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Personnages bibliques

Esther et le destin caché


3 Juin 2018

Rédigé par JiDé et publié depuis Overblog


Si le livre d'Esther a été rédigé quelques quatre ou cinq siècles avant notre ère, il n'en
reste pas moins un livre d'une brûlante actualité. Ce livre se termine par ces mots,
concernant le cousin d'Esther, Mardokaï (Esth. 2:7, 15) : "Il rechercha le bien de son
peuple et parla pour le bonheur de toute sa race" (Est. 10:3). 

Chronologiquement, ce dernier verset du livre d'Esther est également le dernier


de ce que l'on appelle communément l'Ancien Testament à avoir été rédigé. Dans
nos Bibles, cet "Ancien Testament" se termine par le livre de Malachie, mais l'ordre
des livres du Canon du Tanach (le texte original hébraïque de notre Ancien
Testament) est quelque peu différent. Il s'achève, quant à lui, par le deuxième
livre des Chroniques. Plus exactement, par ces deux versets : 

"La première année de Cyrus, roi de Perse, afin que s'accomplît la parole de
l’Éternel prononcée par la bouche de Jérémie, l’Éternel réveilla l'esprit de Cyrus, roi de
Perse qui fit faire de vive voix et par écrit cette publication dans tout son royaume :
Ainsi parle Cyrus, roi de Perse : l’Éternel, le Dieu des cieux, m'a donné tous les
royaumes de la terre et Il m'a commandé de lui bâtir une maison à Jérusalem en Juda.
Qui d'entre vous est de son peuple ? Que l’Éternel son Dieu soit avec lui et qu'il
monte" (2 Chroniques 36:22, 23). La question du roi Cyrus, bien qu'il soit d'une époque
ultérieure à celle d'Esther, la concerne pourtant indirectement : "Qui d'entre vous est
de son peuple ?"  

La jeune Hadassa (en hébreu "myrte"), sur le conseil de son cousin, changea son nom
hébreu en celui de "Esther".  Mais ce nom a une double signification car si, en langue
persane, il signifie "étoile", en hébreu il veut dire "caché". Hadassa entre alors en
clandestinité pour qu'Esther puisse pénétrer dans les sphères les plus élevées du
pouvoir.

L'histoire d'Hadassa / Esther commence à Suse (Shushan en persan), capitale d'un


immense empire sur lequel règne, depuis trois ans, le roi Xerxès / Assuréus (de son
nom persan : Arashvérosh). Cet immense empire médo-perse s'étend de l'Inde à
l'Ethiopie. Ce jour là, le roi a convié les grands de son empire à un magnifique festin.
Échauffé par le vin, Xerxès / Assuréus exige soudain la présence de son épouse Vashti
à sa fête. La reine refuse de venir s'exhiber devant ces convives avinés pour satisfaire
la vanité orgueilleuse de son époux. Le roi de Perse, conseillé par ses grands qui
considèrent ce refus comme un affront personnel, décide de répudier la reine sur le
champ. On chercha alors une nouvelle épouse pour le roi et une reine pour l'empire. 

La jeune Hadassa était une juive benjamite de la famille de Kiss, d'où était issu le roi
Saül en son temps. Son cousin Mardochée avait fait partie des déportés qui avaient été
emmenés de Jérusalem avec Jéconia, roi de Juda, par le roi Nabuchodonosor dans ce
qui était alors la Babylonie, et il élevait seul Hadassah. Esdras nous dit que
"Nabuchodonosor... détruisit cette maison (le Temple de Jérusalem) et emmena le
peuple captif à Babylone" (Esdras 5 : 12). Les déportés avaient été disséminés dans
l'immense empire babylonien dont Suse n'était pas encore la capitale. Mardochée et sa
jeune cousine s'étaient adaptés à leur nouvelle vie. Ils avaient assisté au changement
de pouvoir qui s'était opéré. Cette ville de province où ils s'étaient installés devint la
nouvelle capitale de cet empire qui venait de changer de main.  Peu de temps après le
festin qui eut lieu au palais, la rumeur commença à se répandre que la reine avait été
destituée. Mais une autre rumeur, plus inquiétante, commençait elle aussi à s'étendre
sur tout l'empire : la disparition soudaine d'un grand nombre de jeunes filles. Celles-ci
étaient, paraît-il, emmenées au palais. On cherchait une épouse pour le roi. Hadassa va
se retrouver parmi les jeunes filles "invitées de force" au palais, aux bons soins des
eunuques. Il nous est dit que Esther fut présentée au roi au mois de Thébèth (ce qui
correspond, dans notre calendrier, à Décembre / Janvier). Or, la préparation des futures
concubines du roi, toujours selon ce que nous dit le texte, durait douze mois. On peut
donc en conclure que l'enlèvement d'Esther eut lieu à cette même période, l'année
précédente. La maison de Mardochée devait être bien froide cet hiver là. L'absence
d'Hadassa, qu'il avait élevée à la place de ses parents disparus, devait peser bien
lourdement sur son cœur. Mardochée connaissait le sort des concubines du roi. Une
fois "connues", elles allaient dans "la maison des femmes", là où s'entassaient, l'une
après l'autre, celles qui n'avaient pu satisfaire ses appétits que le temps d'une nuit.
Vashti avait refusé de se présenter devant le roi alors qu'elle y était invitée. Plus tard,
Hadassa, devenue Esther reine de Perse, se présentera, de sa propre initiative et au
péril de sa vie, devant ce même roi dont elle était devenue l'épouse.  

Mardochée était un benjamite déporté du royaume de Juda (le royaume du Sud étant
formé, après le schisme, des deux tribus de Juda et de Benjamin). Son nom a une
consonance qui ne rappelle pas ses origines car Mardokaï (son vrai nom) est associé
au dieu babylonien  Mardouk. On peut donc supposer que, alors qu'ils vivaient dans ce
qui était encore l'empire babylonien, le cousin d'Hadassah s'était déjà attribué un nom
plus "local". Quelques vingt-cinq siècles plus tard, d'autres juifs, disséminés eux
aussi dans un immense empire gouverné par un tsar, se donneront des noms tels que
Vladimir ou Ivan. Selon ce que lui avait recommandé Mardochée, Esther, une fois au
palais, "ne fit connaître ni son peuple, ni sa naissance" (Esther 2:10, 20). Si
Hadassa avait vécu à l'époque du rois Cyrus, elle n'aurait pas été tenue de respecter la
consigne de son cousin. A la question "Qui est de son peuple ?", Hadassa aurait pu
répondre au roi Cyrus comme elle le fit à Xerxès / Assuréus : "Sauve mon peuple, voilà
mon désir" (Est.7:3).  

Mardochée vient de faire déjouer un complot contre le roi de Perse. Après que les
comploteurs aient été pendus, le compte-rendu en est fait dans le livre des chroniques
en présence même du roi. Pourtant, le roi, qui a échappé à un projet d'assassinat, ne
manifeste à l'égard de Mardochée aucun geste de reconnaissance. Qui plus est, c'est
un certain Haman, Amalécite, qui vient au pouvoir dans le cercle rapproché du
monarque. Un Amalécite, ennemi juré du peuple hébreu. Un descendant de ce roi que
Saül avait épargné. On peut comprendre que Mardochée refuse obstinément de se
prosterner devant lui. Lorsque Haman apprit de quel peuple était Mardochée, sa colère
n'en fut que plus vive. Ainsi, ce Mardochée était de ce peuple qui avait exterminé ses
aïeux. Il en conçut une telle haine qu'il "voulut détruire le peuple de Mardochée, tous
les juifs qui se trouvaient dans le royaume" (Est. 3:6). Plus de deux mille quatre cents
ans plus tard, un autre "fils d'Haman" allait mettre ce même projet à exécution. Projet
de destruction qui coûta la vie à plus de six millions de Juifs. Le mot qui est utilisé ici
pour parler de "détruire" le peuple de Mardochée est bien plus fort que celui utilisé
plus haut. "Chamad" signifie exterminer, détruire, faire disparaître. Il en est
question plus en détail dans un autre article sur la shoah. 

Mardochée et Hadassa étaient donc de la famille de Kiss, de qui descendait également


le roi Saül. Celui-ci, lorsqu'il régnait autrefois sur le royaume d'Israël, avait épargné la
vie d'Agag, roi  d'Amalek, désobéissant ainsi à l'ordre de l’Éternel qui était de ne laisser
vivant aucun Amalécite (1 Samuel 15:1 à 11). Un descendant d'Agag, Haman, fut
promu à un poste élevé du pouvoir  à la cour du roi pour le plus grand malheur du
peuple juif. Une rancune vieille de plusieurs générations allait bientôt mettre en péril
les vies de Mardochée et de sa cousine, ainsi que de tous les juifs vivant dans
l'immense empire perse. Une sorte de "pogrom" avant la lettre allait bientôt se mettre en
place. Mais l'enlèvement d'Esther (qui ne portera désormais plus que ce seul prénom)
va contribuer au salut de tout son peuple. Par cette situation apparemment
malencontreuse, le plan de salut de Dieu pour le peuple juif (qui ne se doute pas encore
de la menace qui va bientôt peser sur lui) est en train, lui aussi, de se mettre en place.
Bien involontairement, Mardochée, fils de Kiss, va être un instrument dans la main de
Dieu pour achever ce que son lointain parent Saül avait négligé de faire. Le descendant
d'Agag, roi d'Amalek, va périr comme auraient dû le faire tous les Amalécites. La folie
destructrice d'Haman l'avait conduit à vouloir détruire le peuple juif. Elle le conduira à
sa propre fin. 

Nous avons vu plus haut que "Nabuchodonosor... détruisit cette maison et emmena le


peuple captif...". Il est intéressant de noter que, en hébreu, le mot "détruisit" a la
même racine que le nom d'Esther (avec les lettres sameh, tav et resh). Étonnamment,
ce verbe, en araméen, a une double signification. Il  peut également se traduire par
"cacher, dissimuler". C'est ainsi que le livre de Daniel nous dit que Dieu "révèle ce
qui est profond et caché (cethar)" (Daniel 2:22). Nous verrons plus loin comment cela
s'applique à l'histoire d'Esther. Ainsi, même si le nom de Dieu n'est pas mentionné dans
le livre d'Esther, son absence est tellement discrète qu'on s'en aperçoit à peine.
Dans le livre du Deutéronome, Dieu dira : "Et moi, je cacherai ma face... (anoki haster
astir)" (Deut. 31 :18). A une lettre près, on pourrait le lire ainsi : "Et moi, je cacherai
Esther". Dans le livre d'Esther, Dieu cache sa face mais il cache également la véritable
identité d'Esther. Haman l'Amalécite, quant à lui, cherchera bientôt à détruire ce peuple
contre qui il garde une haine féroce, ce peuple "autrefois emmené captif" par le roi de
Babylone.

"L'esprit d'Amalek" agit encore aujourd'hui. Il est à l'origine de toutes les formes


d'antisémitisme car, selon les époques, il prend des formes diverses et s'adapte à
chaque fois à son nouvel environnement. Ainsi, Moïse prophétisa en disant : "il y aura
guerre de l’Éternel contre Amalek de génération en génération" (Exode 17:16). Chose
étonnante, il écrit plus haut : "l’Éternel dit à Moïse : écris cela dans le livre pour que le
souvenir s'en conserve... j’effacerai la mémoire d'Amalek de dessous les cieux" (Exode
17:14). Comment peut-il y avoir "guerre de l’Éternel contre Amalek de génération en
génération" alors que Dieu promet "d’effacer la mémoire de ce peuple" ? La réponse
est : à cause d'Haman ! Le Livre d'Esther, que l'on appelle "Meguillah d'Esther", utilise
une expression particulière pour parler d'Haman. Cette expression, "Tsorer kol ha
yehoudim" (Esth. 3:10 - 8:1 - 9:10, 24), ne se retrouve nulle part ailleurs dans la Bible.
Elle signifie : "ennemi de tous les juifs", c'est à dire de TOUS les juifs, de tous les
temps, de toutes les époques et de tous les pays. Lorsqu'il est parlé de "Haman fils de
Hammedatha, l'Agaguite, ennemi des juifs", on peut se demander qui, de Haman ou de
Hammedatha son père, est ennemi des juifs. La réponse est : "les deux". La haine
qu'éprouve Haman pour le peuple juif lui a été transmise par son père. Et celui-ci la tient
du sien qui... et l'on peut remonter ainsi jusqu'à l'époque du roi Saül qui épargna la vie
du roi des Amalécites.

Le mot "Amalécite" signifierait : "peuple qui lape". Le livre des Juges nous dit que
Gédéon, devant affronter le peuple d'Amalek, sur le conseil de Dieu, choisit les
guerriers qui l'accompagneraient au combat selon qu'ils boiraient l'eau de la rivière avec
leur main ou en la lapant (Juges 7:4 à 7). Les Sages d'Israël ont dit : "de tous temps, à
toutes les époques, il nous faudra discerner QUI est Haman. Quel est l'ennemi qui veut
nous détruire ?". Les pogroms des Cosaques, l'inquisition espagnole, les Bolchéviques,
les nazis... derrière tout cela, c'est toujours "l'esprit d'Haman" qui est à l'oeuvre. Le nom
d'Haman est un mot persan d'origine sanskrite qui désigne la planète Mercure, et le
nom du père d'Haman, Hammedatha, veut dire "donné par la lune". Or, Mercure porte
également ailleurs le nom de Vulcain, le dieu qui fabrique les armes. Aujourd'hui
encore, "Haman" porte les armes de son père, "donné par la lune". Le croissant de lune
a bien souvent représenté une menace pour ce petit peuple, mais l'étoile de David a
toujours connu la victoire parce que la lumière triomphe toujours des ténèbres. 

J'aimerais m'arrêter quelques instants sur le mot "tsorer", de l'expression "tsorer ha


yehoudim" ("l'ennemi de tous les juifs"). Il signifie : "être à l'étroit, enfermer, persécuter,
opprimer". Moshè Kaz dit que ce mot "renvoie directement à la notion d'étroitesse de la
liberté de mouvement puis de la liberté de penser. Comme tout ghetto qui limite la
liberté de mouvement et enserre les juifs dans un espace restreint, comme une étape
de leur longue agonie et de leur étouffement". Pendant les quatre siècles de son
esclavage en Egypte, le peuple hébreu s'est trouvé exploité dans un pays dont la
signification du nom égyptien, "Mitsraïm", signifie "double enfermement". Les notions
d'étroitesse et de double enfermement rappellent les conditions épouvantables dans
lesquelles les juifs ont été parqués dans les trains qui les conduisaient à une mort
certaine, selon qu'il est écrit : "pour qu'on détruisît, qu'on tuât et qu'on fit périr tous les
juifs jeunes et vieux, petits enfants et femmes, en un seul jour, le treizième du
douzième mois qui est le mois d'Adar, et pour que leurs biens fussent livrés au pillage"
(Est. 3:13). Ainsi Haman," l'ennemi de tous les juifs", continuait-il à agir pour sa
destruction. Mais ce que Haman ignorait, c'est que la reine de Perse était juive, et que
le nom qui lui avait été donné à sa naissance était "Hadassa" (la myrte). Or, en Israël,
cette plante est réputée pour être particulièrement résistante, à tel point qu'elle est
devenue un symbole de l'indestructibilité d'Israël. La myrte est également l'un des
éléments constitutifs de la Soukkah, cette tente de branchages sous laquelle les juifs
se réunissent en famille pour se rappeler leurs pérégrinations dans le  désert pendant
quarante ans. 
 

Avant de poursuivre le cours du récit, il nous faut tout d'abord nous arrêter sur son
déroulement dans le temps. Esther 1:3 nous dit que les événements relatés au début
du récit se déroulent dans la troisième année du règne d'Assuréus / Xerxès. Est. 2:16
nous dit que "Esther fut conduite auprès du roi Assuréus / Xerxès le dixième mois qui
est le mois de Tebeth, la septième année de son règne". Quatre années se sont donc
écoulées depuis que la reine Vashti a été répudiée. Le couronnement d’Esther
comme reine s'est donc produit quatre ans plus tard (2:17). Les expressions "dans
ce même temps" (2:21) et "après ces choses" (3:1) nous laissent supposer que nous
sommes toujours dans le cours de cette septième année durant laquelle Haman eut
l'intention de détruire le peuple de Mardochée (3:6). Mais le verset suivant (3:7)
introduit une nouvelle date : "Au premier mois qui est le mois de Nissan, la
douzième année du roi Assuréus / Xerxès". Cinq années se sont donc écoulées
depuis que Haman a médité la destruction du peuple de Mardochée sans que ce projet
ne l'ai quitté le moins du monde. En ce premier jour du premier mois de l'année juive (le
1 Nissan), le temps est venu pour lui de mettre enfin son projet à exécution.  "Les
secrétaires du rois furent appelés le treizième jour du premier mois" pour que soit
rédigé l'ordre de destruction du peuple juif (Est. 3:12). Cette date n'est pas anodine car
elle précède le quatorzième jour du mois de Nissan qui est le Jour de la Pâque,
Pessah. C'est donc ce Jour de la Pâque, jour qui célèbre la délivrance du peuple juif
hors d'Egypte, que "les lettres furent envoyées par les courriers dans toutes les
provinces du roi pour qu'on détruise, qu'on tue et qu'on fasse périr tous les juifs..." (Est.
3:13). On pourrait penser que Haman envoyait ainsi un message à ses ennemis jurés
pour leur dire : "Vous avez échappé à l'Egypte mais, à moi, vous n'échapperez pas".
Lorsque la nouvelle se répandit dans la capitale, "toute la ville fut dans la
consternation", ce qui laisse supposer que le peuple juif était relativement apprécié par
la population et contredit les accusations dont Haman se servit pour obtenir l'accord du
roi.

Mardochée apprend la terrible nouvelle à sa cousine qui, enfermée dans le palais, n'a
eu aucune connaissance des événements qui se préparent. Pour Mardochée, seule
l'intervention d'Esther, en tant que reine, peut sauver leur peuple. Or Esther, qui est
déjà l'épouse du roi depuis cinq années maintenant, ne pense plus pouvoir prétendre
obtenir "grâces et faveurs devant lui plus que les autres jeunes filles" (2:17), mais en
cela elle se trompe (Esth. 5:2). Elle ne peut paraître devant le roi sans y avoir été
invitée et sans que cela puisse lui coûter la vie. Mais Mardochée a cette parole qui est
peut-être l'une des plus connue du livre d'Esther : "N'est-ce pas pour un temps
comme celui-ci que tu es parvenue à la royauté ?" 

Mais quel temps ? La rumeur du danger encouru par le peuple de Mardochée s'est
probablement rapidement répandue dans la capitale. Nous sommes donc tout au plus
quelques jours après la Pâque. "N'est-ce pas pour un temps comme celui-ci ?" Pour
ce temps particulier pendant lequel le peuple juif célèbre sa délivrance et sa sortie
d'Egypte. Pour bien comprendre toute la dimension de ce livre et sa profondeur, il faut y
voir en parallèle l'aspect à la fois historique et prophétique du récit. Cette double
dimension décrit à la fois le sort du peuple juif vivant dans l'empire Perse (le troisième
empire dont parle le prophète Daniel dans son interprétation du rêve du roi
Nabuchodonosor) mais aussi de tous les temps et de toutes les époques.
L’expression "pour un temps comme celui-ci" s'applique tout aussi bien à l'époque
d'Esther qu'à la nôtre. 

Lorsque Haman va présenter ses griefs contre le peuple juif au roi de Perse, il le
présente comme "un peuple dispersé et à part" (am ehad mèfouzzar ou
mèforad"  Esth. 3:8). La présence du mot "ehad" est importante. Celui-ci souligne la
particularité unique de ce peuple. "Am ehad", littéralement : "un peuple un", ce qui
souligne à la fois combien ce peuple est unique et différent des autres nations, mais
également qu'il a réussi à préserver son unité malgré sa dispersion. C'est un peuple
unique et uni. Le seul qui ait su, à travers les vicissitudes de son histoire, préserver son
identité au travers de sa dispersion, alors que bien des peuples contemporains ont
disparu depuis des siècles. Il faut noter que la dispersion du peuple juif parmi les
nations était initialement une conséquence de son endurcissement contre la volonté de
son Dieu. Le psalmiste se plaint en disant : "Tu nous disperses parmi les nations"
(Psaume 44:11). Il est aussi écrit : "l’Éternel frappera Israël... il les dispersera de l'autre
côté du fleuve (l'Euphrate)" (1 Rois 14:15).

Notre récit nous amène ensuite à un festin donné par la reine Esther, auquel elle a
convié le roi et son conseiller Haman, flatté d'avoir ainsi été privilégié par la reine.
Le roi, lui, tout à son bonheur, promet d'exaucer la demande d'Esther quelle qu'elle
puisse être. Mais Esther, prudente, sachant le roi aussi versatile qu'imprévisible, n'aura
d'autre requête que de pouvoir à nouveau inviter son mari et le conseiller de celui-ci au
banquet qu'elle donnera le lendemain. "Demain, je donnerai la réponse au roi selon son
ordre" dira Esther au monarque dont la curiosité est ainsi attisée. Ce "Demain" est une
des clefs pour la compréhension du sens prophétique du livre d'Esther. Nous le verrons
plus loin. Mais la joie de l'Amalécite est ternie par l'ombre de Mardochée qui refuse
toujours de se prosterner à son passage. Frustré, Haman s'en confie à sa femme
Zeresch. Sur le conseil de celle-ci, il fait bâtir une potence, de cinquante coudées de
hauteur, à laquelle il espère bien faire pendre l'impudent qui refuse obstinément de lui
rendre hommage. Il ignore encore que c'est lui qui y sera bientôt pendu. Le corps se
verra assurément de loin. Haman pense peut-être faire ainsi un exemple pour tous ceux
qui refuseraient, comme Mardochée, de reconnaître son rang et sa dignité. Mais dans
les Écritures, aucun détail n'est jamais présent par hasard. Tout a une signification. Or,
les Sages d'Israël ont dit : "Cinquante est le nombre qui symbolise ce qui est
caché et révélé". Effectivement, c'est durant ce deuxième festin organisé par la reine
qu'Esther va révéler au roi sa véritable identité.

"Qui d'entre vous est de son peuple ? Que l’Éternel son Dieu soit avec lui". Au
moment propice, Esther se révèle au roi comme faisant partie de ce peuple dont
Haman a programmé la destruction. Et plus encore, comme étant une proche parente
de ce Mardochée qui avait permis de faire échouer le complot ourdi contre la vie de
l'empereur. Le roi, furieux, se retire un instant à l'écart. Haman, qui sent que sa perte
est arrêtée, tente d'infléchir le cœur de la reine en se jetant à ses pieds mais le roi,
surgissant à cet instant même dans la salle du festin, pense voir son conseiller porter
atteinte à la vie de la reine. Immédiatement, un sac est jeté sur la tête d'Haman par l'un
des gardes. C'est à la potence qu'il destinait à Mardochée qu'Haman va être pendu. Le
16 Octobre 1946, à Nuremberg en Allemagne, aura lieu le procès puis l'exécution de dix
nazis ayant participé ou ayant fortement favorisé l'extermination de six millions de Juifs
dans les camps de concentration. Après avoir gravi les treize marches de la potence,
un sac est mis sur leur tête avant que le bourreau ne leur passe la corde autour du cou.
Puis un bruit sec. A dix reprises, la trappe va s'ouvrir. Mais ce n'est qu'un aspect de la
similitude entre les deux événements dont le premier se déroule à Suse en Perse, et
l'autre à Nuremberg, au sein même du fief du nazisme vaincu. Nous avons vu que
lorsqu'il est écrit : "Haman, fils d'Hammedatha, l'Agaguite, ennemi de tous les juifs",
"Tsorer kôl ha yéhoudim" (Esth. 9:24), on ne peut déterminer, de Haman ou de
Hammedatha l'Agaguite, lequel est "ennemi des juifs", car ils le sont tous deux. Il en est
de même de Haman comme de ces dix hommes, condamnés à mort par pendaison.

J'aimerais revenir un instant sur le nombre "cinquante" dont, je le rappelle, les Sages
d'Israël ont dit : "Cinquante est le nombre des choses cachées et révélées". Pour
comprendre la portée de ce nombre et sa signification, il nous faut nous référer à ce qui
peut être considéré, en sa structure, comme un "plan", une "maquette" de l'oeuvre de
Dieu au sein de son peuple : le Mishkan, plus généralement connu sous le nom de 
"Tabernacle". Ainsi, il est écrit dans le livre de l'Exode : "on mit cinquante lacets au
premier tapis, et l'on mit cinquante lacets au bord du tapis terminant le second
assemblage, ces lacets correspondaient (en hébr. "qabal) les uns aux autres. On fit
cinquante agrafes d'or et l'on joignit les tapis l'un à l'autre avec les agrafes. Et le
Tabernacle forma un tout" (Exode 36:12, 13). Ce n'est pas ici le sujet de détailler le
Tabernacle, mais je voudrais juste souligner le fait que ces cinquante lacets
permettaient d'ajuster ensemble ce qui devait parachever le Tabernacle dans sa
réalisation finale. L'achèvement de cette réalisation complexe dépendait de la façon
dont les divers éléments s'ajustaient de façon symétrique (qabal) les uns aux autres
pour que l'édifice "forme un tout". Il en est de même du récit biblique auquel
viennent s'ajuster divers événements de l'Histoire pour former cet édifice qu'est en
réalité l'Histoire du peuple juif.

"Au douzième mois qui est le mois d'Adar, le treizième jour du mois, jour où devaient
s'exécuter l'ordre et l'édit du roi, et où les ennemis des juifs avaient espéré dominer sur
eux, ce fut le contraire qui arriva et les juifs dominèrent sur leurs ennemis" (Est. 9:1).
C'était initialement le projet qu'avait fomenté Haman, mais Haman était mort et ses fils
allaient également périr parmi les "ennemis des juifs". Le texte dit : "les dix fils
d'Haman, fils d'Hammedatha, l'ennemi des juifs" (Est. 9:10). On peut comprendre que
les dix fils sont ceux d'Haman et que "l'ennemi des juifs" c'est Hammedatha. Mais
pourquoi les dix fils ont-ils péri ? Parce qu'ils faisaient partie de leurs "ennemis". Il est
donc évident que ces trois générations d'hommes portaient en eux le même germe de
haine contre le peuple d'Esther et de son cousin Mardochée. Et s'ensuit une requête
étrange de la reine Esther au roi Xerxès / Assuréus : que les dix fils d'Haman soient
pendus. Requête à laquelle le roi acquiesce bien que ceux-ci soient déjà morts.
Pourquoi cette demande ? Pourquoi pendre ces hommes qui étaient déjà morts ?
La réponse est dans ce mot "demain" (mahar). "Mahar", que l'on pourrait traduire
par "demain, dans le futur, dans les temps à venir". "Que l'on pende au bois les dix
fils d'Haman" (Est. 9:13).

Qui sont-ils, ces dix fils d'Haman ? Cette liste de noms apparaît telle quelle dans le
texte original du livre d'Esther. Ils forment une colonne à la droite de la page. 

Parschandatha 

Dalphon 

Aspatha 

Poratha

Adalia
Aridatha

Parmaschtha

Arizaï

Aridaï

Vajezatha 

Il y a, dans les Écritures, un petit mot hébreu qui apparaît régulièrement mais que l'on
ne traduit pas parce qu'il fait partie de la construction de la phrase. Ce petit mot, c'est
"èth", qui s'écrit avec un aleph et un tav, la première et la dernière lettre de l'Alphabet
hébreu. Les Sages d'Israël ont dit : "Ce mot signifie : ce qui est écrit". Or le texte dit :
"kedat ha yom ve èth acèreth bènèï Haman" (d'après la loi de ce jour, selon ce qui est
écrit sur les dix fils d'Haman). Et qu'est-il écrit ? "Qu'ils soient pendus au bois", comme
si la sentence avait déjà été écrite à l'avance. L'exécution du décret royal ordonnant
que les dix fils d'Haman soient pendus serait donc l'accomplissement d'un décret divin,
écrit au préalable bien avant que n'aie lieu leur condamnation. Les Sages d'Israël ont dit
: "il y a un "demain" pour aujourd'hui, et il y a un "demain" pour le futur". Ce qui s'est
produit du temps d'Esther est appelé à se reproduire. C'est pourquoi ce "demain" dont
parlait Esther s'est reproduit en Octobre 1946, à Nuremberg, siège du nazisme, où
furent jugés les criminels de guerre par un tribunal militaire international. Le mode
d'exécution choisi de concert par les participants fut le mode britannique : la pendaison.
Il y eut onze condamnés à mort mais l'un d'entre eux, Hermann Goering, se suicida
dans sa cellule en avalant une capsule de cyanure. Ainsi, ces "dix fils d'Haman"
périrent-ils par pendaison, réalisant ainsi la prophétie du livre d'Esther. Mais quelque
chose d'étrange s'est produit lors de l'une de ces exécutions. Lorsque le responsable
de la propagande nazie, Julius Streicher est monté sur la potence, il s'est tourné vers
les personnes présentes assistant à l'exécution et s'est écrié : "Pourim 1946". Que
pouvaient bien vouloir dire ces mots ? Pourquoi ce haut dignitaire nazi, alors qu'il ne lui
reste plus que quelques instants à vivre, prononce-t-il le nom d'une fête juive, faisant
très probablement référence au livre d'Esther ? Pour comprendre la suite, il nous faut
nous arrêter sur quelques petits détails que contient la liste des noms des fils d'Haman
mentionnés dans le livre d'Esther. 
 

Depuis l'antiquité, les scribes recopient scrupuleusement, lettre par lettre, le texte
biblique. Certaines lettres sont parfois plus petites, plus grandes, certaines viennent à
manquer, alors que d'autres ne se justifient pas mais le texte étant sacré, on ne peut le
modifier. Jésus lui-même a attesté cela lorsqu'il dit : "Car je vous le dis en vérité, tant
que le ciel et la terre ne passeront pas, il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un
seul trait de lettre, jusqu'à ce que tout soit arrivé" (Matthieu 5:18). Siècles après siècles,
les scribes ont recopié ces noms tels qu'ils les avaient trouvés dans le texte, avec des
lettres plus petites et une dernière plus grande que les autres, et cela sans en
comprendre le sens. Jusqu'au jour où l'on découvrit que, puisque les lettres sont
également des chiffres, cela correspondait à une année du calendrier hébraïque, l'an
5707. Cette année 5707 correspondant, selon notre calendrier, à 1946. Ainsi se réalisa
la parole qu'Esther avait prononcée devant le roi : "qu'il soit permis aux juifs qui sont à
Suse d'agir encore demain selon le décret d'aujourd'hui et que l'on pende au bois les
dix fils d'Haman" (Est.9:13). Julius Steicher avait-il compris que ce qui se déroulait, ce
16 Octobre 1946 à Nuremberg, était en réalité l'accomplissement d'une ancienne
prophétie dont personne jusqu'alors n'avait compris le sens ? On a découvert que la
bibliothèque de cet ennemi acharné du peuple juif était en fait remplie d'ouvrages
rédigés en hébreu. Julius Streicher faisait partie de ces hommes qui s'imprègnent de
tout ce qui concerne leurs adversaires afin de mieux les combattre. Mais pourquoi une
telle haine ? Selon le grand rabbin Vilna de Gaon, qui vécut au dix-huitième Siècle, le
peuple germanique serait issu du peuple d'Amalek, dont était membre le perfide
Haman. Ce peuple aurait été appelé autrefois "Guermania", la Germanie, de qui naîtra
le peuple allemand et dont faisaient partie ces dix hommes qui furent pendus tout
comme le furent les dix fils d'Haman l'Amalécite. 

Mais il y a plus encore. 

Nous avons vu que l'année 5707 correspond à l'année 1946 de notre calendrier. Mais le
16 Octobre 1946 correspond, dans le calendrier hébraïque, au vingt et unième jour du
mois de Tishri qui est aussi appelé Hoshannah Rabba. Ce jour est le septième jour de
la fête de Soukkoth et fait partie de ce que, dans le judaïsme, on appelle les "dix jours
redoutables". C'est au terme de ces dix jours que le jugement rendu à Rosh Hashanna
(la nouvelle année juive) entre en vigueur. Ainsi, par l'intermédiaire de la justice des
hommes s'accomplissait une autre justice, divine celle-ci. La prophétie énoncée par la
reine Esther envers "l'ennemi de tous les juifs" venait de se réaliser. Mais cette jeune
reine avait su préserver en elle cette identité et ce nom qui lui avait été donné à sa
naissance : Hadassa. Ce nom qui symbolisait pour ce peuple menacé l'indestructibilité
d'Israël. 

Mais s'il est une fête qui doit être associée au livre d'Esther, c'est bien évidemment
Pourim (Est.9:27 à 32). "Les juifs prirent pour eux et pour leur postérité et pour tous
ceux qui s'attacheraient à eux (futurs beaux-fils et belles-filles) la résolution et
l'engagement de célébrer chaque année ces deux jours selon le mode prescrit. Au
temps fixé ces jours devaient être rappelés et célébrés de génération en génération
dans chaque famille... et ces jours ne devaient jamais être abolis au milieu des juifs, ni
le souvenir s'en effacer parmi leurs descendants". Et donc, même si le Nouveau
Testament n'en fait pas mention, Jésus et ses disciples devaient fêter la fête de Pourim
en son temps. Le texte poursuit : "...comme ils les avaient établis pour eux-mêmes et
leur postérité", ce qui sous-entend que Mardochée et Esther enseignèrent ces choses à
leurs enfants. Esther eut ses enfants à la cour royale et ceux-ci furent probablement
élevés comme princes et princesses du royaume de Perse. Mais leur mère leur
enseigna, tout comme leur oncle Mardochée à ses propres enfants, la signification de la
fête de Pourim et comment l'un et l'autre, avec l'aide de Dieu, purent empêcher la
disparition de leur peuple, déjouant ainsi les projets d'Haman l'Amalécite, "l'ennemi de
tous les juifs".  

Le code introduit, il y a des siècles de cela, dans la liste des fils d'Haman venait de
délivrer son secret. Les choses cachées étaient enfin révélées. Les divers événements
de l'Histoire s'étaient assemblés "pour former un tout", tout comme pour les éléments
du Mishkan. Les pièces du puzzle venaient s'ajouter l'une à l'autre et les éléments  du
récit biblique venaient s'ajuster aux événements pour que continue à s'édifier cet édifice
toujours menacé de l'Histoire du peuple juif. Jusqu'à ce que vienne un autre roi de
Babylone ayant projeté, une fois de plus, de "détruire la maison d'Israël".   

JiDé
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