouvent au datif avec valeur de relalion et d'a- Gentils, t1 y tl ég<ilcment deux manières de l'entendre. Prcmjèrcmenl ce
va ntage et un seul au génitif (cf. v. 8e). C'est cc dcmicr qui constitue la contenu cccl6siologique se trouve dans l' in vitation adressée aux d~ux
clé de lecture des autres substantifs con tru it au datif. Ceci est du fait composantes de .ta communauté.: les faib les et les fo rts, à s'accepter
qu 'il exprime la rai on de tout agir du chrétien. S'il vit pour le Christ et m_utucllemen t: d autant plus qu ' ils ont été tous accueillis par Dieu le
meurt pour lui, c'est justement à cause de on appartenance au Christ Pcre et appartiennent tous au Christ. Deuxièmement cette dimension se
son Maître. rév~le dan la mani~re dont Pau l remplit sa fonc tidn de pasteur. li ac-
En guise de conclusion. l'étude détaillée de l'ex trait Rm 14, 1-9 per- cue11le toutes .le. divergences au sujeL du componement de chaq ue
met de répondre aux interrogations que nous nous somme po ées ci- membre, et on~nte chacun vers ! ~essentiel de l'être chrétien. JI s'agit
dessus, notamment sur l' identité de 0foç I Dieu. Ce terme renvoie au donc de la certitude de se condutre en lien avec le Maître et en son
Père, car on emploi par Paul fait allusion au Père dan la plupart des honneur. Ces aspects de la pensée de Paul feront l'objet du ch. VI, le-
cast16 . Nous avon dan toute la péricopc 1'acùon de Dieu, le Père et quel se cra con acré à une rénexion théologique de Rm 14, 1-9.
celle du Christ, le Fil . D' une part. Dieu le Père accueille tous les
croyants de la communauté (v. 3) et reçoit l'action de grâce ou la re-
connaissance de la part d'eux. D'autre part, le Christ, le Fils qui e t
mort et revenu à la vie pour devenir Maître de tous le croyants morts
et vivants. C'e t Lui qui est puissant pour soulever on serviteur lors-
qu 'il tombe. Il s'agit de l'entrelacement de actions du Dieu le Père et
celle du Fils.
Un regard attentif sur Je contenu de cc verset nou. permet de perce-
vo ir comment l'argument des parties A et A' concerne les deux factions
présentes dans la communauté. Dans la troi sième et ln quatrième partie
(8-B'), il s'agit des affi rmations générales: en cc sens qu 'elles concer-
nenl tout le monde. L'Apôtre s'adresse non pas à un groupe spécifique
ma is à toute la communautéR7•

116 Nous renvoyons :\ cc que nous avons dit à la note 58 de cc chupitrc.


117 Dans la quatrième partie. il y a une sorte de progression dans l'argumentation de
!'Apôtre. li est pani de la situation concrète qui prédomfoa it dans la communauté de
Rome cmrc les faibles cl les forts. JI conclut son argumeota11on par un discours adres-
sé :\ IOU'l les croyants. y compri lui-même.
CHAPITRE VI

Réflexion théologiq ue sur Rm 14, 1-4

L'écrit de l'apôtre Paul aux Romains repré ente l'un ique lettre qu'i l
a envoyée à une communauté chrétienne qui n'a pas été fondée par lui.
Toutefois, cette épitre a eu, au co u ~ de l'histoire. un impact considéra-
ble sur la vie de chrétiens ou de l'Eglise. Ce fait c justHie san doute
par la va leur de on contenu . En effet. la lettre aux Romains constitue
non seulement un de écrits les plus significatifs de Paul, mais aussi de
tout l'Évangi le chrétien 1• Son influence sur le éminents théologiens est
un fait bien connu. Nous pouvon . entre autres grands pen eurs chré-
tiens. citer Origène. Augustin, Luther, Barth.
L 'en eignement de la lettre c regroupe en deux catégories : l'une
d'ordre doctrinal et l' autre d 'ordre exhortatif. L 'Apôtre y aborde une
riche et importante gamme thématique. Cette dernière recouvre la va-
leur de la lo i mosaïque dans la problématique du sa lut en rappon avec
la foi en Jésus-Christ, le rô le hi torique d' lsraël, la question de l'ap-
partenance à la communauté des élus destiné a priori au salut et le
problème de la j ustification avec ou sans œ uvre . A travers ce thème ,
I' Apôtre visait principalement à ram ener à l'unité de tous les membres
croyants de la communauté de Ro me.
Notons toutefois que d'autres arg uments impon ants y sont dévelop-
pés et o nt pcnni s à l'apôtre des nations de rendre encore plus influent
on écrit ur le destinataires. Il s'agit particulièrement des thématiques
telles que l'appartenance au C hrist, la Seigneurie du Christ et l'attitude
de Dieu envers tou les croyants. Nous nous sommes aperçus de la pré-

1 Cf. J.0 .G. Dl.i l\ . Romans 1- 9. 1. \Îii: P. STillJLMACHER. «The Purpose of Ro-
mans». 231 : B. 8YRNf. Romans. xi: J.-'J ALETTI. «Romans>>. 1555.
200 PARTIE Il : LE SElGNEU R EST PUl SSANT CH Vl : RÉFLEXION Ti fÉOLOG JQUE DE RM 14,1- 20 1

sence de tous ces aspects du contenu de l'écrit, lors de la lecture atten- dans l'avenir. Dans les lettres de Paul, en particulier, malgré l'emploi
tive et de l'approche exégétique de l'extrait Rm 14, 1-9. Dans cette sec- moins fréquent du mot Règne de Dieu, !'Apôtre en parle de deux manières.
tion de la thèse, notre travail se propose de livrer une réflexion théolo- D'une part, il fait comprendre que la réalité du Règne de Dieu est dé-
gique sur les trois derniers thèmes évoqués ci-dessus. li est précisément jà présente et peut être expér1mentée par les croyants. Il s'agit ici d' une
question des dimensions ecclés iologique, christologique et théologique. eschatologie présente, comme révélation de Dieu aux hommes, à la-
quelle ces derniers doivent répondre. Nous rencontrons cette acception
1. La dimension ecclésiologique du Règne de Dieu dans deux passages des lettres proto-pauLini ennes:
Rm 14, 17 et 1Co 4.20. En Rm 14, J7 notamment Pau1 fait observer que
Ce point du chapitre portera sur une réflex ion au sujet de l'Église, en I.e Règne de Dieu, en tant que réalité présente dans le monde, en l'oc-
tant que communauté des croyants qui se réclame du Christ. Notre pen- currence, dans la commw1auté de Rome, ne se rédui t pas à l'aspect ali-
sée va s'articuler sur deux axes. Nous nous intéresserons d'abord à l'at- menta ire. 11 est bien plus que cela. Le Règne de Dieu est réelle.ment
titude flexible et ouverte d' un responsable de communauté comme fac- ~ i s ible dans la mesure où les croyants vivent dans la pratique de la jus-
teur déterminant pour la stabilité de la vie communautaire. Nous déve- tice. de la paix et de la joie dans !' Esprit Saint. Donc, aux prises avec la
lopperons ensuite l'exigence d'accueil comme témoignage du sens situation de di vision au sujet de la nourriture, les chrétiens de la com-
d' appartenance au Chri.st. munauté de Rome sont invités à aller à l'essentiel du Règne de Dieu qui
Avant de réfléchir à cet aspect, nous voulons répondre à la curiosité est déjà pann i eux. Ils dojvent s'efforcer de témoigner, dans la vie de
du lecteur sur le sens paulinien des expressions «Règne de Dieu» et chaque jour, de la justice, c'est-à-dire, de ce qui est eftèctivement con-
«Règne du Christ». Ceci nous paraît opportun, du fait qu ' il exi ste une fonne à la conduite chrétienne des membres de la famille de Dieu. Ils
relation évidente entre ces express ions et la réalité ecclésiale en tant doivent vivre dans la paix, c'est-à-dire dans la concorde, en évitant tout
que lieu de la manifestation du Règne de Dieu-Règne et du Christ. Leur ce qui peut entrainer des conflits entre eux. Ainsi, la joie poutTa régner
compréhension de ces expressions nous aidera à cerner davantage le au sein de la communauté.
message ecclésiologique de notre réflex ion. . D'autre part, l' Apôtre parle du Royaume de Dieu dans une perspec-
tive future. fi est donc question d' une eschatologie fu ture, en tant que
1.1 Usc1ge paulinien du terme {Jctatü{a / «règne» manifes tation pleine et définitive de Dieu, réalisation parfaite de son
Le mot P<i:oLÀEtcx emp loyé dans les expressions PcxoLÀELO: r oû 9EOû / projet pour l'homme. Paul veut dire par là que les cl1réti ens vivent dans
«Règne de Dieu» et paot).E(cx îOÛ Xp to-roû / «Règne du Ch.rist» est l'espérance d' une réa lité de Dieu qui doit venir, vécue selon son des-
moins fréquent dans le corpus paulinien2 . Ces locutions représentent sein. Par conséquent, ils doivent se comp0tter de manière digne d'en-
pourtant une des idées fondamentales dans la perspective eschatologi- fants de Dieu, qui les appelle à son Royaume et à sa gloire (cf. l Th
que de Paul et sous-tendent toute sa pensée3. 2, 12). En effet, Paul annonce que les croyants hériteront le Royaume de
Au sujet du Règne de Dieu. les spécialistes sont parvenus à un con- Dieu, mais à condition qu ' ils témoignent d' une vie chrétienne digne
sensus général, selon lequel le message principal de Jésus était d'an- (cf. l Co 6.9- 10; Ga5.21: etc.).
noncer la présence de ce Règne pam1i les hommes. Cette présence s'était En cc qui concerne le Règne du Christ. il s'agit bien d'une réalité
naturellement manifestée à travers sa propre vie et son ministère jusqu 'à présente parmi les chréti ens mais qui aura une fin. li a commencé avec
sa résurrection des morts. Cependant, ce Règne de Dieu présent au mi- l' incarnation ou l'avenue du Messie dans l' histoire. JI prendra ·fin à l'ar-
lieu des hommes est dans J'attente de la pleine réalisation, quj aura Lieu rivée du Règne de Dieu, lorsque le Christ au moment de sa parousie
remettra son Règne à Dieu le Père, dans le futur ( 1Co 15,24). Autre-
2 Cf. L.J. KR EITZER, «Ki ngdom of God/Christ», DPL. 524. Nous signalons routc- ment dit, la réal ité eschatologique - en tant que révélation de Dieu par
fo is que le tem1e paoLÂela / <<rëgne» ne se trouve pas dans la péricopc analysée Rm Jésus-Christ, et en tant que la réponse de l' homme à cette révélation -
J4, 1-9. Cependant, nous l ' utiliseroos lorsque nous allons aborder. dans cette dimen- a déjà commencé avec la venue du Christ. Par conséquent, selon la vo-
sion ecclésiologique, le point 1.2.2 b) l'accueil mutuel. lonté de Dieu, les chrétiens, aussi bien vivants que morts, se trouvent
3 Cf. L.J. K REITZER, «Kingdom of God/Chrisb>, DPL, 524.526.
202 PARTLE U: LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH VI : RÉFLEXlON THÉOLOG IQUE DE RM 14, 1- 203

dans le Règne du Christ Car c'est Dieu qui les a arrach~s at! pou.vo~r seule chose : ramener tous les membres de la communauté à la com-
des ténèbres et les a transférés dans le Royawne de son Fils b1en-a1Ille. mun ion fraternelle.
Ainsi , ils ont obtenu leur rédemption , la rémission de leurs péchés par De fait, il convient de rappeler qu ' il régnait parmi l.e s croyants de
l'entremise du Fils de Dieu (cf. Col 1,13-14). Rome une divergence d ' opinions concernant certaines attitudes à ob-
Par ailleurs, dans la première lettre aux Corinthiens, Paul précise server, notamment sur le comportement alimentaire. Cette absence
bien le moment fina l du Règne du Christ. li fait savoir que cette fin, qui d'harmonie a malheureusement conduit à une division entre les mem-
est ta restitution de son Règne à Dieu le Père interviendra lorsque le bres. D'une part. il y avait le groupe de ceux qui s'abstenaient de la
Chri st aura détruit toute principauté, domination et puissance (cf. 1Co viande pour certains jours, et ne mangeaient que des légumes. Ce
15,24). Il s' agit donc de la fin de l' histoire marquée par la conquête ob- groupe représentaü les croyants faibles dans la foi , pour lesquels !' A-
tenue à travers l' anéantissement des pui ssances négatives s ur le monde pôtre avait exhorté Les autres membres de la communauté à les accueil-
(cf. lCo 15,25-26). Ceci nous emmène à déduire que la manifestation lir sans cootestations (cf. v. 1). D 'autre part, il y existait des membres
ple ine de la ptdssance ou la Seigneurie du Christ adviendra par la ré- qui ne se faisaient aucun scrupule au sujet des aliments, et estimaient
duction à l' impuissance des pouvoirs négatifs sur l'univers. Ce n 'est que l'on pouvait tout manger à n ' importe que l jour de la semaine. Ces
qu 'après cette domination sur toutes les fo rces du mal , qu ' il remettra membres constituaient la faction de ceux qui sont appelés les «forts», et
son Règne au Père et se soumettra lui-même à son Père (cf. 1Co 15,27- qui devaient reconnaître les faibles dans la foi comme membres à part
28). A travers ce texte, nous apercevons le rapport qui existe entre Les entière de la communauté.
deux types de Règne, ou le passage du Règne du C~uis~ au R~gne de De son côté, prenant acte de la situation et sachant que les deux
Dieu. li s'agit pour ainsi dire d'un rapport de subordmat1on, tmeux en- groupes, tant les forts que les faibles! se rejetaient mutueUement, Paul a
core d'un rapport dialogique, voire dialectique du «déjà et du pas en- interdit tout jugement entre eux et les a ori entés vers !.'essentiel de la foi
core»4. Et son Règne n'aura pas de fin. en Chri st. Cet essentiel se s itue dans la ple ine conviction que l'agir de
Nous pouvons affirmer que la compréhension paulinien~e des lo?u- chacun doit être en synto uie avec le Chris t, son Seigneur et en vue de
tions Règne de Dieu et Règne du Christ permet de percevoir la tension l' honorer. De cette man ière, l'apôtre des Gentils voulait les inviter à
entre l' eschatolog ie présente et future. L'eschatolog ie présente est celle rendre grâce à Dieu. Nous osons croire que cette atti tude de !'Apôtre a
qui prépare le croyant à l'eschato logie future, c'est-à-dire, à la ré~é_la­ sans auctm doute contribué à l'éd ification de chaque membre et à la
tion pleine de Dieu et à la réalisation du salut de ! 'homme. Le chretlen communion fraternelle au sein de la communauté de Rome.
vit, de fai t, dans le présent de manière à correspondre à l' appe l de Dieu, En lien avec le passage de Rm 14, 1-9, nous pouvons, en particu lier,
manifesté en Jésus-Christ en vue de la révélation parfaite de Dieu et de évoquer la lettre à Philémon pour illustrer davantage l'attitude souple et
son salu t. Après avoi r succinctement présenté le sens paulinien des ouverte de Paul comme responsable e,t pasteur. En effet, dans cet écrit,
expressions PctotÀElct 1où . 0Eoû / «Règne de ~ieu» et Pctot~EL~ wû Paul, vieux et prisonnier à cause de l' Evangile, résout le probl.èrne entre
Xpwwû / «R ègne du Chnst», nous pouvons developper les differents Onésime, l' esclave et Philémon . .le maître. Ceux-ci doivent vivre non
ang les de la dimension ecclésiologique, qui ne manque pas de Lien avec plus comme esclave et maître mais plutôt comme frères bien-aimés au
la notion de Règne de Dieu ec de Règne du Christ. service d ' un seul Maître, le Chri st. Notons toutefois qu' il s'agit préci-
sément d'une situation difficile voire délicate : celle d'un esclave fugi -
1.2 l 'attitudejlexible el ouverte d 'un responsable tif. La dj fficulté, à cette époque, se situait au niveau des conséquences
qu'un tel cas comportai t. L' esclave en fuite, une fois découvert, était
La lecture attentive de la péri cope Rm 14, 1-9 nous a conduite à dé-
remis à son maître. Celui-ci pouvait lui demander, so it de retourner à
duire l'attitude exemplaire d ' un responsable de communauté. En effet,
son état précédent, c'est-à-dire, continuer à être esclave, so it lui impo-
l'apôtre des Genti ls, à travers sa lettre aux chrétiens de Rome. s' est
ser des pe ines très sévères, telle que la pûne capitale5.
montré un pasteur fl exible et ouvert, mais pas complaisant. Il visait une
5 Cf. A. SACCl ll, «La lettcra a Filcmooc», 151.
4 Cf. G. B ARBAGLIO, la prima lertera ai Corinzi, 826-831.
204 PARTIE n : LE SEIGNEUR E ST PUISSANT CH VI : RÉFLEXION THÉOLOGIQ UE DE RM 14.1 - 205

De fait, Onés ime avait fui son maître Philémon et savait le consé- son compte les fautes et les dettes d ' Onésime (cf. vv 18-19). Il participe,
quences qui l'attendaient. li savait probablement que la protection en tant que p_asteur, à l' acte de réconciliarioo entre deux chrériens, qui,
d ' une personne influente pourra it la i épargner de graves sanctions. Tl tou deux, lut sont chers, nonobstant l'état de chacun .
était sans doute au courant de la re lation qui liai t son maitre Philémon à Dans cette dé marc he de l' Apôtre, ea plus de l'acte de comportement
Pau l. La connaissance de tous ces éléments l' a vrai emblablement exemplaire quïl donne comme responsable. nous pouvons éga lement
conduit à chercher refuge auprès de Paul (v. 1 1). Pour sa part. Paul , note r le sacri(ice qu ' il accepte d 'endurer en vue de faci li ter la réconci-
in formé de la situation. entreprend de la résoudre au nom de la foi en liation et l' is u pos itif de sa requête. Nous comprenons par là que l'a-
Christ el aussi de l'amitié entre lui et Pliilémon6. mour, en particulier envers les fa ibles. comporte de sacrifices non né-
La réso lu tion du problème passe par u ne décision de la part de Paul : gligeables de la part de ce lui qui le pratique. Car cet acte engage
re nvoyer l'esclave Onésime auprès de son maitre Philémon avec une personne lle ment celu i qu i l'exerce et lw coûte que lque chose. C'est
lettre de recommandation. Pour ce faire, !' Apôtre reconnaît et loue d' a- j ustement ce qu ' a fa it Paul en consentant à payer les dettes du coupa-
bord les qualités chrétiennes de Philémon. li exalte sa charité et sa foi à ble. ~prè~ avoi r amorcé le début de la réconciliation, l' Apôtre espère
travers lesque lles son ami agit tant pour le Seigneur Jésu qu 'au béné- obtenir ga111 de cause a uprès de son ami Ph ilémon au pro fit d'Onésime.
fice de tous les ch rétiens. Dans une deuxième étape. Pau l présente sa En nous référant à la péricope Rm 14, 1-9, nous pouvons utiliser,
requête en fa veur de l'esclave Onésime, son fils qu ' il a engendré dans pour la situation confli ctuelle de la lettre à Ph ilémon, les tennes qui ont
les c haînes. Il pre nd soin de préparer Philémon à accueilli r sa soll ic ita- ca ractéri sé les d ifférentes factions de la communauté de Rome, à savo ir
tion en fa isant une description pos itive d'Onésime. Aussi affirme-t-il à le fa ible et le fort. En effet. dans la lettre à Philémon, il y a éga lement
Phi lémon qu ' Onésjme. qu i autrefois ne lui fut guère utile. lui sera bien deux catégorie de personnes, et nous pouvons, en quelque sorte, appe-
uti le à présent comme il l' est devenu pour lu i, Paul (cf. v. 11 ). ler Phi lémon. le fort et Onésime, le faible7. Comme dans la s ituation de
Par a illeurs. I' Apôtre lui fai t avoir que. dans sa situation de oéce si- Rome, Pau l ne prend parti pour personne. LI les aime tous le deux tels
ceux comme prisonnier, il a le désir de vouloir reteni r Onésime pour lui, qu ' il sont. li reconnaît, d' une part. les qua lités chrétienne du maître,
mais il n' a pas voulu le fa ire sans le consentement de Philémon. Ainsi, et d 'autre part. le passé de l'esclave Onésime. Tout en déplorant l'er-
il pré fè re le renvoyer chez lui, son maître. Ce fa isant. Pau l fai t preuve re ur de cc dernier d 'avoir fui son maître, il exa lte son état actuel comme
non pas d'autorité comme responsab le. mai de fi nes e dans la façon de c royant. Il demande aux deux protagon istes de faire un pas de plus dans
présenter sa requête. Car il a respecté la li berté de son ami Philémon. la fo i. A Philémon. il demande d 'accueilli r Onésime non plus comme
Notons au si un fai t important du comportement de Paul comme pas- c clave ma i com me frère très cher. car il est devenu très urile. A Oné-
teur. li n 'occulte pas la gravité de l'acte d ' Onésime par rapport à Phi- sime, il lui demande de retourner c hez son patron. 11 s'agit là une faço n
lémon; mais il fait comprendre à ce dernier que la fuite de son esc lave intelligente d' inviter chacun à l'accueil mutuel. en tant que membres de
Onésime était en que lque sorte un mal nécessa ire, en ce sens q u'i l lui a la grande fami lle de Dieu en Jésus-Christ. Tel fut le cas dans la com-
été retiré pour un temps afin qu ' il lu i soit rendu pour l'étern ité (cf. munauté de Rome.
v. 15). Toutefois, il lui est rendu non plus comme un esclave mai s com- En e ffet, l'attitude de l' apôtre des Genti ls nous amène à aftinner
me un frè re très cher en C hrist (cf. v. l 6a). qu ' un responsable esl bien celui qui redonne con(iance à chaque indi-
Après la présentation de l' état actuel d'Onés ime. Pau l fa it appel a ux
liens am icaux qui existent enlre lui e t Philémon. Au nom de cette re la- 7 Signalon q ue dans le cas de la lettre à Philémon, il ne s·agit pas néanmoins
tion, il invite Philémon à accueillir son ex-esc lave comme s' il accueil- d' une fa iblesse et d'une force dans la foi, mais d' une faiblesse et d 'une fo rce en lie n
lait Paul lui-même (cf. v. 17). Outre la faveur qu'i l lui demande pour avec la vie !>Ociale. Le maitre Philémon se trouvait dans la catégorie de fort. et l'es-
son fil s pirirue l, Paul s'engage lui-mê me en per onne à assumer sur c lave _q nésim7 rcpré en1_a!t les fa ibles de la socié té. C'est à juste titre q ue l'apôtre
Paul fan savoir aux c hreuens de Galates que tous les bapti és sont devenus lils de
Dieu par la foi e n Christ. Par con équenL iJ ne doit pl us exister de divisions ethnique,
6 Celui-ci était le collabomteur de I" Apôtre (v. 1). et probablement de\ enu chrétien ociale e t exuellc panni eux. car ils ne font qu'un dans le Christ-Jésus (cf. Ga 3.26-
à travers l"œuvre de Paul (' . 19). Cf A. SA<Tl Il, «La lcllcra a Filcmonc». 152. 29).
206 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH VI : RÉFLEXJON THÊOLOGIQUE DE RM 14, 1- 207

vidu au sein d' une église, particulièrement celui en situation difficile, Cet exemple éd ifi ant par rapport à la fonction d' un responsable de
de sorte que personne ne se sente victime. et que chacun se voit consi- communauté doit aider tous ceux qui assument de telles charges dans
déré et reconnu dans ce qu ' il fait dans la communauté pour son Maître, nos communautés chrétiennes, afin de rendre visible le Royaume de
le Christ. L'attitude d' un bon responsable doit aider à combattre les Dieu parmi les hommes de notre temps. Car les critiques, les médisan-
di visions internes à la communauté afin de promouvoir l' unité et la ces mutuelles surtout à l'égard des membres faib les y seront élim inées.
concorde. Tel a été le cheval de bataille de l'écrit de Pau l aux Romains, En revanche, il y règnera un grand sens d ' accueil. de compassion et
et à tant d'autres communautés fondées par lui. d'aide. En guise de conclusion, nous affirmons que la façon d'agir de
Ce bel exemple de Paul mérite d'être suivi par tous ceux qui assu- Paul comme responsable n'est rien d'autre que l' imitation de l'attitude
ment , la charge de responsable au sein des communautés chrétiennes et du Christ, son Seigneur et son Modèle.
de l'Eglise en généra l. Pau l constitue en effet une figure modèle qui se
met à la suite de l' agir de Jésus. Nous illustrons cet agir de Jésus à tra- 1.3 l'exigence d 'accueil comme témoignage du sens d'appartenance
vers, notamment un épisode tiré des évang iles de saint Luc. au Christ
Dans l'évangi le selon saint Luc, nous apprenons la visite de Jésus 1.3. 1 Le sens d'appartenance au Christ
chez un pharisien : Simon, et l' intrusion de la fem me pécheresse (cf. Le
7,37-50). Luc raconte que Jésu s, invité à table chez Simon, se retrouva Le message de Pau l dans les vv. 1-5 de Ja péricope examinée nous
soudain êLre touché à ses pieds par une femme. Celle-ci, tout en pleurs, conduit à nous interroger sur le sens de l'accueil mutue l dans une com-
arrosait les pieds de Jésus de ses larmes et les essuyai t avec ses cheveux. munauté chrétienne. L' accueil mutuel dont il est question dans ce pas-
Elle n'arrêtait pas de couvrir de baisers les pieds de Jésus et de Jes oin- sage a été objet de l'interpellation de l' Apôtre à l'égard des croyants de
dre de parfum. Alors que Jésus accepte bien la manifestation d'affec- Rome. Il a été motivé par la situation de division qui préva lait parmi les
tion de la femme pécheresse, son hôte, le pharisien Simon en est scan- membres de la communauté romaine. Cette fracture interne a fait uite
dalisé. Celui-ci, indigné. remet en cause l' identité de Jésus, car, pour à des tensions créées par Ja tendance à se juger les uns les autres, et par
Simon, si Jésus était prophète, il devrait bien se rendre compte du statut le refus de s'accepter mutuellement. A la base de cet état d'esprit, il y a
social de la femme qui le touchait la divergence comportementa le autour des aJiments en rapport avec leur
Devant la perplex ité de Simon sur l' identité de son invité et le juge- foi en Christ. li y avait ceux qui ne mangeaient que des légume à des
ment à l'égard de la fem me, Jésus interpelle Simon et va lui infliger jours biens précis, et ceux, par contre, qui mangeaient tout sans li mita-
une leçon de chari té et de miséricorde. A travers une parabole, il lui fai t tion des jours. Cette divergence a provoqué au sein de la communauté
comprendre qu 'aussi bien la femme que lu i, le pharisien, ils sont tous une fracture interne et une situation de refus réciproque qui a amené
deux débiteurs d'lln créancier, à savoir Dieu en la personne de Jésus- l' Apôtre à les exhorter à s'accueillir les uns les autres.
Chri st. Jésus lui explique que tous les deux. de façon d ifférente, l'ont En effet, 1' in vitation à ! 'acceptation réciproque adressée aux croyants
aimé. En effet, Simon l'a invité à manger chez lui . La femme, de son en Chri st révèle le problème des rapports entre les composantes d' une
côté, n'a cessé de couvrir les pieds de Jésus de baisers et de les oindre communauté. Cependant ce problème des rapports ne concerne pas seu-
de parfum. Cependant Jésus n' hésite pas à fa ire voir à Simon que la lement les chrétiens de Rome. li a toujours caractéri sé, vo ire miné l'cs-
fem me dite pécheresse a fa it preuve de bea ucoup plus d'amour que ne prir de fraternité et de communi on dans les communautés chrétiennes
l'a fa it lui, le phari sien. de tous lieux el de tous temps. Cette difficulté relationnelle se pose à
Cette attitude de Jésus enseigne que l'accuei l mutuel doit ex ister en- partir du moment où les membres de la communauté s'éloignent de la
tre les hommes, notamment les croyant , indépendamment de la si tua- raison fondamenta le qui les unit en communauté et oublient qu ' il s sont
tion sociale de chacun. C'est seulement de cette manière qu'w1 respon- membres d' un seul corps, l'Église de Dieu. Le fa it quï ls so ient au
sable, à la suite de Jésus, peut empêcher la naissance de divisions et Chri st signifie q ue Dieu, par la personne de Jésus-Christ, les a tous ac-
controverses au sei n de la communauté. d'autant plus quï l met chacu n cuei lli s et qu ' il s forme nt une même famille d'enfants de Dieu (cf. Ga
face à sa réalité intime et profonde. 3,26; 4,4-6).
208 PARTIE U : LE SElGNEUR EST PUISSANT CH Vl : RÉFLEXION THÉOLOGIQUE DE RM 14.1- 209

La question se pose de savoir quand et comment ceux qui croient en les recevoir comme membres â part entière au milieu d'eux. Cependant,
Christ appartiennent réellement au Christ et deviennent effectivement ils ~oiven l le faire sans aucune contestation (cf. Rm 14.1 ).
fils de Dieu. Les chrétiens sont véritablement du Christ et par consé- Etant donné que, par le baptême, les croyants revêtent le Christ et lui
quent fils de Dieu à travers le sacrement de baptême. Cet acte cultuel appartiennent, leur comportement doit refléter celui de leur Seigneur, le
représente, de fait, le premier moment d'accueil par lequel tous les cro- Christ. Auss i, pour souligner l'importance de l'accueil envers les fai-
yants en Christ, sans distinction, sont appelés fils de Dieu et deviennent bles. allons-nous exam iner l 'agir du Christ face au manquement de cer-
membres de la grande famille de Dieu. Ils ont, par conséquent, revêtu le tains de ses disciples, notamment Pierre et Thomas. Ces dern iers se
Christ, en cc sens qu' ils portent Je Christ en eux (cf. Rm 6,3; Ga 3,27). sont montrés fa ibles suite à leu r incapacité d'accepter certains a pects
Par le baptême dans le Christ, Je croyant reçoit une vie nouve lle. Tl apparemment inconcevables de la miss ion du Christ : la passion pour
s'est libéré du vieil homme, qui a été crucifié avec le Christ. Ainsi, U- Pierre et la résu rrection pour Thomas.
béré, le croyant devient un homme nouveau et ne se plie plus aux Nous apprenons des évangiles qu 'après la résurrection. le Christ s'est
convoitises de son corps. Il doit désonnais se mettre au service de Dieu, présenté auprès de Pierre qui l'avait reni é devant les gens de la cour du
comme instrument de justice, en ce sens que tous ses actes doivent grand prêtre, après qu'il eut été reconnu comme un de ses disciples (cf.
exactement être l'expression de sa nouvelle vie en Christ. Cette expres- Le 22,57-6 1). Par son acte de trahison, Pierre avait non seul ement reni é
sion de sa nouvelle vie est rendue possible par la grâce de Dieu sous l'amitié avec Jésus, mais aussi sa propre fo i qu ' il ava it professée au
laquelle il se trouve. Autrement dit, l'acte du baptême façonne le cro- préalable à Césarée de Philippe, lorsqu'il l'avait reconnu com me le
yant à telle enseigne qu'i l devient affranchi du péché et a servi à Dieu. Messie, le Fils de Dieu vivant (cf. Mt 16,16). En dépit de cette trahison,
li doit par conséquent se comporter en enfant de Dieu en vue de la vie le Ressuscité a voulu témoigner de la fo rce de son ~1m our miséricor-
éternelle, qui est le don gratuit de Dieu en Jésus-Christ, le Seigneur dieux en relevant Pierre de la déchéance, et en le réhabifüant dans ses
(Rm 6, 12-23). prérogatives de pasteur du troupeau conformément à la promesse faite
Par ailleurs, étant intérieurement affranchi du péché et ayant adhéré au préalable (cf. Mt 16. 18; Jn 2 1, 15- 17). Par un éprouvant mais exorci-
au Christ, la vie du croyant est désormais guidée par Je dynamisme in- sant interrogatoire, Jésus amène son disciple à confesser de nouveau sa
térieur de la foi . Ce dynamisme le porte à une maturation de vie plei- fo i et à renaître à l'amitié et à la confiance. Par cet exemple, nou cons-
nement chrétienne. Ce faisant, la vie communautai re devient expression tatons que le Christ ne juge pas son Apôtre mais lu i offre de nouveau
d'amour fraternel, accueil mutuel, pardon, entraide, etc. Par ai lleurs, son amour, son.est ime en vue de continuer la mission qu'i l lui a confiée
l' appartenance au Christ peut concrètement trouver son expression la au sein de on Eglise.
plu chrétienne, entre autres, dans l'attjtude d'accuei l de faib le de la Un autre exemple du même genre est celui de la réaction du Christ â
com munau té (cf. Rm 14, 1). l'incrédulité de Thomas. Ce derni er est resté sceptique à l'annonce de
la nouvelle de sa résurrection. Au dire de ceux qui annonçaient cette
1.3.2 L'exigence d 'accueil nouvelle, il conditi onne son adhésion à la vérité de la résurrection à la
a) l'accueil des faibles dans la communauté présentation des preuves tangib les. Ce faisant, Thomas s'était montré
fa ible et lent à croire, alors que. à l'occasion de Pannonce de la passion
Nous voul ons ici réfléchir sur la façon dont les chrétiens fa ibles mé- du Christ, il ava it encouragé les autres disciples à aller mourir avec le
ritent d'être accueillis dans la communauté de la part des fo rts. Il s'agit Maître (cf. Jn 11 , 16). Ainsi, pour le relever de sa chute dans l' incrédu-
précisément de ceux dont le comportement oc traduit plus leur êlre lité, le Ressuscité lu i est apparu et, après lui avo ir fourni les preuves
chrétien. C'est justement ce que Paul dit lorsqu ' il ex horte les membres qu'il exigeait, l'a ex horté à ne plus être incrédule (c f. Jn 20,24-26). Il
forts de la communauté de Rome à accueillir les faibles dans la foi. Ces s'en suivra un acte de renouvellement, mieux, de renaissance à la fo i de
membres faibles dans la communauté de Rome étaient ceux qui choi- la part de Didyme: <(mon Seigneur et mon Dieu» (cf. Jn 20,27-28).
issaicnt de ne manger que des légumes certains jours. En vue de rame- Le moins qu 'on puisse dire, est que, dans ces deux fai ts. l'attitude de
ner l' harmonie parmi tous les croyants, Paul invite les membres forts à Jésus offre un éloquent exemple d'aide fraternelle envers Je membres
2 10 PARTIE LI : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH Vl : RÉFLEX ION THÉOLOGl QUE DE RM 14, 1- 2 1l

de la communauté qui se montrent fafüles dans leur témoignage de foi. Pour mettre fin à cet état d'esprit, Paul adresse à tous les membres de la
En effet, le Christ ne les juge pas, ne les humilie pas mais au contraire communauté l' invitation à s'accueillir mutuellement. Ceci est à cause
les aide à reprendre le chemin de la foi. En d'autres tennes, la faiblesse de l'acte accueillant de Dieu envers eux tous.
du disciple n'empêche pas le Christ à continuer à l'aimer8. Les chré- A travers cette exhortation, l' Apôtre veut ramener l' unité au sein de
tiens sont donc invités, à leur tour, à se comporter de la même faço n les la communauté en leur interdisant toute habitude de jugement les uns à
uns envers les autres. l'égard des autres. li leur fait comprendre qu ' ils sont tous serviteur d' un
Par ailleurs, nous savons aussi que Paul a exhorté en Rm 14,3 les fai- Maître, qui est le Christ. Personne d'entre eux ne peut donc se permet-
bles à ne pas condamner les forts, c'est-à-dire ceux qui se senta ient tre de juger l'autre dans son état de foi, en tant qu'il dépend de son
libres de tout manger n' importe quel jour. Cela nous amène à compren- Maître. Car cette capacité de porter un jugement ne revient qu'au Maî-
dre que, de leur côté, les faibles n'accueillaient pas. non plus, l'atthude tre, qui est le ChristtO.
des forts. ils portaient eux aussi un jugement sur les autres. C'est ai nsi Par ailleurs, I' Apôtre ex horte chaque membre, aussi bien le fort que
que !'Apôtre a interdit aux deux groupes de se juger et les a invités, en le faible. à avoir la plei ne certitude dans son cœur que son agir est en
revanche, à s'accueillir mutuellement. En effet, Paul offre aux membres lien avec son Maître et cela en vue de l'honorer. C'est justement ce
de la communauté de Rome ainsi qu 'à tous les chrétiens des directives comportement qui doi t être l'objet de conviction de tout croyant; et
pour un accueil réc iproque digne des enfants de Dieu et di sciples du c'est seulement de cette façon que cbaque membre est in vité à rendre
Christ, Seigneur. grâce à Dieu. Nous voyons donc que l'essentiel dans l'agir chrétien se
situe au niveau de sa moti vation, c'est-à-dire de ce qui stimule le cro-
b) L 'accueil mutuel
yant à se comporter de telle ou telle manière. Ceci veut dire que le com-
Si r être chrétien est fondé par l'acte constitutif de son identité. à sa- portement d' un membre dans la communauté. en particul ier en rapport
voir le baptême en tant que moment d' insertion dans la communauté avec ce qui est secondaire à l'essence de la vie chrétienne, en l'occu r-
ecclésiale, alors les baptisés fo!lt tous panie de la même fami ll e d'en- rence les pratiques alimentaires, ne doit pas être motif de discorde.
fa nts de Dieu qui s'appelle l' Eglise. En vertu de cette première exi-
gence d'appartenance, ils sont appelés à s'accepter et s'accuei llir mu-
tuell ement. Néanmoins, au regard de ce qui se passait dans la commu-
nauté de Rome et dans nos communautés actuelles - divisions, rejet par les viandes impures. les Juifs évitaient de manger de la viunde. Ceci laisse enten-
dre que la consommation de la viande n'était pas du tout interdite dans la loi juive
mutuel parmi les croyants - nous pouvons admettre que cette réa lité mais que dans la diaspora il se posait le problème de l'identification de la viande.
d'appartenance de chaque baptisé au Cbri t et à la grande fami lle de Quant aux membres de la communauté de Rome. certains tenaient encore à cette ob-
Dieu ne va pas de soi. Souvent les membres oublient leur condition de servance. notamment pour des jours de fëte . Noton que ce jours renvoient aux jours
pauvreté antérieure. Ce faisant, ils ne pensent plus qu' ils sont tous aussi ·péciaux des fëte de judaï me. notamment le sabbaL Nous savQns que l'observance
fru it de la mi éricorde et de l'amour gratuit de Dieu. Aussi son t-i ls de jour des fëtes, en particulier le sabbat, était un problème important dan.-; le ju-
daïsme du temps de Paul. car ce jour représentait une des caractérist iques du judaîsme
prêts à se surestimer vis-à-vis des autres et à juger ceux-ci moins méri- de la diaspora. Quant aux membres qui ne mangeaient que des légumes. nous affir-
tants qu 'eux-mêmes. De fait, comme nous l'avons précédemment si- mons quï l ne s'agit pas nécessairement des chrétiens d'origine j uive, du tàit que les
gnalé, il régnait parmi les croyants de Rome la tendance à se rejeter membres d' origine païenne furent des sympathisanl<i du juduïl'mc c1 avaient donc une
mutuellement à propos des questions alimentaires (cf. Rm 14.1 -9)q. certaine conm1issance de lu loi juive. Ceci nous amène donc à croire que parmi ces
membres qui choisissaient de ne manger que des légumes figura ient les deux eùmics
présentes dans la communauté romaine. Cf. J.D.G. DlNN. Romans, Il. 804-806.
8 En effet. Jésus dit <cje ne suis pas venu appeler les justes mais les pécheurs. au re- 10 A propos du priv iJège 4ui revient uu Christ. le Maître des croyants, Paul indique
pcntim (Le 5. 32). que celui qui croit en Jésus-Christ. lui appanient à tout moment. Autrement dit. le cro-
9 Il s'avère imponant de signaler brièvement le contexte alimentaire de membres yant peut demeurer fidèle par rappon à sa relation avec son Seigneur. tout comme il
de la communauté de Rome. Les chrétfons de Rome étaient issus du judaïsme vécu peut connaitre des moments de faiblesse dans cenc même relation, il est toujours du
dans la djaspora. Dans cc milieu, il était di fficile d'identifier de la viande pure et im- Christ et pour lu i. Cependant. sïl arrive que le croyant tombe, son Maitre, le Christ,
pure. c'est-à-dire celle offer1e aux idoles. Par conséquent, au risque de e contaminer est en mesure de le relever, du fait qu'il est puissant (cf. Rm 14.4).
212 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH VI : RÉFLEXION THÉOLOGIQUE DE RM 14.1- 213

Nous constatons que le problème majeur de la communauté de Rome Pour rendre plus décisive son ex hortation, Paul fait avoir que l'es-
tel que relaté en Rm 14, 1-9 était celui relatif à la nourriture. Ce pro- sentiel du règne de Dieu se situe dans la pratique de la justice, paix et
blème a conduit les membres à assumer une attitude moins charitable joie dans !'Esprit Saint (cf. Rm 14, 17)1 3.
les uns à l'égard des autres: le jugement mutuel. L'apôtre Paul, pour Par contre, les questions de nourriture ou de boisson sont d' une im-
les aider à changer pos itivement leur attitude, leur a donné plusieurs portance moindre, donl on peul tranquillement se passer sans nuire à la
raisons que nous avons exposées ci-dessus. réalisation du règne de Dieu au sein de la communauté. Ainsi. tout en
L' Apôtre leur fai t voir qu ' ils sont tous pass ible d'un juge~ent de la ayant conscience que rien n 'e t impur, tout en se sentant libre par rap-
part de Dieu le Père, car ils comparaîtront tous devant le tnbunal de pon aux questions alimentaires, les forts, à cause de la charité envers
Dieu•• . Par là, il montre que le seul juge qui exercera un jugement sur les faibles, doivent vei ll er à ne pa porter atteinte à la foi des faibles,
chaque croyant est bien entendu Dieu, le Père de Jésus-Cbrist. C"est ex- voire à les scandaliser. En revanche, ils doivent s·engager à promouvoir
clusivement à lui que chaque cbrétien rendra compte pour lui-même. la ju tice. la paix, la joie el l'édification mutuelle. Car, lor que les
Cela veut dire qu·aucun membre d' une communauté chréti enne n'a le membres de .la communauté vivent quotidiennement ce qui convient à
privilège de porter un jugemenc sur l'autre. Cela est l'apanage de Dieu leur être chrétien, les deux autres aspects, à savoir la paix et la joie s'en
qui les a tous accueill is. Cependant, tout en interd isant l'attitude de ju- sui vent. Un tel comportement rend la personne agréable à Dieu el attire
gement les uns à l'égard des autres, !' Apôtre encourage que chaque sur clic l'estime des autres.
membre puisse juger sa propre action afin de se rendre compte de l' im- Tout compte fait, il convient de noter que le fait de se savoir libre à
pact de sa conduite sur la foi des autres membr_es da~s la c?rnmunaut~. l'égard des questions secondaires au règne de Dieu e t encourageant
En effet, s' il s'aperçoit que on acte peut entrainer 1 autre a la chute, t1 pour la pcr onne elle-même devant Dieu. Étant donné le conséquences
l'évitera d'agir de la sorte. Cette précaution doit être prise, lorsq u' il s'a- fâcheuses qu ' un tel comportement peut a oir sur le faible, il est re-
git des questions secondaires par rapport au caractère fondamental de la commandé, pour le forts, de s'en abstenir. Cependant, Paul affinne
vie chrétienne (cf. Rm 14, 17). En agissant de la sorte, il fera preuve de que celui qui prend une décision, tou t en sachant que cela peut affa iblir
charité envers son frère faible dans la foi. son frère, se condamne. li est coupable parce qu'i l agit sans bonne foi
Tout en ayant la pleine conviction, dans le Seigneur, qu'aucun ali- (cf. Rm 14,22-23). De fait, les forts, à l'exemple du Christ, ont le de-
ment n'est en soi impur, et qu ' il le devient seulement pour celui qui vo ir de porter la faib lesse de ceux qui n'ont pas la fo rce; ils ne doivent
l'estime ainsi, Paul exhorte néanmoins à la prudence, à l'attention aux pas chercher ce qui leur plaît mais plutôt ce qui plaît à leur prochain
autres comme signe de charité fraternelle. De façon concrète, !'apôtre pour le bien en vue d'édifier. Nou savons toutefois que Paul a exhorté
Paul invite les croyants à ne pas contrister leur frère pour une question non culement les forts à accueillir les faibles ma is aussi les faibles à
d'aliment. 11 convient d'éviter de manger une nourriture qui crée obsta- faire de même. Car il leur interd isait aussi de condamner les forts. Cet
cle à l'autre. Car ce derni er est un frère pour qui le Ch rist est mort 12 . acte d'accueil, tant pour le forts que pour les faibles. doit être accom-
pli comme l'a fait le Christ à l'égard de tous pour la gloire de Dieu (cf.
11 Signalons que Je terme Dieu I «9Eoc;» est souvent employé par Paul en faisant al- Rm 15, 1-7) .
lusion à Dieu le Père. Cf. O. GUTI IRIF. - R.P. MARTIN, aGod)}. DPL, 357;
L. W. HURTJ\DO, «Lord», DPL, 560-56 1; G. D. Fm~. Pa11/i11e Cliristology. 16- 17.
12 Rappelons que. en lien avec l'extrait Rm 14, 1-9. la recommandation de Paul
s·adresse principalement aux forts. li les invite à ne pas exposer leur prérogative :i l 3 Comme nous l'a vons exposé ci-dessus. le Règne de Dieu dont parle 1'apôtre
l'outrage. Nous entendons par prérogative le compor1cmen1 libre des forts à tout man- Paul en Rm 1-LI 7 concerne cette réalité du Règne déjà présent parmi le croyants
ger indépendamment des jours. Car. selon eux. aucun aliment n·cst _impur. Cependa~t. et dont ils doivent témoigner pur un comportcmcnl réellcmcnl chrétien. Et c·est ce
ib doivent toujour., foire prcu\ c de discernement dans leur condwte communautaire comportement authent iquement chrétien qui est le signe visible de l'existence du
au nom de la charité fraternelle. en vue de l'édificat ion des faibles dans la foi. Le Règne de Dieu au milieu des hommes. Cela dit. la v ie chrétienne est appelée à
manque d'at1ention envers le faible portera non seulement préjudice au pri\ ilègc des devenir chaque jour un témoignage. une épiphan ie du Règne de Dieu à l'œuvre
forts. mais encort: à l'œuvre de Dieu dans celui qui e. t fa ible dans la foi (cf. Rm dans l'histoire.
14.16-20).
214 PARTIE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH VI : RÉFLEXION THÉOLOG IQUE DE RM 14,L- 2 15

2. La dimension christologique L'apôtre des Gentils utilise le mot Kuptoç en se référant le plus sou-
vent au Christ et très peu aux hommes. Dans ce dernier cas, il s'agit de
Dans cette section du lravail, notre réflexion se fonde sur deux affir- ceux quj exercent l'autorité sur les autres, tel que le maître des esclaves,
mations à grande teneur christc:togique. En ~ffet, le passa~e de Rr:n etc. Par ailleurs, ce terme Kuptoç représente chez Paul un des titres
14,4.9, expose la pensée de l'apotre des Ge~til s pa~, rapport a d~~x r~­ christologiques importants. Dans l'emploi de ce terme tant dans sa con-
alités relati ves au Christ, le Seigneur. li s'agit prem1erement _de l 1mph- notation séculière que religieuse, Paul a subi l'inOuence de l'usage de
cation de la pui ~sa nce du Christ,. en ta~t que Maître o~ Se 1gn ~u r,_ sur Kuptoç par les Juifs comme par les païens du monde gréco-romain.
son serviteur qui accuse une certame fa iblesse dans sa vie de fo i, ~.est­ Quant à son sens religieux typiquement pau linien, le tenne est uti lisé
à-dire chaque fois qu ' il s'éloigne de son Maître (cf._ v. 4). Deuxien~e: par allusion au Christ16. Toutefois, il existe aussi des textes de Paul où
ment le texte met en évidence la Seigneurie du Christ comme finahte Je tenne se réfère également à Dieu. Dans ce dernier cas, il semble dif-
de sa' mort et de son retour à la vie (c f. v. 9). Par ailleurs, cette Seigneu- ficile de percevoi r la référence exacte du mot. à savoir Dieu ou Christ.
rie du Christ s'inscrit dans la relation d' appartenance des chrétiens à Néanmoins, il convient de noter que, pour la plupart des cas, les allu-
leur Seigneur, le Christ. De ces aspects dominants du texte, nous vou- sions à Dieu du mot KUpLoç se trouvent dans les textes où Paul ci te un
lons d'abord cerner le contexte de la mort du Christ et de son retour à la extrait de I' AT. En pareill e circonstance, Dieu est désigné par le terme
vie, ensuite appréhender l' importance et l' impact de cette Seigneurie hébreu :"li:"l' / «Yabvé»' 7 , qui est la traduction de Kuptoç. Voici à ce pro-
sur les chrétiens. particul ièrement sur le faible. pos quet'ques passages où le tenne est cité par I'Apôtre, au sens évoqué
Cependant, il s'avère important de présenter la signification fon~a­ supra, avec une référence vétérotestamentai rc : Rm 4,8 (Ps 32, 1-2):
mentale et spécifique du mot Kuptoç selon l'entendement de Paul. L'in- 9,28-29 (ls 28,22): 10, 16 (Js 53, 1); 11 ,34 (Is 40, 13); 15,11 (Ps 11 7, l ~;
térêt de cet exposé est motivé par le rappo_rt privilég~é. que ce t~rrr:ie !Co 3,20 (Ps 94, l l ); 2Co 6,17- 18 (ls 52,11 ; 2S 7, 14), etc. Cependant, il
entretient avec l'as pect christologique des ecn ts paul1111ens. ~ec1 dit, y a dans plusieurs textes pauliniens des citations de I' AT avec la men-
nous donnerons d'abord une explica tion globale du tenne, ensuite nous tion de :"li:"l' / «Yah vé», mais se référant au Christ, tels qu'en Rm 10,13
en préciserons l' usage qu'en fait Paul, et enfin nous exposerons une (JI 2,32); ico 1.3 1 (Jr 9.23-24); 10,21.26 (M l 1,7. 12, Ps 24,1); 2Co
réflexion que ce rapport nous a inspiré. 3, 16 (Ex 34,34); 10,17 (Jr 9,23-24): ITh 3,13 (Za 14.5); 2Th 1.7-8 (Ts
66, l 5), etc. LI y a en revanche deux extraits où il s'avère diffici le de
2. 1 Usage pauli11ien du ferme KVptor; dire si le terme KUptoç se réfère exclusivement à Dieu ou au Christ. li
Le mot grec KUptoç est un tenne qu'o~ traduit le p l~s souvent lar s'agit de Rm 14, 11 (Is 45,23) et l Co 2,16 (Js 40, 13).
«seigneur», «maître» dans le NT, y compris dans les écrits de Pauli . l! En défin itive, nous soutenons qu 'en dép it de quelques textes qui
évoque une supériorité de la personne à qui il se réfère. li peut ~ u ss 1 montrent que le tenne KUptoç renvoie à Dieu, il y a cependant plusieurs
indiq uer une attitude de respect; il est alors généraler:nent cons?"'1ll a_u textes qui permettent d'affirmer que !' usage de Paul de KUptoç se réfère
vocatif. Ce dernier ca e t la plupart du temps employe dans les evang1- bel et bien à Jésus-Christ, notamment en Rm 14,4.6.8-9 . Après avoir
les. Associé avec le terme ôoûÀoç / «esclave, serva nt», KUptoç désigne campé le terme KupLoç dans le panorama littéraire paulinien, nous al-
un patron en tant que maître de ses es~l aves .. Par cont.rc, ?a ns. le_ mi~ieu
sémite et la pa11ie orientale de l'empire greco-romam, JI fa1sa1t refé-
t r~s utilisé, il se trouve seulement une dizaine de fois. Dans les écrits de Paul. le terme
renee aux dieux / divinités. Le mot KÙptoç était aussi utili é pour parler est présent dans les le11rcs dites pastorales : 1Tm 6,2: 2Tm 2,21 et Tl 2,9.
de empereurs romains dans la deuxième moitié du 1er siècle 15. 16 Cf. L. w. H UR1 ADO. «Lor<fo. DPL. 560: c. SrlCQ. «I UpLoÇ». TLNT. Il . 350.
17 CC L.W. ll URlADO. «Lord», DPL, 562: G.D. FEE, Pauline Christology, 272-277.
14 Cf. L.W. H UHTADO, «Lord». DPL. 560: c. SPtCQ. «KupLOÇ», TLNT. Il , 341-342. Nous voulon ici préciser le sens de KUploç en lien avec les juifs du 1er siècle ap. 1.-C.
15 Cf. L. W. H UlnADO. «Lord». DPL, 560: C. SPICQ. <d{upLOc;». TlNT. Il. 344-345. En effet. cc terme rcprésen1ait une façon ~évérenci.eusc pour les j~i fs de cc .temps-là
Signulons également la présence d' un auLrc Lerme grec ôeo11?:.11~ qui est ren~u ~ar de parler de Dieu. Cet usage corrcsponclmt à celui de :ip•/«Yahve» des Jui fs. E1ant
«seigneur». «maitre» dans le NT. aussi dans les lettres paulm1cnncs, en pai:1culier donné que Paul faisait partie de ce milieu, nous pensons qu ï l en a certainement était
celles dont !"authenticité ùc Paul est mise en question. Cependan1. le tem1e n est pas innucncé.
216 PARTIE Il : LE EIG EUR E T PUI A T CH VI : RÉFLEXION TKÉOLOGIQUE DE RM 14.1 - 2 17

Ions à présent étudier la dimension cbristologique suggérée par notre Nous voyons donc que la Seigneurie du Christ découle, bien entendu,
lecture exégétique de Rm 14,4.9 de son acte d'obêissancc; cet acte l'a conduit d' abord à la mort et en-
suite à la résurrection d'entre les morts. Cependant, elle s' insère, com-
2.2 l e contexte du devenir Seigneur de Jésus-Christ me nous l'avons déjà signalé, dans le cadre de sa relation avec les chré-
La réflexion de ce point provient exactement de Rm 14,9. Dans ce tiens morts et vivants. D'où la question de savoir comment se manifeste
texte. Paul affi nne que le Christ est mort el revenu à la vie pour être cette relation du Christ, Seigneur envers tous les chrétiens, en particu-
Seigneur des morts et des vivants. Toutefois. on devenir Seigneur 1ier les faibles.
constitue une réa lité qui se comprend à l'intérieur du rapport qui ex iste
lui entre tous les croyants, morts ou vivants. Car, dans la vie ou dans la 2.3 l 'impacr de la Seigneurie du Christ sur les chrétiens
mort, les chrétiens appartierment à leur Seigneur, le Christ. Toute leur Le pré upposé théologique qui ervira de toile de fo nd et de fil
existence, toutes leurs actions se trouvent en relat ion avec lui et ont une conducteur à cette réflexion est l' implication de la Primauté du Chri st
finalité bien préc ise celle de l' honorer (v. 8). Toutefo is, le contexte et le dans la vie d'un individu ou de l' ensemble de la communauté. Ce pré-
processus du devenir Seigneur du Christ sont décrits par Paul dans la supposé théologique décou le du texte de Paul, lorsqu'i l fait savoir aux
lettre aux Phi lippicns. Cette lettre présente, de fait, le déroulemen t de deux factions présentes dans la communauté de Rome que tous les
l' aba issement du Christ, son assomption de la nature humaine el son croyants, se lon l'état de foi de chacun, appartiennent au Christ, leur
devenir Seigneur. En effet, la problématique du devenir Seigneur du Seigneur. C'est à lui seul que revient exclusivement le droit de juger.
Christ suppose celle de la kénose - l' abaissement du Christ, en deve- En cas de faib lesse, il est le seul à intervenir pour raffem1ir celui qui a
nant homme - du fait qu 'elle constitue la conséquence incontournable des difficultés. Le Chris t, le Seigneur, est en mesure de relever cel ui qu i
de son incarnation. Étan t donné que, dans la première partie de la thèse, tombe, à cause de sa puis ance (cf. Rm 14,4).
nous avons, de façon détaillée, exposé toute la procédure de la kéno e Nous comprenons par là que l'i mplication de la Seigneurie du Christ
du Chri st, ici, dans la deuxième partie, il s'agira simplement de mettre exprime son intervention puissante sur la vie de ses fidèles. En d'autres
en évidence l'effet de cette kénose, c'est-à-dire la Seigneurie du termes, cette répercuss ion se traduit par les effets de la grâce opérante,
Christ18. et donc transformatrice du Christ sur le croyant. En eftèt, quiconque a
La Primauté du Christ, comme nous la rapporte la leth"e aux Philip- fai t dans sa vie une expérience de rencontre avec le Seigneur, sous une
piens (cf. 2,6- 11 ), représente le résultat de son acte d'obéissance et fonnc ou une autre. ne peut pas ne pas s'en retrouver radicalement
d'humilité envers Dieu. son Père. S'étant dépouillé de sa condition di- transfonné. Il s'agit, par conséquent, d'une expérience qui fait passer
vine qui l'égalait à Dieu, il devint homme en tout excepté le péché. en d'un état de faib lesse à celui de la force, d'une vie de ténèbres à une vie
vue de sauver l' humanité pécheresse. Cet acte de renoncement et d'ac- de lum ière. Une expérience qui imprime un nouveau style dans la vie
ceptation totale de la condition humaine l' a naturellement condui t jus- de la personne : elle est régénérée.
qu 'à la mort sur la croix (cf. Pb 2,6-7). Cependant, cette mort n'a pas En consonance avec le passage de Rm 14,4, nous évoq uerons cer-
eu le dernier mot, ca r le Ch ri st est revenu à la vie (cf. Rm 14,9). c'est-à- tains textes qu i re latent les implications du Chri st, Seigneur. Nous pas-
dire il est ressuscité, exalté par Dieu et a reçu le nom qui est au-dessus serons en revue les effets de sa grâce, aussi bien dans d'autres textes
de toue nom. Par conséquent, non seulement tout s' agenoui ll e partout pauli niens que dans les autres textes du NT, notamment les Actes des
- au plus haut des cieux, sur terre et dans les enfers - au nom de Jé- Apôtres. Dans la Lettre aux Philippiens, face à ses dén igreurs j udaïsants
sus, mais encore toute langue proclame de lui qu'i l est Seigneur à la de la stricte observance qui mellaient en évidence leurs avantages char-
gloire de Dieu le Père (cf. Ph 2, 10- 11; Ac 2,32-33.36). nels. l'apôtre Paul se met à narrer son expérience passée, antérieure à sa
rencontre avec le Seigneur ressuscité. Il affirma qu'il aurait bien des
raison de se prévaloir de es qualités précédentes, car il était un hom-
18 Cf. La première panic de la thèse. le point 2.2. I Le processus de l'abaissement me irréprochable par rapport à la pratique de la loi mosaïque. Il montre
du Christ. qu 'en raison de cette pratique, il éta it même per écuteur de l'Église.
2 18 PARTIE Tf : LE SEIGNEUR EST PUISSANT CH V I : RÉFL EX ION THÉOLOG IQUE DE RM 14, 1- 2 19

mais à partir de sa rencontre avec le Christ, il accepta de tout perdre (cf. Corinthiens, pour motiver l' action de générosité des chrét iens de Corin-
Ph 3,4-9). De son récit, Paul montre justement que cc fut l' intervention the à prendre part à la quête d' argents pour les chrétiens de Jérusalem,
puissante du Christ. qui l' a amené à considérer tous ses privilèges char- Paul fait allusion à la générosité des églises de Macédoine. Celles-ci, en
nels comme des balayures : des objets sans valeur devant la connais- dépi t de leurs moyens li mités, ont participé spontanément à la collecte
sance supérieure du Christ. Ce changement radical de Paul ne fut pas de fonds pour les chrétiens de l'église mère.
l'œuvre de sa propre volonté mais bien plus celle de la grâce opérante Toujours en ham1onie avec le message de Paul de Rm 14,4 au sujet
et trans forma trice du Ressuscité. de la manifestation de la puissance du Christ parmi les croyants nous
En effet, comme le relate aussi Luc dans les Actes des Apôtres, pou vons nous référer à quelques récits de Luc dans les Actes des A-
l'expérience de Paul sur la route de Damas traduit cette dimension de la pôtres. En exposant ces faits concrets relatés par Luc, nous visons sim-
Seigneuri e du Christ. Le Seigneur est intervenu pour arrêter la persécu- plement à illustrer l' impact de la puissance du Christ dans son Église.
tion qui sévissait contre les chrétiens. Pendant cette intervention, il se En fait, les Acles des Apôtres rapportent les épisodes qui ont accompa-
manifesta à Saul pour l'éclairer et le détourner de son projet destructeur gné les débuts de l' Église. Nous y trouvons la présence de Jésus-Christ.
de l'œuvre du salut. Le Ressuscité l' illumina et lui fît la grâce de naître Seigneur, au mi lieu de ses djsciples. A travers l'envoi de !'Esprit Saint,
dans la vie nouvelle des enfants de Dieu par le baptême. Il lui confia la le Ressuscité réconforte le moral et la fo i de ses disciples affaiblis par
mi ssion de porter sa bonne nouvelle chez les Gentils. Sans tarder, Saoul, les événements de sa passion et sa mort. Il les rassure de sa présence
appelé Paul, se mit à prêcher Jésus-Christ dans les Synagogues avec parmi eux jusqu 'à la fin du monde.
zè le et assurance. fi proclamait que Jésus est bien le Fi ls de Dieu et le Des Actes des Apôtres, nous apprenons de façon surprenante le com-
Chri st attendu. portement de Pierre après la résurrection du Christ, son Seigneur. En
Comme partout où les disciples du Christ propagea ient la bonne effet, depu is le jour de la Pentecôte, Pierre, qui avait eu peur de re-
nouvelle, les signes évidents qui accompagnaient leur prédication at- connaître Jésus à la cour du grand prêtre lorsque son Maître fut arrêté,
tira ient beaucoup de gens au Seigneur (cf. Ac 19, 1-42). De l' expérience était désonnais devenu capable, par la puissance de !'Esprit Saint, d' an-
de Paul sur la route de Damas, nous percevons l' impact de la Seigneu- noncer la résurrection du Christ, son Seigneur et la bonne nouvelle du
rie du Christ comme une action illuminante du Christ dans la vie du salut avec assurance devant les gens de Judée et de Jérusalem (et: Ac
Tarsiote. D'ailleurs ses lettres offrent des témoignages significatifs de 2, 14-36). Sa prédication a tout de suite eu des échos favorables, car les
cette présence en lui. En effet, les écri ts pau lin iens nous apprennent son gens qui l'ont entendu furent touchés, se sont convertis et reçurent le
élan miss ionnaire, particulièrement au milieu des Gentil s. Dans ce mi- baptême (cf. Ac 4, 3 7-4 1). Ainsi, la première communauté chrétienne
licu païen, Paul a apporté la bonne nouvell e du salut en Jé us-Christ et vit le jour.
a fondé des communautés ferventes. Nous avons ici deux façons de lire la présence de la Seigneurie du
Par ailleurs, I ' Apôtre expose dans ses lettres des exhortations de Christ. Elle s'est révélée comme action libérantc envers Pierre qui an-
grande teneur théologique. christologique, ecc lésiologie, etc. Nous pou- nonce sans crainte la bonne nouvelle du salut en Jésus-Christ. A l'égard
vons à juste litre souligner son engagement, en tant qu ' Apôtre dans la des gens de la Judée, la Seigneurie du Christ est perçue comme une
vie ecc lésia le des commw1autés cliréti.e nnes, en particulier ce lles dont il présence qui illumine et régénère. Us sont éclairés dans toute leur vie et
est le fo ndateur. Un élément important, parmi tant d'a utres, qui expli- ont déc idé d' adhérer au Christ en recevant le baptême. Grâce à cet acte,
cite l'action de la puissance du Christ, Seigneur, en lui dans la vie des ils sont renouvelés, en ce sens qu ' ils accèdent à une nouvelle vie, celle
communautés est la façon dont il encourage ses fidèles à la so lidarité des enfa nts de Dieu. Ainsi, nés spirituellement, ces nouveaux croyants
avec les croyants de Jérusalem 19. En effet, dans la deuxième lettre aux vivent dans la fidélité par rapport à l'écoute de la parole de Dieu, à la
fraction du pain et à la prière. lis se sentent solidaires les uns des autres,
19 Rappelons que l'engagement de Paul à aider financièrement les chrétiens de car ils mellent tout en commun et le partagent entre eux tous, selon les
l'église de Jérusalem représente sa réponse à la recommandation reçue des apôtre besoins de chacun. Toutes leurs actions sont marquées par la joie et la
Pierre. Jacques et Jean de ongcr aux pauvres. dans leur mission auprès de Gentils (cf. simplicité de cœur. Ils jouissent de la faveur de tous ceux qui les voient
Ga 2.10).
220 PARTIE Il : LE SEIG EUR CST PUI SANT CH VI : RÉFLEXIO TITÉOLOG IQUE DE RM 14.1- 221

v ivre. Par conséquent. la nouvelle communauté a grand i en nombre 3. La dimension théologique


avec l' arrivée des nouveaux membres (cf. Ac 2,42-47; 4.32-35). La réflexion que nous propo ons dans cette partie e veut une élabora-
Nous apercevons un autre fa it import~nt d~ 1~ .Seignewi~ du Christ tion du message résu ltant de l'analyse de Rm 14, 1-3.6. De cette analyse,
dans la vie communautaire de cette Ëghse prunn1vc. Le Seig neur res- nous avons noté la recommandation de Paul envers les membres de la
s uscité manifesta également sa puissance parmi es fidè les dan des communauté. Cette recommandation se présente sur deux versants.
moments des controverse au sein de l' Église. Car il e pré ente comme D'abord, l'apôtre interpelle les membre à r accueil mutuel , du fai~ que
celu i qui illumine les croyants dans les prises des décisions. e l e~ tant Dieu a déjà accuei lli chacun d 'eux: le faib les comme le forts. Cc fat ant
que celui qui les aide à e réconcilier. Au _cb. 1? des Actes_des Ap o~es, il donne à on exhortation un fondement théologique en pré entant Dieu
nous appren ons qu ' il y a a it des tensions a Antioche au SUJ~t des P.a~ens comme modèle de l' accuei l. Ensuite, !'Apôtre les invite à rendre grâce à
con ertis au ChrisL Certains Juifs vou laient que ces ethnico-chrellens Dieu. Cependant. il leur fait comprendre que cette reconnaissance doit êtr:e
so ient circoncis suivant l' usage de la loi de Moï e. Car, selon e ux. cet le résultat de leur comportement, lequel e trouve en rapport avec leur Sei-
état de circonc is leur permettrait de recevoi r le salut. La questio n éclata gneur, le Christ et quj vise à l'honorer. C 'est seulement en agissant de la
en d iscussion entre Paul et Barnabé avec les j udéo-chrétiens venus de sorte qu 'i ls peuvent élever leur prière d 'action de grâce à Dieu.
Judée. Ainsi, la communauté décida de faire tra iter la question à Jérusa- De cette recommandation de l'apôtre PaLLl, nou retenons deux aspects
lem auprès des apôtre et des anciens. . . relatifs à l'agir de Dieu en vue d 'une réflexion théologique. 11 s'agit de
A travers la déci ion de la communauté d ' Antioche. nous avons la un l'accueil de Dieu à l'égard de tou les chrétiens (cf. vv. 1-3) et de l'action
signe de la pré ence du Sei~e~ qu i illumine les membr~s et les de grâce qui lui est rendue de la part des chrétiens (cf. v. 6).
oriente vers la hiérarch ie de l' Eglise; un geste de grande portee ecclé-
sio logique. L ïntervcnti?~ ~es responsable . d~ Jéru al~i;n, ~n part!culier 3. 1 L'accueil de Dieu em·e1:'i 10111;; les cr oyanL'i
Pierre et Jacques, fut dec1s1ve. Elle a pe~t~ a to~te .1 ~glt se:. et a celJe Dans les vv. 1-3. l'apôtre Paul exhorte les membres de différentes fac-
d 'Antioche n otamment. d ' intégrer les chret1ens d on gm e pa1enne sa ns tions qui composent la comm unauté de Rome à l'accueil mutuel. Cette
aucune imposition concernant la circoncision. La décision des apôtres exhortation fait suite à la sin1ation qui prévalait au sei n de la communauté.
refl ète sans aucun doute une action du Ressuscité à travers l'Esprll En effet, les rapports entre les membres de la communauté sont empreints
Saint parmi eux. D e fa it. la lettre que les apôtres _ava ient envoy~e à de l'attitude du jugement et du mépris réciproques. L' Apôtre déconseille à
l' église d 'Antioche montre à suffisance que le ap otres et. les anciens chaque groupe une telle attitude el les invite à s'accepter .mu~ell.ement.
n'ont pas décidé seuls mais avec l' aide de l'E pnt du C hrist. Les res- Cette exigence d 'accueil des uns envers les autres est u~ LIDpera ~f pour
pon able de Jérusalem onL rej~lé rid~e ?'imposer d'autre~ charg.e s que tout croyant en Jésus-Cbri t, en tant que membre de la famille de D ieu.
cell es qui sont indi pen ables. a savoir 1 abstme_nce a.u~ ~~nde immo- Cet impératif s'inspire de l' attitude de D ieu qu i s'est déjà mon!Té ac-
lées aux idoles, aux chai rs étouffées et aux union 11leg1tunes (cf. Ac cue illant vis-à-v is de tous les hommes. chacun dans sa façon de vivre sa
15, 1-29). . . . foi en Chris t. Cet accueil est, du reste, le fruit de son amour gratuit pour
En définitive. nous affirmons que l' impact de la Se1gneune du C hn ~ t ces êtres créés à son image, en vue de les déli vrer de la damnation éter-
se manifeste toujours à travers des actions qui rendent fructueuse la vie nelle que leur a valu Je péché d ' Adam 20. Car, à travers le péché,. 1'.hom-
des croyants en Christ. Car ils se trouvent illuminés, régénérés, réconci- me a perdu sa cond ition initiale d ' enfant de Dieu. Comme le dit JU ~ te­
liés. etc. Par a illeurs la teneur christologique du message de Paul da ns ment l'apôtre des Genti ls, la faute d'un seul a apporté la condanmat:Ion
les textes analy és n'ous a pennis de com~rendre l ' ii:nportanc~ e.t lïm- sur tous les hommes (cf. Rm 5, 12-2 1, spécialement le v. 9). A cause d u
pact de la Seigneurie du Christ dans la .vie des chret1ens. A.ms1. nous péché, l'homme était pour ainsi dire mort et avait donc perdu le salut.
r
saisissons exhortation de Pau l, lorsqu' tl a ffirme que le Seigneur est
puissant pour « oulevern son serviteur au moment de la faibJesse (cf.
Rm 14.4). 20 Cf. Saint Jean relate l'amour graruit de Dieu pour tous les homme en ces ter-
me : <<Dieu a Lant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique. afin que quiconque
croit en lui ne e perde pas. mais ait la vie éternelle» (Jn 3.1 6).
222 PARTIE li : LE SEIGNEU R EST PUlSSANT CH YI: RÉFLEXIONTfTÉOLOGIQUE DE RM 14,1- 223

Ainsi, l' initiative du salut de tous les hommes, en partjculier de tous fornication, l' impureté sous toutes ses formes, la cupidité, les grossière-
ceux qui croient en Jésus-Christ, vient de Dieu. tés, les inepties, les facéties (cf. Ep 5,3).
En effet, Dieu a voulu actua liser et perpétuer dans le temps son projet L' auteur ne se contente pas de fustiger ces pratiques; il va jusqu 'à
de rédemption. Po ur ce faire, il a envoyé son Fils Jésus-Chtist pour ré- radicali ser sa position en interd isant aux chrétiens de ne prononcer
con cili er les hommes avec lui, leur créateur (cf. R.m 5,5-9.12-21 ; Ga même pas la moindre paro le q ui évoquera it ces irrégularités. Ceux qui
4,4-7; Ep 2,3-5 et Jn 3, 16). C'est donc à cause de sa portée sotériologi - se conduisent de la sorte n'auront pas droit à l' héritage dans le Règne
que et pédagogique que Paul , en vue de stimuler les fidèles de Rome à du Christ et de Dieu (cf. Ep 5,3-4). En d 'autres tennes, ils ne posséde-
!.'accueil mutue l, évoque cette attitude de Dieu à l'égard de tous (cf. ront rien dans ce Royaume de Dieu, qui est déjà présent parmi les bom-
Rm 14 3) et le propose comme paradigme des relations au sein de la mes par l'entremise de Jésus-Christ, Fils de Dieu, ni dans ce Royawne
conmrnnauté des croyants. de Dieu qui viendra dans le futur, lorsque le C hrist remettra son Royau-
S i le sa lut est le fruit de l'amour gratuit de D ieu en Jésus-Cfilist, me au Père21.
parce que l' homme ne l' a pas mérité en ra ison de sa cond ition de pé- Le droit d 'hériter Je Règne du Cfilist, et par surcroît le Règne de Dieu,
cheur, alors il y a toutes les raisons pour qu ' il soit reconnaissanl envers exige des croyants un comportement qui soit en conformité avec les
cc Dieu si bon et généreux. exigences de l'enseignement du Cl1risl, Seigneur, et qui l' honore. Il s'a-
git en effet d'éviter les ténèbres dans lesquelles les croyants étaient
3 .2 L'action de grâce rendue à Dieu de la pari des croyants autrefois avant leur expérience de foi. Comme des enfants de lumière,
S' il est une des caractéristiques propres aux épîtres paulirueru1es, Jeurs actes doivent correspondre à la vo lonté de Dieu et ainsi témoigner
nous pouvons entre autres souligner !'incessante et insistance action de de la bonté, justice et vérité (cf. Ep 5,6-13). C'estj ustementce que Paul
grâce. TI ne serait donc pas excessif de dire que les écrits de Saint Paul affirme, lorsqu ' il invite chaque membre de la communauté de Rome à
commencent souvent par des expressions d ' action de grâce rendue à avoir pleinement la conviction selon laquelle son agir doit être en rela-
Dieu, et que l'exJ1ortation de Paul en Rm 14,6 obéit à cet esprit. Aussi, tion avec Je Christ, son Seigneur et doit viser à l' honorer (cf. Rm 14,5).
nous offre-t-elle des éléments pertinents pour réfléchir sur l' attitude des Une vie cbrétfonne vécue de cette façon conduit nécessairement à ren-
croyants à ! 'égard de Dieu qui les a accueillis tous et leur a témoigné dre g râce à Dieu en Jésus-Christ son Seigneur.
son amour. En effet, saint Paul invite les croyants de Rome à rendre C 'est pour cette raison que l'exhortation pau linienne en Ep 5 invite
grâce à Dieu, chacun selon sa façon de vivre sa foi. TI s'agi t d 'un com- les croyants à veiller sur leur conduite. Cette derruère doit être une con-
portement qui est vécu en relation avec le Seigneur, le Christ et qu i ne duüe non pas de personn es insensées mais p lutôt de personnes sages
vise qu ' un seul objectif, celui de l' honorer. A travers deux textes pau li- qui savent trouver dans le moment présent ou dans le monde ce qui est
niens, nous aHons c lairement percevoir les raisons fondamenta les de bon, ce qu i est conforme à la volonté du SeigneLLr (cf. Ep 5, 15-18).
cette action de grâce qui do it être rendue à Di eu. Ainsi, ils doivent réc iter entre eux des psaumes, des hymnes, des canti-
Le premjer tex te de notre réflexjon est celui de la lettre aux Éphé- ques inspirés; chanter et célébrer le Seigneur de tout leur cœur. fis do i-
siens au cb. 5. Dans ce dernier, l' auteur exhorte les cbrétiens à se con- vent en tout moment et à tout propos élever leur prière de reconnais-
duire de manière digne des enfants de D ieu. Pour parvenir à une te lle sance à Dieu le Père, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ (cf. Ep
vie, ils doivent imiter Dieu, leur Père. Cependant, l' imitation de Dieu 5, 19-20).
n' est possible que par le canal du C hrist, qui a révélé aux hommes !' a- Le deuxième texte, qui nous permet de bien saisir la conduite chrétienne
gir divin , en vivant lui-même dans l 'amour pour l ' hwnanité entière. Cet en Lien avec le Christ et en vue de sa g loire d 'où découle l'action de grâce
amour du Christ s 'est manifesté à travers les actes concrets durant sa à Dieu (cf Rm 14,6), se trouve dans la lettre aux Colossiens (cf. Col 3,5-
v ie terrestre. et notamment à travers l' offrande de sa vie pour le sa lut de
l' homme déchu (cf. Ep 5, 1-2). A la suite du Christ, le croyant doit écar- 2 l Pour une distinction déLaillée entre Règne ou Royaume de Dieu et du Christ,
ter de sa vie le comportement indigne d ' un disc iple du Christ, tel que la nous renvoyons dans ce chapitre au poim l.J Usage paulinjcn du ternie pao LÀl'LIX /
«règne».
224 PARTLE Il : LE SEIGNEUR EST PUISSANT Cii V I : RÉFLEX ION T HÉOLOG IQUE DERM 14.1 - 225

17). En effet, les chrétiens sont invités à rendre grâce à Dieu dans tout ce les reçues dans le Cbri~t, Paul, à son tour, bénit Dieu. C'est ce qu ' il
qu ' ils font ou disent au nom du Seignew· Jésus (Col 3, 17). Cette exhorta- relate dans la lettre aux Ephésiens (cf. 1,3).
tion paulinienne rejoint celle de Rm 14,6 où les chrétien sont invités à En lien avec les chrétiens de Philippes qui ont pris part à l' Évangi le
glorifier Dieu à cause de leur comportement en rapport avec le Christ, dès le début jusqu'au moment où Paul écrivait, !'Apôtre rend grâce à
Seigneur et pour son honneur. Le texte paulinien présente les directives Dieu chaque fo is qu' il fait mémoire des Philippiens (cf. Ph 1,3). En Col
pour une vie digne de celui qui appartient au Christ et qui veut lui rendre 1,3, l'action de grâce est rendue à Dieu et Père de leur Seigneur Jésus-
toute gloire. Tl s'agit exactement de la vie des croyants marquée par les Cbrist par Paul et ses compagnons lorsqu 'i ls pensent aux Colossiens.
principes chrétiens, étant donné qu'ils ont été dépouillés du vieil homme et L'action de reconnaissance est également rendue à Dieu pour les Thes-
ont désormais revêtu l' homme nouveau : le Christ. Par conséquent, les at- saloniciens par Paul et compagnie (cf. 1Th 1,2). En 2Th 1,3, ils remer-
titudes d'autrefois avant leur adhésion au Christ, telles que colère. empor- cient Dieu pour le progrès de la foi des Tbessaloniciens et la croissance
tement, malices, outrage , etc. doivent être bannies de leur conduite. Par de l'amour de chacun envers les autres. Dans ta lettre à Philémon, PauJ
contre, les attitudes de charité, de tendresse, de compassion, de bienveil- rend incessamment grâce à Dieu en faisant mémoire de Philémon dans
lance, d'humilité, de douceur. de patience, de pardon mutuel doivent tra- ses prières. Cette gratitude à Dieu est due à la charité et à la foi de Phi-
duire le comportement des Chrétiens. Ce dernier manifeste le lien qui lémon envers tous (cf. Phm 4).
existe entre les chrétiens et leur Seigneur, Jésus-Christ. Néanmoins, PauJ En syntonie avec l'exhortation de Paul aux croyants de Rome à être
ne se contente pas de recommander une conduite à ses fidèles vis-à-vis de reconnaissants envers Dieu par leur comportement, qui est eo lien avec
Di.eu. En bon pédagogue, il leur suggère un modèle à imiter : sa propre leur Seigneur, le Christ, et en vue de lui rendre gloire, Luc rapporte
conduite à Juj (cf. 1Co 11 , 1). dans les Actes des Apôtres des réc!ts qui présentent des moments d'ac-
tion de grâce des chréti ens de l'Eglise primitive. Nous en exposons
3.3 Paul, modèle de/ 'action de grâce ci Dieu quelques cas à titre illustratif. En Ac 2,42-47, la louange est rendue à
Paul lui-même donne, de fait, l'exemp le de ses exhortations à la lu- Dieu de la part des chrétiens pour tout ce qu ' ils vivaient et qui élait
mière de son expérience personnelle, et de celle de ses communautés. fruit de la grâce de Dieu en Jésus-Christ.
Ses lettres. d'ailleurs, présentent un tableau significatif des actions de Un autre moment est celui qui présente la reconnaissance de l' im-
grâce rendues à Dieu22 . Notons que, en plus des actions de reconnais- potent guéri par Pierre au nom de Jésus le Nazôréen (cf. Ac 3,1-10).
sance à l'égard de Dieu que l'on trouve dans les corps des lettres pauli- Certes, l'acte de guérison accompli e par Pierre montre bien que I' A-
niennes, nous allons nous li miter à ne mettre en évidence que celles ex- pôtre a agi en relation avec son Seigneur, le Christ et pour lui rendre
primées au début et la fin de la plupart de ses lettres. Dans la lettre aux gloire. En Ac 4,23-3 1, nous avons la prière des Apôtres élevée vers
Romains. Paul remercie Dieu par Jésus-Christ au sujel des croyants, à Dieu au moment de la persécution. A travers cette prière, ils expri-
cause de leur fo i qui est connue par tous (cf. Rm 1,8). Il conclul son maient leur gratitude envers Dieu, le Créateur de tout ce qu 'existe, qui
écrit par une formule de gloire. En effet. Paul glorifie Dieu. le seul sage, a rendu à la liberté les apôtres Pierre et Jean devant le Sanhédrin. Nous
par Jésus-Christ (cf. Rm 16,27). La première lettre aux Corinthiens avons également la louange de Paul et Silas qui sont jetés en prison à
présente le remerciement de J' Apôtre pour la grâce de Dieu qui leur a Philippe. Nous pouvons dire que les apôtres chantaient. les louanges de
été accordée en Jésus-Christ (cf. 1Co 1,4). Au début de la deuxième Dieu, du fait qu'ils avaient la certitude que Dieu interv.iendrait en leur
épitre aux Corinthiens, il bénit Dieu, le Père des miséricordes et le Dieu fa veur (cf. Ac 16,25-40). Le moins qu'on puisse dire c'est que tous ces
de toute consolation à cause de la consolation qu' il lui offre, ainsi qu'à événements qui ont conduit à rendre grâce à Dieu ont été le fruit de la
ses compagnons dans toute 1.eur tribul ation. Il s'agit naturell ement des relation des chrétiens avec leur Seigneur et ava ient pour finalité de
rribulations qu ' il vivent dans leur agir chrétien et en vue de la gloire de l' honorer.
leur Seigneur, le Christ (cf. 2Co 1,3). Suite aux bénédictions spirituel- En omme, la réflexion sur la dimension théo logique dégagée en Rm
14,6 nous révèle la relation intrinsèque qui existe entre Dieu et le cro-
12 Voir aussi o. G UTHRIE R.P. M ARTIN, «God», DPL, 354.
yant par Jésus-Christ. Elle nous apprend aussi le sens de la prière d'ac-
226 PA RTIE Il : LE SEIGNEUR EST PU ISSANT

tion de grâce comme réponse de l'homme à Dieu pour la générosité


dont il est toujours bénéficiaire de la part du Père par le biais du Fils.
Notons également que la recommandation de Paul à l' action de grâce à
Dieu suit l'attitude de gratitude de Jésus à l'égard de son Père. Nous
pensons particulièrement à la j oie dont il tressaillit en apprenant le suc-
cès missionnaire de ses apôtres. Cette joie le poussa nature llement à
bénir Dieu pour leur avoi r fa it don de la révélation des choses cachées
aux sages et aux intelligents (Mt l l.25-27; Le 10,2 1-22).

TROISIÈME PARTIE
CONCLUSION
Cl IA PITRE VU

Conclusion

Nous voic i arri vée au terme de nos investigations sur le thème de


!' agir puissant du Christ parmi les chrétiens. Les textes 2Co 13, l-4 et
Rm 14, 1-9 nous ont servi de fil conducteur. Certes, ce chapitre conclu-
sif constitue le point d'aboutissement de nos recherches. Cependant, les
considérations que nous y développons n'ont nullement la prétention
d 'épuiser les différentes possibilités de compréhens ion de cette pro-
blématique, telle qu 'elle se pose dans l'ensemble du corpus paulinien.
Ceci est d' autant plus que ce dernier est composé de plusieurs lettres.
Ainsi, il nous a semblé une entreprise trop audacieuse, dans les limites
d ' un travail de thèse que de vouloir étudier ce sujet par rapport à toutes
les épîtres de Paul. Aussi avons-nous procédé par un travail sélectif des
textes. Ainsi, nous avons choisi ceux qu i nous ont paru les plus proches
de notre compréhension de la problématique.
Nous avons articulé la dissertation en trois parties. Les deux premiè-
res sont centrées sur l'examen de chaque péricope. Il a été question
d' une ana lyse de son contexte socio-historique pour aboutir à une ré-
flexion théo logique sur les questions suscitées par l'exégèse des textes
examinés. La troisième et dernière section constitue la conclusion géné-
rale de notre enquête. Elle a pour obj et de comparer les résultats obte-
nus dans les deux premières parties, et d' offrir de façon synthétique une
perspective théologique. Cette dernière se présente comme le message
évangélique dégagé dans les textes abordés : 2Co 13,1-4 et Rm 14,1-9.
Nous présenterons également une tentative d 'actual isation du message
paulinien sur l'agir puissant du Christ dans le contexte spécifique de la
communauté ecclésiale du Congo.
--
230 L' AOIR PUISSANT DU CHRI ST PARMl LES CHRÉTIENS CONCLUSION 231

1. L'exposé comparatif moins l'analyse faite de ces t,extes montre que cet accueil n' allait pas de
soi. Les destinataires de cet Evangile ont éprouvé des difficu ltés à com-
1.1 caractère ad hoc de la lettre
prendre !' agir paradoxa l du Christ.
1.1.l Les fondations des églises de Corintbe et de Rome
Le travail d'investigation mené à ce suj et nous permet d'affirmer que 1.1.2 La vie au sein des communautés de Corinthe et de Rome
les églises de Corintbe et de Rome ont été fo ndées à partir de circons- et leur rapport avec Paul
tances et par des personnes différentes. Nous pouvons dire, avec plus La relation qui existait entre Pau l et les chrétiens, destinataires de ces
de probabilité, que l'église de Corinthe fut l' œuvre de Paul lui-même. écrits était différente d' une communauté à une autre. Au suj et de la
Elle a eu lieu lors de la première visite de l' Apôtre dans la cité autour communauté de Corinthe, il existait un lien de paternité, en ce sens que
des années 50/51 ap. J.-C. Par contre, il est difficile de détenniner la l'Apôtre en était le fondateur. Par contre, Je rapport avec la communau-
date de fondation de la communauté de Rome. Le moins qu ' on puisse té de Rome était un rapport normal entre un pasteur et les croyants en
dire, c'est que cette communauté existait déjà bien avant la rédaction de Christ. Bien que les problèmes qui se posai~nt dans les deux entités fus-
l' épître aux Romains par Paul (Rrn L5 ,23). Elle a été fondée par les sent au niveau de la comprébension de l' Evangile; cependant chaque
croyants de la ci té même. Ceux-ci. étaient de Juifs résidants à Rome qui communauté le vivait différemment. Alors qu 'à Corinthe, on note un
avaient cru en Christ, probablement lors d ' un pèlerinage ou d' un vo- climat polémique entre le fondateur et ses convertis, à Rome, par contre,
yage d'affaires en Palestine. li s'agirait des couples Andronicus et Ju- le conflit s'observe entre les membres eux-mêmes. Dans les deux situa-
nias (Rm 16,7) ou Priscille et Aquila (Rm 16,3-4). De retour à Rome, tions, Paul proposa, par le biais de ses écrits, des directives à suivre en
ils avaient diffusé la Bonne Nouvelle du Salut en Jésus-Christ dans les vue de ramener les croyants sur la bonne voie: celle de :l' unité et de la
synagogues de Rome. concorde voulue par Jésus-Christ (cf. Jn 17,21-23).
Les membres de ces deux communautés étaient d'origine juive et En effet, les membres de la communauté de Corinthe semblaient a-
païenne. Ceux d'origi ne païenne : les Gentils y représentaient un grand voir bien compris le message de l'évangi le annoncé par Paul. à en
groupe, et étaient pour la plupart, en particulier ceux de Rome, des croire l'enthousiasme dont ils faisaient preuve. C'est pourquoi !'Apôtre
sympathisants du judaïsme qui fréquentaient les synagogues. Par consé- n'aurait peut-être pas pensé à un dérapage dans la vie pratique de ses
quent, iJ s avaient une certaine connaissance des coutumes juives, parti- fils dans la foi et surtout dans leur rapport avec lui. Ainsi, devant les in-
culièrement celle de la loi au sujet du sabbat, de la circoncision et des cohérences qu ' ils ont manjfestées après son départ de Corintbe, Paul
règles alimentaires. Bien qu'ils aient eu des origines confessionnelles leur a écrit pour les aider à retrouver la Vérité évangélique du Christ.
différentes, ils avaient cependant en commun la connaissance du ju- Le problème de la communauté se présentait, en fait, à deux niveaux:
daïsme. Quant à leur niveau de vie soc iale, ils étaient en majorité de la d'une part, la difficulté qu'éprouvaien~ certains membres de la commu-
basse classe sociale. C'est d 'ailleurs un fait qui se comprend bien, étant nauté à incarner les exigences de l'Evangile dans leur vie pratique;
donné que, dans l'empire romain, la société était uniquement composée d 'autre part, le conflit concernant Paul lui-même, en tant qu' apôtre cré-
de deux groupes sociaux : d' une minorité de riches et d' une majorité de dib le du Christ.
pauvres!. Toutefois, il y avait parmi les croyants corintbiens et romains Quanl à la communauté de Rome, Paul n'a pas eu explicitement de
des gens d' un baut njveau soc ial. Tout compte fait, l' on est porté â problèmes avec elle du fait qu ' il ne la connaissait pas personnellement.
croire qu 'étant donné leurs origines modestes, ces membres de deux li a certes entendu parler d 'elle à cause de la foi de ses membres en
communautés étaient plus djsposés à accueillir la Bom1e Nouvelle de Christ (cf. Rrn 1,8). n envisagea de la visiter lors de son voyage mis-
Jésus-Christ proclamée par Paul, notamment le message paradoxal du sionnaire en Espagne. La déc ision de l' Apôtre à écrire aux croyants de
Christ, à la fois, faible et puissant (2Co 13, 1-4 et Rrn 14, 1-9). Néan- cette église fut motivée, entre autres, par une situation concrète qui mi-
nait la vie conununautaire. Elle concernait en particulier les comporte-
1 Dans ce travail cf. le point 1.3 Les membres de 1'église de Corinthe et leur posi- ments des membres.
tion sociale.
232 L' AG 1R PU ISSANT DU CHRJST PARMl LES CHRÉTIENS CONCLUSION 233

Concernant le moment historique correspond à la rédaction de 2Co et que. Concernant les preuves intrinsèques, il est question de l'ethos, du
de Rm. les deux correspondances ont pratiquement été rédigées à la pathos et du logos. Etant donné que, dans cette lettre polémique, Pau l
même période. La deuxième lettre aux Corintbjens erait écrite vers les visait à affronter ses dénigreurs en vue de les éloigner des Cori nthiens
années 55 ou 56 et 56 ou 57 ap. J.-C. en Macédoine et ce lle aux Ro- et récupérer ai nsi son e time apostolique auprès de ses convertis, il a
mains autour des années 56 ou 57 ap. J.-C à Corinthe. par conséquent employé un style défensif. Ceci justifie naturell emen t
l' usage par !'Apôtre de l'ethos et du pathos. Car il a dû, d ' une part. res-
1. 1.3 les lettres aux Corinthiens et aux Romains taurer son ethos, c'e t-à-dire l'aspect moral de sa vie. Il a montré qu 'il
Les deux écrits représentent des épîtres authentiques de l'apôtre Pa ul. se trouvait bien dans la vérité et que ses opposants étaient, eux, dans
Cependant, Les positions des biblistes sont partagées au sujet de la l'erreur. D' autre part, l'apôtre des nations a suscité le pathos des Corin-
question de leur unité. Certains reconnaissent leur intégra lité. D'autres, thiens en sollicitant leur émoti on par son ton pathétique. Son objectif
par contre, affirment leur caractère compos ite. éta it d'amener les Corinthiens à le défendre et à rejeter des insinuations
A propos de la deuxième épître aux Corinth iens, bon nombre des caJomn ieuse de e adversajre . En ce qui concerne le logos, cette
spéc ialistes soutiennent qu 'elle comprend plusieurs missives de !' A- preuve rhétorique qui pcnnet à l'orateur d 'employer des arguments dé-
pôtre. La fo rme acruelle serait par conséquent le résultat du travail d 'as- ductifs en partant des exemples, est absente dans la lettre polémique.
semblage d'un scribe. Dans ce travail, nous partageons cette hypothèse Quant aux preuves extrinsèques de la rhétorique, on trouve seule-
de la majorité. A leur suite, nous affirmons qu ' il y a deux lettres origi- ment deux ci tat ions implicites de I' AT (Jr 9,22-23 en 2Co 10, 17; Dt
nairement séparées, regroupées e n 2Co. TI s'agit exactement des lettres 19, 15 en 2Co 13, l b) et une allusion (Gn 3,4. 13 en 2Co 11,3). Notons
dites «lettre de réconciliation» (2Co 1-9) et «lettre polémique» (2Co que dans la péricope analysée 13. l-4. nous avons les deux preuves. La
10-13)2. Bien que le vocabulaire soit identique dans ces deux écrits, ce- preuve intrinsèque est représentée par l'ethos et le pathos et celle ex-
pendant l' unité interne de chaque lettre est évidente. Elle est manifeste trinsèque par la citation impl icite de Dt 19, 15 en 2Co 13, 1b.
à travers, notamment Je ton. La façon d 'exprimer de Pau l est ré fléchi Dans la lettre aux Romain , Paul étoffe son discours en recourant éga-
dans les ch. 1- 9. Dans les ch. 10-13, son expression est cri tique, agres- lement à I'inventio ou à la preuve. Nous y trouvons les deux types de
sive. voire violente. preuve : intrinsèque et extrinsèque. Compte tenu du genre démonstratif de
En ce qu i concerne la lettre aux Romains. son unité est attestée par la la lettre aux Romains, le preuve intrinsèques employées ne cherchent ni
majorité. Elle est mise en évidence notamment à travers l'application à rétablir l'ethos de l'auteur, ni à susciter le pathos des auditeurs. Elles
de la méthode rhétorique. Celle-ci permet de percevoir l' harmonie de visent plutôt à montrer, voire expliquer une réalité, en l'occurrence la
l'argumentation de l'épître. Bonne Nouvelle du Christ. C'est pourquoi Paul utilise un style posé à tra-
vers la diatribe, le midrash, les enthymèmes formels et les syllogismes, etc.
b) Jnventio ou preuve Signalons que la diatribe sert à améliorer l'ethos des audüeurs3; le midrash
est une sorte d 'argumentation jujve qui sert à expliquer et interpréter un
L ' i11ve11tio ou preuve représente une des techniques rhétoriques que texte par d'autres textes4 • Les enthymèmes et le syllogisme sont au niveau
l'auteur utilise pour donner de L'ampleur, voire de l'importance à son de la fo rme des arguments. Les enthymèmes comprennent une prémisse
discours. Cette méthode a pour but de convaincre et émouvoir l 'audi- majeure, une mineure et une conclusion et les syllogismes trois proposi-
toire. Elle est de deux types, à savoi r les preuves de types intrinsèques tions, dont deux prémisses et une conclus ion5 . Tl y a en Rm 14, 1-9 le
et de types extrinsèques. Paul a dû y recourir dans ses deux écrits. s·a- preuves intrinsèques en forme de syllogisme, notamment aux w. 7-9, et la
gissant de la lettre dite polémique (2Co 10- 13) - dans laquelle se situe
le passage qui fait l'objet de la première partie de notre travai l - elle 3 Cf. G.L. KUSTAS <<Diatribe>>, 7- 11 ; R. JEWETr. Romans, 25.
se caractérise par une prédominance des preuves de la méthode rhétori- 4
Cf. R. J EWETI. Romans. 27. Voir aussi W.R. STEGNER, «Romans 9,6-29 Midrasll».
37-52; M. GERTNl:.R, «Midrashim», 267-292; G. PORTON. <<Dcfining Midrash». 55-92.
5 Cf. H. LA USBERG, llandbuch, 37 1: J. MARTI'I, Anrike Rhetorik. 242-243:
2 Dans ce travai l cf. le point 2.2 Caractère composite. J.O. MOORES, Wrestlmg wirh Rarionality in Pa11/. 33-37; R. JEWETr. Romans, 28.
234 L'AGLR PUISSANT DU CHRIST PARMI LES CHRÉTl ENS CONCLUSION 235

diatribe au v. 4. Concernant Les preuves extrinsèques, la lettre aux Ro- sente, dans les grandes lignes, la structure de cet écrit de la mani ère sui-
mains constitue un cas unique panni les lettres de Paul de par l'abondance vante : exordium général : 10,J-6; un corpus: 10,7- 12,18 et une con-
des citations scripturaires. Ces références bibliques constituent un rôle cen- clusion : 12, 19- 13.13. Sur les traces du bibliste Jewett, la péricopc Rrn
tral dans l'argumentation de la lettre. On y trouve aussi d' autres genres de 14, 1-9 est placée dans la quatrième preuve, laquelle comprend la sec-
preuves extrinsèques, telles que les citations du credo de premiers chré- tion des ch. 12,1- 15, 13. Dans cette section, Paul présente les implica-
tiens, des hymnes, des bénédictions, des doxologies. Dans }'extrait textuel tions parénétiques de la thèse principale eo 1, 16-17 en donnant les di-
de notre travail, nous identifions La formule du credo de l'Eglise primitive rectives pour vivre dans la justice de Dieu. Nous représentons ici en
aux vv. 8-9. grandes lignes la disposilio proposée par le bibliste américain : confir-
Par ailleurs. notons que, comme toute méthode, l'approche rhétori- matio 1, 18-4,25, exomatio (élaboration) et ratiocinatio (raisonnement)
que offre naturellement des avantages non négli geables pour une meil- 5, 1- 8,39, cotnparatio (comparaison) 9- 1J, exhortatio (exhortation )
leure compréhension des écrits de l' Apôtre, en l'occurrence de la deu- 12, 1- 15, 13.
xième lettre aux Corinthiens et de la lettre aux Romains. Car ell e au-
torise à sa isir la cohérence de l'argumentation de Paul et également les 1.1.5Lestextcsdc2Co13, l-4etRm 14, 1.-9
rapports entre les différents arguments de chaque partie de la lettre. Le dernier volet consacré aux contextes de 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9
Toutefois, il est important de savoir que le procédé rhétorique ne cons- s'est conclu par l' étude de la critique tcxtueUe des extrai ts en examen. 11 a
titue pas l' unique procédé pow· une meilleure exégèse des épîtres pau- été question d'étudier des problèmes liés aux textes de ces extraits pour
liniennes. Elle doit être utilisée en rapport avec d'a utres approches in- savoir s' ils correspondent à la fonne originale. Ainsi, grâce aux manuscrits
terprétatives pour éviter de rester simplement à un ni veau descriptif et disponibles, nous avons pu soit confirmer la correspondance du texte à sa
stylistique. forme originale soit le reconstruire afin qu ' il devienne plus proche de sa
forme originale. En effet, les deux textes de notre dissertation présentent
1. 1.4 Les structures des lertres aux Corinthiens et aux Romains
des difficultés relatives à leur forme originale. Cependant, la plupart de ces
Compte tenu de la méthode adoptée dans l'élaboration de cette thèse, difficultés ont déjà été résolues par les études faites à cc sujet par des exé-
il nous a été impossible de traiter de la question de la dispositio de la gètes, à l'exception d' une seule, présente en Rrn 14,5. Dans ce dernier, la
deuxième lettre aux Corinthiens et celle de Romains. Aussi, avons-nous présence de la conjonction yap est omise par plusieurs manuscrits. alors
seulement recensé les différente études faite à cc sujet de la part des que très peu des manuscrits attestent sa présence dans le texte. Vu la diffi-
biblistcs. Ceci nous a permis de connaître l'état actuel de la question et culté de prendre une décision, les spécialistes ont préféré le laisser dans le
d ' identifier l'emplacement des péricopes en examen, à savoi r 2Co 13, 1- texte, mais en le mettant entre parenthèse. Quant à nous, nous affirmons
4 et Rm 14,1-9. De ces études, nous n'avons pas manqué de prendre que sa présence ou son absence n'altère pas le sens du texte.
position en fa veur de tel ou tel exégète en raison de la plausibilité de
1.2 Les lectures attentives de 2Co 13.1-4 et Rm 14, l-9
son hypothèse par rapport aux autres. C'est ai nsi que, pour la deuxième
lettre aux Corinthi ens, nous avons souscrit à ! 'approche méthodologi- Dans cette partie, notre travai l s'est concentré sur une lecture attentive
que de Pitta et pour la lettre aux Romains à cell e de R. Jewett, pour des des extraits en examen 2Co 13. l-4 et Rm 14.1 -9. A travers cette lecture,
raisons que nous avons expliqu6es en son temps. nous avons sai i le message de Paul au sujet de !'agir puissant du Christ
Dans le sillage de Pitta, l'extrait 2Co 13, 1-4 se sirue dans la lettre po- parmi les chrétiens. Nous y sommes parvenue à travers une étude syntaxi-
lém ique (2Co 10- 13). exactement dans la conclusion finale où Paul que, sémantique et structureUe de chaque verset. Nous avons d'abord
reprend sa thè e principale (cf. 2, 17), notamment en 12, 19, pour récapi-
tuler tout cc qui a été dit tout le long de la lettre6 . Notre bibliste pré-
voyés de Dieu que. devant Dieu, nous parlons dans le Christ». Elle est repri e. du
moins dan les grandes lignes. en 2Co 12,19 : «Depuis longtemps, vou vous imagi-
6 La Lhè c principale de la lettre en 2Co 17 : «Nous ne sommes pas. en cfTet. com- nez que nous nous défendons devant vous. C'est devant Dieu. dan le Christ, que nous
me la plupart. qui frelatent la parole de Dieu: non. c'est en toute pureté. c'est en en- parlons. Et tout cela. bicn-:iimés. pour votre édification».
236 L"AGlR PUISSANT DU CHRIST PARMl LES CHRÉTI ENS CONCLUSION 237

cherché à comprendre la fo nction grammaticale des mots et leur sens dans avec des questions de nourri ture. li s'agit préc isément des membres di ts
chaque phrase. Cette première étape nous a permis de proposer une traduc- faibles et forts. Le groupe des fa ibles représente ceux qui ne mangent
tion littérale du texte grec. Ensuüe, à travers une étude structurelle, nous que des légumes à des jours bien déterminés. En revanche, le groupe
avons réussi à percevoir les Liens syntaxiques entre les différents mots et des forts est composé de ceux qui mangent tout n' importe quel jour.
phrases du texte. De cette compréhension des liens syntaxiques, iJ nous a L'apôtre Paul les invite à ne pas se juger mutuellement, étant donné
été faci le d'expliciter d'abord le contenu de chaque verset, ensuite de deux qu ' ils sont tous accueillis par Dieu le Père, et que leur état de foi, aussi
ou trois versets ayant une même unité de sens, et enfin de l'ensemble de la bien dans la faiblesse que dans la force, est en relation avec le Christ,
péricope. De cette façon, nous avons su identifier les différentes parties leur Seigneur et pour son honneur. D' ailleurs, leur Seigneur, dit Paul,
que comporte chaque extrait textuel. est puissant pour relever le membre faible qu i tombe. A travers les mo-
En 2Co 13,1-4, le texte forme deux parties, à savoir vv. 1-2 et 3-4. tivations théologique et christologique, I'Apôtre montre aux croyants
Ces deux parties sont principalement unies par la conjonction ÈTTEL de Rome qu' ils doivent abandonner toute tendance à se juger récipro-
(v. 3). Dans la première partie du texte (vv. 1-2), il y a l'annonce du quement. Toutefois, il les exhorte à avoir la conviction que leur agir,
troisième séjour de Paul dans .la communauté de Corinthe, de la finalité selon l'orientation de chacun, est vraiment conforme au Christ et pour
de ce séjour et du moyen pour rendre effectif cet objectif essenti el de son honneur. Dès lors qu ' ils ont cette pleine conviction, ils doi vent ren-
son séjour. Il s'agissait précisément pour l 'Apôtre de mettre tin, d' une dre grâce à Dieu. La troisième partie (vv. 7-9) présente le message de
part, à la situation dans laquelle certains membres de la communauté se Pau l relatif à !'agir et à la fina li té de cet agir des chrétiens et du Christ.
trouvaient en rapport à leur vie chrétienne, et d'autre part, au doute qui Dans les vv. 7-8, !' Apôtre proclame que le chrétien ne fai t rien pour lui-
plana it sur son apostolicité. Dans la résolution de ce problème. l' Apôtre même. Son action de vivre ou de mourir est toujours confonne à son
avertit ses convertis qu ' il ne sera pas clément en vers ceux qui mèoen1 Maître et a pour but de l' honorer, à cause de son appartenance au Maî-
une vie désordonnée. La deuxième partie de la péricope (vv. 3-4) ex- tre, le Christ (cf. vv. 7-8). Quant à l'agir du Chri st décrit au v. 9, il est
pose la rai son pour laquelle Paul adoptera une telle attitude. C'est à question de son agir à travers sa mort et son retour à la vie, qui a eu Lieu
cause de l' exigence de la part des Corinthiens de trouver une preuve at- dans le contexte d'appartena nce des chrétiens à lu i. Sa mort et son re-
testant que le Christ continue à leur parler par le biais de leur fon dateur. tour à la vie avaient pour fina lité le devenir Seigneur du Christ des
A travers des assertions paradoxales, I'Apôtre leur présente un signe morts et des vivants.
probant que c'est bel et bien le Chris1 qui parle en lu i. Ces assertions A partir de l'exégèse faite des textes 2Co 13, 1-4 et Rm 14,1-9, nous
paradoxales montrent la crncifixion du Chrisl dans la faib lesse et sa vie avons déduit trois thèmes, qui nous ont servi de fil conducteur dans la
en vertu de la puissance de Dieu. Elles évoq uent en plus la faiblesse des réflexion théologique élaborée dans le troisième et le sixième chapitre.
croyan ts en Christ, y compris Paul lui-même en Christ, leur espérance En 2Co 13, 1-4, il a été question de la dimension ccclésiologique, chri s-
en la vie avec le Christ au nom de la même puissance de Dieu. Ainsi, il tologico-tbéologique et anth ropo l ogi co-th ~o logiq u e. Dans le premier
s'est avéré que la preuve recherchée par les Corinthiens réside dans la aspect. nous avons réfléchi sur la vie de l'Eglise conformément à l'exi-
faiblesse aussi bien du Christ que des croyants, et dans l'action puis- gence du comportement chrétien dans la vie personnelle et communau-
sante de Dieu qui a redonné vie au Christ et qui donnera aussi la vie, à taire. Le second aspect se trouve dans le message de Paul au suj et de la
tous les croyants. Cette vie que Dieu donne est un fa it déjà accomp li crncifixion du Christ à cause de sa faiblesse et de sa vie à cause de la
pour le Christ, tandis qu 'elle est, pour les chrétiens, une réalité futu re. puissance de Dieu. Le troisième et dernier volet de la réflexion tbéoJo-
Les chrétiens espèrent que dans le Christ, ils obtiendront la vie éternelle gie du ch. 11I découle de l'affirmation de !'Apôtre relative à la faiblesse
à cause de la puissance de Dieu. de l' homme croyant en Christ et à son espérance avec le Christ à la vie
L'analyse détai llée en Rm 14.1-9 nous a amené à identifier trois par- à cause de la puissance de Dieu. En Rm 14,J-9. les trois thèmes sont
ties: vv. l -4; vv. 5-6 et vv. 7-9. Les deux premi ères parties (vv. 1-4 et des teneurs ecclésiologique, christologique et théologique. En rapport
5-6) rapportent l'ex hortation de !'Apôtre aux membres de la eom- avec le premier thème, notre réflexion s'est concentrée sur le sens d'ac-
munau1é selon leurs différentes orientations comportementales en li en cueil mutuel et du rôle d' un responsable de communauté. La réflexfon
238 L'AGlR PUI SSANT DU CHRIST PARM I LES CHRÉTIENS CONCLUSION 239

sur le second thème a consist é à développer l' action pui ssa nte du Cbrist, chrétiens, notamment les faibl es dans la fo i. De cette réfl exion é laborée
notamment envers les fa ibles dans la foi. Le troisième et dernier thème à partir des thèmes des pér.icopes en examen. nous pouvons dire que la
a serv.i à éluc ider l'action accueillante de Dieu à l' égard de tous les cro- puissance du Christ constitue une dimension importante dans la vie
yants et la reconnaissance qu'il reçoit d ' eux. chrétienne, voire une preuve de la présence du Chri st parmi ses fidèles.
L'étude sur les péricopes des deux lettres ont révélé un certain nombre Les Corinthiens, voulant avo ir la confirmation que le Chris t est bien
de similitudes et qu elques dissemblances. La similarité de ces textes présent dans les paroles de PauJ , cherchent un sig ne de la pui ssance du
(2Co 13,1-4 et Rm 14,1-9) se trouve dans le discours de l'Apôtre par C hrist dans la personne de 1'Apôtre. Par contre, pour mettre fin au ju-
rapport à la vie ecclésiale. Paul interpelle les chrétiens de la communauté gement à l'égard du faib le dans la fo i et ramener à l' unité communau-
de Corinthe et de Rome à un cbangement de comportement. Il s'agit ta ire, PauJ évoque également la puissance du Christ Seigneur qui sou-
d ' un changement comportemental des Corinthiens par rapport à la prati- lève Je fa ible. D e ce constat, nous pouvons affirmer que les di scours
que de leur vie chrétienne personnelle et aussi par rapport à leur attitude christo log iques dans les deux péricopes interviennent dans un contexte
v is-à-v is de Paul lui-même. Quant au ch an gement comportemental at- po lémique, mieux encore prob lématique. En 2Co 13, 1-4, le problème
tendu des Romains, il devait porter sur leur rapport les uns envers les du refus de reconnaître 1'autre dans la communauté se pose entre les
autres au sein de la communauté. Pour le message concernant les chré- chrétiens et leur pasteur; en Rm 14,1-9 entre les chrétiens eux-mêmes.
tiens de Corinthe, l'accent est plus mis sur l'exigence du comportement Signalons que da ns les deux textes est présent aussi le discours para-
cbrétien dans la vie de chaque membre et aussi. dans la vie communau- doxal de Paul en lien avec le Cbrist. En 2Co 13, 1-4 , il est bien explicite,
taire. S'agissant des chrétiens de Rome, il est surtout question de lorsque Paul parle de la crucifix ion du Christ et de sa vie el en Rm
l'accueil mutuel dans la communauté. Par contre, les deux passages dif- 14, 1-9, de la mort du Christ et de son retour à la vie. En 2Co 13, J-4, il
fèrent dans la façon dont Paul parle de la christologie et de la tbéologie. donne les causes de la mort du Christ et de sa vie : la mort à cause de la
La dissemblan ce entre ces deux passages se sirue à trois niveaux : par fai blesse et la vie à cause de la puissance de Dieu. E n Rm 14, 1-9, il ne
rapport à l'aspect christologique, antbropo logico-théologi.q ue et théolo- donne pas les ra i.sons de la mort et de la v ie du C hrist mais le Lieu ou le
gique. Premièrement, à propos de sa pensée christo.logique en 2Co contexte de la mort et de la vie du Chri st. Ce contexte est celui d ' appar-
13, 1-4 , elle est étro itement liée à l'aspect théologique, par contre en tenance des chréti ens au Christ. Par conséquent, l' on voit bien que le
Rm 14, 1-9, la christo logie et la théologie cons tituent deux discours sé- billôme fa iblesse et la puissance du Christ se retrouvent dans les deux
parés, même s'ils se rejo ignent au niveau du résultat final. Autrement passages mais exp rimés différemment : en 2Co 13, 1-4 : crucifixion-vie
dit, en 2Co 13, 1-4, répondant aux Corinthiens qui utilisaient l' aspect du C hrist; en Rm 14, 1-9 : mort et vie du Christ.
puissant du Christ pour le discréditer dans sa missio n d 'apôtre, Patù Deux ièmement, ! 'é lément qui marque la dissembl ance entre ces deux
affirme la crucifi xion du Christ à cause de sa fai blesse et de sa vie à passages se dégage de l'absence de l' aspect anthropologique en .Rm
cause de la puissance de Dieu (cf. v. 4a). Dans le passage de 2Co, Paul 14 , 1-9. Dans cet écrit, Paul expose uniqueme.nt la réalité de l' homme
oriente sa pensée christologique en mettant l'accent sur la mission du croyant cn tant que membre d 'une communauté des croyants, tandi s
Chris t : son assomption de la condition huma ine jusqu'à la mort à cause qu ' en 2Co 13, 1-4, il est question non seulement de l' bomme comme
de la fa iblesse et sa vie à cause de la pui ssance de Dieu. En lien avec la membre d ' une communauté croyante ma is encore de l' homme croyant
deux ième affinna tion sel.on laquelle les croyants et lui-même sont fai- en tant que cel.ui qui expér.imente, voire qui vit dans son corps une fai-
bles dans le Christ et vivront avec lui par l'effet touj ours de la puis- bl esse. Vo ilà pourquo i, nous avons désign é cet aspect sous le nom de
sance de Dieu (cf. v. 4 b), Paul doone aux Corinthiens la preuve de sa l 'anthropo logico-théologique.
mission aposto lique. En Rm 14, 1-9, la pensée christologique de Paul Troisièmement, la d ifférence entre les deux péricopes est manifeste par
in tervient face à l' attitude de refus mutuel qu i régnait dans la commu- rapport à la dimension théologiqu e. En 2Co 13,1-4, la dimension théologi-
nauté. L ' Apôtre affim 1e la puissance du Christ, le Seigneur, en tant que concerne l'action puissante et déterminante de Dieu sur Jésus-Christ et
qu ' il est capab le de soulever le fa ib le qui tombe. Il s'agir ici d' une mise sur 1.e s croyants en Christ. Dieu est celui qui redonne vie au Cluist et la
en évidence de la Se igneurie du Christ et de son im pact sur la v ie des donnera aussi aux croyants. Par contre, en Rm 14, l-9, la dimension théo-
240 L"AGIR PUISSANT DU CHRJST PARMJ LES CHRÉTIENS CONCLUSION 24 1

logique est mise en évidence à travers l'action accueillante de Dieu envers Au sujet de 2Co, comme nous l'avons exposé au premier chap.itre. le
tous les croyants indépendamment de leur comportement Dieu est celui contexte de sa rédaction, en particulier celui des ch. l 0- 13 fut un con-
qui a déjà accueilli cbaque membre de la communauté. Par conséquent, les texte problématique entre Paul et ses convertis. A travers sa correspon-
chrétiens, dans leur comportement conforme au Christ et en vue de dance, nous apprenons que l'apôtre a défendu la foi de ses fils qu ' il a
l'bonorer, doivent rendre grâce ou être reconnaissants à Dieu. engendrés dans le Christ (lCo 4, 15) et aussi sa mission apostolique. H
Par ailleurs, notons que le message de 2Cor 13, 1-4 pennet de souli- vou lait par là regagner la crédibi lité de sa miss ion en tant qu 'apôtre du
gner le lien de paternité entre Paul et les convertis de Corinthi ens - Christ et préserver la foi des membres de la communauté de Corinthe.
l'Apôtre leur parle comme à des fils (2Co 4,15)- et le climal polémi- Pour ce faire, Paul a présenté l'Évangile du Christ en plusieurs argu-
que qlù caractérise la deux ième épître aux Corinthiens. Par contre, le ments et cela sur un double registre: doctrinal et parénétique. Les thè-
message de Rm 14, J-9 montre un rapport nom1al entre un pasteur et les mes recueillis du texte 2Co 13, 1-4 appartiennent au registre doctrinal
croyants, et auss i le c limat tranquiUe de la Lettre aux Romains. Cette de l'argumentation de Paul. En effet, I' Apôtre invite les Corinthiens à
divers.ité d 'état d'esprit mise en évidence par ces deux péricopes nous un cbangement de comportement relatif à leur vie chrétienne. Ainsi,
amène à dire qu 'en 2Co, Paul est en train de défendre l'Évangile et en toujours dans la perspective apologétique, Paul utiLise l'argument de La
Rm de l'expLiquer. En effet, en 2Co 13, 1-4, Paul est déterminé à mettre faiblesse comme motif de son orgueil, car elle justifie et approuve son
fin aux conflits qui entravent la pratique de la Bonne NouveUe et la apostoli cité. Ceci parce qu'elle représente, pour lu i, le lieu de la mani-
reconnaissance de sa mission de la part de certa ins croyants. Tl annonce festation de la puissance de Dieu. Cette faiblesse est, bien entendue en
qu'il ne sera pas clément envers ceux qui se comportent indignement re lation avec le Christ.
selon l'enseignement du Christ (vv. 1-2). Aussi, pour répondre aux ob- Nous avons intitulé les trois thémes de la réflexion théo logique de la
jections contre sa mission d 'apôtre suscitées par uu.e conception erronée manière suivante : les exigences de la vie chrétienne, le rappo1t para-
des Corinthiens (v. 3), Paul présente la vérité de l'Evangile en montrant doxal de fa iblesse-puissance dans la vie du Christ et Je rapport para-
la bonne compréhension du Christ. Il parle du Christ crucifié par 1' effet doxal faiblesse-puissance dans la vie du chrétien. Ces trois thèmes cor-
de la fa iblesse et vivant par l'effet de la puissance de Dieu (v. 4a). Nous respondent précisément aux aspects ecclés io logique, christologico-
pouvons affirmer que 2Co est plus un écrit personnel que pastoral, en théologique et anthropologico-théo logiqu e. Dans l'aspect ecclésiologi-
tant qu' il concerne personnellement Paul et ses convertis. que, nous avons développé les exigences de la vie chrétienne à travers
Quant à la lettre aux Romains, la péricope Rm 14, 1-9 montre qu'on est trois réalités de la vie ecclésiale. Il s'agit du comportement chrétien
dans le genre démonstratif (épidictique), en ce sens que Paul est en train ambigu, du rôle du responsab le de communauté et des conséquences
d'expliquer l'Évangile. Il écrit en tant que Pasteur à une communauté en d'un comportement chrétien ambigu. Concernant le comportement
conflit entre ses membres. Il s'agit ici d' une lettre purement pastorale, chrétien, nous avons mis en évidence l'attitude ambivalente qui peut
d'autant plus que Paul leur écrit pour leur expliquer la vérité évangélique facilement s ' insinuer dans le comportement d'un chrétien, comme cc
et pour les inviter à la communion fraternelle. fut le cas de )'agir des croyants de Corintbe. Ces derniers, bien qu ' ils
aient accueilli avec ferveur l'Évangile du Christ, vivaient dans les dé-
2. Quelques Réflexions théologiques sordres, la jalousie, l.es animosités les di sputes, les calomnies, etc.
2. l Les apports dégagés des deux textes (2Co 12,20). En lien avec leur fondateur, ils sont parvenus à réfuter son
autorité apostolique. A propos du rôle d' un responsable de communau-
Nous voulons ici reprendre les apports qui ont été dégagés au cours de té, nous avons démontré, à partir du comportement exemplaire de l'a-
l'élaboration des réflexions théologiques des trois thèmes, résultants de la pôtre Pau l, relaté en 2Co 13, 1-4, ce que doit être l'attitude d' un respon-
lecture attentive des textes analysés: 2Co 13, 1-4 et Rm 14, J-9. Nous sable. Nous savons que Paul a connu beaucoup d'ennuis avec ses con-
avons essayé de comprendre ces trois thèmes dans le contexte de toute vertis, cependant, il n'a pas cessé de les exhorter tant par des corre-
l'argumentation aussi bien de la deuxième lettre aux Corinthiens que celle spondances que par des visites afin qu' ils retrouvent la bonne voie.
de la lettre aux Romains. Quant aux conséquences d' un comportement chrétien ambigu, notre
242 L'AG IR PUISSANT DU CHR1ST PARMI LES CHRÉTIENS CONCLUSION 243

réflex ion est partie de l'attitude prétentieuse des Corinthiens que !'A- à cause de la faib lesse en 2Co l 3,4a est le résultat d ' un acte volontfilre
pôtre dénonce en 2Co J 3,3. Les Corinthiens cherchent une preuv e pour du Christ, en ce sens qu ' il ne l'a pas subie mais l'a assumé à travers son
admettre que le Christ continue à parler en la personne de leur fo nda- attitude humble et obéissante. En retour, il a été récompensé par Dieu,
teur. Toutefois, ils veulent seulement trouver un Christ quj n'est pas qui lui a redonné la vie (2Co l 3,4a) et l ' bonneur en recevant le nom du
fa ible majs puissant. Ce faisant, les Corinthiens ont déformé le portrait Seigneur (Pb 2.6-1 l ). Bien que nous ayons compri s le processus de
du Chri st, car ils n'ont mis en évidence qu' un seul aspect, celui de la l' incarnation du Christ, les modalités de son agir humain c l les consé-
puissance et ont oublié celui de la faib lesse. De cette attitude des Corin- quences de son incarnation à travers ces deux textes, nous avons cons-
thiens, nous avons déduit les conséquences qui découlent d' un compor- taté, au sein de la théologie paulinienne telle que développée dans ces
tement chrétien ambigu. li s'agit d' un manque de sincérité, de vérité, péricopes. l'absence d' une dimension importante de la christologie pau-
mieux encore de cohérence dans la vie chrétienne. Une telle vie conduit linienne, à savoir la dimension salvi fique. Ce manque se justifie bien
nécessairement à valoriser seulement certains aspects de l'enseigne- par l'obj ecti f que visait !'Apôtre dans ces textes. En 2Co l 3.4a et Ph
ment du Christ - du fai t qu ' ils correspondent à leur désir profond - et 2,6- 11 , Paul entend mettre en évidence non pas l'aspect sa lvifique de la
à en négli ger d' autres. Par conséquent, on notera cbez les chréti ens un mission du Christ mais plutôt son aspect théologique. Autrement dit, il
comportement superfic iel el un attrai t aux apparences en vue d' une cer- ne s'agit pas, pow· Paul, de parler de la fonction de l'abaissement ou de
taine gloire. l'incarnation du Christ mais de l'action puissante et déterminante de
Dans la dimension christologico-tbéologiquc, nous avons réfléchi sur Dieu en Chri st. n s'agit précisément du Christ en son rapport à Dieu7.
Je rapport paradoxa l fa iblesse-pujssance dans la vie du Christ. Nous Nous notons toutefois une différence importante entre les deux textes.
l'avons articulé suivant deux réalités intrinsèques à la vie du Christ en Elle se situe au niveau de la finalité de chaque texte en lien avec ses
tant qu'homme. 11 a été question du processus de son abaissement et de destinataires. En Ph 2,6-1 1, Paul offre aux Phil ippiens le Christ comme
la dimension concrète de sa nature humai ne. Dans la première réalité. modèle à sui vre. Par contre, en 2Co l 3,4a. il le présente comme preuve
nous avons démontré l'assertion de Paul selon laquell e le Christ a été de la crédib ilité de sa mi ssion apostolique que les chrétiens corinthiens
crucifié à cause de la faiblesse et vi.t à cause de la puissance de Dieu cherchent en lui. Dans la deux ième réa lité intrinsèque à la vie du Christ
(2Co l 3,4a). Nous avons, pour ce faire, voulu comprendre à quoi con- en tant qu ' homrne, notre rénex ion s'est concentrée sur la dimension
siste cette faib lesse qui a été la rai son déterminante de La crucifi xion du concrète de la nature humaine du Christ. Nous ! 'avons développé en
Christ filnsi que de sa mort. Cette préoccupation a porté notre attention deux points, à savoir le rapport de Jésus envers Dieu et envers les
au mystère de l'incarnation: moment où le verbe de Dieu s'est fa it hommes. Au premier point, il a été questi on du rapport de Jésus-Christ
chair et est venu habiter parmi les hommes (cf. Jn 1,14). envers Dieu. Nous avons montré que le rapport de Jésus envers Dieu,
Grâce au tex te de Ph 2.6-1 1, nous comprenons que l' incarnation du son Père était marq ué par le signe de la dépendance totale. Jésus vivait
Christ a consisté en l' action du Christ de se dépouiller lui-même de sa cette dépendance dans l' hum ilité et obéissance. li était toujours en com-
condition ru vinc pour assumer la condition d'esclave. Le Fils de Dieu munion avec Dieu, notamment dans des moments importants de la ré-
est, de fa it, devenu semblable à l' homme et reconnu comme tel par son alisation de sa mission rédemptrice parmi les hommes. Cette commu-
comportement. Cependant, son agir, en tant qu' homme, était marqué nion s 'est exprimée part iculièrement dans la prière (c f. Mt 14, 19; Mc
par un sens d' humilité et d'obéissance à ! 'égard de Dieu. Par aill eurs, 14,32-39; Le 6, 12). Au deuxième point, nous avons ex posé le rappo1t
même si par son incarnati on, Je Christ a connu la mort, pourtant il a été de Jésus avec les hommes. En effet. Jésus a été envoyé au monde par
exa lté par Dieu de qui il a reçu un nom qui surpasse tous les noms. De Dieu pou r sauver les hom mes de leur état de péché. L'accomplissemen t
cette compréhension de l'abfilssement du Christ, nous avons noté deux de sa mission est passé par des signes bienveillan ts et miraculeux réali-
réalités significatives qui mettent en évidence la fa iblesse du Christ. Il sé par Jésus. Cependant. il a rencontré beaucoup de ré istance de la
est question de la réalité ontologique et mora le. La réalité ontologique
manifeste ! 'être-homme du Christ et celle morale les moda lités de son 7 c·csl cc
agir comme homme. A la lumj ère de Ph 2,6-1 1, la cruci fi xion du Christ que J. . Aleui qualifie de Lhéologisation progrci.sivc de la christologie.
Cf. fo., «Théologie paulienne». DCT. 868-869. -
242 L'AG IR PUISSANT DU CHRJST PARMI LES CHRÉTIENS CONCLUSION 243

réflex ion est partie de l'attitude prétentieuse des Corinthiens que !'A- à cause de la faiblesse en 2Co l 3,4a est le résultat d' un acte volontaire
pôtre dénonce en 2Co 13,3. Les Corinthiens cherchent une preuve pour du Christ, en ce sens qu ' il ne l'a pas subie mais l'a assumé à travers son
admettre que le Chri st continue à parler en la personne de leur fonda- attitude humble et obéissance. En retour, il a été récompensé par Dieu,
teur. Toutefo is, ils veulent seulement trou ver un Christ qui n'est pas qui lui a redonné la vie (2Co 13,4a) et ! ' honneur en recevant le nom du
faible mais puissant. Ce faisant, les Corinthiens ont déformé le portrait Seigneur (Ph 2,6-11 ). Bien que nous ayons compris le processus de
du Christ. car ils n'ont mis en évidence qu ' un seul aspect, celui de la l' incarnation du Christ, les modalités de son agi r humain et les consé-
puissance et ont oublié celui de la faiblesse. De cette attitude des Corin- quences de son incarnation à travers ces deux textes. nous avons cons-
thiens, nous avons déduit les conséquences qui découlent d' un compor- taté, au sein de la théologie pauli nienne teUe que développée dans ces
tement chrétien ambigu. li s'agit d'un manque de sincérité, de vérité. péricopes, l'absence d' une dimension importante de la christologie pau-
mieux encore de cohérence dans la vie chrétienne. Une telle vie conduit linienne, à savoir la dimension salvifique. Ce manque se justifie bien
nécessairement à va loriser seulement certains aspects de l'enseigne- par l'objectif que visai t I' Apôtre dans ces textes. En 2Co l 3,4a et Pb
ment du Christ - du fait qu' ils correspondent à leur désir pro fond - et 2,6-1 1, Paul entend mettre en évidence non pas l'aspect salvifique de la
à en négliger d'autres. Par conséquent, on notera chez les chrétiens un mission du Christ mais plutôt son aspect théo logique. Autrement dit, iJ
comportement superficiel et un attrait aux apparences en vue d' une cer- ne s'agit pas, pour Paul, de parler de la fonction de l'abaissement ou de
taine gloire. ! ' incarnation du Christ mais de l'action puissante cl déterminante de
Dans la dimension christologico-théo logique, nous avons réfléchi sur Dieu en Christ. Il s'agit précisément du Christ en son rapport à Dieu7.
Le rapport paradoxal faiblesse-puissance dans la vie du Christ. Nous Nous notons toutefois une différence importante entre les deux textes.
l'avons articulé uivant deux réalités intrinsèques à la vie du Christ en Elle se situe au niveau de la finalité de chaque texte en lien avec ses
tant qu ' bomme. li a été question du processus de son abaissement et de destinataires. En Ph 2,6- 11, Paul offre aux Philippiens le Christ comme
la dimension concrète de sa nature humaine. Dans la première réalité, modèle à suivre. Par contre, ca 2Co 13,4a, il le présente comme preuve
nous avons démontré l'assertion de Paul selon laquelle le Christ a été de la crédibilité de sa mission apostol ique que les chréti ens corinthiens
crucifié à cause de la faiblesse et vit à cause de la puissance de Dieu cherchent en ILti. Dans la deuxième réali té intrinsèque à la v.ie du Christ
(2Co l 3,4a). Nous avons, pour ce faire, voulu comprendre à quoi con- en tant qu ' homrne, notre réflexion s'est concentrée sur la dimension
siste cette faiblesse qui a été la raison déterminante de la crucifixion du concrète de la nature humaine du Christ. Nous l'avons développé en
Christ ainsi que de sa mort. Cette préoccupation a porté notre attention deux points. à savoir le rappo11 de Jésus envers Dieu et envers les
au mystère de l' inca rnation : moment où le verbe de Dieu s'est fai t hommes. Au premier point, il a été question du rapport de Jésus-Christ
chair et est venu habiter parmi les hommes (cf. Jn 1. 14). envers Dieu. Nous avons montré que le rapport de Jésus envers Dieu,
Grâce au texte de Ph 2.6- 1l , nous comprenons que l' incarnation du son Père était marqué par le signe de la dépendance totale. Jésus vivait
Christ a consisté en l' action du Christ de se dépouiller lui-même de sa cette dépendance dans l' humilité et obéissance. Il était toujours en com-
condition divine pour assumer la condition d'esclave. Le Fils de Dieu munion avec Dieu. notamment dans des moments importants de la ré-
est, de fait, devenu semblable à l' homme et reconnu comme tel par son alisation de sa miss ion rédemptrice parmi les hommes. Cette commu-
comportement. Cependant, son agir, en tant qu' homme, était marqué nion s'est exprimée particulièrement dans la prière (cf. Mt 14, 19; Mc
par un sens d' humilité et d'obéissance à l'égard de Dieu. Par ailleurs, 14,32-39; Le 6, 12). Au deuxième point, nous avons exposé le rapport
même si par son incarnation. le Christ a connu la mort, pourtant il aéré de Jésus avec les hommes. En effet, Jésus a été envoyé au inonde par
exalté par Dieu de qui il a reçu un nom qui surpasse tous les noms. De Dieu pour sauver les hommes de leur état de péché. L'accomplissement
cette compréhension de l'abaissement du Christ, nous avons noté deux de sa mission est passé par de ignes bienveillants et miraculeux réali-
réalités significati ves qui menent en évidence la faiblesse du Christ. li é par Jésus. Cependant, il a renconrré beaucoup de résistance de la
est question de la réalité ontologique et morale. La réalité ontologique
manifeste l'être-homme du Christ et celle morale les modalités de son 7
agir comme homme. A la lumière de Ph 2,6- 11, la crucifixion du Chri st C'csLcc que J-N. Aletti qualifie de théologisation progressive de la christologie.
Cf. ID.. «Théologie paulienne». DCT. 868-869.
L.AGI R PUlSSANT DU CHRJST PARM I LES CHRÉTIENS CONCLUSION 245
244

part du peuple, en particulier les autorités (pharisiens, scrib~s, anciens était fragmentée en deux groupes autour de la question de nourriture. Il
etc.). Face à ces difficultés, Jésus s'est montré totaleme~t .Libre, en ~c y avai t d' une part des membres fai bles qui ne mangea ient que des lé-
sens qu'aucune contrainte hwnaine ne l'a empêch.é de realiser sa. mis- gumes pour certains jours, et d'autre part, des forts qui mangeaient tout
sion. Ceci est dû au fait qu'il se savait soumis à Dieu et que de lut seul n' importe quel jour. Cette divergence comportementale alimentaire a
il recevait l'ordre d'accomplir sa mission. De toutes. les controver~es entrainé une attitude de refus mutuel dans la communauté. Paul inter-
que Jésus a affrontées, nous avons compris ~ue la fatble~se_ d,u Ch_nst, vient par le biais de sa lettre pour les exhorter à la communion frater-
cause de sa crucifixion, n'est nullement en hen avec la reaLite_soctale; nelle. Dans son intervention, il ne prend partie pour aucune faction,
elle réside dans sa dépendance totale à Dieu. C'~st po~ ~ett~ ra1_son que mais prend d'abord acte de la situation. Ensuite, il interpelle chaque
Jésus ne se sentait pas condüionné à tout ce qui se d1sa1t _n e~atJvement faction, mieux encore chaque membre, à ne pas porter un jugement sur
autour de lui. li a bravé tout cela avec la fo rce de sa soum1ss1on tetale à les autres. Enfin, il invite chacun , dans sa façon d'agir, à aller à l'essen-
Dieu. . tiel de leur adhésion au Christ. Cet essentiel consiste de la part de cha-
Dans la dimension anthropologico-théologique, notre répexio~ a eu cun à examiner son agir ou son comportement par rapport au Christ
pour objet I.e message parad_oxal de Paul_en 2Co l 3,4b. Ll s e_st a~1 d~ la pour l'honorer. Les croyants doivent donc arriver à la conviction selon
faiblesse du croyant en Chnst et de sa v.1e future avec l~ Chn~t par 1 e~­ laquelle leur agir est conforme au Christ et vise à l' honorer. La faço n
fet de La puissance de Dieu. Nous avo~ montré en_quoi consiste la_fai- dont Paul a géré les conflits dans les communautés chrétiennes permet
blesse du croyant en Christ et son esperance de v1v~e avec l~ Christ à d'assurer la stabilité de la vie communautaire. Nous sommes convain-
cause de la puissance de Dieu. Comme p~u.r le Chri~t, la faiblesse du cue que cene attitude de Paul a aidé les membres de Rome à retrouver
croyant est un état qui le met dans un_e pos1t1on consc1en~e de sa n~t~ire l' hannonie au sein de leur communauté.
lim itée et nécessiteuse. Cette conscience par rapport a sa condtt1on Le second volet du sixième chapitre a eu comme objet de réflexion
pennet au croyant de s'abandonner avec confiance ~ la volonté de_ Dieu. l'exigence d'accueil comme témoignage du sens d'appartenance au
Cet abandon est soutenu par son espérance d' une vie avec le Chn st par Christ. Nous l'avons élaboré à partir de deux réa lités propres de l'être
l'effet de la puissance de Dieu. croyant, telles que le sens d'appartenance au Christ et l'exigence d'ac-
En ce qui concerne les trois thèmes recueillis de Rm 14, 1-9, nous cueil. A propos de la première réalité, nous avons posé le problème
avons aussi cherché à le comprendre dans le contexte de toute l~ lettre relatif au sens d'appartenance au Christ, dégagé de l'ex hortation de
aux Romains. Comme en 2Co, on trouve dans la lettre aux Romams d~s Paul aux membres de la communauté de Rome au sujet de l'accueil
enseignements d'ordre doctrinal et parénétique. A travers ~e~ ens~ 1- mutuel (cf. Rm 14, L-5). L'Apôtre les invite à l'accueil mutuel pour
gnements. Paul visait à l' unüé de tous t.es, rne~bres. De l 'ex.eg.e~e fa ne mettre fi n au jugement réciproque. Nous avons déduit de cette exhorta-
de Ja péricope R 14, 1-9. nous avons note 1 ense1~nemen.t p~enet1que de tion la difficulté relationnelle entre les membres chrétiens et nous avons
Paul, qui ex horte les membres de la communaute r? mame a a?opt: r un essayé d'en chercher la cause. Celle-ci se trouve dans le fait que les
comportement digne de leur appa~e?a nce au ~hn~t. Les. trots. themes membres oublient qu ' ils ont tous frères et sœurs de la grande fam ille
dégagés de cene exégèse ont guide notre reflex1on the~l~g1qu~ du de Dieu et appartiennent tous au Chri st. Cependant, la cause de cette
ch. VI. Il s'agit des thèmes correspondants aux ~~pect~ eccles1olo&1que,. difficulté relacionnell e réside fo ndamentalement dans l'oubli de ce que
chri stologiquc et théo logique. Notre note eccl~s1olog1que a cons1~té a comporte )'appartenance au Christ. Ainsi, nous avons voulu expliciter
développer le thème de l'appartenance au Chn st en deux vo lets, a .sa- le sens d'appartenance de tous les croyants au Christ en mettant l'ac-
vo ir l'attitude flexible et ouverte d' un responsable de communautc et cent sur le moment où l'on adhérc au Christ et la manière dont on vit
l'exigence d'accueil comme témoignage du se~s . d'ap~artenance au cette adhésion. En effet, le sacrement de baptême constitue le moment
Christ. Dans le premier volet, nous avons montre, a parh.r du com~or­ où un indi vidu devient chrétien et fait partie de la fami lle de Dieu. De
tement exemplaire de Paul, comme?l I'Apôtre a su gére_r le p~oble,me cet acte. il est libéré du vieil homme, c'est-à-dire de tout ce qui ne cor-
entre les membres de la com munaute de Rome, et en quoi consiste 1 at- respond pas à la vie digne du disciple du Christ et fils de Dieu. et revêt
titude flex ible et ouverte d' un responsable. En effet, la communauté le Christ. Par conséquent. la personne se met au service de Dieu et tous
246 L'AG IR PUISSANT DU CHRIST PARMI LES CHRÉTIENS CONCLUSION 247

ses actes deviennent ou doivent être l' expression de sa vie nouvelle en réali té présente au milieu des chrétiens et à laquelle les chrétiens doi-
Christ. vent répondre à travers leur comportement dignement chrétien - est
Cette vie nouvelle a des impacts sur la vie communautaire à travers plus question de justice, paix et joie dans J' Esprit Saint.
des actes concrets d'amour fraternel. d'accueil mutuel, etc. de la part de La réflex ion sur la dimension christologique de Rm 14, 1-9 est partie
ses membres. En cc qu i concerne la deuxième réalité, il s'agit de l'exi- du thème de la Seigneurie du Christ dégagé dans les vv. 4.9. Oc ces ver-
gence d'accueil. Notre réflexion s'est basée sur l'accueil qui doit être sets, la Seigneurie du Christ est présentée à travers deux réalités christo-
fait entre les membres d' une communauté. Il a été question de l'accueil Jogiques : la Seigneuri e du Christ comme finalité de la mort et du retour
du fai ble et de l'accueil mutuel. Au sujet de l' accueil du faible dans la à la vie du Christ, et l'impact de La ptùssance du Christ, Seigneur sur le
foi, nous sommes partie de l'exhortation de Paul aux membres forts de croyant faible dans la foi . La première réalité a eu pour objet
la communauté à recevoir ceux qui ne vivent pas conformément à la l'explication du processus qui a conduit le Christ à renoncer à sa condi-
Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. Il les invite à poser cet acte d'accueil tion djvine, à assumer la condition de serviteur et à devenir Seigneur des
dans la paix, c'est-à-dire sans contestations (cf. Rm 14, 1). Pour explici- morts et des vivants. Nous nous avons à cet effet dû faire appel au texte
ter cette invitation de I 'Apôtre et montrer concrètement comment cet de Phi lippiens que nous avons déjà mentionné dans la première partie du
accueil envers les frères et sœurs faib les daJ1s la foi doit être fait, nous travaiJ (cf. Ph 2,6- 11 ). Nous avons brièvement repris ce texte en vue de
avons évoqué l'attitude de Jésus envers ses discip les faibles, notam- montrer surtout l' aboutissement de ce processus de l' abaissement du
ment Pierre et Thomas (cf. Le 22,57-61 ; Jn 20,24-26). A travers ces Christ : le devenir Seigneur à la gloire de Dieu. En effet, le Christ a en
deux exemples d' accueil de Jésus, nous avons voulu illustrer une ma- toute obéissance et humil ité assumé la condition humaine et la consé-
nière concrète et chrétienne de l'accueil du fa ible. En effet. malgré Je quence de cet1e dernière: la mort. Cependant il est revenu à la vie. a été
reniement de Pierre et l' incrédulité de Thomas, Jésus ne les a pas jugés, exalté et reçu le Nom de Seigneur qu i dépasse tout nom. Par conséq uent,
ni humi lié , mais les a accueillis et aidés à reprendre le chemin de la foi il reçoit de tous el panout l'honneur et la reconnaissance de sa Seigneurie.
(cf. Jn 20.27-28; 2 1, 15- 17). Cette Seigneurie, qui est reconnue par tous, a des implication sur la vie
S' agis ant de l'accueil mutuel dans la communauté, notre réflexion a de tou ceux qu i croient en lui. Ce sont ces implications qui ont fait objet
consisté à développer l'exhortation de !' Apôtre autour de l'acceptation de la seconde réal ité de notre réflex ion christologique.
réciproque que doit caractériser toute vie communautaire. Compte tenu De fait, à la deuxième réalité, nous avons montré, à travers des
du j ugement mutuel au sein de la communauté de Rome à cause des exemples, l'impact de la pu issance du Christ, Seigneur sur les chrétiens,
questions alimentaires, Paul , pour encourager les croyants à l' accueil notamment sur le fa ible, et surtout comment il se mani feste sur le cro-
mutuel, évoque !'agir de Dieu et du Christ, le Maître. Les Romains doi- yant. 11 s'agit, en effet, de l' intervention du Christ en tant qu ' une pré-
vent s·accueillir. du fait que Dieu les a tous accueilli indépendamment ence qui transfo rme, illumine, et Libère. le faible. L'expérience de la
de leur comportement. Par ailleurs. ils doivent cesser de se juger, car vie de l'apôtre Paul nous apprend qu'il a été transformé par le Christ de
chacun d' eux est un serviteur qui appartient à son Maître, lequel a le son é.tat de faibl esse relati ve à la fo i, de tel.l e sorte que, de persécuteur
pri vil ège de le juger et de le soulever ou relever s' il tombe. Dans la de 1' Eglise qu' iJ était, est devenu apôtre du Christ, consh·ucteur de cette
suite du ch. 14, nous avons démontré que Paul moti ve son exhortation à même Eglise à h·avers sa vie et sa prédication (Ph 3,4-9). La vie de l'a-
l' accueil mutuel en mett ant en relief la charité qui doit ca ractériser pôtre Pierre nous a éga lement servi de modèle pour comprendre com-
l' agir des chrétiens. JI invite à Ja prudence et à l'attention envers les ment le Seigneur agit dans la vie de tous ceux qui croient en lui. Pierre
fai bles qui ri squent de perdre la foi en raison du comportement des a été transfo1mé et libéré grâce à la présence du Christ dans !' Esprit
forts. qui se sentent libre de tout manger à n'importe quel jour. Ces Saint. L' apôtre Pierre est passé de la peur au courage. La peur de la
forts doivent tenir compte des fa ibles, et ainsi év iter de se comporter de menace de prison de la part des hommes l'avait conduit à ni er son Sei-
manière à candal iser les autres, lorsqu ' il s'agit notamment des que. - gneur; le courage reçu par la puissance de son Seigneur fa it de lui un
rions seconda ires ou moins importantes à la vie chrétienne. Ils doivent prédicateur audac ieux, les menaces de prisons. vo ire de mort de la part
agir avec charité d' autant plus que le règne de Dieu - en tant qu ' une des hommes ne lui fo nt plus peur (cf. Ac 2, 14-36).
248 L'AGIR PUlSSANT DU CHRIST PARML LES CHRÉTIENS CONCLUSlON 249

La note théologique vient du fondement théologique que Paul a don- De fai t, le Christ a librement renoncé à sa condition divine et accepté
né à sa recommandation à l'accueil mutuel aux croyants romains (cf. la mission du projet de son Père. Son adhésion à ce dessein du Père l'a
Rm 14.3.6). Nous avons élaboré notre réflexion à deux niveaux. Pre- mis en position de faiblesse, en ce sens qu'il dépendait tota lement de la
mièrement, nous avons démontré en quoi consiste l'agir accueillant de volonté de celui qui l'a envoyé racheter le genre humain. Bien qu' il ait
Dieu à l'égard de tous les hommes, notamment des chrétiens. En effet, connu la mort, il a été cependant élevé au dessus de tout en tant que
Dieu accueille tous les hommes à cause de son amour pour eux, en tant Seigneur des morts et des vivants. Son Règne. quj est bien présent au
qu'êtres créés à on image et à sa ressemblance. U veu t par là les sauver milieu des hommes, est reconnu par tous les peuples et reçoit d'eux la
de leur condition des pécheurs par l'entren:ùse de son Fils Jésus-C hri st. gloire (cf. Ph 2,6- 11). De sa part, le Christ Seigneur exerce sa puissance
A travers cette réflex ion, nous avons compris que l'agir accueillant de sur tous ceux qui croient en lui, notamment sur les faibles. Il intervient,
Dieu se trouve à l' origine de la mission rédemptrice du Christ son Fils. en cas de faiblesse ou d' infidéfüé comme une présence transformatrice,
Cet agir représente pour les chrétiens un modèle à sui vre pour arri ver à illuminante et libérante dans la vie de ses croyants pour redonner force
s'accepter mutuellement avec amour. Deuxièmement, nous avons déve- et courage (cf. Rm 14,4).
loppé la recommandation de I'Apôtre relative à ! 'action de &rrâce que Les chrétiens, quant à eux, sont ceux qui doivent accueillir la Bonne
les chréti ens doivent rendre à Dieu. Une action de grâce qui décou le de Nouvelle du salut dans leLLr vie et en témoigner à travers une conduite
la prise de conscience de !.'amour gratuü de Dieu en Jésus-Chri st envers dignement chrétienne. Ils doivent éviter toute sorte d'ambiguïté dans
eux. lis doivent le faire en vivant conformément au Christ et pour 1' ho- leur vie, qui se manifeste lorsqu'on s'éloigne de l'essentiel de leur vie
norer. Paul, lui-même, à travers ses écrits, donne un bel exemple d'ac- chrétienne. Pour ce faire, ils doivent à tout propos vivre conformément
' tion de grâce rendue à Dieu. à l'enseignement du Christ. Ce faisant ils honoreront leur Seigneur et
éviteront des actes incohérents. Ceux-ci conduisent nécessairement à la
2.2 Synthèse de la perspective évangélique en 2Co J3.1 -4 et Rm 14, 1-9 division dans la communauté et au contre témoignage vis-à-vis de ceux
.A propos de la synthèse de la perspective théologique ou de qui ne croient pas en Christ. En définitive, l'on voit bien que dans le
l'Evangile trouvé dans ces péricopes, nous pouvons dire que nos inves- mystère du salut l'action de Dieu est décisive, car elle a rendu possible
tigations exégétiques de 2Co 13, 1-4 et Rm 14, l-9 nous ont permis de la rédemption de toute l' humanité en Jésus-Christ à travers son incarna-
comprendre le mystère du salut en Jésus-Christ et la façon don t doivent tion. C'est pourquoi les hommes desti nataires du salut de Dieu, en par-
se comporter tous ceux qui sont bénéficiaires de cette rédemption. Nous ticulier les croyants, conscients et reconnaissants de cet amour gratuit
avons exactement pu comprendre Je rôle de chaque protagoniste de ce de Dieu envers eux, expriment leur gratitude par des prières et hymnes
mystère du salut : Dieu, Christ et les croyants. A travers notre réflexion d'action de grâce.
théologique des péricopes examinées, nous apprenons que Dieu, celu i 3. Tentative d ' actualisation dans le contexte
qui a déjà accueil li tous les hommes et qui reçoit d'eux l'action de spécifique de l'église congolaise
&rrâce, constitue la raison déterminante aussi bien de la vie du Christ
après sa mort dans la faiblesse que de l'espérance des croyants en la vie La bonne nouvelle annoncée par Paul aux chrétiens de !'empire ro-
avec le Christ (cf. 2Co 13.4 et Rm 14,3.6). En effet, l'accueil de Dieu mai n au Ier siècle ap. J.-C., ti.ré de 2Co 13, .1 -4 et Rm 14, 1-9, demeure
eocore très actuell e aujourd ' hui pour les chrétiens du 2 lème. Nous esti-
envers tous les hommes traduit son projet d'amour de racheter l'huma-
nité déchue suite au péché d'Adam et Eve. li réalise cc projet par l' in- mons qu ' il l'est davantage pour les chrétjens de l'église de la Répub li -
carnation de Jésus-Christ, son Fils parmi les hommes. Dieu commence que Démocratique du Congo en proie à une crise multiforme sur le plan
ce projet salvifiquc et l'accomplit par le biais de la mort sur la croix de politique, économique, sociale et religieuse. Dans un tel contexte,
son Fils et de sa résurrection. Car le Christ, dit Pau l, est mort et revenu quelle pourrait être la pertinence de cette Bonne Nouvelle que nous
à la vie en vue de devenir leur Seigneur grâce à la puissance de Dieu (cf.
relatent les deux péricopes analysées ?
En effet, à cause du marasme généralisé dans lequel est plongé le
2Co 13,4 et Rm 14,9).
pays depuis plus d'une décennie, l'église du Congo expérimente jour
250 L'AG IR PUISSANT DU CHRIST PARMI LES CHRÉTIENS CONCLUS ION 25 1

après jour un état d ' impui ssance qui menace d'éteindre l'espérance blesse, voi re d ' impuissance que vit le peuple congolais constitue en
chrétienne de ses fidèles. Pour remédier à cet état de choses, les évê- elle-même déjà un Lieu privilégié de la manifestation puissante du
ques congolais n'ont cessé de multiplier des vibrants appels aux fidèles Christ, et par conséquent, un Lieu herméneutique pour comprendre et
catho liques et aux hommes de bonnes volontés en les invitant à un éveil vivre chrétiennement cet état de choses. Le Christ est bel et bien en
de consciences. action parmi le peuple congolais et les chrétiens en particulier. Car, de
Ces appels des évêques sont appuyés par un diagnostic sévère et non par leur baptême, ils appartiennent au Christ qui, par la mort et le retour
complaisant de la grave situation qui paralyse le pays dans toutes les à la vie, est devenu Seigneur de tous ceux qui cro ient en lui (cf. Rm
couches de sa vie sociale. Cene réalité ne permet pas aux congolais de 14,4). Par conséquent. il demeure tout puissant et continue à opérer
se réa liser dans leur aspiration légitime à une vie humainement digne. même au miJjeu de cette population martyrisée du Congo en situation
Os ne peuvent pas non plus expérimenter leur état de peuple racheté par matérielle et spirituelle très fragile. En effet, cette église congolaise re-
le Christ (Ga 3,13). A cet effet, les évêques dénoncent particulièrement pr~s~nte par le biais de tous ses membres - évêques, prêtres, re ligieux,
les maux qui entravent cette pleine réa lisation, dont la corruption, re lig ieuses et fidèles laïcs - des signes tangibles de l'action puissante
l'égoïsme des leaders po litiques. leur indifférence face à la situation de du Christ au mi lieu de la population congolajse dans l'ensemble.
la population et leur manque de patriotisme, etc. Les responsables de Au sujet des évêques, leurs incessantes interventions à travers des
l'église de Dieu qui est au Congo déplorent également la complaisance écrits adressés aux fid èles catho liques et aux hommes de bonne vo lonté
des chrétiens dans toutes ces pratiques immorales qui sont en fai t de rendent évident cette présence du Christ. Car, par leurs messages, ils
contre témoignage face au monde. réconfortent le peuple, exhortent les autorités à un engagement dévoué
Ce triste bilan de la situation désastreuse du pays ne peut laisser au- pour le pays et à l'attention particulière aux démunis. Quant aux prêtres
cun fils et fill e de ce pays indifférent face à l'urgence d ' assumer notre diocésains, en plus de leur ministère sacerdotal, ils révèl.ent le Chri st
responsabi lité chrétienne dans l' édification d ' une communauté hu- puissant par l' attention qu ' ils accordent à la situation de la population
maine et chrétienne qui so it l' espace de l'épiphanie du Royaume. Aussi, et aussi par des interventions auprès des autorités civiles en faveur de
comme fill e de ce pays voudrions-nous, à partir des résul tats de nos cette même population. En ce qui concerne les religieux et religieuses,
investigations exégétiques et théologiques, apporter notre contribution leur engagement au service du peuple congo lais est remarquable dans
pour redonner un sens à la vie de notre peuple au ni veau morale et spi- plusieurs domaines de la vie soc iale du pays, notamment dans le do-
rituelle notamment. Ainsi, mue par ce souc i, nous nous sommes posée maine de la santé et de l'enseignement. fis s'adonnent considérable-
La question de savoir si le message de Pau l concernant l'agir puissant ment à ! ' instruction de la jeunesse, aux so i.ns des malades, aux visites
du Christ parmi les chréti ens contenu dans 2Co 13, 1-4 et Rm 14, 1-9 des person nes margi nalisées. Face aux phénomènes nouveaux venus
peut avoir un sens pour les chrétiens congo lais, au point de légitimer suite à la sjtuation de crise du pays beaucoup des religieux, et les Filles
quelque espérance et un brin d'enthousiasme dans la condu ite indivi- de Notre Dame 9, en particulier ont dû adapter leur mission au besoi n du
duelle el collective. Autrement dit les fid èles chrétiens qui vivent dans temps. E lles s'occupent également des enfants abandonnés dans la rue
cette situatio n peuvent-ils reconnaître et témoigner que le C hrist mort et par leur famille 10. Elles les accueillent et leur offrent un milieu fam ilial.
ressuscité, et donc puissant, continue d 'agi r parei llement au milieu Ainsi, ces enfants peuvent étudier, bénéficier des soins médicaux en cas
d'eux? Qu 'est-ce qui peut autoriser cet optimj sme? Comment peu-
vent-ils contribuer à la reconstruction de leur pays? 9
JI convient d 'abord de rappeler que. selon sai nt Paul, la puissance du Les Filles de Notre Dame du Sacré-Cœur est une congrégation missionnaire fon-
dée par le ~ère Jul~s Chevalier en 1874 à Issoudun en France. Leur présence en Ré-
Christ se révèle dans la fa iblesse (2Co 12,9). Nous avons eu à démon- publique Democrauque du Congo date de 1925. Elles travaillent précisément dans le
trer théologiquement le bien fondé de cette assertion paradoxale dans diocèse de Mbandaka Bokoro. province de l'Équateur.
les pages précédentes. Ceci nous porte à dire que la situation de fai- IO Les enfants abandonnés dans la rue ou «enfants de la rue» constituent un phé-
nomène .nouveau au C~ngo. Les raisons qui justi~ent le rejet de ces enfants de la part
des fami lles sont mult1ples, entre autres le déces de leurs parents et le manque de
8 Cf. CENCO. Changeon.~ nos cœ11rs; lD., il est temps. moyens matériels des fam illes.
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170, 171 , 172, 173, 174, 178, Carrez: 23, 31 , 34
179, 180, 18 1, 189, 191, 192 Cassius: 23, 118, 120. 123
Barbaglio: 13, 23, 24, 28, 34. 35, Chase: 145
37, 53, 6 1.80, 83,202 Chrisostome: 62
Barclay: 124, 16 1, 180, 185 Cipriani: 33
Bamen: 32, 58, 62, 66, 67, 69. 72, Colacrai : 80, 82
74. 78, 8 1, 85 Collins: 13 1
Barrett: 29, 32. 36. 5 1, 62. 67. 79. Corsani : 24. 29
130 Cranfield: 152. 156. 159, 163. 167.
Bates: 13. 33 170, 17 1
Baur: 3 1. 32 Dankcr: 40. 6 1
Beatrice: 28, 32 Dcdem: 185
Becker: 24, 179. 181 DeWng: 179
Behm : 161 Démosthène: 39. 40
Benko: 11 8 Dodd: 127
Betz: 34. 35 Donfried: 22. 23, 24, 126, 127, 13 1,
Black: 74, 101 . 172 136, 148
280 L.AGIR PUIS ANT DU CHRIST PARMI LES CHRÊTIE S INDEX DES NOMS o·AUTEURS 281

Dunn: 11 8. 120, 12 1, 123, 124. 126, Hengel : 24 Lietzmann: 13 J Newman : 178


128. 130. 133. 134, 135. 137, Hoehner: 97 Long:32.34.37. 38. 39.44. 45.62 Ollrog: 25
156. 159, 161. 167, 170, 171. Huby: 124 Lüdemann: 22. 24. 32 O manson : 161
172, 179. 180. 185. 199. 2 11 Hughe : 33, 37. 61 Luz: 126 O'Neil: 132. 180
Egger: 54. 152 Hurtado: 176, 2 12, 2 14. 21 5 Lyoonet: 124, 162 Oostendorp: 32
Elliot: 16 1 Hydahl: 13, 32, 33 Malherbe: 26 Orose: 22
Engels: 26 lngelaere: 156 Manson: 127, 131 Pa lzkill : 172
Epp: 13 1 Jeffers: 12 1 Manzi: 13, 33, 35, 36, 37, 6 1, 62, Penna: 32, 49. 92. 97. 101. 11 8.
Es Ier: 156, 158, 16 7 Jervell : 127 74. 76, 89. 93. 101 119, 121, 123, 125, 126. 127.
Eusèbe: 129 Jewett: 22, 23. 24. 33. 1 18. 124, Marguerat: 31, 32, 34. 5 1 128. 129. 130, 138. 141. 142.
fabris: 101 , Il 1 127, 129, 130. 13 1. 132. 138. Martin. D.B.: 26 144, 151
FaUon:89 140, 14 1, 145, 146. 147. 148, Martin. J .: 148, 150, 234 Perkins: 32
fanning: 156 149, 150. 15 L. 152, 153. 156, Martin, R.P.: 22. 23 , 28, 30, 3 1. 34, Pesch: 13, 37
Fee: 101 , 111 , 176, 2 12. 2 15 158, 159, 160, 16 1, 170. 171 , 35, 36, 5 1, 72, 74. 76, 176, 2 12, Philon: 119, 16 1
Feldman: 16 1 172. 173, 174, 178, 179. 187, 224 Pitta: 23, 24, 25. 26, 27, 28, 30. 3 1.
Finegan: 23 192.233,234.235 1atera: 29. 69, 78. 80. 83 34,35. 36,37. 38. 46.4 7, 48, 49.
Fitzmyer: 1O. 34, 1 18, 1 19, 121. Jo èphe: 120. 162 Marxsen: 32. 127. 131 50.51 ,52.53.54. 5 ,6 1,63,66.
12 4. 130, 159. 163, 167, 180 Küscmann: 32, 76. 124, 159, 163. McCant: 39, 42. 43, 6 1. 62. 67. 68. 67.6. 72. 73. 74. 76. 78, 79,82.
Ford: 37,39.40,50 167. 172, 180 76 83. 89. 92, 93. 101. 103. 12 1.
Fox:26 Ke nnedy. G.A.: 39 Mc Neile: 5 1 122, 129. 130, 138. 143. 144.
Fuchs: 80 Ke nned y. J.H.: 35 Meggit: 26 145, 149, 150, 157. 158. 159.
Fumish: 23, 28. 3 1, 32. 36. 50, 51. Ke nt: 25 Meeks: 25. 26. 27 16 1, 163, 164, 165. 17 1. 172.
52.54.57.58.6 1.62.63.66.69, Ke)cs: 62 Metzger: 10. 54, 152, 153 174, 180, 18 1. 192, 234
72. 73. 74. 76. 78. 79. 8 1 Kinoshita: 132 Meyner: 51 Plummer: 35, 62
Fu co: 32 Klein: 126. 127 M ichaelis: 172 Plutarque: 39. 120
Gagé: 25 Koch: 150 Michel: 10, 124. 130. 160. 167, 174. Porton: 149. 233
Gambie: 136 Kre itzer: 200 179, 185 Reasoner: 158. 16 1. 180
Garofalo: 27 Kühl : 192 Mincar: 127, 180 Richardson: 122
Georgi : 32. 92. 93 Kühncr: 77 Momigliano: 118 Riggenbach: 16 1
Gerth:77 Kümmel : 122. 124. 16 1 Moo: 10. 129. 13 1, 16 1. 165, 170, Sacchi : 22. 23. 24, 26. 27, 28, 29.
Gcrtner: 149 Ku!.tas: 149. 233 17 1. 172. 178. 179, 1 o. 185. 3 1,34.204
Gill: 26 Lacey: 180 192 Safrai: 16 1
Gnilka: 34, 101. 1 1 1 Lag range: 124. 130, 162. 171. 192 Moore : 150, 234 Samplcy: 36, 9
Godet: 172 Lake: 35, 36 Morris: 130, 166 Sanday: 130
Goodspccd: 13 1 Lambrccht: 27, 31. 32. 33. 54, 66. Mortara Garavell i: 48. 49, 100, 148 Scheiner: 171
Green: 82 69. 2.83.92. 93 Moule: 187 Schenke: 132
Gunthcr: 23. 32 Lampe: 1 1 . 121. 123. 131 Moulton: 192 Sehl ier: 158, 172, 174, 179, 192
Guthrie: 176. 212. 224 Lane: 11 Müller: 103 Schmithals: 32. 37. 13 1, 132
Harri : 13, 33. 35. 62. 69 Lausberg: 43. 4 . 49. 100, 147. 148. Murphy-O 'Connor: 22. 23. 24, 25 , Schrenk: 127
Hau rath: 35. 36 150,234 26.27.28. 29.30.3 1,32,36.51. Scroggs: 132
Hays: 150 Leenhardt: 172. 1 0 63 Segalla: 13, 33
Headlam: 130 Légas c: 11 8. 126, 127. 128. 129, Murray: 156 Semler: 35, 36
He iJ : J30. 16 1 158. 167. 169. 170. 171 Neuhaus: 22. 24 Seaft: 28
282 L' AGIR PUISSANT DU CHRIST PAR.Ml LES CHRÉTIENS

Slingerland: J l 8 Vliet: 61
Smallwood: 23, 118 Walter: 93
Spicq: 156, 172, 2 l4 , 2 15 Watson: 13, 35, 36, 124
Stablin: 158 W edderburn: 124, 162
Stegman: 3 1, 32, 33, 35, 36, 37, 38. Weiss: 37
39,50, 5 1, 78, 83 Wierel : 11 8, 120, J22, 123, 127
Stegner: 149, 233 Wikenbauser: 33 TABLE DES MATIÈRES
Stephenson: 33 Wilckens: 1O. 124, 134, l 36, 16 1,
Stowers: 124, 149, 161 171 , 179
Stracban: 35 Williams: 5 1
StuhJmacher: 122, 123, 126, 128, Windiscb: 32, 62, 69. 76, 80
Witherington III: 26, 29, 30, 34, 36, R.EMERCIEMENTS . ..... ....... ... . ... . ... . ... . . ... .... ........ .. ... . .... ....... ..... ... .... ..... .... ..... 7
129, 13 1, 199
Suétone: 1 t 7, 118, 121 , 122 37, 38, 41 , 42, 47, 5 1, 61, 62. lNTRODUCTION ......•. .... .... ... . ... . . ... ... . . ....... .... . ... . . ... ..... ....... . ... . ... ...... ... . ... ... . . 9
Suetonius: 22, 1 l 8 121
1. La délimüation de l' étude....................................................................... 9
Summey:33,36 Wodka: 93
3. La nouveauté de l' étude. ................... ...................................................... 11
Tacite: 11 8, 125 Wolff: 33 4. Méthode.................................................................................................. 11
Theissen: 25, 26, 28 Wuellner: 134, 138, 14 1, 145
5. Division du travai l .................................................................................. 12
Thrall: 13, 32. 37, 62 Young:37, 38,39, 40,50
Thüsing: 172 Zahn: 130 PREMIÈRE PARTl E: 2CO 13, 1-4. LE CHRIST EST PUISSANT
Tomson: 124, 163 Zeller: 130, 166, 180
Trobisch: 13 1 Zerwick: 66, 73, 97, 156. 171 , 172, CHAPITRE I : Le contexte de 2Co I 3, 1-4 ..................................................... 21
Turner : 192 173, 182, 192 1. Caractère ad hoc de la lettre . . .. ... .. . . .. . . .. . . .. . . .. . . .. . . ... . . .. . . .. . . .. . .. . . .. .. . .. . .. . . ... . 21
Vanni: 127 Ziesler: 124 1. 1 La fondation de l' église de Corinthe.......................................... .. .... 21
Virgulin: 33, 89 Zmjjewiski: l58 1.2 Les m embres de 1' église de Corinthe et leur position sociale....... ... 24
1.3 Relation entre Paul et la communauté............................................. 27
1.4 Les adversarres de Paul.. .................................................................. 31
2. La deuxième lettre aux Corinthiens........................................................ 33
2.1 Intégralité de la lettre ............................ .. ......................................... 33
2.2 Caractère composite de la lettre : Les théories de partitions ........... 35
3. Analyse rhétorique littéraire de 2Co ....................................................... 37
3.1 L'utilisation de la méthode rhétorique en 2Co ................................ 38
3. 1.1 Différentes approches rhétoriques........... ............................... 38
3. 1.2 ll1 ventio ou preuves en 2Co .................................................... 48
3.2 Avantages et inconvénients de l' analyse rhétorique........................ 50
3.3 Occasion, Lieu et date de la composition de la lettre ........................ 50
3.3 Délimüation de 2Co 13, 1-4 ............................................................. 51
4. Texte de 2Co 13.1-4................................................................................ 53

C HAPITRE 11 : Une lecture attentive de 2Co 13.1-4 .................................... 55


1. 2Co 13, 1.................................................................................................. 55
1. 1 Analyse syntaxique du v. 1 .............................................................. 55
1.2 Composition du v. 1......................................................................... 59
L'AGIR PUISSANT DU CHRIST PARMI LES CHRÊTrENS TABLE DES MATlÈRES 285
284

2. 2Co 13,2 ........................................ .................... ..................................... . 63 Cil/\ PITRE V : Une lecture a1te11tive de Rm 14, 1-9 ..................................... 155
2.1 Analyse syntaxique du v. 2 ............................................. ................ . 63 1. Rn1 14, 1................................................ .... ................. .............................. 155
2.2 Composition du v. 2 ........................................................................ . 67 1. 1 Analyse syntax ique du v. 1.............................................................. 155
2.3 Le lien structurel entre les vv. 1-2 ............... ................................... . 70 1.2 Co111posiLion du v. 1......................................................................... 157
3. 2Co 13,3 ............................................. ..................................................... 72 2. Rn1 14,2........ ... ........................................................................................ 159
3. 1 Analyse syntaxique du v. 3 ............................................................. . 72 2. 1 Analyse syntaxique du v. 2 .............................................................. 159
3.2 Composition du v. 3 ........................................................................ . 75
2.2 Composition du v. 2 ......................................................................... 160
4. 2Co 13.4 ................................................................................................. . 77
2.3 Le lien structurel entre les v. 1-2 ................................................... 162
4. 1 Analy c syn taxique du v. 4 ............................................................. . 77
81 3. Rrn 14,3 ................................................................................................... 164
4.2 Composition d u v. 4 ........................................................................ .
84 3. 1 Analyse syntaxiqu e du v. 3 .............................................................. J64
4.3 Le lien structurel entre les vv. 3-4 .................................................. .
85 3.2 Composition du v. 3......................................................................... 164
4.4 Le lien structure l de la péricope ...................................................... .
3.3 Le lien structurel entre le. vv. 1-3 ........................................... ........ 167
4. Rrn 14,4 .............................................................. ..................................... 169
C HAPITRE l1I : R~flexion théologique de 2Co 13, l -4 ................................. 89
4. 1 Analyse syn tax ique du v. 4 .............................................................. 169
1. Dimension ecclésiologique .......... ......................................................... .. 90 4.2 Composirion du v. 4. ......... ............................................................... 174
1. 1 Le comportement ambigu .............................................................. .. 91 4.3 Le lien structurel entre le. vv. 1-4 ................................................... 176
1.2 Le rôle du responsable de communauté ......................................... .. 91 5. Rrn 14,5........... ........................................................................................ 178
1.3 Conséquences d'un compo rtement chrétien ambigu ..................... .. 95 5.1 Analyse syntaxique du v. 5 .............................................................. 178
2. Dimension christologico-théologique .................................................... . 99 5.2 Composition du v. 5......................................................................... 180
2.1 Usage paulinien des termes ao9ÉVELOC et ouvaµtç ...... :.. ······ 00
··········•
00 99 6. Rm 14.6 ................................................................................................... 181
2.2 Rapport paradoxal de faib lesse et puissance du Christ.. ................ .. 100 6. 1 Analyse syntaxique du v. 6 .............................................................. 181
2.2 .l Le processus de l' abaissement du Christ .._. ........................... .. 100 6.2 Composition du v. 6........................... .............................................. 183
2.2.2 La dimension concrète de la nature humaine ............... ......... . 103 6.3 Le lien structurel entre les vv. 5-6 ................................................... 184
3. Dimension anthropologico-théologique ................................................ .. 108 6.4 Le lien stmcturel entre les vv. 1-6 ................................................... 186
7. Rm 14,7................................................................................................... 187
D EUXIÈME PARTI E : RM 14.1-9. LE SEIGNEUR EST PUISSANT 7. 1 Analyse syntaxique du v. 7 .............................................................. 187
CllAPffRE TV : le contexte de Rm J4, 1-9 ................................................... 117 7 .2 Composition du v. 7 ..... ... ................. .................... ........ .... ... .... ......... 188
8. Rrn 14,8.................................................. ................................................. 189
1. Caractère ad hoc de la lettre ................................................................... 117 8. 1 Anal y e syntaxique du v. 8 ...... ........ .. ........................... ..... .. ............ 189
1. 1 La fondation de la communauté de Rome ............... ....... ................. 1 17 8.2 Composition du v. 8 ......................................................................... 190
1.2 Les membres de la communauté de Rome .............. ........................ 120 8.3 Le lien structurel entre le vv. 7-8 ................................................... 190
1.3 Conséquences de l'édit de Claude sur la communauté .................... 122 9. R.Jn 14.9 ................................................................................................... 191
1.4 La structure interne de la communauté............................................ 124
9.1 Analyse syntax ique du v. 9 ......................... .... ................................. 191
2. La lettre aux Ro1nains ............................................................................. 125
9.2 Composition du v. 9............................... .......................................... 193
2. 1 Destinateur de la lettre ..................................................................... 125
9.3 Le lien structLLrel entre les vv. 7-9 ................................................... 193
2.2 Occasion de la lettre ....................................................................... ·· 126
9.4 Le lien structurel de la péricope....................................................... 195
2.3 Lieu et date de la composition de la lettre......... .............................. 128
? 4 Intégralité de la lettre... .................................................................... 130
Cl IAPITRE V I : Réflexion théologique de lCo I 3.1-4 ................................. 199
Ï:5. St~cture de la lettre........................................................................ 132
2.5. 1 Structure littéraire................................................................... 133 1. Di men ion ecclésiologique ..................................................................... 200
2.5.2 Structure rhétorique................ ................................................ 137 1. 1 Usage paulinien du tem1c [3aotl..€[a/«règne» .................................... 200
2.5 Dél imitation de Rm 14, 1-9 ............................................................. 150 1.2 L'altitu de flexible et ouvcrie d ' un responsable....... ........................ 202
3. Texte de R111 14, 1-9 ................................................................................ 15 1
286 L' AGlR PUISSANT DU CHRIST PARMl LES CHRÉTLENS

t .3 L'exigence d'accueil comme témoignage du sens d'appartenance


TESI GREGORIANA
au Christ............................................................................................ 207
1.3. I Le sens d'appartenance au Christ ........................................... 207
1.3.2 L'exigence d'accueil.... ........................................................... 208 Depuis 1995 , la coUeetion «Tesi Gregoriana» met à la disposition d u
2. Dimension christologiquc ............................ ........ ..................... ... ........ ... 2 14 pubblic que lques-unes des meilleures thèses élaborées à l' Université
2. 1 Usage paulinien des tcnnes ku,rioj .................................................. 2 14 Pontificale G régorienne. La compos ition en est assurée par les auteures
2.2 Le contexte du devenir Seigneur de Jésus-Christ ............................ 2 16 eux-mêmes, selon les normes typographiques dé finies et contrô lées par
2.3 L' impact de la Seigneurie du Christ sur les chrétien ...................... 2 17 ! ' Universi té.
3. Dimension théologique ........................................................................... 22 1
3. 1 L'accuei l de Dieu envers tous les croyants ...................................... 22 1 Volumes Publiés (Série: Théo logie]
3.2 L'action de grâce rendue à Dieu de la part des croyants... .............. 222
3.3 Paul, modèle de l'action de grâce à Dieu ......................................... 224
[Vol. 1-1 10: cfr. l1rww. unigre. it ITG/teologia.hlm]
TROISIÈME PARTLE : CONCLUSION
CllAPITRE Vil : L 'ag ir puissant du Christ parmi les chrérie11s ................... 229 111 . Planellas Barnosell, Joan, Lu recepciôn del Varicano Il en lns manuales
de eclesio/ogla espaiioles. /. Ruidor, J. Collantes, MM Garijo-Guembe, S. Pie-
1. L'exposé comparatif...... ......................................................................... 230 Ninot, E. Bueno. 2004, pp. 598. ·
1. 1 Caractère ad hoc de la lettre ........ ......... ........ .... .... ... ...... ... ... .... ... .... 230 112. Fi lippi, Nicola, Essenza e.forma di esercizio del minisfero petrino. JI
1. 1.1 Les fondations des églises de Corinthe et de Rome ............... 230 Magistero di Giovanni Paolo li e la riflessione ecclesiologica, 2004, pp. 298.
1. 1.2 La vie au sein des communautés de Corinthe et de Rome 11 3. Pegucro Pérez, Javier, la figura de Dios en los diâlogos de J es1is con
et leur rapport avec Paul......................................................... 231 las a111oridades en el Templo. lectura de Mc 11.27- 12,34 a parrir de su insran-
1. 1.3 Les lettres aux Corinthiens et aux Romains .... ........ ... .... ........ 232 cia comunicativa, 2004, pp. 426.
1. 1.4 Les structures des lettres aux Corinthiens et aux Romain ..... 234 114. Lopez Barrio, Mario, El tema del «Agape» en la primera carta de San
1.1.5 Les textes de 2Co 13, 1-4 et de Rm 14, 1-9 .............................. 235 Juan. Estudio de JJn 4, 7-2 J: una perspectiva antropo/6gico-social, 2004, pp. 266.
1.2 Les lectures attentives de 2Co 13, 1-4 et de Rm 14. 1-9 .................. 235 115. Borck, Waclaw. Unità e reciprocità delle membra della Chiesa. Studio
2. Quelques réflexi ons théologiques........................................................... 240 esegetico-teo/ogico di / Cor 12,21-26; Rom 12,3-8; Ef 4,24-5.2, 2004, pp. 352.
2.1 Les apports dégagés des deux textes................................................ 240 116. Vives Pérez, Pedro Luis, la singularidad de Crisro. Perspectivas
con vergent~· en la cristologia catô/ica contemporémea, 2004, pp. 464.
2.2 Synthèse de la perspective évangélique en 2Co 13. 1-4
et enRrnl 4,l -9 ................................................................................ 248 117. Wuek, Bernard, Dio e i suoifigli. Analisi rerorica della Prima Rocco/ra
Salomonica (Pr 10. 1- 22, 16), 2005, pp. 41 6.
3. Tentative d'actualisation dans le contexte spécifique 1 18. Borghino, Angelo, la «Nuovo Alleanza» in ls 54. Analisi esegerico-
de l'église congolaise............................................................................. 249 teologica, 2005 , pp. 480.
11 9. Urso, Filippo, «lmparo l 'obbedienza dalle cose che patiJ> (Eb 5,8). li
SIGLES ET ABRÉVLATlONS ........................................................................... 253 va/ore educalivo della sofjèrenza in Gesù e nei cristiani ne/la Le/fera agli Ebrei
BIBLIOGRAPHIE........................................................................................... 26 1 li cdizione riveduta e corretta, 2005, pp. 5 14. '
120. Kim, Jcong Rac, « ... perché io sono mite e umile di cuore» (Mt I J,29) .
INDEX DES NOMS D'AUTEURS ..................................................................... 279 Srudio esegetico-reologico sull ·umiltà del Messia secondo Malleo. Dimensione
TABLE DES MATIÈRES ................................................................................. 283
cristo/ogica e risvolti ecclesiologici, 2005, pp. 334.
121. De Vccchi , Gaia, L 'Etica o Seita te ipsum di Pierro Abelardo. Analisi
critica di un proge110 di teologia morale, 2005, pp. 208.
122. Mendoza Maga 116n, Pedro, «Estar crucificado j untamente con Cristo»:
el nuevo stafm ckl creyente en Cristo. EslLldio exegético-teolôgico de Gal 2. 15-21
y Rom 6,5-11, 2005, pp. 328.
123. Duffy, Mervyn, Ho111 lang11age, Ritual and Sacramenrs Work. According
ro Joltn Ausrin, Jiirge11 Habermas and l ouis-Marie Chauvel, 2005, pp. 282.
124. Lee, Hye Ja (lnduk Maria), «Signore, vogliamo vedere Gesù». La
conclusio11e del/ 'a11ivi1à pubblica di Gesù secondo Gv 12,20-36, 2005, pp. 302.
125. Mazza, Giuseppe, la /f111i11alità come dinamica di passaggio. La rive- del dialogo ne/ cap. 18 di Malleo, 2007, pp. 400.
la=ione come smmura osmotico-pe1formath a de// 'inter-esse trinitario, 2005, pp.
1
147.. . Sz~pula. Wojc ie~b. The Ho/y Spirit in the Eschatologica/ Tension of
786. Clms11a11 Life. An fü:ege11co-Theological Srudy of2 Corinthians 5, J-5 and
126. Montaldi, Gianluca, «lnfede ipsa essentia Revelatio11is completur»: il Romans 8. 18-27. 2007. pp. 436. ·
tema della fede 11ell 'evo/11ersi del concilio Vaticcmo Il: la genesi di D V 5-6 e i 148. Amo Usanos, Rafael. El principio viral del ser l111111a110 en fre11eo
suoi riflessi su 11/teriori ambiti co11ciliari. 2005. pp. 628. Orige11es, Agustin, Tomas de Aquino y la a111ropologia 1eo/6gica espaiiola ·
127. Poggemeyer, Joseph, The Dialectic of K11mving Godin the Cross (lnd reciente, 2007, pp. 362.
the Creation. An Exegetico-Theologiccil St11c61 of !Cori11thians 1.18-25 and Romans 149: Aprile, Biagio, «Passio Christi tom evidenter quasi el'ongelium
1.18-23. 2005, pp. 344. rec11at11r». la passione di Cristo su/la croce: i11seg11ame11to ed esempio. Studio
t 28. Di Paolo, Roberto, Il Servo di Dio porta il dirilfo a/le na:ioni. Ana/isi .ml Commemo Il ul salmo 21 di Agos1ino di lppona, 2007. pp. 3 1O.
retorica di Matteo 11- 12, 2005, pp. 286. 150. Casazza, Pabrizio, Sviluppo e libenà in Amartya Sen. Provocazioni per
129. Ronconi. Marco. «A maiestate humilitas». Il rilie1'0 de/Io retorica 11ella la teologia morale. 2007, pp. 424.
teologia di Leone Magno, 2005, pp. 260. 1_s 1. Varsalona, Agnese, D dialogo e i suoi fimdamenti. Aspetti di antropologiu
130. Colautti, Guillermo Bruno, Las figuras ec/esiolôgicas en San Hilario de }1~m;ojica e 1eologica secondo Jorg Splell e Walter Ka~pe1., 2007, pp. 300.
Poitiers, 2005, pp. 304. 1:>2. George Kochurhara, Shaji, The Concept o/Sexua/ Plea.rnre in the
131 . Tibaldi. Marco, Ke1ygmc1 e atto di Jet.le ne/la teo/ogia di Hans Un 1•on Catltolic Moral Tradition, 2007, pp. 518.
Balthasar, 2005, pp. 276. 153. Scardi ll i, Pietro Damiano, 1 nuclei ecc/esiologici ne/la costituzione
132. Piqué Collado. Jorge. Teologia y mlisica. Una co11trib11ciô11 dialéctico- liturgica del Vaticano 11, 2007, pp. 418.
transce11dental sobre la sacramentalidad de la percepci611 estética del Misterio 15.4.. ~al?chuvatt i l , Math.e""'.. <~The One Who Does rite Will of the Fathen>.
(Agustin, Balthasar. Sequeri; Victoria, Srh6nberg, 1'vfessiae11), 2006, pp. 422. . D1stmg111sh111g Character oj D1sc1ples According to Matthew. An Exegetica/
133. Costin. Teodor, JI perdono di Dio 11el vangelo di Matt eo. Uno studw Theological Study, 2007, pp. 404.
esegetico-teologico, 2006, pp. 254. 155. Barbosa Filho, Domingos, A vontade wlvifica e predes1i11a111e de Deus e
134. Bisceglia, Bruno, «ln natura humana Deus Pater impressit Verbum». a que.mio do cristocemrismo. Um estudo sobre a dourrina de Jotio Duns Escoto
Dio Padre ne/ commento di Sa11 Tommaso al Vangelo di Son Giovanni. 111dagine e seus ecos na teologia contemporânea. 2007, pp. 496.
dottrinale e 11erifica analitica. A11alisi swtislica e Jessicografica. 2006, pp. 352. 156. Onwuka, Chidolue Peter, The Law, Rede111p1io11 and Freedom in Chris!.
135. Jones. Michael Keenan , Toward~ a Cltri.'itology of Chris! tlte Higlt An Exegetical-Tlteological Study ofGalatiam 3. 10-14 and Romans 7, l-6. 2007.
Priest. 2006. pp. 408. pp. 374.
136. Gudiel Garcia. l lugo Cain, Lafe segû11 Xavier Zuhiri. U11a aproxi111aci611 157. Jané Coca, José M., «Ser hal/ado en ÉI». la reciprocidad illfersubjetiva
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137. Margaria, Claudio, Fede come seque/a: uno teologia in via. Christi negli
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138. Bellusci, Gianluca, L 'universale concrctum, categoriafondame11tale 1?9.. . Abb.an.ista, ~stcr'. Orige11e legge Geremia. Analisi. commenta e r(/les-
della Rivelazione a par1ire dal/ 'analisi del ciclo natalizio, 2006. pp. 298 . Stont d1 un b1b!tsto d1 ogg1, 2008, pp. 355.
139. Pcllegrino, Cam1clo, Paolo servo di Cristo e padre dei Corinzi. Analisi 160. Spronck. Joël. la patience de Dieu. Jusri/ications théologiques du délai
retorico-/elferaria di /Cor 4, 2006, pp. 408. de la Parousie. 2008, pp. 356.
140. Mulcahy, Eamonn, The Cause of Our Salvatio11. Soteriologicaf Causality 16 1. Ederlc. Rubén Alberto, Discipu/os y Ap6stoles de Jesûs. la refaciôn
according 10 some Modem British Theologians 1981 - 199R, 2006, pp. 528. entre los dis~Îpulos y los Doce seg1in Marcos, 2008, pp. 368.
141 . Balcius, Vidas, Virtit e opzione fondamentale. Una riflessione a partire 162. Caria, Roberto, Lo s1c1to ne/le teorie politiche di/. Kam e J. Maritain.
da/ contributo di S. Pinckaers e J. Fucks, 2007, pp. 240. Una legiuimazione tra raziona/ifà efede, 2008, pp. 306.
142. Xa lxo, Prem, Compleme11tari(1• of H11111t111 Ltfe and Other Life Forms i11 163. Mac~I?· ~nd~·é, A esca_tologia_ 11~ /ivro do Apocalipse. Da .wa realizaçiio
Nature: A Study of H11111a11 Obligations toward tlte Environment with Parficular 110 presenre !tt11rg1co a cons/usao da h1s1oria. 2008. pp. 394.
Reference to the Oraon lndigenrms Co1111111111ity of Chtoa11agp11r, lndia, 2007, pp. 164: Tamiono. Pa~lus Toni. Speoking tlte Tn11h in Christ. An Exegetico-Tlteo-
240. lug1ca/ Stu~y ofC?alat1c111s .4.12-20 a1~d Ephesians 4, 12-16, 2008, pp. 302.
143. Brighi, Davide. Assenso reole e scien:::e profane. li contributo di John 165. Z1ccard1, Costan11110 Antonio. Tite Relalionship ofJesus and tlie King-
Henrv Newman ad ww ri1111ovata ragio11e teologico, 2007. pp. 222. dom ofGvd Accordi11g to Luke-Acts, 2008, pp. 584.
144. · Petriglicri. Jgnazio, la definizirme dogmatico di Calcedonia 11ella 166. Brady, Patrick J., The Process ofSancriflcarion in the Cltris1ia11 life.
cristologia italiana co11tempora11ea, 2007. pp. 346. An Exegerical-Tlieological Study of 1Thess 4. 1-8 and Rom 6. 15-23, 2008, pp. 322.
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C ii \ ~ f .\L \. ~ 0 '1(rl 5 \ Kl\1l SA

«L ' AGIR PL ISSANT DL CHRIST


PARMI Lf-S CHRÉTI ENS »
L ne étude exégético-théol ogique
de 2Co 13 . 1-4 et Rm 14.1-9

La connais:-uncc de la puissance du Chrisl. t-=ib di:


Dit:u. au milieu de tllus œ ux qui croient en Lui est un
fai t é\'i<lcnt. notam ment pl)ur lcc:, C hrét1 ens Cc n\:st
œ pen<lant pas k cas pour tous en ce qui concerne la
manière dont die se manifes te.
Pour nous aider à comprendre comment le Chrbt
agit puissamment pam1i les Chrétiens. l'auteur
analyse deux c.xtrn its des lett res dc saint Paul : 2Co
IJ. 1-4 et Rrn 14.1-4 . .Elle pmm.uit sa renex1on en st:
référant à d'autre.!:> textes du l\ l qui mettent en
ê' idence la capaci té du Christ a produire des cfîcts
extraordinaires dans la vie de 'es fid~ l cs .
Au terme de ce travai l. il ~·a, èn: que la pu bsance
du Christ - qu i passe par la la1 bles-.;c - se révè le ù
traver-.; ses impacts o;, ur les C hn:til:ns sous une muhi -
plicite de fom1es. Elle peut se montrer en tan t qu ' une
pn.!sencc qui k s tram.forme. illumine. libère. etc.
Rien cependant ne s'opere san-.. une \êritablc relation
d'appancnancc au Christ

Cl 1 \1\ T .\L 1\ ~0 '\ ( d ~ .\ Kl t\ tr ~ \ . nêc à Kinshn'a


( R.D. Congo) en 19:" 1. entrcc dan-. la Congr~gatio n
des Filles ùc Notre Dame du <;acré-Cu:ur en 1992.
Elk a fo 1t ::.c~ ~tuti es de Ph iloso phll~ cl de theologic ù
l"Uniwr~llé Pont ilicalc Grégorienne de Rome Elk
obtient le doctorat en théologie bihliqul.' à celle ml.!mc
Unh crsité en 2009.
€ 22.00

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