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Séance 1

L3LFA031/L3LFB031
Stylistique et grammaire

L3LFA031/L3LFB031 Stylistique et grammaire


M. Edoardo CAGNAN edoardo.cagnan@gmail.com
Descriptif
Le premier volet du cours de TD est consacré à la grammaire et
s’intéresse aux mécanismes de construction de la phrase
complexe, et tout particulièrement à la subordination. Le

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second volet de l’enseignement de TD vise à initier les

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étudiantes et étudiants à l’analyse du discours dans une
perspective stylistique : nous aborderons les systèmes de
l’énonciation, la modalisation, le discours rapporté et la
polyphonie.
Par ailleurs, dans le cadre de ce TD, à côté d’un corpus français,
on explorera également un corpus francophone, c’est-à-dire une
production littéraire écrite en français mais non hexagonale.
Évaluations
Que vous soyez inscrits en LFA ou en LFB, vous aurez deux devoirs sur table en TD : le premier portera
sur la grammaire, tandis que le second portera davantage sur la stylistique. En règle générale, ces
devoirs sont obligatoires pour tous les étudiants et constituent ensemble 50% de la note finale (soit
25% pour chaque devoir de TD). Toute absence doit être justifiée, aucune épreuve supplémentaire ne

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sera organisée pour rattraper une absence ou une mauvaise note. Les dates des devoirs de TD sont

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indiquées dans le plan de cours.
Pour les LFA, le cours de « Stylistique et grammaire » est un module de contrôle continu intégral
(CCI) : il n’y aura donc pas d’examen en janvier, ni de session de rattrapage en juin. La note finale sera
calculée sur la base de la moyenne dans les devoirs de TD et de CM. En plus des deux devoirs de TD,
vous aurez un devoir pour le volet de grammaire avec Mme Ch. Reggiani et un devoir pour le volet de
stylistique avec M. J. Dürrenmatt : les devoirs de CM ont lieu pendant la 13e semaine de cours et
constituent 50% de la note finale (soit 25% pour chaque devoir de CM).
Pour les LFB, en revanche, le cours de « Stylistique et grammaire » est un module de contrôle mixte :
il y aura donc un examen en janvier et une session de rattrapage en juin, évaluée sur la base d’une
épreuve orale. Dans le cadre du contrôle mixte, la moyenne de TD n’est prise en compte que si elle
est supérieure à 10/20 et à la note de l’examen : le cas échéant, elle représente 50% de la note finale.
Assiduité, présence et Moodle
À l’exclusion des étudiant·e·s qui ont reçu une dispense d’assiduité, vous avez droit à trois absences non justifiées en
TD. Sauf indication contraire, les cours auront lieu en présence. Il faut néanmoins s’inscrire dès à présent à la page
Moodle consacrée à ce TD (pas de clé d’inscription requise) :
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Cette page contient notamment) un fascicule (à télécharger ou à imprimer), les supports diffusés en classe, des
textes et des communications. Elle sera, par ailleurs, incontournable si nous basculons dans un type d’enseignement

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hybride ou à distance.
Grammaire
Plan de cours

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Bibliographie de grammaire
Annie DELVAU, Syntaxe : la phrase et la subordination, Paris, Armand Colin, coll. « Campus linguistique », 2001, 192 p.
Delphine DENIS et Anne SANCIER-CHATEAU, Grammaire du français, Paris, Le Livre de poche, coll. « Guides de la langue
française », 1997, 545 p.
Anne-Marie GARAGNON et Frédéric CALAS, La phrase complexe : de l’analyse logique à l’analyse structurale, Paris, Hachette,

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coll. « Ancrages lettres », 159 p.

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Joëlle GARDES-TAMINE, La Grammaire, t. 2, Syntaxe, Paris, Armand Colin, coll. « Cursus lettres », 5e éd., 2010, 243 p.
Maurice GREVISSE et Marc LITS, Le petit Grevisse : grammaire française, Bruxelles/Paris, De Boeck/Duculot, 2005, 383 p.
Florence LECA-MERCIER, 35 questions de grammaire française, Malakoff, Armand Colin, coll. « Mon cours en fiches », 2018,
331 p.
Pierre LE GOFFIC, Grammaire de la phrase en français, Paris, Hachette supérieur, coll. « HU Langue française », 1994,
p. 591 p.
Pierre LE GOFFIC, Grammaire de la subordination en français, Paris, Éditions Orphys, coll. « L’essentiel français », 2019, 303 p.
Cécile NARJOUX, Le Grevisse de l’étudiant : grammaire graduelle du français, Louvain-la-Neuve, De Boeck supérieur, coll.
« Grevisse langue française », 2018, 767 p.
Martin RIEGEL, Jean-Christophe PELLAT et René RIOUL, Grammaire méthodique du français, Paris, PUF, coll. « Quadrige »,
2018 [7e éd.], 1109 p.
Bibliographie de stylistique
Frédéric CALAS, Leçons de stylistique : cours et exercices corrigés, Malakoff, Armand Colin, coll. « Cursus », 4e
éd., 2021, 461 p.
Patrick CHARAUDEAU et Dominique MAINGUENEAU (dir.), Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil, 2002,
661 p.

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Jacques DÜRRENMATT, Stylistique de la poésie, Paris, Belin, coll. « Atouts lettres », 2005, 255 p.

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Catherine FROMILHAGUE, Les Figures de style, Paris, Armand Colin, coll. « 128 Lettres », 2005, 127 p.
Anne HERSCHBERG-PIERROT, Stylistique de la prose, Paris, Belin, coll. « Lettres Sup », 2003, 319 p.
Dominique, MAINGUENEAU, Les Termes clés de l’analyse du discours, Paris, Seuil, coll. « Points essais », 2009.
Dominique MAINGUENEAU, Manuel de linguistique pour le texte littéraire, Paris, Armand Colin, 2020, 415 p.
Georges MOLINIÉ, La Stylistique, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 2e éd., 2014, 211 p.
Claire STOLZ, Initiation à la stylistique, Paris, Ellipses, coll. « Thèmes & études », 2006, 129 p.
Henry SUHAMY, Les Figures de style, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2016, 124 p.
Nature et fonction
Il faut penser la phrase comme un organisme composé d’éléments
différents entre eux: chacun de ces éléments remplit une fonction à
l’intérieur de cet organisme et permet de le faire fonctionner.

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Exemple du corps humain:
• Le cœur est un muscle (nature) qui permet de faire circuler le sang (fonction),
contrairement aux biceps qui sont aussi des muscles (nature) mais qui
permettent de bouger les bras (fonction).
• Le crâne est un os (nature) qui permet de protéger le cerveau (fonction)
Nature et fonction
dans la phrase simple
Prenons la phrase suivante:

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Choderlos de Laclos a écrit un roman
Quelle est la nature de chaque élément de cette phrase?
Nature et fonction dans la phrase simple

Nature Fonction
Choderlos de Laclos Nom propre

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a écrit Verbe

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un Article indéfini
roman Nom commun

Et maintenant quelle est la fonction de ces éléments?


Nature et fonction dans la phrase simple

Nature Fonction
Choderlos de Laclos Nom propre Sujet

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a écrit Verbe Verbe

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un Article indéfini Le groupe nominal (GN)
forme un complément
roman Nom commun d’objet direct (COD)
Nature et fonction dans la phrase simple

Prenons maintenant la phrase suivante:

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Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman épistolaire

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Quelle est la nature de chaque élément de cette phrase?
Nature et fonction dans la phrase simple

Nature Fonction
Choderlos de Laclos Nom propre

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est Verbe

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l’ Article défini
auteur Nom commun
d’ Préposition
un Article indéfini
roman Nom commun
épistolaire Adjectif

Et maintenant quelle est la fonction de ces éléments?


Nature et fonction dans la phrase simple

Nature Fonction
Choderlos de Laclos Nom propre Sujet

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est Verbe Verbe

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l’ Article défini (GN) Attribut
auteur Nom commun
d’ Préposition (GP) Complément du
nom
un Article indéfini
roman Nom commun
épistolaire Adjectif Épithète

Et maintenant quelle est la fonction de ces éléments?


Nature et fonction
analogie entre phrase simple et subordination

Comparons les deux phrases suivantes:

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(1) Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman épistolaire
(2) Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman qui est composé de lettres

En quoi ces deux phrases se ressemblent?


En quoi elles diffèrent?
Nature et fonction: analogie entre phrase simple et subordination

(1) Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman épistolaire


(2) Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman qui est composé de lettres

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Déjà, d’un point de vue sémantique (le sens), « épistolaire » et « qui est composé de

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lettres » signifient la même chose.
Ensuite, d’un point de vue logique, « épistolaire » et « qui est composé de lettres » ont la
même fonction en regard du groupe nominal « d’un roman », à savoir la fonction épithète.
En revanche, d’un point de vue syntaxique, « épistolaire » est un adjectif (nature), tandis
que « qui est composé de lettres » est une subordonnée relative. Au sein de cette
subordonnée relative, nous repérons ensuite: un pronom relatif, un verbe conjugué au
présent de l’indicatif (voie passive), une préposition et un nom commun.
La phrase simple et la phrase complexe
Qu’est-ce qu’une phrase?
D’un point de vue syntaxique, et selon une conception quelque peu rigide, la phrase est une
unité syntaxique basée sur un noyau verbal (conjugué à un mode personnel) comportant un

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sujet et éventuellement des compléments.

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(1) Choderlos de Laclos est l’auteur d’un roman épistolaire

On distingue un groupe nominal (GN) avec la fonction sujet: Choderlos de Laclos


et un groupe verbal (GV): est l’auteur d’un roman épistolaire

On dira que (1) est une phrase simple (ou indépendante).


La phrase simple et la phrase complexe

Prenons maintenant ces trois phrases:

(2) Laclos est l’auteur d’un roman : Les Liaisons dangereuses est devenu un classique

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(3) Laclos est l’auteur d’un roman et son roman est devenu un classique

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(4) Laclos est l’auteur d’un roman qui est devenu un classique que nous lisons encore

Dans les trois phrases, nous avons deux, voire trois, noyaux verbaux.
Chaque noyau verbal constitue dès lors une proposition.
Et l’ensemble des propositions constitue une phrase complexe.
La phrase simple et la phrase complexe

Mais qu’est-ce qui lie les propositions entre elles, au sein d’une phrase complexe?

(2) Laclos est l’auteur d’un roman : Les Liaisons dangereuses est devenu un classique

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(3) Laclos est l’auteur d’un roman et son roman est devenu un classique

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(4) Laclos est l’auteur d’un roman qui est devenu un classique que nous lisons encore

Nous avons un signe de ponctuation (2), une conjonction de coordination (3) et deux
pronoms relatifs (4).
Ce sont trois modes d’enchaînement différents qui correspondent à la juxtaposition
(2), à la coordination (3) et à la subordination (4).
La phrase complexe
1. La JUXTAPOSITION
Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu
Chaque proposition se trouve sur le même plan (parataxe) et garde une certaine

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indépendance par rapport aux autres, car il n’y a pas de mot de liaison (asyndète), mais
seulement des signes de ponctuation. Le lien logique entre chaque proposition est donc

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implicite.
La phrase complexe

1. La JUXTAPOSITION
Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu
Chaque proposition se trouve sur le même plan (parataxe) et garde une certaine indépendance par
rapport aux autres, car il n’y a pas de mot de liaison (asyndète), mais seulement des signes de

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ponctuation. Le lien logique entre chaque proposition est donc implicite.

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2. La COORDINATION
Je suis venu, puis j’ai vu et enfin j’ai vaincu
Chaque proposition se trouve sur le même plan (parataxe), mais elle est associée aux autres
par un mot de liaison (syndète) qui peut exprimer l’addition (et), l’alternative (ou),
l’opposition (mais), la cause (car), la conséquence (donc)… À la liste traditionnelle de
conjonctions de coordination (mais, ou, et, donc, or, ni, car), on ajoute désormais des
adverbes de liaison tels que: ainsi, aussi, en effet, par conséquent, ensuite, puis…
La phrase complexe

1. La JUXTAPOSITION
Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu
2. La COORDINATION

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Je suis venu, puis j’ai vu et enfin j’ai vaincu

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3. La SUBORDINATION
Je suis venu, j’ai vu et j’ai vaincu, bien qu’un petit village peuplé d’irréductibles Gaulois
résiste encore et toujours.
La proposition « bien qu’un petit […] et toujours » n’est pas sur le même plan que « j’ai
vaincu », mais à un niveau en quelque sorte inférieur (hypotaxe). En d’autres termes, la
proposition « bien qu’un petit […] et toujours » est subordonnée à « j’ai vaincu ».
« J’ai vaincu » constitue donc la proposition principale (ou phrase matrice) et régit la
proposition subordonnée (en l’occurrence, circonstancielle concessive) « bien qu’un petit
[…] et toujours ». La subordonnée est introduite par un outil subordonnant: en l’occurrence,
par la locution conjonctive « bien que »
La subordination
C’est une relation de dépendance syntaxique d’une proposition à l’égard d’une autre
proposition: la proposition subordonnée dépend de la proposition principale. Selon une
terminologie contemporaine, on dit que la proposition subordonnée est enchâssée dans la

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phrase matrice.

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Une subordonnée est donc:
1. Une proposition, c’est-à-dire un constituant complexe (en gros, composés de
plusieurs mots avec un noyau verbal)
2. Avec une fonction analogue à celle d’un constituant simple (nom, adjectif, adverbe)
au sein de la phrase matrice
3. Introduite par un outil subordonnant (un marqueur de subordination)
La subordination

Virtuellement, la subordination est un processus qui peut se développer à l’infini, selon un


processus qui s’apparente aux « poupées russes »:

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J’ai vaincu, bien qu’un petit village, qui est peuplé de Gaulois, qui sont irréductibles,

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résiste encore et toujours, depuis que j’ai commencé l’invasion de la Gaule.

Combien de noyaux verbaux? Quelle est la phrase matrice? Combien de propositions subordonnées?

En langage plus technique, le système de


« poupées russes » se dénomme RÉCURSIVITÉ:
théoriquement, une structure donnée peut
être réutilisée à l’infini, à des niveaux différents
et s’inscrivant dans le niveau supérieur.
La subordination

[Phrase matrice] J’ai vaincu,


[Prop. sub. niveau 1] bien qu’un petit village, , résiste encore et toujours,

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[Prop. sub. niveau 2] qui est peuplé de Gaulois, depuis que j’ai commencé l’invasion de la Gaule.

[Prop. sub. niveau 3] qui sont irréductibles

1. Quels sont les outils subordonnants?


2. À quels constituants simples (nom, adj., adv.) s’apparentent ces subordonnées?
La subordination
[Phrase matrice] J’ai vaincu,

[Prop. sub. niveau 1] bien qu’un petit village […] résiste encore et toujours,
[Adverbe]

[Prop. sub. niveau 2] qui est peuplé de Gaulois,

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depuis que j’ai commencé l’invasion de la Gaule.
[Adjectif: « village »] [Adverbe: temps]

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[Prop. sub. niveau 3] qui sont irréductibles
[Adjectif: « Gaulois »]
2. À quels constituants simples s’apparentent
1. Quels sont les outils subordonnants? les propositions subordonnées?
a. Conjonctions de subordination: que, quand, lorsque, puisque, a) Nom: Il fait [un cours] / Il fait [ce que je
comme, quoique, si veux]
b. Locutions conjonctives: parce que, tandis que, pendant que, afin b) Adjectif: Un roman [épistolaire] / Un
que, pour que, de sorte que, à ce que… roman [qui est composé de lettres]
c. Pronoms/adjectifs/déterminants/adverbes interrogatifs: qui, c) Adverbe: [Hier] tu étais contente /
quoi, que, comment, où… [Quand tu étais en vacances], tu étais
d. Pronoms relatifs: qui, que, où, dont, lequel, auquel, duquel… contente
Subordination implicite
La subordination sans outil subordonnant?
Selon une approche traditionnelle, pour qu’il y ait proposition subordonnée, il faut:
a. un noyau verbal à un mode personnel
b. un outil subordonnant qui marque la dépendance

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Or, cette délimitation semble quelque peu artificielle. À côté de la subordination
« traditionnelle » existent deux cas de figures de subordination implicite:
a. il y a intégration syntaxique de la « proposition subordonnée », mais il n’y a pas de
proposition à proprement parler, car il n’y a pas de noyau verbal à un mode personnel:
on parle de propositions réduites.
b. il y a bel et bien une proposition, mais il n’y a pas de subordination à proprement parler,
la dépendance restant implicite: on parle de dépendances textuelles non marquées.
Propositions réduites
1. L’infinitive
Considéré comme le « nom du verbe », l’infinitif partage des traits typiques du verbe (régir
des compléments: Manger des légumes, c’est bon pour la santé) et des traits typiques du
nom (avoir les même fonctions qu’un GN: Fumer tue).

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Au sein d’une phrase complexe, quel est le sujet de l’infinitif? Quelles sont ses valeurs

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temporelles et modales? De fait, il y a un débat sur la manière de considérer l’infinitif en
tant que proposition subordonnée à part entière.

Pierre Le Goffic a par exemple une conception large, mais qui n’est pas partagée de tous:
Je ne sais pas où aller > subordonnée interrogative à l’infinitif
Je cherche quelqu’un à qui laisser mon chien > subordonnée relative à l’infinitif
J’espère réussir (= j’espère [que je réussirai]) > sub. complétive à l’infinitif
Propositions réduites: 1. L’infinitif
Un cas sur lequel les grammairiens semblent s’accorder est celui de la proposition infinitive:

Je vois les problèmes venir ou Je vois venir les problèmes

Ici, le verbe « voir » a deux COD: le GN « les problèmes » et l’infinitif « venir ».

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Le GN est à bien des égards le sujet de l’infinitif: les problèmes viennent

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Mais le sujet de la principale est nécessairement différent de celui de l’infinitive: Je vois les
problèmes venir vs. Paul veut voir Virginie [« Paul » est le sujet de « vouloir » et de « voir »]
On peut la paraphraser avec une relative: Je vois les problèmes qui viennent vs. Paul prie
Virginie de venir [qui ne peut pas donner: *Paul prie Virginie qui vient]
Le GN peut être pronominalisé: Je les vois venir
L’infinitif ne peut pas être pronominalisé [tandis qu’on peut avoir: Paul en prie Virginie]
Le plus souvent, on rencontre cette construction à double COD avec les verbes de perception: J’entends les oiseaux chanter;
J’écoute l’orchestre jouer; Je regarde la pluie tomber…
Mais aussi avec des verbes d’opinions dans des relatives: Voici la solution que j’estime convenir le mieux.
Et avec des verbes factifs: L’espoir fait vivre [les gens]; Il laisse refroidir le gâteau; Envoyez quelqu’un chercher du secours!
Propositions réduites
2. La participiale
La proposition participiale est héritée de l’ablatif absolu latin et peut se construire aussi
bien avec le participe présent qu’avec le participe passé:

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La nuit tombant rapidement, nous rentrâmes en taxi

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La nuit tombée, les rues se vident

La participiale exprime un lien de temps (Après que la nuit est tombée, les rues se vident), la
cause (Puisque la nuit est tombée, les rues se vident), et souvent un mélange de temps et de
cause (Pendant que/Puisque la nuit tombait rapidement).
Le participe est le noyau de la proposition: il peut régir des complément ou des adverbes
(rapidement) et il a toujours un sujet qui n’a pas de fonction dans la principale.
Le sujet de la participiale (la nuit) est toujours différent de celui de la principale (nous, la
nuit): Tombant du troisième étage, la pastèque explosa au sol n’est donc pas une
participiale, car le sujet de « tomber » et de « exploser » est toujours « la pastèque ».
Dépendances textuelles non marquées
1. La subordination paratactique
Selon certains il s’agit de parataxe asyndétique, selon d’autres d’hypotaxe asyndétique.
Quelle que soit la terminologie adoptée, il faut percevoir qu’une phrase peut dépendre
étroitement d’une autre sans que ce lien de dépendance soit exprimé au moyen d’un outil

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subordonnant. Cette subordination implicite dépend du sens, mais aussi de quelques

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aspects syntaxiques.
Paraphrasez les phrases suivantes en employant des outils subordonnants:

(1) Tu me l’aurais dit, je t’aurais aidée


(2) Il a beau être l’été, il fait froid
(3) On dirait le mois d’octobre, tellement il fait froid
(4) À peine avait-il dit un mot, tout le monde l’a critiqué
(5) Allait-il la supplier, elle le pardonnait immédiatement
(6) Qu’il aille la supplier, elle ne le pardonnera pas
Dépendances textuelles non marquées: 1. La subordination paratactique

(1) Tu me l’aurais dit, je t’aurais aidée


> Si tu me l’avais dit, je t’aurais aidée: lien circonstanciel d’hypothèse
(2) Il a beau être l’été, il fait froid
> Même si c’est l’été, il fait froid: lien circonstanciel de concession
(3) On dirait le mois d’octobre, tellement il fait froid

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> On dirait le mois d’octobre, puisqu’il fait très froid: lien circonstanciel de cause

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(4) À peine avait-il dit un mot, tout le monde l’a critiqué
> Tout le monde l’a critiqué, dès qu’il a dit un mot: lien circonstanciel de temps exprimant
une antériorité immédiate
(5) Allait-il la supplier, elle le pardonnait immédiatement
> Chaque fois qu’il allait la supplier, elle le pardonnait immédiatement: lien circonstanciel
de temps exprimant la répétition de l’action
(6) Qu’il aille la supplier, elle ne le pardonnera pas
> Même s’il va la supplier, elle ne le pardonnera pas: lien circonstanciel de concession

Quelques indices syntaxiques et lexicaux de la subordination implicite:


Le conditionnel (1), le subjonctif (6), l’inversion (4) et (5), des termes tels que « avoir beau » (2) ou
« tellement » (3)…
Dépendances textuelles non marquées
2. Insertion
Il existe des propositions qui interrompent le cours de la phrase, pour apporter une nuance,
commenter ce qui vient d’être dit ou ce qui sera dit immédiatement après. Autonomes d’un
point de vue syntaxique, elles se situent tout de même à l’intérieur de la principale et à un

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niveau inférieur:

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(1) Entendez-moi bien, je le dis dans votre intérêt
(2) Il faut – c’est étonnant d’avoir à le dire – penser avant de parler
(3) L’autre jour (tu ne vas pas me croire) j’ai vu une poule avec des dents
(4) Paris est en France, semble-t-il

Il y a des traits syntaxiques et lexicaux qui montrent les limites de ces propositions:
L’impératif (1), le présentatif « c’est » (2), les tirets et les parenthèses (2) et (3), l’inversion (4), l’adresse
à un destinataire (1) et (3), et surtout des verbes de parole, croyance, interlocution…
Dépendances textuelles non marquées
3. Incise
Proche de l’insertion, c’est le cas de l’incise. Il s’agit de propositions contenant des verbes déclaratifs,
qui permettent de rapporter les paroles ou les pensées d’un locuteur:

(1) « Y en a marre », s’écria-t-il

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(2) « Viens », dit Paul à Virginie

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(3) « Quand Virginie sera là – soupirait-il – je serai au comble de mon bonheur »
(4) « Les troupes rentrées, pensaient les Américains, la guerre sera finie »

Encore une fois, il y a des traits syntaxiques et lexicaux:


Les verbes déclaratifs (au sens parfois très large), les signes de ponctuation et l’inversion du sujet et du
verbe.
Mais attention, les auteurs prennent souvent beaucoup de libertés:
« Je t’ai bien compris va! qu’elle a répondu » (Céline)
« Tout de suite! s’affairait le capitaine » (Céline)
« Tu vois, il a dit à l’amoureux, elle c’est ma femme » (Giono)
« Voui, vuvurre Zazie » (Queneau)
Repérez les subordonnées participiales:
Dany LAFERRIÈRE, « L’élan », Journal d’un écrivain en pyjama, Paris, Le Livre de Poche,
2015 [2013], p. 13-15

À l’époque, j’habitais dans un meublé surchauffé à Montréal, et je tentais d’écrire un roman


afin de sortir du cycle infernal des petits boulots dans des manufactures en lointaine

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banlieue. Mes voisins étaient de jeunes clochards, imbibés de bière, qui n’avaient pas assez

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d’argent pour la cocaïne. Le crack n’avait pas encore envahi les quartiers pauvres de la ville.
Je retrouvais le samedi soir les copains d’usine, dans une discothèque que fréquentaient des
femmes qui pouvaient être nos mères. C’est la promesse de l’Amérique à ceux qui partent
travailler avant la lumière du jour et reviennent, le soir, manger un spaghetti tout en
regardant un mauvais film à la télé. Je voulais la même promesse que l’Amérique fait à ses
gosses surprotégés des quartiers huppés. À l’usine, je ne valais pas tripette, ne sachant rien
faire de mes mains. Sauf écrire. On oublie qu’écrire est un travail manuel. Peut-on se mettre
tout d’un coup à écrire un livre sans fréquenter aucun groupe littéraire, ni même un club de
lecture ? Je lisais tout ce qui me tombais sous la main. Mais écrire est différent de lire.
L’écrivain et le lecteur se trouvant aux deux extrémités de la chaîne.
Repérez les subordonnées participiales:
Dany LAFERRIÈRE, « I. L’élan », Journal d’un écrivain en pyjama, Paris, Le Livre de Poche,
2015 [2013], p. 13-15

À l’époque, j’habitais dans un meublé surchauffé à Montréal, et je tentais d’écrire un roman


afin de sortir du cycle infernal des petits boulots dans des manufactures en lointaine

M. Edoardo CAGNAN edoardo.cagnan@gmail.com


banlieue. Mes voisins étaient de jeunes clochards, imbibés de bière, qui n’avaient pas assez

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d’argent pour la cocaïne. Le crack n’avait pas encore envahi les quartiers pauvres de la ville.
Je retrouvais le samedi soir les copains d’usine, dans une discothèque que fréquentaient des
femmes qui pouvaient être nos mères. C’est la promesse de l’Amérique à ceux qui partent
travailler avant la lumière du jour et reviennent, le soir, manger un spaghetti tout en
regardant un mauvais film à la télé. Je voulais la même promesse que l’Amérique fait à ses
gosses surprotégés des quartiers huppés. À l’usine, je ne valais pas tripette, ne sachant rien
faire de mes mains. Sauf écrire. On oublie qu’écrire est un travail manuel. Peut-on se mettre
tout d’un coup à écrire un livre sans fréquenter aucun groupe littéraire, ni même un club de
lecture ? Je lisais tout ce qui me tombais sous la main. Mais écrire est différent de lire.
L’écrivain et le lecteur se trouvant aux deux extrémités de la chaîne.
Repérez les subordonnées participiales:
« Je lisais tout ce qui me tombais sous la main. Mais écrire est différent de lire. L’écrivain et
le lecteur se trouvant aux deux extrémités de la chaîne »
• Les sujets « l’écrivain et le lecteur » sont différents du sujet de la principale (« écrire »)
• La participiale exprime un lien causal: Mais écrire est différent de lire, puisque l’écrivain et le lecteur
se trouvent aux deux extrémités de la chaîne

M. Edoardo CAGNAN edoardo.cagnan@gmail.com


Il y a une différence entre la langue des grammairiens, la langue telle qu’on la parle

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(qu’étudient les linguistes) et la langue telle que l’écrivent les auteurs (qu’étudient les
stylisticiens). Ici, selon les habitudes de l’écriture contemporaine, Dany Laferrière abuse,
en effet, de la ponctuation et rompt ainsi les liens syntaxiques entre ces trois
propositions qui devraient constituer une seule et unique phrase complexe:
[Coordination]
Je lisais tout ce qui me tombait sous la main, mais écrire est différent de lire,
[Subordination]
l’écrivain et le lecteur se trouvant aux deux extrémités de la chaîne

Bien entendu, ces libertés syntaxiques ne constituent pas tout à fait des fautes:
d’ailleurs, ces écarts par rapport à la norme n’ont pas empêché Laferrière d’être élu à
l’Académie française.
Pour la séance 2
1. Se procurer une grammaire
2. Réviser en autonomie toutes les catégories grammaticales (nature et fonction)
3. Réaliser exercice autocorrigé ci-dessous

M. Edoardo CAGNAN edoardo.cagnan@gmail.com


Déterminez pour ces phrases complexes si elles présentent un lien de juxtaposition, de

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coordination ou de subordination implicite:
a. Le temps est bon, le ciel est beau, j’ai deux amis […] (Bon entendeur)
b. Donnez-moi une suite au Ritz, je n’en veux pas! (Zaz)
c. Tout disparaîtra, mais le vent nous portera (Noir désir)
d. La caravane passe: les chiens aboient (Aragon)
e. Ça c’est une riche idée! Zazie dit (Queneau)
f. Aussi l’écrivain refuse-t-il, de bonne fois, d’asservir la littérature (Sartre)
g. Tu étais formidable, j’étais fort minable, nous étions fort minables (Stromae)
c. Coordination; d. Juxtaposition; e. Incise (non canonique); f. Rien du tout; g. Juxtaposition
Solutions: a. Juxtaposition; b. Subordination paratactique exprimant un lien de concession et/ou d’hypothèse;

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