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1ère 1 DS 2 heures

Cannibale, de Didier Daenincks

Inspiré par l'échange de crocodiles contre autant de Kanaks pour le cirque Höffner
de Francfort-sur-le-Main, ce récit déroule son intrigue dans le Paris des années 1930.
On y voit les mentalités de l'époque et l'univers étrange de l'Exposition coloniale de
1931. L'auteur y met en perspective les révoltes qui auront lieu cinquante ans plus
tard en Nouvelle-Calédonie. Ce passage évoque la visite des officiels au jardin
d’acclimatation, le jour de l’inauguration de l’Exposition.
Vous ferez le plan très détaillé du commentaire composé de cet extrait de Cannibale,
de Didier Daenincks (1998 Folio p.28.30.) Puis vous rédigerez l’introduction, et, au
choix, une des « grandes » parties de votre plan, et, enfin la conclusion.
Votre plan ne doit pas suivre celui du texte, contrairement à ce que l’on fait pour la
préparation des textes à l’oral.
Sur la copie que vous rendez :
- Le plan très détaillé
- Introduction rédigée
- Une de vos grandes parties, avec au moins deux sous-parties
- La conclusion rédigée.

Pour vous aider : début de l’introduction :


Didier Daeninckx est un écrivain français du 20e siècle. En 1998 il publie
un roman inspiré de faits historiques réels nommé Cannibale . Dans celui-ci, il
raconte l’histoire des kanaks qui seront exposés tels des animaux dans un zoo
lors de l’exposition coloniale de 1931 à Paris. Elle donna lieu à des
reconstitutions spectaculaires des environnements naturels des « sauvages »
dans lesquels les indigènes amenés dans ce zoo humain étaient « dressés » à
jouer aux sauvages pour distraire les visiteurs. Cette même année, certains
kanaks y seront échangés contre des alligators sous le prétexte de visiter
Paris.
Suite de l’Introduction :
Cet extrait peut s’apparenter à un réquisitoire contre l’esclavage et la
barbarie ainsi qu’une critique sociale du comportement des européens. On
peut alors se demander en quoi le concept de l’exposition coloniale décrit
dans cet extrait permet de dénoncer le racisme et les injustices de cette
époque. (=problématique).
Annonce du plan :
Tout d’abord nous nous attacherons au point de vue original adopté par
l’auteur ; nous montrerons ensuite que la mise en scène voulue par les
organisateurs est affligeante, pour voir enfin que la dénonciation en est
d’autant plus féroce.

I. Un point de vue original


A. La parole d’un témoin
- Première personne du singulier et du pluriel, valeur testimoniale, implication
du locuteur, qui raconte ce qu’il a vécu.
- Modalisateurs.

B. Un regard naïf en apparence


Bonté, générosité, bienveillance, aspiration au repos, aucun esprit de révolte,
politesse = qualités des Kanaks
C. Une perception neuve des choses :
C’est tout à fait le regard d’Usbek et Rica, décrivant le Paris qu’ils découvrent
dans leur Correspondance, et qui en dévoilent les absurdités. (Montesquieu, les
Lettres Persanes : « Les Français ... enferment quelques fous dans une maison,
pour persuader que ceux qui sont dehors ne le sont pas. »)
Ici : ridicule du défilé des Provinces, bêtise du gardien, stéréotype des groupes de
visiteurs, qui se pensent supérieurs et qui ne sont que stupides.
II. Une mise en spectacle affligeante
A. La déshumanisation des Kanaks
- Des animaux
- Des choses : une simple monnaie d’échange pour remplacer des crocodiles
morts.
B. La privation de liberté
Génératrice de racisme : montrer des êtres enfermés dans des enclos est une
manière de bien faire comprendre de quel côté se trouve le pouvoir et le
savoir .
C. La construction du Cannibale : le public veut voir des anthropophages, on les lui
donne à voir. Visée politique : si le sauvage existe, cela légitime la colonisation :
autant exploiter les richesses des territoires conquis, voire civiliser ces
« sauvages »…Cannibale construit pour répondre à un fantasme.

III. Une dénonciation d’autant plus féroce.


A. Un passage éminemment ironique
Une fierté française bien mal placée : tout compte fait, les provinciaux défilent aussi,
et se donnent en spectacle au bon peuple parisien, « civilisé », lui. Idée qu’il est
temps d’éduquer toutes ces régions reculées, où ne résident que des gens frustes, et
peu évolués. Dénonciation du racisme, mais surtout de la bêtise qui y préside : la
France se moque d’elle-même, sans s’en rendre compte, alors que les kanaks, eux,
perçoivent l’incongruité de la situation.
B. La dénonciation du mensonge colonial
Un voyage fondé sur le mensonge, qu’il s’agisse de celui effectué par les Kanaks
depuis leur pays, ou celui que certains d’entre eux doivent effectuer vers
l’Allemagne. Fausse bonhommie de Grimaut, paternalisme insupportable que
dénonce l’auteur par la réponse en apparence soumise d’un des
protagonistes,Ueken : « Nous allons vous suivre, monsieur, puisque vous nous le
demandez… Mais nous n’avons pas besoin de prendre nos bagages pour visiter
Paris… » (l.87-90)
C. Le pathétique de la scène, qui suscite la révolte du lecteur
Antinomie entre le champ lexical de la fête et le traitement infligé aux kanaks,
dont l’innocence fondamentale rappelle celle du Bon Sauvage de
Rousseau.Légèreté des badauds, horreur de ce que vivent ces malheureux : la
mise en perspective de deux groupes humains diamétralement opposés renforce
l’empathie du lecteur, qui finit par n’éprouver que mépris à l’égard de ceux qui,
originellement, méprisent : renversement de perspective// Montaigne : les
sauvages ne sont pas ceux que l’on croit. (pourtant, ne pas oublier que ce public
est manipulé à des fins politiques : il faut approuver le colonialisme !)

Début de la conclusion :
En conclusion, Cannibale de Didier Daeninckx dénonce l’Exposition Coloniale à la fois à
travers les mentalités françaises face aux Kanaks et la condition des Kanaks. Dans ce roman
contre l’ignorance et la barbarie qu’elle engendre, l’auteur interroge l’histoire non seulement
sur le pouvoir des puissants sur les plus faibles mais aussi sur le racisme.
Ouverture :
Cette œuvre peut nous faire songer au texte de Montesquieu, écrivain des Lumières,
également très engagé dans la lutte contre l’injustice, nommé "De l'esclavage des nègres",
dans de l’Esprit des Lois, en 1748, texte ironique tournant en ridicule les arguments en faveur
de l'esclavage.

Un lien sur un article très intéressant :


https://casoar.org/2019/06/19/les-kanak-exhibes-en-marge-de-lexposition-coloniale-en-
1931-le-mythe-du-sauvage-cannibale/
Hommes kanaks lors de l'Exposition coloniale de Paris en 1931

Histoire : en mai 1931, des dizaines de Kanaks sont exhibés dans


un zoo humain en marge de l’Exposition coloniale de Paris
(France Info, la 1, portail des Outre-Mer, Philippe Triay • Publié le 14 mai 2021)

Il y a 90 ans, de mai à novembre 1931, la dernière Exposition coloniale internationale de Paris


connaît un succès sans précédent. Tous les territoires des Outre-mer actuels y sont représentés
par des pavillons. Mais des dizaines de Kanaks en sont réduits, en marge, à une ignoble mise
en scène.

La dernière Exposition coloniale internationale de Paris ouvre ses portes le 6 mai 1931 à la
Porte Dorée et sur une grande partie du bois de Vincennes, et durera jusqu’au 15 novembre de
la même année. Avec huit millions de visiteurs, c’est un succès populaire sans précédent et
une victoire idéologique pour la France impériale de l’époque. Des « indigènes » des colonies
sont emmenés dans la capitale comme figurants, afin de reproduire pour le public français des
scènes de leur vie locale.

Mais pour des dizaines de Kanaks, une autre histoire va se dérouler. Sordide. En marge de
l’exposition, la Fédération française des anciens coloniaux en « recrute » une centaine, pour
les exhiber au Jardin zoologique d’acclimatation du bois de Boulogne. Vous avez bien lu,
dans un zoo ! En fait de recrutement, les Kanaks sont complètement dupés. On leur ment
délibérément en leur disant qu’ils vont participer à l’Exposition coloniale internationale pour
présenter leurs danses et leur culture, et qu’ils pourront visiter la capitale. A leur arrivée en
mars 1931 à Marseille, ils sont envoyés non pas à Vincennes, mais directement au Jardin
d’acclimatation. Quelques-uns d’entre eux iront néanmoins à Paris pour l’ouverture officielle
du pavillon de la Nouvelle-Calédonie.

"Sauvages cannibales et polygames"


Parmi ceux qui accostent à Marseille, certains sont envoyés, sans qu’ils s'y attendent, en
Allemagne, à Francfort, pour un « show » intitulé « Les derniers cannibales des mers du
Sud ». Nous y reviendrons. Au Jardin zoologique d’acclimatation, des cases de fortune sont
construites à la va-vite. Les publicités s’étalent dans la presse, où les Kanaks sont qualifiés,
entre autres, de « sauvages cannibales et polygames ». Et le spectacle peut commencer en
marge de l’Exposition coloniale. Dans son livre « Cannibale », inspiré des entretiens que
l’auteur a eu avec des descendants de Kanaks exhibés dans le zoo humain, le romancier
Didier Daeninckx écrit en leur nom :

On nous jetait du pain, des bananes, des cacahuètes, des caramels... Des cailloux aussi.
Les femmes dansaient, les hommes évidaient le tronc d’arbre en cadence, et toutes les
cinq minutes l’un des nôtres devait s’approcher pour pousser un grand cri, en montrant
les dents, pour impressionner les badauds. Nous n’avions plus une seule minute de
tranquillité, même notre repas faisait partie du spectacle.

Le triomphe est au rendez-vous, en dépit des protestations émises par les communistes, des
religieux, des associations de défense des droits humains et des Kanaks, tous unis contre les
responsables de cette déshumanisation. Le ministre des Colonies est saisi de l’affaire, et
réagira bien tard, en sommant la Fédération française des anciens coloniaux, au mois de
juillet, de rapatrier ses « employés ».

Exhibés en Allemagne et en Autriche

Mais les organisateurs n’en ont cure. Au contraire, ils poursuivent leurs sinistres projets. Dans
le courant du mois de mai, ils obligent une soixantaine de Kanaks à partir en Allemagne, où
ils sont de nouveau exposés aux railleries de la foule à Hambourg, Berlin, Francfort,
Munich… ainsi qu’à Vienne en Autriche. Ils sont confiés notamment à des dirigeants de
cirque.

Leur cauchemar se termine en novembre 1931. Avec ceux de Paris, les Mélanésiens
rejoignent Marseille, où ils embarquent finalement vers leur terre natale, avec un souvenir de
France qui les marquera à jamais, ainsi que leur descendance à laquelle ils ne manqueront pas
de raconter les avanies endurées. Le reste appartient à une histoire qui est loin d’avoir fini de
s’écrire, comme en témoigne l’actualité de la Nouvelle-Calédonie…

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