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L' affaire fait grand bruit au sein de la communauté juive parisienne. Le projet de
destruction-reconstruction de la synagogue Copernic divise, depuis plusieurs mois,
les fidèles de ce lieu de culte. Elle agite aussi les voisins directs de cet édifice, dans le 16e
arrondissement de la capitale. En cause ? Le projet architectural qui doit remplacer l'édi-
fice existant. Le 21 octobre 2021, le conseil d'administration de l'Union libérale israélite
de France (Ulif, propriétaire du site), qui rassemble un millier de familles, a déposé une
demande de permis de démolition de l'immeuble qui l'abrite. Plusieurs recours juridiques
ont été déposés pour en obtenir l'annulation.
Si l'affaire prend une certaine résonance, c'est que cette synagogue est chargée d'histoire.
Inaugurée le 1er décembre 1907, elle a été la cible de plusieurs attentats en 1941 et en
1980. Le principal suspect de cette dernière attaque, extradé du Canada où il avait fui,
doit d'ailleurs être déféré prochainement devant une cour d'assises. Ce n'est cependant
pas en raison de cet événement tragique que les opposants au projet tentent de bloquer la
démolition de la synagogue, mais pour des raisons strictement patrimoniales. La décora-
tion de cette shoul (comme on désigne en yiddish un lieu de culte juif) est, en effet,
l'œuvre de l'architecte Marcel Lemarié. Remanié en 1923, l'oratoire arbore une décoration
typique de l'Art déco avec ses vitraux et ses moulures.
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Agrandi à deux reprises en 1961 puis en 1968, l'édifice religieux n'est cependant pas clas-
sé. La commission régionale du patrimoine et de l'architecture d'Île-de-France a, de fait,
refusé l'inscription au titre des monuments historiques, le 27 septembre 2018, au motif
que le site « ne revêt pas d'intérêt architectural particulier » et que « ses décors sont très
courants ». Cette décision a beaucoup étonné Eva Hein-Kunze qui fréquente les lieux de-
puis plus de trente ans. « C'est en effet la seule synagogue de France à avoir un tel décor
Art déco », explique-t-elle.
« Le seul héritage de la communauté juive libérale de Paris et de France »
Dès qu'elle a eu connaissance des menaces qui pesaient sur l'édifice, en 2017, elle a
créé une association pour la protection du patrimoine Copernic (APPC). « Mon seul objec-
tif est d'empêcher la réalisation du projet de démolition de la synagogue historique qui
constitue le seul héritage de la communauté juive libérale de Paris et de France, aussi bien
architectural que mémoriel », justifie-t-elle.
C'est son esthétique que critiquent les défenseurs du patrimoine. Ceux-ci estiment son ar-
chitecture « inadaptée à l'environnement ». Des riverains leur ont emboîté le pas. « Les
fondateurs de la synagogue Copernic souhaitaient se fondre dans le paysage. Le côté os-
tentatoire du nouvel édifice va à l'encontre de leur philosophie », émet Eva Hein-Kunze.
Ce à quoi Lionel Errera, administrateur de la synagogue, lui rétorque que « la communau-
té juive n'a pas à se cacher ».
Jean-François Bensahel, président de
l'Ulif, insiste sur le fait que « le bâtiment
n'est pas aux normes et est aujourd'hui
trop exigu, tant pour les offices que pour
les cours de Talmud Torah. Nous n'avons
pas d'autre choix que de l'agrandir ». Il
affirme que le projet architectural retenu
inscrit cette communauté dans
le XXIe siècle. Une manière selon lui de
défendre justement l'esprit des fonda-
teurs de ce mouvement qui pré-
tend concilier modernité et tradi-
tion. L'Institut international d'études hé-
braïques, installé sur place après la
i guerre, a été le premier centre de forma-
tion de rabbins libéraux en France. C'est
là qu'a été notamment formé le rabbin
Daniel Farhi (1941-2021) qui a fondé le mouvement juif libéral de France (MJLF) au-
jourd'hui animé par Delphine Horvilleur.
Mais ces arguments n'ont pas l'heur de convaincre ses opposants, qui ont lancé une péti‐
tion. Laquelle a réuni à ce jour plus de 11 000 signatures. Eva Hein-Kunze et son mari dé-
fendent un projet alternatif. Ils en ont présenté les grandes lignes lors d'une conférence
de presse le 21 juin en partenariat avec l'association « Regard naïf » de Roland Larivière.
Ce contre-projet conserve des plans initiaux l'idée de détruire un petit atelier, racheté par
l'Ulif et qui jouxte le bâtiment, pour construire, sur son emprise, un immeuble de six
étages. La façade mettrait en avant, de manière discrète, des éléments rappelant la voca-
tion des lieux : une corniche serait ornée par une représentation des tables de la loi et un
alignement, à chaque étage, de sept fenêtres rappellerait les sept bougies de la menorah.
Là où le projet de l'Ulif prévoit de passer de 1 093 m2 à 1 930 m2, celui de l'APPC attein-
drait les 1 260 m2. Dans le contre-projet de cette association, une terrasse végétalisée do-
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