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Délais de paiement: Le projet de loi enfin voté

Par Hassan EL ARIF | Edition N°:6429 Le 10/01/2023 | Partager

Il cible les entreprises PM ou PP réalisant un chiffre d’affaires de plus de 2 millions de DH HT

Une amende de 2,5% du montant de l’impayé, majorée de 0,85% par mois de retard

Le projet de loi sur les délais de paiement n°69-21, modifiant la loi n°015-95, était programmé pour
le vote par la commission des secteurs productifs, lundi 9 janvier. La dernière mouture du texte a
subi quelques ajustements, notamment le calendrier de son entrée en vigueur, le montant des
amendes révisées à la baisse avant le vote en commission puis, plus tard, en séance plénière.

Ainsi, les délais de paiement entre partenaires commerciaux devront être précisés avant la
conclusion de toute transaction sur tout document probant, tel qu’une facture, un bon de livraison
ou un contrat de vente. Pour les établissements publics, ce délai commence à courir à partir de la
date de supervision de la réalisation de la prestation selon la réglementation en vigueur. Dans le cas
où les délais de paiement ne seraient pas convenus, ils ne peuvent dépasser 60 jours à compter de la
date de facturation, qui doit être émise avant la fin du mois pendant lequel la prestation a été
réalisée ou la marchandise livrée. En l’absence d’une facture, le délai est considéré à partir de la fin
du mois de la réalisation de la prestation ou de la livraison. Lorsqu’un fournisseur et un client sont
liés par des opérations commerciales récurrentes pendant le mois, l’échéance du paiement est fixée
à la fin du mois suivant. Les partenaires commerciaux ne pourraient pas convenir d’un délai de
paiement au-delà de 120 jours.

Délais, infractions et accords sectoriels

A l’instar de la législation actuelle, les opérateurs concernés pourront exceptionnellement fixer entre
eux des délais pouvant aller jusqu’à 180 jours suite à l’avis du Conseil de la concurrence. Les délais
sectoriels devront être signés entre organisations professionnelles dans des conditions qui seront
arrêtées par un décret. De plus, les accords sectoriels sont suspendus à la réalisation d’études
objectives par les associations concernées.

Ces délais doivent être mentionnés par toute structure ayant son siège social, son domicile fiscal ou
une entité établie au Maroc. Les dispositions du projet de loi s’appliquent à toute entreprise de droit
privé, délégataire de la gestion d’un service public ainsi que les établissements publics réalisant de
manière régulière des transactions de nature commerciale. Sont exclues les personnes morales et
physiques dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 millions de DH HT.

Les infractions à la loi seront sanctionnées d’une amende équivalant au montant du taux directeur de
Bank Al-Maghrib, qui est actuellement de 2,5%, majorée de 0,85% pour chaque mois ou fraction de
mois de retard. Ne sont pas concernées par cette amende (article 78-3) les factures émises avant le
1er janvier 2025 et dont le montant est inférieur ou égal à 10.000 DH TTC.

L’amende, dont le recouvrement et le contrôle des déclarations (article 78-4) seont confiés à
l’administration fiscale, sera appliquée au montant impayé en tenant compte de la TVA. L’amende
devra être acquittée de manière spontanée au Trésor au moment du dépôt de la déclaration
trimestrielle des impayés. L’amende, objet d’un litige instruit par le tribunal de commerce, reste
tributaire d’une décision judiciaire définitive ayant acquis la force de la chose jugée. A signaler que
l’amende s’appliquera au reliquat de la facture resté impayé. Les personnes morales et physiques
réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions de DH seront tenues de souscrire une déclaration
électronique trimestrielle auprès des services des impôts et ce, avant la fin du mois suivant
l’expiration du trimestre

■ Les sanctions en cas d’infraction à la loi

Le défaut ou retard dans la déclaration trimestrielle, dans le dépôt de l’état détaillé des impayés ou
dans le paiement de l’amende (articles 78-3 et 78-6) exposent à des sanctions pécuniaires allant de
5.000 DH à 250.000 DH selon l’infraction et le chiffre d’affaires. Des montants ayant été réduits par
rapport à la première version du projet de loi. En cas de non-paiement de l’amende de manière
spontanée, l’administration procédera à l’émission de l'ordre de recette et sera recouvrée selon les
dispositions de la loi n°15-97 sur le recouvrement des créances publiques.

L’administration fiscale est habilitée à contrôler la sincérité des déclarations et de l’état détaillé des
impayés. Elle pourra même procéder à des contrôles sur place au niveau du siège social ou de
l’adresse commerciale des entreprises concernées. La direction de l’entité sera avisée conformément
à la réglementation au moins 15 jours avant le début du contrôle. Une fois la procédure de
vérification entamée, l’entité contrôlée devra fournir l’ensemble des justificatifs nécessaires. A
défaut, l’administration pourra émettre des amendes (article 78-6) via un ordre de recette. Les
sanctions pécuniaires pourraient être doublées en cas de récidive. Les infractions relevées seront
consignées dans un procès-verbal dont une copie sera remise aux personnes concernées, qui
disposeront d’un délai de 30 jours pour se justifier. En cas de non-réponse ou de justifications
incomplètes, l’amende devient due au Trésor.

Une liste annuelle (article 78-8) des entités en infraction par rapport aux obligations déclaratives et
au respect des délais de paiement sera élaborée par la Direction générale des impôts et transmise à
l’Observatoire des délais de paiement.

En cas de litige sur les amendes

Les personnes faisant face à l’application d’une amende seront tenues d’adresser un courrier dans ce
sens au ministère des Finances dans un délai n’excédant pas six mois suivant le mois où l’ordre de
recette a été émis. En cas de non-réponse dans un délai de trois mois, le fournisseur pourra saisir la
justice au cours des deux mois suivants. L’administration fiscale est autorisée à réduire ou annuler les
amendes et autres sanctions pécuniaires au profit des personnes qui en feraient une demande
justifiée à condition de régulariser les factures impayées.
Source : Projet de loi 69-21 sur les délais de paiement
Le barème des amendes s’applique en cas de défaut de déclaration trimestrielle des impayés

Une déclaration trimestrielle obligatoire dans tous les cas

Les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 2 millions de DH HT sont tenues de souscrire
une déclaration trimestrielle même en l’absence de factures impayées dans les délais. La déclaration
dont le modèle sera fixé par l’administration fiscale devra contenir un certain nombre d’informations
dont:

- Identification de l’entreprise (nom, adresse commerciale, siège social ou entreprise établie, ICE,
IF…)

- La période couverte par la déclaration

- Le chiffre d’affaires HT au terme de l’exercice comptable

- Le montant total TTC des factures impayées dans les délais

- Le montant total des factures intégralement ou partiellement payées dans les délais

- Le montant total des amendes

- Le montant des factures objet d’une action de justice

La déclaration trimestrielle relative aux factures impayées dans les délais devra être accompagnée
d’une attestation d’un commissaire aux comptes (au-delà de 50 millions de DH HT de chiffre
d’affaires au terme d’un exercice comptable) ou d’un expert-comptable ou d’un comptable agréé (en
deçà de ce chiffre d’affaires).

Etat détaillé des impayés

La déclaration trimestrielle doit être accompagnée de l’état détaillé des impayés, contenant les
informations suivantes

• La référence des factures hors délai (nom, adresse commerciale, siège social, RC…)

• La date de leur émission

• L’identité des fournisseurs ayant émis les factures

• Date de livraison des marchandises, des travaux ou services rendus

• Date de supervision des travaux ou des services par l’établissement public

• Nature des marchandises, des travaux ou des services rendus

• Les montants TTC des factures

• La date convenue pour le paiement

• Le montant de la facture impayée

• Le montant de la facture payée totalement ou partiellement

• La date du paiement partiel ou intégral, sa référence et son mode

• Le nombre de mois de retard

• Le montant de l’amende

• Le montant des factures objet d’une action judiciaire

Echéancier de l’entrée en vigueur de la loi

La loi sur les délais de paiement n°69-21, modifiant la loi n°015-95 formant code de commerce, entre
en vigueur à compter du 1er mois suivant sa publication au Bulletin officiel sauf pour les dispositions
des articles 3-78 (amendes) et 10-78 (demande de réduction des amendes) de la loi. Dans un premier
temps, ces articles ne concerneront que les entreprises réalisant au moins un chiffre d’affaires de
plus de 50 millions de DH. A signaler également que ces structures devront souscrire une déclaration
annuelle au titre des exercices 2024 et 2025 avant le 1er avril 2026. Le défaut de déclaration
annuelle est sanctionné d’une amende de 20.000 DH (entre 2 millions et 10 millions de DH HT de CA)
ou 50.000 DH (entre 10 millions et 50 millions de DH HT de CA). Pour les autres structures, la loi
s’appliquera selon l’échéancier mentionné au tableau ci-contre.
Hassan EL ARIF

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