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réalités Cardiologiques – n° 371_Avril 2022

Revues générales

Désir de grossesse
chez une femme hypertendue
RÉSUMÉ : Les désordres hypertensifs de la grossesse (DHG) surviennent dans 7,4 % des cas, grevant
le pronostic maternel et fœtal. Ils représentent aussi un facteur de risque de survenue de maladies
cardiovasculaires ou rénales dans les décennies qui suivent.
Une grossesse chez une femme hypertendue doit être préparée. Le suivi doit être coordonné entre les
différents intervenants (médecin généraliste, équipe obstétricale, spécialiste et pharmacien).
Il est recommandé de traiter sans délai toutes les hypertensions artérielles (HTA) sévères
PAS  ≥ 160  mmHg ou PAD ≥ 110 mmHg. Le seuil de mise en route d’un traitement est plus bas
(140-159/90-109 mmHg) en cas de risque cardiovasculaire élevé, de maladie cardiovasculaire
ou rénale, de diabète gestationnel. L’objectif thérapeutique est une PAS < 160 mmHg et une PAD
entre 85 et 100 mmHg.
Les antihypertenseurs autorisés pendant la grossesse sont l’alpha-méthyldopa, le labétalol, la nifédi-
pine et la nicardipine. Les IEC, les ARA2 et les antialdostérones sont contre-indiqués ; les diurétiques
et les bêtabloquants ne sont pas recommandés.
L’automesure est préconisée pour le suivi des femmes hypertendues enceintes. La surveillance ten-
sionnelle doit être très rapprochée en raison du risque de prééclampsie voire d’éclampsie.

L’
hypertension artérielle (HTA) grossesse : pression artérielle systolique
touche environ 7,4 % des gros- (PAS) ≥ 140 ou pression artérielle diasto-
sesses et représente la première lique (PAD) ≥ 90 mmHg.
cause de mortalité et de morbidité mater-
nelle et fœtale. Les risques maternels sont On parle d’HTA légère à modérée
essentiellement l’éclampsie, l’accident entre 140 et 159 mmHg de PAS et 90 et
vasculaire cérébral (AVC) et l’insuffisance 109 mmHg de PAD.
rénale aiguë. Les risques pour le fœtus
sont le retard de croissance intra-utérin L’HTA est dite sévère si la PAS est
(RCIU), la prématurité, la mort in utero. ≥ 160 mmHg ou la PAD ≥ 110 mmHg
(tableau I).
Le dernier rapport de l’Enquête nationale
confidentielle sur les morts maternelles Les désordres hypertensifs de la gros-
Y. ANTAKLY
Service de Cardiologie, (ENCMM) classe les maladies cardiovas- sesse (DHG) regroupent :
Hôpital Saint-Joseph, PARIS. culaires au premier rang de la mortalité – l’HTA chronique qui préexiste à
maternelle, à part égale avec les suicides la grossesse ou qui apparaît avant la
maternels, devant les hémorragies de la 20e semaine d’aménorrhée (SA) ;
délivrance [1]. – l’HTA gestationnelle qui apparaît chez
une femme enceinte après la 20e SA. En
général, les chiffres de pression arté-
Quelques définitions  rielle se normalisent dans les 6 semaines
post-partum ;
Il existe un consensus international – la prééclampsie définie par une HTA
pour la définition de l’HTA pendant la (contrôlée ou non) associée à une pro-

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l Informer la patiente des risques d’une


Définition de l’HTA au cours de la grossesse
grossesse compte tenu de l’HTA chro-
HTA lors de la grossesse PAS ≥ 140 mmHg ou PAD ≥ 90 mmHg
nique.
HTA légère à modérée PAS = 140-159 mmHg ou PAD = 90-109 mmHg
HTA sévère PAS ≥ 160 mmHg ou PAD ≥ 110 mmHg l Rechercher à l’interrogatoire des fac-
teurs de risque de prééclampsie : anté-
Tableau I : Définition de l’HTA au cours de la grossesse.
cédent personnel de prééclampsie,
téinurie pathologique (protéinurie sesse mais également à plus long terme, antécédents familiaux de prééclampsie,
≥ 300 mg/j ou ratio protéinurie/créatini- même plusieurs dizaines d’années après. autres facteurs de risque cardiovascu-
nurie ≥ 30 mg/mmol ou 300 mg/g) décou- Les femmes ayant présenté une HTA ges- laire, rechercher des arguments en faveur
verte après 20 SA. tationnelle ou une pré­éclampsie ont un d’un syndrome d’apnée du sommeil.
risque majoré d’HTA chronique, d’AVC
La prééclampsie est jugée sévère si elle et d’accidents coronaires. L’étude fran- l L’objectif est de préparer au mieux
s’accompagne d’au moins un des critères çaise CONCEPTION, réalisée à partir des cette grossesse en arrêtant les traite-
suivants : données du Système national des don- ments potentiellement tératogènes. Il
nées de santé (SNDS), a colligé toutes les y a 4 molécules autorisées pendant la
l Une HTA sévère. naissances survenues entre le 1er janvier grossesse : l’alpha-méthyldopa, le labé-
2010 et le 31 décembre 2018 et a permis talol, la nicardipine et la nifédipine. En
l Une atteinte viscérale définie par au d’apporter des données sur la fréquence vue d’une grossesse, les autres médica-
moins l’un des critères suivants : des DHG et de leurs complications ments anti­hypertenseurs doivent être
– une oligurie < 500 mL/24 h, ou une (tableau II) [4]. remplacés par un ou plusieurs de ces
créatininémie > 135 µmol/L, ou une 4 médicaments.
protéinurie > 3 g par 24 h ; Les patientes ayant une HTA chronique
– un œdème aigu du poumon ; ont un risque très élevé de développer l Les IEC et les bloqueurs des récepteurs
– une douleur en barre épigastrique per- une prééclampsie : ce risque est multi- de l’angiotensine sont tératogènes aux
sistante ; plié par 6 chez les nullipares et 12 chez 2e et 3e trimestres de la grossesse ; s’ils
– un HELLP syndrome (hémolyse intra- les multipares [4]. ont été pris pendant le 1er trimestre de
vasculaire, cytolyse hépatique et throm- la grossesse, il n’y a pas d’indication à
bopénie) ; une interruption thérapeutique de gros-
– des signes neurologiques persistants Avant la grossesse : consultation sesse. Les bêtabloquants, notamment
(troubles visuels, céphalées, réflexes préconceptionnelle chez l’aténolol, sont à risque d’hypotrophie
ostéotendineux vifs et polycinétiques, une femme hypertendue (fig. 1) fœtale. Les diurétiques thiazidiques
convulsions) ; doivent être évités mais pourraient être
– un hématome rétroplacentaire. Il est indispensable de préparer une utilisés en cas d’HTA résistante. Les
grossesse chez une femme hypertendue antialdostérones sont contre-indiqués
L’éclampsie est définie par une crise chronique. Une patiente hypertendue en raison essentiellement d’un risque
convulsive tonico-clonique dans un en âge de procréer doit être informée du antiandrogénique chez les fœtus mâles
contexte de pathologie hypertensive de risque tératogène des éventuels traite- (tableau III) [2, 3, 5, 6].
la grossesse [2, 3]. ments antihypertenseurs qu’elle prend.
La grossesse doit être anticipée et prépa- l Les chiffres de la pression artérielle
Ces DHG exposent les femmes à des com- rée en consultation préconceptionnelle. doivent être équilibrés avant de débuter
plications à court terme pendant la gros- Cette consultation va servir à : la grossesse.

Désordre hypertensif Fréquence l Un bilan étiologique à la recherche


DHG 7,4 % (8,4 % des grossesses primipares, 6,5 % des multipares) d’une cause secondaire à cette HTA
HTA gestationnelle 4,2 % doit également être effectué avant la
HTA chronique préexistante 1,7 % (1,8 % des nullipares, 1,6% des multipares) conception, certaines étiologies pouvant
2 % des grossesses, précoce 1 fois sur 5, sévère dans 40 % compromettre le bon déroulement de
Prééclampsie
des cas la grossesse (sténose de l’artère rénale,
HELLP syndrome 10 % des prééclampsies (prévalence : 0,2 %) phéochromocytome…).
Éclampsie 0,1 % des grossesses
l Ondoit profiter de cette consultation
Tableau II : Fréquence des DHG de la grossesse en France, d’après l’étude CONCEPTION [4]. préconceptionnelle pour délivrer des

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Accord professionnel Hypertension chronique avant la grossesse


Grade C - Classe 2
Consultation préconceptionnelle

Interrompre les traitements contre-indiqués pendant la grossesse

Substitution si nécessaire au choix par :


l’alpha-méthyldopa, le labétalol, la nicardipine ou la nifédipine
La surveillance de la PA
Surveillance de la PA et de la protéinurie à 1 mois peut comprendre
une AMT ou une MAPA
Début de grossesse

PAD < 85 mmHg PAD entre 85 et 109 mmHg PAD ≥ 110 mmHg
et PAS < 160 mmHg et PAS < 160 mmHg et PAS ≥ 160 mmHg

Réduction ou arrêt du traitement anti-HTA Majoration du traitement anti-HTA


Surveillance étroite PA et avis spécialisé

En l’absence de protéinurie Surveiller la PA


ou de signe clinique de gravité Rechercher une protéinurie À tout moment
1er et 2e trimestres : Ajuster le traitement anti-HTA si nécessaire si la protéinurie se positive ou
suivi coordonné par le médecin traitant si signes cliniques d’alerte :
ou le gynéco-obstétricien hospitaliser en urgence
3e trimestre : en centre obstétrical spécialisé
suivi coordonné par l’obstétricien

PAS : pression artérielle systolique ; PAD : pression artérielle diastolique ; AMT : automesure de P A ; MAPA : mesure ambulatoire de PA.

Fig.  1 : Prise en charge d’une HTA chronique avant et en cours de grossesse (consensus d’experts SFHTA).

messages de santé publique : sevrage sel n’est pas recommandé chez la femme débuté avant 20 SA et poursuivi au moins
tabagique indispensable si la patiente enceinte. jusqu’à 35 SA. La posologie recomman-
est tabagique, gestion du diabète et équi- dée se situe entre 75 et 160 mg/j [2, 3, 8, 9].
libration avant la conception, prise en l On discutera également l’introduction
charge des autres facteurs de risque, ali- d’un traitement par aspirine : il n’y a pas
mentation équilibrée et surtout activité de consensus international sur les indi- Pendant la grossesse (fig. 1)
physique : l’exercice physique pourrait cations du traitement par aspirine chez
réduire le risque d’hypertension gesta- la femme enceinte hypertendue. Certains Une patiente hypertendue enceinte doit
tionnelle et de prééclampsie respecti- pays la recommandent chez toutes les être surveillée de très près, avec un suivi
vement de 30 et 40 %. Les Canadiens femmes hypertendues. En France, l’as- coordonné entre le médecin généraliste,
recommandent l’exercice physique chez pirine est recommandée uniquement l’équipe obstétricale, le spécialiste et le
toutes les femmes enceintes qui n’ont pas chez les femmes ayant un antécédent pharmacien. La Société française d’hy-
de contre-indication [7]. Le régime sans de prééclampsie. Ce traitement doit être pertension artérielle (SFHTA) suggère
d’utiliser un carnet de suivi “grossesse
Autorisés Non recommandés et HTA”.
Alpha-méthyldopa IEC
La mesure de la pression artérielle chez
Labétalol ARA2 la femme enceinte doit être faite en posi-
Nicardipine Diurétiques thiazidiques tion assise, en milieu médical, après au
Nifédipine Bêtabloquants moins 5 minutes de repos, en utilisant
Antialdostérone
un appareil électronique huméral homo-
logué. En cas d’asymétrie tensionnelle, la
Tableau III : Traitements anti-HTA pendant la grossesse. pression artérielle doit être prise au bras

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une étude multicentrique randomisée


contrôlée incluant 987 patientes entre
POINTS FORTS 14 et 33 semaines de grossesse, 75 %
d’hypertendues chroniques et 25 % d’hy-
pertensions gravidiques. Les patientes
❙ La prévalence des désordres hypertensifs de la grossesse est de
ont été randomisées en deux groupes :
7,4 %.
objectif de pression artérielle lâche
❙ Il est recommandé de traiter sans délai toutes les HTA sévères avec une PA diastolique < 100 mmHg
PAS ≥ 160 mmHg ou PAD ≥ 110 mmHg. et un groupe avec un objectif plus strict
❙ Le seuil de mise en route d’un traitement est plus bas (140-159/90- de PA diastolique < 85 mmHg. Il y a eu
109 mmHg) en cas de risque cardiovasculaire élevé, de maladie moins d’HTA sévères dans le groupe
cardiovasculaire ou rénale, de diabète gestationnel. objectif strict, mais pas de différence
significative concernant la survenue de
❙ L’objectif thérapeutique chez la femme enceinte est : prééclampsies, de complications mater-
PAS < 160 mmHg, PAD entre 85 et 100 mmHg. nelles graves ou de retard de croissance
❙ Quatre molécules sont autorisées pendant la grossesse : intra-utérin [12].
alpha-méthyldopa, labétalol, nifédipine et nicardipine.
L’étude CHAP, qui vient d’être publiée
dans le NEJM, est une étude améri-
où les chiffres sont les plus élevés. En pronostique vers 24 SA en cas de perte caine multicentrique randomisée
cas d’HTA légère à modérée, elle doit être d’inversion du cycle nycthéméral et en ouvert : 2 408 femmes enceintes
confirmée par des mesures en dehors du d’HTA nocturne. Ce critère est corrélé à hypertendues chroniques modérées
cabinet médical : automesure ou MAPA la prééclampsie et au risque de retard de ont été incluses avant 23 semaines de
(mesure ambulatoire de la pression arté- croissance intra-utérin [11]. grossesse, dans un groupe traitement
rielle) afin d’éliminer un effet blouse actif (objectif PA < 140/90 mmHg) ou
blanche. La prévalence de l’HTA blouse Il n’y a pas de consensus international contrôle (arrêt des anti-HTA, traite-
blanche chez la femme enceinte se situe sur les objectifs en termes de chiffres ment si PA ≥ 160/105 mmHg). Le cri-
entre 4 % et 30 % [5]. de pression artérielle chez la femme tère principal est un critère combiné
enceinte. Cela est dû au fait qu’il y a (prééclampsie sévère, accouchement
En cas d’automesure, les mesures peu d’études chez la femme enceinte, prématuré < 35 semaines, décollement
doivent être faites par un appareil avec peu d’effectifs et une grande hété- placentaire, décès fœtal ou néonatal).
validé chez la femme enceinte : la liste rogénéité rendant les méta-analyses Son incidence est significativement
est disponible sur le site www.dable- difficiles. moindre dans le groupe traitement actif
ducational.org. L’automesure est tout à (30,2 %) que dans le groupe contrôle
fait adaptée à la population des femmes Il faut trouver le bon équilibre entre la (37 %, p < 0,001), sans effet délétère sur
enceintes. Chez la femme hypertendue prévention des complications mater- le fœtus (pas de différence significative
chronique enceinte, l’automesure doit nelles et éviter un risque fœtal. Il y a peu du risque de retard de croissance). Cette
être réalisée de façon régulière, hebdo- de bénéfice au traitement anti-HTA sur étude amènera peut-être des change-
madaire voire quotidienne, avec idéale- les quelques mois que dure la grossesse ments dans les pratiques concernant
ment une télétransmission des résultats chez les femmes qui n’ont pas d’autres l’objectif tensionnel, mais la popula-
au médecin. Le seuil diagnostique est le facteurs de risque cardiovasculaire. En tion de l’étude n’est pas représentative
même que dans la population générale diminuant les chiffres de la pression des populations européennes (48 % de
(135/85 mmHg) [5, 10]. artérielle, on risque de compromettre femmes de race noire, 20 % d’hispa-
la circulation utéro-placentaire et d’af- niques, BMI moyen 37,6 kg/m2) [13].
Il existe une diminution physiologique fecter la croissance fœtale. De plus, les
de la pression artérielle au premier tri- options thérapeutiques sont limitées En France, il est recommandé de traiter
mestre, de 10 à 20 mmHg, avec cepen- avec un risque tératogène de nom- sans délai toutes les HTA sévères PAS
dant une variabilité interindividuelle. Il breuses molécules. ≥ 160 mmHg ou PAD ≥ 110 mmHg. En cas
ne faut pas hésiter à alléger le traitement d’HTA légère à modérée en consultation
si nécessaire. Le traitement de l’HTA légère à modé- et confirmée par des mesures ambula-
rée réduit de 50 % le risque d’HTA toires, la présence d’antécédents cardio-
La MAPA est intéressante chez la femme sévère mais sans diminuer le risque vasculaires, de diabète gestationnel, de
enceinte avec notamment un intérêt de prééclampsie. L’étude CHIPS est maladie rénale chronique ou d’un niveau

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Revues générales

PA < 140/90 mmHg Pas de traitement, surveillance Après l’accouchement


PAS entre 140 et 159 ou PAD entre 90 et 109 mmHg
Pas de traitement, surveillance Il est possible d’avoir une déstabilisa-
sans antécédents cardiovasculaires
tion des chiffres de pression artérielle
PAS entre 140 et 159 ou PAD entre 90 et 109 mmHg
confirmée par automesure ou MAPA avec maladie Débuter un traitement anti-HTA
en post-partum. Il faut continuer la sur-
cardiovasculaire ou rénale, diabète gestationnel ou (tableau III) veillance de la PA, car le risque de pré­
risque cardiovasculaire élevé éclampsie persiste dans les jours suivant
Débuter sans délai un traitement l’accouchement [5].
PA ≥ 160/110 mmHg anti-HTA (tableau III), discuter une
hospitalisation En cas d’allaitement, la liste des médica-
Protéinurie ou signes d’alerte (prise de poids ments autorisés est plus large que pen-
brutale, œdèmes des membres inférieurs, céphalées dant la grossesse :
Hospitalisation en milieu obstétrical
violentes, troubles visuels, douleur abdominale en – les bêtabloquants : labétalol et pro-
barre) pranolol ;
– les inhibiteurs calciques : nicardipine
Tableau IV : Prise en charge de l’HTA pendant la grossesse (consensus d’experts SFHTA).
et nifédipine ;
– l’alpha-méthyldopa mais avec un
Gradation : Grade B - Classe 2 risque de majoration de dépression du
Prééclampsie Prééclampsie Prééclampsie Prééclampsie post-partum ;
< 24 SA 24-34 SA 34-36 SA > 37 SA – les IEC : bénazépril, captopril, énalapril
• PES : interruption • PES : expectative à • PES  : • PES  : ou quinapril sauf si l’enfant est né pré-
de grossesse à discuter accouchement accouchement maturé ou s’il a une insuffisance rénale
discuter • PEM : expectative • PEM : expectative • PEM  : (tableau VI).
• PEM : expectative accouchement

Tableau V : Prise en charge de la prééclampsie modérée ou sévère selon le terme de la grossesse (consen- En ce qui concerne la contraception,
sus d’experts SFHTA). PEM : prééclampsie modérée ; PES : prééclampsie sévère ; SA : semaine d’aménorrhée. il est recommandé d’éviter les estro-
progestatifs dans les 6 premières
de risque cardiovasculaire élevé en pré- Quand hospitaliser ? À tout moment en semaines du post-partum à cause du
vention primaire suggère l’initiation cas de protéinurie positive ou de symp- surrisque thrombotique.
d’un traitement antihypertenseur [2, 3]. tômes d’alerte, en centre obstétrical spé-
Lorsqu’un traitement antihypertenseur cialisé. Il faudra organiser une consultation
est prescrit, il est recommandé d’ob- d’information et d’annonce à distance
tenir en consultation un objectif de En cas de prééclampsie, la prise en de l’accouchement : en effet, de plus en
PAS < 160 mmHg et de PAD entre 85 et charge diffère selon qu’elle est modérée plus d’études ont mis en évidence une
100 mmHg (tableau IV) [2, 3]. ou sévère, et selon le terme de la gros- augmentation importante du risque de
sesse. En cas de mauvais pronostic, le pathologie cardiovasculaire et rénale
Il faudra également bien expliquer à la seul moyen de protéger la mère est de dans les décennies suivant la grossesse
patiente les symptômes d’alerte : prise provoquer l’accouchement. L’enjeu de la chez une femme ayant présenté un DHG.
de poids brutale (plusieurs kilos en prise en charge consiste donc à prolonger Ce risque existe essentiellement en cas
quelques jours), œdèmes des membres la grossesse autant que possible afin de de prééclampsie mais également en cas
inférieurs, céphalées violentes, troubles libérer l’enfant à un terme acceptable de d’HTA gestationnelle : augmentation du
visuels (hypersensibilité à la lumière, son développement (tableau V). risque d’AVC (× 2), d’infarctus du myo-
taches devant les yeux), douleur abdo-
minale en barre, PA ≥ 160/110 mmHg.
Autorisés Non recommandés
Par ailleurs, il est recommandé de Bêtabloquants : labétalol, propranolol ARA2
rechercher une protéinurie par bande-
Inhibiteurs calciques : nicardipine, nifédipine Diurétiques
lette sur recueil urinaire au moins une
fois par mois chez toute femme enceinte. IEC : bénazépril, captopril, énalapril, quinapril
En cas de résultat ≥ 1 + à la bandelette, il Alpha-méthyldopa : mais risque de dépression du post-
faut une confirmation au laboratoire sur partum
un échantillon matinal ou un recueil des
24 heures. Tableau VI : Traitements anti-HTA et allaitement.

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