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Machine-outil

Présentation
par François C. PRUVOT
Ingénieur-docteur
Ancien Directeur technique de Renault Machines-outils
Professeur honoraire, directeur du Laboratoire de productique et de machines-outils
École polytechnique fédérale de Lausanne

1. Définitions.................................................................................................. B 7 120 - 2
2. Principe d’une machine type ................................................................ — 3
3. Description sommaire et fonctionnelle ............................................. — 4
3.1 Bâti ................................................................................................................ — 5
3.2 Sol ou fondation .......................................................................................... — 5
3.3 Pièce à usiner ............................................................................................... — 5
3.4 Outil .............................................................................................................. — 5
3.5 Broche........................................................................................................... — 5
3.6 Commande de puissance............................................................................ — 5
3.7 Porte-outil..................................................................................................... — 6
3.8 Montage d’usinage...................................................................................... — 6
3.9 Chariot .......................................................................................................... — 7
3.10 Glissières ...................................................................................................... — 8
3.11 Commande d’avance................................................................................... — 8
3.12 Alimentations et commande ...................................................................... — 9
3.13 Élaboration et transmission des consignes............................................... — 9
3.14 Système d’outils .......................................................................................... — 9
3.15 Préparation et stockage des pièces............................................................ — 9
3.16 Mesure.......................................................................................................... — 10
3.17 Traitement des copeaux et du liquide de coupe ....................................... — 10
3.18 Capotage de la machine.............................................................................. — 10
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. 7 124

’étude ne concernera que les machines d’usinage des métaux.


L La quasi-identité de la plupart des organes de toutes les machines d’usinage,
soulignée par les définitions (§ 1), nous permettra de n’en étudier qu’une seule,
qu’on choisira volontairement atypique ; aussi bien élément de machine uni-
verselle que tout ou partie d’une machine spéciale, elle nous permettra de ne
décrire qu’une fois ses principaux composants. Bon nombre, cependant, seront
absents de certaines machines : leur étude ou leur utilisation ne les prendra
simplement pas en compte, sans pour autant remettre en cause l’architecture
4 - 1997

ou la technologie de la machine type.


Il faut cependant noter une évolution qui a commencé avec la Première Guerre
mondiale, mais qui est loin d’être achevée : c’est la tendance à l’automatisation
intégrale.
L’automatisation est devenue une réalité dans les industries du textile dès la
fin du XVIII e siècle (cf. Jacquard 1752-1834). Les premières machines-outils
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entièrement automatiques, les décolleteuses, nées à la fin du XIX e siècle,


n’étaient capables que d’usiner des pièces relativement simples et fabriquées
en grande série, généralement tirées de métaux en barres (cf. Brown et Sharp ;
Jung). C’est la guerre sous-marine qui, rendant problématique l’exportation de

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céréales des États-Unis vers la Grande-Bretagne, poussa au développement du


machinisme agricole dans ce même pays, contraint de devenir autosuffisant pour
ce qui est de la nourriture. La première usine moderne de tracteurs y fut alors
installée par Henry Ford (1863-1947). De nos jours et depuis des décennies, la
génération des machines-transferts, des machines à commande numérique, des
systèmes flexibles de fabrication, des machines d’assemblage automatique et
de bien d’autres, toutes machines sur lesquelles l’homme n’intervient pra-
tiquement plus en temps réel, n’a pas encore modifié l’architecture des machines
et leurs composants de façon radicale.
Cela procède sans doute de la volonté consciente ou inconsciente de maintenir
les machines-outils dans leur rôle d’auxiliaire d’un opérateur humain. Nous
essaierons, à la fin de l’ensemble « Machine-outil », de montrer une évolution
possible des machines, qui pourrait leur permettre un travail quasiment auto-
nome. Se pose alors la question de savoir si cette évolution est nécessaire
économiquement ; si la réponse est positive, on ne pourra alors pas échapper
à deux problèmes qu’on ne saurait passer sous silence. Le premier, d’ordre social
– sinon sociologique –, fait l’objet de débats publics depuis des décennies, ce
qui ne veut pas dire qu’il soit bien compris (et encore moins résolu). Le second
semble être passé inaperçu, bien que son importance soit au moins égale à celle
du premier ; le progrès technique n’a été rendu possible que par la conjonction
de l’homme et de la machine, l’un poussant et corrigeant l’autre. C’est ainsi que
l’on a pu faire des machines filles, plus performantes, plus précises, que leurs
mères. L’automatisme intégral, en tout cas tel qu’il se pratique aujourd’hui, n’a
plus ce potentiel d’amélioration continue qui a permis de passer du tour de potier
du néolithique au centre de tournage permettant la génération, par usinage au
diamant monocristallin, de miroirs de télescopes et d’objectifs de satellites-
espions, d’une précision très submicronique. La fille ne vaut plus la mère ; en
tout cas, elle ne lui est plus supérieure. Là encore, nous essaierons de montrer
quelques points qui pourraient permettre de poursuivre l’amélioration des per-
formances des machines-outils qui s’avérera rapidement indispensable.
L’article « Machine-outil » fait l’objet de plusieurs articles :
[B 7 120] Présentation ;
[B 7 121] Principaux organes ;
[B 7 122] Exemples de machines ;
[B 7 123] Systèmes de fabrication.
Les sujets ne sont pas indépendants les uns des autres ; le lecteur devra assez
souvent se reporter aux autres articles. Le numéro d’article est suivi du numéro
de paragraphe ou de figure.

1. Définitions successifs sont réalisés automatiquement, tandis que l’avance des


outils, à chaque poste, est commandée par des contacteurs électro-
magnétiques, actionnés par des cames et des tiges qui provoquent
le déclenchement des différentes opérations suivant un cycle d’usi-
■ La machine-outil , selon le dictionnaire Larousse est une nage préétabli. »
« Machine destinée à façonner la matière et mettant en œuvre un
outillage mû mécaniquement [...]. Une machine-outil travaille soit Ces définitions doivent être considérées comme incomplètes,
par déformation de la matière (machine à dresser les tôles, cisaille, voire partiellement erronées. On ne prétend pas ici apporter toutes
emboutisseuse, poinçonneuse, plieuse), soit par enlèvement de les corrections et tous les compléments nécessaires. Au contraire,
métal. On a alors : on réduira le champ aux seules machines d’usinage des métaux, en
notant toutefois que, en fabrication mécanique, on doit ajouter plu-
— les machines à mouvement circulaire continu, soit de la pièce sieurs espèces relativement nouvelles de machines – nées dans la
(tour), soit de l’outil (fraiseuse, perceuse, aléseuse) ; deuxième partie du XXe siècle – sans lesquelles toute production
— les machines à mouvement rectiligne alternatif, soit de la pièce est simplement impossible. On citera en particulier :
(raboteuse), soit de l’outil (étau limeur, mortaiseuse, brocheuse) ;
— les machines à outil abrasif dans lesquelles l’outil est constitué — les machines à mesurer ;
par une meule, une toile enduite d’émeri, etc. [...] ; — les machines d’assemblage ;
— les machines-transferts : dans une machine-transfert, l’avance — les machines de réglage ;
des pièces à usiner et leur ablocage aux différents emplacements

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auxquelles on pourrait non abusivement ajouter les machines de s’il y a interférence outil/pièce, un enlèvement de matière que nous
manutention et de stockage. À ces dernières appartiennent encore appelons usinage.
les robots, qui sont très rarement employés avec bénéfice hors de Nota : l’essentiel de la matière enlevée doit appartenir à la pièce à usiner. Cependant, la
ce domaine. plupart des processus d’usinage entraînent aussi un enlèvement de matière de l’outil ; c’est
alors une usure dont l’effet n’est pas toujours nuisible (cf. autorégénération des meules en
Nota : il y a encore bien d’autres types de machines-outils qu’on peut incorporer dans
rectification ou des pierres en pierrage).
des systèmes de fabrication (machines à laver, à contrôler l’étanchéité, à mesurer le bruit,
etc.).
■ Selon les conventions de la physique élémentaire, un point maté-
Les erreurs et approximations que contiennent les définitions riel – et donc une pièce composée d’une infinité de points – possède,
ci-dessus sont de plusieurs ordres. par rapport à un référentiel spatial fixe, six degrés de liberté. Si ce
● Ces définitions sont d’abord incomplètes. Ici, on ne voit pas une référentiel est un trièdre trirectangle, le déplacement du
machine de bombardement électronique ou une machine d’usinage point/pièce dans l’espace pourra être réduit à trois translations sui-
par laser s’insérer dans une des quatre classes définies. Ce sont vant les axes OX, OY, OZ (figure 1) et à trois rotations autour de vec-
pourtant des machines-outils d’usinage. teurs parallèles à ces mêmes axes, normalement désignées par A
● Ensuite, ces définitions ne sont pas homogènes. À l’évidence,
(autour de OX ), B (OY ) et C (OZ ). Le point/pièce est alors réputé avoir
l’espèce (ou la famille, l’ordre, etc.) des machines à mouvement six degrés de liberté par rapport au référentiel [trois de translation
circulaire n’est pas de même niveau hiérarchique que celle des (OX, OY, OZ ) et trois de rotation (A, B, C )].
machines à outil abrasif, ce dernier pouvant être tournant (rectifica- ■ Si les déplacements correspondants sont commandés, on
tion) ou animé d’un mouvement alternatif (pierrage, rodage, super- conçoit qu’on puisse générer, sur et dans la pièce, des surfaces fonc-
finition). tionnelles, mais de fonctions très variées : purement esthétiques
● La description de la machine-transfert peut se rattacher à ce type (matrices d’emboutissage de carrosseries de véhicules ou d’un appa-
d’erreur, bien que s’en distinguant à d’autres points de vue. reil électroménager) ; guidage d’écoulement (voilure ou fuselage
d’avion, aubage de turbine) ; séparation (surface d’un carter disso-
■ En fait, une classification correcte devrait distinguer la famille ciant deux espaces dont la communication doit obéir à certaines
des machines spéciales , à laquelle appartiennent les machines- règles) ; positionnement relatif avec une précision plus ou moins
transferts – et bien d’autres comme les machines à poste fixe, les grande de deux pièces l’une par rapport à l’autre, etc.
machines à plateau pivotant, etc. –, et celle des machines univer-
selles, ou banales, comme on les appelle parfois. Dès que ces surfaces répondent à des caractéristiques topo-
logiques ou dimensionnelles précises (planéité, parallélisme, dia-
La description d’une machine-transfert, par Larousse, est mètre, etc., suivant leur taille de 1 à 0,1 mm et au-dessous, les limites
elle-même particulière. Elle s’applique aux machines spéciales actuelles se situant vers le nanomètre), leur réalisation, leur façon-
électromécaniques qui ont été créées par Renault à la fin de la nage sont généralement du domaine de l’usinage et donc de la
Deuxième Guerre mondiale. Avant cela – et encore aujourd’hui – machine-outil d’usinage.
d’autres machines-transferts utilisaient des cames pour actionner
tous leurs organes, à l’instar des décolleteuses, dont les cames sont ■ Pour la très grande majorité des machines-outils d’usinage, la
entraînées généralement à vitesse constante par un ou plusieurs vitesse relative pièce/outil nécessaire à l’enlèvement de matière
moteurs ; d’autres machines-transferts sont à commande hydrau- est obtenue par rotation de l’outil ou de la pièce (§ 1) : tours,
lique ou électrohydraulique. Enfin, dès avant 1970, l’électronique et aléseuses, rectifieuses, fraiseuses, perceuses, centres d’usinage, uni-
l’informatique avaient fait leur apparition et avaient permis le déve- tés composant les postes des machines spéciales et, en particulier,
loppement de nouvelles commandes de machines : des machines-transferts, etc.
— commande par automate programmable, pour ce qui est de Pour quelques autres (de plus en plus rares), le mouvement relatif
la logique ; est une translation : les raboteuses et étaux limeurs ayant
— commande numérique (CNC - Computerized Numerical maintenant disparu, il ne reste plus, pratiquement, que les machines
Control ) pour la commande des « axes » des machines ; à tailler à outil-couteau et les brocheuses.
les deux types de commande se trouvant en général conjointement Certaines autres machines n’ont nul besoin d’une vitesse relative
au sein d’une seule et même machine pour en assurer le fonction- de coupe, comme les machines d’électroérosion, à fil ou par
nement. enfoçage.
Nota : on appelle généralement axe d’une machine un ensemble capable de positionner
un organe – fonction la plus simple – à une position définie numériquement. À des niveaux
Enfin, pour d’autres machines encore, l’outil est presque virtuel ;
plus évolués, on parle de commande en vitesse, de synchronisation, d’interpolation avec ou plutôt il existe sous forme divisée, voire continue : machine à
d’autres axes. découper au jet d’eau, chargée ou non de particules abrasives,
Les deux types de machines, universelles et spéciales, ont bien machines à usiner par laser, par bombardement électronique et
sûr bénéficié de ces nouvelles commandes ; en fait, il est très facile quelques autres (usinage chimique par exemple).
de s’en rendre compte, elles sont étroitement apparentées.
Bien que visuellement très différentes, elles dépendent des mêmes
connaissances, des mêmes méthodes d’étude et leurs organes prin-
cipaux sont pratiquement équivalents, si ce n’est identiques. Cette
très grande similitude nous permettra, dans ces articles, une non
moins grande simplification, puisque leur seule réelle différence
apparaît dans leurs cadences de production.

L’essentiel des paragraphes 2 et 3 est tiré de [1].

2. Principe
d’une machine type
Figure 1 – Les trois axes cartésiens et les six degrés de liberté
Le principe d’une machine-outil par enlèvement des copeaux est
très simple : on déplace devant un outil (fixe ou animé de
mouvements) une pièce à usiner. Ce déplacement relatif entraîne,

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L’intérêt de cette énumération (incomplète) est que toutes ces


machines, malgré la grande différence entre les processus qu’elles 3. Description sommaire
mettent en œuvre, ont des morphologies et d’autres caractéristiques
techniques et technologiques presque identiques. Toutes utilisent un
et fonctionnelle
bâti portant des glissières permettant une translation outil/processus
et pièce selon les axes d’un trièdre trirectangle. Beaucoup nécessi-
La figure 2 montre la machine atypique dont nous avons parlé
tent aussi des axes rotatifs et tous ces axes doivent être commandés
dans l’introduction. Nous allons rapidement la décrire, ainsi que ses
de manière sensiblement identique ; leurs commandes, avec ou sans
principaux composants, d’une manière essentiellement
rétroaction en provenance du processus d’usinage, sont très proches
fonctionnelle ; c’est uniquement quand nous étudierons leur
ainsi que bien d’autres composants et organes qu’on décrira dans
conception [B 7 121] que nous nous intéresserons à leurs perfor-
cet article.
mances (nous devrons alors préciser le sens de ce mot dans le
contexte des machines-outils) et, de là, à leur morphologie, leurs
Dans ces conditions, on peut envisager une méthode unique dimensions et leur technologie.
de description, voire une méthode et des procédés identiques
d’étude et de fabrication pour toutes les machines-outils.

Figure 2 – Système de fabrication et machine type

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3.1 Bâti d’usinage [(9), figure 2 , décrit (§ 3.8), qui est alors chargé
d’augmenter la rigidité relative outil/surface à usiner jusqu’à une
Le bâti [(1) (1’), figure 2)], ou structure de la machine, assure valeur acceptable.
plusieurs fonctions ([B 7 121] § 4).
■ C’est, d’abord, l’élément qui tient ensemble les différents 3.4 Outil
éléments fonctionnels de la machine. Il en assure la position rela-
tive qui permettra l’usinage des surfaces de la pièce à usiner [(3),
figure 2]. Les outils [(4), figure 2] sont montés sur un porte-outil (8) tournant.
Comme nous l’avons vu (§ 1), le porte-outil peut également être fixe
■ Sa deuxième fonction est de fixer la machine au sol dans une et la pièce est alors tournante. Nous avons aussi noté que certaines
position et une attitude compatibles avec le personnel qui utilisera machines d’usinage ne comportent pas d’outil à proprement parler ;
ou entretiendra la machine. Notons que jusqu’ici les machines même dans ce cas, on trouvera des organes qui joueront exactement
reposent presque toujours sur le sol, mais rien ne s’opposerait à ce le même rôle que le porte-outil. Nous y reviendrons (§ 3.7).
qu’elles soient fixées à une paroi verticale – un mur – ou au plafond.
Nous verrons, paragraphe 3.18 et en [B 7 121] (§ 7), que ces
morphologies, aujourd’hui inhabituelles, présentent un intérêt si 3.5 Broche
grand pour le bon fonctionnement de la machine, qu’elles devraient
se généraliser et, en tout cas, devenir beaucoup plus fréquentes dans
un futur, sans doute malheureusement éloigné. Une broche [(5), figure 2] est un arbre tournant sur des paliers ;
ils lui retirent cinq degrés de liberté ; le sixième, une rotation, est
■ Le bâti assure souvent d’autres fonctions, que nous ne détaille- enlevé par la commande de puissance [(6) et (7), figure 2] qui fournit
rons pas car elles sont de moins en moins souhaitables pour un bon l’énergie nécessaire à l’usinage.
fonctionnement de la machine :
■ La broche reçoit le porte-outil (outil tournant) ou la pièce (pièce
— servir de réservoir au liquide de coupe qui assure des fonctions tournante) et lui confère la vitesse de coupe nécessaire à l’usinage.
de refroidissement (de la pièce, de l’outil, des copeaux) et de trans- Certaines machines n’utilisant pas d’outil peuvent néanmoins
port des copeaux ; comporter une broche. Par exemple, les machines de fraisage par
— servir de réceptacle aux copeaux ; dans ce cas, il comporte des électroérosion comportent une électrode montée sur une broche
moyens permettant de diriger les copeaux résultant de l’usinage vers tournante.
un récipient ad hoc ;
— protéger l’environnement humain et matériel des projections ■ La broche est également un des éléments les plus importants
de matière et de liquide résultant de l’usinage ; pour un usinage de qualité et, à ce titre, sa rigidité et d’autres
— servir de support à des équipements auxiliaires tels que mani- caractéristiques que nous préciserons en [B 7 121] (§ 3) sont de la
pulateurs de pièces et d’outils, appareils de mesure, etc. plus haute importance.
Nous arrêterons là cette description fonctionnelle.
Une broche de machine-outil, suivant la taille de la pièce et la
nature de l’usinage et, bien sûr, la taille de la machine, peut
3.2 Sol ou fondation tourner à des vitesses allant de quelques tours par minute à
200 000 tours par minute (Usinage à Très Grande Vitesse, UTGV)
Le rôle le plus évident du sol [(2), figure 2] est de supporter la pour des puissances allant de quelques kilowatts à plusieurs cen-
machine et, bien sûr, le personnel. taines de kilowatts.
Cependant, pour beaucoup de machines, et en particulier les
grandes machines, la fondation sert à donner l’essentiel de sa rigidité ■ Au rang des fonctions importantes de la broche, on doit
au bâti. En d’autres termes, doivent être considérées comme grandes compter la rapidité et la facilité d’établissement et de suppression de
les machines dont le bâti ne peut reposer au sol en trois points de la liaison avec le porte-outil , afin de minimiser les temps non
façon isostatique. productifs. De plus, la précision et la fidélité de position du porte-outil
sont fondamentaux, afin de permettre le préréglage de position de
Par exemple, les machines servant à l’usinage de turbines hydrau-
l’outil, lui aussi indispensable à la minimisation des temps non pro-
liques de grande puissance (700 MW par exemple) et de turboalterna-
ductifs.
teurs modernes (1 300 MW) ont des longueurs qui dépassent
couramment 30 m. Sans la fondation, elles seraient bien incapables ■ Enfin, la broche peut servir de lieu de passage pour le liquide de
d’assurer un usinage de précision. coupe, pour des organes de réglage de position de l’outil quand la
broche est en marche, pour des signaux traduisant la position de
On peut donc dire que le sol ou fondation fait, dans de tels cas,
l’outil ou le diamètre de pièce ; en outre, quand un fluide est utilisé
partie intégrante de la machine et doit, à ce titre, être conçu, calculé,
pour nettoyer l’interface broche/porte-outil au moment du chan-
et réalisé selon un cahier des charges qui précisera ses perfor-
gement de celui-ci, il est amené jusqu’à cette interface par l’intermé-
mances.
diaire de la broche.
De plus, notons que le sol peut renfermer nombre d’auxiliaires
et en particulier les moyens d’évacuation et de traitement des
copeaux et du liquide de coupe.
3.6 Commande de puissance
■ La commande de puissance [(6) et (7), figure 2] est chargée
3.3 Pièce à usiner comme son nom l’indique, de fournir l’énergie nécessaire à la
coupe. Elle comprend un moteur qui, lorsque l’outil ou la pièce
Cette pièce [(3), figure 2] fait partie intégrante de la machine. En tourne, est généralement un moteur électrique, soit à courant
effet, nous montrerons paragraphe 3.3.2 en [B 7 121] que la rigidité continu, soit asynchrone, soit, de plus en plus souvent, synchrone
relative outil/surface à usiner est un des facteurs les plus importants autocommuté.
pour un usinage de précision. On conçoit alors que l’usinage d’une
Dans les machines spéciales, qui n’effectuent souvent qu’une
pièce de faible rigidité puisse présenter des difficultés insurmon-
seule et même opération, le moteur asynchrone alimenté par le
tables si certaines précautions ne sont pas prises. C’est le montage
réseau (et tournant donc à vitesse constante) est souvent suffisant.

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Il est cependant facile d’obtenir deux, et parfois trois, vitesses par de porte-outils différents. Une telle performance ne peut être atteinte
commutation de pôles ou à l’aide de plusieurs enroulements stato- qu’en normalisant strictement les diamètres et tolérances, bien
riques. Pour les machines pouvant travailler à vitesse variable, le au-delà de ce que recommandent les organismes nationaux (AFNOR
moteur à courant continu est fréquemment remplacé par les moteurs pour la France) et internationaux (ISO International Standard
asynchrones et, plus encore, synchrones alimentés à fréquence Organization ) [2].
variable [cf. articles spécialisés dans le traité Génie électrique].
■ Un point très important dans le porte-outil est la standardisation
■ Le rotor peut être directement monté sur l’arbre de la broche – on de sa liaison avec la broche et l’éventuel chariot (standards différents
parle alors de motobroche – ou bien il entraîne celle-ci par l’intermé- d’ailleurs).
diaire d’une courroie, d’une chaîne ou d’engrenages. On peut aussi ● Le standard ISO, encore en vigueur, est la copie d’un standard
associer au moteur (à vitesse constante ou variable) une boîte de américain SAE (Society of Automotive Engineers) datant du début du
vitesses permettant d’étendre son domaine de fonctionnement. XXe siècle, qui a été crée sous l’impulsion d’Henry Ford, quand il a
● Les transmissions à courroies classiques semblent avoir atteint fabriqué, pour la première fois dans le monde, un véhicule auto-
aujourd’hui leurs limites, alors qu’elles avaient depuis des décennies mobile en grande série. Malgré des défauts importants qui rendent
empiété largement sur le domaine des engrenages. son utilisation très délicate en fabrication automatique (médiocre
● Il est donc probable qu’on assistera à un retour en force des précision, forte sensibilité à la pollution, prix de revient élevé, grand
engrenages pour les très hautes puissances et vitesses. Signalons encombrement, nécessité de grands diamètres – inutiles – de
que, dans l’aérospatiale (boîtiers de prise de puissance de broches, etc.), on emploie encore largement ce standard car il y a des
turboréacteurs ; réducteurs de rotors d’hélicoptère), ils permettent milliards de porte-outils de ce type dans le monde.
des vitesses tangentielles allant de 65 m/s (pignons spiroconiques) Exemple : la figure 3 montre le standard ISO des queues d’outils
à 150 m/s (pignons cylindriques hélicoïdaux). (queues de porte-outils) et la figure 4 le standard correspondant des nez
● Pour les plus basses puissances, les motobroches dominent de broches.
déjà largement le marché.
● L’industrie automobile, confrontée au changement rapide –
● On peut montrer qu’un retour – on les a déjà utilisés et aban-
donnés tant pour des raisons de coût que de rendement – des mais généralement manuel – et simultané de nombreux outils sur
une même machine (en particulier les machines-transferts), a pu en
moteurs hydrauliques, est, cependant, probable. Leurs versions les
grande partie s’affranchir de ce standard et a crée le sien. Malheu-
plus modernes permettent des puissances massiques de l’ordre
de 20 kW/kg pour les moteurs volumétriques ; des moteurs à tur- reusement, celui-ci est très peu adapté au changement automatique
bine Pelton, alimentés à des pressions de l’ordre de 500 bar ou plus, et il devra être renouvelé à moyenne échéance.
pourraient s’avérer d’un grand avenir pour l’usinage à très haute ● Enfin, sous l’impulsion de l’Allemagne, un standard DIN de
vitesse. L’intérêt de ces matériels dépasse la seule puissance queues d’outils est en passe de devenir ISO. Il pose également des
massique. Leurs très faibles dimensions, comparées à celles des problèmes délicats (hyperstatisme en particulier, qui n’existait pas
moteurs électriques les plus performants, facilitent énormément le dans l’ancien standard).
dessin des structures de machines, légères et de très haute rigidité.

3.8 Montage d’usinage


3.7 Porte-outil
Le rôle du montage d’usinage [(9), figure 2] est multiple.
Comme son nom l’indique, le rôle du porte-outil [(8), figure 2] est ■ Le rôle le plus évident, baptisé souvent ablocage, est de brider,
de tenir l’outil coupant proprement dit dans une position permettant bloquer la pièce sur la machine, lui retirer ses six degrés de
un usinage correct. Qu’il soit tournant, et donc monté sur une broche, liberté, afin de permettre son usinage sans qu’elle puisse bouger
ou fixe et monté sur un chariot, le rôle du porte-outil dans la qualité sous l’effet des forces de coupe.
des usinages est complémentaire de celui de la broche. Un élément
fondamental à prendre en compte pour sa conception est donc sa
rigidité. Celle-ci, cependant, ne doit en rien s’opposer à la facilité
et la rapidité de son montage et de son démontage de la
broche (§ 3.5) ou du chariot fixe (§ 3.9).
■ Le porte-outil est de plus en plus changé automatiquement, en
particulier sur les machines universelles pouvant utiliser de
nombreux outils différents. Le porte-outil est alors stocké, sur la
machine elle-même, dans un magasin à outils, et son échange avec
un autre porte-outil contenu dans le magasin se fait à l’aide d’un
changeur d’outil.
Nous décrirons (§ 3.13 et 3.14) plus en détail ces deux appareils
dont la fonction est extrêmement importante dans la gestion de fabri-
cation. Notons le rôle primordial que les porte-outils et les outils
jouent dans la gestion d’une entreprise de fabrication mécanique.
En effet, une entreprise moyenne (2 000 à 3 000 personnes),
considérée comme bien gérée, a couramment 6 000 à 8 000 outils
et porte-outils différents ; ce nombre ne comprend évidemment pas
les porte-outils frères, qui peuvent se compter par dizaines, si l’on
veut que les machines en soient en permanence pourvues malgré
usure et casse des outils. Certains sous-traitants de la NASA
(Administration de l’Aérospatiale Américaine) peuvent avoir jusqu’à
100 000 (!) porte-outils différents afin de répondre aux besoins de
Figure 3 – Queue de porte-outil ISO [ISO/R 297-1963 (F)]
leur client.
À l’inverse, on peut démontrer qu’une entreprise bien gérée (fabri-
quant ses propres machines) peut se contenter de quelques dizaines

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On peut utiliser, dans certains cas, des plateaux magnétiques (cou-


rants pour des pièces magnétiques possédant une face plane de sur-
face suffisante qu’on peut utiliser comme face d’appui), des plateaux
à vide, le collage. Toutes ces solutions s’appliquent à des cas par-
ticuliers de pièces très spéciales. Des solutions plus générales restent
à trouver. On peut avoir quelques idées de ce qui est recherché
dans [3].
Pour ce qui est des pièces tournantes, des arbres, le problème
est sensiblement plus simple que pour les pièces polyédriques ou
carters. Il suffit d’utiliser un arsenal d’éléments pratiquement stan-
dards que sont les mandrins, les pinces, les contre-pointes, les
lunettes (fixes ou à suivre) et autres entraîneurs. Cependant, l’obten-
tion d’une réelle flexibilité (dans le sens d’adaptation quasi immé-
diate à une pièce de formes et de dimensions quelconques, parfois
faite à l’unité) est encore assez loin d’être acquise. Là encore, les
normes ISO, beaucoup trop anciennes et fixant de façon dépassée
le mode de liaison du mandrin, des pointes et des pinces à la
machine, retardent le progrès. Celui-ci, de toute façon, ne se fera
que lentement, mais il est possible.

3.9 Chariot
Figure 4 – Cône à conicité 7/24 pour nez de broches ISO
On a vu (§ 2, figure 1) qu’un solide libre possède dans l’espace
[ISO/R 297-1963 (F)]
six degrés de liberté. De plus, pour usiner une pièce, il faut souvent
(car il y a des exceptions) la positionner sur un montage et lui enlever
ses six degrés de liberté par rapport à la machine (§ 3.8). Nous avons
■ Le second rôle est de positionner la pièce avec précision, avant aussi vu (§ 2) qu’un usinage nécessitait en général un déplacement
qu’on la bride. Ce positionnement peut être plus ou moins précis. relatif de la pièce et de l’outil.
Quand la pièce est brute, il faut qu’elle soit bien balancée sur la
machine, c’est-à-dire que toutes les surfaces à usiner aient une sur- ■ Un premier déplacement est dû à la rotation d’une éventuelle
épaisseur d’usinage suffisante [couramment de l’ordre du millimètre broche (§ 3.5) qui assure la vitesse de coupe (cf. article Procédés
à quelques millimètres, suivant la taille de la pièce, quand la pièce d’usinage. Présentation [B 7 000] dans ce traité).
brute est obtenue par forge ou par fonderie ; moins, et parfois beau- ■ La génération d’une surface nécessite d’autres mouvements
coup moins (0,1 mm et au-dessous) quand le procédé de fabrication relatifs pièce/outil.
de la pièce est plus précis : pensons au frittage, au découpage fin, à
● Pour percer un trou, la pièce doit être déplacée vers le foret par
la forge à froid]. De plus, les pièces internes à la pièce usinée (boîtier,
un mouvement de translation parallèlement à l’axe de rotation (de la
carter) et les pièces qui lui sont extérieures ne doivent pas entrer en
pièce ou de l’outil) : un degré de liberté commandé.
collision avec elle. C’est alors le rôle fonctionnel de la pièce dans un
ensemble monté qui doit aussi être pris en compte. ● Pour fraiser une surface plane, il faut déplacer la pièce par un
mouvement de translation perpendiculairement à l’axe de rotation
■ Enfin, un troisième rôle (signalé § 3.3) consiste à donner à la pièce de la fraise. Le déplacement peut être, dans tous les cas, accompli par
une rigidité qu’elle n’a pas naturellement (par exemple, l’usinage du la pièce ou l’outil ; là encore, un degré de liberté commandé.
revêtement épais d’une aile d’avion, bloc-cylindres de moteur ther- ● Pour fraiser une surface quelconque avec une fraise sphérique,
mique en aluminium coulé sous pression). Cette fonction est sans il faut au moins trois degrés de liberté commandés.
doute la plus délicate de toutes celles qu’un montage d’usinage doit
assurer, car cette rigidification doit se faire sans pratiquement défor- Pour fraiser une surface quelconque avec une fraise sphérique ou
mer la pièce. Elle est rendue encore plus complexe, quand la pièce torique en maintenant des conditions de coupe constantes (vitesse
à usiner reçoit un usinage d’ébauche. La matière enlevée, ainsi que de rotation constante de la fraise, donc rayon d’usinage de fraise
le reste de la pièce, sont le siège de contraintes internes résultant du constant), la normale à la surface à fraiser au point de contact
procédé de formage de la pièce brute. L’ébauche rompt l’équilibre fraise/pièce doit faire un angle constant avec l’axe de la broche
des forces internes résultant de ces contraintes et la pièce doit alors porte-fraise. Il faut alors, entre outil et pièce, cinq degrés de liberté
se déformer pour retrouver son équilibre interne. Très généralement, commandés.
elle ne peut le faire que quand elle est relâchée par le montage. Une ● Pour tourner un arbre de diamètre variable (continûment ou par
méthode bien préférable consiste à utiliser un montage qui, tout en sauts), il faut deux degrés de liberté commandés entre pièce et outil ;
donnant à la pièce la rigidité qui lui manque à l’état naturel, lui permet etc.
de reprendre sa forme d’équilibre avant son usinage de finition. Certains usinages nécessitent six degrés de liberté commandés,
■ On conçoit qu’assurer ces trois fonctions de façon entièrement mais certaines machines en ont beaucoup plus, par exemple pour
automatique relève d’une conception raffinée. Le problème est déjà distinguer les mouvements grossiers peu précis et des mouvements
complexe pour la fabrication en grande série ; il n’est pas résolu de fins précis.
façon satisfaisante pour la fabrication automatique unitaire (surtout) Dans tous les cas, la pièce ou le montage porte-pièce est monté
et de petite série, malgré les travaux qui se font au Japon, aux sur un chariot [(10), figure 2] qui n’a, en général, qu’un seul degré
États-Unis, en Allemagne et en Suisse. de liberté commandé. Quand on en veut plus, on monte ce chariot
Des procédés non généralisables ont été mis au point pour sur un deuxième chariot, qui est lui-même guidé par un troisième
certaines applications très particulières (et pour des coûts élevés), chariot, etc. Pour de nombreuses raisons, en particulier de rigidité
telles que le positionnement et le bridage par réfrigération, la pièce et de précision, on répartit, le plus souvent, les degrés de liberté entre
étant partiellement immergée dans de l’eau contenue dans un bac broche et pièce.
réfrigérant fixé à la machine ; la prise de la glace immobilise la pièce.

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Chaque chariot doit être guidé avec un jeu aussi faible que possible
(nul de préférence) par une glissière (§ 3.10).

Depuis quelques années – 1990 – certains fabricants de


machines prônent l’utilisation de morphologies non conven-
tionnelles de machines, basées sur les travaux de Stewart. Ces
morphologies ne font appel qu’à des barres (en fait des vis
commandées par des moteurs) au nombre de six (pour les six
degrés de liberté) et reliées aux deux parties principales de la
machine par des rotules. La figure 5 donne un schéma de prin-
cipe d’une telle machine. On peut penser que l’outil et la broche
(par exemple) seraient solidaires de la plate-forme (P1 → P6 )
alors que la pièce serait bridée sur la plate-forme (b1 → b6 ).
On voit immédiatement quelques caractéristiques impor-
tantes de cette machine :
— le perçage d’un simple trou se fera par interpolation des
six axes de la machine ;
— l’alésage, ainsi que le fraisage d’une surface plane, néces-
siteront aussi l’interpolation des six axes.
Or, les surfaces universelles de la mécanique de précision sont
uniquement le plan et le cylindre, qui se font, en usinage tradi-
tionnel, par déplacement d’un seul axe, parallèlement à la surface
(fraisage) ou à son axe (alésage).
Les calculateurs actuels n’auront guère de difficulté à calculer Figure 5 – Plate-forme de Stewart
les lois d’interpolation des six axes qu’il faut déplacer ensemble
pour la plate-forme de Stewart, mais l’imperfection des moteurs, La glissière idéale devrait donc avoir une rigidité infinie ; son
des vis à billes, des systèmes d’asservissement, fait qu’il est jeu avec le chariot porte-pièce ou outil devrait être nul ; le frottement
difficile d’imaginer aujourd’hui qu’une telle machine puisse statique dans la direction d’avance entre chariot et glissière devrait
sérieusement concurrencer, dans le domaine de la précision être aussi nul. Par contre, le frottement dynamique devrait être aussi
(et bien d’autres) des machines plus conventionnelles. élevé que possible (avec une loi linéaire frottement/vitesse corres-
Signalons un autre problème : une telle machine aura bien de pondant au terme du premier ordre de l’équation différentielle
la peine à travailler dans un demi-espace borné par le plan linéaire à coefficients constants modélisant le comportement du
porte-pièce. D’ailleurs certains fabricants (Geodetics) le savent chariot), afin de conférer au chariot un amortissement élevé, et donc
bien : ils munissent leurs hexapodes de têtes porte-outil à plu- une réponse amortie à une perturbation de force résultant, par
sieurs degrés de liberté. exemple, de l’usinage.
Au total, ces morphologies semblent devoir être confinées à
des domaines spéciaux.
Cependant, nous verrons (§ 4.2 et 4.3.2 en [B 7 121], et § 1 en 3.11 Commande d’avance
[B 7 122]) les limites des morphologies conventionnelles et leur
nécessité d’évolution, si le besoin se fait sentir un jour de perfor- La commande d’avance [(12) et (13), figure 2] est généralement
mances supérieures. Jusque-là, on utilisera toujours des chariots composée de deux éléments principaux : le moteur (souvent élec-
pour guider pièce ou outil dans ses déplacements. trique et à vitesse variable) et l’organe mécanique actionnant le cha-
riot, qui est habituellement une vis (à billes ou à rouleaux).
Nota : les surfaces de la mécanique de précision autres que les surfaces universelles
sont : ■ La rotation du moteur entraînant la vis déplace le chariot et
— la sphère, qui ne sert qu’à faire des billes de roulement et des rotules ; crée un mouvement relatif d’avance entre l’outil et la pièce.
— les tores, qui forment uniquement les pistes de roulements à billes ;
— les cônes qui font les porte-outils ISO et quelques autres éléments ; ● Un seul axe en déplacement, si la glissière est linéaire, engen-
— les surfaces en développante et assimilées (Novikov, Axicon), qui font les dentures drera une surface usinée réglée qui, suivant les machines, sera cylin-
(engrenages et cannelures).
drique ou conique de révolution (outil à une seule arrête de coupe)
Toutes ces formes ne se font que sur des machines spéciales.
ou plane (utilisation d’une fraise).
On pourrait générer d’autres types de surfaces réglées telles que
des hyperboloïdes (diamantage de la meule d’avance d’une recti-
3.10 Glissières fieuse sans centre, par exemple), des paraboloïdes hyperboliques
et d’autres encore. Cylindres et plans forment toutefois l’essentiel
Le rôle des glissières [(11), figure 2] est de retirer au chariot (10) des surfaces universelles de la mécanique de précision (cf. § 3.9),
cinq degrés de liberté, de façon à permettre, entre le support de glis- car leur simplicité analytique entraîne une grande simplicité ciné-
sières (dans le cas de la figure 2, le bâti (1) de la machine) et le chariot, matique et de commande pour les machines d’architecture
un déplacement unidirectionnel qui est en général linéaire. Il existe conventionnelle. Il est bien évident, comme nous le signalions
cependant des glissières courbes, ne permettant très souvent qu’un aussi (§ 3.9) que cette simplicité cinématique disparaît avec les
mouvement de rotation (un seul degré de liberté) au chariot (glissière machines du type Stewart, par exemple, et les tolérances de réali-
circulaire), mais on réalise d’autres trajectoires. sation d’un plan ou d’un cylindre de révolution n’ont plus alors
Le chariot portant la pièce ou l’outil, la qualité de la surface usinée aucune raison d’être plus serrées que celles d’un paraboloïde de
dépendra pour une bonne part de la qualité de la glissière. En effet, révolution ou d’une surface polynomiale de Bézier-Bernstein.
un jeu entre chariot et glissière correspondra à un défaut de la surface Néanmoins, la plupart des machines nécessitent plus d’un axe.
usinée. Un accroissement du frottement entre chariot et glissière
● Un tour doit avoir au moins deux axes. Le premier servira à fixer
entraînera nécessairement une force à exercer plus grande de la part
la position radiale de l’outil et donc le diamètre du cylindre qu’on veut
de la commande d’avance (§ 3.11), et donc éventuellement, des
tourner. Le second permettra de générer le cylindre en déplaçant
erreurs statiques et/ou dynamiques de position relative outil/pièce
l’outil parallèlement à son axe, pendant que la pièce (ou l’outil)
plus grandes.
tourne.

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● L’usinage d’un filetage sur ce même tour nécessitera un troi- que les pièces soient usinées à la cote. Les changements d’outils
sième axe. Celui-ci, correspondant à une rotation, sera l’axe de la sur la tourelle peuvent naturellement aussi être rendus automa-
broche, puisqu’un filetage nécessite pour son usinage la synchroni- tiques, mais la machine devient alors exagérément complexe et
sation de la rotation de la pièce avec l’axe Z (l’axe parallèle à l’axe de chère. Il est hors de doute que toutes les machines, dans un futur
la broche), afin de permettre la génération des flancs du filet. Cette proche (et existant pour nombre de sociétés et de machines) seront
synchronisation devra être conservée pendant tout l’usinage du munies d’un magasin à outils et d’un changeur qui montera les outils
filetage, qui se fait généralement en plusieurs passes. séquentiellement sur un support unique, fixe ou tournant. Tous les
● Suivant les pièces à usiner, les surfaces dont elles sont compo- centres d’usinage (qui remplacent les anciennes perceuses, les
sées et leurs relations topologiques, une machine peut comporter un aléseuses, les fraiseuses) en sont déjà équipés. Quelques centres de
nombre variable de commandes d’axes, associées à autant de cha- tournage ont également reçu des systèmes comparables, ainsi que
riots et d’ensembles tournants. des machines d’électroérosion par enfonçage et certaines recti-
fieuses intérieures, dont les meules sont changées automa-
■ Il existe aussi des moteurs linéaires, hydrauliques (vérins) et tiquement.
électriques, qu’on utilise à la place du moteur rotatif et de la vis (ou Nota : la diminution d’importance des rectifieuses pour la mécanique est relativement
de l’engrenage et de la crémaillère) transformatrice de mouvement. courante. Ces machines sont de plus en plus remplacées par le tour (tournage à l’outil
Ces moteurs linéaires électriques peuvent, comme les moteurs dur-nitrure de bore cubique, nitrure de silicium) et par le pierrage et même la bande abrasive.
Les raisons de cette désaffection sont multiples (intégrité des surfaces usinées, coût de
rotatifs, être du type asynchrone ou synchrone. Leur intérêt principal l’opération, coût de la machine, nécessité de changement de machine entre ébauche et
est de supprimer la vis et ses défauts qui sont, outre des irrégularités finition, etc.).
de fonctionnement, son inertie, généralement bien supérieure à celle
du chariot (ramenée à la vis) et à celle de moteurs (synchrones), et
sa vitesse limite, limitant l’accélération et la vitesse maximales du
chariot. Par contre, ils ont une rigidité mécanique nulle et le réglage
3.14 Système d’outils
de position du chariot, statique et dynamique, dépend entièrement
de la qualité du système d’asservissement. Nous avons évoqué ce système [(18), figure 2] dans le
paragraphe 3.13 ; cependant, il est beaucoup plus complexe que ce
que nous avons mentionné. Les outils, fixes et tournants, doivent
d’abord être préparés.
3.12 Alimentations et commande
■ Selon le type d’outil, le mode de préparation varie.
Les moteurs d’axes, qu’ils soient électriques ou électrohydrau- ● Pour les outils massifs, généralement en acier rapide, il faut les
liques (pour les très hautes performances, les commandes électro- affûter (s’ils ne sont pas neufs) et mesurer leur longueur (centres
hydrauliques, sont souvent indispensables), ainsi que les autres d’usinage) ou la régler à une valeur standard (machines spéciales),
organes à commander (par exemple le blocage des chariots, les bri- grâce à un porte-outil permettant de compenser l’usure.
dage des pièces, généralement hydraulique), nécessitent des ali- ● Pour les outils utilisant des plaquettes à jeter, on remplacera la
mentations. Celles-ci peuvent aller du simple relais électrique ou plaquette usée par une neuve et on mesurera et/ou réglera la position
de l’électrovalve alimentée en huile sous pression par groupe de la pointe de l’outil par rapport au porte-outil.
hydraulique [(14), figure 2], au servorégulateur complexe assurant
que les consignes de position et/ou de vitesse adressées à chaque ■ Dans un cas comme dans l’autre, les outils sont identifiés par une
axe sont exécutées sans erreur excessive. Pour cela, les valeurs de pastille qui peut être lue à distance (transpondeur). Connaissant le
consigne sont comparées aux valeurs réelles. La soustraction de ces numéro de l’outil, on peut alors avoir accès à ses caractéristiques en
deux valeurs donne un signal d’erreur qui, traité de façon plus ou interrogeant l’ordinateur de gestion des outils, qui donne le type
moins complexe (exemple : réglage prédictif, à horizon fuyant, etc.) de l’outil, ses dimensions de réglage ou mesurées, la matière de
commande [(15), figure 2] un amplificateur alimentant le moteur l’outil et donc les métaux qu’il peut usiner et les paramètres de coupe
d’axe ou la servovalve de façon à annuler l’erreur détectée. permis, sa durée de vie résiduelle, etc. Les outils peuvent alors être
stockés dans un magasin central en attendant d’être affectés à une
Les commandes par tout ou rien sont ordinairement générées par machine particulière.
un automate programmable.
Quand une demande arrive en provenance du système de fabri-
Les valeurs réelles de position/vitesse (éventuellement accéléra- cation, les outils sont sortis du stock (automatiquement dans les sys-
tion) du chariot sont élaborées par un système de mesure (§ 3.16). tèmes modernes) et transportés, aussi automatiquement, vers le
magasin à outils de la machine demandeuse. Celle-ci en profite pour
renvoyer vers le lieu de préparation les outils usés ou dont elle n’a
3.13 Élaboration et transmission plus besoin. Une fois dans le magasin de la machine, l’outil peut
des consignes être mis par le changeur d’outil dans la broche ou sur le chariot,
afin d’usiner une ou plusieurs surfaces de la pièce.
La gamme d’usinage d’une pièce ayant été élaborée, on envoie
à la machine les ordres correspondants, qu’elle doit exécuter [(16)
et (17), figure 2]. La pièce à usiner ayant été positionnée et bridée 3.15 Préparation et stockage des pièces
(manuellement ou automatiquement, § 3.8), ces ordres concernent
le type d’outil qui a été sélectionné par le système de programmation Il existe pour les pièces un système [(19), figure 2] très proche de
assistée par ordinateur. Le porte-outil correspondant sera pris dans celui des outils.
le magasin à outils de la machine par le changeur d’outil et mis en
place dans la broche ou sur le chariot. Il peut aussi être déjà présent ■ Les pièces brutes doivent d’abord être préparées, c’est-à-dire
sur une tourelle de la machine (tour), et une simple rotation de celle-ci qu’on vérifie qu’il y a sur les surfaces à usiner des surépaisseurs
l’amènera en position de travail. Notons que ce dernier organe est d’usinage suffisantes, comme nous l’avons mentionné au
en voie d’être complètement démodé. En effet, une tourelle peut paragraphe 3.8. Cette préparation peut se faire de différentes
rarement accommoder un nombre suffisant d’outils (fixes et tour- façons.
nants) et nécessite, de ce fait, d’être déséquipée et rééquipée chaque ● Manuellement, par traçage
fois qu’on change de pièce ou qu’un outil casse ou est usé. Ces opé- Le traceur, en s’aidant de différents outils (marbre, équerre, dé,
rations non productives sont longues car elles nécessitent, en plus trusquin, pointe à tracer, etc.) trace sur la pièce des droites définissant
des montages et démontages d’outils, leur réglage de position, afin des plans de référence ; ceux-ci, positionnés correctement sur la

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machine d’usinage quand la pièce est bridée sur le montage d’usi- généralement dues à des variations de température. On assure de
nage, garantiront le bon balancement de la pièce, c’est-à-dire qu’il cette façon un usinage des pièces dans les tolérances ; les loupés
y aura (cf. § 3.8) des surépaisseurs suffisantes sur toutes les surfaces et retouches peuvent donc être pratiquement éliminés.
à usiner, et aussi que les volumes et formes de la pièce seront compa-
tibles avec ceux des autres pièces composant l’organe assemblé. ■ Autres mesures
On effectue aussi :
● Automatiquement
— une mesure de puissance de coupe, qui peut servir dans
Des outillages spéciaux balancent la pièce de façon à lui assurer quelques cas (rares) à vérifier l’intégrité ou l’état d’usure d’un outil ;
les mêmes caractéristiques que dans le cas précédent. — une mesure de courant (électroérosion) avec rétroaction sur
Très généralement, ce positionnement automatique est suivi d’un la commande d’avance du chariot, qui garantit un usinage optimal
usinage, lui aussi automatique, permettant de placer avec précision (courant maximal possible sans court-circuit, usure minimale de
la pièce sur la ou les machines d’usinage. Ces usinages doivent donc l’électrode) ;
permettre de retirer à la pièce ses six degrés de liberté. — une mesure de niveau vibratoire dans des bandes élevées de
— Pour les pièces polyédriques ou carters, on peut choisir diffé- fréquence, renseignant sur l’état de l’arête de coupe de l’outil ; etc.
rents types de surfaces.
• Un plan (fraisé, par exemple) permet de retirer trois degrés de
liberté (deux rotations et une translation). Les trois degrés de liberté 3.17 Traitement des copeaux
restants peuvent être retirés de plusieurs façons, mais très souvent et du liquide de coupe
à l’aide des pieds de centrage. Un pied de centrage, formé d’un
cylindre court (approximation d’une sphère) d’axe perpendiculaire ■ Les copeaux sont des sous-produits de l’usinage. Cette présence
au plan, permet de retirer deux degrés de liberté supplémentaires pose toujours des problèmes extrêmement sérieux qui rendent leur
(deux translations). Il ne reste alors plus à la pièce qu’un seul degré traitement indispensable [(21), figure 2].
de liberté de rotation, qui peut être retiré par un pied depincé.
En effet, on montre que les copeaux véhiculent de 80 % à plus
• On peut utiliser d’autres surfaces telle qu’une droite (deux degrés de 90 % de l’énergie de coupe. Laisser les copeaux entrer en contact
de liberté enlevés) parallèle au plan fraisé, approximée par une avec certains éléments de la machine entraîne leur échauffement et
bande fraisée étroite ou par deux petites surfaces planes, généra- donc une perte de précision. Dans la mesure du possible, on doit
lement coplanaires. Le dernier degré de liberté (une translation) peut donc éviter tout contact entre les copeaux et tout autre organe de
être enlevé par une petite surface perpendiculaire à la droite. la machine (en particulier la pièce à usiner qui, après refroidissement,
— D’autres combinaisons sont possibles. En particulier, pour les peut être hors tolérances ).
pièces de base de révolution ou arbres, on peut usiner des centres, Les copeaux sont aussi souvent abrasifs :
petites surfaces coniques matérialisant l’axe de la pièce et l’immo-
bilisant axialement (cinq degrés de liberté enlevés). Le sixième sera — les copeaux d’acier sont trempés, en particulier par le liquide
retiré directement par le mandrin ou l’entraîneur du tour, de la de coupe, et peuvent rayer les surfaces de la pièce et de la machine
rectifieuse ou de la machine à tailler. D’autres possibilités existent (par exemple les glissières) ;
pour balancer automatiquement les pièces. — les copeaux de fonte libèrent des particules de graphite très
abrasives et les copeaux d’aluminium libèrent de la silice (alliages
■ Quand les pièces sont prêtes, elles sont transportées vers la pour fonderie sous pression ; alliages hypersiliciés).
machine d’usinage, souvent après avoir été positionnées et bridées Enfin, mélangés aux copeaux, on trouve des particules très
sur un montage d’usinage, lui-même solidaire d’une palette qui abrasives résultant de l’usure de l’outil ou de la meule.
servira à transporter la pièce de station à station (machine-transfert)
ou à la positionner sur le centre d’usinage. Elles peuvent aussi, si ■ Très souvent, afin de refroidir les copeaux et pour les véhiculer loin
elles ont été préparées largement à l’avance, être envoyées vers un de la machine, on utilise un liquide de coupe. Celui-ci, généra-
magasin de stockage, qui peut être automatique, central ou tampon lement à base d’eau (liquide bon marché et ayant la capacité
attaché à une machine particulière. De là, le moment venu, elle sera thermique massique la plus élevée) doit cependant comporter des
mise automatiquement sur la machine, grâce à un échangeur qui composants évitant l’oxydation de la pièce usinée et des organes de
l’échangera avec une pièce précédente qui vient d’être finie. la machine. Le liquide de coupe véhicule donc les copeaux, mais il
doit ensuite être traité :
— filtré pour le débarrasser des particules solides (filtres papier,
3.16 Mesure centrifuge, magnétique, etc.) ;
— refroidi ou réchauffé car il garantit la stabilité dimensionnelle
de la pièce et de la machine en les maintenant à température
On peut faire sur machine deux types principaux de mesures
constante ;
dimensionnelles [(20), figure 2].
— régénéré afin d’éviter qu’il donne asile à des colonies bacté-
■ Mesure de la position du (des) chariot(s) riennes qui peuvent oxyder les pièces, etc.
C’est en effet la position des chariots par rapport à l’outil qui garan-
tit l’usinage correct des surfaces de la pièce à usiner. Cette mesure
se fait généralement grâce à des règles linéaires, optiques ou magné- 3.18 Capotage de la machine
tiques (plus rarement à laser), qui envoient vers la commande les
signaux correspondant à la position du chariot. Le capotage de la machine [(22), figure 2] a d’autres fonctions,
■ Mesures nécessaires à la vérification des usinages effectués autrement importantes, que l’esthétique, qu’on ne saurait cependant
(mesures diamétrales, mesures de longueur de la pièce) négliger.
De plus en plus fréquemment, on fait ces mesures sur les ■ La première fonction – chronologiquement, non par ordre
machines. On peut ainsi, par une procédure prévue avant le début d’importance – du capotage est la séparation de l’espace
de l’usinage, compenser l’usure ou la dilatation de l’outil et les varia- machine, pollué par les copeaux et le liquide de coupe, de l’envi-
tions dimensionnelles de certains éléments de la machine, ronnement, où évolue l’opérateur. Cette séparation est indispen-
sable à la sécurité. En effet, l’utilisation de hautes vitesses de coupe
– couramment de 450 m/min (c’est-à-dire près de 8 m/s) pour l’acier
à 3 000 m /min et même 5 000 m /min (plus de 80 m /s), pour les
alliages légers – transforme les copeaux et les débris d’outils en pro-
jectiles dangereux.

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■ La seconde fonction, qui devient la plus importante du fait que les Pour les centres d’usinage, la séparation des espaces copeaux et
machines sont de plus en plus automatiques et fonctionnent donc machine conduira à une pièce fixe (ou peut-être tournante à un seul
sans opérateur, est la séparation de l’espace de travail, où degré de liberté), tous les autres mouvements étant réservés à l’outil.
s’effectue l’usinage et où sont produits les copeaux, de l’espace Le bâti sera au-dessus de la pièce. Dans une phase transitoire, on
machine, c’est-à-dire l’espace où se trouve toute la partie méca- pourra, pour ne pas perturber utilisateurs et acheteurs, se contenter
nique et précise de la machine. Cette fonction est très loin d’être bien d’une rotation de π/2 comme nous le montrons figure 7. Pour les
réalisée sur la plupart des machines, du fait d’une architecture machines d’usinage d’arbres, qu’on appellera encore centres de
inadaptée. Par exemple, avec les tours actuels, il est pratiquement tournage, il est facile de montrer que le banc devra être au-dessus
impossible de séparer ces espaces. Les chariots X et Z, avec la (ou de la pièce. La correcte séparation des espaces copeaux et machine
les) tourelle(s), ne peuvent pas être protégés efficacement. Il en va imposera aussi la poupée mobile (comme pour les décolleteuses
de même avec la plupart des centres d’usinage, dont les degrés de d’aujourd’hui et d’hier), alors que l’outil, animé des mouvements X,
liberté commandés (les axes) sont répartis entre pièce et outil. Y et B, sera porté par une broche, pour les outils tournants, ou sera
Ce mélange d’espaces, qui devraient être distincts pour assurer coaxial avec la broche – mais non porté par elle – pour les outils
un bon fonctionnement des machines, entraîne toujours une fixes. Il n’y aura plus de tourelle, mais un magasin et un changeur
mauvaise accessibilité des organes techniques qu’on doit entretenir d’outils. Ainsi, on fera aisément la complète séparation des espaces
et éventuellement dépanner. Il s’ensuit des temps de dépannage trop copeaux et machine. Du même coup, les opérations d’entretien
longs ; il peut en être de même pour les temps perdus pour les chan- seront fort simplifiées.
gements d’outils.
Dans l’industrie automobile, près de 40 % du temps d’une chaîne
de production est consacré au dépannage et aux changements
d’outils. Les machines ne produisent donc réellement que
pendant 60 % environ du temps de marche. Pour les machines uni-
verselles, on atteint rarement, quoi qu’on en dise, de telles valeurs.
Les protections sont en général beaucoup mieux réalisées pour
les machines spéciales que pour les machines universelles. La
figure 6 montre une machine-transfert Renault très ancienne (1961).
On voit, pourtant, que la partie mécanique proprement dite, les uni-
tés d’usinage et les outils sont immédiatement accessibles. Seule
la partie centrale, qui voit se dérouler le processus d’usinage, est
complètement fermée, et de très grandes quantités de liquide de
coupe assurent l’évacuation des copeaux et de la chaleur résultant
de la coupe. Les seuls éléments techniques se trouvant dans cette
zone sont les montages d’usinage et le système de transport des
pièces.
La raison principale de l’inadéquation des machines actuelles à
l’évacuation des copeaux et à la protection de l’espace technique
est la pesanteur. Les machines, ainsi que l’opérateur, reposent sur
le sol (la fondation). Les pièces, pour être usinées, ont été pendant
longtemps – et sont encore, pour les machines non automatiques –
posées sur une table appartenant à la machine. Là, un opérateur
les positionne et les bride. C’est la pesanteur qui maintient la pièce
sur la table entre la dépose et leur bridage par l’opérateur. Dans les
machines futures – car très peu, aujourd’hui, sont bâties sur ce
modèle –, la pesanteur n’étant plus d’aucune utilité pour l’alimen-
tation de la machine en pièces et en outils, on pourra avoir une
architecture inversée. Toute la structure (le blanc, le bâti) se
trouvera au-dessus de la pièce, laissant les copeaux et le liquide de
coupe tomber librement par gravité.

Figure 7 – Centre d’usinage LMO-EPFL

Figure 6 – Machine-transfert Renault (1961)

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MACHINE-OUTIL _______________________________________________________________________________________________________________________

La figure 8 montre un centre d’usinage à 4 ou 5 axes de structure


presque traditionnelle permettant cette parfaite séparation
copeaux/mécanique. Le cahier des charges proposé à son auteur se
résumait à peu de choses, en plus de cette séparation : tout le capo-
tage devrait pouvoir s’enlever en moins de 10 s pour permettre un
entretien ou une réparation facile. Le contrat a été parfaitement
rempli. Une architecture de machine plus moderne – inversée – aurait
infiniment simplifié l’étude.

Figure 8 – Centre d’usinage à espaces différenciés


(étude Claudio PFISTER)

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B 7 120 − 12 © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique
P
O
U
Machine-outil R

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par François C. PRUVOT N
Ingénieur-docteur
Ancien Directeur technique de Renault Machines-outils
Professeur honoraire, Directeur du Laboratoire de productique et de machines-outils
École polytechnique fédérale de Lausanne
S
Références bibliographiques
A
[1] PRUVOT (F.). – Conception et calcul des
machines-outils. Vol. 1. Généralités. Morpho-
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taires Romandes, Lausanne (1989).
R

P
L
U
S
4 - 1997
Doc. B7124

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