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UNIVERSITE DE SOUSSE

FACULTE DE MEDECINE « IBN ELJAZZAR » SOUSSE

2ème Année Médecine


Bloc 1

L’AUTOMATISME CARDIAQUE

Pr ROUATBI SONIA Dr CHAIEB FATEN

Année universitaire : 2022-2023

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OBJECTIFS

1. Définir les termes fréquence cardiaque, rythme cardiaque, systole et diastole.


2. Réunir les arguments expérimentaux permettant d’affirmer que le cœur est doué
d’automatisme.
3. Reconnaître les particularités électro-physiologiques de la cellule nodale.
4. Expliquer les modalités de propagation du potentiel d’action au niveau des cellules
nodales et myocardiques.
5. Commenter la loi d’excitabilité du myocarde en précisant les phénomènes ioniques
de la dépolarisation et de la repolarisation (PA de la cellule myocardique).
6. Comparer le potentiel d’action d’une cellule du tissu nodal et d’une cellule
myocardique.
7. Expliquer les mécanismes physiopathologiques d’un trouble de rythme et d’un
trouble de la conduction.
8. Citer les moyens d’exploration de l’activité électrique du cœur
9. Situer et nommer les différentes dérivations : Dérivations frontales et Dérivations
précordiales
10. Décrire les caractères morphologiques et chronologiques de l’électrocardiogramme
(ECG) normal.
11. Interpréter un ECG normal

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AUTOMATISME CARDIAQUE

I. Introduction générale
Le myocarde possède 2 types de myocytes :
 les myocytes contractiles permettant le travail mécanique du cœur
 les myocytes automatiques (le tissu nodal) sont responsables de l’automatisme cardiaque.
Chez l’Homme adulte la fréquence cardiaque (Fc) = 70 BPM (100 000 Bat/24H). Cette Fc
diminue avec l’âge : chez le fœtus : 130-140 BPM, à 1an : 120-130 BPM et à 20 ans : 70-80
BPM
II. L’automatisme cardiaque
1. Origine de l’automatisme (Mise en évidence) :

Un cœur isolé, dénervé et perfusé convenablement continue à battre. Le cœur a donc une
activité automatique. Cet automatisme cardiaque repose sur le fonctionnement d’un
ensemble de cardiomyocytes spécialisés qui constituent le tissu nodal.

2. Organisation du tissu nodal (figure 1)

Le tissu nodal est un ensemble de cardiomyocytes spécialisé disposés en amas (nœuds) et en


ramifications (faisceaux) :
Le nœud sinusal (nœud SA) : situé dans la paroi postérieure de l'oreillette droite, à
proximité de l’abouchement de la veine cave supérieure
Le nœud auriculo-ventriculaire (nœud AV) : siège dans le plancher de l’oreillette droite à
la partie inférieure du septum interauriculaire.
Le faisceau de His : prends son origine au nœud AV et descend en direction de la pointe
du cœur dans le septum interventriculaire. Il se divise ensuite en deux branches, droite et
gauche. La branche droite chemine dans la paroi du ventricule droit. La branche gauche se
divise en deux rameaux, ventral et dorsal destinés au ventricule gauche.
Les fibres de Purkinje : constituent la continuité du faisceau de His et se distribuent à
l’ensemble du myocarde ventriculaire en sous endocardique.

en avant de l'abouchement du sinus coronaire.

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Figure 1 : Organisation du tissu nodal (Sherwood L. 2006)

3. Fonctionnement hiérarchique du tissu nodal (Figure 2)


Toutes les cellules du tissu nodal sont douées d’activité automatique.
Elles sont capables de se dépolariser et de générer un potentiel d’action (PA) spontanément
en dehors de toute influence externe.
Il existe un fonctionnement hiérarchique entre les structures du tissu nodal avec une
fréquence de décharge qui diminue depuis le nœud SA jusqu’aux Fibres de Purkinje comme
suit :
-Nœud SA (cœur isolé dénervé) :100 c/min
-Nœud SA (cœur en place) :70-80 c/min →tonus cardiomodérateur parasympathique
-Nœud AV : 40-60 c/min
-Faisceau de His et fibres de Purkinje : 20-40 c/min

Figure 2. Fonctionnement hiérarchique du tissu nodal

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Le nœud SA possède la fréquence de décharge de PA la plus haute et impose sa cadence à
l’ensemble des cellules myocardiques contractiles. Ainsi, chez un sujet sain au repos, le
cœur bat à une fréquence de 70 c/min, fréquence déterminée par le nœud SA, pacemaker
normal du cœur.
4. Mécanismes électrophysiologiques de l’automatisme cardiaque
La génération du potentiel d’action au niveau du tissu nodal
La cellule du tissu nodal a un fonctionnement automatique spontané et rythmique.
La survenue spontanée d’un PA est la conséquence d’un potentiel de repos instable encore
appelé potentiel « pacemaker » ou dépolarisation lente. En effet, à l’état de repos, la
membrane est siège d’un potentiel de -60 mV dérivant spontanément vers -40 mV, valeur
seuil permettant le déclenchement d’un PA (figure 3).
Les cellules nodales sont caractérisées par 3 phases :

1. Potentiel « pacemaker » ou dépolarisation lente : due aux phénomènes suivants:


*augmentation de la perméabilité au Na+ (un courant entrant de Na+par ouverture des canaux
Na+f (Funny)).
*augmentation de la perméabilité au Ca2+ (entrée de Ca2+ suite à l’ouverture de canaux Ca2+
de type T (transitoire)).
*Diminution de la perméabilité au K+ (fermeture progressive des canaux K+ ouverts au cours
de la phase de repolarisation).
2. Dépolarisation : survient à l’atteinte du seuil de potentiel avec déclenchement du PA. La
dépolarisation est induite par un courant entrant de Na+ et de Ca2+ via des canaux calciques
3. Repolarisation caractérisée par une augmentation de la perméabilité au K+ avec flux sortant
de k+ via des canaux potassiques avec retour du potentiel de membrane à l’état de repos.
De nouveau, la cellule nodale est le siège d’une dépolarisation lente avec décharge spontanée
et création de nouveau un PA. Ce phénomène électrique se répète d’une manière spontanée et
rythmique.

Figure 3 : activité pacemaker d’une cellule automatique (PA automatique)

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2 types de cardiomyocytes :
Les cardiomyocytes contractiles ( NSA)
Les cardiomyocytes cardionectrices

Propriétés électriques des cellules myocardiques contractiles (figure 4)

Les cardiomyocytes contractiles n’ont pas d’activité automatique.


Leur potentiel de repos est stable à -90mV (absence de dépolarisation spontanée).
La dépolarisation survient suite à la survenue et à la propagation du PA généré au
niveau du tissu nodal.
Le potentiel d’action est caractérisé par 5 phases (figure 4):
phase 0 : dépolarisation rapide, ascendante correspond à une entrée massive
et brutale de Na+ (ouverture des canaux sodiques voltage dépendants).
Phase 1 : repolarisation rapide de durée brève par baisse de la perméabilité
au Na et sortie de K+.
+

Phase 2 : plateau, ralentissement du courant de K+ sortant et entrée de Ca2+


(canal calcique de type L).
Phase 3 : repolarisation, augmentation de la perméabilité au K+ avec sortie
rapide de K+ et la cellule reprend son potentiel membranaire de repos.
Phase 4 : maintien du potentiel membranaire de repos.

Figure 4 : le potentiel d’action d’une cellule myocardique contractile

La durée du PA des cardiomyocytes contractiles dure environ 250 ms et correspond à la durée


de la période réfractaire absolue durant laquelle, le cœur est totalement inexcitable. Le
couplage excitation-contraction se produit durant cette période réfractaire (figure 5), ce qui
protège les cellules myocardiques de la tétanisation (pas de possibilité de sommation des
contractions).

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Figure 5 : relation entre le potentiel d’action et la période réfractaire d’une part et la durée
de la contraction du muscle cardiaque d’autre part (Sherwood L, 2006)

5. La propagation de l’excitation cardiaque (figures 6, 7 et 8)


La conduction de l’excitation d’une cellule myocardique se fait de proche en proche via les
jonctions serrées (Théorie des câbles).
Les différentes structures du cœur ont des PR différents et décroissants du nœud sinusal au
réseau de purkinje, qui vont conditionner la hiérarchie de la conduction de la dépolarisation.
Le pacemaker (nœud SA) produit de manière spontanée et rythmique des PA à la fréquence
la plus élevée et mène sa cadence au reste des cellules myocardiques.
L’excitation se propage de façon unidirectionnelle en raison de la période réfractaire à
laquelle se trouve les cellules myocardiques dépolarisées.
L’activation de l’étage auriculaire se fait avec une vitesse de 1 m/s. L’oreillette droite se
contracte légèrement en avance par rapport à l’oreillette gauche.
Au niveau du nœud AV, seul point de passage possible du PA, il existe un ralentissement de
la propagation de l’excitation (vitesse = 0,05 m/s). Ce ralentissement est fondamental et
constitue le délai ou retard nodal permettant la dépolarisation et la contraction des oreillettes
avant celles des ventricules.
Au niveau du faisceau de His et des fibres de Purkinje, la conduction du PA s’accélère
jusqu’à 4 m/s et active les cellules myocardiques ventriculaires dans l’ordre septum, pointe,
parois latérales et bases du cœur, dans le sens endocarde épicarde. Le ventricule droit se
contracte légèrement en avance par rapport au ventricule gauche (en raison du nombre des
cardiomyocytes plus élevés au niveau du ventricule gauche). La transmission est très rapide
de l’Influx au système de Purkinje vu que les fibres sont très grosses. Avec une vitesse de
conduction très rapide, très grande perméabilité ionique des zones de jonction, donnant une
transmission quasi instantanée des impulsions à l’ensemble des 2 ventricules : c’est la
synchronisation de la contraction ventriculaire.

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PR= -60mV

PR= -90mV

Figure 6. Sens de propagation de l’excitation cardiaque en fonction des potentiels de


repos des cellules cardiaques (Sherwood L, 2006)

Ainsi on distingue des:


 Cellules à conduction rapide : myocytes cardiaques et cellules du système His-
Purkinje
 Cellules à conduction lente : Nœud sinusal et NAV

Ceci est expliqué par les variations quantitative et qualitative de l’équipement en canaux
ioniques de ces cellules cardiaques.

Figure 7 : Sens de propagation de l’excitation myocardique. (Sherwood L, 2006)

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Figure 8 : Délai de transmission de l’influx cardiaque (en fractions de secondes). NS : nœud
sinusal. NAV : nœud auriculo-ventriculaire (Guyton AC et Hall JE, 2003)

6. Modulation de l’automatisme cardiaque (Figure 9)


a. le système nerveux végétatif
Le Parasympathique (PS) ralentit l’automaticité des fibres nodales en augmentant la
perméabilité membranaire au K+
Le Sympathique (S) augmente la fréquence d’excitation du Nœud sinusal en augmentant le
flux entrant de Na+

Figure 9. Modulation de l’automatisme cardiaque

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Le Parasympathique (PS)(Figure 9) :
Il diminue la fréquence d’excitation du nœud sinusal (NS) entrainant une diminution de la
fréquence cardiaque et donc du débit cardiaque. Le PS diminue également l’excitabilité de la
jonction Auriculo-ventriculaire (AV) ralentissant ainsi la conduction AV. Il agit par son
neurotransmetteur l’acétylcholine (Ach) qui agit sur son récepteur muscarinique.M2
diminuant ainsi l’AMPc qui augmente la perméabilité membranaire au K+ d’où
l’hyperpolarisation membranaire et la baisse de l’excitabilité des fibres.
Le Sympathique (Figure 9) :
Ses effets sont opposés au PS. Il augmente la fréquence d’excitation du NS d’où
l’augmentation du flux entrant de Na+. Il stimule la conduction et l’excitabilité de tout le cœur
en augmentant le flux entrant de Na+.
Il augmente la force de contraction du cœur par augmentation du Ca++intracellulaire.
Son neuromédiateur est la Noradrénaline (NAD) qui agit sur son récepteur béta1 adrénergique
et augmente ainsi l’AMPc, d’où l’augmentation de la perméabilité membranaire au Na+ et
Ca++ et augmentation de la pente de dépolarisation.
b. Notion de Tonus vagal.
Un cœur isolé s’accélère à 120bts/min. Si on coupe l’innervation PS (Vagotomie) il ya
accélération du cœur (Fc). La Fc s’accélère également sous atropine (Parasympathicolytique).
Ainsi on peut dire que la la fréquence du nœud sinusal est maintenue en permanence à
70bts/min par le tonus vagal qui agit donc comme un frein permanent.
c. Autres facteurs modulateurs de l’automatisme cardiaque.
 La Température centrale: modifie la Fr d’impulsion des cellules nodales :
– ↑ T°: Tachycardie
– ↓T°: bradycardie, A 25°C le cœur émet des impulsions désordonnées : Fibrillation
cardiaque (mort)
 L’Hyperkaliémie: diminue la Fr des impulsions du NSA (Hyperpolarisation
membranaire)

III. Exploration: Electrocardiogramme (ECG)


ECG est un Outil clinique permettant d’évaluer des évènements électriques à l’intérieur du
cœur.
Le corps étant conducteur, les courants électriques peuvent être détectés à la surface de la peau
grâce à des électrodes, placées à la surface de la peau, en différents points du corps.
1. Dérivations Frontales
Bipolaires (DI, DII et DIII) (Figure 10)

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Figure 10. Dérivations Bipolaires

Dérivations Unipolaires (aVR, aVL, aVF) (Figure 11)

aVR, aVL, et aVF sont des dérivations unipolaires et correspondent au membre avec
lequel elles sont connectées soit respectivement le bras droit, le bras gauche, et la
jambe gauche. C’est la théorie de Wilson et Golberger, où l’électrode exploratrice
positive correspond au membre appliqué. Le voltage est alors amplifié (d'où le préfixe
a) pour obtenir un tracé de même amplitude que D1, D2, D3.

Figure 11. Les Dérivations unipolaires

2. Les dérivations précordiales (V1, V2, V3, V4, V5, V6) (Figure 12)
On les nomme pour les dérivations standards : V1 à V6 :
V1 est placée sur le 4ème espace intercostal droit, au bord droit du sternum.
V2 est placée sur le 4ème espace intercostal gauche, au bord gauche du sternum.
V4 est placée sur le 5ème espace intercostal gauche, sur la ligne médioclaviculaire.
V3 est placée entre V2 et V4.
V5 est placée sur le 5ème espace intercostal gauche, sur la ligne axillaire antérieure.
V6 est placée sur le 5ème espace intercostal gauche, sur la ligne axillaire moyenne

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Figure 12. Les dérivations précordiales
3. Interprétation de l’ECG (Figure 13)
L’ECG est formé de : 5 ondes (P, Q, R, S, T), 2 intervalles (PR et ST), 2 segments (PQ et
ST) et un complexe QRS (Figure 13).

Figure 13. Interprétation d’un ECG


L’Onde P correspond à la dépolarisation et contraction des oreillettes.
Le segment PR : Il correspond à la pause d’1/10e de seconde entre l’activation auriculaire et
l’activation ventriculaire, par le passage de l’influx du Noeud auriculo- ventriculaire au
faisceau de His. Il se mesure de la fin de l'onde P jusqu'au début du QRS et correspond à 0,03
à 0,04 seconde (moins de 2 petits carreaux).
L’intervalle PR : C’est le temps de conduction auriculo-ventriculaire. C’est le temps
nécessaire à l’influx pour dépolariser les oreillettes puis franchir le Noeud auriculo-
ventriculaire et le tronc du faisceau de His. Il se calcule à partir du début de l’onde P en allant
jusqu’au début du QRS. Il est de 0,12 à 0,23 seconde.
Le complexe QRS : Il correspond à l’activation et à la dépolarisation des ventricules de
l’endocarde vers l’épicarde, il est constitué de trois segments :
L’onde Q : première déflexion négative : activation septale.
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Onde qui s’inscrit sur un ECG vers le haut (déflexion
positive) ou vers le bas (déflexion négative) par
rapport à la ligne de base
L’onde R : première déflexion positive : activation pariétale du VG.
L’onde S : défection négative qui suit l’onde R : activation basale du VG.
Le segment ST : Il correspond à la période d’excitation uniforme des ventricules jusqu’à la
phase de récupération des ventricules. On le mesure de la fin de l’onde S ou R jusqu’au début
de l’onde T. Il est normalement horizontal ou légèrement oblique +/- isoélectrique. Un sus-
décalage ou un sous-décalage de plus d’1 mm par rapport à la ligne isoélectrique est anormal.
L’intervalle QT : C’est l’intervalle de dépolarisation (QRS), d’excitation (ST) et de
repolarisation (T) des ventricules. Il se mesure du début du QRS jusqu’à la fin de l’onde T. le
QT est fonction de la fréquence cardiaque (Figure 14).

Figure 14. L’activité électrique à différents niveaux du Cœur.


Références
1. Arthur C. Guyton et John E. Hall. Précis de Physiologie Médicale. 2ème édition Française. PICCIN. 2003.
2. Hervé Guénard. Physiologie humaine. Editions Pradel. 4 ème édition, 2009.
3. Marieb, Elaine N. Anatomie et physiologie humaines. Pearson Education France. 2005.
4. William F Ganong. Physiologie Médicale. Les presses de l'Université de Laval, 19ème édition, 2001
5. Sherwood L. Physiologie Humaine. 2ème édition Française. De Boeck. 2006

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