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978-2-10-075258-4
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Table des matières
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LISTE DES AUTEURS XI

INTRODUCTION 1
Manuel Bouvard

PREMIÈRE PARTIE
LE TDAH CHEZ L’ENFANT ET L’ADULTE, NOSOGRAPHIE, CLINIQUE ET ASPECTS COGNITIFS
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

1. Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice au trouble


neurodéveloppemental 6
François Bange
« Altérations morbides de l’attention » au Siècle des Lumières 7
Instabilité et parallélisme psychomoteur 8
Un hiatus d’un siècle, 8 • « Mobilité exubérante » et « chorée
mentale », 8 • « L’écolier instable », 9 • « Instabilité constitutionnelle »
et parallélisme psychomoteur, 9 • « Turbulence » et développement
psychomoteur, 10 • Diffusion internationale de l’« instabilité », 11
Déficit du contrôle moral et de la volonté 11
Déficit de « contrôle moral », 11 • « Haltlosen », déficit de la volonté et
personnalité pathologique, 12
IV TABLE DES MATIÈRES

Doctrines organiques et doctrines psycho-environnementales 13


Doctrines organiques, de l’« hyperkinésie » au MBD, 13 • Doctrines
psycho-environnementales, milieu et psychodynamique, 17
Le syndrome dans les classifications internationales 19
DSM, de l’« a-théorie » au trouble neurodéveloppemental, 19 • Révisions
du DSM jusqu’au DSM-IV-TR, 20 • « Troubles hyperkinétiques » et
personnalité pathologique dans la CIM-10, 21 • Trouble
« neurodéveloppemental », 22
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Une nouvelle ère nosographique ? 22
Conclusion 23
Bibliographie 24

2. Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 25


Clarisse Locret-Capon, Stéphanie Bioulac
Description clinique 25
Le déficit attentionnel, 25 • L’hyperactivité ou instabilité
psychomotrice, 27 • L’impulsivité, 28 • Composantes secondaires de la
symptomatologie, 29 • Conséquences, 30
Évaluation diagnostique 31
Entretien clinique, 31 • Échelles psychométriques, 32 • Critères
diagnostiques chez l’enfant selon le DSM-5 (APA 2013), 35 • Bilans
complémentaires, 40
Bibliographie 45

3. Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 46


Caroline Maurs, Jean-Philippe Reneric
Épidémiologie 46
Prévalence, 46 • Sexe, 47
Diagnostic 48
Description clinique, 48 • Critères diagnostiques selon le DSM, 54 •

Comment faire le diagnostic de TDAH chez l’adulte ?, 63


Conclusion 72
Bibliographie 73
Table des matières V

4. TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 75


Hervé Caci
La Classification Internationale du Fonctionnement 76
Mesurer le fonctionnement et le retentissement 77
Échelles de qualité de vie, 79 • Sheehan Disability Scale, 79 • ADHD
Impact Module, 79 • Barkley Functional Impairment Scale, 80 • Weiss
Functional Impairment Rating Scale, 80
Stigmatisation et coming-out 81
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Perception de la stigmatisation par les enfants atteints, 82 •
Stigmatisation par des pairs sains, 84 • Stigmatisation publique des
enfants TDAH, 84 • Stigmatisation publique des adultes TDAH, 85 •
Stigmatisation de courtoisie, 86
Le fonctionnement chez l’enfant 87
Les fonctions mentales globales, 87 • Les fonctions mentales
spécifiques, 90 • Les difficultés scolaires, 90 • Utilisation des
services, 92 • Mortalité, 94 • Suicide et tentative de suicide, 94
Le fonctionnement chez l’adulte 97
Le fonctionnement professionnel, 97 • Le fonctionnement familial, 100 •

La gestion financière, 102 • La conduite de véhicules, 102 • Coût du


TDAH chez l’adulte, 103
Conclusion 103
Bibliographie 104

5. Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 110


Hichem Slama, Rémy Schmitz
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Concepts et définitions 110


Les fonctions attentionnelles, 111 • Les fonctions exécutives, 114 • Les
limites de l’évaluation des fonctions exécutives et attentionnelles, 117 •
Développement des fonctions attentionnelles et exécutives, 118
Cognition et TDAH 120
Bref historique des troubles attentionnels et exécutifs dans le TDAH, 121
• Modèles cognitifs à cause unique du TDAH, 122 • La vision

actuelle, 124
Évaluation cognitive du TDAH dans la pratique clinique 126
Le développement des troubles cognitifs dans le TDAH 127
Conclusion et perspectives 129
VI TABLE DES MATIÈRES

Bibliographie 129

DEUXIÈME PARTIE
FORMES FRONTIÈRES ET COMORBIDITÉ

6. TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 132


Élodie Courtabessis, Diane Purper-Ouakil
Réactivité émotionnelle – dysrégulation émotionnelle 133
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Dysrégulation émotionnelle et comportementale sévère et Trouble disruptif
avec dysrégulation émotionnelle 134
TDAH et dysrégulation émotionnelle 137
Trouble Bipolaire 138
TDAH et trouble bipolaire 139
Évaluation 140
Traitement 142
Bibliographie 144
Annexe 145

7. TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 147


Natalia Piat, Manuel Bouvard
Étude de la comorbidité entre TDAH et TSA 148
Problématique et conceptualisation de cette association comorbide, 148
• Données épidémiologiques à travers les études de comorbidités, 150 •

Description symptomatique : de la similitude à la spécificité, 151 •


Identification et caractérisation des processus cognitifs
et neurobiologiques, 154 • L’influence des facteurs génétiques, 157 •
Faut-il repenser la thérapeutique ?, 158
Étude des interactions sociales dans le TDAH 161
De la compétence au bien-être social, 161 • Perturbation des relations
sociales, 162 • Altération de la cognition sociale, 164 • De nouvelles
perspectives thérapeutiques ?, 166
Conclusion 167
Bibliographie 168
Table des matières VII

8. TDAH, somnolence et troubles du sommeil 170


Stéphanie Bioulac, Jean-Arthur Micoulaud-Franchi, Astrid Claret
TDAH et troubles du sommeil 171
TDAH et mouvements anormaux liés au sommeil, 171 • TDAH et troubles
respiratoires du sommeil, 172 • TDAH et troubles du rythme circadien
veille-sommeil, 173 • TDAH, insomnie et réduction du temps de
sommeil, 175 • TDAH et hypersomnolence d’origine centrale, 175
Liens entre TDAH, symptômes de TDAH et somnolence diurne excessive 176
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De la somnolence diurne excessive aux symptômes de TDAH, 176 • Du
TDAH à la somnolence diurne excessive, 177 • Proposition d’un
modèle, 177
Conclusion 178
Bibliographie 179

9. TDAH, comportements d’agression physique et criminalité 181


Grégory Michel, Julie Salla, Olivier Grondin
TDAH et comorbidité avec le TC et le TOP 182
Trouble des Conduites (TC), 182 • Le Trouble Oppositionnel avec
Provocation (TOP), 183
TDAH, comportements antisociaux et criminalité 184
TDAH prédictif de la criminalité, 184 • Importance de la comorbidité, 184
TDAH et Troubles de la personnalité 185
TDAH et Trouble de la Personnalité Borderline, 185 • TDAH et Troubles de
la personnalité antisociale (TPA) et psychopathique (TPP), 186
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TDAH et développement de l’agression physique dès la petite enfance 187


Conclusion 188
Bibliographie 189
VIII TABLE DES MATIÈRES

TROISIÈME PARTIE
ÉPIDÉMIOLOGIE, DEVENIR ET COMPLICATIONS

10. Épidémiologie du TDAH 192


Cédric Galéra, Flore Moulin, Manuel Bouvard
Epidémiologie descriptive 193
Prévalence du TDAH chez l’enfant et l’adolescent, 193 • Prévalence du
TDAH chez l’adulte, 194 • Variations selon le sexe, 195 • Comorbidités
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cliniques psychopathologiques et neuro-développementales, 195 •
Prévalence d’enfants traités par médicament ciblant l’attention, 196
Épidémiologie analytique 196
Facteurs de risque du TDAH, 197 • Conséquences longitudinales du
TDAH, 201 • Trajectoires développementales du TDAH, 201
Epidémiologie évaluative 203
Revues Cochrane, 203 • Principales revues et méta-analyses non
Cochrane, 204
Conclusion 205
Bibliographie 205

11. TDAH et addictions 209


May Boumendjel, Melina Fatseas, Ruben Miranda,
Amine Benyamina
Épidémiologie 209
En population générale, 209 • En population spécifique, 210
Étiologie 210
Génétique 210
Facteurs de risque 211
Le genre, 211 • Le niveau d’éducation, 211 • Comorbidité, 211
Clinique 212
Stratégie diagnostique, 212 • Particularités cliniques, 212 •

Particularités par produit, 213


Comorbidités 215
Diagnostic différentiel 216
Trouble bipolaire, 216 • Trouble anxieux, 216 • Trouble de la
personnalité , 216
Neuro-imagerie 217
Table des matières IX

Neuro-cognition 217
Niveau intellectuel, 218 • Fonctions attentionnelles, 218 • Fonctions
exécutives, 219 • Mémoire de travail, 220 • Cognition sociale, 220
Prise en charge 220
Pharmacologique, 221 • Psychothérapeutique, 221
Pronostic 223
Conclusion 223
Bibliographie 223
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12. TDAH et accidents de la route 229
Stéphanie Bioulac, Cédric Galéra
Apport des études épidémiologiques 230
Apport des études expérimentales 232
Conclusion 234
Bibliographie 235

13. Suicide et TDAH chez l’adulte et l’enfant 237


Flore Moulin, Cédric Galéra
Risque suicidaire dans le TDAH 238
Suicide et enfant TDAH, 238 • Suicide et adulte TDAH, 238
Explications possibles de l’augmentation du risque de suicide chez les TDAH 239
Comorbidités, 239 • Troubles cognitifs et traits de personnalité, 241 •
Neurobiologie commune du TDAH et du suicide, 242 • Implication du
traitement du TDAH dans le suicide, 243
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Conclusion 244
Bibliographie 245

CONCLUSION. LA PERSPECTIVE DÉVELOPPEMENTALE, UN ENJEU POUR LA COMPRÉHENSION


DES TROUBLES 249
Manuel Bouvard
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Liste des auteurs
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Coordonné par :
Manuel Bouvard
PU-PH, Chef du Pôle Universitaire de Psychiatrie de l ’Enfant et de l’Adolescent,
CH Charles Perrens, Bordeaux, Chef du service SUHEA au Centre Jean Abadie –
CHU de Bordeaux, Unité de recherche UMR CNRS 5287 INCIA.

Liste des auteurs :


François Bange
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

PH, UF Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, AP-HP, Hôpital Robert-Debré,


75019 Paris.
Amine Benyamina
PU-PH Centre d’Enseignement, de Recherche et de Traitement des Addictions,
Hôpital Universitaire Paul-Brousse, AP-HP, Université Paris-Sud 11, INSERM
U669.
Stéphanie Bioulac
PH, Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, CH Charles
Perrens, Bordeaux, CHU de Bordeaux, USR Sanpsy.
May Boumendjel
Hôpital Universitaire Paul-Brousse, AP-HP, Université Paris.
XII L ISTE DES AUTEURS

Hervé Caci
Psychiatre, pédopsychiatre, Docteur de l’Université Paris 7, Université Nice Sophia
Antipolis.
Astrid Claret
PH Centre Jean Abadie, Pôle Aquitain de l’Adolescent, CHU Bordeaux.
Élodie Courtabessis
Chef de clinique des Universités – Assistant des Hôpitaux, Médecine Psycholo-
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gique de l’Enfant et de l’Adolescent 1- St Eloi – CHU Montpellier. e-courtabessis
@chu-montpellier.fr
Mélina Fatseas
PH Université de Bordeaux, CH Charles Perrens et CHU de Bordeaux (Pôle Addic-
tologie), Sanpsy CNRS USR 3413.
Cédric Galera
PH Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, CH Charles
Perrens, Bordeaux.
Olivier Grondin
MCU, Inserm 1219, Bordeaux Population Health Research Center, Université de
Bordeaux, Faculté de psychologie, Bordeaux.
Clarisse Locret-Capon
Chef de Clinique Assistant, Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de
l’Adolescent, CH Charles Perrens, Bordeaux.
Caroline Maurs
MD, Service Universitaire de Psychiatrie et Psychologie Médicale, Hôpital de Psy-
chiatrie, Toulouse. 330, avenue de Grande-Bretagne, TSA-70034, 31059 Toulouse
Cedex 9.
Grégory Michel
Professeur de Psychopathologie et de Psychologie Clinique, Directeur adjoint
Equipe Healthy, U Inserm 1219, Bordeaux Population Health Research Center,
Université de Bordeaux, Faculté de psychologie, 3 ter Place de la Victoire, 33000
Bordeaux. gregory.michel@u-bordeaux.fr
Ruben Miranda
Hôpital Universitaire Paul-Brousse, AP-HP, Université Paris-Sud 11.
Liste des auteurs XIII

Flore Moulin
Interne, Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, CH
Charles Perrens, Bordeaux.
Natalia Piat
CCA, Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, CH Charles
Perrens, Bordeaux.
Diane Purper-Ouakil
Professeur des Universités – Praticien Hospitalier, Service de Médecine Psycholo-
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gique de l’Enfant et de l’Adolescent 1- St Eloi – CHU Montpellier.
Jean-Philippe Reneric
PH Pôle Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent, CH Charles Perrens,
Rue de la Béchade, 33076 Bordeaux.
Julie Salla
Post-Doctorante en Psychologie, U Inserm 1219, Bordeaux Population Health
Research Center, Université de Bordeaux, Faculté de psychologie, Bordeaux.
Rémy Schmitz
Docteur en Sciences Psychologiques, Chargé de recherches, Université Libre de
Bruxelles, Belgique, UR2NF, CRCN, FNRS.
Hichem Slama
Docteur en Sciences Psychologiques, Neuropsychologue, Université Libre de
Bruxelles, Belgique, UNESCOG, UR2NF, CRCN UNI-ULB Neuroscience Institute,
Service de Neuropsychologie Clinique et Cognitive - Hôpital Érasme, FNRS.
Introduction
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Manuel Bouvard

L ETDAH (trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) est un


trouble fréquent du développement touchant 5 % de la population générale.
Il débute dans l’enfance, mais se maintient fréquemment à l’âge adulte dans plus
d’un tiers des cas. Les conséquences délétères sur le fonctionnement du sujet
sont bien documentées avec, chez l’enfant, une altération majeure de la scolarité
et des relations sociales et familiales, et, chez l’adulte, du fonctionnement
professionnel et le risque de développer un abus de substances.
Malgré nombre d’évidences cliniques et scientifiques, le TDAH Trouble déficit de
l’attention avec ou sans hyperactivité est indubitablement, encore aujourd’hui,
un espace de paradoxes.
Le premier et non le moindre est que ses premières descriptions remontent à plus
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

d’un siècle et demi et qu’aujourd’hui la question de son identité reste encore


posée pour certains. Comment expliquer qu’après les descriptions d’Hoffman en
1845, de Wallon en 1925, pour ne citer que les européennes, et les nombreuses
autres qui ont suivi, nous soyons encore aujourd’hui à interroger sa réalité ?
La clinique du TDAH a évolué au cours du temps pour passer d’un trouble
du comportement externalisé à un trouble de la régulation du comportement
et de l’adaptation, introduisant au sein d’une clinique de la motricité et du
comportement, une clinique de l’action et de sa régulation, de l’attention et
de son économie. Le développement de critères diagnostiques pour le TDAH
dans les classifications du DSM et de la CIM a donné une définition claire et
opérationnelle du trouble en associant les symptômes liés aux difficultés de
régulation de la motricité et les manifestations en rapport avec les problèmes
2 I NTRODUCTION

attentionnels et exécutifs. La critériologie insiste également sur l’importance,


dans la reconnaissance et dans le diagnostic du retentissement fonctionnel, du
trouble dans la vie du sujet. Il existe pourtant une fréquence particulière de
formes subsyndromiques, et les études montrent que la modification d’un ou de
deux critères peut faire varier la prévalence de façon importante. C’est rappeler
l’importance d’une procédure de diagnostic rigoureuse associée à une évaluation
fonctionnelle individualisée.
Pourtant, la clinique catégorielle prend mal en compte la diversité et l’hétérogénéité
de ce trouble. Cette diversité tient à différents facteurs, dont la fréquence de
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la comorbidité avec les troubles émotionnels et d’autres troubles du comporte-
ment, la variabilité clinique en fonction du sexe et de l’âge d’apparition, aux
fluctuations des manifestations en fonction du contexte et de l’environnement.
Un paradoxe notable est lié à la diversité des trajectoires développementales. Un
des facteurs est lié à la capacité d’adaptation et de compensation des personnes
atteintes. Ces différences tiennent sans doute à la capacité de l’environnement,
notamment familial, à s adapter aux difficultés de l’enfant, mais aussi à des
processus de régulation interne encore mal élucidés. Les facteurs qui contribuent
à l’adaptation au contexte et aux capacités de compensation dans le TDAH
demeurent actuellement encore objet d’études. Pourtant, ils constituent un
élément important pour expliquer la grande diversité des év olutions observées
de ce trouble.
Le TDAH a longtemps été considéré comme une pathologie de l’enfant dispa-
raissant à l’adolescence. Les résultats des études longitudinales attestent de
l’inverse, avec des taux de persistance syndromique de plus de 30 %. Pourtant
le diagnostic à l’âge adulte est difficile et rare aujourd’hui en France. Cette
difficulté s’explique, en partie, par la fréquence des complications qui viennent
grever le devenir de ces enfants et masquer la nature développementale du
trouble. Ce sont souvent les conséquences du trouble qui sont au premier plan,
liées à la comorbidité de celui-ci, notamment avec les troubles de l’humeur, ou
aux conséquences directes comme les addictions, les accidents ou les conduites
délinquantes. Il reste encore de nombreuses questions sur les facteurs aggravants
ou protecteurs de ces modalités évolutives. Parmi les questions soulevées par
ce trouble à l’âge adulte, l’âge de début du trouble est celle qui a fait l’objet
d’études récentes. L’âge de début avant 7 ans a longtemps été le critère le plus
fiable du TDAH chez l’adulte, des travaux récents ont montré que certaines formes
pourraient avoir un début plus tardif. Ces travaux ont amené à relever l’âge de
début à 12 ans. On mesure que cette évolution critériologique est susceptible
Introduction 3

de modifier de façon importante ce trouble en terme de prévalence et de santé


publique.
Un des autres aspects est lié à la caractéristique chronique de ce trouble et aux
liens avec les troubles de la personnalité chez l’adulte, notamment la personna-
lité limite ou antisociale. Certains traits tels que l’impulsivité, l’intolérance à
l’attente et à la frustration, la réactivité émotionnelle sont communs au TDAH
et aux troubles de la personnalité. Ce lien est d’autant plus marquant que si
les interventions thérapeutiques permettent souvent de réduire le handicap du
trouble, la persistance de traits de fonctionnement particuliers est la règle chez
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les patients avec un TDAH.
Le développement d’études de cohortes en population normale et en population à
risque permet aujourd’hui d’interroger les interactions dans le temps des facteurs
environnementaux et individuels. Une des perspectives, sans doute, sera de
considérer les interventions, qu’elles soient préventives ou thérapeutiques, dans
cette dimension longitudinale.
La question de la causalité a longtemps sous-tendu les descriptions cliniques,
opposant les tenants d’une approche lésionnelle à ceux d’une approche éducative
et/ou relationnelle. Cette perspective causaliste a enfermé le TDAH dans de
nombreux débats qui en ont fait oublier le retentissement et les complications.
L’intégration récente dans le DSM-5 du TDAH dans les troubles neurodéveloppe-
mentaux témoigne des travaux de ces dernières années qui montrent l’implication
d’anomalies de réseaux neuronaux. À ce titre, l’étude des processus cognitifs
et attentionnels est du plus grand intérêt. Si l’accent a souvent été mis sur les
fonctions exécutives, l’implication des processus motivationnels et émotionnels
est de plus en plus souligné.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

On le voit, les questions restent nombreuses et passionnantes autour d’un trouble


longtemps enfermé dans d’inutiles polémiques. Nous avons fait le choix, dans
cet ouvrage, de ne pas aborder les questions des traitements qui méritent à notre
sens un ouvrage à part entière, ni d’approfondir les travaux sur les mécanismes
notamment neuronaux.
Cet ouvrage vise à faire une revue générale de nos connaissances actuelles dans
le domaine de la clinique, des facteurs étiopathogèniques et du retentissement
de cette pathologie. Il est centré sur des revues de la littérature scientifique,
qui sont fort nombreuses dans le domaine. L’intérêt de l’ouvrage est de mettre
ce trouble dans une perspective développementale tout au long de la vie et
d’aborder certains thèmes comme les comportements suicidaires ou le risque
d’accidentologie sous-évalué aujourd’hui.
4 I NTRODUCTION

Il vise un public élargi de professionnels médecins ou non (psychologues, ortho-


phonistes, psychomotriciens, ergothérapeutes, éducateurs...) qui sont amenés à
rencontrer ces patients. L’objet de cette contribution est aussi de sensibiliser
les psychiatres d’adultes à cette problématique.
Les auteurs sont tous des cliniciens expérimentés, reconnus sur le plan scien-
tifique au niveau national et international. Ils sont auteurs de nombreuses
publications dans le domaine.
De nombreux ouvrages de qualité ont déjà été consacrés à ce tr ouble pour des
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publics variés, professionnels ou parents ; celui-ci ne se veut qu’une étape dans
le sinueux chemin des connaissances.
Chapitre 1

Évolution nosographique
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de l’instabilité psychomotrice
au trouble neurodéveloppemental

François Bange

U NE SCIENCE, LA NOSOGRAPHIE, a pour objet la description et la classification


méthodique des maladies d’après leurs caractères distinctifs. Actuellement
deux systèmes nosographiques règnent sur la psychiatrie à travers le monde.
Dans le premier, élaboré en 1992 par l’Organisation Mondiale de la Santé, le
syndrome est référencé comme « Trouble Hyperkinétique » (WHO, 1992). Mais
l’appellation « Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité » est actuellement de
beaucoup la plus répandue.
Quand et comment cette dernière est-elle apparue ? C’est dans la version publiée
en 1994 du second de ces systèmes nosographiques, le DSM, rédigé au sein
de l’American Psychiatric Association qui vient de le mettre à jour (APA, 2013).
Voilà peut-être pourquoi le TDAH est souvent moqué en France comme une trou-
vaille récente, faite outre-Atlantique, et favorisée bien sûr par la consommation
effrénée de nouvelles technologies.
En réalité, le TDAH n’est qu’un héritier. Il s’avère que ses ancêtres sont nombreux,
et vieux de plus de deux siècles pour les plus anciens. Qui sont-ils ? Leur examen
se cantonnera ici aux textes médicaux à proprement parler, laissant de côté
d’autres sources qui ont fait accéder à l’immortalité littéraire des « étourdis » et
des « distraits » depuis l’Antiquité.
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 7

Si le syndrome s’installe solidement dans la nosographie à la fin du XIXe siècle, l’un


de ses noms les plus usités étant alors « instabilité psychomotrice », c’est dès
XVIIIe siècle qu’il fait en réalité ses premiers pas. Retracer l’histoire des ancêtres
de l’actuel « trouble neurodéveloppemental », histoire longue de près de trois
siècles, et faire revivre brièvement certains d’entre eux (ils sont si nombreux
qu’un choix ici est nécessaire) démontre toute la fausseté de la caricature qui
est souvent présentée.
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« A LTÉRATIONS MORBIDES DE L’ ATTENTION »
AU S IÈCLE DES L UMIÈRES

Le XVIIIe siècle a légué deux descriptions de conditions morbides que les spécia-
listes du TDAH considèrent assez similaires au syndrome actuel (Barkley, 2012).
Ce sont les œuvres de deux médecins, un Allemand Melchior Adam Weikard, et
un Écossais, Alexander Crichton. Ils ne font aucune référence l’un à l’autre, ils
ne semblent pas connaître leurs travaux réciproques, mais ils décrivent cha-
cun un syndrome partageant des traits communs faits de défici t d’attention et
d’impulsivité, sans hyperactivité significative.
La publication la plus ancienne, celle de Weikard datant de 1775, décrit des
adultes inattentifs et impulsifs dans des termes très proches des modernes cri-
tères du TDAH « avec inattention prédominante », comme l’illustre cet extrait :
« Une personne inattentive ne remarquera rien, mais sera futile partout. Elle
n’étudie ses affaires que superficiellement ; ses jugements sont erronés et elle
méconnaît la valeur des choses, car elle ne consacre pas assez de temps ni de
patience à une question particulière, et sans la précision requise. [...] La plupart
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sont téméraires, souvent pleines de projets imprudents, mais elles sont aussi très
inconstantes dans leur exécution. »

Quelques années après, dans son recueil médical portant sur « la nature et l’ori-
gine du dérangement mental », Crichton consacre un chapitre aux « altérations
morbides de l’attention » (Crichton, 1798). Certaines, présentes dès l’enfance,
ont beaucoup d’effets néfastes sur l’« éducation » (education dans le texte) mais
sans atteindre un degré tel que celle-ci soit impossible, d’autant que généra-
lement elles s’atténuent avec l’âge. C’est le plus ancien texte médical faisant
référence à une pathologie de l’attention chez l’enfant.
Cependant, sauf à ce que d’autres textes oubliés soient découverts prochai-
nement, ces deux travaux précurseurs sont restés sans postérité scientifique
immédiate.
8 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

I NSTABILITÉ ET PARALLÉLISME PSYCHOMOTEUR

Un hiatus d’un siècle


!

Un hiatus d’environ un siècle existe, avant que des médecins ne publient à


nouveau des observations sur le syndrome dans les deux dernières décennies du
XIXe siècle.

Certes en 1844 un médecin allemand, Heinrich Hoffmann, conçoit-il des histoires


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d’enfants turbulents et désobéissants, sous le titre Struwelpeter. Mais c’est dans
un recueil de comptines que le praticien fabrique pour son fils alors âgé de 3 ans.
L’œuvre qui relève d’un genre moral et éducatif connaît un succès immense et
persistant en Allemagne et dans les pays anglo-saxons, puis dans le reste du
monde. Mais rien ne montre chez Hoffmann l’intention de décrire une situation
pathologique ni de s’adresser à un public de médecins.

« Mobilité exubérante » et « chorée mentale »


!

Ce n’est que vers 1880 que le syndrome réapparaît dans la litt érature médicale.
Ainsi une catégorie d’enfants ayant une « mobilité physique exubérante », mais
aussi une « mobilité mentale » et des « impulsions subites », est mentionnée
dans les comptes rendus médicaux d’un neurologue dévoué à améliorer le sort
des enfants handicapés mentaux, Bourneville (Bange, 2014).
« Leur mobilité est exubérante, ils ne restent en place nulle part, se lèvent de table
à chaque instant sans motif ; s’ils jouent, ils passent rapidement d’un jeu à un
autre ». Ils « se font remarquer par l’indifférence aux observations, la désobéissance
et l’indiscipline ; par l’impétuosité, l’incontinence motrice et les étourderies. »

Les signes moteurs – agitation et l’impulsivité – dominent, y compris dans les


jeux ou « à table ». Les troubles de l’attention transparaissent sous la « mobilité
mentale » et les « étourderies ». Au total, cela forme un tableau évocateur pour
l’observateur moderne accoutumé au TDAH chez le jeune garçon. S’y ajoutent les
difficultés à se conformer aux règles et aux consignes des adultes, des signes
qui seraient probablement rangés un siècle plus tard parmi ceux du « Trouble
Oppositionnel avec Provocation ».
Au plan cognitif ces enfants-ci sont considérés comme des « débiles légers ».
Mais, dès la fin du XIXe siècle, la doctrine que des enfants extrêmement agités ne
sont pas nécessairement « arriérés » est défendue par Demoor en Belgique. Il
forge le nom « chorée mentale » par emprunt à la nosographie des neurologues
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 9

pour résumer leur besoin incessant de mouvement accompagné par un « excès


dans l’expression des émotions » et un manque d’attention.

« L’écolier instable »
!

Un chapitre entier est consacré à L’écolier instable, un enfant nettement dis-


tingué de l’enfant « arriéré », dans un ouvrage à mi-chemin entre pédagogie
et médecine, publié au tout début du XXe siècle par Philippe et Paul-Boncour
(Bange, 2014). Ce sont deux médecins français proches d’Alfred Binet, le créateur
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des premiers tests psychométriques.
Le texte accorde une place prééminente à l’instabilité de l’attention (les italiques
sont ceux des deux auteurs) :
« l’écolier instable [...] ne peut fixer son attention soit pour écouler, soit pour
répondre, soit comprendre. [...] perpétuellement et malgré lui son esprit se tourne
ailleurs. »
Ensuite vient l’instabilité physique :
« il est à noter que souvent l’instabilité physique n’est pas moins prononcée que
l’instabilité mentale. »
Enfin l’impulsivité achève le tableau :
« d’autres écoliers instables ne sont pas seulement des enfants mobiles, ce sont en
outre et surtout des impulsifs. »
Ces écoliers ont une bonne intelligence, et certains peuvent être des « prodiges
partiels ».
En résumé, le « trépied diagnostique » qui constitue l’actuel TDAH – c’est-à-dire
le déficit d’attention, l’hyperactivité, l’impulsivité – est donc clairement défini en
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1905 chez des enfants sans retard intellectuel. Et mieux encore, c’est l’instabilité
de l’attention qui est mise au premier plan.

« Instabilité constitutionnelle » et parallélisme psychomoteur


!

À la même époque en France, « l’instabilité constitutionnelle » est définie


comme une association entre une agitation motrice continue et une incapacité
d’attention (Dupré, 1913). Cette doctrine souligne « l’étroite association étiolo-
gique et clinique des deux déséquilibres mentaux et moteurs ». L’« instabilité
psychomotrice » associe signes psychiques et signes moteurs, selon la théorie
du « parallélisme psychomoteur » : incapacité à soutenir l ’attention et labilité
de l’humeur dans le premier registre, instabilité motrice dans le second.
10 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Dans le berceau de la pédopsychiatrie française, qui prend le nom de Clinique


Annexe de Neuropsychiatrie Infantile dans les années 1920, un jeune médecin
appelé à une grande carrière, G. Heuyer, observe les instables « incorrigibles ».
Ils présentent :
« un trouble psychomoteur dans lequel l’émotivité est labile, variable, comme
l’inaptitude motrice à continuer la même action, à soutenir un rythme régulier, à
réagir de façon constante, à persévérer dans une même entrep rise et au point de
vue intellectuel à fixer l’attention. »

Outre l’aspect moteur et l’aspect attentionnel, un troisième élément est donc


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bien repéré, l’humeur elle aussi instable. Cet élément émotionnel est absent
des critères du TDAH, cependant Barkley, l’un des spécialistes du syndrome, a
beaucoup milité pour qu’il y soit intégré.

« Turbulence » et développement psychomoteur


!

L’enfant turbulent est l’œuvre majeure de la littérature scientifique francophone


sur le sujet, rédigée par un brillant psychologue, médecin et philosophe (Wallon,
1925). Il y explique le développement psychomoteur de l’enfant par la maturation
progressive de centres étagés (du cervelet au lobe frontal en passant par le
mésencéphale et les noyaux gris centraux) et la myélinisation graduelle des
faisceaux neuronaux qui les relient.
Les troubles caractériels et moteurs graves de certains enfants y sont mis en
corrélation avec certaines localisations cérébrales, et différentes formes de
« turbulence » sont définies. L’une d’elle, imputée à un défaut de maturation
frontale perturbant le contrôle exercé sur les centres sous-corticaux du tonus
et des attitudes, est caractérisée par un besoin de changement, une attention
s’épuisant à chaque instant et nécessitant sans cesse un nouvel objet pour la
relancer, une activité papillonnante, une distraction facile et une fuite des idées,
en bref nombre des signes de l’instabilité psychomotrice et du futur TDAH.
Quinze ans plus tard, L’enfant et l’adolescent instables rassemble un recueil
d’observations, faites à la Clinique Annexe de Neuro-Psychiatrie Infantile que
dirige Heuyer, avec une synthèse des données bibliographiques internationales
sur l’instabilité, rédigé par une psychologue, disciple de Wallon (J. Abramson,
1940).
En résumé, dès avant la Première Guerre mondiale l’« instabilité » est le sujet
d’un corpus de descriptions cliniques où se reconnaissent les éléments cardi-
naux du TDAH actuel, chez l’enfant avec des prolongements chez l’adulte. Des
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 11

considérations étiopathogéniques se fondent sur les acquis de la neurologie de


l’époque.

Diffusion internationale de l’« instabilité »


!

L’« instabilité », dès que la notion émerge dans la littérature médicale franco-
phone, connaît une fortune dépassant les frontières linguistiques. Sa transpo-
sition dans plusieurs langues témoigne de sa diffusion rapide dans les milieux
médicaux internationaux, même si la réalité désignée comporte des nuances
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d’un pays à l’autre.
En allemand, les « Instablen » à l’âge adulte correspondent, selon Kraepelin, à
un groupe de patients ayant une certaine personnalité pathologique (cf. infra)
(Kraepelin, 1915).
En espagnol, des enfants « inestables » sont décrits en des termes similaires
à ceux de Bourneville, Philippe et Paul-Boncour, dans Los Niños Mentalmente
Anormales, ouvrage publié en 1917 par Gonzalo Rodriguez Lafora, un neuropsy-
chiatre formé auprès de Ramon y Cajal et de Kraepelin, et qui exerce un temps
en France.
En anglais « Unstable Child » est un ouvrage publié à New York, par Mateer en
1929, où l’instabilité mène presque inéluctablement à la délinquance.

D ÉFICIT DU CONTRÔLE MORAL ET DE LA VOLONTÉ

Déficit de « contrôle moral »


!
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Trois conférences au Collège Royal de Médecine à Londresi, intitulées « On Some


Abnormal Psychical Conditions in Children », sont généralement citées par les
spécialistes du TDAH comme ouvrant l’histoire du syndrome au XXe siècle, en 1902
(Barkley, 2006). Sans référence à la littérature francophone antérieure, Georges
Still, prestigieux fondateur de la chaire de pédiatrie britannique, y dresse une
liste d’anomalies sévères du comportement, au premier rang desquels viennent
l’impatience et la promptitude à exprimer frustration, colère, hostilité et agres-
sivité. La liste comprend aussi cruauté, jalousie incontrôlable, transgression des
lois, malhonnêteté, vols et mensonges, plaisir à faire souffrir, absence de honte,
dévergondage et immoralité sexuels.
Le manque de pertinence de cette description eu égard au TDAH a été remarqué.
En fait, elle embrasse l’ensemble des signes répertoriés ultérieurement parmi les
12 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

comportements déviants allant du Trouble Oppositionnel avec Provocation au


Troubles des Conduites.
Bien que l’hyperactivité soit quasi absente du tableau dressé, celui-ci prélude
cependant au futur TDAH de deux façons. D’abord, car un déficit d’attention est
nettement présent chez beaucoup de ces enfants, souligné par Still (« a quite
abnormal incapacity for sustained attention »), remarqué tant par les parents y
compris dans les jeux, que par les maîtres d’école avec un échec scolaire, même
chez ceux des enfants qui ont une intelligence normale. Ensuite l’impulsivité
est sous-jacente à bon nombre de ces comportements déviants, selon la lecture
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faite par les spécialistes du TDAH concernant l’« exaggeration of excitability »
qu’invoque Still (Barkley, 2006).
À la racine du syndrome, Still désigne un défaut de « contrôle moral » lié à
différents facteurs psychiques dont l’intelligence. Mais chez ceux des enfants
avec une intelligence normale, le défaut de « contrôle moral » est imputé à une
pathologie de la « volonté ».

« Haltlosen », déficit de la volonté et personnalité


!

pathologique

C’est en référence à l’« instabilité » que Kraepelin caracté rise une catégorie de
patients adultes, les « Haltlosen », dans un chapitre de la 8e édition de son
Traité de psychiatrie (Kraepelin, 1915). N’étudiant que les affections mentales
touchant les adultes, c’est chez eux qu’il repère les Haltlosen, tout en spécifiant
bien que leur trouble débute dans l’enfance. Ce sont les « instables, comme les
Français les appellent » (« die Haltlosen oder, wie die Franzosen sie nennen, die
Instablen ») (Bange, 2014).
Ces « Haltlosen » ont en commun une activité désordonnée, « une absence de fil
directeur perceptible », une « incapacité d’inhibition ». Leur déficit d’attention
est bien caractérisé :
« Ce qui les révèle avant tout, c’est leur incapacité totale à un travail dans la durée
et dans le fond. Ils commencent avec beaucoup de zèle, mais leur élan retombe
très vite, ils sont distraits, se dispersent, perdent l’envie, se laissent aller à des
fautes grossières et à des négligences. »

Une perspective dimensionnelle est déjà présente, puisque la sévérité des


troubles varie du quasiment normal au franchement pathologique :
« Il est clair que l’instabilité peut montrer toutes les nuances possibles [...] on ne
peut considérer l’instabilité comme morbide que si l’accom plissement des tâches
générales de la vie est lourdement grevé. »
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 13

Enfin le trouble débute dans l’enfance avec notamment des difficultés attention-
nelles invalidantes :
« À l’école, il peut arriver que de grandes espérances soient attachées à leurs dons,
mais ils ne les remplissent pas à cause de leur inattention et de leur manque de
fiabilité. »
Dans l’histoire de la nosographie des troubles mentaux, Kraepelin occupe une
place prééminente. En effet il réorganise les pathologies mentales décrites avant
lui, en les classant selon leur évolution, livrant ainsi le socle sur lequel s’appuient
encore les principales nosographies actuelles, dites « néo-kraepeliniennes », que
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ce soit la CIM-10 ou le DSM à partir de sa 3e version. Il classe les Haltlosen
parmi les « personnalités psychopathiques » ce qui désigne dans son œuvre un
ensemble de variantes psychiques entre la normale et les pathologies mentales
bien définies, sans le caractère restreint que le terme « psychopathe » a acquis
aujourd’hui. Et il invoque, comme Still, une pathologie de l a volonté parmi les
mécanismes à l’œuvre.

D OCTRINES ORGANIQUES ET DOCTRINES


PSYCHO - ENVIRONNEMENTALES

En matière de causalité, dès le début du XXe siècle les doctrines font une place au
contexte dans lequel est élevé l’enfant, à son environnement familial, mais elles
font aussi la part belle aux troubles organiques présents dans les antécédents
des enfants concernés. Des années 1900 jusqu’aux années 1980, la nosographie
se métamorphose en grande partie selon l’importance variable que les auteurs
accordent aux deux types de causalité, avec de vifs débats à la clé sur leurs
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parts respectives.

Doctrines organiques, de l’« hyperkinésie » au MBD


!

Imputer les troubles mentaux à des causes médicales, organiques et biologiques,


est une doctrine répandue chez les aliénistes dès le XIXe siècle, et il en va de
même dans les troubles du comportement de l’enfant, au début du XXe siècle.
Dès les conférences de Still les étiologies invoquées appartiennent à un catalogue
varié fait de maladies organiques avérées, tumeur cérébrale, méningite, épilep-
sie, traumatisme cérébral, fièvre typhoïde. Mais le syndrome peut aussi survenir
en l’absence de maladie physique alors que l’examen clinique traditionnel est
normal, et dans ce cas Still l’impute à des circonstances périnatales telles qu’un
14 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

accouchement difficile ou une prématurité. Cette doctrine reliant les troubles du


comportement de l’enfant à des causes lésionnelles, démontrées ou supposées,
est promise à un grand succès dans les décennies à venir.
Ailleurs les causes innées sont privilégiées, comme dans l’« instabilité constitu-
tionnelle » où la « constitution » est l’« ébauche et le germe d’une affection men-
tale en puissance dont le caractère majeur est de relever surtout de l’hérédité »
(Dupré, 1913). Ici la « débilité motrice » qui fait le lit de l’instabilité est un
« état pathologique congénital de la motilité, souvent héréditaire et familial »
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Mais ce sont les causes organiques acquises et lésionnelles qui vont peser long-

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temps sur la nosographie. Ainsi leur recherche motive travaux et théories pendant
plus de quatre décennies, du début des années 1920 à la fin des années 1950.

Hyperkinésie et lésions organiques

La recherche d’une étiologie lésionnelle reçoit une vigoureuse impulsion de


deux événements historiques presque concomitants : la Première Guerre mon-
diale, grande pourvoyeuse de traumatisés crâniens, et l’épidémie d’encéphalite
léthargique d’origine virale, dite de Von Economo (1917-1925, vingt millions de
personnes affectées à travers monde). Médecins et psychologues établissent des
corrélations entre localisations anatomiques des séquelles de la guerre ou de
l’encéphalite, et conséquences fonctionnelles, neurologiques et psychiatriques.
La localisation assez précise des lésions de l’encéphalite de Von Economo illustre
le rôle décisif d’une atteinte organique circonscrite, dans l’éclosion de symp-
tômes neuropsychiatriques. L’« hyperkinésie » est décrite chez l’adulte dans les
séquelles de cette encéphalite et de certains traumas crâniens ; elle est faite de
comportement hyperactif et de mauvais contrôle des impulsi ons. Chez l’enfant
un changement radical du caractère et du comportement est signalé au décours
de l’encéphalite (Ebaugh, 1923).

Maladie hyperkinétique de l’enfance, Kramer et Pollnow

Un syndrome hyperkinétique de l’enfant (« hyperkinetische Erkrankung im Kinde-


salter ») est décrit, à Berlin en 1932, par Kramer et Pollnow (Lange, 2010). Une
hyperactivité motrice sans but, remarquable et incessante, est au tout premier
plan. Elle est accompagnée de distractibilité et d’une inca pacité de concentra-
tion plus de quelques minutes même dans un jeu, contrastant cependant avec
la possibilité de se concentrer plusieurs heures sur une activité d’un intérêt
particulier. Enfin une instabilité de l’humeur est notée, av ec des colères et des
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 15

pleurs pour des motifs mineurs. Les répercussions sur l’éducation de l’enfant sont
sévères.
Le syndrome n’a pas de lien avec l’encéphalite, selon les aut eurs de sa descrip-
tion, mais une étiologie organique est suggérée par la survenue du syndrome
au décours d’une fièvre ou de convulsions épileptiques. Les symptômes moteurs,
considérés comme les plus caractéristiques de la maladie, disparaissent dans la
plupart des cas vers la fin de l’enfance selon les auteurs qui envisagent cependant
que des répercussions puissent exister chez l’adulte.
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Du lésionnel au fonctionnel

Aux États-Unis, une variante de l’hyperkinésie est décrite par Kahn en 1934,
chez l’enfant, dénommée organic drivenness, et caractérisée par l’agitation,
l’impulsivité et la maladresse. Elle est observée non seulement chez des patients
atteints d’encéphalite mais aussi chez d’autres sans antécédent neurologique, et
la responsabilité en est imputée à des lésions présumées du tronc cérébral.
Mais devant la fréquence, dans certaines enquêtes, de la prématurité et des
complications de la grossesse et de l’accouchement chez les enfants hyperkiné-
tiques, c’est une étiologie lésionnelle néo- ou postnatale qui est attribuée au
syndrome désormais nommé minimal brain injury ou damage par Strauss, en 1947.
Ainsi au prix d’adaptations, le succès de l’hypothèse lésionnelle ne se dément
pas jusqu’au début des années 1960 et pour Leon Eisenberg, figure éminente
de la pédopsychiatrie nord-américaine, l’hyperkinésie est la plus fréquente des
complications comportementales chez les enfants porteurs d’atteintes cérébrales.
À ces modèles purement lésionnels s’ajoute l’hyperkinetic impulse disorder éla-
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boré dans les années 1950 qui y ajoute des causes fonctionnelles (Laufer, 1957).
Non sans analogie formelle avec les stades du développement psychomoteur
selon Wallon, il repose sur le constat que les très jeunes enfants étant phy-
siologiquement hyperkinétiques, impulsifs et distractibles, c’est la maturation
du système nerveux avec l’âge qui leur permet d’amender ces comportements.
L’enfant souffrant d’un hyperkinetic impulse disorder n’y parvient pas en raison
soit d’une maturation ralentie du cortex sans étiologie lésionnelle, soit d’un
facteur traumatique responsable d’un excès d’excitation du système réticulé,
expliquant que certains nourrissons répondent avec une intensité anormale à
des stimulations sensorielles ressenties comme banales par les autres bébés.
16 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

L’abandon des théories lésionnelles

Les doctrines lésionnelles de l’hyperkinésie s’affaiblissent progressivement pour


plusieurs raisons, d’abord l’absence fréquemment soulignée de modifications
anatomiques observables par l’imagerie, ensuite le constat de plus en plus
fréquent que l’examen neurologique est généralement normal chez les enfants
présentant un tableau avéré de troubles hyperkinétiques, et enfin de l’absence
d’antécédents organiques notables chez beaucoup de patients.
Finalement la référence à une lésion cérébrale est écartée e n 1962 par l’Oxford
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International Study Group of Child Neurology.

Cependant des « lésions minimes »...

Un avatar du minimal brain injury (ou damage) connaît cependant un succès


remarquable, le minimal brain dysfunction ou MBD (Clements, 1962). C’est un très
large éventail de manifestations avec un continuum entre les atteintes légères
et d’autres plus marquées, fait de difficultés comportementales, de difficultés
d’apprentissage et de signes neurologiques mineurs.
Ces derniers, les soft signs, sont des variantes neurologiques de la normale
(troubles de la motricité fine, de la coordination, de la perception et de
l’intégration sensorielle) sans valeur pathognomonique. Leur présence ainsi
que celle d’anomalies à l’électro-encéphalogramme attesteraient d’un désordre
neurologique sous-jacent, mais en l’absence de toute lésion visible.
Le catalogue du MBD comporte une centaine de signes et symptômes, et parmi
les plus fréquents figurent l’hyperactivité, l’impulsivité, la labilité émotionnelle,
le déficit d’attention, les difficultés de mémoire et d’organisation de la pensée,
les difficultés perceptivo-motrices, les difficultés de coo rdination, les troubles
du langage oral et de l’apprentissage de la lecture, de l’écriture, de l’orthographe,
du calcul.
La popularité initiale du MBD est à placer dans le contexte historique du baby-
boom. La réussite scolaire est un enjeu crucial d’ascension sociale, où le dépis-
tage des inaptitudes comme le développement des rééducations prennent une
grande importance.
Cependant la très faible spécificité du MBD est critiquée. Son emploi se raréfie
puis disparaît après la publication des critères du DSM-III en 1980 (cf. infra).
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 17

Doctrines psycho-environnementales, milieu


!

et psychodynamique

Au-delà des facteurs organiques qui viennent d’être retracés, l’idée a germé
tôt que certains facteurs familiaux et sociaux puissent également favoriser
le syndrome, puisqu’elle est présente dès les premières descriptions du syn-
drome en Europe au début du XXe siècle. Et aux États-Unis, des facteurs socio-
environnementaux sont couramment invoqués selon la doctrine de Meyer, jusqu’à
aboutir à une conception exclusivement psychodynamique du syndrome dans les
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années 1970.

Étiologie socio-environnementale en Europe

Dans ses conférences de 1902, Still note que ces enfants sont souvent élevés
dans des familles aux pratiques éducatives chaotiques. Dans les années 1920,
Wallon intègre à sa doctrine l’influence des interactions de l’enfant avec son envi-
ronnement. À la Clinique Annexe de Neuropsychiatrie Infantile, les pathologies
les plus fréquentes, sont dues à un milieu familial difficile : famille dissociée,
parents absents, alcooliques ou violents, enfants « instables », « difficiles »,
« turbulents » sur lesquels les parents n’ont plus d’autorité ; il s’agit d’une
« instabilité conditionnée » (Heuyer, 1951).
Dans les années 1970, un continuum est envisagé entre « instabilité subcho-
réïque », de nature constitutionnelle, et « instabilité affectivo-caractérielle »,
fortement conditionnée par l’environnement selon Ajuriaguerra.

Étiologie socio-environnementale aux États-Unis


© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Aux États-Unis la conception organique de l’origine des troubles mentaux n’est


ni la seule, ni même la mieux acceptée dans la première moitié du XXe siècle.
Au contraire domine alors une approche psychodynamique ada ptée de Freud et
de Jung, et défendue par Adolf Meyer, psychiatre d’origine s uisse. Les troubles
mentaux y sont conçus comme des types de réactions pathologiques de l’individu
à des sources de stress venant de l’environnement.
Les facteurs psycho-sociaux et les conditions de vie adverses susceptibles de
favoriser l’hyperkinésie chez les enfants sont ainsi recensés par Childers dans les
années 1930 : milieu familial désorganisé, déménagements fréquents, éducation
inadéquate, horaires irréguliers, mauvaises habitudes de vie, insécurité affective.
Le modèle imputant l’hyperkinésie à des causes organiques, prévalant dans les
années 1950, n’est lui-même pas exclusif. Il s’enrichit de facteurs psycho-sociaux
18 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

car les complications périnatales (toxémie gravidique, saignements ou préma-


turité...) sont d’autant plus fréquentes que le statut socio-économique de la
famille est bas (Knobloch & Pasamanick, 1959).

« Réaction Hyperkinétique de l’Enfance »

Cependant une doctrine intransigeante prospère à la fin des années 1960, où


seuls des facteurs psychiques contribuent à l’hyperkinésie, en réaction aux théo-
ries organiques. La définition de la « Réaction Hyperkinétique de l’Enfance »,
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formulée en 1968 dans le DSM-II, impose l’absence formelle de toute lésion
cérébrale.
Le syndrome, cantonné à l’enfance, y est défini en quelques lignes par un com-
portement, « suractivité, agitation, distractibilité, brève durée d’attention », et
surtout par un processus étiologique, la « réaction ». En référence aux concep-
tions de Meyer et à celles de Winnicott, pédiatre et psychana lyste britannique,
la doctrine de la réaction exclusivement psychodynamique implique un contexte
environnemental perturbé et un conflit psycho-affectif interne à l’enfant ou
entre lui et son entourage.
À partir des années 1980, cette doctrine s’étiole dans les pays anglo-saxons
attachés au pragmatisme, faute de confirmation par des données empiriques
objectives. En effet, rare est l’existence confirmée de signes dépressifs obser-
vables cliniquement, et précédant la survenue de l’hyperkinésie chez l’enfant.

Nosographie chez d’irréductibles Gaulois

En France les théories psychodynamiques ne cessent de faire recette dans la noso-


graphie. La CFTMEA, Classification Française des Troubles Mentaux des Enfants
et des Adolescents, est conçue dans les années 1980, pour faire une « large
place aux conceptions psychanalytiques du fonctionnement mental ». Et ses
auteurs lui assignent d’être la « classification de référence » pour les pédo-
psychiatres français (Mises, 2002). Cependant les autorités sanitaires du pays
utilisent la CIM-10 de l’OMS (cf. infra) dans le Programme de médicalisation des
systèmes d’information (PMSI) destiné à mesurer l’activité en psychiatrie des
établissements de santé.
Le préambule de la CFTMEA revendique haut et fort sa réaction aux « carences »
et aux « orientations nosographiques réductrices » du DSM-III (cf. infra) où
toute étiologie psychodynamique est écartée (Misès, 1988) . La référence de la
classification française est la « structure psychopathologique », notion clé de
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 19

la psychanalyse, pour établir l’étiologie des troubles et un pronostic sur leur


évolution.
Certes, l’« hyperactivité infantile constitue un problème de Santé Publique »
(Misès, 2001). Mais la faire entrer dans les cadres de la doctrine psychanalytique
reste une tâche ardue. Ainsi, dans les deux tiers des cas environ selon une
étude utilisant la CFTMEA, l’hyperkinésie est un symptôme d’autres pathologies
comme les « troubles névrotiques » et surtout l’« organisation limite de l’en-
fance » ou « dysharmonie évolutive ». C’est également un syndrome « d’une
réelle originalité » et difficile à appréhender en termes de « structure » en raison
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d’un « ancrage insuffisant des ouvertures névrotiques », avec une persistance
dans une « pseudo-œdipification », et une « bi-triangulation », « sans qu’il y ait
conflit au sens du conflit névrotique » (Misès, 2001). Depuis, une seule autre
étude publiée a utilisé la CFTMEA.
Dans la version de la CFTMEA révisée en 2010, le syndrome éclate entre deux cha-
pitres : les Troubles du Développement et des Fonctions Instrumentales (pour la
forme sans hyperkinésie) et dans les Troubles des Conduites et du Comportement.

L E SYNDROME DANS LES CLASSIFICATIONS


INTERNATIONALES

Dans les deux systèmes nosographiques qui règnent sur la psychiatrie dans le
reste du monde, la CIM et le DSM, les définitions du syndrome obéissent chacune
à des règles propres, selon le poids accordé à ses trois composantes, déficit
d’attention, hyperactivité et impulsivité, mais aussi selon la présence ou non
de troubles des conduites. Quand aux troubles de la régulation émotionnelle,
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aucune des deux nosographies n’en fait un élément décisionnel.

DSM, de l’« a-théorie » au trouble neurodéveloppemental


!

Le DSM, publié depuis 1952 par l’American Psychiatric Association, est remanié au
long des décennies, en quête de précision dans l’identification et la description
des troubles mentaux. La nosographie du DSM est restée la référence obligée
dans la recherche sur le TDAH, jusqu’aux récents RDoC (cf. infra), car elle s’appuie
sur des enquêtes épidémiologiques « sur le terrain », méthod e scientifique qui
rapproche la psychiatrie des autres disciplines médicales.
La première édition, publiée en 1952, ne comporte aucun des troubles mentaux
de l’enfance. Dans le DSM-II (cf. supra), en 1968, le syndrome est sommairement
20 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

défini en quelques lignes qui reflètent les théories psychody namiques alors en
vogue. Une succession de remaniements mène du DSM-III, en 1980, qui se veut
« a-théorique », sans référence à des causes supposées, au DSM-5, en 2013, où
le syndrome est inscrit parmi les troubles neurodéveloppementaux.

La révolution empirique du DSM-III

Le DSM-III formalise en 1980 le « Trouble Déficitaire de l’Attention (avec ou sans


Hyperactivité) ». Révolution méthodologique destinée à réduire la part d’impré-
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cision dans le diagnostic, liée à la subjectivité de chaque clinicien, il établit des
critères avec trois listes de symptômes comportementaux, objectivables, sans
référence à des processus étiologiques présupposés, et décrivant les difficultés
attentionnelles, l’impulsivité, et l’hyperactivité.

L’inattention au premier plan

Les auteurs du DSM-III privilégient l’inattention, avec l’impulsivité comme autre


symptôme clé. L’hyperactivité motrice est au second plan, à travers deux sous-
types : « Trouble Déficitaire de l’Attention » avec ou sans « Hyperactivité ». C’est
un renversement de perspective par rapport à l’hyperkinésie, en faveur duquel
ont pesé les travaux canadiens sur les difficultés d’attention et de contrôle
des impulsions (Douglas, 1972). L’existence d’une forme sa ns hyperactivité est
admise. Enfin le syndrome n’est pas limité à l’enfance, et sa persistance pos-
sible est reconnue chez l’adulte lorsque le déficit attentionnel et l’impulsivité
persistent sans rémission et avec un retentissement fonctionnel.

Révisions du DSM jusqu’au DSM-IV-TR


!

En 1987, le syndrome est rebaptisé « Trouble Hyperactivité Déficit de l’Attention »


(THADA) dans le DSM-III-R, avec une liste unique d’items rassemblant indistinc-
tement les trois types de symptômes. L’ancien « Trouble Déficit de l’Attention
sans Hyperactivité » est exclu du syndrome, et relégué dans une section à part
du manuel, où il est désigné « Trouble Déficit de l’Attention indifférencié », avec
l’indication que les données manquent pour établir des critères de diagnostic.
Pendant les années 1990, l’impulsivité et l’hyperactivité sont réunies en une
dimension comportementale unique d’où découlent les critères du DSM-IV, en
1994, puis du DSM-IV-TR, en 2004, composés de deux listes d’items : une pour
l’inattention et l’autre pour l’hyperactivité-impulsivité. Contrairement au DSM-III-
R, il est à nouveau possible de diagnostiquer une forme du syndrome constituée
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 21

essentiellement de difficultés d’attention : le « TDAH avec inattention prédo-


minante », ainsi qu’une forme résiduelle chez l’adulte. Pour la première fois,
il est également possible de diagnostiquer une forme sans déficit d’attention
significatif : le « TDAH avec hyperactivité-impulsivité prédominante ».

« Troubles hyperkinétiques » et personnalité pathologique


!

dans la CIM-10

La Classification Internationale des Maladies, 10e version actuellement en


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vigueur depuis 1992, inscrit quant à elle le syndrome parmi les Troubles
Hyperkinétiques, dans une conception restée proche de celle du DSM-III-R. Mais,
de façon assez méconnue, elle en mentionne également une variante dans une
catégorie résiduelle de Troubles de la personnalité.

« Troubles hyperkinétiques »

Au sein des « Troubles hyperkinétiques » de la CIM-10, la subdivision principale


repose sur la présence ou l’absence chez le jeune patient d’un comportement
agressif, délinquant ou dyssocial. Ainsi un pronostic plus sévère à l’âge adulte dis-
tingue le « Trouble hyperkinétique et trouble des conduites » de la « Perturbation
de l’activité et de l’attention ».
Cette dernière est voisine du « TDAH sous-type mixte » du DSM-IV. Mais la CIM-
10 ne reconnaît ni le « déficit de l’attention sans hyperactivité » du DSM III, ni
le sous-type du TDAH « avec inattention prédominante » du DSM-IV. Cela écarte
du diagnostic nombre de patients.
Selon les auteurs de la CIM-10 les « enfants sujets à des préoccupations
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

anxieuses », et les « rêveurs apathiques » ne doivent pas être inclus dans le


groupe diagnostique « Perturbation de l’activité et de l’attention » car leurs
« difficultés sont probablement de nature différente ». Cela prélude aux débats,
qui persistent, concernant la place du « Sluggish Cognitive Tempo » dans la
nosographie (cf. infra).

Personnalité « haltlos »

Le classement du syndrome parmi les personnalités pathologiques, à l’âge adulte,


esquissé par Kraepelin en 1915, n’est pas resté complètement sans descendance.
Un trouble de la personnalité de type « haltlos », figure dans la CIM-10, classé
parmi les « autres troubles spécifiques de la personnalité » (F60.8), mais
22 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

méconnu et inusité. Le terme allemand, considéré comme intraduisible en


anglais, renvoie aux concepts de « unstable psychopath » en anglais et de
« Willenlose Psychopathen » (c’est-à-dire sans volonté) en allemand, dans la
description desquels se mêlent certains traits relevant du TDAH et d’autres
appartenant aux registres histrionique et sociopathique (Langmaack, 2000).

Trouble « neurodéveloppemental »
!

Le DSM vient de connaître sa 5e version, publiée en 2013. Le « TDAH » garde le


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même nom depuis 1994, mais son classement dans la nosographie est bouleversé
car il quitte les « Comportements perturbateurs de l’enfant », où il voisinait
les Troubles des conduites, pour entrer dans les « Troubles neurodéveloppemen-
taux ».
Les « Troubles neurodéveloppementaux », qui regroupent le TDAH, les troubles du
spectre autistique, les retards mentaux, les troubles de l’acquisition du langage et
ceux de la coordination motrice, ont en commun d’affecter le développement de
grandes fonctions du cerveau. Ils possèdent plusieurs caractéristiques communes,
un début précoce, une forte influence génétique et une association à des altéra-
tions du fonctionnement cérébral que mettent en évidence la neuropsychologie,
l’électro-encéphalographie, l’imagerie cérébrale structurale et fonctionnelle.
La description comportementale du TDAH en vigueur depuis vingt ans, celle du
DSM-IV, est conservée dans le DSM-5, avec ses deux dimensions classiques, le
déficit d’attention et l’hyperactivité-impulsivité. Des nuances sont apportées
destinées à faciliter le diagnostic chez le grand adolescent et l’adulte.
La place à accorder à la forme ne comportant qu’un déficit d’attention prononcé
(sluggish cognitive tempo) reste objet de débat. Les uns voulaient en faire un
syndrome à part, mais ceux considérant que c’est prématuré l’ont emporté dans
le DSM-5.

U NE NOUVELLE ÈRE NOSOGRAPHIQUE ?

Depuis peu, le National Institute of Mental Health, dont l’influence est grande
sur le financement de la recherche scientifique dans les troubles mentaux aux
États-Unis, remet radicalement en cause les concepts nosologiques actuels,
ceux du DSM-5, et donc la définition du TDAH. Le NIMH privilégie désormais le
projet Research Domain Criteria (RDoC). Son ambition est de « développer de
nouvelles façons de classer les troubles mentaux basées sur les dimensions de
Évolution nosographique de l’instabilité psychomotrice... 23

comportement observable, mesurables, et sur des marqueurs neurobiologiques »


(Cuthbert, 2014). Cette ambition vise à rapprocher la psychiatrie des pratiques
usuelles dans le reste de la médecine en introduisant dans le diagnostic des
troubles mentaux des critères étiologiques.
Il s’agit d’orienter tous les efforts vers la recherche de marqueurs biologiques
objectifs, en génétique, en neurobiologie, en imagerie, etc., afin que l’observa-
tion clinique ne reste plus l’unique clé du diagnostic. L’enjeu en est également
d’intégrer l’énorme complexité des données désormais potentiellement acces-
sibles pour chaque patient depuis la démocratisation de technologies encore
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très coûteuses il y a peu, imagerie cérébrale et génétique par exemple. Le « big
data » va entrer dans des algorithmes diagnostiques où l’informatique devra
jouer son rôle.

C ONCLUSION

Somme toute le TDAH n’est que le dernier avatar d’un trouble connu chez
l’homme depuis fort longtemps. C’est le nom peu élégant donné actuellement à
une situation reconnue comme pathologique depuis le XVIIIe siècle en Europe,
bien avant la révolution culturelle en cours sous nos yeux, bien avant que les
sociétés développées n’entrent dans cette ère post-industrielle où l’homme est
stressé par les « écrans » et Internet.
Dès le début du XXe siècle le syndrome est décrit par les médecins, les psycho-
logues et les pédagogues dans de nombreux pays, avec toutes ses caractéristiques
principales – déficit d’attention, hyperactivité et impulsivité, intelligence nor-
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

male, enfin évolution continue de l’enfance à l’âge adulte où il peut garder des
répercussions importantes.
Dès le début du XXe siècle, une place importante est réservée au déficit de
l’attention dans le syndrome, ainsi qu’aux dysrégulations émotionnelles.
La principale nouveauté du XXIe siècle est le défi provoqué par l’accès potentiel
à une énorme masse de données pour chaque patient. L’arrivée du « big data »
va bouleverser inéluctablement la nosographie de ce syndrome séculaire.
24 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

B IBLIOGRAPHIE

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motrices. Paris, Alcan. lines, Geneva, WHO.
Chapitre 2

Description clinique et évaluation


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diagnostique chez l’enfant

Clarisse Locret-Capon, Stéphanie Bioulac

C LASSIQUEMENT, le TDAH se définit selon un trouble tridimensionnel associant


inattention, hyperactivité et impulsivité (Jensen et al. 1997).
La forme clinique du garçon d’âge scolaire est souvent prise comme exemple
de description car c’est le tableau clinique le plus caractéristique, dans lequel
la scolarisation est une situation où l’expression peut apparaître « bruyante »
(Mouren, M-C. 2004). Mais au-delà de cette clinique « classique », il existe une
variabilité d’expression du trouble. Différentes formes cliniques existent et la
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symptomatologie évolue au cours du développement.

D ESCRIPTION CLINIQUE

Le déficit attentionnel
!

L’attention est définie par William James comme « la sélection sous forme claire
et précise d’une information ou d’un évènement extérieur à la pensée et son
maintien dans la conscience ».
Les difficultés que l’enfant TDAH manifeste dans le domaine de l’attention sont
parfois peu visibles chez l’enfant de moins de 6 ans ou mises sur le compte d’une
26 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

certaine immaturité de cette tranche d’âge. L’entrée au primaire et les réper-


cussions organisationnelles peuvent révéler ces difficultés. Différentes formes
d’attention existent et chacune d’elle peut être plus ou moins affectée. L’expres-
sion clinique du déficit attentionnel est par conséquent diversifiée chez le sujet
TDAH.
Il existe quatre grandes composantes de l’attention.

Deux sont liées à l’intensité ou à la qualité de l’attention


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1. L’alerte est un état propice à la détection de l’information sensorielle qui
correspond à notre niveau de vigilance. En anglais, cela se définit par l’« arou-
sal » ou niveau d’excitation. Si celui-ci est trop faible ou trop important nos
comportements ne seront pas suffisamment adaptés en réponse à des stimuli
externes.
2. L’attention soutenue, c’est-à-dire la capacité à rester attentif pendant une
longue période est mise en évidence dans les situations où il est nécessaire
pour l’enfant d’avoir une concentration soutenue, comme par exemple, lors
de tâches répétitives, plus ou moins agréables, ou ennuyeuses. Elle est liée à
l’attention sélective, permettant de maintenir le stimulus sélectionné pendant
une certaine période.
Les enfants TDAH présentent une moins bonne persévérance à l’effort, qu’ils
perçoivent souvent comme une contrainte. L’attention est difficile à soutenir
lors du travail scolaire (à la maison et à l’école), mais auss i dans certains jeux
de loisirs « classiques ». Ce qui ne semble pas le cas avec les jeux vidéo ou
l’ordinateur par exemple (Bioulac, S. et al. 2008).
Les parents et les enseignants décrivent ces enfants comme rêveurs, « dans leur
monde, dans la lune ». On dit aussi qu’ils papillonnent. Il faut leur rappeler
plusieurs fois les choses. Ils donnent l’impression de ne pas entendre ce qu’on
leur dit.
Ils ont des difficultés à accomplir des tâches de façon autonome et ont besoin
du soutien de l’adulte. Leur attention décroche plus ou moins rapidement mais
n’est pas suffisante pour suivre plusieurs heures d’enseignement, ou une histoire
qui leur est racontée pour les plus jeunes.
L’enfant peut être maladroit ou se mettre en danger par inattention, en vélo ou
en traversant sans regarder par exemple.
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 27

Deux autres sont liées à la sélection des informations


1. L’attention sélective correspond à la focalisation sur une seule source d’in-
formation, en faisant abstraction des autres. On parle aussi d’orientation de
l’attention. Il s’agit en fait de filtrer les informations non pertinentes.
Lorsque cette attention sélective fait défaut on parle alors de distractibilité. Elle
se caractérise par une incapacité à rester concentré sur une tâche : le moindre
bruit ou mouvement en présence de l’enfant, détourne son attention et entraîne
véritablement un « échappement » à son activité. Il fait des fautes d’étourderie
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et ne parvient pas à faire attention aux détails. Il est donc distrait et à tendance
à arrêter plus rapidement que les enfants de son âge l’activité en cours.
Il oublie ou perd souvent ses affaires. Les parents ont alors souvent l’impression
d’être toujours derrière leur enfant pour contrôler, vérifier. Les enfants TDAH
ont également tendance à oublier en route ce qui leur a été demandé, le plus
souvent à cause de leur distractibilité qui les attire vers une autre tâche. Ils
passent d’une activité à une autre, ne parvenant pas à terminer à la première.
L’organisation est difficile avec une difficulté à hiérarchiser, à prioriser aux
dépens souvent des éléments accessoires.
1. L’attention partagée ou divisée, c’est-à-dire lorsque l’on traite plusieurs
sources d’informations, permet la réalisation de plusieurs tâches en même
temps ou de passer rapidement d’une activité à une autre.
On peut alors observer des difficultés à l’école pour réaliser la double tâche
quotidienne des enfants en âge scolaire d’écouter et retranscrire en même temps,
comme lors des dictées par exemple. Il leur est aussi difficile de répondre
à une consigne complexe ou encore à un exercice tout en se souciant de la
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présentation.
Si de nombreuses descriptions cliniques confirment l’importance de l’inattention
dans la symptomatologie du TDAH, les travaux de recherche retrouvent des
résultats contradictoires à ce sujet. Ainsi des études ont mis en évidence un
déficit d’attention soutenue ou de la vigilance chez les sujets TDAH (Taylor, E., et
Sonuga-Barke, E. 2008), mais d’autres auteurs décrivent des résultats contraires
(Sergeant et van der Meere 1990).

L’hyperactivité ou instabilité psychomotrice


!

L’hyperactivité se définit par une incapacité ou une difficul té à rester en place


dans une situation de contrainte. C’est une agitation désorganisée et sans but.
28 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Dimension clinique « bruyante », elle a été le premier symptôme remarqué du


trouble. Dès, 1992, Halperin et al, avaient démontré que les sujets TDAH se
distinguaient d’enfants témoins ou d’enfants atteints d’a utres troubles, par un
niveau élevé d’activité motrice (Halperin et al. 1992). Les travaux récents de
Wood et al, ont mis en évidence par actimétrie, un nombre et une amplitude
des mouvements supérieurs chez les sujets TDAH comparés à des sujets témoins
(Wood et al. 2009).
L’enfant plus jeune a tendance à courir, à avoir du mal à tenir en place, à
escalader, grimper. Il peut être décrit comme « casse-cou », « cascadeur » par
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les parents. Il a du mal à rester calme lors des jeux.
Il a du mal à tenir en place devant un dessin animé ou un film. Il se lève de
table à la maison ou en classe sans demander la permission. Il est décrit comme
« monté sur ressorts », avec un besoin incessant de bouger.
Par la suite, en grandissant, il court moins, mais « gigote » sur sa chaise, bouge
ses jambes. En classe, il touche des objets sans arrêt, « trifouille » sa trousse,
sa règle, fait du bruit et parfois des commentaires inappropriés.

L’impulsivité
!

L’impulsivité est définie par une incapacité à inhiber une réponse. Elle se mani-
feste par une réponse plus rapide aux stimuli proposés. Cette réponse étant trop
rapide, elle peut être inadaptée, ou exagérée. L’impulsivité se traduit clinique-
ment par une intolérance à l’attente et des difficultés de planification (comme
par exemple s’organiser dans le travail scolaire). Elle s’accompagne de prises de
risque sans que le sujet perçoive le danger avec un nombre augmenté d’accidents
(fractures, intoxications accidentelles et accidents de la voie publique).
Elle se traduit également par des interventions intempestives : le sujet coupe la
parole, répond avant la fin de la question, à des difficultés à respecter son tour
de parole (APA 1994).
Ces enfants ont tendance à faire les choses trop vite, sans réfléchir avant d’agir.
Il leur arrive donc ne pas prendre suffisamment en compte le contexte et de vexer
ou blesser leurs pairs sans intentionnalité réelle. D’autre part, cette impulsivité
est source d’erreurs, ne prenant pas le temps de lire la consigne ou encore de
« réfléchir avant d’agir ». Ils se précipitent.
Ils ont du mal à attendre leur tour, coupent la parole et peuvent se mettre
rapidement en colère dans ce contexte de frustration.
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 29

Composantes secondaires de la symptomatologie


!

Un retard modéré de langage, de la motricité ou du développement social ne


sont pas spécifiques du TDAH mais peuvent fréquemment s’obse rver. Les carac-
téristiques associées peuvent inclure une faible tolérance à la frustration, de
l’irritabilité ou une labilité de l’humeur. Même en l’absence d’un trouble spécifique
des apprentissages, le travail scolaire est souvent altéré (APA 2013).

Dysrégulation émotionnelle
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Les enfants TDAH peuvent présenter une hyper-expressivité et une hyperréacti-
vité émotionnelle.
Leur réactivité émotionnelle particulière se traduit par une variabilité de l’ex-
pression de leurs émotions. La réaction aux émotions négatives mais aussi
positives peut être excessive. Elle se traduit par une labilité émotionnelle et des
réactions excessives aux frustrations. Elle est parfois extrême et déconcertante
pour l’entourage.
La régulation des émotions est difficile notamment la colère et l’agressivité
(Wehmeier, Schacht, et Barkley 2010).
Ces enfants sont aussi décrits comme très sensibles, à « fleur de peau ».

Opposition

Il est fréquemment repéré une certaine désobéissance avec une difficulté à obser-
ver les règles. Ces enfants sont décrits comme « non compliants » (Barkley, R. A.
1997). Ils ont des difficultés à intégrer les règles à la maison mais aussi dans
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d’autres environnements tels que l’école. Un certain autoritarisme et entêtement


pouvant entraîner une véritable intolérance à la frustration peuvent aussi exister
(Mouren, M-C. 2004).

Difficultés de planification, d’adaptation

Ces enfants ont des difficultés à s’adapter lors des situations nouvelles par
manque d’anticipation, c’est-à-dire à penser les conséquences de leurs actes.
Leur présentation comportementale est par conséquent fluctuante et parfois un
peu « chaotique ».
Confrontés à une situation nouvelle, comme par exemple, celle d’une consul-
tation, ils peuvent apparaître comme calmes voire même inhibés. Ainsi, on
30 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

identifie des situations pouvant exacerber la symptomatologie alors que d’autres


environnements vont la réduire (Mouren, M-C. 2004)(Bioulac S., Bouvard M. P.
2011).
Ils sont également en difficulté pour différer les récompenses lors des prises en
charge de type cognitivo-comportementales par exemple.
Les situations pouvant majorer la symptomatologie sont les situations de groupe,
les taches monotones et répétitives, les taches nécessitant un effort intellectuel
et une attention soutenue, ou encore une situation non structurée.
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À la différence, une situation nouvelle et/ou duelle, intéressante, une récom-
pense ou un renforcement positif immédiat pourront atténuer la présentation
clinique.

Habiletés sociales

À un stade sévère, une certaine maladresse sociale est également présente. Leur
manque de filtre, c’est-à-dire leur incapacité à prendre en compte le contexte ou
les conséquences de leurs actes ou prise de parole par impulsivité, est souvent
mal toléré par l’environnement social. Les enfants TDAH sont donc souvent boucs
émissaires à l’école, isolés, rejetés par leurs pairs. De même au niveau familial,
les parents sont souvent soumis aux rejets des autres membres de la famille.

Conséquences
!

Il existe des conséquences immédiates et à long terme au niveau des interactions


sociales, du domaine familial ou scolaire. Le DSM-5 prend maintenant en compte
l’intensité du trouble, qualifié de modéré, sévère, très sévère qui peut aussi être
évaluée en fonction de l’importance des conséquences.
Une certaine maladresse en lien avec l’inattention et l’impulsivité peut être
observée. Elle peut cependant être en lien avec une dyspraxie, comorbidité
fréquente du TDAH.
Les difficultés relationnelles avec leurs pairs sont donc fréquentes par l’inatten-
tion, l’impulsivité et la dysrégulation émotionnelle.
Un échec scolaire peut être observé au fil du temps avec une baisse de l’estime
de soi, et la survenue d’une anxiété de performance pouvant être un facteur de
risque de dépression.
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 31

Des mises en danger sont possibles par inattention et impulsivité, à vélo ou en


traversant la route sans regarder par exemple chez l’enfant. Elles seront d’autant
plus à risques d’être présentes par la suite chez l’adolescent ou l’adulte.

É VALUATION DIAGNOSTIQUE

Le diagnostic de TDAH chez l’enfant peut être difficile à poser en lien avec une
variabilité clinique due à l’aspect développemental. L’inattention ou l’impulsi-
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vité peuvent être observées chez certains enfants sans être considérées comme
pathologique. Seule la comparaison au stade de développement correspondant,
en fonction de leur intensité ou de leur sévérité, permettra de les considérer ou
non comme pathologiques.
Cette évaluation est clinique. Elle peut être complétée par des échelles psycho-
métriques ainsi que par des évaluations neuropsychologiques.

Entretien clinique
!

L’évaluation clinique commence par interroger le motif de la consultation et la


personne l’ayant demandée : les parents, l’enseignant, le médecin scolaire, le
psychologue, l’orthophoniste. Il est important de connaître la plainte principale :
est-ce l’instabilité psychomotrice, les répercussions d’un déficit de l’attention
au travers de difficultés scolaires, l’impulsivité, des difficultés d’organisation,
d’autonomie ou encore des répercussions secondaires déjà plus importantes
telles un trouble anxieux ou une symptomatologie dépressive.
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Le contexte familial est évalué, le mode de vie, le métier des parents, le mode de
garde en cas de séparation parentale, la présence ou non de difficultés éducatives.
L’histoire familiale, les événements de vie marquants et l’évaluation sociale sont
également indispensables.
Le clinicien reprend l’histoire prénatale et développementale, médicale et psy-
chiatrique personnelle et familiale.
Le niveau scolaire actuel et le parcours scolaire sont repris de façon précise afin
de déterminer la période à laquelle les difficultés ont été relevées en dehors du
domaine familial.
Le sommeil est évalué en tant que comorbidité fréquente du TDAH mais aussi
en cas de prescription à venir de psychostimulant. Dans ce cadre-là, il est
habituel de préciser la qualité de l’appétit, la croissance staturo-pondérale, les
32 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

antécédents médicaux cardiaques, neurologiques (épilepsie, tics) personnels


et familiaux et les prises médicamenteuses actuelles et passées. Ces éléments
seront indispensables avant toute prescription de psychostimulant.
L’histoire développementale est aussi importante que l’évaluation clinique
actuelle.
Cette évaluation clinique doit être globale afin d’éliminer des diagnostics dif-
férentiels pouvant mimer les symptômes du TDAH. Il est donc important de
recherche un trouble des apprentissages, un trouble de l’humeur (épisode dépres-
sif majeur, trouble bipolaire), les différents troubles anxieux, un haut potentiel,
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des troubles développementaux, un trouble du spectre de l’autisme (comorbidité
maintenant admise par le DSM-5), un syndrome de Gilles de la Tourette. Il est
également important de considérer ces troubles comme des comorbidités pos-
sibles. En effet, 58-87 % des enfants avec TDAH ont au moins une comorbidité
et jusqu’à 20 % en ont trois ou plus (Brassett-Harknett et Butler 2007).
L’entretien doit comprendre une évaluation en présence des parents mais aussi
avec l’enfant seul.
La symptomatologie doit être retrouvée dans au moins deux environnements
différents.
L’évaluation prend par conséquent habituellement en compte le milieu familial
et scolaire. En effet, les parents et les enseignements observent les enfants sur
des temps et des conditions différentes, rendant la validité de leur évaluation
comparable.

Échelles psychométriques
!

Les échelles psychométriques sont alors nécessaires pour venir compléter l’évalua-
tion clinique, le contexte de l’entretien duel pouvant minorer la symptomatologie
comme nous l’avons dit précédemment. Comme décrit par Hinshaw et Nigg les
échelles psychométriques augmentent la validité diagnostique par de nombreux
avantages : la facilité d’utilisation, la possibilité de décrire des comportements
non observables sur un plan clinique en dehors d’un entretien duel comme le
comportement en classe ou l’attention, une excellente stabilité test-retest et
une forte consistance interne. Elles quantifient la fréquence, la durée ou la
sévérité. Elles n’ont en revanche aucune valeur diagnostique propre. Chacune
a ses propres limites : la longueur, l’informateur, la limite d’âge, les données
normatives (Hinshaw, Stephen P.; Nigg, Joel T. 1999).
Les différentes échelles utilisées sont les suivantes :
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 33

Inventaire des comportements - Child Behavior Check List (CBCL,


Achenbach, 1991)

Ce questionnaire, d’approche dimensionnelle, destiné aux 4-18 ans, a été utilisé


sous la forme d’hétéro-questionnaire, rempli par les parents. Il évalue au travers
de 8 dimensions psychopathologiques une partie de la symptomatologie de
l’enfant : le repli, les plaintes somatiques, l’anxiété/la dépression, le retentis-
sement social, les troubles du cours de la pensée, l’agressivité, les problèmes
de délinquance et le déficit attentionnel. Il élabore 3 scores totaux : problèmes
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internalisés, problèmes externalisés et score global. Les scores seuils fixés sont
de 60.

Échelles de Conner’s (Conner’s rating scale, Conners, 1968)

Ce questionnaire possède une version parent, une version enseignant et une


version pour l’enfant. Il est très largement utilisé. Les symptômes cardinaux
et associés sont explorés : l’agitation, l’inattention, l’impulsivité, l’anxiété, les
troubles des apprentissages, les émotions, les symptômes de dysfonction exécu-
tive.
La dernière version, la Conners 3 validée en français, représente mieux les
catégories du DSM IV-TR. Elle se décline en une version longue (110 items)
et une version courte (43 items) pour les parents et 115 et 39 items pour les
enseignants. Les scores des différentes échelles sont convertis en T-score, c’est-
à-dire avec une moyenne de 50 et un écart-type de 10 pour chaque sexe et par
intervalle d’âge de 2 ans entre 3 et 17 ans. Un score T" 70 correspond à un score
fortement atypique. Elle comprend 13 scores et ajoute à la ve rsion précédente
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

des troubles comorbides comme le trouble oppositionnel avec provocation ou le


trouble des conduites. Une version d’auto-évaluation existe également (Conners
3 self-report, Conners 3-SR).

L’ADHD rating scale-IV (ADHD-RS) (George du Paul)

Cet hétéro questionnaire permet aux parents et aux enseignants mais aussi au
clinicien de coter les 18 symptômes du DSM IV sur une échelle de 0 à 3. Un
symptôme est considéré comme présent si le score de l’item vaut 2 ou 3. La
version française est en cours de validation. Un cut-off à 28 est considéré comme
pathologique.
34 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Questionnaire SNAP IV 26 (Swanson, Nolan and Pelham IV, 1983)

Ce questionnaire court, de 26 items, explore l’inattention (items 1 à 9), l’hyper-


activité (items 10 à 18) et l’impulsivité ainsi que le trouble oppositionnel avec
provocation (items 19 à 26). Les items sont côtés de 0 à 3 (0=pa s du tout, 1=
juste un peu, 2= nettement, 3= énormément).
Il est fondé sur les critères diagnostiques du DSM IV. Il contient également des
items du questionnaire de Conners et de l’IOWA (Loney et Milich, 1985). L’IOWA
a été développé pour distinguer les items qui mesurent l’inattention/suractivité
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(I/S : items 4,8,11,31 et 32) de ceux qui mesurent l’agression/provocation (A/P :
items 21,23, 29,34 et 35). Les sous-scores sont exprimés par une moyenne. Le
SNAP IV est disponible dans une version française, non validée, destinée aux
parents et aux enseignants.

Inventaire pour l’évaluation du comportement de la fonction exécutive


(Behavior Rating Inventory of Behavior Function –BRIEF), Gio, 2000

Il est destiné aux enfants et adolescents âgés de 5 à 18 ans et disponible en


version parents et enseignants. Il contient 86 questions dont les réponses sont
simplement cotées de jamais (J), parfois (P) à souvent (S).
Il évalue les difficultés de régulation du comportement, d’organisation, de régu-
lation émotionnelle, l’inattention, l’impact sur la mémoire de travail, le manque
de flexibilité, la difficulté à initier une action. Il donne 8 scores cliniques
(regroupés en deux index : régulation du comportement et métacognition), deux
scores de validité (négativité et incohérence dans les réponses). On retrouve
une forte cohérence interne (alpha = 0,80-98), fidélité test-retest (rs= 0,82
pour les parents et 0,88 pour les enseignants). Il aurait une plus grande validité
écologique que les tests généralement utilisés en neuropsychologie (Vriezen et
Pigott 2002).
Il s’agit donc d’une évaluation globale du fonctionnement exécutif, ce qui le
différencie d’autres questionnaires et le rend particuliè rement pertinent. Il est
disponible en français.

L’échelle de Brown – Brown Attention-Deficit Disorder Scales, 1996, 2001


(BADDS)

Il existe plusieurs versions en fonction de l’âge dont une ve rsion étalonnée en


France pour les 12-18 ans. Elle comprend 40 items et mesure 5 f acteurs : orga-
nisation et énergie au travail, attention et concentration, soutien de l’énergie
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 35

et de l’effort, gestion des émotions et de la frustration, mémoire de travail et


rappel des souvenirs.

L’échelle SKAMP (Swanson, Kotkin, Agler, M-Flynn, and Pelhamm scale,


1992)

Cette échelle comprend 10 items. Elle a pour objectif d’éval uer les troubles du
fonctionnement de l’enfant en milieu scolaire. L’enseignant côte la sévérité de 10
comportements (6 premiers items correspondent à l’évaluation de l’attention, les
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4 derniers à celle du comportement), selon 4 degrés : pas du tout (côté 0), un
peu (côté 1), souvent (côté 2), très souvent (côté 3). Un score de dégradation
est donc obtenu.
L’évaluation prendra en compte l’évolution de la symptomatologie en fonction
de l’âge.
Dans le cadre d’un TDAH de type mixte notamment, la composante hyperactive
et impulsive aura tendance à être au premier plan pendant la petite enfance
pour ensuite s’atténuer, alors que la composante inattentive se révélera au cours
de l’évolution développementale mais aussi avec l’augment ation des exigences
scolaires.
Le diagnostic se réfère aux critères diagnostiques du DSM-5 (APA 2013).
Le TDAH est depuis la parution du DSM-5 classé parmi les troubles neurodéve-
loppementaux et non parmi les troubles psychiatriques de l’enfant, signifiant
la part développementale importante du trouble et son évolution jusqu’à l’âge
adulte.
Les symptômes doivent être présents avant l’âge de 12 ans et non 7 ans comme
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

c’était le cas dans le DSM IV-TR (APA 1994, s. d.).

Critères diagnostiques chez l’enfant selon le DSM-5 (APA


!

2013)

A. Un mode persistant d’inattention et/ou d’hyperactiivé-impulsivité qui


interfère avec le fonctionnement ou le développement, caractérisé par (1)
et/ou (2)
1. Inattention : Six (ou plus) symptômes d’inattention et/ou d’hyperacti-
vité/impulsivité persistent depuis au moins 6 mois, à un degré qui ne correspond
pas au niveau de développement et qui a un retentissement négatif direct sur
les activités sociales et scolaires.
36 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

NB : les symptômes ne sont pas seulement la manifestation d’un comportement


opposant, provocateur ou hostile, ou de l’incapacité à comprendre les tâches ou
les instructions.
2. Hyperactivité et impulsivité : Six (ou plus) symptômes d’inattention et/ou
d’hyperactivité/impulsivité persistent depuis au moins 6 mois, à un degré qui ne
correspond pas au niveau de développement et qui a un retentissement négatif
direct sur les activités sociales et scolaires.
NB : les symptômes ne sont pas seulement la manifestation d’un comportement
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opposant, provocateur ou hostile, ou de l’incapacité à comprendre les tâches ou
les instructions.
B. Plusieurs symptômes d’inattention et/ou d’hyperactivité-impulsivité
étaient présents avant l’âge de 12 ans.
C. Plusieurs symptômes d’inattention et/ou d’hyperactivité-impulsivité sont
présents dans au moins deux contextes différents (ex : à la maison, à l’école,
dans d’autres activités)
D. On doit mettre clairement en évidence que les symptômes interfèrent
avec ou réduisent la qualité du fonctionnement social, scolaire.
E. Les symptômes ne surviennent pas exclusivement au cours d’une schi-
zophrénie ou d’un autre trouble psychotique, et ils ne sont pas mieux
expliqués par un autre trouble mental (trouble de l’humeur, trouble anxieux,
trouble dissociatif, trouble de la personnalité, intoxication par, ou sevrage d’une
substance).
Spécifier le type :
# Présentation combinée : si à la fois les critères A1 (inattention) et les critères
A2 (hyperactivité-impulsivité) sont remplis pour les 6 derniers mois.
# Présentation inattentive prédominante : si, pour les 6 derniers mois, le critère
A1 est rempli mais pas le critère A2.
# Présentation hyperactive/ impulsive prédominante : si pour les 6 derniers
mois, le critère A2 est rempli mais pas le critère A1.
Spécifier si :
En rémission partielle lorsqu’au cours des 6 derniers mois l’ensemble des critères
pour poser le diagnostic ne sont plus réunis alors qu’ils l’étaient auparavant,
et que les symptômes continuent à entraîner une altération du fonctionne-
ment social, scolaire.
Spécifier la sévérité actuelle :
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Tableau 2.1. Symptômes d’inattention DSM-5 (APA 2013)

a. Souvent, ne parvient pas à prêter attention aux détails, ou fait des fautes d’étourderies dans les devoirs scolaires,
le travail ou d’autres activités
ex : néglige ou ne remarque pas les détails, le travail est imprécis
b. A souvent du mal à soutenir son attention au travail ou dans les jeux
ex : a du mal a rester concentré pendant les cours magistraux, des conversations ou la lecture de longs textes
c. Semble souvent ne pas écouter quand on lui parle personnellement
ex : commence des tâches mais se déconcentre vite et se laisse facilement distraire
d. Souvent ne se conforme pas aux consignes et ne parvient pas à mener à terme ses devoirs scolaires
ex : le travail scolaire ou les devoirs à la maison
e. A souvent du mal à organiser ses travaux ou ses activités
ex : difficulté à gérer des taches comportant plusieurs étapes, difficulté à garder ses affaires et ses documents en ordre,
travail brouillon ou désordonné, mauvaise gestion du temps, échoue à respecter les délais
f. Souvent évite, a en aversion, ou fait à contrecœur les taches qui nécessitent un effort mental soutenu
ex : le travail scolaire ou les devoirs à la maison
g. Perd souvent les objets nécessaires à son travail ou ses activités
ex : matériel scolaire, crayons, livres
h. Se laisse facilement distraire par des stimuli externes
i. A des oublis fréquents dans la vie quotidienne
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant
37

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38
T ROUBLE D ÉFICIT

Tableau 2.2. Symptômes d’hyperactivité – impulsivité DSM-5 (APA 2013)

a. Remue souvent les mains ou les pieds, ou se tortille sur son siège
b. Se lève souvent en classe ou dans d’autres situations où il est supposé rester assis
ex : quitte sa place en classe
c. Souvent court ou grimpe partout dans des situations où cela est inapproprié
d. Est souvent incapable de se tenir tranquille dans les jeux ou les activités de loisir
e. Est souvent « sur la brèche » ou agit souvent comme s’il était « monté sur ressorts »
ex : n’aime pas rester assis pendant un temps prolongé ou est alors mal à l’aise
DE L’ATTENTION AVEC OU SANS

f. Parle souvent trop


g. Laisse souvent échapper la réponse à une question qui n’est pas entièrement posée
ex: termine les phrases des autres, ne peut pas attendre son tour dans une conversation
h. A souvent du mal à attendre son tour
ex : dans une file d’attente
H YPERACTIVITÉ

i. Interrompt souvent les autres ou impose sa présence


ex : fait irruption dans les conversations, les jeux ou les activités, peut se mettre à utiliser les affaires des autres sans le
demander ou en recevoir la permission
DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 39

Léger
Peu de symptômes, ou aucun, sont présents au-delà de ceux requis au minimum
pour poser le diagnostic, et les symptômes n’entraînent que des altérations
mineures du fonctionnement social ou professionnel.
Moyen
Les symptômes ou l’altération fonctionnelle sont présents sous une forme inter-
médiaire entre « léger » et « grave ».
Grave
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Plusieurs symptômes sont présents au-delà de ceux requis pour poser le diag-
nostic, ou plusieurs symptômes particulièrement graves sont présents, ou les
symptômes entraînent une altération marquée du fonctionnement social ou
professionnel.
Il n’existe pas de marqueurs biologiques permettant le diagnostic de TDAH. Pris
dans leur ensemble, en comparaison avec leurs pairs, les enfants ayant un TDAH
présentent une augmentation des ondes lentes à l’électroencéphalogramme, un
volume total du cerveau réduit à l’IRM et possiblement un retard de maturation
corticale dans le sens postérieur-antérieur mais ces constatations ne participent
pas au diagnostic.
Dans les cas rares où il existe une cause génétique connue (ex : syndrome de l’X
fragile ou syndrome de délétion 22Q11), la présence d’un tableau clinique de
TDAH devra aussi faire poser le diagnostic.
Il est important d‘éliminer les diagnostics différentiels, tels que le trouble
oppositionnel avec provocation (TOP), le trouble explosif intermittent, les autres
troubles neuro-développementaux, un trouble spécifique des apprentissages, un
trouble du développement intellectuel, un trouble du spectre de l’autisme, un
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

trouble réactionnel de l’attachement, des troubles anxieux, un trouble dépressif,


un trouble bipolaire, un trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle, un
trouble psychotique, des symptômes de TDAH induits par un médicament, des
troubles neurocognitifs.
Il ne faut pas oublier de rechercher les comorbidités qui sont fréquentes. Le TOP
est retrouvé chez la moitié des enfants TDAH avec la présentation combinée
du trouble. De même pour le trouble des conduites chez les enfants et les
adolescents. Un pourcentage inférieur d’enfants avec un TDAH a des symptômes
qui correspondent au trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle. Les
troubles anxieux et dépressifs, le trouble explosif intermittent sont plus présents
qu’en population générale. D’autres troubles peuvent être retrouvés : le trouble
obsessionnel compulsif, les tics et le trouble du spectre de l’autisme.
40 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Bilans complémentaires
!

Des bilans complémentaires peuvent être réalisés : neurops ychologique, ortho-


phonique et de psychomotricité.

Bilan neuropsychologique

L’évaluation cognitive, et notamment attentionnelle, est utile lors de comorbidi-


tés de type trouble des apprentissages.
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Elle permet de déterminer un profil cognitif spécifique avec un type de rééduca-
tion correspondant.

Épreuve d’efficience intellectuelle - WISC IV (Wechsler,D. 2005)


Il est d’important de réaliser tout d’abord une évaluation du quotient intellectuel
avec la réalisation d’une WISC IV (Weschler Intelligence Scale for Children). Il
s’agit d’une batterie d’évaluation intellectuelle pour les enfants âgés de 6 à
16 ans. Les conditions de passation sont standardisées, elle doit être passée
en une séance de 1h30 à 2h. Elle se compose de 15 subtests dont 10 sont
obligatoires et 5 sont optionnels. Elle situe un patient par rapport à son groupe
d’âge de référence.
Quatre indices composent la WISC IV.
# L’indice de compréhension verbale (ICV)
Mesure la formation de concepts verbaux, l’abstraction et le raisonnement
verbal, les connaissances acquises.
# L’indice de raisonnement perceptif
Évalue le raisonnement perceptif, le traitement spatial et l’intégration visuo-
motrice.
# L’indice de mémoire de travail
Mesure les capacités à conserver temporairement des informations en mémoire,
à réaliser certaines opérations et à produire un résultat. Il met en jeu l’atten-
tion, la concentration et le contrôle mental.
# L’indice de vitesse de traitement
Évalue la discrimination, la mémoire visuelle et l’attention sous une contrainte
de temps.
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 41

Des profils hétérogènes sont souvent retrouvés dans le TDAH :


# L’IMT et l’IVT sont sensibles au déficit de l’attention et de nombreux travaux
montrent des scores inférieurs mais non systématiques (Thaler, Bello, et Etcoff
2013).
# En l’absence de trouble des apprentissages, l’ICV et l’IRP se situent en général
dans la zone moyenne de la population. Cependant l’IRP, sensible à l’im-
pulsivité cognitive, peut être diminué du fait de réponses trop rapides aux
questions.
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# Un profil moyen sans écart important entre les différents indices mais avec
des écarts intra-scalaires importants peut aussi être observé.

Épreuves neuropsychologiques évaluant les capacités attentionnelles et les


fonctions exécutives
On retrouve différents instruments en fonction de l’âge.
TEA-ch (Test of Everyday Attention for children) Manly Robertson, 2006
Ce test est destiné aux enfants âgés de 6 à 12 ans. Il permet une évaluation
de l’attention auditive et visuelle, soutenue et divisée. Il évalue également la
flexibilité cognitive et la capacité d’inhibition de l’enfant.
Il comprend 9 subtests : attention sélective (recherche dan s le ciel, carte géo-
graphique), attention soutenue (coup de fusil, écouter deux choses à la fois,
marche/arrêt, transmission de codes), attention divisée (faire deux choses à
la fois), modalités visuelles et auditives, flexibilité cognitive, inhibition de
l’impulsivité. Deux versions existent pour réévaluation après rééducation ou
traitement médicamenteux.
Les enfants avec TDAH comparés à un groupe contrôle ont de moins bons
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

résultats aux subtstests évaluant l’attention soutenue auditive et le contrôle


attentionnel (Heaton et al. 2001).
NEPSY-II (Neuropsychological Assessment of children 2nd éd.) Korkman, Kirk
et Kemps, 2012
Cette batterie d’évaluation est destinée aux enfants âgés de 3 ans à 16 ans
11 mois. 6 domaines à travers 32 subtests sont explorés : attention et fonc-
tions exécutives, mémoire et apprentissages, langage, fonctions sensori-motrices,
traitements visuo-spatiaux et la perception sociale.
L’évaluation des habiletés sociales est importante dans cette batterie et peut
conduire à une évaluation de la théorie de l’esprit ou de la re connaissance des
émotions.
42 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

KITAP Zimmerman et Fimm, 2002


Il est destiné aux enfants âgés de 6 à 10 ans. Il évalue l’attention divisée,
l’attention soutenue, la vigilance, la flexibilité cognitive, la mémoire de travail,
l’inhibition de l’impulsivité.
CPT –III (Conner’s continuous Performance Test) Conners 2008
C’est un test sur ordinateur, utilisé à partir de 8 ans et qui dure 14 minutes. Il
évalue l’inattention, la vigilance, l’attention soutenue et l’impulsivité.
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Bilan psychomoteur

Ce bilan évaluera :

La motricité intentionnelle
C’est le niveau de coordination motrice ou de développement moteur, l’instabilité
psychomotrice, l’impulsivité motrice et le défaut de planification.
Deux instruments sont souvent utilisés :
# Échelle de coordination motrice de Charlop-Atwell (Albaret et Noack, 1993).
Elle est destinée aux enfants âgés de 3 ans et demi à 6 ans. Elle dure
15 minutes. Elle évalue quatre domaines : coordination entre membres
supérieurs et inférieurs, coordination de deux actions simultanées, équilibre
statique et dynamique.
# La batterie d’évaluation du mouvement chez l’enfant (M-ABC) (Henderson et
Sugden, 1992, Soppelsa et Albaret, 2004).
Elle est fonction de quatre tranches d’âges (4-6, 7-8, 9-10, 11-12) et dure 25
à 40 minutes. Elle évalue trois domaines : dextérité manuelle, la maîtrise de
balles avec un lancer d’objet et un attraper, l’équilibre statique et dynamique.

L’écriture
L’échelle d’évaluation rapide de l’écriture chez l’enfant BHK (Charles et al., 2003)
consiste en la copie d’un texte pendant 5 minutes.

L’attention sélective
Le Test de Stroop (Albaret et Miglire, 1999) est destiné au 8-16 ans et évalue
l’attention sélective.
Dans le test de Stroop, les enfants TDAH font plus d’erreurs dans la condition
d’interférence et éprouvent plus de difficultés à sélection ner la caractéristique
Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 43

pertinente (couleur) et à inhiber la lecture automatique du mot (Sergeant J.,


Geurts, et Oosterlaan 2002).

Fonctions exécutives
Différents tests existent et évaluent différentes composantes des fonctions
exécutives.

Bilan orthophonique
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Les troubles comorbides du langage écrit et/ou oral sont fréquents chez les
enfants TDAH, il convient donc d’explorer l’utilisation du langage, l’acquisition
de la lecture et de la transcription.

Évaluation du langage oral


# Qualité de l’échange
# Communication non verbale
➙ Interactions, gestes, mimiques, respect du tour de parole
# Niveau de développement du langage sur le versant expression et compréhen-
sion
➙ Articulatoire, phonologique, lexical, syntaxique, pragmatique
Évaluation du langage écrit
# Lecture, orthographe
➙ Recherche d’une dyslexie-dysorthographie
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# Répercussions des troubles de l’attention, de la concentration


# Évaluation de la qualité de l’écriture
Ces éléments permettent de déterminer si l’enfant TDAH présente également
un trouble spécifique du langage oral ou écrit pouvant aggraver les difficultés
scolaires en lien avec le déficit attentionnel. Il est alors de rigueur de mettre en
place une rééducation orthophonique adaptée.
En conclusion, il est important de rappeler que le diagnostic de TDAH est avant
tout clinique. Les bilans complémentaires permettent de renforcer la validité
diagnostique ou de préciser les atteintes afin de définir au mieux la prise en
charge, notamment pour la rééducation attentionnelle.
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44
T ROUBLE D ÉFICIT

Tableau 2.3. Tests d’évaluation des fonctions exécutives

Test Mesure
Bloc de Corsi Mémoire de travail visuo-spatiale
Laby 5-12 Inhibition
DE L’ATTENTION AVEC OU SANS

Fluence figurale (Sevino, 1998) Fluence


Test de classement des cartes du Wisconsin Flexibilité
Test d’appariement d’images (Marquet-Doléac, 1999) Impulsivité motrice - inhibition
H YPERACTIVITÉ
DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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Description clinique et évaluation diagnostique chez l’enfant 45

B IBLIOGRAPHIE

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chologique des Apprentissages chez l’Enfant„
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cent Psychiatry 48 (10): 1023-30.
berg, C. Pfeffer, J. Schowalter, et T. Shapiro.
Chapitre 3

Le TDAH à l’âge adulte : concepts,


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aspects cliniques, diagnostic

Caroline Maurs, Jean-Philippe Reneric

É PIDÉMIOLOGIE

Prévalence
!

Le trouble déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH) est un trouble neuro-


développemental débutant dans l’enfance, avec une prévale nce estimée de 5 à
7 % chez les enfants et les adolescents. Il est maintenant bien établi grâce aux
études cliniques de suivi que des symptômes peuvent persister à l’âge adulte.
Également, on sait que les adultes ayant eu dans l’enfance un diagnostic de TDAH
ont un risque important de présenter d’autres troubles par la suite, qui pour
la plupart pourraient être une conséquence du TDAH de l’enfance. Cependant,
connaître la prévalence du trouble chez l’adulte reste difficile.
Dans les études prospectives et de suivi, le nombre de TDAH diagnostiqués
chez l’enfant et traités diminuerait de moitié environ tous les 5 ans, estimant
ainsi une prévalence de moins de 1 % à l’âge de 40 ans. De nombreux biais
pondèrent ces données, dont la sévérité des symptômes présents dans l’enfance
qui prédit fortement la persistance des symptômes chez l’adulte. Une autre façon
d’estimer la prévalence du TDAH de l’adulte est de rechercher le trouble lui-même
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 47

en population générale au travers d’entretiens structurés utilisant les critères


DSM-IV ; sur 1 813 sujets, Kooij et al. (2005) estiment ainsi la prévalence à
1 % quand tous les critères sont présents, et à 2.5 % quand 4 critères sur
les 6 requis sont présents. Enfin, des études à large échelle ont été menées
par l’Organisation Mondiale de la Santé dans une vingtaine de pays, avec une
évaluation rétrospective et structurée du TDAH dans l’enfance et à l’âge adulte.
La prévalence estimée du TDAH chez l’adulte est de 4.4 % aux USA et de 3.4 %
en moyenne dans les résultats poolés de 10 pays, avec des taux allant de 1.5 %
(Colombie, Liban, Mexique, Espagne) jusqu’à 7.3 % en France (pour revue, voir
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Adler, Spencer, Wilens. 2015) ! Tous ces résultats interrogent la validité chez
l’adulte des critères diagnostiques utilisés et développés initialement chez l’en-
fant. En effet, nous savons que les manifestations et le profil clinique du TDAH
évoluent avec l’âge, questionnant des critères plus spécifiques à l’adulte. De
nombreuses études montrent en effet que l’hyperactivité et l’impulsivité tendent
à diminuer avec l’âge, même si ce sont parfois les symptômes prééminents chez
quelques adultes, mais que c’est le déficit d’attention qui est le plus stable, et se
manifeste sous des formes très variées. C’est de ces observa tions que le DSM-5
a réduit le nombre de critères requis de 6 à 5 pour les adultes, et ajouté de
nouveaux exemples de symptômes et de situations pour aider les cliniciens.
L’identification du TDAH de l’adulte représente pourtant un enjeu important de
santé publique du fait des retentissements et complications multiples du trouble,
sur un plan psychopathologique mais aussi en termes d’« économie de la santé »,
comme vu plus bas et dans d’autres chapitres de ce livre ou d’autres.

Sexe
!
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Contrairement aux populations infanto-juvéniles où le trouble prédomine net-


tement chez les garçons, le sexe ratio tend s’équilibrer chez les sujets adultes
(Barkley et al., 2010). Les femmes adultes seraient plus souvent diagnostiquées
TDAH que les hommes. En effet, les femmes semblent avoir une meilleure recon-
naissance de leurs difficultés attentionnelles et organisationnelles, ce qui facilite
et oriente l’accès aux soins. On suppose que le retentissement de leur trouble
attentionnel dans la gestion de la vie quotidienne est probablement plus grand
face aux responsabilités de l’âge adulte. Les filles TDAH présentent moins de
symptômes d’hyperactivité et d’impulsivité durant l’enfance que les garçons, et
présentent également plus de troubles comorbides internalisés que les garçons
tels qu’anxiété et dépression, souvent motifs primaires de consultation spécia-
lisée, ce qui est un facteur de retard au diagnostic de TDAH. Certains auteurs
48 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

rapportent également qu’il n’y aurait pas de différence significative selon le


sexe concernant les différents sous-types de TDAH (définis selon des critères
du DSM-IV), la sévérité des symptômes et l’existence de comorbidités psychia-
triques ; cependant, l’abus de substances et le taux de criminalité seraient plus
élevés chez les hommes, et les troubles affectifs, les troubles du comportement
alimentaire ainsi que les troubles somatoformes plus fréquents chez les femmes
(Rasmussen et Levander, 2009).
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D IAGNOSTIC

Description clinique
!

Le TDAH est depuis peu reconnu comme un trouble existant non seulement chez
l’enfant mais également chez l’adulte... Cependant, il demeure fréquemment non
diagnostiqué, car mal connu des praticiens, confondu avec d’autres troubles dont
il peut être comorbide, et non traité de manière adéquate.

Un diagnostic difficile ?

Le diagnostic est surtout difficile car on n’y pense pas ! De nombreux autres diag-
nostics sont posés et parfois à juste titre (des troubles de l’humeur, un trouble
anxieux, un abus de substances etc.), qui sont eux-mêmes souvent comorbides
entre eux et comorbides d’un TDAH ! Les troubles attentionnels peuvent mimer
les troubles de la concentration observés dans le trouble dépressif majeur, la
dysthymie, l’état de stress post-traumatique, le trouble anxieux généralisé etc.
L’agitation motrice et la logorrhée, peuvent être difficile s à distinguer de l’agi-
tation du trouble anxieux généralisé, de la manie et l’hypomanie ou du trouble
dépressif majeur. Les symptômes d’impulsivité du TDAH peuvent ressembler à
l’impulsivité caractéristique des épisodes maniaques ou hypomaniaques. C’est
la reconnaissance de la chronicité des troubles et des symptômes cardinaux
requis pour le diagnostic qui permet de faire une distinction entre le TDAH et
les autres troubles psychiatriques. Par exemple, les difficultés de concentration
dans le TDAH peuvent être un problème existant depuis l’enfa nce alors que les
symptômes de troubles attentionnels présents lors d’un épisode dépressif majeur,
sont généralement concomitants de celui-ci et sont accompagnés de symptômes
thymiques tels que l’anhédonie. Dans le trouble bipolaire, l’augmentation du
niveau d’activité survient lors des épisodes maniaques, hypomaniaques ou mixtes
et est de courte durée, comparée à l’hyperactivité chronique présente dans le
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 49

TDAH. Une errance diagnostique durable est donc fréquente concernant le TDAH
de l’adulte. Cependant, presque tous les adultes TDAH qui n’ont pas été diag-
nostiqués dans l’enfance identifient eux-mêmes le trouble (informations média
internet, cas familiaux ou proches...), en particulier parce qu’ils ont consulté
parfois depuis des années dans des services de soins de première ligne et se
questionnent toujours sur la validité des différents diagnostics qui ont été posés
et traitements proposés... Il n’est donc pas rare que ce soit le patient lui-même
qui pose la question d’un TDAH... !
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L’hyperactivité et l’impulsivité

Sur un plan plus clinique, le TDAH n’est souvent pas évoqué chez l’adulte car
il ne se manifeste pas aussi bruyamment que chez l’enfant. Les symptômes
clés du TDAH décrits initialement chez l’enfant subissent des modifications
lors de l’entrée dans l’âge adulte. Les praticiens qui ont reçu un enseignement
universitaire sur le TDAH, assez récent en France, ont tendance à stigmati-
ser l’« hyperactivité » comme symptôme majeur, auquel on résume souvent ce
trouble, à défaut. Comme nous l’avons signalé plus haut, la présentation clinique
du TDAH à l’âge adulte est majoritairement différente de celle de l’enfant ou
de l’adolescent : les symptômes d’hyperactivité et d’impulsivité sont souvent
moins manifestes directement au travers du comportement, mais s’expriment
plus par la perception d’une agitation interne, d’un flot continu de pensées, une
incapacité à se détendre et mettre son esprit au repos, de jour comme de nuit,
une tendance à changer de façon impulsive de métier ou de relations affectives
etc. Longtemps condition sine qua non du TDAH, l’hyperactivité n’est plus requise
pour faire le diagnostic. L’hyperactivité est le symptôme l e plus susceptible de
s’améliorer ou de s’amender parallèlement à la maturation cérébrale. Certains
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adultes souffrant de TDAH continuent de présenter une hyperactivité motrice,


facile à repérer durant l’entretien : fréquence des frottements, des gesticulations,
des changements de position, des mouvements des jambes ou des bras, des
manipulations d’objets qui suggèrent que le patient est aux prises avec l’envie
de bouger. Une clé pour distinguer la fébrilité d’un patient qui est anxieux dans
un contexte médical (« effet blouse blanche ») versus l’agitation d’un patient
qui souffre de TDAH est que la première tend à diminuer au fur e t à mesure de
l’entretien, alors que la seconde tend à augmenter au fur et à mesure que la
nouveauté stimulante de l’entretien décroît. Le plus souvent, les manifestations
extériorisées et comportementales d’hyperactivité diminuent alors que les sensa-
tions subjectives persistent, ce qui donne à l’hyperactivité une expression plus
« cognitive » : le sujet a des sensations d’impatience motrice, des difficultés
50 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

pour se relaxer, parle trop, travaille de façon excessive, multiplie les projets, a
peu d’activités sédentaires.
Les adultes souffrant de TDAH ont des manifestations d’impulsivité qui égale-
ment ont évolué avec l’âge et les contraintes liées aux responsabilités qui y
sont liées. Les activités où taches qui requièrent de la patience sont de vrais
challenges : par exemple faire la queue dans un supermarché... Les achats et
décisions impulsifs sont habituels. L’impulsivité tend aussi à s’exprimer dans les
conversations. Certains adultes terminent les phrases des autres, sans parvenir à
s’en empêcher. Pire, ils peuvent dire des choses inappropriées socialement. L’im-
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pulsivité tend aussi à s’exprimer dans la conduite automobile, souvent qualifiée
de dangereuse par les patients eux-mêmes. Les bouchons sont un véritable fléau
pour ces patients ; ils ont un seuil de frustration plus bas que la moyenne, un
tempérament « soupe-au-lait » et font des colères fréquentes qui peuvent faire
retarder le diagnostic et orienter le praticien sur un trouble bipolaire. Ils peuvent
faire des tentatives inconsidérées ou inutiles pour atteindre leurs objectifs. Cette
impulsivité, associée au déficit à prêter une attention soutenue et à la tendance
à être distrait, fait des conducteurs souffrant de TDAH des dangers publics à
grande échelle sur la route. Les études ont montré qu’ils présentent statisti-
quement des taux plus élevés d’infractions du code de la route et d’accidents.
Par ailleurs, les accidents dans lesquels ils peuvent être impliqués sont plus
susceptibles d’être graves.
Si les symptômes d’hyperactivité et d’impulsivité s’atténuent avec le temps,
les troubles de l’attention en revanche paraissent de plus en plus au premier
plan. Ce sont les manifestations les plus gênantes et discriminantes du TDAH de
l’adulte, elles retentissent dans presque tous les domaines de la vie, du fait des
nombreuses contraintes et responsabilités dont familiales professionnelles et
civiques liées à l’âge. Les patients se plaignent de désorganisation au quotidien,
d’oublis pluriquotidiens, de vite s’ennuyer, de sensibilité accrue au stress, mais
également d’une labilité émotionnelle.

Les troubles attentionnels

Les troubles attentionnels et la distractibilité constituent les symptômes les


plus fréquents et les plus stables chez les adultes souffrant de TDAH. Leur
retentissement varie selon les exigences de l’environnement, professionnel et
familial. Les sujets souffrant de TDAH ont beaucoup de difficultés dans les
situations où la tâche est monotone et requiert un traitement séquentiel de
l’information, et/ou lorsqu’ils sont tenus de rester relativement passifs : les
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 51

conférences et les réunions de travail sont des exemples classiques de rêverie


non intentionnelle et de distraction par des stimuli externes ou internes non
pertinents. L’incapacité à maintenir une attention soutenue affecte fréquem-
ment d’autres activités essentielles, comme la lecture. Les adultes souffrant de
TDAH rapportent systématiquement le besoin de relire les pages car ils prennent
conscience au bas de la page ou à la fin du chapitre qu’ils ont lus qu’ils n’étaient
pas concentrés et par conséquent n’ont pas extrait le contenu de la lecture. Ces
difficultés attentionnelles génèrent une gêne sociale significative. Pourtant, Les
sujets souffrant de TDAH se montrent souvent très motivés et ambitieux quand
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ils s’engagent dans un projet, mais sa réalisation est une bataille du fait de leur
propension à être distrait et de leur profonde incapacité à organiser les tâches
qui comportent des étapes consécutives complexes. Ils peuvent débuter des
projets avec les meilleures intentions et un grand enthousiasme ; toutefois, ils
sont fréquemment incapables de le mener à terme. La procrastination est la règle,
perçue par les autres comme de la paresse ou manque de motivation. Par exemple,
une personne qui évite de payer son loyer ou de remplir sa déclaration d’impôt,
non par manque d’argent, mais en raison du manque d’attention soutenue pour
les détails et du besoin d’organisation que ces activités nécessitent. Ils peuvent
oublier leurs clés, leur portefeuille, leurs obligations et rendez-vous, beaucoup
plus souvent que les sujets ne souffrant pas de TDAH.

Les manifestations associées : la dysrégulation émotionnelle

Wender a souligné l’association entre le TDAH et la labilité émotionnelle aussi


bien que l’intolérance au stress, et les critères de l’Utah p our le TDAH incluent
des symptômes tels que la colère, l’instabilité de l’humeur, l’hyperréactivité
émotionnelle, comme aspects centraux du trouble (Wender, 1995). Depuis 1968,
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

les versions successives du DSM ont inclus les déficits dans la régulation des
émotions comme associés au TDAH. Barkley a proposé que les traits du déficit de
régulation émotionnelle soient considérés comme des symptômes cardinaux du
trouble plutôt que comme des symptômes associés. Cela concorde avec le concept
du TDAH en tant que trouble de l’autorégulation de l’affect aussi bien que de l’at-
tention, de la motivation et de l’éveil. Barkley a étudié la prévalence de tels traits
chez les adultes souffrant de TDAH (Barkley, 2010) : l’impatience, le fait d’être
prompt à se mettre en colère, d’être sensible à la frustration et facilement excité
par l’environnement, ainsi que l’hyperréactivité émotionnelle étaient retrouvés
chez plus de 60 % des adultes souffrant de TDAH versus moins de 15 % des sujets
témoins. Des découvertes similaires ont été identifiées chez un tiers des adultes
souffrant de TDAH participant à des essais cliniques avec l’atomoxetine, et chez
52 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

plus de la moitié des adultes avec le méthylphénidate (Reimherr et al., 2007).


Ces essais ont suggéré que les symptômes de dysrégulation émotionnelle sont
sensibles au traitement. Le TDAH présenté avec l’aspect de d ysrégulation émo-
tionnelle, représenterait un sous-type de TDAH, selon une analyse récente sur la
transmission familiale de la dysrégulation émotionnelle chez les adultes souffrant
de TDAH. Surman et al. (2013) ont analysé les données à partir d’une étude
cas-témoins sur un large échantillon communautaire d’adultes. Les comorbidités
chez les adultes souffrant de TDAH incluaient : le trouble bipolaire, l’épisode
dépressif majeur, un ou plusieurs troubles anxieux, la dépendance à l’alcool, à
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d’autres substances, au tabac, la personnalité dyssociale. L’association avec le
Trouble Oppositionnel avec Provocation (TOP) était également étudiée. 61 % des
sujets souffrant de TDAH rapportaient une dysrégulation émotionnelle intense
plus sévère que 95 % des sujets témoins. Celle-ci était associée au TDAH et à
de nombreuses comorbidités psychiatriques chez les patients souffrant de TDAH,
mais l’association de la dysrégulation émotionnelle avec le TDAH n’était pas
complètement imputable à un trouble psychiatrique comorbide actuel ou sur la
vie entière. La dysrégulation émotionnelle était également associée de façon
significative à une qualité de vie plus pauvre et à un plus mauvais ajustement
dans les relations, à un statut marital pauvre (taux de mariages plus bas et taux
de divorces plus élevé), et à un risque plus élevé d’accidents de la route et
d’arrestations.

L’altération significative du fonctionnement : le retentissement


dans la vie quotidienne

Les études longitudinales d’enfants souffrant de TDAH devenus adultes et les


études transversales de sujets adultes atteints, montrent que le TDAH de l’adulte
a un retentissement dans divers aspects de la vie quotidienne dans le domaine
scolaire et académique, la vie professionnelle, la vie familiale mais aussi le
domaine spécifique de la conduite automobile. Ces études rel èvent, comparati-
vement aux témoins, un niveau académique, universitaire et socio-économique
moins élevé, un moins bon ajustement psychosocial. Les diffi cultés d’organisa-
tion se répercutent sur la vie familiale, conjugale, amicale et se manifestent par
des changements répétés d’emploi avec un sentiment d’ennui, de conflit avec
l’autorité, des performances irrégulières, une mauvaise gestion financière, des
retards chroniques, des difficultés à mener à bien un projet personnel, à aller au
bout d’une tâche. Les enquêtes transversales décrivent également les difficultés
que rencontrent les adultes souffrant de TDAH dans leur vie familiale, leurs
relations sentimentales et conjugales et dans l’éducation des enfants. Barkley,
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 53

rapporte que vers 20 ans le taux de Maladies Sexuellement Transmissibles est


quatre fois plus élevé chez les sujets souffrant de TDAH et le nombre de nais-
sances chez les mères âgées de moins de 20 ans et souffrant de TDAH, également
quatre fois plus élevé. Sur le plan médico-légal, par rapport aux sujets témoins,
il s’agit d’une population impliquée plus fréquemment dans les infractions au
code de la route, les accidents de voiture, les incarcérations, les décès précoces.

Modalités et stratégies d’adaptation


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Un autre motif de retard de diagnostic chez les adultes est qu’ils ont développé
au cours du temps, souvent spontanément, des stratégies adaptatives qui per-
mettent de diminuer le retentissement fonctionnel professionnel et social du
trouble, et retarder l’hypothèse d’un TDAH. Ces « stratégies » peuvent prendre
des formes multiples : éviter les emplois de bureau, ou nécessitant une atten-
tion soutenue durable, ou nécessitant des qualités organisationnelles, ou trop
répétitifs et rébarbatifs... s’orienter vers des professions qui permettent le mou-
vement, les déplacements, le milieu extérieur, qui permettent voire valorisent
l’action, la réactivité, les contacts, la parole, des professions « indépendantes »
sans hiérarchie voire au contraire des professions très « encadrantes » comme
l’armée...
Au quotidien, d’autres stratégies sont utilisées ou délibérément mises en place,
le problème étant souvent le maintien de ces stratégies sur la durée : utiliser
un agenda, et penser à le consulter ; les smartphones remplacent de plus en
plus les agendas papiers, car toujours avec soi, utilisant des alarmes sonores
qui peuvent se répéter pour un même évènement, ou pour des événements
récurrents. Le conjoint quand il y en a fait aussi office d’agenda en rappelant
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

les « missions du jour », assurant l’organisation de la vie de famille, prenant


en charge les tâches demandant précision, attention soutenue : remplir les
documents administratifs, payer les factures, gérer les finances, faire des listes
pour les courses alimentaires, aller chercher les enfants à l’école ou les y amener
etc. Le sujet a appris, lui-même ou avec l’aide d’un tiers proche ou professionnel,
à automatiser certaines situations du quotidien : poser son trousseau de clés
et ou son smartphone toujours au même endroit, garder certains documents
toujours sur lui (cartes transport...) pour ne pas avoir à les chercher des heures...
Ils ont parfois développé une telle « anxiété d’oublier » que leur stratégie de
vérification devient envahissante, pouvant faire évoquer au praticien un Trouble
Obsessionnel Compulsif...
54 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Critères diagnostiques selon le DSM


!

Les apports du DSM-5 à la reconnaissance du TDAH chez l’adulte

En raison de la persistance de symptômes sévères et de leur retentissement chez


les sujets devenus adultes, l’évolution de la reconnaissance du diagnostic de
TDAH s’est avérée nécessaire. En effet, les études ayant appliqué strictement
l’interprétation des critères diagnostiques du DSM-III, -IV, et IV-TR rapportent un
taux bas à modéré de persistance du trouble à l’âge adulte (4-42 %). Par ailleurs,
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les experts croyaient initialement à une rémission du trouble après l’adolescence.
D’autres études ont rapporté des taux de persistance plus élevés (49 %-66 %) en
définissant le seuil diagnostique à partir de la présence d’une altération significa-
tive du fonctionnement ou bien d’une symptomatologie sévère par comparaison
à des groupes de témoins. Ces données suggèrent que les critères DSM établis
pour le diagnostic du TDAH durant l’enfance n’étaient pas qu antitativement et
qualitativement suffisants pour établir le diagnostic chez des sujets devenus
adultes. La cinquième édition de la classification de l’Association Américaine de
Psychiatrie (APA), le DSM-5 (2013), a révisé les critères de diagnostic pour le
TDAH. Le tableau suivant compare les modifications intervenues dans les critères
diagnostiques.
Le DSM-5 classe désormais le TDAH non plus parmi les « Troubles habituel-
lement diagnostiqués pendant la première enfance, la deuxième enfance ou
l’adolescence », comme le DSM-IV le faisait, mais parmi les « Troubles neurodé-
veloppementaux », soulignant des modalités d’expressions du trouble dépendant
du niveau de développement et l’âge du sujet. Des modifications importantes
en découlent qui concernent le diagnostic chez le grand adol escent et l’adulte
d’une part, et chez les patients ayant également un syndrome autistique d’autre
part.

Le type de symptômes

Le DSM-5 reprend les deux mêmes listes séparées de symptômes du DSM-IV


correspondant au trouble attentionnel et à l’hyperactivité-impulsivité. Pour amé-
liorer la fiabilité et élargir la validité des critères de TDAH chez les adultes, le
Groupe de Travail du DSM-5 avait initialement suggéré d’inclure 4 symptômes
d’impulsivité supplémentaires : agit sans réfléchir, est souvent impatient, a du
mal à faire les choses lentement et agit avec précipitation, trouve difficile de
résister aux tentations ou aux opportunités même lorsque cela implique de prendre
des risques. Une étude cas-témoins a montré que ces quatre nouveaux symptômes
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Tableau 3.1. Tableau comparatif des critères du DSM-IV et du DSM-5 pour le TDAH

DSM-IV DSM-5

A. Présence soit de (1), soit de (2) A. Un mode persistant d’inattention et/ou


d’hyperactivité-impulsivité qui interfère avec le fonctionnement
ou le développement, caractérisé par (1) et/ou (2)

1. Six des symptômes suivants d’inattention (ou plus) ont 1. Inattention. Six des symptômes suivants (ou plus) ont persisté
persisté pendant au moins 6 mois, à un degré qui est inadapté pendant au moins 6 mois, à un degré qui ne correspond pas au
et ne correspond pas au niveau de développement de l’enfant niveau de développement et qui a un retentissement négatif
direct sur les activités sociales et scolaires/professionnelles
Note : les symptômes ne sont pas seulement la manifestation
d’un comportement opposant, provocateur ou hostile, ou de
l’incapacité de comprendre les tâches ou les instructions. Chez
les grands adolescents et les adultes (17 ans ou plus), au moins
5 symptômes sont exigés

a. Souvent, ne parvient pas à prêter attention aux détails, ou a. Souvent, ne parvient pas à prêter attention aux détails, ou fait
fait des fautes d’étourderie dans les devoirs scolaires, le travail des fautes d’étourderie dans les devoirs scolaires, le travail ou
ou d’autres activités d’autres activités (par ex., néglige ou ne remarque pas des
détails, travail imprécis)

b. A souvent du mal à soutenir son attention au travail ou dans b. A souvent du mal à soutenir son attention au travail ou dans
les jeux les jeux (par ex., a du mal à rester concentré dans des
conférences, des conversations, ou la lecture de longs textes)

c. Semble souvent ne pas écouter quand on lui parle c. Semble souvent ne pas écouter quand on lui parle
personnellement personnellement (par ex., semble avoir l’esprit ailleurs, même en
l’absence d’une source de distraction évidente)
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic
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56

Tableau 3.1. (suite)

d. Souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient d. Souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient
pas à mener à terme ses devoirs scolaires, ses tâches pas à mener à terme ses devoirs scolaires, ses tâches
domestiques ou ses obligations professionnelles (cela n’est domestiques ou ses obligations professionnelles (par ex.,
T ROUBLE D ÉFICIT

pas dû à un comportement d’opposition, ni à une incapacité à commence des tâches mais se déconcentre vite et est
comprendre les consignes) facilement distrait)

e. A souvent du mal à organiser ses travaux ou ses activités e. A souvent du mal à organiser ses travaux ou ses activités (par
ex., difficulté à gérer des tâches comportant plusieurs étapes ;
difficulté à garder ses affaires et ses documents en ordre ; travail
brouillon, désordonné ; mauvaise gestion du temps ; incapacité
de respecter les délais)

f. Souvent, évite, a en aversion, ou fait à contrecœur les tâches f. Souvent, évite, a en aversion, ou fait à contrecœur les tâches
qui nécessitent un effort mental soutenu (comme le travail qui nécessitent un effort mental soutenu (par ex., e travail
scolaire ou les devoirs à la maison) scolaire ou les devoirs à la maison ; chez les grands
DE L’ATTENTION AVEC OU SANS

adolescents et les adultes, préparer un rapport, remplir des


formulaires, analyser de longs articles)

g. Perd souvent les objets nécessaires à son travail ou à ses g. Perd souvent les objets nécessaires à son travail ou à ses
activités (par ex., jouets, cahiers de devoirs, crayons, livres ou activités (par ex., matériel scolaire, crayons, livres, outils,
H YPERACTIVITÉ

outils) portefeuille, clés, documents, lunettes, téléphone mobile)

h. Souvent, se laisse distraire par des stimuli externes h. Souvent, se laisse distraire par des stimuli externes (chez les
grands adolescents et les adultes, il peut s’agir de pensées sans
rapport)

i. A des oublis fréquents dans la vie quotidienne i. A des oublis fréquents dans la vie quotidienne (par ex.,
corvées et courses ; chez les grands adolescents et les adultes,
rappeler des personnes au téléphone, payer des factures,
DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

honorer des rendez-vous)

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Tableau 3.1. (suite)

2. Six des symptômes suivants d’hyperactivité-impulsivité (ou 2. Hyperactivité et impulsivité : 6 des symptômes suivants (ou
plus) ont persisté pendant au moins 6 mois, à une degré qui plus) ont persisté pendant au moins 6 mois, à un degré qui ne
est inadapté et ne correspond pas au niveau de correspond pas au niveau de développement et qui a un
développement de l’enfant retentissement négatif direct sur les activités sociales et
scolaires/professionnelles Note : les symptômes ne sont pas
seulement la manifestation d’un comportement opposant,
provocateur ou hostile, ou de l’incapacité de comprendre les
tâches ou les instructions. Chez les grands adolescents et les
adultes (17 ans ou plus), au moins 5 symptômes sont exigés

a. Remue souvent les mains ou les pieds, ou se remue sur son a. Remue souvent les mains ou les pieds, ou se remue sur son
siège siège

b. Se lève souvent en classe ou dans d’autres situations où il b. Se lève souvent en classe ou dans d’autres situations où il est
est supposé rester assis supposé rester assis (par ex., quitte sa place en classe, au
bureau ou dans un autre lieu de travail, ou dans une autre
situation où il est censé rester en place)

c. Souvent, court ou grimpe partout, dans des situations où c. Souvent, court ou grimpe partout, dans des situations où cela
cela est inapproprié (Note : chez les adolescents ou les adultes est inapproprié (Note : chez les adolescents ou les adultes cela
cela peut se limiter à un sentiment d’impatience motrice) peut se limiter à un sentiment d’impatience motrice)

d. A souvent du mal à se tenir tranquille dans les jeux ou les d. Est souvent incapable de se tenir tranquille dans les jeux ou
activités de loisir les activités de loisir

f. Parle souvent trop f. Parle souvent trop

g. Laisse souvent échapper la réponse à une question qui n’est g. Laisse souvent échapper la réponse à une question qui n’est
pas encore entièrement posée pas encore entièrement posée (par ex., termine les phrases des
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic

autres ; ne peut pas attendre son tour dans une conversation)


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58

Tableau 3.1. (suite)

h. A souvent du mal à attendre son tour h. A souvent du mal à attendre son tour (par ex., dans une
queue)
T ROUBLE D ÉFICIT

i. Interrompt souvent les autres ou impose sa présence (par i. Interrompt souvent les autres ou impose sa présence (par ex.,
ex., fait irruption dans les conversations ou dans les jeux) fait irruption dans les conversations, les jeux ou les activités ;
peut se mettre à utiliser les affaires des autres sans le demander
ni en recevoir la permission ; chez les adolescents ou les
adultes, peut faire irruption dans les activités des autres ou s’en
charger)

B. Certains des symptômes d’hyperactivité-impulsivité ou B. Plusieurs symptômes d’inattention ou


d’inattention ayant provoqué une gêne fonctionnelle étaient d’hyperactivité-impulsivité étaient présents avant l’âge de
présents avant l’âge de 7 ans. 12 ans.
DE L’ATTENTION AVEC OU SANS

C. Présence d’un certain degré de gêne fonctionnelle liée aux C. Certains des symptômes d’inattention ou
symptômes dans deux ou plus de deux types d’environnement d’hyperactivité/impulsivité sont présents dans deux ou plus de
H YPERACTIVITÉ

différents (par exemple : école, travail, maison) deux types d’environnement différents (ex : à la maison, l’école,
ou le travail ; avec des amis ou des relations ; dans d’autres
activités)
D. Mise en évidence d’une altération cliniquement significative D. On doit clairement mettre en évidence une altération
du fonctionnement social, scolaire ou professionnel cliniquement significative du fonctionnement social, scolaire ou
professionnel et de la qualité de vie
E. Les symptômes ne surviennent pas exclusivement au cours E. Les symptômes ne surviennent pas exclusivement au cours
du trouble envahissant du développement d’une schizophrénie d’une schizophrénie ou d’un autre trouble psychotique et ils ne
ou d’un autre trouble psychotique et ils ne sont pas mieux sont pas mieux expliqués par un autre trouble mental (trouble
DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

expliqués par un autre trouble mental (trouble thymique, trouble thymique, trouble anxieux, trouble dissociatif, trouble de la
anxieux, trouble dissociatif ou trouble de la personnalité). personnalité, intoxication par une prise de substance ou son
arrêt).

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Tableau 3.1. (suite)

Sous-types cliniques Sous-types cliniques


Déficit de type mixte ou combiné : les critères Al et A2 sont Condition mixte ou combinée : les critères Al et A2 sont
satisfaits pour les 6 derniers mois satisfaits pour les 6 derniers mois

Déficit de type « inattention prédominante » : le critère Al est Condition « inattention » prédominante : le critère Al est satisfait,
satisfait pour les 6 derniers mois mais pas le critère A2 le critère A2 n’est pas satisfait et trois ou plus symptômes du
critère A2 sont présents pour les 6 derniers mois
Déficit de type « hyperactivité/impulsivité prédominante » : le Condition « inattention » restrictive : le critère AI est satisfait
critère A2 est satisfait pour les 6 derniers mois mais pas le mais pas plus de deux symptômes du critère A2 sont satisfaits
critère Al pour les 6 derniers mois
Condition « hyperactivité/impulsivité » prédominante : le critère
A2 est satisfait pour les 6 derniers mois mais pas le critère Al
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic
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60 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

ne n’étaient pas significativement associés au TDAH, mais que c’étaient les symp-
tômes d’inattention qui étaient les meilleurs prédicteurs du diagnostic de TDAH
et de son retentissement (Matte et al. 2015). Il est aussi important de noter
qu’il n’y avait pas moins d’association entre les 22 symptômes du DSM-5 avec
le diagnostic de TDAH qu’avec les comorbidités, contrairement à ce qu’avaient
rapporté Kessler et al., en 2010 (Kessler et al., 2010), qui avaient identifié un
groupe de symptômes davantage associé au TDAH qu’à un trouble comorbide.
Barkley et al. avaient rapporté des résultats similaires au sein des critères DSM-
IV : un seul symptôme d’inattention (facilement distrait) était suffisant pour
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discriminer les adultes TDAH des sujets témoins dans une étude réalisée à partir
d’un échantillon communautaire à l’Université du Massachusetts (Barkley et al.,
2008). Un ensemble de trois symptômes d’inattention (ne parvient pas à prêter
attention aux détails, a du mal à soutenir son attention, ne parvient pas à mener
à terme ce qu’il a entrepris) et un symptôme d’hyperactivité (parle fort) étaient
suffisants pour discriminer les cas TDAH des cas témoins dans un échantillon
clinique. Dans la même étude, les cinq symptômes de TDAH qui présentaient les
plus fortes associations avec un retentissement clinique, quel qu’il soit, étaient
les symptômes d’inattention.
Le DSM-5 remplace les trois sous-types cliniques du DSM-IV (inattentif pré-
dominant, hyperactif/impulsif prédominant, mixte) par des présentations ou
conditions qui répondent aux mêmes critères. Le libellé des 18 symptômes
principaux du TDAH est pratiquement inchangé dans le DSM-5. Les symptômes
sont toujours divisés en deux listes, comprenant 9 symptômes de troubles atten-
tionnels (A1.a-i) et 9 symptômes d’hyperactivité/impulsi vité (A2.a-i), mais ils
sont explicités dans le DSM-5 par des exemples qui s’appliquent aussi aux grands
adolescents et aux adultes. Au plan rédactionnel, le DSM-5 donne plus d’exemples
détaillés pour illustrer certains critères ; par exemple pour les difficultés d’or-
ganisation (critère A1.e.), il précise : difficulté à gérer des tâches comportant
plusieurs étapes ; difficulté à garder ses affaires et ses documents en ordre ; travail
brouillon, désordonné ; mauvaise gestion du temps ; incapacité de respecter les
délais. Les formulations spécifiques à l’adulte, rares dans le DSM-IV, deviennent
plus nombreuses dans le DSM-5. Dans les deux versions, l’hyperactivité peut
prendre la forme d’un sentiment de nervosité (« sentiment subjectif d’impatience
motrice »), et d’une difficulté à s’engager dans des activités calmes et séden-
taires. En complément, le DSM-5 mentionne plus d’activités ou de responsabilités
propres aux grands adolescents et aux adultes, et liées à la vie professionnelle,
telles que les conférences et les réunions de travail, la gestion du temps et des
rendez-vous, les factures à payer, la lecture ou la rédaction de documents et de
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 61

rapports longs, les décisions impulsives concernant un emploi, etc. Le DSM-5


mentionne également que la distraction causée par des « stimuli externes »
peut aussi l’être par des pensées sans rapport (unrelated thoughts) chez le grand
adolescent et l’adulte.

L’âge d’apparition de la maladie

Dans le DSM IV, la présence requise de symptômes invalidants de TDAH avant


l’âge de 7 ans était souvent difficile à établir rétrospectivement chez les adultes.
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Le DSM-5 remonte le plafond à 12 ans, et n’exige plus la nécessité d’une gêne
fonctionnelle antérieure. Kessler et al. dans une étude portant sur la prévalence
vie entière des troubles mentaux, ont montré que seulement la moitié des sujets
ayant reçu un diagnostic de TDAH à l’âge adulte a indiqué avoir présenté les
symptômes avant l’âge de 7 ans, tandis que 95 % d’entre elles se souvenaient
avoir présenté des symptômes avant l’âge de 12 ans (Kessler et al., 2005). Ceci
a produit une prévalence élevée du TDAH sur la vie entière (8 %). On pourrait
soutenir que cette étude démontre que l’augmentation de l’âge de déclaration
de la maladie augmente la prévalence du TDAH chez les adultes en élargissant
les seuils de la pathologie. Toutefois, cette modification n’est pas susceptible
d’accroître la prévalence du TDAH chez les enfants car très peu d’entre eux
atteints de TDAH voient se manifester leurs symptômes après l’âge de 12 ans
(Polanczyk et al., 2010).

Nombre de symptômes requis

Le DSM-5 a conservé pour l’enfant et l’adolescent, le minimum établi dans le


DSM-IV de 6 symptômes pour valider le déficit d’attention ou bien l’hyperacti-
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vité/impulsivité dans les deux listes respectivement. En revanche, pour ne pas


sous-diagnostiquer les sujets âgés de plus de 17 ans le DSM-5 réduit le nombre
de symptômes requis à 5 seulement. En effet, les études antérieures avaient
rapporté que, malgré une diminution des symptômes du TDAH à l’âge adulte,
le retentissement n’est pour autant pas diminué. Dans leur étude cas-témoins,
Matte et al. ont cherché à évaluer quel doit être le nombre de symptômes dans
le DSM-5 pour apprécier le retentissement chez les adultes (Matte et al, 2015).
Ce travail a montré que, mieux que l’utilisation des quatre nouveaux symptômes
d’impulsivité proposés par le Groupe de Travail, la seule limitation du nombre
de symptômes requis dans le DSM-IV était la meilleure manière d’apprécier le
retentissement clinique du trouble. Ces données concordent avec les études pré-
cédentes qui suggéraient que les critères du DSM-IV, avec un seuil diagnostique
62 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

à 6 symptômes, appréhendaient seulement la part la plus extrême des cas de


TDAH adultes. Néanmoins, la question se pose de perdre en spécificité ce que
l’on gagne en sensibilité, et le risque d’augmenter le nombre de faux positifs et
la prévalence du trouble.

Retentissement et sévérité

Alors que le critère C du DSM-IV exigeait que quelques « symptômes » pouvant


entraîner des déficiences dans au moins deux situations distinctes soient pré-
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sents pour satisfaire les critères diagnostiques, le DSM-5 déclare que « plusieurs
symptômes doivent être présents dans au moins deux situations distinctes ».
Même si le texte révisé exige la présence d’un plus grand nombre de symptômes,
les déficiences découlant de ces symptômes ne sont plus nécessaires. Il n’est
pas certain que ces changements subtils apportés au libellé auront un impact en
pratique clinique. Concernant ces deux situations distinctes, cela peut impliquer
que deux sources différentes constatent les mêmes symptômes (enseignants et
parents) ou bien que ces symptômes soient observés dans deux cadres différents
(domicile et école).
Selon le DSM-5, la sévérité actuelle doit désormais être spécifiée selon trois
degrés. Le TDAH léger est défini comme le fait d’avoir peu de symptômes au-delà
de ceux requis pour faire le diagnostic voire aucun. Inversement, le TDAH sévère
exige beaucoup de symptômes en plus de ceux requis pour faire le diagnostic,
ou bien plusieurs symptômes particulièrement sévères, entraînant une altération
marquée du fonctionnement social ou professionnel.
Les personnes souffrant d’un TDAH modéré se situent entre ce s deux extrêmes,
soit en fonction du nombre de symptômes soit en fonction du degré de déficience.
Ces définitions manquent de précision et ne tiennent pas compte du trouble
chez l’adulte, sévère en lui-même du fait de sa persistance. Par ailleurs, le DSM-5
spécifie « en rémission partielle » lorsque les critères complets ont été remplis
auparavant et ne le sont plus pour les 6 derniers mois, et lorsque des symptômes
continuent à entraîner une altération du fonctionnement social, scolaire ou
professionnel. Il est important de préciser que cette forme « résiduelle » ne
s’apparente pas forcément à un trouble en rémission car si la plupart des adultes
ne présentent pas le nombre symptômes requis, pour la majorité d’entre eux le
retentissement fonctionnel du trouble demeure parfois important.
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 63

Comment faire le diagnostic de TDAH chez l’adulte ?


!

En dehors des sujets ayant reçu un diagnostic de TDAH durant l’enfance et en


quête d’une continuité de soins, de plus en plus d’adultes n’ayant jamais reçu
de diagnostic viennent consulter. Les motifs de consultation sont toujours un
peu les mêmes :
➙ Certains se sont reconnus dans les descriptions qu’ils ont pu lire, entendre ou
voir dans les médias.
➙ D’autres ont dans leur entourage un parent, un enfant ou un ami traité pour
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ce trouble. Certains professionnels, qui ont participé au diagnostic d’un enfant
ou d’une fratrie, suggèrent aux parents un « dépistage » mais il arrive que
des parents se reconnaissent dans le tempérament de leur enfant.
➙ D’autres encore certains souffrent d’un trouble comorbide tel qu’un abus de
substance, une dépression, un trouble anxieux... Dans ces circonstances, il
n’est pas facile de penser au diagnostic de TDAH qui n’est pas au premier plan
ni de l’écarter face à un sujet qui attribue déjà ses symptômes à un TDAH à
l’origine de la consultation. En effet, le diagnostic peut être attendu, comme
une explication qui viendrait « encadrer » les souffrances du sujet.
➙ Une plainte de l’entourage (parent, conjoint, collègues, amis) est parfois à
l’origine de la consultation. Il peut s’agir de jeunes adultes conduits par leurs
parents inquiets du fonctionnement de leur enfant. La question d’un trouble
attentionnel est souvent intriquée à la problématique scolaire et à la question
de la réussite académique. Il peut aussi s’agir d’un(e) conjoint(e) qui se plaint
du fonctionnement du sujet, qu’il a toujours pourtant connu ainsi, qui ne
participe pas ou peu à l’organisation du quotidien, à la vie de famille, à la
gestion du ménage et des enfants. Certains de ces sujets peuvent répondre à
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la plainte de leur entourage par l’inhibition, se laissant guider par le désir de


leurs parents ou de leur conjoint(e). Le soignant doit demeurer vigilant face
à la demande familiale tout comme face à la passivité du sujet qui vient en
consultation parfois pour un trouble qu’il ne présente pas.

La démarche clinique

Le TDAH chez l’adulte a une prévalence élevée par rapport aux autres troubles
psychiatriques. Sa recherche doit donc être systématiquement incluse dans les
évaluations diagnostiques de première ligne. Outre le recueil des antécédents
personnels médicaux et psychiatriques et des antécédents psychiatriques fami-
liaux (avec notamment la recherche d’un TDAH y compris chez les enfants du
64 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

patient), la recherche d’abus de substances, ainsi que la prise d’un traitement


en cours, pour pouvoir distinguer le TDAH des autres troubles psychiatriques, les
médecins doivent prêter attention à certains aspects cliniques.
La démarche clinique qui permet de poser un diagnostic de TDAH doit répondre
aux questions suivantes :
" les symptômes cibles sont-ils présents à l’âge adulte ?
" les symptômes cibles étaient-ils présents durant l’enfance ?
" existe-t-il une altération significative du fonctionnement ?
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" les symptômes sont-ils mieux expliqués par les circonstances environnemen-
tales ou un autre trouble psychiatrique ?
" existe-t-il un TDAH chez les apparentés ?

La recherche de symptômes cibles à l’âge adulte : outils d’évaluation

Pour le dépistage ou l’évaluation du TDAH adulte, de nombreu x outils diagnos-


tiques et instruments de cotation des symptômes ont été spécifiquement dévelop-
pés comme l’ACDS (Adult ADHD Clinical Diagnostic Scale v1.2), la Conners’Adult
ADHD Diagnostic Interview for DSM IV (CAADID), ou encore la DIVA 2.0 etc. Nous
avons explicité une partie seulement de ces outils, tous empiriquement validés
et largement cités dans des articles à comité de lecture (pour revue voir Adler
Spencer et Wilens 2015).
L’objectif de ces échelles et de rechercher les symptômes de TDAH décrits pré-
cédemment, leur retentissement ainsi que les stratégies adaptatives mises en
place par le sujet. Les modifications récentes des critères DSM et l’amélioration
des connaissances du trouble chez l’adulte laissent à penser que les échelles
d’évaluation sont elles aussi amenées à évoluer. Nous avons choisi de développer
certains de ces instruments.

L’ASRS v1.1
Parmi les instruments standardisés actuellement utilisés pour évaluer les adultes
souffrant de TDAH, l’ASRS v1.1 (Adult ADHD Self-Report Scale version 1.1) est un
outil développé par l’OMS. C’est une échelle d’auto-évaluation qui recherche les
symptômes les plus fortement prédictifs de la présence d’un TDAH chez l’adulte :
quatre questions portent sur les problèmes d’attention, et deux autres concernent
les symptômes d’hyperactivité/impulsivité. Les symptômes significatifs appa-
raissent dans des cases grisées et leur fréquence est estimée par les termes
« parfois » ou « souvent ». Si au moins 4 points apparaissent dans les cases
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 65

grisées, le patient a des symptômes qui correspondent de très près au TDAH.


Cet outil est assez sensible, spécifique ainsi que rapide et facile à administrer
(environ une minute). Il est utile surtout en termes de dépistage dans les
structures de soins de premier niveau, mais ce n’est pas un outil diagnostique.
Celui-ci sera éventuellement confirmé dans des services spécialisés après une
évaluation plus exhaustive.
D’autres échelles font intervenir également des proches, souvent des membres
de la famille qui connaissent bien le sujet. Elles évaluent le TDAH chez les
adultes en utilisant un langage spécifique à l’adulte et contextuel. Ces instru-
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ments diffèrent entre eux selon qu’ils évaluent seulement les symptômes actuels,
comme la Conners’Adult ADHD Rating Scale (CAARS) ou incluent le fonction-
nement exécutif, comme la Brown Attention Deficit Disorder Rating Scale for
Adults (BADDRS) et les symptômes antérieurs. Les échelles qui recueillent les
symptômes actuels sont utiles dans l’évaluation de la réponse au traitement en
cours, pharmacologique et/ou psychothérapeutique.

Échelle de Brown
Les échelles BADDRS (Brown Attention Deficit Disorder Rating Scale) sont
construites pour évaluer le TDAH au travers des perturbations des fonctions
exécutives qui font son lit. L’échelle pour adulte (plus de 18 ans) comporte
40 questions déterminant ces déficits de fonctionnement exécutif : organiser,
établir les priorités, s’activer à la tâche ; se concentrer, maintenir et transférer
l’attention sur les tâches ; réguler la vigilance, maintenir l’effort et la vitesse
de traitement des informations ; gérer la frustration et moduler les émotions ;
utiliser la mémoire de travail et accéder au souvenir. La passation dure entre
10 et 20 minutes et se fait dans le cadre d’un entretien orient é semi-structuré
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

qui implique également l’évaluation par des proches (parents, conjoint...) du


sujet. Cette échelle produit des scores « normatifs » qui indiquent la probabilité
d’un TDAH. L’obtention de ces scores passe par de logiciels disponibles dans le
commerce.

Échelle de Conners
Les échelles CAARS (Conners’Adult ADHD Rating Scale) sont basées sur le même
principe que les échelles de Conners couramment utilisées chez l’enfant ou l’ado-
lescent. Elles ont été adaptées aux problématiques adultes et à son contexte
environnemental. Comme pour la BADDS, elle se passe dans le cadre d’un entre-
tien orienté. Elles évaluent les domaines suivants : attention/mémoire ; impulsi-
vité/labilité émotionnelle ; hyperactivité/agitation ; problèmes avec le concept
66 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de soi. Il existe une version d’auto-évaluation pour le sujet lui-même, et une


version d’hétéro évaluation pour les « observateurs », en général des proches
qui connaissent bien le sujet. Il existe des versions abrégées (passation environ
10-15 minutes) et longues (66 items, durée environ 30 minutes). Les résultats
sont comparés à des données normatives (l’achat du logiciel de traitement des
données est recommandé pour son utilisation).

Échelle de Wender-Utah
La WURS (Wender Utah Rating Scale), initialement développée pour la recherche
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et aujourd’hui utilisée dans le dépistage du TDAH. À la différence de la BADDRS
et de la CAARS, elle est entièrement gratuite. C’est une autoévaluation par
61 questions (10 à 15 minutes) dont 25 portant sur les symptômes actuels du
trouble, mais qui a également une dimension rétrospective, recherchant les symp-
tômes cibles durant l’enfance et les manifestions émotionnelles fréquemment
associées. Cet outil évalue les comportements dans six catégories : hyperactivité,
déficits d’attention, problèmes de comportement à l’école, impulsivité, excitabi-
lité excessive et humeur. Chaque question a 5 réponses possibles avec un score
allant de 0 à 4 points. En utilisant un score limite de 46 pour uniquement les
25 questions portant sur le TDAH, il a été montré que cette éch elle permettait
d’identifier 86 % des patients atteints du TDAH. Elle peut donc aider au diag-
nostic mais manque de spécificité. Dans la mesure du possible, la confirmation
de l’existence des symptômes durant l’enfance par un informateur extérieur est
utile. L’interrogatoire des membres de la famille améliore nettement les chances
du médecin d’identifier correctement le TDAH ; en effet, l’entourage se rappelle
souvent de troubles du fonctionnement que le patient échoue à reconnaître
ou a oublié. Il est donc important de connaître l’histoire développementale du
sujet : comportement et tempérament durant l’enfance, à l’école et à la maison,
bulletins scolaires, commentaires des professeurs sur le comportement et le
niveau de performance à l’école, redoublement, renvoi et/ou expulsion scolaire,
ainsi que le parcours et le niveau académique obtenu.
Une étude australienne cas-témoins récente (Breda et al. 2015), a évalué l’intérêt
du recueil d’information auprès d’un membre de l’entourage pour l’évaluation des
symptômes de TDAH durant l’enfance. Ils ont évalué chez 449 adultes présentant
des symptômes de TDAH (critères DSM-IV) l’apport d’informa tion provenant de
tiers sur la présence de symptômes de TDAH durant l’enfance. Parmi les patients,
on notait une concordance entre les dires du patient et ceux du tiers dans
277 cas ; dans 172 cas, il n’y avait pas de concordance. Étaient comparés les
profils démographiques, cliniques ainsi que la réponse au traitement entre les
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 67

deux groupes pour évaluer la pertinence de l’apport d’information provenant


d’un tiers sur la question spécifique des symptômes de TDAH durant l’enfance.
Les résultats montraient que les deux groupes de patients souffrant de TDAH
présentaient des taux plus élevés de comorbidités (Trouble Oppositionnel avec
Provocation, Troubles de Conduites, Abus de Substance, Troubles Bipolaires) et
de retentissement fonctionnel que les sujets témoins, et ce de façon significative.
L’absence de concordance entre l’auto-évaluation par le patient et le rapport
par un tiers des symptômes de TDAH présents durant l’enfance était retrouvée
dans 38 % des cas. Les deux groupes de patients souffrant de TDAH avaient
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des profils similaires dans la réponse au traitement, l’existence de comorbidités
et peu de différences étaient détectées entre les deux group es sur les mesures
d’altération du fonctionnement. Bien que les informations recueillies auprès
d’un tiers joue un rôle dans le diagnostic de TDAH chez les enfants, elle ne
semble pas apporter de valeur supplémentaire dans l’évaluation des symptômes
de TDAH durant l’enfance chez des adultes qui ont répondu eux-mêmes à une
auto-évaluation de l’histoire du trouble dans le cadre du bilan diagnostique.

Diagnostish Interview Voor Adhd (diva 2.0)


La DIVA et un entretien structuré développé pour le TDAH de l’adulte aux Pays-
Bas par l’équipe experte de La Haye (Kooij JJS, 2012). Cet outil a été traduit et
validé dans 20 langues, dont en français. Il est facile d’utilisation, et disponible
gratuitement sur Internet. Il est construit autour des 18 critères DSM-IV du TDAH
et évalue la présence ou l’absence de chacun de ces critères, dans l’enfance et à
l’âge adulte en s’appuyant sur des exemples de situations concrètes et réalistes
à la fois pour les comportements actuels et aussi passés (dans l’enfance). Ces
exemples sont basés sur des descriptions courantes de comportements faites par
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

des patients adultes eux-mêmes. Par ailleurs, des exemples de retentissement


habituellement associés aux symptômes sont également proposés, dans cinq
domaines de la vie quotidienne : travail/scolarité, relations aux autres/vie fami-
liale, interactions sociales, temps libre/loisirs/divertissements, estime de soi.
Dans la mesure du possible, il est très important que l’entretien de passation de
la DIVA soit réalisé et coté non seulement avec le patient, mais aussi en présence
de son conjoint et/ou proche, voire d’un membre de sa famille, afin de valider
au mieux les informations rétrospectives et collatérales. La durée de passation
de la DIVA est estimée entre une heure et une heure et demie. La DIVA 2.0 ne
couvre cependant pas les troubles psychiatriques comorbides les plus fréquents
du TDAH, dont on sait par ailleurs qu’ils sont présents chez environ 75 % des
sujets présentant un TDAH. Il convient donc de réaliser systématiquement une
68 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

recherche clinique et anamnestique de ces troubles associés potentiels, et d’y


apporter au besoin une proposition thérapeutique spécifique intégrant un projet
global de soins.

Un trouble neurodéveloppemental qui n’apparaît pas de novo


à l’âge adulte ?

Dans tous les cas, le diagnostic de TDAH de l’adulte implique une histoire déve-
loppementale en faveur du trouble, ce qui n’est pas toujours facile à mettre en
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évidence. L’évaluation rétrospective est basée sur les souvenirs du sujet, parfois
des informateurs extérieurs (surtout les parents) lorsque cela est possible, et sur
les bulletins scolaires retrouvés. La possibilité d’une relecture des comportements
de l’enfance au regard du diagnostic doit être considérée. Enfin si l’on retrouve
dans la majorité des cas une histoire développementale en faveur du trouble,
le critère d’âge de début (augmenté à 12 ans par le DSM-5) n’est pas toujours
respecté. En effet, les symptômes existent parfois de façon infraclinique, avec
une expression variable en fonction des activités et des responsabilités, accrues
à l’âge adulte. Dans une étude très récente, Moffit et al. posent une question fon-
damentale : est-ce que le TDAH de l’adulte est un trouble neurodéveloppemental
qui débute durant l’enfance (Moffit et al., 2015) ? Ils ont effectué une analyse
rétrospective et prospective à partir d’une étude longitudinale sur une cohorte
de naissance de 1037 sujets suivis jusqu’à l’âge de 38 ans, issus d’un échantillon
communautaire. De façon simultanée, les parents et les enseignants ont identifié
61 sujets (soit 6 % de l’échantillon) présentant les critères du DSM III du TDAH
durant l’enfance. À l’âge de 38 ans, 31 sujets (3,1 %) présentaient les critères
du DSM-5 pour un TDAH, selon leurs auto-observations et celles de l’entourage.
Ces prévalences correspondent à celles qui étaient attendues. Cependant, les
deux groupes de sujets atteints n’étaient pas superposables puisque seulement
3 sujets présentaient le trouble depuis l’enfance jusqu’à l’âge adulte.
Une équipe (Castellanos, 2015) a commenté cette étude. Ce manque de conti-
nuité presque total a deux composantes : la première, c’est que seulement 5 %
environ des enfants qui présentaient un TDAH durant l’enfance ont continué de
présenter le trouble selon les critères du DSM-5 à l’âge adulte, bien qu’en tant
que groupe ils montraient toujours des altérations du fonctionnement. Moffit et
al. (2015) suggèrent que ce taux décroissant de remplissage des critères diagnos-
tiques à l’âge adulte concorde avec la littérature existante et limitée à ce sujet.
Par ailleurs, des différences inévitables entre les échant illons communautaires
et les échantillons cliniques peuvent justifier les écarts de taux de persistance
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 69

du trouble à l’âge adulte, ce qui vient confirmer la lacune nosologique des


symptômes résiduels de TDAH à l’âge adulte.
La deuxième composante, inattendue, est l’émergence d’un groupe de sujets qui
présentent tous les critères du DSM-5 pour le TDAH excepté celui concernant la
présence du trouble avant l’âge de 12 ans. Environ 90 % de ces sujets étaient
des cas de novo, ne présentant pas de critères du trouble durant l’enfance, et
ils différaient en de multiples façons des sujets qui présentaient le trouble
dans l’enfance. Ces derniers en effet, montraient des altérations neurocognitives
durant l’enfance qui persistaient en grande partie à l’âge adulte, alors que
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les adultes ayant « déclaré » un TDAH à l’âge adulte, possédaient des facultés
intellectuelles générales comparables aux sujets témoins ne souffrant pas de
TDAH, avec des altérations neurocognitives négligeables durant l’enfance et
l’âge adulte. Ces deux groupes de sujets adultes souffrant de TDAH rapportaient
des difficultés cognitives subjectives marquées à l’âge adu lte et montraient de
façon manifeste une altération du fonctionnement psychosocial avec des revenus
moins élevés, des taux de solde créditeur plus bas, des problèmes de trésorerie,
des difficultés en matière d’épargne, davantage de soutien administratif et de
demandes d’indemnités auprès des assurances. Qu’est-ce que cela signifie ? La
possibilité qu’il s’agisse d’une simulation est exclue en raison du manque de
bénéfices secondaires. Les prodromes d’une pathologie démentielle semblent
peu probables à l’âge de 38 ans. La possibilité que ces symptômes soient la
conséquence de troubles liés à l’abus de substances ne peut pas être écartée
mais apparaît insuffisante sachant que 55 % des adultes souff rant de TDAH ne
présentent pas d’autre diagnostic actuel à l’âge de 38 ans. La dernière possibilité
est que le TDAH de l’adulte soit un véritable trouble autonome considéré à
tort comme un trouble neurodéveloppemental en raison des similarités avec le
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TDAH chez l’enfant. L’acceptation d’une entité nouvelle requiert un caractère


reproductif dans d’autres études longitudinales prospectives. Toutefois, dans
l’étude longitudinale new-yorkaise, les sujets du groupe témoin qui avaient été
recrutés initialement à l’adolescence, ont fait l’objet d’une nouvelle évaluation
diagnostique en double aveugle entre trente et quarante ans. Les critères pour
un TDAH, selon le DSM-IV-TR, ont été retrouvés dans 29 % des cas (soit 23
sur 80 sujets) et le trouble a été qualifié de non spécifié en raison du critère
manquant d’existence du trouble durant l’enfance. Leur structure cérébrale ne
différait pas de façon significative de celle des 57 sujets témoins restants, alors
qu’elle différait dans plusieurs régions cérébrales de celle des 17 sujets adultes
présentant un TDAH persistant depuis l’enfance. Ainsi, d’autres mécanismes
pourraient jouer un rôle, malgré le recoupement symptomatique. Des études
70 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

récentes chez des primates ont montré que la mémoire de travail était sensible à
la détérioration liée à l’âge, ce qui soulève la question de savoir si d’autres fonc-
tions exécutives comme l’inhibition de la réponse sont également vulnérables. En
dépit des résultats neuropsychologiques concernant les évaluations subjectives
des fonctions exécutives, les études examinant les profils neurobiologiques,
neuropsychologiques et fonctionnels de sujets adultes présentant les critères
d’un TDAH avec l’absence du trouble durant l’enfance pourraient mettre à jour
un nouveau syndrome, accessible à un traitement, et ses mécanismes associés.
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Un trouble familial

De nombreuses études ont mis en évidence un risque accru de TDAH chez les
membres de la famille d’enfants souffrant de TDAH. Dans une revue exhaustive,
Franke et al. (2012) ont rapporté plusieurs résultats :
➙ Les études de jumeaux montrent une plus grande concordance pour les symp-
tômes de TDAH entre monozygotes qu’entre dizygotes et par rapport aux
membres biologiquement apparentés de la famille d’enfants souffrant de TDAH
adoptés, moins de membres de la famille adoptive souffrent de TDAH et/ou
de troubles associés. Ces études ont permis d’établir un taux d’héritabilité de
60 à 80 %.
➙ Les études familiales sur les adultes souffrant de TDAH sont plus rares ; elles
suggèrent cependant que la persistance du TDAH pourrait être associée à des
facteurs étiologiques familiaux plus puissants. Le TDAH serait plus fréquent
parmi les membres de la famille d’adolescents et d’adultes « persistants » que
parmi les membres de la famille d’enfants souffrant de TDAH. Ainsi, le risque
de TDAH serait deux à huit fois plus élevé chez les parents d’enfants souffrant
de TDAH et il existerait un taux très élevé, de 41 à 57 % chez les apparentés
d’adultes souffrant de TDAH.
➙ Le TDAH a une forte composante génétique, avec une héritabilité estimée de
80 % ; ceci suggère que les facteurs génétiques seraient responsables à 65 %
de la variance phénotypique. Toutefois, seulement quelques gènes associés
au TDAH ont été identifiés, la plupart dans des études de gènes candidats,
et ces gènes représentent 3 % seulement de la variation phénotypique ; les
études d’associations pangénomiques n’ont pas identifié d’autres variantes
génétiques communes. Ceci suggère que de nombreuses variantes génétiques
communes non identifiées avec des effets mineurs, des interactions gène-
environnement ou gène-gène, des variantes rares, ou une combinaison de ces
facteurs jouent un rôle déterminant dans la cause génétique du TDAH.
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 71

Un trouble qui répond aux psychostimulants chez l’adulte aussi

Les essais pharmacologiques, randomisés et contrôlés chez les adultes souffrant


de TDAH ont montré de façon systématique des effets positifs à court terme,
incluant la réduction du nombre de symptômes et l’amélioration du fonctionne-
ment au quotidien. Toutefois, la preuve d’effets positifs à plus long terme est
limitée et provient la plupart du temps d’études d’observation qui ont montré des
bénéfices dans le fonctionnement, l’estime de soi et la performance au travail.
Une étude suédoise basée sur des registres (qui incluait des sujets hospitalisés)
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a montré une réduction du risque de la criminalité chez les su jets souffrant de
TDAH qui recevaient un traitement par rapport à ceux qui n’étaient pas traités
(Lichenstein et al., 2012). Bien qu’il existe un consensus en faveur d’un traite -
ment nécessaire et continu pour le TDAH, peu d’essais randomisés ont évalué
l’efficacité à long terme (au-delà de six mois) du traitement médicamenteux chez
les adultes souffrant de TDAH. La mise en évidence des bénéfices est rendue
difficile par la faible adhésion au traitement, la prise discontinue du traitement
et l’existence de comorbidités psychiatriques. Une disparition des bénéfices
après une interruption du traitement de plusieurs mois peut suggérer que la
médication reste utile.

Les fonctions exécutives

Les adultes souffrant de TDAH rapportent des difficultés liées aux fonctions
exécutives, incluant le contrôle de l’attention, davantage qu’une hyperactivité
comportementale ou une impulsivité. Dans une revue qualitative de plusieurs
études neuropsychologiques, Woods et al. (2002) ont trouvé que la majorité
des adultes souffrant de TDAH présentaient une altération significative sur au
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

moins une mesure de fonction exécutive. Les tests les plus fiables étaient ceux
qui exploraient l’attention soutenue et sélective, et l’inhibition de la réponse
motrice. Plusieurs méta-analyses, dont celle de Hervey et al. (2004), ainsi que
des études empiriques, ont montré par la suite que les adultes souffrant de
TDAH avaient tendance à présenter des scores particulièrement bas lors des
tests requérant différents aspects de contrôle attentionnel, bien que les déficits
dans les domaines cognitifs ne touchant pas les fonctions exécutives tels que
le traitement de l’information et sa vitesse aient été également observés. Les
déficits dysexécutifs précoces dans le TDAH apparaissent persister à l’âge adulte
(Barkley et al., 2011) et peuvent concorder avec les évaluations de l’entourage
ou du sujet lui-même concernant les perceptions subjectives des difficultés
exécutives dans la vie de tous les jours (Barkley et al. 2010).
72 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Bien que l’attention soit une faculté élémentaire, elle comporte une fonction à
multi-facettes dont dépendent les processus neurocognitifs et les dysfonctions
de ces composantes de l’attention peuvent partiellement souligner les difficultés
avec les fonctions exécutives complexes telles que la planification, la résolution
de problèmes, la prise de décision. Une observation clinique bien connue est
celle de personnes souffrant de TDAH qui fournissent un effort attentionnel
soutenu quand ils sont très motivés pour une certaine tâche ou une certaine
activité (Barkley et al., 2010). Donc, l’inattention n’est pas un aspect invariable
dans le TDAH, puisqu’elle dépend des facteurs motivationne ls et des exigences
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environnementales qui agissent sur le contrôle cognitif. On parlerait plutôt
d’attention inconstante que d’inattention. La vie adulte, indépendante et pro-
ductive, requiert en premier lieu une adaptation rapide et une flexibilité dans le
comportement en fonction des circonstances extérieures ch angeantes. C’est ce
que désignent typiquement les fonctions exécutives et qui d emande un niveau
élevé de contrôle en matière d’attention et de comportement, compromis chez
l’adulte souffrant de TDAH.

C ONCLUSION

Le TDAH est un trouble fréquent chez l’enfant, qui persiste dans la plupart des cas
la vie entière. En faire le diagnostic de novo chez les adultes est souvent difficile,
car la dysrégulation émotionnelle peut recouvrir les symptômes d’inattention
d’hyperactivité et d’impulsivité, et orienter le praticien vers d’autres troubles,
essentiellement thymiques, qui par ailleurs peuvent être comorbides du TDAH.
Des outils d’évaluation validés aident au diagnostic de TDAH, qui reste clinique
et diachronique, encore faut-il penser à les utiliser le plus systématiquement pos-
sible, pour limiter les errances diagnostiques et thérapeutiques. En effet, même
si la plupart des sujets adultes souffrant de TDAH développent des stratégies
adaptatives, celles-ci restent insuffisantes, et le trouble retentit en tâche d’huile
sur presque tous les niveaux de fonctionnement, académique, professionnel,
familial, social, favorisant l’émergence de troubles anxieux et dépressifs, d’abus
de substance, voire de complications sanitaires et judiciaires. C’est l’évaluation
avec le patient et si possible avec ses proches des difficultés rencontrées au
quotidien qui permettront de proposer une stratégie thérapeutique, qui peut
aller de la rééducation attentionnelle à un traitement pharmacologique, en
incluant des thérapies individuelles ou groupales, cognitives/comportementales,
familiales...
Le TDAH à l’âge adulte : concepts, aspects cliniques, diagnostic 73

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Chapitre 4

TDAH : retentissement et handicap


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tout au long de la vie

Hervé Caci

E N 2013, un livre blanc sur le TDAH1 a été présenté à Bruxelles devant un


groupe multidisciplinaire d’experts. Son titre, « TDAH : rendre visible l’invi-
sible », reflète bien la difficulté à faire entendre que le TDAH est une situation
de handicap qui ne se voit pas, ou plutôt qui ne se voit qu’en creux, au travers du
prisme de ses multiples conséquences. Un individu, enfant ou adulte, souffrant
de TDAH n’a pas de lunettes, de prothèse auditive, de béquille ou de fauteuil
roulant ni même de déficit intellectuel, et il peut néanmoins lui être difficile
voire impossible de voir, d’entendre, de se déplacer ou d’organiser sa pensée.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Et cela en dehors de toute pathologie organique ou psychiatrique. C’est pire


encore dans la présentation inattentive prédominante puisque les symptômes
d’agitation motrice et d’impulsivité ne sont pas au premier plan.
L’étude LIS (Lifetime Impairment Survey) conduite dans 6 pays européens a
montré que les conséquences du trouble n’étaient pas seulement limitées à la
performance scolaire (Caci, Asherson et al., 2014 ; Caci, Manfred Doepfner et al.,
2014 ; Caci & Paillé, 2014). C’est le fonctionnement global qui est impacté avec
des difficultés d’intégration dans le groupe de pairs et confl its intra-familiaux,
une faible estime de soi, des idées suicidaires, l’utilisation de substances (alcool,
tabac, drogues), l’apparition de troubles comorbides (troubles anxieux, troubles

1. https://www.shire.com/newsroom/2013/april/new-expert-white-paper
76 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de l’humeur, opposition avec provocation voire trouble des conduites). Toutes


ces difficultés pourront aboutir à une intégration socioprofessionnelle de qualité
moindre parfois teintée de violence voire de délits, à des relations conjugales
compliquées et retentiront sur le rôle de parents lorsque ces individus viendront
à avoir des enfants. Les études d’économie de la santé montrent d’ailleurs que le
poids pour la société n’est pas négligeable non plus. Les traitements médicamen-
teux ont montré leur capacité à infléchir certaines trajectoires évolutives même
si les résultats sur le plus long terme sont logiquement difficiles à quantifier
(Arnold, Hodgkins, Caci, Kahle, & Young, 2015 ; in press; Klein et al., 2012 ;
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Shaw et al., 2012).
Rendre visible cet invisible chez l’enfant et chez l’adulte suppose de parcourir
l’ensemble des champs dans des dimensions transversale et longitudinale, et
dans certains cas de manière récursive aussi. Ne pouvant faire l’économie d’une
longue liste de points négatifs sans même chercher à être exhaustif, nous avons
souhaité ajouter des éléments positifs. Certains auteurs ont souligné les « avan-
tages » du TDAH, comme la créativité, l’esprit d’entreprise (prise de risque).
Voulant lutter contre la stigmatisation qui entre tout trouble psychiatrique – à
laquelle le TDAH n’échappe pas –, des personnalités publiques ont effectué leur
coming-out en déclarant être atteint par ce trouble.

L A C LASSIFICATION I NTERNATIONALE
DU F ONCTIONNEMENT

Le DSM-IV définit un trouble mental comme un syndrome comportemental ou


psychologique cliniquement significatif associé à une détresse (par exemple, un
symptôme douloureux), un handicap (par exemple, l’altération d’une ou plusieurs
domaines important du fonctionnement) ou une augmentation significative d’un
risque de handicap, de souffrance, de décès ou de perte de liberté.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a développé une définition plus étroite
et un référentiel précis, la Classification Internationale du Fonctionnement, du
Handicap et de la Santé (International Classification of Functioning, Disability,
and Health, ICF). Cette classification vient compléter la Classification Internatio-
nal des Maladies (CIM) pour constituer la Family of Internatinal Classifications
(WHO-FIC). Elle répond à un modèle biopsychosocial dans lequel l’individu inter-
agit avec son environnement. Ainsi, l’état de santé (trouble ou maladie), les
facteurs environnementaux et personnels retentissent sur trois domaines inter-
dépendants : le corps, les activités quotidiennes, et la participation sociale. Les
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 77

traitements peuvent cibler l’état de santé, les facteurs environnementaux, les


déficits (impairment), les limitations et les restrictions. L’ICF augmente permet
une meilleure compréhension des concepts de fonctionnement et de handicap.
En 2010, une version a été dérivée pour l’enfant : l’International Classification
of Functioning, Disability and Health for Children and Youth (ICF-CY). La version
actuelle de l’ICF (http://www.who.int/classifications/icf) compte plus de 1 400
catégories classées et accessibles via un moteur de recherche en ligne.
La figure 4.1 illustre l’application de la CIF au TDAH chez les enfants en âge sco-
laire (Loe & Feldman, 2007 ; Üstün, 2007). Les comorbidités font l’objet d’autres
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listes de catégories selon le schéma de la CIF (par exemple, la dépression).
Rares sont les troubles mentaux dont les symptômes sont aussi divers que le
TDAH chez l’adulte. Les adultes sont confrontés à des situations plus variées que
les enfants : conduite automobile, abandon d’un emploi, rupture sentimentale
brutale, etc. Cela participe probablement à la difficulté que les psychiatres
d’adultes éprouvent pour l’appréhender lorsqu’ils n’ont pas eu l’expérience du
TDAH chez l’enfant. Pourtant, il s’agit d’un trouble fréquent qui touche environ
3 % de la population générale (Caci, Morin & Tran, 2014) et beaucoup plus
dans certains groupes particuliers. La CIF a été adaptée au TDAH chez l’adulte
(Söderström et al., 2014) mais l’on peut être surpris que certaines catégories
n’aient pas été retenues comme, par exemple, la catégorie d4751 « conduire un
engin motorisé ». Quoi qu’il en soit, cette grille devrait permettre une meilleure
compréhension des difficultés et des besoins des patients.

M ESURER LE FONCTIONNEMENT ET LE RETENTISSEMENT


© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Conformément à l’esprit du TDAH et de l’OMS, la définition d’un cas certain


nécessite la mesure du retentissement de l’ensemble des symptômes sur le
patient dans son environnement familial, social, scolaire/professionnel. Ainsi,
les lignes directrices des agences du médicament européenne pour l’évaluation
des traitements médicamenteux du TDAH recommandent l’utilisation de mesures
du fonctionnement (scolaire, social, professionnel, etc.) en plus des mesures de
l’efficacité des traitements (Coles, Coon, DeMuro, McLeod & Gnanasakthy, 2014).
Le fonctionnement psychologique, social et scolaire/professionnel d’un individu
peut être mesuré par des instruments très globaux. On peut citer le Global
Assessment of Functioning (GAF), qui s’étend de 0 à 100, et les Clinical Global
Impression scales (CGI). Le CGI-Severity peut prendre sept valeurs, de 1 (normal)
à 7 (extrêmement malade), selon l’expérience clinique du cotateur.
78 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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Figure 4.1. Impact fonctionnel du TDAH chez l’enfant en âge scolaire selon
l’International Classification of Functioning de l’OMS. Adapté de Üstün (2007).

D’autres approches ont été développées, spécifiques ou pas du TDAH dont les
propriétés psychométriques seraient insuffisantes (Naglieri, 2009) : la Children’s
Global Assessment Scale (CGAS), la Child and Adolescent Functional Impairment
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 79

Scale (CAFAS), la Columbia Impairment Scale (CIS), la Brief Impairment Scale


(BIS) et l’Impairment Rating Scale (IRS).

Échelles de qualité de vie


!

Il existe des échelles génériques pour mesurer la qualité de vie liée à la santé
chez l’enfant et chez l’adulte, et des échelles spécifiques à un trouble ou un
groupe de troubles. La version générique de la Pediatric Quality of Live Inventory
(PedsQL) est adaptée à l’âge et complétée par des modules spécifiques ; par
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exemple, arthrite, asthme, tumeur cérébrale1 . Le PedsQL, Child Health Question-
naire (CHQ) et d’autres peuvent être utilisés dans le TDAH. Mais, contrairement à
leurs parents, les enfants présentant un TDAH n’estiment pas leur propre qualité
de vie plus faible que les enfants sans TDAH.

Sheehan Disability Scale


!

Développée en 1983 pour mesurer le retentissement fonctionnel dans plusieurs


troubles psychiatriques (par ex., trouble panique, phobie sociale, trouble dépres-
sif majeur, dépendance à l’alcool), la Sheehan Disability Scale (SDS) a été traduite
en plus de 21 langues. Ses 5 items sont faciles à renseigner dans la salle d’at-
tente ; 4 scores peuvent être dérivés : gêne au travail/en classe (sur 10), gêne
dans la vie sociale/loisirs (sur 10), gêne dans la vie familiale/gestion de la
maison (sur 10), et un score total (sur 30). Des scores à ces trois premiers items
supérieurs à 5 suggèrent un retentissement significatif. Les deux derniers items
demandent le nombre de jours de travail/classe manqués à cause du TDAH et
le nombre de jours pendant lesquels les symptômes du TDAH ont impacté la
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productivité au travail/en classe. La période d’intérêt se limite souvent aux 7


derniers jours pour les 5 items. Une étude internationale sur 462 adultes ayant
un TDAH rapporte un coefficient α de Cronbach à 0,79, des corrélations élevées
avec les scores de l’ADHD-Rating Scale, l’ASRS v1.1 et le CGI-Severity ainsi qu’une
sensibilité au changement sous traitement (Coles et al., 2014).

ADHD Impact Module


!

On peut citer au titre des échelles spécifiques l’ADHD Impact Module for Children
(AIM-C) chez l’enfant, l’ADHD Impact Module for Adults (AIM-A) chez l’adulte, et

1. http://www.pedsql.org/about_pedsql.html
80 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

l’Adult ADHD Quality of Live (AAQoL) développée aux USA avant d’être validée en
Europe avec des propriétés comparables (Brod et al., 2015).

Barkley Functional Impairment Scale


!

Développée à partir de la Home Situations Questionnaire (HSQ), la Barkley Func-


tional Impairment Scale for Children and Adolescent (BFIS-CA) est remplie par les
parents des enfants de 6 à 17 ans. Elle peut être utile lors du diagnostic ou lors
du suivi pour évaluer l’impact des interventions. Elle mesure par 15 items cotés
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de 0 à 9 le retentissement d’un trouble mental ou médical dans 15 domaines
psychosociaux : 9 items sont combinés dans un score Maison-École et 6 autres
dans un score Communauté-Loisirs. S’y 8 autres items relati fs, par exemple, au
fonctionnement avec et sans traitement pour les patients concernés.
Les scores sont normés par rapport à la population américaine mais la repré-
sentativité de l’échantillon de validation est insuffisante (McGill, 2014). Un
score inférieur au percentile 85 (p-85) indique la normalité, du p-85 au p-92
un retentissement limite, du p-93 au p-95 un retentissement léger, du p-96 au
p-98 un retentissement modéré et, enfin, le p-99 un retentissement majeur. Au
surplus, on peut compter la somme des items dont les scores sont au moins au
p-93 peut aussi être interprétée.

Weiss Functional Impairment Rating Scale


!

Proposée dès 2005, la WFIRS est incluse dans la valise d’outils du CADDRA
(Canadian Attention Deficit Disorder Resource Alliance) dans ses deux versions : la
WFIRS-P pour les parents en hétéro-évaluation1 , et la WFIRS-S pour les adultes
en auto-évaluation2 (tableau suivant). L’instrument a été traduit en plus de 18
langues et reste le seul à mesurer le retentissement fonctionnel dans le cadre du
TDAH. Les items sont cotés de 0 à 3 (ou N/A) par rapport au mois écoulé. Les
réponses du patient peuvent être discutées lors de la consultation et permettre
de valider les réponses données à l’entretien diagnostic. Bien sûr, l’évaluation
du retentissement ne doit pas se limiter aux aspects formalisés dans la WFIRS,
et doit aussi prendre en compte les troubles des apprentissages, le sommeil,
l’alimentation, le harcèlement à l’école, les interactions familiales (exigences,
frustrations, etc.).

1. http://www.caddra.ca/pdfs/fr_caddraGuidelines2011WFIRS_P.pdf
2. http://www.caddra.ca/pdfs/fr_caddraGuidelines2011WFIRS_S.pdf
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 81

La WFIRS-P compte 50 items répartis en 6 sous-scores, et la WF IRS-S 69 items


répartis en 7 sous-scores. L’auteure recommande qu’un doma ine avec au moins
deux réponses 2 ou au moins une réponse 3, ou avec un score moyen supérieur
à 1,5 soit considéré comme impacté. La moyenne du score total peut aussi être
utilisée.
Peu d’études de validation ont été réalisées à ce jour. Le coefficient α de Cron-
bach pour chaque domaine et de l’ensemble des items est supérieur à 0,7 (Gajria
et al., 2015). La validité convergente avec d’autres mesures du fonctionnement
(par exemple, le GAF ou la Columbia Impairment Scale) est de l’ordre de 0,6.
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La validité discriminante est modérée, de l’ordre de 0,4, avec les symptômes
avant traitement ou la qualité de vie (Child Health and Illness Profile, CHIP).
L’échelle est sensible au changement : une diminution du score total de 13
points correspond à une amélioration significative.

Enfant Adulte
(Hétéro-évaluation) (Auto-évaluation)
Famille (10 items) Famille (8 items)
Travail (11 items)
École : Études (10 items)
Apprentissages (4 items)
Comportement (6 items)
Aptitude à la vie quotidienne Aptitude à la vie quotidienne
(10 items) (12 items)
Concept de soi (3 items) Concept de soi (5 items)
Fonctionnement social (7 items) Fonctionnement social (9 items)
Comportements à risque (10 items) Comportements à risque (14 items)

Structure de la Weiss Functional Impairment Rating Scale (WFIRS)


selon la version utilisée.

S TIGMATISATION ET COMING - OUT

La stigmatisation est un facteur de stress environnemental, chronique et cultu-


rellement déterminé qui prédit l’évolution négative et l’impact du diagnostic
mais qui est modifiable. Entre 50 et 75 % des patients ne reçoivent pas le traite-
ment adéquat et/ou l’arrêtent prématurément à cause de la stigmatisation dont
ils font l’objet (Corrigan, 2004). Au cours des dernières décennies, le nombre
82 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de publications sur la stigmatisation a connu un net essor, notamment celles


concernant la stigmatisation des patients psychiatriques, et des outils de mesure
ont été développés (Brohan, Slade, Clement & Thornicroft, 2010). Néanmoins,
les études consacrées au TDAH restent rares (Mueller, Fuermaier, Koerts & Tucha,
2012).
À la suite de travaux du sociologue Erving Goffman (1922-198 2), on distingue
trois qualités de stigmatisation (figure 4.2) :
" la stigmatisation publique (public stigma) caractérise le rejet collectif par
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les nombreux membres d’un groupe d’individus ou de groupes d’individus qui

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diffèrent d’eux sur des critères intrinsèques ou perçus concernant leur aspect
physique ou leur comportement ;
" l’auto-stigmatisation (self-stigma) est le résultat de l’internalisation de la
stigmatisation publique qui aboutit à une image dégradée de soi-même d’où
l’altération du fonctionnement social et de la qualité de vie ;
" la stigmatisation de courtoisie (courtesy stigma) se rapporte au jugement
négatif porté sur les apparentés ou les proches de l’individu stigmatisé.
Pour Goffman, les troubles les plus à risque de déclencher la stigmatisation
publique sont d’étiologie globalement inconnue ou arbitraire ou leurs symptômes
dépassent les capacités de contrôle de l’individu. L’impré dictibilité de certains
symptômes du TDAH (par exemple, impulsivité, instabilité émotionnelle) et
la trajectoire de vie d’individus jamais ou mal traités encouragent certains à
faire un lien entre TDAH et violence voire dangerosité sociale. Enfin, l’image
négative des traitements psychostimulants, puisque ce sont ceux qui ont été les
premiers découverts et utilisés, renforce la stigmatisation : patients qualifiés de
« drogués », médecins prescripteurs de « dealers », etc. Pourtant, par rapport aux
spécialités à libération immédiate, le développement de spécialités à libération
prolongée/modifiée a permis de réduire la stigmatisation à l’école dans la mesure
où une seconde prise pendant la journée n’est généralement plus nécessaire.

Perception de la stigmatisation par les enfants atteints


!

La faible estime de soi trouve son origine plutôt dans la trajectoire évolutive
de TDAH que dans l’idée de la différence associée à l’obligation de prendre un
traitement.
Il n’est pas rare que les patients voire le médecin prescripteur soient accusés de
« dopage » pour ce qui ne serait qu’une fainéantise. Les effets indésirables liés
au traitement tels que rapportés par une certaine presse ou certains groupes de
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 83

Stigmatisation publique Auto-stigmatisation

- Stéréotype : - Stéréotype :
- tous les malades mentaux sont - tous les malades mentaux sont
- dangereux. - incompétents.

- Préjugé : - Préjugé :
- les malades mentaux sont - j’ai une maladie mentale donc je
- dangereux et me font peur. - suis incompétent.

- Discrimination : - Discrimination :
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- je ne veux pas être proche d’eux ; - pourquoi devrais-je chercher un
- ne les engagez pas sur mon lieu - travail ; je suis un malade mental
- de travail. - incompétent.

Éviter l’étiquette Éviter le traitement

Ne pas rechercher le traitement


&
Ne pas adhérer à un traitement

Figure 4.2. De la stigmatisation au non-traitement. Adapté de Corrigan, 2004.


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pression contribuent à la stigmatisation, notamment auprès des parents (Dos-


Reis, Barksdale, Sherman, Maloney & Charach, 2010). De surcroît, les enfants
sont sensibles au coût des médicaments contrairement à leurs parents. Malgré
leur efficacité reconnue, la tendance est à la dissimulation ou au refus de ces
traitements alors que le dire ne provoque pas de rejet particulier des pairs (Singh
et al., 2010). La non-compliance résulte de l’interaction complexe entre les
effets de la molécule positifs ou négatifs (par ex., déception face aux attentes),
les effets indésirables ressentis ou annoncés (par ex., lus sur des sites Web ou
sur le Résumé des Caractéristiques du Produit souvent pas à jour), la dynamique
familiale (ambivalence, déni du trouble, conflit entre parents, etc.) et la stigma-
tisation perçue (Stine, 1994). L’accès au diagnostic en est rendu d’autant plus
difficile (Caci et al., 2016 ; Quiviger & Caci, 2014).
84 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Les recommandations pour lutter contre ces mauvaises perceptions du TDAH sont
plutôt intuitives et efficaces. Les professionnels de santé doivent expliquer le
diagnostic, ses étiologies et ses conséquences, les éventuels troubles associés et
les différentes possibilités thérapeutiques (Stine, 1994). Le rôle des associations
de patients est loin d’être négligeable : en France, par exemple, HyperSuper,
TDAH-PACA, et le Collectif Parents TDAH Ouest.

Stigmatisation par des pairs sains


!
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Les normes des enfants ne sont pas les normes des adultes. Leur bien-être est
lié de manière disproportionnée à l’acceptation par leurs pairs plutôt qu’au
regard des adultes. Classiquement, les enfants avec TDAH ont moins d’amis que
les enfants sans TDAH, sont plus solitaires dans la cour de l’école, sont moins
souvent invités à des anniversaires (Law, Sinclair & Fraser, 2007).

Stigmatisation publique des enfants TDAH


!

La National Stigma Study-Children a montré que les adultes avaient une plus forte
tendance à rejeter les enfants avec TDAH que ceux avec un tableau dépressif
ou un asthme. Un quart des adultes interrogés ne veulent pas que leur enfant
soit ami avec un enfant TDAH, 20 % refusent de s’intéresser même à un enfant
TDAH, et la moitié stigmatise même la recherche d’aide, la psychothérapie ou
le traitement ( Martin, Pescosolido, Olafsdottir & McLeod, 2007). Étonnamment,
les reproches adressés à l’enfant ou à ses parents concernant ses comportements
sont d’autant plus forts que l’enfant est âgé et de sexe masculin, et viennent
plutôt de femmes mariées ayant un bon niveau d’éducation. Si elles devaient
être confrontées au TDAH chez leur propre enfant, les personnes interviewées se
disent moins enclines à se tourner vers leurs proches, leurs amis, les hôpitaux
généraux ou les psychiatres que vers les enseignants, les médecins généralistes
et d’autres professionnels de la santé mentale (Pescosolido et al., 2008).
Les attentes, qui sont des précurseurs cognitifs des attitudes, peuvent aboutir à
une forme de stigmatisation si elles sont déçues et influencées par des préjugés.
Les parents et les enseignants ont tendance à évaluer plus sévèrement les filles
(Eisenberg & Schneider, 2007). Les sanctions des enseignants vis-à-vis du com-
portement des enfants avec TDAH augmentent le risque d’isolement social et
favorisent leur stigmatisation par les autres élèves (Tuchman, 1996). Pourtant,
seuls les enseignants spécialisés dans la prise en charge des enfants handicapés
sont conscients de la stigmatisation subie par les enfants avec TDAH (Bell, Long,
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 85

Garvan & Bussing, 2011). Alors même qu’ils n’avaient pas jugé que son test
manuscrit inférieur à celui d’enfants sans TDAH, des enseignants se montrent pes-
simistes sur le devenir scolaire et professionnel d’un élève après avoir visionné un
film où il montre les comportements caricaturaux de TDAH (Cornett-Ruiz, 1993).
De surcroît, les enfants sous-estiment leurs propres capacités, notamment les
garçons avec TDAH qui sous-estiment leur niveau en mathématiques (Eisenberg
& Schneider, 2007).
Le handicap reste invisible aux yeux des enseignants même au lycée et à l’uni-
versité (Vance & Weyandt, 2008). Un TDAH ne serait pas équivalent à un trouble
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des apprentissages pour 40 % des enseignants, et autant ne croient pas que les
élèves obtiennent des notes inférieures s’ils ont un TDAH. Presque 30 % discutent
l’indication d’aménagements pédagogiques, tels que la fourniture de photocopies
des cours ou des devoirs adaptés. Paradoxalement, la majorité avouait manquer
d’informations sur le TDAH.

Stigmatisation publique des adultes TDAH


!

La confusion et les critiques vis-à-vis du TDAH seraient plus intenses chez


l’adulte que chez l’enfant, peut-être à cause de la subjectivité des critères de
diagnostic. L’analyse qualitative et quantitative des articles de journaux sur
dix années montre que l’image typique du TDAH aux USA serait « un jeune
homme blanc appartenant à la classe moyenne et présentant essentiellement
une hyperactivité » (Schmitz, Filippone & Edelman, 2003). L’entourage juge ce
symptôme très sensible aux traitements médicamenteux.
Chaque année en octobre, la ADHD Awareness week a pour but de faire mieux
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

connaître le TDAH. La révélation active du diagnostic, c’est-à-dire seulement


lorsque les symptômes sont perceptibles par l’environnement, pourrait atténuer
les réactions de stigmatisation. Des personnes dont on peut dire qu’elles ont
« réussi dans la vie » hésitent de moins en moins à révéler qu’elles souffrent d’un
TDAH depuis leur enfance voire qu’elle prenne un traitement médicamenteux.
Plusieurs sites relaient ce genre d’informations sur l’Internet1,2,3,4,5 (tableau
suivant).

1. http://www.addadult.com/add-education-center/famous-people-with-adhd/
2. http://www.healthcentral.com/adhd/understanding-adhd-161681-5.html
3. http://www.parenting.com/gallery/famous-people-with-add-or-adhd
4. http://www.additudemag.com/slideshow/67/slide-1.html
5. http://www.everydaywithadhd.com.au/user-assets/Info_Sheets/Famous_Men_with_ADHD.pdf
86 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Domaine d’activité Noms


Acteur, chanteur, Jim Carrey, Robin Williams, Ryan Gosling, Justin
musicien Timberlake, Will Smith, Paris Hilton, Howie
Mandel, Michelle Rodriguez, Solange Knowles
(sœur de Beyonce), Channing Tatum, Adam
Levine, Will.i.am, Bex Taylor-Klaus, Salma Hayek,
Britney Spears
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Écrivain, artiste Katherine Ellison, Robert Toth, John Dunn, Thom
Hartman, Nancy Ratey, Karina Smirnoff
Journaliste, média, James Carville, Glenn Beck, Ty Pennington, Woody
animateur Harrelson, Mariette Hartley, Christopher Knight,
Tim Howard, Lisa Ling, Shane Victorino, Evelyn
Polk-Green
Sportif Terry Bradshaw, Andre Brown, Cammi Granato,
Viglil Green, Woody Harrelson, Chris Kaman, Hank
Kuehne, Michael Phelps, Pete Rose, Bruce Jenner,
Michael Jordan
Entrepreneur, Thomas Edison, Sir Richard Branson (Virgin), Paul
inventeur Orfalea (Kinko), David Neeleman (JetBlue), Dexter
Scott King (fils de Martin Luther King), Peter
Wright, Jamie Oliver (chef cuisinier), Cynthia
Gerdes (chef cuisinière), Daniel Koh, Robin
Stephens, Tamara Mellon
Médecin, chercheur Albert Einstein, Ed Hallowell (psychiatre), Patricia
Quinn (pédiatre), Sari Solden (psychothérapeute)
Homme politique John Fitzgerald Kennedy

Quelques personnalités ayant déclaré avoir un TDAH voire être traitées par un
médicament. Plusieurs ouvrages évoquent le diagnostic chez John Fitzegarld
Kennedy, des éléments historiques ont pu faire évoquer le diagnostic chez Thomas
Edison et Albert Einstein.

Stigmatisation de courtoisie
!

Cette forme de stigmatisation, ressentie par les parents qui ont cherché de l’aide
pour leurs enfants auprès de professionnels de la santé ou de groupes de soutien,
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 87

est spontanément évoquée comme un frein à la recherche des solutions (Koro-


Ljungberg & Bussing, 2009). Les stratégies d’adaptation des parents vont du
déni du diagnostic au refus de le dévoiler, et jusqu’à des actions plus radicales
comme faire appel à la police pour régler des relations familiales (Koro-Ljungberg
& Bussing, 2009).
La plupart des parents se considèrent socialement isolés par le comportement
de leur enfant et craignent que le rejet des pairs ait des conséquences pour son
avenir (Caci, Asherson et al., 2014 ; Caci, Doepfner et al., 2014 ; DosReis et
al., 2010). Les remarques, parfois cruelles, concernant leur incapacité à éduquer
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correctement leur enfant pour rentrer dans certaines normes sociales (Tuchman,
1996) sont plus facilement intériorisées par les mères (Nor vilitis, Scime & Lee,
2002), ce qui les conduit à s’auto-stigmatiser (Tuchman, 1996). Sur la Courtesy
Stigma Questionnaire, les attitudes sont comparables entres les mères d’enfants
sans TDAH et les mères d’enfants avec TDAH, mais ces dernières pensent que
les premières ont une vision plus négative du comportement de leur enfant
(Norvilitis et al., 2002). Ils vivent mal l’idée que des mesures compensatoires
du handicap de leur enfant, notamment dans leur scolarité, puissent apparaître
comme des bénéfices (DosReis et al., 2010). Certains abandonnent l’idée de
faire comprendre aux autres (famille, proches, enseignants, professionnels de
santé) ce que c’est d’élever un tel enfant voire envisagent d’arrêter les prises en
charge (DosReis et al., 2010). Il convient d’éduquer les mères des enfants TDAH
en soulignant les points positifs (Norvilitis et al., 2002), mais aussi l’entourage
proche qui a un impact sur la dynamique familiale (Koro-Ljungberg & Bussing,
2009).

L E FONCTIONNEMENT CHEZ L’ ENFANT


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Les fonctions mentales globales


!

Le Quotient Intellectuel (QI) total des enfants TDAH se situ e dans la moyenne
pour l’âge et le sexe (MTA Cooperative Group, 1999). Son lien est faible avec
les difficultés attentionnelles. Les différents indices rendus par le test WISC
(Wechsler Intelligence Scale for Children) sont souvent hétérogènes. Par exemple,
l’Indice de Compréhension Verbale (ICV) du test WISC-IV permet de prédire
les performances scolaires mais est aussi l’indice le plus dépendant du milieu
social et sensible aux troubles de la lecture qui peuvent affecter les enfants
TDAH. Mais cette hétérogénéité peut aussi être retrouvée entre les épreuves qui
composent les indices. Par exemple, les sous-tests Mémoire des Chiffres, Code
88 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

et Arithmétique (remplacée par Séquences Lettres-Chiffres dans les dernières


versions du test) reflètent souvent la faiblesse de la mémoire de travail et de la
vitesse de traitement des enfants TDAH.

La précocité intellectuelle

Même si cela peut paraître a priori antinomique, la précocité intellectuelle peut


se rencontrer associée au TDAH, dans une proportion théorique de 10 %, mais le
contraire n’est pas vrai (Antshel, 2008). Les risques sont de ne pas diagnostiquer
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le TDAH devant un enfant qui obtiendrait de bons scores au test WISC (grâce à
son intérêt pour les tâches intellectuelles et sa capacité à se focaliser sur une
tâche intéressante) ou, pire, qui rêvasserait en cours (à cause d’une forte suscep-
tibilité à l’ennui). La rêvasserie est encore trop souvent i nterprétée comme un
signe de précocité intellectuelle. De fait, même si l’on attend généralement des
valeurs supérieures ou égales à 120, la définition de la préco cité intellectuelle
ne repose pas uniquement sur le score à l’échelle totale du test WISC-IV. En
comparant un groupe d’enfants TDAH avec un QI > 120 à des enfan ts précoces
sans TDAH, Antshel a trouvé que le premier groupe avait redoublé plus souvent
(22 %), nécessitait plus de soutien en classe, avait plus de g êne fonctionnelle
dans différents domaines selon leurs parents, avait plus de diagnostics d’Épisode
Dépressif Majeur, de troubles anxieux (Anxiété de Séparation, Phobies, Phobie
Sociale, Trouble Anxieux Généralisé) et de Trouble d’Opposition avec Provocation
sur leur vie entière (Antshel et al., 2007). Suivi jusqu’à leur adolescence, ce sous-
groupe de patients a atteint de moins bonnes performances en mathématiques
et avait nécessité plus de soutien scolaire (Antshel et al., 2008).
La littérature regorge d’articles suggérant un lien entre le TDAH et la créativité,
mais il y a en a presqu’autant qui suggèrent un lien entre la précocité intellec-
tuelle et la créativité. Si la qualité de ces études peut être discutée, elles n’en
sont pas moins utilisées pour affirmer que le TDAH serait un « don ». D’autres ont
cherché sans convaincre à mettre en évidence un effet négatif des traitements
médicamenteux sur cette créativité.
Au total, il n’est pas recommandé de se fier à un seul indice pour juger de
la précocité intellectuelle d’un enfant, et encore moins lorsqu’il présente des
symptômes de TDAH. Il est probablement illusoire d’attendre chez ces enfants-là
une grande autonomie, justement du fait de ces symptômes de TDAH. Leur défaut
de motivation et de vigilance en l’absence de renforcements positifs peut les
gêner ; par exemple, ils excellent à l’oral mais sont en difficulté à l’écrit (lecture
ou production) (Antshel et al., 2007). Un traitement médicamenteux du TDAH,
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 89

une pédagogie stimulante, un lien préférentiel avec un enseignant, des horaires


flexibles et des activités extra-scolaires captivantes sont particulièrement indi-
qués dans ces cas pour lutter contre l’échec scolaire qui les guette aussi. Ces
aménagements peuvent justifier la reconnaissance d’une situation de handicap
par la MDPH afin d’obtenir des financements exceptionnels (voir plus loin).

Les déficits intellectuels

Pour les mêmes raisons que ci-dessus, il est raisonnable de penser que la pro-
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portion d’enfants déficients intellectuels aussi atteints par un TDAH n’est pas
négligeable. Historiquement d’ailleurs, et jusqu’aux années 1970, le déficit
attentionnel était caractéristique du retard mental ce qui rendait difficile la
distinction d’avec les patients qui présentaient ce qui allait devenir le TDAH
dans les nosographies ultérieures (Deutsch, Dube & McIlvane, 2008).
Deux approches s’opposent dans les faits. La première, déficitaire, met en avant
les différences par rapport à l’âge chronologique et, sans aucune difficulté, fait
apparaître un déficit attentionnel chez les enfants déficients intellectuels. La
seconde met en avant les différences par rapport à l’âge mental et fait alors
apparaître un retard de développement. Une méta-analyse sur 26 études donne
cette dernière comme supérieure sur la plupart des variables dans les retards
mentaux non liés à une cause organique (Deutsch et al., 2008).
L’approche développementale est soutenue par le DSM, y compris dans sa défi-
nition du TDAH. Malheureusement, les scores des échelles utilisées pour le
diagnostic du TDAH (par exemple, les échelles de Conners pour les Parents ou
pour les enseignants) peuvent difficilement être normés pour des déficients
intellectuels. De même, les tests informatiques ne sont pas adaptés à cette
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

population et peuvent donner des résultats difficilement interprétables. Comme


dans les troubles autistiques, l’observation clinique peut apporter un élément
de réponse pertinent. Ainsi, à la fin des années 1970, il a été observé que les
apprentissages de certains enfants déficients étaient gênés par leurs distractibi-
lité : ils commençaient une tâche sans pouvoir persister (Zeaman & House, 1979).
Une évaluation pluri-disciplinaire est nécessaire. Les traitements médicamenteux
(méthylphénidate) se sont montrés efficaces, mais des études en cross-over
versus placebo et en double aveugle seraient utile (Handen, Feldman, Lurier &
Huszar Murray, 1999).
90 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Les fonctions mentales spécifiques


!

Les listes issues de l’ICF regroupent l’attention, la mémoire, le contrôle psycho-


moteur, la régulation des émotions, la pensée (cours et vitesse), l’organisation-
planification, la gestion du temps, la flexibilité cognitive, le jugement, la résolu-
tion de problèmes et le sentiment de soi. Les corrélations neuropsychologiques
du TDAH chez l’enfant et chez l’adulte ne laissent aucun doute et font l’objet
d’un autre chapitre de cet ouvrage.
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Les difficultés scolaires
!

Elles entrent le composant « Activité et Participation » de l’ICF, à l’origine de


limitations et de restrictions au sens de l’OMS.
Les enfants TDAH ont plus de difficultés en classe, réussissent moins bien, sont
plus exposés à un risque de renvoi, de redoublement (Caci et al., 2016), d’orien-
tation vers l’éducation spéciale (Déry, Toupin, Pauzé & Verlaan, 2004) ou vers
la voie professionnelle. Au surplus, le jeu des comorbidités fait que les enfants
TDAH présentent aussi souvent des troubles spécifiques des apprentissages, des
troubles anxieux ou d’autres troubles externalisés du comportement.
Certains auteurs seulement ont montré que les enfants inattentifs avaient plus
de risques d’échouer que les enfants ayant une présentation combinée, ou d’être
plus facilement orientés vers des classes spécialisées dans les troubles des
apprentissages.

Leur évolution dans le temps

Ces difficultés peuvent commencer tôt : certains symptômes s ont rapportés en


classe maternelle, entre 3 et 6 ans (Caci et al., 2016). Les enfants suspects
de présenter un TDAH dans ces classes auront plus de difficultés dans leurs
apprentissages (DuPaul, McGoey, Eckert & Vanbrakle, 2001).
Le TDAH peut être associé jusque dans 11,8 % des cas à un refus scolaire (Martin,
2014) survenant le plus souvent au cours du primaire (Ishii, Takahashi, Kawamura
& Ohta, 2003). Les raisons identifiées sont multiples : troub le anxieux, conflit
avec un enseignant trop strict ou évitement des moqueries des autres élèves. Les
interventions ciblées ont été rapidement efficaces dans tous les cas. L’association
TDAH et TOP exposerait à un risque plus important que le TDAH isolé (Harada,
Yamazaki & Saitoh, 2002).
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 91

Les études longitudinales montrent que les symptômes persistent à l’adoles-


cence et après. Si le niveau d’hyperactivité tend à diminuer avec le temps, les
difficultés attentionnelles et l’impulsivité resteront au moins stables (Faraone,
Biederman & Mick, 2006). Approximativement, un tiers des patients devenus
adultes présenteront une rémission complète, environ la moitié une rémission
partielle et un tiers une persistance du trouble (Biederman, Petty, Evans, Small &
Faraone, 2010). Ainsi, deux tiers des patients subiront les conséquences du TDAH
qu’ils présentaient enfants, et plusieurs études longitudinales montrent que les
jeunes adultes auront atteint des niveaux d’études et socio-professionnels plus
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faibles (Klein et al., 2012). L’histoire naturelle des symptômes du TDAH chez des
enfants non-diagnostiqués ou non-traités semble montrer que, de manière dimen-
sionnelle, l’inattention et l’hyperactivité sont à l’origine de difficultés scolaires
significatives hormis tout diagnostic formel de TDAH (Polderman, Boomsma,
Bartels, Verhulst & Huizink, 2010).

Besoins éducatifs spéciaux

L’étude MTA (Multimodal Treatment Study of Children With Attention Deficit Hyper-
activity Disorder) a montré que le risque est 4 à 5 fois plus élevé pour les enfants
TDAH de nécessiter une scolarité adaptée aux difficultés qu’ils rencontrent (Jen-
sen et al., 2004).
En France, cela pourrait correspondre à des adaptations pédagogiques, au tutorat
par un autre élève, de l’intervention d’un enseignant spécialisé essentiellement
pour les élèves de maternelle (dans le cadre du Réseau d’Aide et de Soutien aux
Élèves en Difficultés, RASED) ou la mise en place d’un Programme Personnalisé
de Réussite Éducative (PPRE) pour les élèves à partir du CE1. Ce dernier se veut
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temporaire, d’une durée de quelques semaines. Enfin, un Plan d’Accompagne-


ment Personnalisé (PAP) peut être mis en place sur proposition des enseignants
(conseil des maîtres, conseil de classe, etc.) ou à la demande des parents, mais
exige l’accord des uns et des autres. Le médecin de l’Éducation Nationale joue
un rôle central dans sa rédaction ne pas méconnaître les difficultés spécifiques
de l’élève.
On entre ensuite dans le champ du handicap. La loi n°2005-102 du 11 février
2005 « Pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté
des personnes handicapées » a porté création de Maisons Départementales des
Personnes Handicapées (MDPH). Au sein de chaque MDPH, la Commissions des
Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) prend toutes les
décisions concernant les aides et les prestations, dans le cadre d’un Projet
92 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

personnalisé de scolarisation (PPS). La CDAPH peut se prononcer sur l’orienta-


tion scolaire ou professionnelle afin de favoriser son intégration, désigner les
établissements ou les services, attribuer une Allocation d’Éducation de l’Enfant
Handicapé (AEEH) et son éventuel complément, attribuer une prestation de com-
pensation du handicap sous forme d’aide humaine dans l’établissement scolaire
(Assistante de Vie Scolaire, AVS) ou d’aide financière pou des dépenses excep-
tionnelles liées au handicap. L’intégration scolaire peut s’appuyer sur différentes
structures en fonction de l’âge de l’élève : un Service d’Éducation Spéciale et de
Soins à Domicile (SESSAD), une Classe d’Intégration Scolaire (CLIS) voire une
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Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire (ULIS). Hormis certains cas particuliers,
un enfant TDAH ne relève pas d’une ULIS ou d’un placement à temps plein dans
un Institut Thérapeutique, Éducatif et Pédagogique (ITEP).

Efficacité des traitements

Les traitements médicamenteux ont une efficacité redoutable sur les symptômes
du TDAH (Ramos-Quiroga & Casas, 2011). Sur des variables écologiques comme
la prise de note, par exemple, l’efficacité est présente avec des doses faibles,
s’améliore avec des doses croissantes sans être dose-dépendante. Toutefois, il
ne peut s’agir de normaliser les aptitudes dans tous les domaines par rapport au
groupe d’âge. Les résultats à long terme sont plus discutables car on ne connaît
pas l’évolution naturelle de l’ensemble des difficultés, les patients n’ont pas
été suivis ou traités plus de deux ou trois ans, et le phénomène d’attrition des
cohortes a pu jouer un rôle.
L’étude MTA a confirmé que l’efficacité des traitements comportementaux seuls
sur les symptômes centraux du TDAH est inférieure à celle des traitements
médicamenteux (MTA Cooperative Group, 1999). Une revue systématique de la
littérature a montré que l’efficacité des traitements médicamenteux au-delà de
2 ans restait globalement significative et était même meilleure lorsqu’ils étaient
associés à des traitements psychologiques (Arnold et al., 2015; in press).

Utilisation des services


!

Les études sur l’utilisation des services publics permettent (1) l’attribution et la
planification des ressources qui sont pertinentes dans une période financièrement
difficile, (2) l’identification de besoins non satisfaits et des facteurs à l’origine
d’inégalités, et (3) d’améliorer les lignes directrices publiées par les sociétés
savantes et focaliser les actions pour satisfaire des besoins spécifiques (Leslie
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 93

& Wolraich, 2007). Les trois secteurs qui fournissent des services aux patients
avec TDAH sont : le secteur médical général (médecins de première ligne et de
nombreux professionnels de santé), le secteur spécialisé dans la santé mentale et
le secteur scolaire. Malheureusement, la communication entre ces trois secteurs
peut être rendue difficile par divers facteurs comme, par exemple, le manque de
connaissances du trouble (Quiviger & Caci, 2014).
A titre d’illustration, une étude danoise a montré que les enfants avec TDAH ont
plus de risques que les témoins de se blesser à 10 ans (odds-ratio ajusté = 1,29 ;
IC95=[1,22 ; 1,37]) et à 12 ans (odds-ratio ajusté = 1,30 ; IC95=[1,23 ; 1,37])
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(Dalsgaard, Leckman, Mortensen, Nielsen & Simonsen, 2015). La réduction de la
prévalence des blessures après prescription d’un traitement était 31,5 % à l’âge
de 10 ans et 43,5 % à l’âge de 12 ans.
Les médecins de première ligne (généralistes, pédiatres, neurologues et psy-
chiatres libéraux) sont sollicités du fait de leur proximité avec les patients et les
familles (Haute Autorité de Santé, 2014) même si, en France, l’accès aux soins
psychiatriques est libre via les Centres Médico-Psychologiques (CMP), notamment.
Des symptômes du TDAH peuvent être notés dès l’âge de 4,5 ans, surtout par
les enseignants (Caci et al., 2016) qui conseillent aux parents de consulter leur
médecin, qui adressera éventuellement l’enfant vers un psychologue ou une
orthophoniste mais d’autant plus rarement vers un psychiatre que les symptômes
externalisés sont au second plan. La trajectoire de soins dé pend de ces étapes
initiales, d’une banalisation des symptômes ou, au contraire, d’une suspicion de
diagnostic étayée par l’anamnèse et l’utilisation d’outils appropriés. Cette étude
nationale a montré que le diagnostic avait été obtenu à l’âge médian de 7,5 ans
après avoir consulté au moins trois professionnels de santé pour la moitié des
familles, et plus de cinq professionnels pour 5 % des familles (Caci et al., 2016).
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Le spécialiste de la santé mentale, souvent hospitalier, pose le diagnostic, com-


plète l’évaluation et définit la stratégie thérapeutique associant les prises en
charge du trouble et des comorbidités et, éventuellement, un traitement médi-
camenteux. Un médecin libéral qui est chargé de renouveler la prescription
initiale hospitalière tous les 28 jours dans le cas d’une spécialité à base de
méthylphénidate, soit au maximum 13 consultations par an. Ce sera un médecin
hospitalier dans le cas d’une spécialité délivrée avec Autorisation Temporaire
d’Utilisation (ATU), comme l’atomoxétine.
94 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Mortalité
!

Plusieurs études se sont intéressées à la mortalité liée à des pathologies psychia-


triques comme la schizophrénie ou le trouble bipolaire de l’humeur. Une analyse
de cohorte a fourni des informations précieuses sur la mortalité liée au TDAH dans
l’enfance et à l’âge adulte (Dalsgaard, Ostergaard, Leckman, Mortensen & Giortz
Petersen, 2015). Les données recueillies concernent 1,92 million de Danois suivi
de leur naissance à 2013 (ou à la date de leur émigration ou de leur mort), soit
24,9 millions de personnes-année. Le taux de mortalité ajusté était de 1,58 pour
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10.000 (IC95=[1,21 ; 2,03]) pour ceux diagnostiqués entre 6 et 17 ans et de
4,25 pour 10.000 (IC95=[3,05 ; 5,78]) pour ceux diagnostiqués après l’âge de 17
ans. Après exclusion de diagnostics comorbides (abus de substance, trouble d’op-
position avec provocation et trouble des conduites), le TDAH restait associé à un
excès de mortalité ajusté significatif (1,50 pour 10.000 avec IC95=[1,11 ; 1,98]),
plus fort chez les femmes. L’abus de substance apparaît comme la comorbidité
la plus délétère. Les causes de mortalité (certaines n’étant pas été retrouvées)
n’étaient pas naturelles, essentiellement des accidents. L’interprétation de ces
résultats reste limitée par le fait que les données n’ont été recueillies qu’auprès
des établissements de santé publics. Il n’est pas impossible que les cas moins
sévères aient été traités dans le secteur libéral et des cliniques privées qui n’ont
pas l’obligation de renseigner les bases de données nationales.

Suicide et tentative de suicide


!

Le suicide est la pire des conséquences d’un trouble mental, tels que la schi-
zophrénie, les troubles affectifs de l’humeur (incluant les troubles bipolaires
de l’humeur) et les troubles de la personnalité. Sur la vie entière, les idées
suicidaires touchent de 4,8 % à 18,5 % des adultes et les tentatives de suicide
touchent de 1,1 % à 5,9 % des adultes (Bernal et al., 2007). Dès lors, la préven-
tion du suicide (et des tentatives de suicide) est un problème de santé publique
qui doit devenir une priorité pour les professionnels de la santé mentale (Nicoli
et al., 2011).

Risque lié au TDAH

Initialement rapporté en 1977, le risque suicidaire plus élevé chez l’adoles-


cent avec TDAH a été ensuite confirmé chez l’adulte aussi par de nombreuses
études (Chen et al., 2014 ; Galéra, Bouvard, Encrenaz, Messiah & Fombonne,
2008 ; Impey & Heun, 2011). Paradoxalement, les liens entre le TDAH et le
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 95

suicide ont été moins étudiés (Allely, 2014). Les causes pos sibles de ce risque
résident dans l’impulsivité et l’instabilité émotionnelle liées au trouble lui-même,
les comorbidités, dont certaines sont des facteurs de risques du suicide, les
atteintes cognitives et certains traits de personnalité qui peuvent prédisposer à
des conduites suicidaires. Nous traitons plus loin l’éventuel rôle des traitements
médicamenteux.
Pourtant, à titre d’exemple, une étude de cohorte sur plus de 200.000 individus a
montré que le risque de geste auto-agressif était 2,4 (IC95=[2,0 ; 2,8]) fois plus
élevé et le risque de tentative de suicide était 2,9 (IC95=[2,4 ; 3,5]) plus élevé
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parmi les TDAH. Ce diagnostic est plus probable chez les adolescents hospitalisés
pour tentative de suicide, acte hétéro-agressif ou auto-agressif.
En France, le risque de tentative de suicide à l’adolescence est estimé 5,46 plus
élevé chez les garçons avec TDAH dans l’enfance seulement (Galéra et al., 2008).
La partie française de l’étude ESEMeD (European Study of the Epidemiology of
Mental Disorders) conduite sous l’égide de l’OMS entre 2001 et 2003 a permis de
calculer la prévalence sur la vie entière de l’idéation suicidaire et des conduites
suicidaires en population générale (Nicoli et al., 2011). L’odds-ratio associé au
TDAH vaut 6,0 (IC95=[2,8 ; 12,9]) pour l’idéation suicidaire et 7,3 (IC95=[2,4 ;
22,3]) pour la tentative de suicide. Toujours en population générale, nous avons
rapporté un risque 2,97 fois plus élevé (mais non significati f) pour les adultes
avec TDAH, 5,38 fois plus élevé (IC95=[1,76 ; 16,47]) dans leur fratrie, et 18,6
fois plus élevé (IC95=[1,62 ; 214,16]) chez leurs enfants (H. Caci et al., 2014).
Par rapport aux garçons, les filles avec TDAH ont plus de risque de développer
une comorbidité dépressive et d’adopter des comportements suicidaires. Après
ajustement, les filles ont 2,5 fois plus de risque (IC95=[1,5 ; 4,2]) que les filles
sans TDAH de développer une comorbidité dépressive que les témoins et de
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commettre une tentative de suicide (Biederman et al., 2008) dont le niveau


de létalité sera alors plus élevé (Nasser & Overholser, 1999). La présentation
Combinée est plus fortement associée aux gestes suicidaires que la présentation
Inattentive Prédominante.
Le méthylphénidate est efficace sur la prise de décision (DeVito et al., 2008)
dont l’altération a justement été impliquée dans la tentative de suicide quel
que soit le trouble mental dont souffre le patient. L’impulsivité est un trait de
personnalité retrouvé associé à la tentative de suicide chez l’adolescent et chez
l’adulte. La typologie vespérale est associée à l’impulsivité (Caci et al., 2005 ;
Caci, Robert & Boyer, 2004) et aux tentatives de suicide violentes (Selvi et al.,
2011).
96 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Risque lié aux traitements médicamenteux

Certaines molécules ont été suspectées de favoriser les passages à l’acte suici-
daire. En 2005, la Federal Drug Administration (FDA) fit apposer une « black box »
concernant une possible élévation du risque d’idéation suicidaire et de passage
à l’acte chez l’enfant et l’adolescent traité par atomoxétine (Strattera® ). Au
Royaume-Uni, une étude de cohorte ayant suivi 18 637 patients-année traités par
méthylphénidate ou amphétamine montre qu’il n’y a pas plus de risque de mort
subite dans l’échantillon, pas plus de suicide chez les 14 ans et plus, mais un
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risque plus élevé de suicide chez les 11-14 ans (162 avec IC95=[19,61 ; 584,88])
(McCarthy, Cranswick, Potts, Taylor & Wong, 2009). Toutefois, les auteurs sou-
lignent qu’ils n’ont pas tenu compte des comorbidités dans cette analyse, ce
qui peut augmenter artificiellement le risque attribué aux molécules (Chen et
al., 2014). De plus, les facteurs environnementaux (par exemple, dynamique
familiale, antécédents familiaux) ont une durée limitée dans le temps et ne
peuvent pas être équilibrés dans les groupes comparés. Il semble y avoir un
intérêt à analyser le parcours chaque individu en y distinguant les périodes
pendant lesquelles il est traité et le type de traitement prescrit (psychostimulant
vs. non-psychostimulant) (Chen et al., 2014).
En 2014, une méta-analyse propose une mise à jour d’une précédente publication
limitée aux enfants et adolescents en analysant les données de 23 études pédia-
triques (n=3883) et 9 études chez l’adulte (n=3365) (Bangs, Wietecha, Wang,
Buchanan & Kelsey, 2014). Aucun suicide n’est survenu au cours de ces 32 études.
Chez l’enfant, il n’y a pas de différence pour les tentatives de suicide (0,04 %
vs. 0 % ; risque relatif = 1,19 ; IC95=[0,05 ; 28,96], non significatif) mais les
idéations suicidaires sont plus fréquentes sous atomoxétine : l’incidence pour
la différence avec le groupe placebo est de 0,4 (IC95=[0,09 ; 0,83], p=0,016).
Chez l’adulte, deux cas d’idéations suicidaires ont été rapportés chacun des deux
groupes atomoxétine et les groupes placebo (risque relatif non-significatif).
Une étude de cohorte Suédoise a suivi 37 936 individus traités pour un TDAH, soit
150 721 personnes/année (Chen et al., 2014). Le taux de suicide est comparable
entre les patients traités par psychostimulants et ceux traités par atomoxétine ou
par l’association atomoxétine et psychostimulant. Le risque relatif de suicide ou
de tentative de suicide est significativement plus élevé pour les patients des deux
sexes traités par atomoxétine ou par l’association atomoxétine et psychostimu-
lant (1,49 ; IC95=[1,27 ; 1,76]), et surtout dans les périodes pendant lesquelles
ils étaient traités (1,48 ; IC95=[1,17 ; 1,88]). Par contre, il n’est pas significatif
pour les patients traités par psychostimulants (1,02 ; IC95=[0,90 ; 1,16]). A
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 97

l’inverse, l’analyse des parcours de chaque individu montre, elle, une tendance
vers un effet protecteur du traitement : 0,89 (IC95=[0,89 ; 1,00]) toutes molé-
cules confondues et 0,81 (IC95=[0,70 ; 0,94]) pour les psychostimulants. De
manière intéressante, les intervalles de confiance augment ent fortement après
exclusion des patients présentant des comorbidités sur la vie entière telles que
épisode dépressif, trouble bipolaire, trouble des conduites, abus de substance
et trouble de la personnalité limite). Pour les patients sans comorbidité, le
risque est 1,24 (IC95=[1,03 ; 1,48]) au niveau de la population, mais de 1,08
(IC95=[0,69 ; 1,70]) au niveau individuel. Pour les patients ayant un trouble
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dépressif comorbide sur la vie entière, le risque de 1,28 (IC95=[1,13 ; 1,43]) au
niveau de la population devient clairement un facteur de pro tection au niveau
individuel (0,78 ; IC95=[1,13 ; 1,43]).

Conclusion

Clairement, la prévention du suicide et des tentatives de suicide passe par


un meilleur dépistage du TDAH tant chez l’adolescent que chez l’adulte. Les
traitements médicamenteux disponibles ne semblent pas être impliqués dans
l’augmentation du risque de suicide ou de tentative de suicide, surtout lorsqu’on
contrôle certaines comorbidités. Les psychostimulants surtout pourraient avoir
un rôle protecteur en diminuant fortement l’impulsivité.

L E FONCTIONNEMENT CHEZ L’ ADULTE

Les conséquences du TDAH à l’âge adulte sont plus complexes à appréhender.


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Certaines sont communes aux adultes et aux enfants, d’autres plus spécifiques de
l’âge. L’apport des suivis de cohortes d’enfants jusqu’à l’âge adulte est important
(Klein et al., 2012) comme celui des études transversales. Nous ne traiterons
pas ici des addictions avec substances (alcool, nicotine, drogues) ni des addic-
tions comportementales (jeu pathologique, sexualité compulsive, jeux vidéo et
cyberdépendance et efforts intensifs) qui peuvent apparaître comme autant de
troubles comorbides.

Le fonctionnement professionnel
!

Les symptômes des adultes avec TDAH s’expriment avant d’accéder à un emploi,
puis sur le lieu de travail et dans le travail (Küpper et al., 2012 ; Sarkis, 2014).
98 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Chômage

Le niveau d’études plus faible, l’accès à des emplois moins payés et l’instabilité
professionnelle font qu’ils connaissent des périodes de chômage (Halmøy, Fasmer,
Gillberg & Haavik, 2009 ; Klein et al., 2012). Or le traitement psychostimulant
dans l’enfance reste le meilleur prédicteur d’une activité professionnelle à l’âge
adulte (OR=3,2 ; p=0,014) (Halmøy et al., 2009).
Un récent rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) a porté
sur les revenus des personnes en situation de handicap dont on peut penser
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qu’une partie non-négligeable présente un TDAH associé à d’autres pathologies1 .
Au premier rang de ces revenus vient le Revenu de Solidarité Active (RSA) suivi
par l’Allocation Adulte Handicapé (AAH).

Difficultés professionnelles

Classiquement, les niveaux d’emploi sont moins élevés qu’attendus (Klein et


al., 2012) et la productivité légèrement plus faible (Kessler, Lane, Stang & Van
Brunt, 2009). Ils sont moins assidus (Secnik, Swensen & Lage, 2005), changent
plus souvent d’emploi (Murphy & Barkley, 1996), ont plus de conflits avec leurs
collègues et plus de risques d’accidents (Kessler et al., 2005 ; Kessler et al.,
2009 ; Klein et al., 2012 ; Küpper et al., 2012 ; Murphy & Barkley, 1996 ; Sarkis,
2014). Au surplus, il ne faut pas négliger l’impact des troubles comorbides
comme l’anxiété, les troubles de l’humeur, les troubles spécifiques des apprentis-
sages (dyslexie, dysorthographie et dyscalculie). Enfin, on oublie trop facilement
qu’avoir un enfant TDAH retentit de manière comparable sur le travail du parent
sans TDAH (Kleinman, Durkin, Melkonian & Markosyan, 2009).
Les difficultés attentionnelles et la mauvaise compréhension des conventions
sociales font que les adultes avec TDAH rechignent devant des tâches labo-
rieuses : par exemple, remplir sans erreur un dossier structuré comprenant de
nombreuses questions, rédiger proprement une lettre de motivation ou un cur-
riculum vitae. Leur faible estime de soi ne les pousse pas à être ambitieux
et peut contraster avec leur comportement durant l’entretien d’embauche où
s’exprimeront leurs difficultés à organiser leur pensée, leur distractibilité, et
leur bavarderie. La plupart des employeurs ne connaissent pas le TDAH et ses
implications aussi la question de se déclarer porteur de ce trouble dès l’en-
tretien d’embauche est-elle difficile à trancher : peur de la stigmatisation et

1. http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2014/12/2014-048r_
liens_handicap_et_pauvrete.pdf
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 99

auto-stigmatisation (reflet négatif que cela leur renvoie d’eux-mêmes et de leurs


compétences). Pourtant, la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé
(RQTH) accordée par la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes
Handicapées (CDPAH créée par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits
et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées)
peut aider au recrutement. Les employeurs ont en effet une obligation d’emploi
de personnes disposant du statut de travailleurs handicapé ou assimilé qui,
dans une entreprise d’au moins 20 salariés, doivent représenter au moins 6 %
de l’effectif salarié. A défaut, ils s’exposent à devoir payer une contribution
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financière à l’Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des
Personnes Handicapées (AGEPIPH) ou au Fonds pour l’Insertion Professionnelle
des Personnes Handicapées (FIPHFP) pour la fonction publique.
Sur leur lieu de travail, les adultes avec TDAH peuvent avoir du mal à se conformer
aux règles alors que des qualités comme la créativité, la vivacité et la spontanéité
sont rarement prises en compte (Küpper et al., 2012). La gêne fonctionnelle
trouvera alors son origine dans les difficultés à gérer le temps, à planifier les
tâches et à s’y conformer (par exemple, se mettre au travail et à le finaliser
dans les délais), à accepter les remarques de collègues ou d’un supérieur (par
exemple, difficulté à se remettre en question, rigidité, impulsivité). Certaines
conditions de travail sont plus pénibles pour les adultes avec TDAH, comme
les open spaces à cause des multiples distractions : bruit ambiant, sonneries de
téléphone, conversations audibles, va-et-vient de collègues, etc.

Addiction au travail et burn-out

A l’inverse, certains adultes avec TDAH pourront développer – surtout si l’enca-


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drement les y encourage – une véritable addiction comportementale au travail


qui causera des problèmes de santé, des troubles anxieux et/ou dépressifs,
une mauvaise qualité de vie, des mauvaises relations familiales et/ou socio-
professionnelles, un burn-out, une tentative de suicide voire un suicide.
Proposés par Wayne E. Oates en 1971, le concept d’addiction au travail et
le terme workaholic correspondent une « compulsion ou un besoin irrépres-
sible de travailler ». Le concept n’a cessé d’évoluer depuis avec une approche
obsessionnelle-compulsive ou une approche multi-dimensionnelle, comprenant le
temps passer à travailler, la capacité à déléguer, et certains traits de personnalité
(Quinones & Griffiths, 2015). Nous n’avons pas trouvé dans la littérature d’étude
portant spécifiquement sur l’association TDAH et addiction au travail pourtant
observable chez nos patients.
100 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Orientation, aménagements et reclassement professionnels

Le TDAH n’est pas rare chez le travailleur adulte et ses conséquences pour
l’employé et l’employeur peuvent être importantes. Dès lors, les questions de
l’orientation des collégiens et des lycéens avec TDAH, du dé pistage du TDAH à
l’embauche et des aménagements sur le lieu de travail voire du reclassement
professionnel méritent d’être posées.
Concernant les collégiens et lycéens, les métiers créatifs ou exercés à l’extérieur
seront préférés aux postes purement administratifs. Les adolescents rechignent à
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s’engager vers des études longues et choisiront des formations professionnelles
courtes. L’attrait vers la carrière militaire, le corps des pompiers ou la cui-
sine/service est régulièrement noté. Une étude américaine montre que 7 % des
jeunes recrues (soit presque le double de la prévalence en population générale)
présentent un TDAH depuis l’enfance avec un retentissement souvent sévère.
Des aménagements du lieu de travail peuvent être prescrits. Les difficultés
attentionnelles et d’organisation peuvent être compensées par une planification
externe des tâches, l’utilisation d’alarmes sur un smartphone, des consignes
claires et concises données par écrit plutôt qu’oralement, la prohibition des open
spaces (ou la fourniture de casques réduisant le bruit ambiant), la délégation des
tâches les plus fastidieuses, des horaires flexibles pour pouvoir travailler dans les
moments calmes de la journée. L’agitation motrice peut être compensée par des
pauses notamment pendant les longues réunions avec la possibilité de se lever.
L’impulsivité peut être compensée par une supervision régulière bienveillante.
La motivation doit être soutenue par des encouragements, des félicitations et
perspectives de gains.

Le fonctionnement familial
!

Relations conjugales

Les relations conjugales doivent faire partie de l’évaluation du fonctionnement


comme dans l’échelle WFIRS ou l’entretien DIVA, par exemple. En effet, les rela-
tions et interactions au sein d’une famille ne sont pas simples lorsqu’un enfant,
et souvent un de ses parents au moins, présente un TDAH. Par exemple, on
entend souvent les mères se plaindre : « j’ai deux enfants à la maison : mon fils
et mon mari ». Les occasions de conflits sont nombreuses et les familles disent
souffrir : « on crie beaucoup à la maison ». Les adultes avec TDAH ont tendance
à initier des relations amoureusement et à les rompre tout aussi impulsivement,
comme dans le milieu professionnel (par exemple, abandon de poste, démission).
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 101

Il leur est souvent difficile de maintenir des relations sociales pour la même
raison, mais aussi par procrastination (par exemple, prendre des nouvelles de la
santé d’une relation) ou à cause d’oublis (par exemple, dates d’anniversaire).

Divorce

En population générale, les divorcés ont plus de problèmes attentionnels : diffi-


culté à répondre à des stimuli tout en en ignorant d’autres, déficits cognitifs dans
la résolution de conflit. Les adultes TDAH divorcent plus tôt et plus fréquemment
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que les témoins (Klein et al., 2012 ; Wymbs et al., 2008). Pour les couples
avec enfant, d’autres prédicteurs interviennent de manière complexe : l’ethnie,
le niveau d’éducation de chaque parent, le comportement antisocial du père,
l’âge de l’enfant et ses comportements externalisés (Trouble Opposition avec
Provocation, Trouble des Conduites) (Wymbs et al., 2008).

Parentalité

Les catégories d7600 et d7601 de la CIF se rapportent aux relations parents-


enfants et enfants-parents, respectivement. Le TDAH d’un enfant impacte le
fonctionnement parental (Johnston & Mash, 2001) même lorsque l’intensité des
symptômes est modérée. Idéalement, la recherche sur cette question doit être
longitudinale, et intégrer le sexe de l’enfant, la présentation du TDAH, le jeu des
comorbidités (par exemple, le Trouble des Conduites), le niveau développemental
(l’âge de l’enfant, les facteurs de risque et de protection y compris biologiques
et environnementaux) et des facteurs familiaux dynamiques. Les poids respectifs
de ces facteurs sont amenés à varier avec l’âge de l’enfant.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

L’approche classique postule que les difficultés familiale s trouvent leur origine
dans les symptômes du TDAH de l’enfant. Mais c’est oublier que le TDAH d’un
parent peut tout autant désorganiser le fonctionnement familial. Partant du
principe que les réponses familiales structurent dans le temps les capacités
d’auto-régulation de l’enfant, on peut concevoir que le type de réponses de l’en-
vironnement familial puisse renforcer les symptômes d’ina ttention, d’agitation
motrice et d’impulsivité d’un enfant qui n’aurait qu’une faible prédisposition
au TDAH. L’environnement familial est plus stressant, les parents ont plus de
discussions conflictuelles sur l’éducation de l’enfant, et moins d’a priori vers
une éducation autoritaire1 (Hinshaw, Zupan, Simmel, Nigg, & Melnick, 1997),

1. Exemple d’items de l’échelle Ideas of Parenting (Heming, Cowan, & Cowan, 1990) : « J’encourage
mon enfant à être indépendant de moi », « Un certain niveau de frustration et de contrariété est
102 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

enfin la séparation ou divorce sont plus fréquents (cf. supra). Les symptômes
du TDAH sont moins associés au type d’éducation que l’opposition et le Trouble
des Conduites qui sont, eux, corrélés, par exemple, à l’inconsistance entre les
parents, au manque de chaleur et aux critiques (Taylor, Schachar, Thorley &
Wieselberg, 1986). Il est possible que l’influence familiale soit plus marquée au
cours des premières années de primaire pour les enfants qui ne montrent pas
encore de symptômes d’un Trouble des Conduites. Mais lorsque les deux troubles
sont marqués à un jeune âge, l’influence familiale paraît négligeable.
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La gestion financière
!

Les adultes avec TDAH gagnent classiquement moins d’argent que les adultes
sans TDAH (Klein et al., 2012). Leur impulsivité et les atteintes cognitives
sont à l’origine de difficultés significatives dans la gestion financière (Barkley
& Fischer, 2010). L’inattention et/ou l’impulsivité émotionnelle prédisent les
difficultés à gérer l’argent, à épargner, et à ne pas faire d’achats impulsifs, et
aussi le nombre de loyers impayés, le nombre de factures impayées à cause d’un
découvert bancaire (Barkley & Fischer, 2010).
Les conséquences sociales peuvent être dramatiques comme nous le constatons
chez nos patients: découverts bancaires, cumuls d’arriéré s, faillites profession-
nelles voire expulsion du domicile. On peut leur conseiller de construire leur
budget et de le surveiller (grâce à des alertes sur leur smartphone, par exemple),
de mettre en place le plus possible de paiements automatiques, de faire des
économies systématiques (virements automatiques) et de ne dépenser pour le
plaisir que les sommes restantes sur le compte courant.

La conduite de véhicules
!

Le code d4751 dans la composante « Activité et Participations » de l’ICF, cor-


respond à la conduite d’un véhicule motorisé (voiture, moto, bateau, avion et
hélicoptère). C’est au début des années 1990 que le lien a été fait pour la
première fois entre hyperactivité dans l’enfance et augmentation des accidents
de la route à l’adolescence et à l’âge adulte. Les études réalisées depuis ont
toujours confirmé le lien entre TDAH et les accidents, les infractions au code de
la route (par exemple, les excès de vitesse), les retraits de permis de conduire.

nécessaire pour le développement émotionnel d’un enfant. Ses parents ne doivent pas être trop
protecteurs ».
TDAH : retentissement et handicap tout au long de la vie 103

L’inattention, l’impulsivité, la somnolence, la conduite sous l’emprise de sub-


stances sont autant de facteurs de risque reconnus. Une revue systématique de
la littérature récente a montré que les traitements du TDAH ( psychostimulants
et non-psychostimulants) améliorent la conduite automobile surtout chez les
plus jeunes (Gobbo & Louzã, 2014). La transmission manuelle améliorerait la
conduite automobile des adolescents en stimulant leur éveil.

Coût du TDAH chez l’adulte


!
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Le coût pour les employeurs est élevé du fait des frais de santé, de la productivité
plus faible et des absences (Birnbaum et al., 2005 ; de Graaf et al., 2008 ; Kessler
et al., 2009 ; Kleinman et al., 2009 ; Sarkis, 2014 ; Secnik et al., 2005 ; Swensen
et al., 2004). Le coût annuel pour l’économie américaine serait de 19,5 milliards
de dollars (Kessler et al., 2005). Une étude de l’OMS dans 10 pays a estimé que
les adultes avec TDAH manquaient en moyenne 22,1 jours de plus leur travail
que les adultes sans TDAH (de Graaf et al., 2008). Deux études américaines
évaluent le frais de santé des adultes avec TDAH entre 4.929 $ et 5.651 $ contre
1.473 $ à 2.771 $ pour les adultes sans TDAH (Secnik et al., 2005 ; Swensen
et al., 2004). Sur les mêmes données, une troisième étude américaine a estimé
les coûts additionnels per capita par rapport à des témoins sans TDAH pour la
tranche d’âge 18 à 44 ans et entre 1996 et 1998 (Birnbaum et al., 2005). Les
traitements médicamenteux et les soins médicaux s’élevaie nt à un montant de
1.993 $ pour les femmes et 2.670 $ pour les hommes. Le coût lié au travail
(retentissement et absentéisme) s’élevait à 690 $ pour les hommes.
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C ONCLUSION

Les retentissements fonctionnels du TDAH sont nombreux et variés sur les enfants
et les adultes qui en souffrent mais aussi sur leur environnement. Il est impos-
sible d’être exhaustif dans ce domaine. Le dépistage, le diagnostic et la prise en
charge des enfants avec TDAH constituent clairement un enjeu de santé publique.
Près de 5 % des enfants de 6 à 18 ans présenteraient un TDAH invalidant en
France. Il en va de même chez les adultes puisque 4 % environ de la population
générale présenterait un TDAH invalidant. La lutte contre les préjugés et la
stigmatisation doit trouver sa place dans les actions à mener car elle retarde les
prises en charge et augmente le risque d’un retentissement plus profond.
104 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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Chapitre 5

Fonctions attentionnelles
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et exécutives dans le TDAH

Hichem Slama, Rémy Schmitz

C OMME MENTIONNÉ dans son intitulé, le syndrome de Trouble de Déficit de l’At-


tention/Hyperactivité (TDAH) est caractérisé par la présence significative de
difficultés attentionnelles. En outre, il est également caractérisé par la présence
de symptômes d’impulsivité, ce qui suggère que les fonctions exécutives, respon-
sables de la régulation du comportement, puissent également être perturbées
dans ce trouble. Dans ce chapitre, nous présentons et discut ons l’historique et
les connaissances scientifiques actuelles concernant les altérations cognitives
attentionnelles et exécutives liées au TDAH, ainsi que la question de l’évolution
de ces troubles durant le développement. Nous discutons également l’intérêt
de l’investigation des fonctions attentionnelles et exécutives durant la mise au
point clinique ou à visée de recherche.
Avant d’aborder plus précisément la question des fonctions attentionnelles et
exécutives dans le TDAH, il semble utile de définir ces concepts ainsi que leurs
relations et spécificités respectives.

C ONCEPTS ET DÉFINITIONS

Définir les fonctions attentionnelles et exécutives est une tâche ardue en raison
de la mise à jour régulière des connaissances scientifiques dans ce domaine.
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 111

C’est pourquoi nous nous contenterons ici de développer les concepts les plus
utilisés dans le domaine clinique, ainsi que ceux nécessaires à la compréhension
des difficultés rencontrées dans le TDAH. Pour une lecture plus approfondie des
mécanismes attentionnels, nous renvoyons le lecteur à l’ouvrage de Jean-Philippe
Lachaux, Le cerveau attentif (2011), à la fois agréable à lire et fort complet sur
le domaine. À notre connaissance, un tel ouvrage didactique en langue française
n’existe pas en ce qui concerne les fonctions exécutives ; le lecteur intéressé
pourra toutefois consulter à profit le Traité de Neuropsychologie de l’Enfant
(2012) qui aborde d’une façon plus spécialisée les fonction s attentionnelles et
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exécutives ainsi que leurs troubles chez l’enfant.
En général, deux grands types d’approches théoriques peuvent être identifiés
dans l’étude des fonctions attentionnelles et exécutives. La première est une
approche taxonomique qui définit conceptuellement différents types d’atten-
tion (par exemple l’attention sélective et divisée) ou de fonctions exécutives
(par exemple l’inhibition et la flexibilité). Cette approche est de loin celle qui
est la plus utilisée par les cliniciens qui tentent de dresser le profil des fonc-
tions altérées et préservées chez un patient. La seconde approche est l’approche
neuroscientifique qui propose des modèles théoriques intégratifs sur base, notam-
ment, de données neurophysiologiques, neuroanatomiques, neuropsychologiques,
mais également de modèles neurocomputationnels et de l’expérimentation ani-
male. Dans ce chapitre, nous envisagerons ces deux approches dans le domaine
des fonctions attentionnelles et exécutives.

Les fonctions attentionnelles


!

L’attention peut être définie comme la capacité à se concentrer et à sélectionner


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les informations qui sont importantes à un moment et à un endroit donné.


L’attention est souvent vue comme un phare virtuel grâce auquel le cerveau
traite l’information en provenance du monde extérieur mais également issue
de nos pensées. L’attention opère en sélectionnant, en fonction de leur prio-
rité, les informations les plus essentielles pour la réalisation des objectifs en
cours. Cette sélection prioritaire est nécessaire car le cerveau à une capacité
de traitement limitée. Les diverses informations entrent en compétition pour
l’accès aux ressources limitées du cerveau et l’attention va biaiser le résultat
de cette compétition en faveur de l’information la plus pertinente pour les
objectifs en cours. Il n’existe pas une seule forme d’attention mais plusieurs
types d’attention ou systèmes attentionnels. Nous allons rapidement décrire
les modèles taxonomiques et neuroscientifiques principaux de l’attention. Cette
112 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

description s’accompagnera de quelques exemples concrets et de la mention


de tests neuropsychologiques fréquemment utilisés en clinique et en recherche
par notre équipe. Le lecteur pourra trouver un exposé plus détaillé et plus
exhaustif des tests disponibles dans des ouvrages spécialisés tels A Compendium
of Neuropsychological Tests (2006).

Modèle taxonomique de l’attention : le modèle clinique de van Zomeren


et Brouwer
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En clinique, la taxonomie la plus fréquemment utilisée est celle de van Zomeren
et Brouwer (1994) qui définissent cinq grands types d’attention répartis en
fonction de deux grands axes : l’axe de l’intensité (alerte, vigilance et attention
soutenue) et l’axe de la sélectivité (attention sélective et attention divisée).

Axe de l’intensité : alerte, vigilance et attention soutenue


1. L’alerte est la capacité à pouvoir réagir rapidement à un événement (un
stimulus). C’est en quelque sorte notre rapidité attentionnelle. Elle fluctue en
fonction du moment de la journée et est influencée selon que l’on se prépare
(alerte phasique) ou non (alerte tonique) à agir. Les troubles de l’alerte se
manifestent principalement par une lenteur (bradypsychie).
Exemple de situation : démarrer le plus vite possible lorsque le feu passe au vert.
Tests neuropsychologiques : épreuves de temps de réaction simples, par exemple
dans la Psychomotor Vigilance Task (PVT) ou dans la tâche d’alerte de la batterie
informatisée Test of Attentional Performance (TAP).
2. La vigilance est la capacité à maintenir son attention dans le temps lors
de situations peu stimulantes, c’est-à-dire lorsqu’il y a p eu de stimuli à traiter.
Celle-ci est fortement associée à la question de l’ennui et de la motivation. Les
troubles de la vigilance se manifestent par des fluctuations de l’attention et des
ratés (lapsus) attentionnels.
Exemple de situation : l’agent de sécurité qui regarde son écran de contrôle pour
détecter un éventuel cambrioleur.
Tests neuropsychologiques : toute épreuve longue et peu stimulante telles les
tâches de performance continue (CPT) ou la tâche d’alerte de la TAP qui, par sa
durée, évalue également la vigilance.
3. L’attention soutenue est la capacité à maintenir son attention dans le temps
lorsque l’on fournit un effort cognitif important. L’attention soutenue est direc-
tement en lien avec l’idée que les ressources attentionnelles sont limitées. En
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 113

effet, lorsque nos ressources attentionnelles sont épuisées, nous ne pouvons


plus effectuer correctement la tâche demandée. Les troubles de l’attention sou-
tenue se manifestent par une fatigabilité et par une performance qui diminue
anormalement rapidement au cours du temps, par épuisement des ressources.
Exemple de situation : écouter un exposé compliqué durant plusieurs heures.
Tests neuropsychologiques : la tâche du Paced Auditory Serial Addition Test
(PASAT) mais également toute tâche réclamant un effort attentionnel intense et
prolongé.
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Axe de la sélectivité : attention sélective et attention divisée
1. L’attention sélective est la capacité à sélectionner une information parmi
d’autres stimuli (appelées distracteurs). L’attention sélective peut être volontaire
(endogène) ou être déclenchée par un stimulus de l’environnement (exogène ; par
exemple, entendre notre prénom attire automatiquement notre attention). Elle
représente en quelque sorte notre filtre attentionnel. Les troubles de l’attention
sélective se manifestent par une distractibilité.
Exemple de situation : tenir une conversation lors d’une fête bruyante.
Tests neuropsychologiques : tâche de balayage visuel de la TAP, tâches de barrage
de cibles parmi des distracteurs.
2. L’attention divisée est notre capacité à faire attention à plusieurs choses en
même temps. Les troubles de l’attention divisée se manifestent par une difficulté
à gérer plusieurs activités simultanément.
Exemple de situation : écouter le journal parlé à la radio tout en conduisant.
Tests neuropsychologiques : tests d’attention divisée de la TAP ou de la TEA-Ch.
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Modèle neuroscientifique de l’attention : le modèle de Posner et Petersen

Le modèle attentionnel neuroscientifique le plus connu est celui de Posner et


Petersen (Petersen & Posner, 2012). Ce modèle distingue trois grands réseaux
attentionnels : l’alerte, l’orientation et l’attention exécutive. Le système d’alerte
est globalement équivalent à l’alerte et à la vigilance du modèle de van Zomeren
& Brouwer. Le système d’orientation, quant à lui, est relativement équivalent à
l’attention sélective. Il comprend un réseau attentionnel dit « dorsal » respon-
sable de l’orientation attentionnelle volontaire et involontaire vers des stimuli
pertinents. Un second réseau dit « ventral » a pour but de réguler les alternances
entre ce réseau dorsal, responsable de l’attention dirigée vers l’extérieur, et un
autre réseau responsable de l’attention dirigée vers nos ét ats intérieurs et nos
114 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

pensées. Ce réseau attentionnel dirigé vers l’intérieur est appelé le réseau du


« mode par défaut ». La dernière composante du modèle tripartie de Posner et
Petersen est l’attention exécutive qui correspond aux fonctions exécutives que
nous allons définir ci-après.

Les fonctions exécutives


!

Les fonctions exécutives sont définies comme les processus mentaux nécessaires
lorsque l’on doit porter attention à notre comportement et que les comporte-
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ments habituels, plus automatiques, ne sont pas adaptés (par exemple dans
une situation nouvelle ; Diamond, 2013). Les fonctions exécutives permettent
de poursuivre un objectif lorsque de la distraction ou des ré ponses habituelles
doivent être inhibées. Le rôle des fonctions exécutives est de réguler, coordonner
et séquencer les actions en fonction d’objectifs. À nouveau , des modèles taxo-
nomiques et neuroscientifiques ont été proposés pour décrire le fonctionnement
exécutif.

Modèle taxonomique des fonctions exécutives : le modèle de Diamond

Une récente revue de la littérature de Diamond (2013) distingue trois fonctions


exécutives de base et trois fonctions dites de haut niveau. Les fonctions de
base sont la mémoire de travail, l’inhibition et la flexibilité. Les fonctions de
haut niveau sont le raisonnement, la résolution de problème (ces deux fonctions
constituant ce que l’on appelle l’intelligence fluide) et la planification. L’auteure
inclut également les capacités d’autorégulation qui font i ntervenir l’inhibition
mais également le maintien optimal du niveau d’excitation émotionnelle, motiva-
tionnelle et cognitive. Cette autorégulation dépendrait également d’une capacité
innée à s’autoréguler que Diamond nomme l’effort de contrôle.

Fonctions exécutives de base : mémoire de travail, inhibition et flexibilité


1. La mémoire de travail est la capacité à maintenir une information nécessaire
à la tâche en cours pendant une courte durée (de quelques secondes à quelques
minutes). Elle permet de garder temporairement en mémoire les objectifs et
les informations, de les manipuler tout en les protégeant contre d’éventuelles
interférences. Un trouble de la mémoire de travail se manifeste par une tendance
à perdre le fil de ses idées, à oublier ce que l’on était en train de faire, de dire
ou de lire.
Exemple de situation : réaliser un calcul mental nécessitant plusieurs étapes.
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 115

Tests neuropsychologiques : empan de chiffres en ordre inverse de la WISC IV,


épreuve de mémoire de travail de la TAP, test de Brown-Peterson, tâche de n-
back.
2. La flexibilité cognitive est la capacité à passer d’une action ou d’une pensée à
une autre. En général, passer à autre chose comporte un coût cognitif que l’on
appelle le coût d’alternance. Un trouble de la flexibilité co gnitive entraîne des
comportements répétitifs inadaptés que l’on nomme persévérations. La personne
reste alors bloquée sur une idée ou sur une action.
Exemple de situation : réaliser des additions puis passer à des soustractions.
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Tests neuropsychologiques : test de flexibilité de la TAP, Trail Making test, tâche
de classement de carte du Wisconsin.
3. L’inhibition est la capacité à empêcher les interférences, c’est-à-dire à empê-
cher des pensées (inhibition cognitive), des stimuli (attention sélective ou
focale) ou des réponses inadaptées (inhibition de réponse) d’interférer avec le
comportement désiré. C’est également la capacité à arrêter en cours d’exécution
une action devenue inadaptée. Comme mentionné, cette fonction recouvre en
partie la notion d’attention sélective.
Tests neuropsychologiques : test de Stroop, tâches de go-no go, tâche stop-signal,
tâche de flanker, tâche CPT-AX.
Dans un article influent, Miyake et collaborateurs ont investigué (à l’aide d’ana-
lyses factorielles confirmatoires et de modélisation structurelle) les relations
réciproques entre fonctions exécutives de base (inhibition, flexibilité et mémoire
de travail). Ils ont mis en évidence ce qu’ils ont appelé l’unité et la diversité
des fonctions exécutives, c’est-à-dire, d’une part, un facteur commun aux trois
fonctions et, d’autre part, des facteurs spécifiques pour la mémoire de travail
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et pour la flexibilité. D’après ces auteurs, le facteur commun pourrait être la


capacité à garder en mémoire les objectifs nécessaires à la tâche (pour une revue
voir Miyake & Friedman, 2012).
Fonctions exécutives de haut niveau : raisonnement, résolution de problème
et planification
1. Le raisonnement et la résolution de problème du modèle de Diamond sont,
d’après elle, équivalents à la notion d’intelligence fluide. Cette forme d’intelli-
gence renvoie à la capacité à raisonner, résoudre des problèmes et percevoir des
relations entre éléments. Elle inclut à la fois le raisonnement logique inductif
(capacité à travailler de manière flexible avec des informat ions inconnues et à
trouver des solutions) et déductif (établir une inférence menant d’une affirmation
générale à une conclusion particulière). L’intelligence fluide est la capacité à
116 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

découvrir les relations abstraites sous-tendant des analogies. Un trouble de


l’intelligence fluide entraîne une incapacité à inférer des relations abstraites ou
à résoudre des problèmes nouveaux.
Exemple de situation : trouver le lien de similitude entre un thermomètre et un
chronomètre
Tests neuropsychologiques : sous-tests des matrices ou d’identification de
concepts de la WISC IV.
2. La planification est la capacité à mettre en place des étapes (un plan d’action)
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pour atteindre un objectif. Planifier requiert d’élaborer différents plans d’action,
de choisir le plus adapté, de le mettre en œuvre et d’être capable de changer
de plan lorsque celui en cours n’est plus adapté. Un trouble de planification
se manifestera par une difficulté à organiser son activité lors de situations
complexes requérant la mise en place d’un plan d’action, par exemple en fixant
des dates ou des échéances relatives à chaque étape.
Exemple de situation : planifier son travail en session d’examen
Tests neuropsychologiques : test de la Tour de Londres, sous-test de la tour de la
NEPSY.

Modèle neuroscientifique du fonctionnement exécutif :


le modèle de Shenhav, Botvinick & Cohen

Les modèles neuroscientifiques récents utilisent le terme de contrôle cognitif


pour désigner le fonctionnement exécutif et distinguent pl usieurs composants
au sein de ce système. Un modèle récent de Shenhav, Botvinick & Cohen (2013)
propose trois composants principaux : la surveillance (monitoring), la spécifi-
cation et la régulation. Le grand intérêt de ce modèle du cont rôle cognitif est
qu’il permet à la fois de comprendre comment le cerveau détecte la nécessité
d’exercer un contrôle, comment le cerveau choisit ou non de l’exercer en fonction
des coûts-bénéfices estimés et comment le cerveau implémente ce contrôle. La
notion de choix d’exercer ou non un contrôle est directement reliée à la notion
d’effort et de motivation que l’on retrouve souvent évoquée dans le TDAH (voir
ci-après).

Contrôle cognitif : surveillance (monitoring), spécification et régulation


1. La surveillance (monitoring) est la fonction chargée de détecter le besoin de
contrôle cognitif à partir de signaux divers comme la détection d’un conflit,
le fait de commettre des erreurs, le fait de recevoir un feed-back négatif ou
la sensation de douleurs.
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 117

2. La spécification est la fonction chargée de définir la quantité de contrôle à


exercer ainsi que l’endroit (l’activité) où l’exercer. Les modèles neuroscienti-
fiques récents considèrent que le contrôle cognitif à un coût que les individus
sont généralement enclins à éviter. Un contrôle cognitif ne sera entrepris que
dans des situations où la différence coût-bénéfice du contrôle cognitif est
en faveur des bénéfices. La spécification est la fonction chargée d’évaluer ce
coût du contrôle. Par exemple, si l’on ne perçoit pas un bénéfice suffisant
(pour la santé) de s’empêcher de manger des sucreries le soir, on ne se privera
pas de ce plaisir.
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3. La régulation est la fonction qui implémente le contrôle cognitif en fonc-
tion des objectifs en cours. Elle est chargée de maintenir les objectifs en
mémoire et d’influencer l’activité des autres régions cérébrales en fonction
de ces objectifs. Le maintien ou, au contraire, la mise à jour des objectifs
en mémoire sont régulés suivant les feed-back positifs et négatifs reçus de
l’environnement.

Les limites de l’évaluation des fonctions exécutives


!

et attentionnelles

Un problème majeur des fonctions exécutives, qui entraîne de lourdes consé-


quences sur leur évaluation, est le faible degré de correspondance entre les
processus exécutifs et les comportements. En effet, à l’inverse des processus
cognitifs dit de « bas niveau », facilement évaluables et sur lesquels s’exerce
leur action (comme par exemple la perception visuelle et auditive), les fonctions
exécutives s’expriment dans une variété de situations différentes, en agissant
ou en modulant ces processus. Le terme exécutif n’est donc pas un processus
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opérationnel mais reste essentiellement de nature théorique : il n’établit pas une


correspondance claire entre processus et comportements. E n outre, sa relation
de dépendance avec les traitements de bas niveaux peut être source d’erreurs
puisqu’un trouble de bas niveau peut être erronément attribué à un trouble
exécutif. En effet, les tâches d’évaluation du système exécutif sont par essence
composites et sous-tendues par des processus non-exécutifs. En surface, un com-
portement déficitaire à une tâche pourrait donc avoir des origines différentes
et non exécutives. C’est ce qui a été qualifié de problème de « l’impureté des
tâches ». Ce problème est également présent, dans une certaine mesure, pour
les fonctions attentionnelles qui peuvent par exemple s’exercer sur du matériel
visuel ou du matériel auditif. La résultante de cet état de fait est que les tâches
censées évaluer le même composant exécutif ou attentionnel sont souvent très
118 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

peu corrélées entre elles. Par exemple, chez l’enfant avec TDAH, des travaux ont
montré que les performances dans plusieurs tâches censées évaluer l’inhibition
étaient en réalité très peu corrélées entre elles. Si l’on ajoute à cela l’existence
d’une grande variabilité entre les différentes versions d’une même tâche (par
exemple en termes de nombre et de types de stimuli, de durée de la tâche,
de temps de présentation des stimuli, de modalité de réponse), on comprend
que l’évaluation des processus attentionnels et exécutifs dans le TDAH conduit
souvent à des résultats contradictoires.
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Développement des fonctions attentionnelles et exécutives
!

Le développement des fonctions exécutives et des fonctions attentionnelles


est un point important à considérer lorsque l’on s’intéresse aux troubles neuro-
développementaux. Le but de ce chapitre n’est certainement pas de faire une
revue exhaustive des recherches réalisées dans ce domaine ( pour une revue du
développement cognitif voir Blaye & Lemaire, 2007). Néanmoins, certains points
semblent importants à souligner. Le premier concerne l’aspect différencié du
développement selon la fonction cognitive envisagée. Le second, la stabilité des
différences interindividuelles.
Comme nous l’avons vu précédemment, les fonctions attentionnelles et exécu-
tives sont multiples. Selon la fonction cognitive envisagée, le développement
prendra cours à des âges et à un rythme différents. Par exempl e, des fonctions
exécutives de base comme l’inhibition ou la flexibilité se développeront plus
tôt et avec un pic de développement plus précoce comparées à des fonctions
comme la planification. Les recherches sur le développement des fonctions
exécutives mettent en évidence une émergence précoce vers 9 mois, d’abord
de façon versatile puis avec une présence plus constante entre 18 et 30 mois.
On note ensuite une progression par étapes avec des évolutions entre 3-4 ans,
4-5 ans, à 8 ans, à 12 ans puis à l’adolescence. Si l’on se base sur un modèle
taxonomique, les composantes d’inhibition et de mémoire de travail semblent
évoluer plus rapidement au cours de l’enfance que la composante de flexibilité,
avec une performance adulte atteinte plus rapidement. Les fonctions de haut
niveau comme la planification évoluent encore plus lentement et leur progression
s’accentue à partir de 8 ans. Il est cependant important de noter que, plus que la
fonction en elle-même, il semble que les composantes des tâches utilisées soient
déterminantes. Des facteurs latents comme la rapidité de réponse (maturité
plus précoce avec une forte évolution vers 8 ans), le contrôle de l’impulsivité
(maturité vers 10 ans) et la planification (évolution plus lente tout au long de
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 119

l’adolescence sans toutefois atteindre la performance adulte) jouent ainsi un


rôle déterminant dans le développement de la performance aux tâches. L’étude
des interactions entre les fonctions exécutives au cours du développement est
également cruciale.
En ce qui concerne le développement des fonctions attentionnelles, beaucoup
de modèles indiquent que leur développement est caractérisé par un passage
progressif de processus sous-corticaux vers des processus plus corticaux et
contrôlés. La vitesse de traitement et l’alerte se développent très rapidement aux
jeunes âges pour se stabiliser ensuite, bien qu’elles continuent à évoluer durant
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l’adolescence. Ainsi, dès 8 à 10 semaines on note une évolution importante
de l’alerte. L’attention sélective involontaire, nécessaire pour l’exploration du
monde, se développe également très précocement, dès le premier jour de vie. Les
aspects plus volontaires et stratégiques se développent également assez tôt, dès
3-4 ans. L’attention sélective évolue ainsi considérablement entre 3 et 8 ans. La
vigilance se développe rapidement de 5-6 ans à 8-9 ans puis arrive à un plateau
entre 10 ans et 10-12 ans, avant d’évoluer à la puberté. Le développement de
l’attention divisée et de l’attention soutenue est, quant à lui, fort parallèle à
celui des fonctions exécutives.
Un premier facteur influençant le développement des fonctions attentionnelles
et exécutives est, bien entendu, la maturation neurologique et notamment la
maturation importante des régions préfrontales qui arrivent seulement à maturité
durant l’adolescence voire à l’âge adulte. Cette maturation améliore la vitesse de
traitement grâce à une meilleure myélinisation et à l’amélioration des connexions
entre régions cérébrales. La maturation influence également les mécanismes
d’inhibition et la quantité d’information pouvant être stockée en mémoire. Enfin,
d’autres facteurs comme le développement du langage et de la symbolique, la
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régulation des émotions et la compréhension des intentions sont autant d’élé-


ments qui affectent le développement des aspects attentionnels et exécutifs.
En tant que contexte majeur réclamant la mise en œuvre de ces processus, la
scolarisation joue également un rôle prépondérant dans ce développement.
Un second aspect essentiel du développement des fonctions a ttentionnelles et
exécutives concerne la stabilité des différences interindividuelles dans le temps.
L’équipe de Friedman et Miyake a réalisé plusieurs études longitudinales qui ont
mis en évidence des éléments cruciaux sur l’importance des facteurs génétiques
et la stabilité des différences interindividuelles (pour une revue voir Miyake
& Friedman, 2012). Dans une première étude, ces auteurs ont montré que des
questionnaires d’évaluation de troubles attentionnels remplis annuellement entre
7 et 14 ans par des enseignants d’un large échantillon d’enfants tout venant
120 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

(422 garçons, 444 filles) corrélaient, d’une part, fortement entre eux au cours
du temps et, d’autre part, avec des tâches exécutives d’inhibition, de flexibilité
et de mémoire de travail réalisées à 17 ans. Ces éléments semblent indiquer
une stabilité des différences interindividuelles au cours du temps. Dans une
seconde étude, ces auteurs ont investigué la capacité de jumeaux monozygotes
et dizygotes (468 garçons ; 477 filles) à inhiber un comportement (se retenir de
toucher un jouet attractif le plus longtemps possible pendant 30 secondes) à 14,
20, 24 et 36 mois. Les auteurs ont ensuite regardé la relation entre cette capacité
et les capacités d’inhibition, de flexibilité et de mémoire de travail des mêmes
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enfants évalués à 17 ans. Ils ont trouvé une forte relation entre cette inhibition
comportementale mesurée dans la petite enfance et les mesures exécutives
à 17 ans. En outre, les aspects génétiques (estimés via la comparaison entre
jumeaux monozygotes et dizygotes) étaient prépondérants pour expliquer cette
relation. Ces résultats suggèrent une relation biologique entre des capacités
innées à inhiber un comportement et le fonctionnement exécutif évalué tard
dans l’adolescence. Enfin, dans une troisième étude, les auteurs ont regardé
l’impact des aspects génétiques sur les fonctions d’inhibition, de mémoire de
travail et de flexibilité en comparant 316 jumeaux monozygotes (177 filles, 139
garçons) et 266 dizygotes (137 filles, 129 garçons). Les résultats indiquent que
le facteur commun des fonctions exécutives (voir plus haut) est influencé par
un facteur très élevé d’héritabilité (99 %) et que les facteurs spécifiques sont
également fortement influencés par des aspects génétiques. Ces trois études
placent les fonctions exécutives parmi les traits psychologiques les plus héri-
tables. En outre, les différences interindividuelles, fortement influencées par les
aspects génétiques, semblent extrêmement stables dans le temps. Ces éléments
permettent sans doute de comprendre l’héritabilité élevée du TDAH et, comme
nous le verrons, la stabilité des troubles cognitifs au cours du développement.

C OGNITION ET TDAH

Après ce survol rapide des modèles classiques des fonctions attentionnelles et


exécutives et de leur développement, nous abordons maintenant les troubles de
ces fonctions dans le TDAH.
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 121

Bref historique des troubles attentionnels et exécutifs


!

dans le TDAH

Les premières propositions théoriques concernant les difficultés des enfants


avec TDAH datent des années 1940 et étaient basées sur l’idée que ces enfants
souffraient de lésions cérébrales (« brain-injured child »). Selon cette vision,
les enfants avec TDAH présentaient des difficultés à inhiber des stimuli non
pertinents, c’est-à-dire une distractibilité liée à un trouble de l’attention sélec-
tive. Les comportements hyperactifs et inattentifs étaient donc la conséquence
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de cette sur-stimulation. En conséquence, il était conseillé aux parents et aux
enseignants de supprimer autant que possible les sources de distraction, ce qui
a été appelé la théorie de la réduction des stimuli. Plusieurs auteurs ont fait
cependant remarquer que, contrairement aux prédictions de cette théorie, les
enfants présentant un TDAH sont plutôt en recherche de stimulation et que,
lorsqu’elle était absente, ils ont tendance à la créer eux-mêmes. Par ailleurs, dans
des situations très stimulantes, telles des situations lud iques, les enfants avec
TDAH sont capables de se concentrer pour de longues périodes. Ces observations
ont amené les auteurs à considérer que l’hyperactivité dans le TDAH est en réalité
dirigée vers un but et que des situations hautement stimulantes amènent une
réduction des comportements hyperactifs et inattentifs. Dans ce contexte, la
théorie de la stimulation optimale de Zentall & Zentall (Zentall & Zentall, 1976)
proposait que les comportements hyperactifs et inattentifs soient en réalité
une adaptation afin de garder un équilibre homéostatique pour optimiser les
entrées sensorielles. En parallèle, d’autres observations suggéraient plutôt des
difficultés plurielles, liées à un trouble de l’autorégulat ion. Ainsi, dès le début
des années 1970, l’équipe de recherche canadienne de Dougla s (1972) mettait
en évidence des troubles attentionnels et exécutifs multiples dans le TDAH. Les
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

enfants présentant un TDAH étaient décrits comme présentant : 1) des difficultés


au niveau de l’investissement, de l’organisation et du maintien de l’attention et
de l’effort ; 2) des réponses impulsives ; 3) des difficultés à moduler leur niveau
d’excitation pour correspondre aux demandes en fonction de la situation ; 4)
une inclination anormalement élevée à rechercher des renforcements immédiats.
Comme nous pouvons le constater, ces données empiriques mettaient déjà en
avant une pluralité de difficultés cognitives dans le syndrome. En regard des
modèles cognitifs présentés précédemment, nous pourrions cataloguer ces diffi-
cultés comme : 1) des difficultés de maintien attentionnel probablement liées à
une altération de la vigilance ; 2) une impulsivité en lien av ec des troubles de
l’inhibition ; 3) des difficultés au niveau de l’autorégulation émotionnelle ; et
122 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

4) un problème de spécification du contrôle cognitif lié à une estimation des


coûts/bénéfices favorisant les renforcement immédiats.
Durant les années 1990 les principaux modèles cognitifs du TDA-H allaient
chacun s’intéresser à une de ces facettes du trouble et proposer des théories
à cause unique. En effet, à la suite des avancées de l’approche cognitive en
psychologie et en neuropsychologie, différents théories et modèles cognitifs du
TDAH allaient être proposés : 1) le modèle de la dysfonction exécutive et du
trouble de l’inhibition ; 2) le modèle du déficit de la régulation des états ; 3) la
théorie de l’aversion au délai ; 4) la théorie de l’intrusion du mode par défaut ;
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et 5) la théorie du déficit de traitement temporel des informations.

Modèles cognitifs à cause unique du TDAH


!

1. Le modèle de la dysfonction exécutive a vu le jour au milieu des années 1980


avec l’observation que les enfants souffrant de TDAH présentaient des altérations
dans les épreuves exécutives utilisées chez les patient cérébrolésés avec lésions
frontales. L’équipe de Douglas notait également la présence de tels déficits
tout en soulignant les limites de considérer le TDAH comme un trouble unique
de l’attention ou de l’inhibition (Shue & Douglas, 1992). D’après cette équipe,
l’hypothèse d’une dysfonction frontale semblait plus adaptée, considérant le rôle
intégrateur des régions frontales et leur implication dans plusieurs processus
de haut niveau. Dans un article de revue, Pennington et Ozonoff (1996), envi-
sageaient l’aptitude de la « métaphore frontale » et des fonctions exécutives
à rendre compte de quatre grands troubles de la psychopathologie développe-
mentale : le TDAH, l’autisme, les troubles des conduites sans TDAH associé et le
Syndrome de Gilles de la Tourette. Les études montraient une adéquation avec le
concept de fonctions exécutives uniquement dans le cas du TDAH et de l’autisme.
Selon eux, le TDAH serait plutôt caractérisé par un trouble de l’inhibition comme
l’indique la faible performance des patients à la tâche stop-signal (inhibition
d’une réponse manuelle lorsqu’un signal sonore est émis par l’ordinateur). Dans
la même lignée, un papier influent de Barkley (1997) décrivait un modèle pla-
çant l’inhibition au centre des déficits cognitifs du TDAH. Cependant, malgré
sa volonté de rendre compte de manière exhaustive des difficu ltés rencontrées
par les patients, le modèle de Barkley est en réalité peu valide sur le plan des
notions cognitives envisagées, notamment à cause des confusions entre niveau
comportemental et niveau cognitif présentes au sein du modèle. Néanmoins,
l’idée d’un rôle prépondérant des troubles exécutifs et principalement de l’inhibi-
tion reste encore défendue à l’heure actuelle, notamment dans certains travaux
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 123

d’imagerie cérébrale. Nous pouvons noter de ce courant qu’il a entraîné une


vision relativement dominante du TDAH comme la conséquence d’un trouble
développemental des fonctions exécutives.
2. La théorie de l’aversion au délai (delay aversion ; Sonuga-Barke, Taylor, Sembi,
& Smith, 1992) pose l’hypothèse que le facteur déterminant dans le TDAH serait
d’avantage une aversion pour tout délai temporel plutôt qu’un déficit au sein
d’un quelconque processus psychologique. Les enfants avec TDAH auraient ainsi
une aversion pour le fait de devoir attendre ou de devoir différer un compor-
tement dans le temps. Les symptômes d’inattention ou d’hyperactivité, plutôt
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que de représenter la cause des difficultés, seraient en fait destinés à réduire
la perception subjective de délai. Les problèmes cognitifs sont ici vus comme
une déviance en termes d’attitude motivationnelle. Cette théorie est à mettre
en lien avec les modèles récents du contrôle cognitif qui envisagent l’impact de
la motivation et de l’effort (Shenhav et al., 2013).
3. Le modèle du déficit de la régulation des états (state regulation deficit ;
Sergeant, 2005) est basé sur le modèle cognitif-énergétique du processus de
traitement de l’information et questionne le problème fondamental dans le TDAH
à inhiber ou à différer des réponses. Ce modèle distingue entre les processus (ou
opérations élémentaires) et les états ou mécanismes énergétiques qui modulent
les opérations élémentaires. Trois systèmes énergétiques sont proposés : l’exci-
tation qui alerte les processus sensoriels, l’activation qui est impliquée dans le
contrôle de l’empressement moteur, et l’effort qui est influencé par des facteurs
motivationnels comme la connaissance des résultats, la récompense et l’autoré-
gulation. Le TDAH est considéré comme reflétant une dysfonction sous-jacente
des mécanismes (états) énergétiques, surtout des composants d’activation et
d’effort (Sergeant, 2005). Le modèle du déficit de régulation des états propose
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

que les individus avec TDAH auraient des difficultés à exercer un effort pour
maintenir un état d’activation optimal durant des activités difficiles et dans
des conditions sous-optimales telles des taux de présentation très lents ou très
rapides de stimuli (Sergeant, 2005). À nouveau, on peut voir ici le lien avec
les modèles récents du contrôle cognitif impliquant la motivation et l’effort
(Shenhav et al., 2013).
4. La théorie des intrusions du mode par défaut proposée par Castellanos et
Sonuga-Barke (Sonuga-Barke & Castellanos, 2007) propose que les fluctuations
observées dans le TDAH dans les épreuves de temps de réaction simples soient
liées à l’intrusion régulière et anormale du réseau cérébral dit du mode par défaut
(responsable de l’attention dirigée vers nos pensées). Ce réseau du mode par
défaut s’activerait anormalement dans des situations où une attention dirigée
124 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

vers l’extérieur est requise et où il devrait être inhibé. De s travaux récents ont
montré qu’une dérégulation du mode par défaut est observée pour les conditions
sous-optimales (taux de présentation très lents ou très rapides de stimuli) et
représente donc une explication plausible du modèle du déficit de la régulation
des états de Sergeant. D’autres travaux ont montré que le mod e par défaut est
activé lors d’une tâche de Go/No go chez des enfants avec TDAH de 9 à 15 ans
alors qu’on ne retrouve pas cette activation chez des enfants à développement
typique. Cependant, cette observation du réseau de mode par défaut n’est plus
observée en situation où l’on donne des récompenses, ni lors de la prise de
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méthylphénidate, ce qui indique que des aspects de motivation et de récompense
sont liés à ce phénomène. La théorie du mode par défaut est donc à mettre en lien
avec une altération de la vigilance mais également des aspects de spécification
du contrôle cognitif (Shenhav et al., 2013).
5. La théorie du déficit de traitement temporel des informations (voir par exemple
Toplak & Tannock, 2005) postule que les troubles cognitifs dans le TDAH sont
liés à un déficit de perception et de représentation du temps entraînant une
atteinte de la gestion temporelle des informations. Des régions cérébrales comme
le cervelet, les noyaux de la base et les régions préfrontales sont impliqués dans
ce traitement temporel de l’information et leur activité est souvent altérée dans
les études d’imagerie comparant individus avec et sans TDAH.
Ces modèles à cause unique, après avoir suscité un engouement important, ont
rapidement été confrontés à leurs limites, d’une part, dans la capacité à expliquer
l’ensemble des symptômes rencontrés dans le TDAH, d’autre part, face à l’absence
de présence systématique de l’un ou l’autre de ces déficits chez les patients. À la
suite de ces désillusions, dans les années 2000, la reconnaissance (à nouveau)
de l’hétérogénéité des difficultés cognitives du TDAH a amené les auteurs à
considérer le trouble comme un concept clinique recouvrant plusieurs réalités
cognitives différentes. Ceci a entraîné l’évolution des modèles cognitifs vers
une vision hétérogène des déficits cognitifs du TDAH. Des modèles à deux voies
ont d’abord vu le jour pour évoluer aujourd’hui vers des hypothèses comprenant
plusieurs ensembles distincts de déficits cognitifs.

La vision actuelle
!

Comme l’ont souligné récemment Sonuga-Barke et Coghill (2014), les éléments


accumulés au travers de nombreuses études ont fait significativement avancer le
domaine de la cognition dans le TDAH. Il est généralement accepté que le TDAH
soit à la fois complexe, avec des déficits dans de multiples pr ocessus cognitifs
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 125

et dans les systèmes cérébraux sous-jacents, et hétérogène, avec différents


individus affichant des profils très différents au sein de divers domaines cognitifs
et motivationnels. Ceci a entraîné l’émergence de modèles à voies multiples
(multiple pathways). Ainsi, Sonuga-Barke et Fairchild (2012) ont récemment
proposé de considérer trois grands réseaux cérébraux associés aux difficultés
cognitives dans le TDAH. Le premier réseau est celui du mode par défaut impli-
quant le cortex préfrontal médial et le cortex cingulaire postérieur. L’activation
inadaptée de ce réseau entraînerait les fluctuations attentionnelles (principale-
ment de la vigilance) classiquement observées dans le TDAH et les difficultés
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de gestion temporelle des informations. Un second réseau impliquant le cortex
préfrontal dorsolatéral et le striatum dorsal serait associé aux troubles exécutifs
(principalement de l’inhibition). Le troisième et dernier réseau engageant le
cortex orbitofrontal, le striatum ventral et l’amygdale serait impliqué dans le
traitement dysfonctionnel des signaux de récompense et serait donc responsable
de phénomènes tels que l’aversion au délai et la préférence exagérée pour les
renforcements rapides (en lien avec l’atteinte de la spécification du contrôle
cognitif). Plusieurs études menées par différentes équipes ont depuis confirmé
la présence d’altérations distinctes dans les tâches cognitives évaluant ces trois
réseaux (e.g., Sjowall, Roth, Lindqvist, & Thorell, 2013), confirmant l’intérêt de
considérer ces trois ensembles de difficultés.
Cette vision à voies multiples souligne, notamment, l’importance d’une approche
individualisée de la prise en charge. En effet, en fonction de la nature des
troubles observés, il serait logique que la prise en charge vise des objectifs
différents. Cette vision plurielle des troubles cognitifs du TDAH, finalement
assez proche de celle des observations de Douglas en 1972 et appuyée par
les données neuroscientifiques, représente certainement un grand progrès dans
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la compréhension de l’hétérogénéité du TDAH et des réponses aux différentes


prises en charge. Néanmoins, nous l’avons vu dans la première partie de ce
chapitre, les fonctions exécutives et attentionnelles comprennent davantage de
fonctions ou composants que ne le propose cette approche à trois voies. Il est
donc probable que d’autres troubles puissent également constituer une source
d’hétérogénéité supplémentaire dans le TDAH. Deux études récentes investiguant
un nombre plus important de fonctions attentionnelles et exécutives suggèrent
la présence de davantage de profils cognitifs dans le TDAH. Coghill, Seth, &
Matthews (2014), en ajoutant des mesures de mémoire de travail et de prise
de décision, ont ainsi mis en évidence des sous-groupes d’enfants avec TDAH
perturbés spécifiquement dans chacune des six fonctions envisagées (inhibition,
aversion au délai, traitement temporel de l’information, v igilance, mémoire de
126 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

travail et prise de décision). L’équipe de Nigg (Fair, Bathula, Nikolas, & Nigg,
2012), à partir de vingt mesures comportementales évaluant la performance
dans sept grandes fonctions cognitives (mémoire de travail, inhibition, alerte,
vigilance, traitement temporel de l’information et vitesse de traitement), a mis
en évidence six profils cognitifs distincts chez des enfants avec TDAH en utilisant
des méthodes statistiques (théorie des graphes et de détection de communauté).
Comme ces travaux l’indiquent, le futur des études scientifiques et probablement
de la prise en charge clinique dépendra sans doute de notre capacité à évaluer
et intégrer cette hétérogénéité des profils cognitifs dans l e TDAH. En effet, de
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nombreuses méta-analyses récentes portant sur les effets d es prises en charge
cognitives et métacognitives dans le TDAH ont indiqué des effets limités, sinon
absents, de ces traitements. Néanmoins, comme souligné par certains auteurs,
un entraînement cognitif qui ne tienne pas compte du profil in dividuel n’a pas
beaucoup de sens. Nous avons donc besoin de davantage d’études tenant compte
de l’hétérogénéité et de la spécificité des profils cognitifs pour pouvoir envisager
l’efficacité de ces prises en charge. À notre connaissance, des données de ce
type ne sont pas encore disponibles dans la littérature.

É VALUATION COGNITIVE DU TDAH


DANS LA PRATIQUE CLINIQUE

Comme évoqué dans les sections précédentes, l’altération de la performance


associée aux tâches attentionnelles et exécutives dans le TDAH est étayée
par de très nombreuses études. D’après les articles de synthèse, les tâches les
plus sensibles sont la tâche stop-signal (inhibition de réponse), les tâches
de mémoire de travail verbale et spatiale, les tâches de performance continue
(CPT ; inhibition, alerte et vigilance), le Trail Making test (flexibilité), la tour
de Londres (planification), la tâche de classement de cartes du Wisconsin (flexi-
bilité et raisonnement) et le test de Stroop (inhibition). Les tâches d’inhibition,
de planification, de flexibilité, d’alerte et de vigilance sont significativement
améliorées par la médication dans 70 % ou plus des études. L’utilisation de ces
épreuves est donc devenue pratique courante dans la clinique du TDAH.
En ce qui concerne l’intérêt du testing cognitif pour le diagnostic du TDAH, il
est souvent admis que les tests ne sont pas un élément suffisant de diagnostic,
notamment en raison de leur manque de spécificité, de la variabilité entre tâches
censées évaluer la même fonction cognitive et des tailles d’effet trop limitées
pour expliquer l’ensemble des cas de TDAH. Nous rappelons que dans les études
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 127

présentées précédemment, de nombreux enfants avec un diagnostic de TDAH


ne présentaient pas de troubles cognitifs dans les fonctions investiguées. Les
troubles cognitifs semblent donc à envisager comme une expression du trouble
parmi d’autres plutôt qu’un symptôme unique et nécessaire. Toutefois, certains
auteurs estiment que l’évaluation cognitive demeure un élément contributif au
diagnostic qui devrait faire partie intégrante de celui-ci, notamment afin de
caractériser l’endophénotype cognitif du patient ou d’évaluer l’efficacité d’un
traitement. De plus en plus de cliniciens ont ainsi recours à des évaluations cog-
nitives détaillées pour affiner leurs mises au point. Certains auteurs préconisent
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également de grouper les différentes mesures en un seul score afin d’arriver
à un taux de discrimination suffisant. Cette démarche est certainement une
évolution utile et souhaitable pour autant que les résultat s des tests cognitifs
soient toujours considérés avec prudence et en regard de leurs propres limites
qui restent importantes (voir ci-dessus).
Un autre point à évoquer concerne l’utilisation de questionnaires investiguant
le fonctionnement attentionnel et exécutif. Ces dernières années ont vu se
développer différentes échelles d’investigation des aspects attentionnels et
exécutifs. Ces questionnaires représentent une information supplémentaire qui
peut se révéler précieuse, notamment à travers l’évocation de situations proches
de la vie quotidienne. Étant donné le gain temporel que peuvent représenter ces
outils par rapport à une évaluation neuropsychologique, la tentation pourrait
être grande de s’y limiter. Cependant, l’aspect subjectif des questionnaires doit
amener à les considérer avec prudence. Certains auteurs ont ainsi montré une
faible corrélation entre les épreuves exécutives classiques et ce type de ques-
tionnaires. Il faut dès lors garder à l’esprit que ces deux types d’outils apportent
chacun une information à la fois distincte et complémentaire.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

L E DÉVELOPPEMENT DES TROUBLES COGNITIFS


DANS LE TDAH

Dans un éditorial récent, Sonuga-Barke & Coghill (2014) notaient que les
approches actuelles du TDAH capturent peu les aspects dynamiques de l’expres-
sion du symptôme. Or, tant le niveau que le profil des symptômes fluctuent
de jour en jour et d’année en année. De plus, il est difficile de savoir si ces
fluctuations représentent de réels changements dans le comportement ou si
elles sont liées au contexte et aux standards imposés par l’environnement
immédiat (par exemple en fonction de l’enseignant, de l’institution scolaire ou
128 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

du milieu professionnel chez les adultes). Sonuga-Barke & Coghill proposent dès
lors de redéfinir le concept de TDAH et de l’élargir en passant d’un phénotype
clinique statique à un syndrome incorporant la notion dynamique de trajectoire
développementale du syndrome. Le but serait de capturer la « croissance » du
trouble en décrivant tant son augmentation, sa persistance ou sa diminution,
que ses fluctuations au cours du temps. À terme, cela devrait permettre de
différencier diverses formes du syndrome TDAH : à « début précoce », à « début
tardif », « persistant » et « non persistant ». Cette vision dynamique des
symptômes du TDAH est également envisageable pour les troubles cognitifs du
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syndrome. Or, force est de constater que nous disposons actuellement de très
peu d’indications concernant l’évolution temporelle des difficultés cognitives
au sein du TDAH. Cette question est complexe car l’évaluation des fonctions
exécutives et attentionnelles est dépendante de la qualité psychométrique des
épreuves, ce qui inclut la validité, la fidélité et la sensibilité des outils. Comme
évoqué plus haut, ces aspects laissent souvent à désirer dans le domaine des
fonctions attentionnelles et exécutives. En effet, les épreuves souffrent du
problème de l’impureté des tâches et d’un manque de validité conceptuelle.
En outre, leur sensibilité et leur fidélité sont rarement évaluées. Les effets
de re-test peuvent également poser problème car la définition des fonctions
exécutives comprend notamment l’idée d’adaptation à des si tuations nouvelles.
Ces éléments compliquent l’estimation de l’évolution des difficultés. En outre, la
reconnaissance d’une persistance à l’âge adulte des troubl es cognitifs associés
au TDAH est relativement récente, datant de la fin des années 1990, et peu
d’études longitudinales ont été réalisées jusqu’à présent. Nous disposons donc à
l’heure actuelle de très peu d’informations sur le développement des troubles
cognitifs au cours du temps dans le TDAH. Les données disponibles indiquent
que les adolescents et les adultes semblent présenter des déficits attentionnels
et exécutifs comparables à ceux observés chez les enfants. Cependant, pour les
objectiver il convient d’utiliser des épreuves qui restent sensibles à l’adolescence
et à l’âge adulte, ce qui a amené certains auteurs à proposer des tâches
exécutives plus complexes et plus proches des conditions de la vie quotidienne.
Les quelques études qui se sont intéressées à la persistance et à la stabilité des
troubles suggèrent une stabilité entre l’enfance et l’adolescence durant 5 années
de suivi et une stabilité chez le jeune adulte durant une période de 7 ans
d’intervalle. Ces éléments semblent donc indiquer que les troubles attentionnels
et exécutifs persistent à l’adolescence et à l’âge adulte dans le TDAH. Ils sont
compatibles avec les données de l’équipe de Friedman et Miyake évoquées
précédemment qui montrent une stabilité des différences in terindividuelles au
niveau exécutif, avec une forte influence génétique. Enfin, chez l’adolescent et
Fonctions attentionnelles et exécutives dans le TDAH 129

l’adulte, l’évaluation des aspects émotionnels est nécessaire car ils sont souvent
marqués et influencent les fonctions attentionnelles et exé cutives. Cependant,
les études récentes indiquent que les déficits cognitifs persistent même lorsque
l’on contrôle pour ces aspects de comorbidité.

C ONCLUSION ET PERSPECTIVES

Les altérations exécutives et attentionnelles dans le TDAH sont aujourd’hui consi-


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dérées comme des éléments majeurs du syndrome. La vigilance, l’inhibition et la
spécification du contrôle cognitif semblent particulièrement touchées dans ce
trouble. Cependant, l’hétérogénéité des difficultés cognitives observées doit nous
amener à utiliser un nombre important d’outils afin de mieux définir les profils
cognitifs des patients. Il faut ainsi tendre vers des traitements individualisés en
fonction du profil cognitif. La même constatation s’impose pour la recherche sur
le TDAH qui, si elle veut pouvoir franchir un cap supplémentaire, devra également
mieux prendre en compte cette hétérogénéité. Enfin, la prise en compte de
l’évolution des symptômes et des troubles cognitifs au cours du développement
est un domaine de recherche récent pour lequel nous ne disposons encore que
de peu d’informations et qui nécessite des études supplémentaires.

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Chapitre 6

TDAH, réactivité émotionnelle


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et troubles bipolaires

Élodie Courtabessis, Diane Purper-Ouakil

L ’ÉMOTION FAIT RÉFÉRENCE à une réaction affective transitoire, intense survenant


après une stimulation externe. La régulation émotionnelle est la capacité
à modifier un état émotionnel pour développer des comportements adaptatifs
orientés vers un but. Elle englobe les processus qui permettent à l’individu
de choisir, de faire attention, d’évaluer les stimuli émotionnels activés et d’y
répondre de manière flexible. Cette capacité à réguler les émotions est un aspect
important du fonctionnement adaptatif de l’individu et constitue le prérequis
d’une bonne santé mentale, somatique et sociale. Les processus mis en jeu sont
physiologiques, cognitifs ou comportementaux, ils peuvent être automatiques
ou volontaires, conscients ou non ; Phillips, Ladouceur, et Drevets 2008). Les
émotions sont l’objet de régulations neurobiologiques par l’intermédiaire de pro-
cessus inhibiteurs, dans un système de contrôle « de haut en bas » (top-down)
qui va des zones corticales vers les zones sous-corticales. Cette régulation met
en jeu un contrôle cognitif qui permet une inhibition de la réponse spontanée
lorsque cette dernière n’est pas adaptée au contexte. Les émotions ont elles-
mêmes un rôle régulateur dans la mesure où elles influencent le comportement,
comme par exemple les réactions de fuite ou d’affrontement devant un dan-
ger naturel ; on parle alors de régulation « de bas en haut » (bottom-up) (D.
Purper-Ouakil et Franc 2011).
TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 133

R ÉACTIVITÉ ÉMOTIONNELLE – DYSRÉGULATION


ÉMOTIONNELLE

La réactivité émotionnelle peut être comprise comme une dimension tempéramen-


tale ; à l’extrême de la dimension, l’hyperréactivité émotionnelle fait référence à
une réponse émotionnelle instable et excessive face aux événements mineurs de
la vie quotidienne. Selon les modèles, elle est qualifiée de labilité émotionnelle,
d’émotionnalité élevée ou de dysrégulation émotionnelle. Chez l’enfant, le tempé-
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rament difficile, dont l’émotionnalité est une composante centrale, est un facteur
de risque pour le développement des troubles internalisés, anxio-dépressifs et
des troubles externalisés dont le TDA (D. Purper-Ouakil et Franc 2011).
La dysrégulation émotionnelle fait référence à une réactio n émotionnelle inap-
propriée selon le développement de l’enfant, selon le contexte et selon les
normes sociales. Elle se manifeste par des changements émotionnels rapides
(labilité), une attribution anormale d’attention à des sti muli émotionnels, une
irritabilité, des changements d’humeur imprévisibles, un tempérament irascible,
des crises de colères, des crises de pleurs, une intolérance à la frustration.
Dans l’ouvrage récent de Stringaris, l’irritabilité est définie comme un état émo-
tionnel prédisposant à la colère ; elle peut être épisodique ou chronique. Il est
difficile de savoir s’il s’agit d’une émotion, d’une humeur ou d’un tempérament ;
la différence entre ces trois concepts repose sur la durée de chacun, des minutes
pour l’émotion, des mois pour l’humeur et des années pour le tempérament. Dans
le DSM-IV, l’irritabilité fait partie des critères de trois diagnostics : la dépression,
la dysthymie et le trouble bipolaire. C’est pourquoi les auteurs préfèrent parler de
l’irritabilité comme d’une qualité de l’humeur : « l’humeur irritable » (Stringaris
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

et Taylor 2015). Les termes d’irritabilité, dysrégulation émotionnelle, labilité


émotionnelle sont assez proches. La dysrégulation émotionnelle s’applique quelle
que soit la valence des émotions tantôt négative, tantôt positive alors que l’irri-
tabilité fait référence à des émotions négatives. L’irritabilité concernerait 3 à
5 % des enfants ; elle entraîne des conséquences négatives comme un taux élevé
de comorbidités psychiatriques, de suicidalité et de retentissement fonctionnel
et social (Deveney et al. 2015).
En psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, l’irritabilité est fréquente dans
le TDAH, dans les troubles de l’humeur, les troubles anxieux et dans les
troubles externalisés (trouble oppositionnel avec provocation (TOP), trouble des
conduites). La labilité émotionnelle se rencontre également dans les troubles de
personnalité borderline où l’instabilité affective est due à la réactivité marquée
134 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de l’humeur, et nous y retrouvons d’autres symptômes communs avec le TDAH à


savoir : l’impulsivité, les colères intenses et inappropriées ou les difficultés à
contrôler sa colère.

D YSRÉGULATION ÉMOTIONNELLE
ET COMPORTEMENTALE SÉVÈRE ET T ROUBLE DISRUPTIF
AVEC DYSRÉGULATION ÉMOTIONNELLE
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En 2003, le National Institute of Mental Health (NIMH) dirigé par Leibenluft
met au point les critères du severe mood disorder (SMD) traduit en français par
dysrégulation émotionnelle et comportementale sévère. La caractérisation de ce
syndrome a pour but de mieux étudier cette population et des liens éventuels
avec les troubles bipolaires de l’adulte. Cependant dans le DSM-5, paru en 2013,
le terme de « Trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle », Disruptive
Mood Dysregulation Disorder (DMDD), en anglais, lui a été préféré. Le DMDD
appartient à la catégorie des Troubles de l’humeur, en raison de son évolution vers
les troubles dépressifs et les troubles anxieux (American Psychiatric Association
2013).
Les entités de SMD et DMDD sont assez proches et l’irritabilité en constitue le
symptôme clé. Les différences reposent pour le DMDD sur l’abaissement de l’âge
de début à 10 ans et la suppression du critère d’excitabilité (hyperarousal), dans
le but de réduire la confusion avec le TDAH (Tableau 6.1). En effet l’excitabilité
étant à la fois un critère de manie et du TDAH elle a été considérée comme peu
spécifique.
Les données épidémiologiques actuelles suggèrent qu’une irritabilité chronique
durant l’enfance est prédictive de dépression unipolaire e t de troubles anxieux
à l’âge adulte. Une étude longitudinale récente s’est intéressée au suivi sur 2
et 4 ans des enfants avec les symptômes d’irritabilité sévère (répondant aux
critères du Severe Mood Dysregulation SMD). Au cours du suivi, l’irritabilité
restait invalidante avec un retentissement sévère dans au moins un domaine du
fonctionnement psychosocial ou bien un retentissement moyen dans plusieurs
domaines. La majorité des jeunes avec SMD étaient suivis en psychiatrie et
traités par antipsychotiques (Deveney et al. 2015).
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Tableau 6.1. Comparaison des critères diagnostiques du SMD et du DMDD.

Critères du SMD Critères diagnostiques du DMDD


Critères d’inclusion
1- Un âge entre 7 et 17 ans et une survenue du syndrome G- Le diagnostic ne doit pas être fait pour la première fois avant
avant 12 ans ; l’âge de 6 ans ou après l’âge de 18 ans.

H- De par l’observation, l’âge d’apparition des symptômes A-E


est avant 10 ans.
2- Une humeur anormale (tristesse, colère) présente au moins D- L’humeur entre ces crises est chroniquement irritable ou
une demi-journée, la plupart des jours, et suffisamment sévère colérique la plupart de la journée, presque tous les jours, et est
pour être constatée par l’entourage de l’enfant (parent, observable par l’entourage.
professeur et pairs) ;
3- Des signes d’excitabilité définis par au moins 3 des critères
suivants : insomnie, agitation, distractibilité, accélération de la
pensée ou fuite des idées ;
4- L’enfant montre une réactivité marquée et amplifiée aux A- Crises de colères sévères et récurrentes avec des
stimuli négatifs comparé à ses pairs. On retrouve par exemple manifestations verbales (rage verbale) et/ou
des crises de colères aux moments des frustrations comportementales (agression contre les personnes ou les
(inappropriées compte tenu de son âge et du facteur objets) qui sont inappropriées en intensité et en durée par
précipitant), des crises de rage verbale, des agressions contre rapport à la situation ou la provocation.
les personnes ou les objets. B- Les crises de colère ne sont pas en lien avec le niveau de
développement de l’enfant.

C- Les crises de colère ont lieu, en moyenne, trois fois par


Ces événements surviennent en moyenne 3 fois par semaine ; semaine ou plus.
5- Les symptômes décrits dans le critère 2, 3 et 4 sont E- Les critères A-D sont présents depuis au moins 12 mois.
habituellement présents et persistent pendant plus de 12 mois, Durant cette période, il n’y a pas eu 3 mois consécutifs ou plus
sans intervalle libre de plus de 2 mois ; sans que tous les symptômes des critères A-D soient présents.
TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires
135

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136
T ROUBLE D ÉFICIT

Tableau 6.1. (suite)

6- Les symptômes doivent avoir au moins un retentissement F- Les critères A et D sont présents dans au moins deux ou
fonctionnel important dans un domaine et moyennement trois domaines (maison, école, avec les pairs) et sont sévères
important dans un second parmi : le domicile, l’école, les dans au moins l’un d’entre eux.
relations avec les pairs.
Critères d’exclusion :
7- La présence d’un des symptômes cardinaux de la manie : I- Il n’y a jamais eu de période de plus d’une journée durant
une humeur élevée ou expansive, des idées de grandeur, une laquelle tous les symptômes d’un épisode de manie ou
augmentation de l’estime de soi, une réduction épisodique du d’hypomanie, sauf pour la durée, étaient retrouvés.
besoin de sommeil ;
DE L’ATTENTION AVEC OU SANS

8- Ces symptômes surviennent de manière épisodique ; J- Les symptômes n’apparaissent pas exclusivement pendant
des épisodes dépressifs caractérisés et ne sont pas mieux
expliqués par un autre trouble psychiatrique.
9- Le sujet répond aux critères d’un abus de substances dans
les 3 mois qui précèdent ;
H YPERACTIVITÉ

10- QI<70 ;

11- Les symptômes sont dus aux effets physiologiques d’une K- Les symptômes ne sont pas attribuables à l’effet d’un
substance ou liés à une affection médicale ou neurologique. toxique ou à toute autre pathologie médicale ou neurologique.
DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 137

TDAH ET DYSRÉGULATION ÉMOTIONNELLE

Le TDAH et la dysrégulation émotionnelle (irritabilité, tempérament chaud, faible


tolérance à la frustration, changement d’humeur imprévisible et faible régula-
tion émotionnelle) sont souvent associés entraînant un rejet des pairs et une
mauvaise intégration sociale. Les difficultés émotionnelles décrites dans le TDAH
pourraient être liées à un déficit du contrôle cognitif ou à un excès de réactivité
émotionnelle à certains stimuli environnementaux (D. Purper-Ouakil et Franc
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2011).
La labilité émotionnelle est un symptôme fréquent chez les enfants/adolescents
atteint de TDAH, pour autant, il est non spécifique (Diane Purper-Ouakil, Vacher,
et Villemonteix 2014). La labilité émotionnelle est plus fréquente lorsque la
présentation du TDAH est mixte, elle est associée à une symptomatologie du
TDAH plus sévère. De plus, la labilité émotionnelle est plus importante chez
les filles que chez les garçons et chez les enfants plus âgés co mparés aux plus
jeunes. La labilité émotionnelle sévère était associée à l’intensité des symp-
tômes de TDAH (notamment dans la dimension hyperactivité/impulsivité), ainsi
qu’à une comorbidité plus fréquente avec le TOP, les troubles de l’humeur et
l’abus de substances (Sobanski et al. 2010). Ces données mettent l’accent sur la
proximité entre la labilité émotionnelle des sujets avec TDAH et les symptômes
oppositionnels ; en effet, la dimension hyperactive-impulsive n’est plus prédic-
tive de la labilité émotionnelle lorsqu’on prend en compte l’opposition et les
symptômes émotionnels (Sobanski et al. 2010; Diane Purper-Ouakil, Vacher, et
Villemonteix 2014). De plus, il existe un lien entre la labilité émotionnelle et
les troubles affectifs chez les sujets avec TDAH, avec un risque plus élevé de
troubles dépressifs (Sobanski et al. 2010). De plus dans l’étude de Sobanski, les
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résultats montrent que la labilité émotionnelle chez les sujets avec TDAH n’est
pas simplement un corrélat de la sévérité des symptômes principaux du TDAH
ni des troubles associés. Les études familiales et de jumeaux ne mettent pas
en évidence une co-ségrégation de la labilité émotionnelle avec le TDAH. Cette
donnée va à l’encontre de l’existence d’un sous-type diagnostique « TDAH et
Labilité émotionnelle » (Sobanski et al. 2010). Concernant les différences entre
DMDD et TDAH, l’irritabilité envahissante et une intolérance à la frustration
sont caractéristiques du DMDD, mais la tendance à l’impulsivité et l’attention
désorganisée du TDAH ne sont pas des caractéristiques essentielles du DMDD
(American Psychiatric Association 2013).
138 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

De nombreux symptômes du TDAH et du TOP se chevauchent comme le manque


de contrôle de l’impulsivité, le fait d’être facilement contrarié, facilement frus-
tré, colérique. L’impulsivité émotionnelle est commune à ces deux troubles. En
2009, Stringaris identifie trois dimensions du TOP : l’irritabilité, le fait d’être
têtu et l’attitude blessante. Les résultats des études prospectives suggèrent
que les dimensions de l’opposition chez les enfants/adolescents ont une valeur
prédictive ; l’irritabilité est plus fortement associée aux troubles dépressifs ;
l’entêtement/l’attitude blessante est associée avec les comportements antiso-
ciaux. Ainsi l’humeur irritable peut expliquer la transition de l’opposition à la
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dépression (Stringaris et Goodman 2009).
En termes de réponse au traitement, le phénotype dysrégulation émotionnelle
n’était pas associé à la réponse au traitement (Peyre et al. 2015; Diane Purper-
Ouakil, Vacher, et Villemonteix 2014). Dans les essais cliniques ayant pris en
compte la labilité émotionnelle, les traitements agissant sur les dimensions
typiques du TDAH sont également actifs sur les symptômes émotionnels (Diane
Purper-Ouakil, Vacher, et Villemonteix 2014).

T ROUBLE B IPOLAIRE

L’irritabilité sévère, l’hyperactivité et la distractibilité pourraient-elles être des


formes développementales de la manie ?
Le trouble bipolaire pédiatrique est une entité diagnostique controversée. La
prévalence du trouble bipolaire pédiatrique est de 1,8 % (Van Meter, Moreira, et
Youngstrom 2011). Le trouble bipolaire est rare avant l’âge de 15 ans, il est donc
difficile de poser ce diagnostic avant la puberté. L’express ion de la manie chez
l’enfant se différencie de celle de l’adulte bien qu’il y ait des caractéristiques
communes, ce qui soulève la question des frontières diagnostiques entre manie
et d’autres types de dysrégulations affectives. Parmi celles-ci, les difficultés de
régulation émotionnelle qui sont rencontrées dans les troubles tels que le TDAH
et le TOP. La difficulté en termes de diagnostic différentiel entre ces troubles
et le risque de diagnostic excessif de trouble bipolaire chez l’enfant a amené
certains auteurs à définir le SMD puis le DMDD dans le DSM-5 (cf. chapitre 3).
L’irritabilité est fréquente dans la dépression et fait également partie des symp-
tômes maniaques. La distinction entre DMDD et trouble bipolaire est claire
puisque l’évolution est chronique pour le DMDD et épisodique pour le trouble
bipolaire. Le DSM-5 stipule bien cette distinction, il mentionne également que
certains auteurs considéraient une irritabilité sévère non épisodique comme
TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 139

une caractéristique du trouble bipolaire mais l’apparition du DMDD permet de


bien différencier ces deux troubles (American Psychiatric Association 2013). Dans
le DSM-5, l’épisode maniaque se caractérise par une période délimitée durant
laquelle l’humeur est élevée, expansive, ou irritable, de façon anormale et persis-
tante, distincte de l’humeur habituelle d’une durée d’au moins 7 jours (ou toute
autre durée si une hospitalisation est nécessaire). Elle est associée à différents
symptômes (idées de grandeur, agitation psychomotrice tachypsychie, fuite des
idées, distractibilité, diminution du besoin de sommeil, achats inconsidérés
et/ou hypersexualité). Pour l’épisode hypomaniaque, la sévérité de l’épisode
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n’entraîne pas une altération marquée du fonctionnement de l’individu, pourtant
la symptomatologie est manifeste pour l’entourage et la durée est d’au moins
4 jours. Ces critères sont valables quel que soit l’âge du sujet, toutefois des
particularités ont été décrites chez l’enfant et l’adolescent. Dans une revue de
la littérature et méta-analyse de Kowath de 2005, les auteurs identifient que
les symptômes de manie les plus fréquemment retrouvés dans les études chez
l’enfant et l’adolescent sont l’augmentation d’énergie (8 9 %), la distractibilité
(84 %), la logorrhée (82 %). L’irritabilité (81 %), les idées de grandeur (78 %)
et l’élation de l’humeur/l’euphorie (70 %) bien que fréquemment retrouvées
sont controversées dans la littérature. Les autres symptômes retrouvés sont la
diminution du besoin de sommeil, la tachypsychie. Dans la population pédia-
trique, les symptômes les moins communs sont l’hypersexualité (38 %) et la
fuite des idées (56 %), pour ces symptômes, les différences sont importantes et
significatives entre les études. Les comorbidités les plus souvent associées sont
le TDAH (62 %) et le TOP (53 %) bien qu’il existe une hétérogénéité importante
entre les études (Kowatch et al. 2005).
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TDAH ET TROUBLE BIPOLAIRE

Des manifestations émotionnelles telles que l’irritabilité, la dysrégulation des


émotions, l’hyperesthésie, surviennent dans l’évolution du trouble bipolaire mais
également dans le TDAH ; ces symptômes représentent des éléments de confusion
entre les deux diagnostics. Il est souvent nécessaire de faire une observation
prolongée pour mettre en évidence la cyclicité des épisodes caractéristique du
trouble bipolaire. Toutefois, le diagnostic peut être plus difficile si les cycles
sont rapides ou en présence d’épisodes mixtes (Thoumy et Bouvard 2014).
L’existence d’une comorbidité réelle entre ces deux troubles est reconnue. La
prévalence de la comorbidité TDAH et trouble bipolaire est assez hétérogène
140 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

en fonction des données de la littérature. La prévalence de cette comorbidité


est élevée dans les études transversales et tend à diminuer dans les études de
cohorte. La prévalence serait autour de 15 % lorsque la question du diagnostic
différentiel est écartée (Thoumy et Bouvard 2014). De plus, le risque de trouble
bipolaire augmente dans la population des adultes avec TDAH. Les enfants de
parents bipolaires sont aussi plus susceptibles d’avoir un TDAH ; ce risque est
multiplié par 8 selon l’étude de Birmaher, avec des symptômes thymiques généra-
lement plus sévères (Birmaher et al. 2010). Globalement, la symptomatologie est
plus bruyante et plus sévère lorsqu’il y a une comorbidité TDAH/trouble bipolaire.
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Elle est dominée par l’irritabilité, l’opposition, la provocation, une agitation
physique plus intense, une hyperesthésie exacerbée et par l’impulsivité qui peut
être source d’auto ou d’hétéro-agressivité. L’intolérance à la frustration est égale-
ment majorée. La symptomatologie est exacerbée lors des phases maniaques ou
hypomaniaques mais elle ne disparaît pas entre les phases (Thoumy et Bouvard
2014). L’élation de l’humeur aggrave les difficultés de gestion des émotions,
notamment pour les émotions à valence négative (colère, tristesse). Shankman a
mis en évidence que l’irritabilité interférait avec la reconnaissance des émotions
(Shankman et al. 2013). Une irritabilité élevée pourrait ainsi entraîner des
« réponses sociales » inappropriés (Stringaris et Taylor 2015; Thoumy et Bouvard
2014).

É VALUATION

Tout d’abord, l’évaluation clinique se base sur l’histoire développementale du


patient en identifiant les symptômes émotionnels et comportementaux, du TDAH,
du trouble bipolaire, et en spécifiant le caractère évolutif (épisodique et/ou chro-
nique et/ou cyclique). L’utilisation d’échelles psychométriques est recommandée.
La Child Behavior Checklist (CBCL) est un questionnaire rempli par les parents
concernant les problèmes émotionnels et comportementaux des enfants (Achen-
bach, 1991). Il est largement utilisé pour l’évaluation clinique des enfants âgés
de 4 à 18 ans en définissant un profil de « dysrégulation émotionnelle ». Le profil
dysrégulation émotionnelle est défini par des scores élevés pour les problèmes
d’attention, le comportement agressif et les échelles d’anxiété et de dépression.
Ce profil constitue un facteur de risque au développement ultérieur d’une symp-
tomatologie psychiatrique mais non spécifiquement un trouble bipolaire. Les
études sont en accord sur le fait que les patients avec le profil dysrégulation
sont plus à risque de développer des troubles de la personnalité, des troubles
TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 141

anxieux, des épisodes dépressifs caractérisés, une suicidalité plus importante.


De plus, ce profil entraîne un retentissement psychosocial plus important (Peyre
et al. 2015). Dans le cas des patients avec TDAH, le profil de dysrégulation était
associé à des taux plus importants de comorbidité avec un TOP, des troubles
des conduites, des troubles anxieux généralisés (Peyre et al. 2015). Ce profil est
en lien avec une sévérité clinique du TDAH plus importante et une réactivité
émotionnelle intense. En ce qui concerne la réponse au méthylphénidate, comme
dans l’étude MTA, le profil avec ou sans dysrégulation ne diff ère pas en termes
de réponse au traitement (Peyre et al. 2015).
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La Young Mania Rating Scale – Parent Version (P-YMRS) est une échelle qui a été
développée pour différencier les troubles bipolaires des autres troubles chez les
enfants/adolescents. Cette version remplie par les parents (Gracious et al. 2002)
s’appuie sur l’échelle développée par l’équipe de Young (1978) remplie par les
cliniciens pour évaluer l’intensité des symptômes maniaques.
Les études de validation de la Strenghts and Difficulties Questionnaire (SDQ) ont
montré que les scores élevés aux échelles de difficultés sont associés à un risque
de trouble psychiatrique diagnostiqué (Goodman 2001). Elle recueille les pro-
blèmes de l’enfant dans les domaines émotionnel, comportemental, hyperactivité-
inattention, relationnel et le comportement prosocial. Cette échelle est adressée
aux parents, aux enseignants et l’enfant et il existe également une version pour
l’adolescent. De plus, l’équipe de Holtmann, a développé un score de profil
de dysrégulation en s’appuyant sur 5 items de la SDQ, équivalent au profil de
dysrégulation émotionnelle de la CBCL (Holtmann et al. 2011). Elle contient un
score d’impact, ce qui permet d’évaluer le retentissement perçu par les parents
mais aussi par l’enseignant.
Dans le domaine de la recherche en imagerie, les études se sont intéressées aux
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aptitudes de perception des émotions telles que la reconnaissance d’émotions


faciales ou à l’attribution d’un état émotionnel ou mental à autrui (théorie
de l’esprit). Cependant au niveau individuel, la réaction émotionnelle est un
processus complexe ayant pour substrat le système cortico-limbique. Les études
en IRM fonctionnelle ont permis de mettre en évidence que le s ystème ventral
(comprenant l’amygdale, l’insula, le striatum ventral, le thalamus, les régions
ventrales du cortex cingulaire antérieur et du cortex préfrontal) est impliqué
dans l’identification de la signification émotionnelle d’un stimulus externe et
dans la production d’état émotionnel. Le système dorsal (hippocampe, parties
dorsales du cortex cingulaire antérieur et du cortex préfrontal) est engagé dans
la régulation de la réponse émotionnelle (attention sélective, planification) et
l’adaptation du comportement à la situation (Phillips, Ladouceur, et Drevets
142 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

2008). Chez les sujets avec une pathologie psychiatrique, il existe une exacer-
bation des processus émotionnels. Les mécanismes de régulation des émotions
pourraient être défaillants. Sur le plan des processus neuropsychologiques, la
labilité émotionnelle a été mise en relation avec des processus bottom-up comme
l’hyper-réactivité limbique, et un défaut de régulation top-down, par hypoacti-
vité du cortex préfrontal impliqué dans le contrôle volontaire (effortful control).
Un troisième circuit, pariétal, a été impliqué dans une régulation émotionnelle
automatique, mettant en jeu des processus d’association sémantique et un réper-
toire de priorités (Diane Purper-Ouakil, Vacher, et Villemonteix 2014; Phillips,
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Ladouceur, et Drevets 2008). Dans le trouble bipolaire pédiatrique, les études ont
montré des anomalies dans ces régions (Phillips, Ladouceur, et Drevets 2008).

T RAITEMENT

Les traitements non médicamenteux basés sur les thérapies cognitivo-comportem


entales sont utiles dans la gestion des troubles du comporte ment. La psychoé-
ducation des parents mais aussi de l’enfant/adolescent et le suivi psychothéra-
peutique sont essentiels dans la prise en charge (Thoumy et Bouvard 2014).
Une revue de la littérature a été menée pour connaître les options médica-
menteuses agissant sur les symptômes d’agressivité et d’irritabilité chronique,
symptômes cardinaux du nouveau diagnostic du DSM-5, le trouble disruptif avec
dysrégulation émotionnelle ou DMDD : antidépresseur/inhibiteurs spécifiques de
la recapture de la noradrénaline, les stabilisateurs de l’humeur, les psychosti-
mulants, les antipsychotiques, et les agonistes alpha (Tourian et al. 2015). Les
auteurs se sont appuyés sur les études utilisant les critères diagnostiques du
SMD. Dans le SMD, trois études ont été publiées et retrouvaient une efficacité du
méthylphénidate et de la rispéridone. Le lithium n’est pas plus efficace que le
placebo alors que le méthylphénidate associé à une thérapie comportementale
était significativement efficace sur le comportement. Chez des adolescents avec
SMD, la rispéridone (3 mg/jour) était efficace sur les symptômes émotionnels
mais également sur les symptômes de TDAH, de dépression et sur le fonction-
nement global (Tourian et al. 2015). Pour l’agressivité, le méthylphénidate a
une taille d’effet de 0,78 d’après l’étude de Pappadopulos. Les antipsychotiques
sont également efficaces pour diminuer l’agressivité des sujets avec trouble des
conduites, TOP, TDAH, autisme et retard mental. Dans cette classe, la rispéridone
est la molécule la plus étudiée avec une taille d’effet pouvant aller jusqu’à
0,9. Les antidépresseurs ont montré une faible efficacité dans la réduction de
TDAH, réactivité émotionnelle et troubles bipolaires 143

l’agressivité avec une taille d’effet autour de 0,3 : le buproprion aurait plus
d’intérêt que la fluoxétine et la desipramine (Tourian et al. 2015).
Il faut donc retenir que le méthylphénidate est le plus efficace pour diminuer
l’agressivité chez les patients avec TDAH. Si la réponse est insuffisante, l’ajout
de rispéridone ou d’acide valproique a montré une efficacité sur les comporte-
ments agressifs. De plus, la rispéridone a montré une efficacité pour diminuer
l’agressivité chez les patients avec trouble des conduites, autisme, retard mental
(Tourian et al. 2015).
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Pour l’irritabilité chronique, l’aripiprazole a montré une efficacité dans le traite-
ment des enfants/adolescents avec des troubles autistiques et des problèmes de
comportement (irritabilité, agitation, auto-mutilations). La FDA a approuvé l’ari-
piprazole et la rispéridone pour le traitement de l’irritabilité associée à l’autisme.
Les psychostimulants à savoir le méthylphénidate, ont montré une efficacité
sur l’irritabilité lorsque les patients souffrent d’un TDAH avec ou sans SMD.
Les anti-convulsivants n’ont pas été spécifiquement étudiés pour le traitement
de l’irritabilité (Tourian et al. 2015). En cas d’irritabilité chronique associée
à un trouble bipolaire, l’utilisation d’antidépresseur n’est pas judicieuse. La
prescription de traitement pharmacologique sera guidée par la symptomatologie
prédominante. En cas de comorbidité TDAH/trouble bipolaire, une association
de traitements est souvent nécessaire.
Dans le trouble bipolaire, les antipsychotiques atypiques (aripiprazole, olan-
zapine, quétiapine, rispéridone) ont montré une efficacité dans le traitement
de l’épisode mixte et maniaque avec un nombre de sujets à traiter compris
entre 3 et 5 (Singh, Ketter, et Chang 2010). L’efficacité des antipsychotiques
atypiques est supérieure à celle des thymorégulateurs, par contre les effets
indésirables des antipsychotiques tels que la prise de poids et la somnolence
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

sont significativement plus probables chez les jeunes comparés aux adultes,
alors que l’akathisie est moins probable chez les jeunes. La taille d’effet est
moyenne pour les antisychotiques atypiques, entre 0,5 et 0, 7 et elle est faible
pour les thymorégulateurs, entre 0,2 et 0,3 (Correll, Sheridan, et DelBello 2010).
Le choix du médicament se fera en fonction de la balance bénéfice-risque de
survenue des effets secondaires chez les jeunes avec épisode maniaque. Pour le
moment, il y a très peu d’études dans l’épisode dépressif bipolaire : deux études
n’ont pas montré de supériorité de la quétiapine par rapport au placebo, la taille
de l’effectif étant une limite importante (DelBello et al. 2009; Findling et al.
2014). Dans le trouble bipolaire et particulièrement pour les épisodes dépressifs,
des études sont à faire pour identifier les traitements les plus efficaces et bien
tolérés.
144 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

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2014. « 11. Troubles bipolaires et trouble défi- 1250-56.

A NNEXE

Critères du SMD
Critères d’inclusion :
1- Un âge entre 7 et 17 ans et une survenue du syndrome avant 12 ans ;
2- Une humeur anormale (tristesse, colère) présente au moins une demi-journée,
la plupart des jours, et suffisamment sévère pour être constatée par l’entourage
de l’enfant (parent, professeur et pairs) ;
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3- Des signes d’excitabilité définis par au moins 3 des critères suivants : insomnie,
agitation, distractibilité, accélération de la pensée ou fuite des idées ;
4- L’enfant montre une réactivité marquée et amplifiée aux stimuli négatifs
comparé à ses pairs. On retrouve par exemple des crises de colères aux moments
des frustrations (inappropriées compte tenu de son âge et du facteur précipitant),
des crises de rage verbale, des agressions contre les personnes ou les objets. Ces
événements surviennent en moyenne 3 fois par semaine ;
5- Les symptômes décrits dans le critère 2, 3 et 4 sont habituellement présents
et persistent pendant plus de 12 mois, sans intervalle libre de plus de 2 mois ;
6- Les symptômes doivent avoir au moins un retentissement fonctionnel impor-
tant dans un domaine et moyennement important dans un second parmi : le
domicile, l’école, les relations avec les pairs.
146 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Critères d’exclusion :
7- La présence d’un des symptômes cardinaux de la manie : une humeur élevée
ou expansive, des idées de grandeur, une augmentation de l’estime de soi, une
réduction épisodique du besoin de sommeil ;
8- Ces symptômes surviennent de manière épisodique ;
9- Le sujet répond aux critères d’un abus de substances dans les 3 mois qui
précèdent ;
10- QI<70 ;
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11- Les symptômes sont dus aux effets physiologiques d’une substance ou liés à
une affection médicale ou neurologique.
Critères diagnostiques du DMDD dans le DSM-5 :
A- Crises de colères sévères et récurrentes avec des manifestations verbales (rage
verbale) et/ou comportementales (agression contre les personnes ou les objets)
qui sont inapropriées en intensité et en durée par rapport à la situation ou la
provocation.
B- Les crises de colère ne sont pas en lien avec le niveau de développement de
l’enfant.
C- Les crises de colère ont lieu, en moyenne, trois fois par semaine ou plus.
D- L’humeur entre ces crises est chroniquement irritable ou colérique la plupart
de la journée, presque tous les jours, et est observable par l’entourage.
E- Les critères A-D sont présents depuis au moins 12 mois. Durant cette période,
il n’y a pas eu 3 mois consécutifs ou plus sans que tous les symptômes des
critères A-D soient présents.
F- Les critères A et D sont présents dans au moins deux ou trois types d’environ-
nement différents (maison, école, avec les pairs) et sont sévères dans au moins
l’un d’entre eux.
G- Le diagnostic ne doit pas être fait pour la première fois avant l’âge de 6 ans
ou après l’âge de 18 ans.
H- De par l’observation, l’âge d’apparition des symptômes A-E est avant 10 ans.
I- Il n’y a jamais eu de période de plus d’une journée durant laquelle tous les
symptômes d’un épisode de manie ou d’hypomanie, sauf pour la durée, étaient
retrouvés.
J- Les symptômes n’apparaissent pas exclusivement pendant des épisodes dépres-
sifs caractérisés et ne sont pas mieux expliqués par un autre trouble psychia-
trique.
K- Les symptômes ne sont pas attribuables à l’effet d’un toxique ou à toute autre
pathologie médicale ou neurologique.
Chapitre 7

TDAH, interactions sociales et


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Troubles du Spectre de l’Autisme

Natalia Piat, Manuel Bouvard

T ROUBLES DU DÉFICIT de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH) et Troubles


du Spectre de l’Autisme (TSA) sont tous deux des troubles neu rodéveloppe-
mentaux aux descriptions cliniques indépendantes. Les TSA se caractérisent par
des altérations de la communication et des interactions sociales en présence de
comportements restreints et stéréotypés, ainsi que de particularités sensorielles.
Et en effet, bien que couramment décrites, les particularités attentionnelles et
exécutives de ces sujets ne font pas parties des critères diagnostiques actuels
de l’autisme. De manière réciproque, les perturbations relationnelles ou sociales
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n’apparaissent pas aujourd’hui comme critère symptomatique du TDAH.


TSA et TDAH ont donc été longtemps étudiés indépendamment l’un de l’autre, le
clinicien ne pouvant lui-même diagnostiquer une co-occurrence entre ces deux
troubles. L’avènement du DSM-5 et cette possibilité nouvel le de « double diag-
nostic » ainsi ouvert nos représentations cliniques, nous p ermettant à présent
de mieux considérer les difficultés sociales de nos patients avec un TDAH. Si bien
que nos démarches cliniques sont aujourd’hui perpétuellement orientées vers
l’exploration de perturbations relationnelles chez ces patients, qu’elles revêtent
un caractère pathologique tel que le Trouble Autistique ou non. La question
se pose alors quant à la considération de ces perturbations s ociales : sont-elle
liées à un retentissement simple du TDAH ou doivent-elles être intégrées à part
entière au trouble ? Cette interrogation donne suite à bien d’autres, telle que
148 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

l’étude d’une caractérisation spécifique des perturbations sociales dans le TDAH,


ou encore le développement de leurs modalités de prise en charge.
Dans cette partie, nous n’aurons pas la prétention de pouvoir répondre à l’en-
semble de ces réflexions, encore débattues à ce jour. Notre souhait est pour
autant celui d’apporter au lecteur une synthèse de cette vaste littérature qui
semble se préciser de plus en plus aujourd’hui autour de l’ét ude spécifique des
interactions sociales dans le TDAH, qu’elles revêtent un caractère pathologique
ou non.
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É TUDE DE LA COMORBIDITÉ ENTRE TDAH ET TSA

La coexistence de différents troubles est une situation particulièrement fréquente


en psychiatrie, amenant une interrogation commune quant aux fondements étio-
logiques de ces différentes affections, demeurant encore à l’heure actuelle mal
identifiés. L’étude de leurs liens associatifs représente alors une nouvelle voie
de recherche dont les répercussions concernent aussi bien les domaines psycho-
pathologiques que diagnostiques et thérapeutiques.
Outre leurs caractéristiques neuro-développementales, TDAH et TSA présentent
la particularité commune d’une grande hétérogénéité en ce qui concerne leurs
particularités cliniques, cognitives, neurobiologiques et génétiques, mais aussi
en termes de trajectoire développementale et de devenir. Associés à l’observation
de leur fréquente coexistence, ces phénomènes complexifient grandement l’étude
de ces deux troubles, et sont pourvoyeuses d’une intense réflexion quant à
l’identification de leurs liens associatifs.

Problématique et conceptualisation de cette association


!

comorbide

Au cours de la dernière décennie, le TSA et le TDAH ont été le plus souvent


étudiés indépendamment l’un de l’autre. Pourtant, l’avènement de champ de
recherche empreint d’une dynamique méthodologique associative rapporte de
plus en plus d’éléments consistants dont les implications bénéficient tout autant
au trouble autistique qu’au TDAH, qu’elles relèvent du domaine clinique et
cognitif, neurobiologique ou encore génétique. Le carcan catégoriel définissant
de manière distincte et dissociée le TSA du TDAH, retenant jusqu’alors comme
mesure majeure leur non-association comorbide s’est incliné devant les nom-
breuses démonstrations de co-occurrences respectives (Frazier et al., 2001), mais
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 149

aussi d’associations familiales réciproques (Mulligan et al., 2009 ; Nijmeijer et


al., 2009 ; Ronald et al., 2008). Le but étant de permettre aux cliniciens mais
aussi aux équipes de recherche d’accroître l’identification et la précision de leurs
liens associatifs, avec pour finalité, l’amélioration de leurs prises en charge
thérapeutiques.
L’étude de leurs liens respectifs a permis la modélisation de deux hypothèses
associatives distinctes. La première relève d’un partage de facteurs étiologiques
communs, envisageant ces deux troubles comme deux alternatives expressives
possibles d’une même entité psychopathologique. Ainsi représentée, cette hypo-
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thèse expliquerait d’une part la dispersion familiale associative des deux troubles
observée de manière réciproque, et d’autre part, le fait que certains sujets ont
successivement bénéficié des deux diagnostics. La seconde hypothèse évoque
quant à elle la possibilité que le diagnostic co-occurrent de TSA+TDAH repré-
sente à lui seul une même entité nosologique indépendante, se distinguant des
formes pures des deux troubles, et émanant alors d’une combinaison de facteurs
étiologiques différente. Cette seconde hypothèse repose sur la démonstration
d’un profil clinique différent de celui qui associerait une simple combinaison
additive des formes pures (Sinzing et al., 2008 ; Gargaro et al., 2011). Et malgré
leurs agencements différents l’une comme l’autre présument ensemble le partage
de certains facteurs étiologiques entre TSA et TDAH.
Au travers d’analyse phénotypique centrée sur le TDAH et ses comorbidités
autistiques (entre autre), il a pu être suggéré que le TDAH po urrait être mieux
conceptualisable sous la forme d’une famille syndromique corrélée et se défi-
nissant en fonction de ses co-occurrences. Cette réflexion est secondairement
orientée vers l’idée que certains éléments étiologiques du TDAH puissent être
spécifiques au trouble, tandis que d’autres seraient partagés avec ses autres affec-
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

tions co-occurrentes. Et l’existence de profils phénotypiques très hétérogènes


au sein du TDAH mais aussi du TSA ajoute une argumentation supplémentaire
à cette hypothèse. L’ensemble de ces considérations épouse une dynamique
spectrale et inter-liable des troubles neuro-développementaux qui se complexifie
au regard du fait que certaines caractéristiques symptomatiques appartenant
à un même phénotype clinique relèveraient d’un facteur étiologique unique et
spécifique.
150 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Données épidémiologiques à travers les études


!

de comorbidités

Les études de comorbidité ont ainsi mis en évidence des taux relativement
importants d’une co-occurrence entre les deux troubles, que cela soit au travers
d’études visant à recenser et mesurer les troubles attentionnels et d’hyperacti-
vité/impulsivité dans des populations de sujets avec un TSA et réciproquement
(pour ne citer qu’eux, Reiersen & Todd, 2008 ; Mulligan et al., 2009). Dans
une revue de la littérature, Rommelse et al. (2011) évoquent qu’à travers ces
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nombreuses études cliniques 20 à 50 % des sujets avec un TDAH remplissent
également les critères diagnostiques d’un TSA, et 30 à 80 % des sujets avec un
TSA remplissent eux aussi les critères diagnostiques du TDAH. Suite à leur étude
dont l’objectif était de caractériser les profils symptomatiques autistiques et
attentionnels d’une cohorte, Frazier et al. (2001) décrivent que sur 1300 patients,
soixante enfants présentaient un TSA dont cinquante avaient également reçu
le diagnostic de TDAH associé. Les caractéristiques cliniques autistiques alors
observées étaient similaires entre ces deux groupes (TSA versus TSA+TDAH), indé-
pendamment donc de la co-occurrence avec un TDAH. Réciproquement en ce qui
concerne les caractéristiques cliniques du TDAH, celles-ci étaient comparables
parmi tous les enfants recevant le diagnostic de TDAH, avec ou sans comorbidité
autistique.
De plus, la prévalence du TDAH observée au sein des sujets avec un TSA (soit
82 %) était très proche de celle observée sur l’ensemble de la cohorte (soit 75 %).
De la même manière, il n’y avait pas de différence entre la prévalence des TSA
retrouvée dans la population totale et dans la population des TDAH (3 % et 5 %
respectivement). Lee & Ousley (2006) observent quant à eux une co-occurrence
du TDAH atteignant les 78 % au sein d’une population constitu ée de 83 sujets
avec un TSA. En termes de distribution selon le sous-type, le type TDAH mixte
serait plus fortement représenté (63 %), suivi du sous-type inattentif prédomi-
nant puis hyperactif/impulsif. Selon les auteurs, cette distribution serait aussi
comparable à celle retrouvée en population générale. De manière plus précise
chez ces sujets, les symptômes d’hyperactivité/impulsivité seraient corrélés néga-
tivement à l’âge, au contraire des troubles attentionnels représentés de manière
plus stable selon une perspective développementale. Cette dernière observation
est comparable à la trajectoire développementale qui caractérise le TDAH en
population générale, définissant les particularités d’hyperactivité/impulsivité de
manière plus prégnante pendant l’enfance alors que les troubles attentionnels
semblent perdurer. Sinzing et al. (2009) confirment l’ensemble de ces obser-
vations puisque 53 % des 83 enfants avec un TSA inclus dans leur étude font
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 151

preuve d’un TDAH associé, au sein desquels 46 % sont de sous-t ype inattentif,
32 % de forme mixte et 22 % de forme hyperactive/impulsive. Cette dispersion
légèrement différente de l’étude de Lee & Ousley (2006) s’expliquerait par le fait
que dans leur échantillon, 75 % des enfants associant TSA+TDAH sont âgés de
plus de huit ans.
Si l’on s’intéresse à la distribution des subdivisions cliniques autistiques recevant
le diagnostic co-occurrent de TDAH, les résultats apparaissent plus contrastés.
Kochlar et al. (2011) évoquant le fait que les sujets avec un TDAH présente-
raient plus de symptômes autistiques que des sujets contrôles, ajoutent que les
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symptômes autistiques observés chez ces premiers relèvent plus des composants
communicatif et social que de la sphère comportementale. Dans leur étude de
2009, Mulligan et al. se sont aussi penchés sur l’observation des caractéristiques
cliniques autistiques présentées par 821 sujets présentant un TDAH de type
mixte. Outre l’observation d’une prévalence du trouble autistique dans cette
population similaire à celle observée en population générale selon le genre (i.e.
représentation plus importante de la co-occurrence chez les sujets masculins),
la recherche de corrélation entre les symptômes des deux troubles est en faveur
d’une certaine indépendance clinique. Et au contraire de ce qui est avancé par
Kochlar et al. (2011) il semblerait que les caractéristiques autistiques retrou-
vées chez les sujets avec un TDAH soient représentées de manière similaire et
homogène selon la triade symptomatique, en faveur d’un aspect dissocié de ces
deux troubles.
Certains auteurs ont tenté d’identifier les facteurs de risque de développer
des traits autistiques au sein d’une cohorte de 205 enfants avec un TDAH. La
présence de traits autistiques maternels ainsi que les caractéristiques d’hyperac-
tivité/impulsivité chez ces sujets semblent être, sous toute réserve, les facteurs
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les plus influents. D’autres évoquent quant à eux le fait que la présence de traits
TDAH parentaux et notamment maternels serait un facteur de risque pour leur
descendance de développer un TSA, alors que la réciproque ne semble pas vraie.
Ces deux dernières études illustrent les nombreuses perspe ctives que l’on peut
envisager à travers la poursuite de ce type de recherche, s’inscrivant autant dans
l’espoir d’un accroissement des connaissances psychopathologiques des deux
troubles que de leur reconnaissance et traitement respectifs.

Description symptomatique : de la similitude à la spécificité


!

La description de similitudes comportementales entre TSA et TDAH repose implici-


tement sur leurs particularités développementales, que ce soit dans l’émergence
152 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de leurs caractéristiques cliniques ou dans leurs trajectoires développementales.


Aucune étude longitudinale n’a encore à ce jour tenté de mieux observer compa-
rativement et de manière simultanée leurs particularités associatives. Néanmoins,
celles-ci peuvent être déduites des travaux respectifs eff ectués au sein du TSA
puis du TDAH. Mis en lien, ils témoignent de similitudes précoces entre les deux
troubles, associant des difficultés ou des délais d’acquisition du langage, des
perturbations comportementales telles que l’agressivité, des perturbations émo-
tionnelles et notamment anxieuses ainsi que des troubles du sommeil (Rommelse
et al., 2011). Bien que non directement liées aux symptômes spécifiques de
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chaque trouble, la présence de ces particularités au sein des deux troubles met
en évidence un certain degré d’association. TSA et TDAH sont définis communé-
ment comme deux troubles neuro-développementaux débutant dans les premières
années de vie des sujets (de manière plus précoce pour le TSA selon la littérature)
et dont l’évolution développementale initialement décrite comme se poursuivant
tout au long de la vie du sujet présente des possibilités d’amélioration clinique
comme en témoignent l’apaisement de l’hyperactivité/impulsivité dans le TDAH,
et pour le TSA, l’amélioration des capacités langagières et l’extinction partielle
des comportements restreints et stéréotypés. D’un point de vue clinique, la
mise en évidence d’un partage phénoménologique commun est résumée dans
la figure 7.1. Celle-ci regroupe l’ensemble des caractéristiques symptomatiques
spécifiques de l’un également reconnues comme présentes dans l’autre.
Hattori et al. (2006) confirment ce recouvrement clinique qualitatif et observent
en effet que chaque symptôme spécifique de l’un est également identifiable
au sein de l’autre. Ces auteurs mettent l’accent sur l’aspect dimensionnel de
leurs caractéristiques cliniques respectives et ajoutent que d’un point de vue
quantitatif, les sujets avec un TSA présentent des perturbations sociales plus
intenses que celles observées chez des sujets avec un TDAH, alors que leurs
perturbations attentionnelles et comportementales (hyperactive/impulsive) sont
globalement similaires en termes de sévérité. Ainsi, le fractionnement de la
triade symptomatique en trois facteurs séparés et indépendants pourrait être
représenté de manière similaire chez les sujets avec un TDAH.
Les habilités sociales des particularités autistiques observables au sein du TDAH
représentent la phénoménologie la plus représentée et étudiée. Selon Kochlar
et al. (2011), les sujets avec un TDAH présentent de manière significative plus
de caractéristiques autistiques que leurs pairs sans TDAH. Et contrairement aux
études précédemment citées (Hattori et al., 2006 par exemple), ces auteurs
soulignent le fait que selon leurs observations, le domaine de la communication
et le domaine social seraient plus fortement perturbés. Cette étude rejoint les
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 153
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Figure 7.1. Similitudes cliniques présentes entre TDAH et TSA, Rommelse et al. (2011).

travaux précédents de Mulligan et al. (2009) mais aussi ceux plus antérieurs qui
déjà à l’époque, mettaient en évidence chez ces sujets l’existence de difficultés
communicatives et sociales. Ces derniers tentent initialement dans une attitude
déterministe, de relier les perturbations sociales et communicatives observées
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

aux caractéristiques fonctionnelles spécifiques du TDAH. Plus récemment, l’ana-


lyse précise de ces difficultés sociales et communicatives identifie chez ces
sujets des perturbations en termes de contact oculaire et orientation du regard,
imitation et simulation, activité collective et imaginaire (Kochlar et al., 2011).
Bien que la discussion reste ouverte, le regroupement syndromique de l’ensemble
de ces particularités, reconnu comme spécifique au TSA, est plus en faveur
d’un déterminisme ayant attrait au TSA qu’aux conséquences fonctionnelles
possibles du TDAH. En 2004, Santosh & Mijovic déterminent au sein du TDAH
deux catégories distinctes de perturbations sociales. La première représente
« les difficultés relationnelles » et correspond aux perturbations des interactions
sociales observées chez ces sujets. La seconde revêt le terme de « difficulté en
communication sociale » et comprend une désinhibition sociale, des difficultés
154 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

en termes d’intégration des signaux sociaux ainsi que de développement des


liens sociaux. Selon ces auteurs, la première catégorie associe plus fortement
des troubles des conduites et de régulation émotionnelle alors que la seconde
serait plus liée à des retards développementaux, notamment en ce qui concerne
l’acquisition du langage, pouvant être le témoin de particularités autistiques
associées chez ces sujets. Dans la même dynamique, Carpenter et al. (2009)
identifient quant à eux au travers de la Child Behavour CheckList d’Achenbach
deux facteurs d’analyse comportementale distincts qu’ils nomment « rejet des
pairs » et « immaturité sociale », respectivement associés aux symptomatologies
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hyperactive/inattentive pour le premier, et autistiques pour le second. Selon
cette dernière étude, l’existence d’un facteur de risque de TSA serait conjointe-
ment associée à ces deux facteurs d’analyses, mais de manière plus importante
en ce qui concerne l’immaturité sociale. Outre le fait qu’ils envisagent plus
favorablement une dynamique spectrale des fonctionnements sociaux autour du
TSA et du TDAH, leurs conclusions partagent également l’idée d’un recouvrement
associatif étiologique commun entre les deux troubles.

Identification et caractérisation des processus cognitifs


!

et neurobiologiques

D’un point de vue neuropsychologique, il a clairement été identifié entre ces


deux troubles une distinction en termes de profil intellectuel en ce qui concerne
notamment les sujets associant un retard mental (i.e. QI < 70). Les sujets avec un
TDAH présentent de manière générale un QI performance plus bas que les sujets
avec un TSA, à l’inverse de ce qui est observé pour le QI verbal (Rommelse et
al., 2011). De manière plus précise, les subtests de compréhension verbale et de
raisonnement social seraient distinctement discriminants. En ce qui concerne les
processus sensoriels, il n’est retrouvé aucune distinction entre les deux troubles,
chacun présentant des altérations au sein de leurs perceptions sensorielles,
apparaissant selon eux difficilement dissociables. Néanmoins, en ce qui concerne
le traitement de l’information locale versus globale et la cohérence centrale,
processus reconnus comme très perturbés dans le trouble autistique, les sujets
avec un TDAH ne présentaient pas de telles perturbations, leurs performances
étant similaires à celles de sujets contrôles.
D’autres auteurs n’ont eu de cesse de démontrer que le TSA et le TDAH présentent
tous deux des particularités attentionnelles et exécutive s majeures, faisant de
ces domaines un point central de réunion associative. Le déficit exécutif est ainsi
probablement le domaine neuropsychologique le plus résolument consistant dans
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 155

la détermination d’un pattern commun entre TSA et TDAH. La plus grande partie
de cette richesse littéraire dans ce domaine provient de travaux ayant étudié
de manière indépendante les profils exécutifs des deux troubles, attestant de
manière consistante leurs perturbations respectives. Et si de nombreux travaux
ont directement comparés les fonctions exécutives de sujets TSA à celles de
sujets TDAH, très peu y ont inclus l’étude comparative de sujets associant les
deux diagnostics. De manière générale, les auteurs s’accordent à considérer de
manière similaire leurs perturbations exécutives. Selon eux, leurs différences
respectives résultent alors plus d’une dimension quantitative des troubles exécu-
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tifs observés que qualitative, illustré par le fait que chaque composant exécutif
apparaît déficitaire dans les deux troubles mais certains plus que d’autres en
fonction du trouble observé. Ainsi, le TDAH serait plus enclin à présenter des
perturbations des caractéristiques inhibitrices, alors que le TSA serait plus asso-
cié à des difficultés en termes de flexibilité, planification et mémoire de travail.
Néanmoins, cette dissociation n’a pu être reproduite de manière consistante
dans la littérature (Rommelse et al., 2011). Et de manière plus globale, il sem-
blerait que les déficits exécutifs soient plus profonds et généralisés dans le
TSA mais que ceux-ci fassent preuve d’une plus grande amélioration avec l’âge
comparativement au TDAH.
Les seules études ayant réalisé une comparaison directe entre TSA, TDAH et
TSA+TDAH retrouvent quant à elles des résultats discordants. Et si certaines
évoquent le fait que l’association TSA+TDAH se distingue d’une hypothèse asso-
ciative additive simple (Sinzing et al., 2008) d’autres postulent qu’il n’y aurait
pas de grande différence entre les profils respectifs des tro is groupes. En effet,
pour Sinzing et ses collaborateurs, les sujets avec un TSA+TDAH présentent des
similarités cognitives avec les sujets TDAH en termes de trouble de l’inhibition
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(bien que ce composant soit perturbé dans une moindre mesure chez le groupe
co-occurrent) mais non en termes de mémoire de travail alors que leur flexibilité
apparaît ici altérée. Néanmoins, ils observent une importante hétérogénéité au
sein de cette population particulière, ne permettant pas encore de répondre
avec précision à ce questionnement. De manière intéressante, et toujours dans
une perspective catégorielle, ces résultats font émerger une nouvelle hypothèse
qui soutient l’existence d’une troisième catégorie clinique associant TSA+TDAH
comme entité à part entière, c’est-à-dire de manière distincte au simple modèle
additionnant les particularités cognitives des deux troubles. Ainsi, l’état actuel
de nos connaissances ne nous permet pas encore de définir clairement les moda-
lités de chevauchement exécutif entre TSA et TDAH. Trop d’incongruences dans
les résultats, de biais de confusion dans les critères d’inclusion ou encore de
156 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

paradigmes non spécifiques ou peu sensibles limitent la connaissance associative


actuelle que l’on peut avoir de ces domaines cognitifs au sein du TSA et du TDAH
mais aussi de leur association comorbide.
En ce qui concerne les composants attentionnels, la plus grande dissociation
se situe au niveau de l’attention soutenue, très altérée chez les sujets avec
un TDAH et semblant intacte chez les sujets avec un TSA. Les mêmes constats
seront également faits en ce qui concerne la distinction de profil de vigilance et
d’inhibition.
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Si quelques mots doivent être prononcés au sujet des investigations neuro-
biologiques, ceux-ci se limitent au fait que trop peu de travaux ont eu pour
objectif de comparer directement le TSA au TDAH. À l’heure actuelle dans ce
domaine, la plupart de nos connaissances reposent encore sur des comparaisons
indirectes et ainsi critiquables à la vue des multiples paradigmes employés.
Sinzing et al. (2009) évoquent le fait qu’au sein de cette population comorbide
TSA+TDAH, les symptômes autistiques et attentionnels présentent deux profils
associatifs distincts : les symptômes d’inattention seraient plus fortement asso-
ciés aux comportements stéréotypés alors que l’hyperactivité semble être plus
liée aux troubles de la communication. Cette perspective serait pour ces auteurs
l’illustration de l’implication de deux systèmes neurochimiques différents : séro-
toninergique (pour l’association inattention/stéréotypie) et dopaminergique
(pour l’association hyperactivité/communication).
D’autre part, les principaux éléments de différenciation entre les deux troubles
concernent l’observation des trajectoires développement ales cérébrales du TSA
et du TDAH qui représentent l’un des éléments dissociatifs les plus importants à
ce jour puisqu’elles semblent s’opposer radicalement. En effet, nous l’avons vu,
l’étude anatomique et structurale du TSA rapporte une augmentation du volume
cérébral global du sujet pouvant atteindre 3 à 5 % du volume total, et ce, dès
les premières années de vie de l’enfant. Au contraire dans le TDAH, la tendance
observée converge vers une diminution cérébrale globale de 5 à 10 % chez la
plupart de ces sujets (Rommelse et al., 2011). En ce qui concerne les quelques
études comparatives directes, celles-ci font preuve de résultats très contrastés
pour celles employant des investigations de neuro-imagerie. Certains auteurs
évoquent déjà l’existence de particularités structurales présentes de manière
similaire au sein des deux troubles, en association avec d’autres, semblant être
plus spécifiques de l’un ou de l’autre.
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 157

L’influence des facteurs génétiques


!

La mise en évidence de facteurs étiologiques et notamment génétiques communs


s’est inscrite dans différents travaux de recherche (Rommelse et al., 2010).
L’héritabilité du trouble autistique a pu être estimée à plus de 90 % pour le
phénotype strict de l’autisme. Dans le TDAH, approximative ment 70 à 76 % de
la variance phénotypique est expliquée par des facteurs héréditaires (Rommelse
et al., 2011). L’observation d’un chevauchement génétique suppose que l’on
distingue des similarités cliniques, cognitives et neurobiologiques des deux
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groupes de patients. La recherche d’une psychopathologie commune entre le
trouble autistique et le TDAH a permis de démontrer que ces deux entités par-
tagent des variabilités cérébrales et fonctionnelles similaires (Rommelse et al.,
2011). Qui plus est, dans une revue de la littérature, Rommelse et al. (2010)
rassemblent de nombreuses études qui soutiennent le fait que TSA et TDAH
seraient en partie originaires de mêmes facteurs génétiques et familiaux. Ces
deux troubles hautement héritables partageraient ainsi entre 50 et 72 % de
leur patrimoine génétique déjà inventorié. Certains auteu rs ont alors souhaité
évaluer leurs liens respectifs au travers d’études familiales et il a été suggéré
que respectivement, les caractéristiques autistiques mai s aussi celles du TDAH
apparaissent elles aussi hautement héritables en population générale (Ronald et
al., 2008). Et pour cause, dans cette étude en population générale, Ronald et al.
(2008) confirment l’existence d’une forte corrélation entre les symptômes autis-
tiques et ceux du TDAH. Outre cette corrélation phénotypiqu e, une corrélation
génétique est aussi observée, aussi bien en analyse quantitative que qualitative
des traits observés respectivement. Estimée à plus de 0.50, cette corrélation
génétique suggère un recouvrement modéré des influences génétiques des deux
troubles. Plus précisément, 72 à 96 % des corrélations phéno typiques seraient
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

sous l’influence de composants génétiques, indiquant que la co-occurrence des


deux troubles serait fortement attribuable à des facteurs génétiques affectant
respectivement les deux troubles. En 2010, ils tentent de re produire ces obser-
vations sur une population de jumeaux âgés de deux ans. Retrouvant dans cette
population plus jeune les mêmes corrélations associatives additionnées d’une
héritabilité partagée modérée, leurs conclusions convergent vers un chevau-
chement génétique dont le degré d’influence augmente avec le développement.
L’étude de Reiersen & Todd (2008) apporte à ces observations une argumentation
supplémentaire puisqu’ils observent eux aussi des corrélations phénotypiques
autistiques et attentionnelles modérées au sein d’une population de 674 jumeaux
adultes. Selon eux, cette co-occurrence symptomatique serait certainement due
à un recouvrement génétique commun présent entre le TSA et le TDAH. Par le
158 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

biais d’une cohorte de 821 sujets avec TDAH, ainsi que leur fratrie et 149 sujets
contrôles, Mulligan et al. (2009) précisent quant à eux que les traits autistiques
apparaissent de manière plus prégnante chez les sujets TDAH qu’au sein de leur
fratrie, et qui plus est de sujets contrôles. Confirmant la familiarité des troubles
autistiques, celle-ci semble étroitement liée à celle du TDAH, mais de façon
incomplète, tel que le suggère le manque de linéarité au sein des corrélations
phénotypiques retrouvées chez les apparentés. Il est aussi intéressant de noter
que ces résultats apparaissent plus significatifs chez les sujets masculins, ce qui
va dans le sens du sex-ratio du trouble autistique en population générale. De la
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même façon, Nijmeijer et al. (2009) réalisent les mêmes constats et confirment
que bien que le trouble autistique puisse être envisagé de manière spectrale
et familiale, cette représentation semble se produire de ma nière indépendante
à celle du TDAH, allant à l’encontre des études précédentes. D’autres auteurs
retrouvent une forte corrélation entre les traits autistiques observés chez ces
sujets et la présence d’une symptomatologie relevant du TDAH. Qui plus est,
chacun des spectres observés (TSA et TDAH) apparaît être associé à un profil
exécutif propre.

Faut-il repenser la thérapeutique ?


!

Bien que beaucoup d’incertitudes persistent, il est un fait établit actuellement


que la présence de troubles hyperactifs et attentionnels ont un impact fonction-
nel et donc thérapeutique dans le TSA et réciproquement. Nombreuses études
comparatives soulignent en ce sens que cette condition associée est source
d’une plus grande sévérité fonctionnelle avec un retentissement quotidien plus
péjoratif comme en témoignent les échelles de qualité de vie et de fonctionne-
ment adaptatif de ces sujets (Davis & Kollins, 2012). Qui plus est, ces patients
seraient plus fréquemment amenés à bénéficier d’un traitement médicamenteux
(58 % des sujets TSA+TDAH versus 49 % pour un TDAH isolé et 34 % pour un
TSA isolé) et à présenter une réponse thérapeutique moindre que les patients
souffrant des formes isolées des deux troubles (Frazier et al., 2011). De nombreux
auteurs font de cette dernière observation une certitude reconnue au sein de
leur activité clinique et encouragent à travers leurs publications la recherche de
trouble clinique attentionnel chez les sujets avec un TSA en pratique courante
(Reiersen & Todd, 2008) et réciproquement, l’identification des perturbations
relationnelles sociales chez les sujets TDAH.
Si l’idée première qui vient à l’esprit du praticien réside dans la mise en commun
des recommandations standardisées de prise en charge du TDAH et du TSA, la
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 159

pratique d’une telle stratégie thérapeutique s’est révélée peu ou en tout cas
moins efficiente qu’attendue, chez les patients associant TDAH et TSA (Reiersen
& Todd, 2008 ; Frazier et al., 2011). Ces dernières observations soulignent la
nécessité de devoir repenser ou adapter de manière plus intensive le projet
thérapeutique élaboré, tout en conservant la trame habituellement déployée
dans les prises en charge du TSA et du TDAH qui associent différents domaines
de prise en charge : thérapeutique (médicamenteux et non médicamenteux),
rééducatif (ciblées sur les compétences langagières et sociales ainsi que les
processus exécutifs et attentionnels) et éducatif (Reiersen & Todd, 2008). En
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l’état actuel de nos procédés thérapeutiques, il nous est permis d’envisager
pour ces patients un protocole de soin associatif développé dans les chapitres
suivants et recouvrant :
" traitement médicamenteux ciblé sur la symptomatologie hyperactive/impulsive
et inattentive ;
" psychothérapie ciblée selon les recommandations en vigueur ;
" rééducations cognitives attentionnelles et exécutives et entraînements aux
habiletés sociales ;
" adaptation du projet de scolarisation.

Prise en charge médicamenteuse

L’émergence d’une réflexion centrée sur les prises en charges médicamenteuses


du trouble autistique est également présente au sein des autres affections
psychiatriques de l’enfance tel que le TDAH et met en avant le souhait formulé
par l’ensemble des praticiens de pouvoir mieux cibler les symptomatologies
invalidantes de ces sujets afin de mieux les traiter. La volonté d’une amélioration
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

symptomatique des troubles autistiques spécifiques et non spécifiques amène


donc fréquemment les praticiens à utiliser des interventions pharmacologiques,
dont les symptômes d’hyperactivité/impulsivité et inattention sont les cibles
les plus fréquentes. Nous voyons ainsi apparaître au sein de cette probléma-
tique thérapeutique la place prépondérante octroyée à la prise en charge des
troubles attentionnels et d’hyperactivité/impulsivité des sujets avec un TSA.
Les traitements pharmacologiques ont une place importante dans l’élaboration
des stratégies thérapeutiques du TDAH. Les classes médicamenteuses utilisées
associent les psychostimulants (MPH pour Méthylphenidate, Dexméthylphenidate,
Dextroamphétamine, sels mixtes d’Amphétamines, Dextrome thamphétamine et
Lysdexamphétamine) considérés en première intention, à de s médications non
stimulantes tels que l’Atomoxetine et les agonistes des récepteurs adrénergiques
160 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

alpha-2a (Clonidine et Guanfacine). Différents travaux pharmacologiques ont


amené les praticiens à considérer le MPH comme l’actuel traitement de référence
des symptomatologies d’hyperactivité et dans une moindre mesure d’inattention
présentées par les enfants associant un TSA. Néanmoins, bien que l’amélioration
de la problématique TDAH prenne place chez plus de la moitié des sujets traités, il
reste nécessaire de considérer l’importance des effets indésirables rapportés tels
que l’irritabilité, des troubles du sommeil, une réduction d’appétit ainsi qu’une
plus grande réactivité émotionnelle. Plus inattendu, certains auteurs clament
le fait que l’efficience thérapeutique des psychostimulants chez ces patients ne
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se limiterait pas aux problématiques TDAH mais pourraient également retentir
de manière bénéfique sur leurs perturbations sociales (Davis & Kollins, 2012).
Au-delà de l’intérêt porté au MPH, l’étude de nouvelles molécules a également
été incluse dans ces travaux dont les résultats préliminaires laissent présager
de nouvelles possibilités thérapeutiques intéressantes. Chef de file, et sujet à
un intérêt de plus en plus croissant l’Atomoxetine semble être une nouvelle voix
thérapeutique prometteuse, de par son efficacité et sa meilleure tolérance. Nous
citerons enfin d’autres thérapeutiques plus récemment envisagées et toujours à
l’essai telles que les agonistes des récepteurs adrénergiques alpha-2a (Clonidine
et Guanfacine).

Prise en charge non médicamenteuse

En dernier lieu, il est essentiel de garder à l’esprit que l’efficience de cette pers-
pective thérapeutique pharmacologique nécessite l’apport associatif indéniable
des prises en charges psychothérapiques, rééducatives mais aussi de l’adaptation
éducative et pédagogique environnementale (Reiersen & Todd, 2008). Et en lien
avec la moindre efficacité thérapeutique des traitements pharmacologiques chez
les sujets associant TSA et TDAH, il semble alors essentiel d e se tourner égale-
ment vers la recherche de processus d’interventions psychothérapeutiques plus
adaptés. Concernant les interventions thérapeutiques proposées dans le TDAH,
les thérapies cognitivo-comportementales et les trainings parentaux semblent
faire preuve d’une réelle efficacité. Et si certaines interv entions ciblées sur les
habilités sociales sont de plus en plus proposées à ces sujets, leur efficience
reste à ce jour très relative. Dans le TSA, les interventions comportementales
précoces ont également démontré une amélioration chez ces patients en termes
de communication sociale et langagière, mais aussi de capacité adaptative
fonctionnelle (Davis & Kollins, 2012). Bien que ces différe nts programmes thé-
rapeutiques engagent mutuellement l’intervention parentale, le rôle de ceux-ci
se distingue en fonction de la pathologie ciblée. Au sein du TDAH, l’élaboration
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 161

de trainings parentaux sous la forme de groupes familiaux où sont présentées


voire enseignées des stratégies éducatives ciblant les difficultés de leurs enfants
(réduction de l’impulsivité, amélioration de la concentration) est le plus souvent
employée. Pour le TSA, il s’agit plus de projets d’éducation parentale individuels
ciblés sur les comportements problèmes ou le souhait d’accroître les compétences
et l’autonomie de leur enfant, à travers l’emploi de différents outils proposés
(langagier et socio-communicatif). L’inspiration mutuelle de ces deux pratiques
l’une envers l’autre permettrait peut-être l’élaboration d’interventions s’orientant
sur l’aide éducative parentale associant des stratégies et outils qui cibleraient les
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perturbations attentionnelles et comportementales mais aussi communicatives
et sociales (Davis & Kollins, 2012).
Les principales conclusions émergentes de cette première p artie soulignent en
premier lieu l’importance des co-occurrences observées entre TSA et TDAH. Et
bien que les modalités de leurs liens relationnels ne puissent encore être clai-
rement définis, il reste néanmoins indéniable de considérer que la présence de
l’un au sein de l’autre influence fortement la symptomatologie résultante ainsi
que la réponse thérapeutique des patients concernés.

É TUDE DES INTERACTIONS SOCIALES DANS LE TDAH

Au-delà de l’étude de la comorbidité entre TDAH et TSA, de plus en plus nombreux


sont les témoignages de patients, de leur famille ou des professionnels de santé
évoquant l’existence de perturbation des interactions sociales dans le TDAH, sans
que celles-ci revêtent le caractère pathologique d’un TSA.
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Dans cette seconde partie, et après une brève définition de ce que représente la
fonction d’être et de bien-être social, nous nous efforcerons de documenter ces
différentes perturbations, spécifiques ou non du TDAH.

De la compétence au bien-être social


!

Depuis les années 1970, nombreuses sont les définitions et conceptualisations


qui ont tenté d’étudier et modéliser « l’intelligence sociale » à travers l’étude de
nos liens sociaux ainsi que leurs processus sous-jacents.
Nous pouvons aujourd’hui définir trois niveaux de conceptualisation :
162 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

1. La cognition sociale : ayant pour but la perception et la compréhension du


monde social. Individualisée des autres fonctions cogniti ves, elle comprend
deux types de processus :
➙ Les processus de bas niveau : ils associent les fonctions de traitement
de l’information (perception, attention et mémoire) aux fonctions exécu-
tives ainsi qu’aux fonctions langagières, et notamment la pragmatique du
langage.
➙ Les processus de haut niveau comme l’empathie, la théorie de l’esprit, ou
encore l’imitation.
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2. La compétence sociale : elle s’appuie sur l’utilisation des processus de cog-
nition sociale en contexte, c’est-à-dire de façon adaptée à l’analyse d’une
situation donnée, comme la reconnaissance d’un visage ou d’une émotion
humaine.
3. Les habiletés sociales : elles représentent un processus plus complexe accès
sur la gestion des comportements de l’individu en situation sociale, dans les
relations interpersonnelles, via la mise en œuvre des 2 niveaux suscités. Ces
habiletés peuvent avoir deux fonctions :
➙ Une fonction instrumentale : elle a pour but d’acquérir un bien-être phy-
sique ou matériel, comme par exemple pour un enfant être accepté pour
remplir un rôle donné dans un jeu, faire la demande d’un objet, ou obtenir
des informations afin de poursuivre un but.
➙ Une fonction socio-affective : elle se met au service de la création et du
maintien de relations amicales, sentimentales ou familiales, permettant à
l’individu de développer un réseau social de qualité.

Dans les paragraphes suivants, nous tenterons de documenter les caractéristiques


de ces aspects cognitifs et comportementaux observés dans le TDAH.

Perturbation des relations sociales


!

Dans nos pratiques, nos observations cliniques nous amènent souvent à constater
que les enfants avec un diagnostic de TDAH ont des difficultés relationnelles
itératives, que ce soit dans leur sphère familiale ou avec leurs pairs. Et à la
différence de ce qui peut être observé dans les troubles autistiques, ceux-ci ont
accès et connaissent les règles sociales sans pour autant pouvoir les appliquer
dans le quotidien. De même, ils restent en perpétuelle recherche d’interaction
sociale (familiale ou amicale), et ce malgré les échecs qu’i ls peuvent éprouver,
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 163

notamment en ce qui concerne les relations amicales. Ceux-ci sont en effet


souvent victimes de rejet, sans pouvoir en intégrer le sens ou la raison, mettant
en œuvre des comportements relationnels non adaptés, que ce soit par leur
intrusion ou leur place imposée au groupe. Et à travers ces situations répétitives,
nos interrogations se portent également sur le manque ou la mauvaise qualité de
leur perception ou analyse face à de telles difficultés, ne semblant pas pouvoir
identifier leur rôle joué dans ces conflits voire au contraire, se sentir souvent
victime de mouvements d’injustice qui se répéteraient sans fin et dans tous
les domaines de leur vie. Ainsi, il est reconnu que les manifestations du TDAH
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contribuent à ces déficits sociaux, revêtant différentes expressions comportemen-
tales selon la dimension pathologique prédominante. Les déficits attentionnels
limiteraient la propension de l’enfant à reconnaître et à apprendre les indices
sociaux essentiels aux interactions sociales efficaces, ou bien mener et soutenir
un travail de groupe demandé. L’hyperactivité et l’impulsivité contribueraient
à la présence de comportements sociaux négatifs comme interrompre ou faire
intrusion dans une conversation ou un groupe, dominer dans les jeux ou ne
pouvoir attendre son tour ou encore savoir faire face à la frustration. Et de
manière intéressante, ces difficultés perçues seraient indépendantes du sous-type
de TDAH ou encore du genre. Réciproquement, leurs pairs considéreraient ces
enfants comme partenaire de travail ou ami moins désirable, à l’origine de ces
comportements de rejet souvent observés.

Le point de vue des enfants

Déjà en 2005 (b), Hoza et ses collaborateurs interrogeaient la perception des


relations sociales de 165 dyades d’enfants avec et sans TDAH, âgés de 7 à
10 ans. Les enfants avec TDAH évoquaient avoir moins d’ami proche que les
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enfants sans TDAH, et 56 % n’en avoir aucun, contre 32 % dans le groupe


control. Ils étaient également plus souvent rejetés (52 % versus 14 %). De même,
ceux-ci percevaient moins bien les marques d’affections ou plus précisément
le manque d’affection de la part de leurs pairs, comparativement aux enfants
du groupe control. Lorsque l’on s’intéresse à la perception des adolescents,
ceux-ci observent de manière convergente ressentir à la fois des difficultés
relationnelles et ne pas être aussi bien intégrés que leurs p airs. En population
générale, des collégiens ont été interrogés sur leurs relations sociales. Une
corrélation positive est ainsi retrouvée entre l’existence d’une symptomatolo-
gie déficitaire de l’attention et hyperactive et des perturb ations relationnelles,
ainsi que des états et traits de colère. Et de manière intéressante, certains
adolescents ont pu décrire avoir une préférence et ainsi se rapprocher plus
164 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

fréquemment de camarades qui présentaient eux-mêmes des symptômes d’hyper-


activité/impulsivité/inattention d’intensité similaire. Enfin, il semble évident
que ces adolescents avec TDAH souffrent d’autant plus de symptômes dépres-
sifs qu’ils ne présentent de difficultés interactionnelles. Et inversement, plus
leurs perceptions sociales (d’eux-mêmes et des autres) sont bonnes, plus leurs
interactions sont également jugées satisfaisantes (McQuade et al., 2014).

Le point de vue des parents et enseignants


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Lorsque l’on interroge les parents ou les enseignants, ceux-ci s’accordent souvent
à évoquer une certaine non-considération de l’autre par ces enfants et adoles-
cents, évoquant un possible manque d’empathie. Les comportements les plus
fréquemment observés associent négociation incessante, non prise en compte
du contexte de la situation, voire une certaine naïveté sociale. Ceci nous oriente
de nouveau vers une ressemblance relative aux perturbations sociales retrouvées
dans l’autisme. C’est ce qu’évoque également la comparaison des observations
parentales de patients TDAH puis TSA versus groupe témoin, qui met en évidence
un profil de perturbation sociale similaire qualitativement, mais d’intensité
plus sévère dans l’autisme que dans l’hyperactivité. Et dans ce contexte, le fait
de retrouver des perturbations de leurs moyens de communication en termes
de pragmatique du langage où habileté linguistique semble confirmer cette
observation.

Altération de la cognition sociale


!

Au-delà de ces observations essentiellement comportementales, se pose bien


évidemment la question de l’implication des éléments cognitifs sociaux au sein
de ces perturbations sociales. Les premiers travaux se sont centrés sur l’étude
de la théorie de l’esprit en parallèle de celle des fonctions exécutives chez ces
enfants. Les observations initiales retrouvaient toutes de manière congruente des
perturbations exécutives (notamment en termes de planification et flexibilité)
chez les enfants TDAH, alors que leur théorie de l’esprit ne semblait pas différente
de celle des enfants sans TDAH. Il faudra attendre la réalisation d’étude de plus
grande envergure, pour voir apparaître des observations contraires, démontrant
que les enfants avec TDAH ont, à l’instar de leurs fonctions attentionnelles, des
perturbations en termes de théorie de l’esprit et attribution d’état mentaux à
autrui. Ces éléments rapprocheront de nouveaux l’étude du trouble attentionnel
à celui du trouble autistique, posant la question de leurs points de comparaison
ou ressemblance sous l’angle nouveau des interactions sociales. Et en effet, il a
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 165

pu être mis en évidence chez des sujets avec un TSA ou un TDAH des difficultés
similaires en termes de reconnaissance des expressions faciales des émotions,
comparativement à des sujets sans trouble associé. Souhaitant orienter leurs
investigations vers l’étude des fonctions attentionnelles, ils soulignent que
celles-ci contribueraient fortement aux processus de perception émotionnelle
chez ces sujets, au-delà même de l’existence d’un trouble autistique. Sinzing et
al. (2008) renouvellent cette expérience en y ajoutant l’inclusion d’un groupe
clinique associant TSA+TDAH. Ils observent alors que les sujets avec un TDAH
isolé et ceux associant TSA+TDAH présentent de plus grandes perturbations
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au sein de leurs processus de reconnaissance émotionnelle, comparativement
aux sujets contrôles mais aussi et de manière significative aux sujets avec un
TSA isolé. Qui plus est dans ce dernier groupe en particulier, les performances
de reconnaissance seraient plus corrélées aux symptômes attentionnels obser-
vés qu’aux symptômes autistiques. Souhaitant affiner leurs observations, ils y
intègrent l’étude des performances attentionnelles par le biais d’une évaluation
conjointe de leur attention soutenue, ainsi que de leur inhibition et flexibilité.
Leurs résultats démontrent alors que chez les sujets avec un TDAH (isolé ou
associé à un TSA), l’attention soutenue et l’inhibition influenceraient de manière
significative leurs performances de reconnaissance émotionnelle. Cette dernière
remarque soulève la question de l’impact des performances a ttentionnelles sur
les compétences sociales. Cette réflexion peut être soutenue par le fait que
chez les sujets avec un TDAH, les caractéristiques attentionnelles seraient, au
contraire de l’hyperactivité/impulsivité, directement reliées aux compétences
de reconnaissance des émotions et des signaux non verbaux. Ces travaux s’ap-
puient en effet sur une littérature congruente qui a pu démontrer à travers
différentes études que les enfants avec TDAH ont des compétences altérées en
termes de reconnaissance des émotions, que ce soit pour des visages d’enfant
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ou d’adulte, attribuées isolément ou en présence d’un contexte social donné.


Mis en comparaison avec des enfants autistes et des enfants associant autisme
et trouble de l’attention/hyperactivité, les enfants avec TDAH seul présentent
des difficultés similaires en termes de reconnaissance des é motions faciales et
théorie de l’esprit, et ce, d’autant plus qu’ils avançaient en âge. Ainsi, certains
auteurs suggèrent que ces perturbations cognitives observées dans le TDAH
seraient qualitativement similaires à celles observées dans les TSA, mais de
manière moindre en termes d’intensité. Il en est en effet de même concernant les
habiletés langagières sociales, avec en particulier des perturbations importantes
de la pragmatique du langage qui selon certains auteurs aurait un lien direct
dans les difficultés interactionnelles observées chez ces enfants. L’ensemble
de cette littérature souhaitant initialement reconnaître les déterminants des
166 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

phénoménologies sociales présentées chez les sujets avec un TSA ou un TDAH


met en évidence l’existence d’une influence des processus attentionnels sur les
compétences sociales, au-delà même de l’isolement de recouvrements associatifs
entre TSA et TDAH.

De nouvelles perspectives thérapeutiques ?


!

Bien que nos expériences cliniques nous amènent à penser l’instauration d’un
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traitement médicamenteux agit bien au-delà des domaines de l’hyperacti-
vité/impulsivité/inattention chez ces enfants, la démonstration scientifique de
ces observations reste difficile aujourd’hui à mettre en œuvre. Nous retenons
donc que les psychostimulants ont un impact bénéfique sur les comportements
sociaux négatifs (telles que les oppositions et bagarres, et non compliance aux
règles de vie), mais sembleraient sans effet sur l’amélioration des comportements
sociaux positifs ou encore la perception de ceux-ci par les pairs (Hoza et al.,
2005) démontrant ainsi la limite des thérapeutiques pharmacologiques. Ceci
nous amène donc à devoir développer des prises en charges globales plurimodales
au-delà de l’instauration seule du traitement médicamenteux de référence.
Les perspectives non médicamenteuses reposent actuellement principalement
sur l’entraînement aux compétences ou habiletés sociales. Dispensé en groupe
ou en individuel, son objectif est donc d’améliorer le fonctionnement social de
l’enfant aux moyens de méthodes cognitives et comportementales. Les théma-
tiques travaillées peuvent être multiples, comme la gestion de ses émotions, la
résolution de problème et de conflit, comment mieux communiquer entre pair,
etc. De nombreux programmes ont été développés et étudiés et il semblerait
que les plus efficaces sont ceux exécutés dans le milieu qui pose problème à
l’enfant, nécessitant donc la participation active des enseignants et des parents,
sur des situations concrètes de la vie de l’enfant, avec selon les études, des
impacts positifs à court et long terme. Ces mêmes effets positifs sur les compé-
tences sociales ont pu être également observés au sein de programmes moins
spécifiques tels que des groupes d’intervention psychosociales ou encore des
groupes d’entraînement à la gestion des émotions. Ces données sont évidemment
à modérer face à certaines méta-analyse ou revue Cochrane antérieures qui ne
retrouvaient aucun argument en faveur ou en défaveur de ces groupes, comparés
à des prises en charge traditionnelles (Storebø et al., 2011). Néanmoins ces
perspectives thérapeutiques semblent de plus en plus prometteuses, et ce d’au-
tant plus qu’elles sont intégrées dans une prise en charge multimodale (incluant
les traitements médicamenteux) menée sur du long terme. Et p our cause, dans
TDAH, interactions sociales et Troubles du Spectre de l’Autisme 167

un article de 2015, Hinshaw & Arnold reviennent sur les données recueillies par
l’étude de grande envergure MTA qui, ayant pour but de comparer différentes
modalités de prise en charge (thérapie seule versus traitement médicamenteux
seul versus traitement combiné versus soin traditionnel) avaient alors conclu en
la supériorité des traitemenst pharmacologiques seuls. Selon ces auteurs, ces
résultats sont à contraster face à l’analyse plus fine de ces données, démontrant
aujourd’hui que le groupe combiné obtient de meilleures perspectives en termes
de devenir, mais également au sein de fonctionnement plus spécifiques (i.e.
compétences académiques, sociales...). Les points importants qu’ils soulignent
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sont la nécessité de bien caractériser les individualités personnelles de chaque
enfant (en termes de comorbidité, style parental, mais égal ement effet indési-
rable médicamenteux à long terme) afin de proposer un programme de soin plus
individualisé et adapté à chaque situation rencontrée (Hinshaw & Arnold, 2015).

C ONCLUSION

Bien que les modalités de leurs liens associatifs ne puissent encore être clai-
rement définies, il est aujourd’hui nécessaire de considérer que la présence
d’une co-occurrence entre TDAH et TSA influence fortement la symptomatologie
résultante ainsi que la réponse thérapeutique des patients concernés. Cette
considération doit dès à présent intégrer les démarches médicales dispensées
auprès de sujets où se pose la question d’une problématique autistique et/ou
hyperactive/attentionnelle, en guidant le choix des investigations diagnostiques
mais aussi l’élaboration de projets thérapeutiques menés par les cliniciens.
Au-delà d’une caractérisation pathologique autistique, la forte influence des
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

difficultés relationnelles ou sociales sur la qualité de vie des sujets avec un


TDAH doit également nous orienter vers une plus grande sensibilisation à cette
dimension dans le Trouble. La description de telles difficul tés observées dès le
plus jeune âge des patients et à l’origine d’isolement voire de rejet social de la
part des autres enfants et ce, peu importe le type ou le degré de sévérité de leur
TDAH, doit nous orienter vers la réalisation systématique d’une exploration de la
sphère sociale chez ces patients. Ceci, afin de mieux comprendre leurs difficultés
respectives, mais surtout mieux prévenir le retentissement social potentiel tout
en accompagnant plus spécifiquement ces enfants dans ce domaine.
168 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

B IBLIOGRAPHIE

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Chapitre 8

TDAH, somnolence et troubles


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du sommeil

Stéphanie Bioulac, Jean-Arthur Micoulaud-Franchi, Astrid Claret

L ES TROUBLES DU SOMMEIL sont fréquemment rapportés chez les enfants et les


adultes présentant un trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperacti-
vité (TDAH) avec une prévalence de l’ordre de 25 % à 55 % (Cortese et al., 2013 ;
Hvolby, 2014). Ces plaintes de sommeil incluent différents troubles du sommeil
(troubles respiratoires du sommeil, mouvements anormaux liés au sommeil...)
ainsi que des difficultés d’endormissement, à se réveiller et à se maintenir éveillé
dans des situations de la vie quotidienne (somnolence diurne excessive). La
somnolence diurne excessive concerne une diminution des capacités de main-
tien d’éveil psychophysiologique et s’améliore généralement par du sommeil. La
somnolence diurne excessive affecte 5 à 10 % de la population générale. C’est
un symptôme fréquemment retrouvé chez les sujets présentant des troubles du
sommeil. Les spécialistes du sommeil sont de leur côté confr ontés à des symp-
tômes d’inattention et d’hyperactivité chez leurs patients souffrant de troubles
primaires du sommeil (Oosterloo, Lammers, Overeem, de Noord, & Kooij, 2006).
En effet, la privation de sommeil peut « imiter, mimer » les symptômes de TDAH
chez l’enfant et l’adulte.
Il peut ainsi parfois être difficile pour le clinicien de faire la distinction entre
diagnostic de TDAH comorbide avec un trouble du sommeil, et un trouble du
sommeil induisant des symptômes de TDAH.
Les liens entre somnolence, troubles du sommeil et TDAH sont complexes et
multifactoriels. L’objectif de ce chapitre est de reprendre les principaux troubles
TDAH, somnolence et troubles du sommeil 171

du sommeil comorbides avec le TDAH, d’une part. D’autre part, seront détaillés
les liens entre TDAH, symptômes de TDAH et somnolence diurne excessive avec
proposition d’un modèle intégratif.

TDAH ET TROUBLES DU SOMMEIL

TDAH et mouvements anormaux liés au sommeil


!
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Deux types de troubles sont principalement décrits dans cette catégorie : le syn-
drome des jambes sans repos (SJSR) et le syndrome de mouvements périodiques
de jambes pendant le sommeil (MPJS).
Le syndrome des jambes sans repos (SJSR), appelées aussi impatiences, se mani-
feste par des sensations désagréables, parfois douloureuses, ressenties dans les
pieds, dans les jambes et parfois dans les bras, associées à un besoin impé-
rieux de bouger ces membres. Le diagnostic du SJSR est clinique et repose sur
quatre critères principaux définis par l’International Restless Legs Syndrome Study
Group (IRLSSG) en 1995 : besoin impérieux de bouger les membres inférieurs,
apparition ou aggravation lors des périodes de repos ou d’inactivité, soulage-
ment ou rémission des symptômes lors de mouvements comme la marche ou
l’étirement et apparition ou nette aggravation des symptômes le soir ou la nuit.
Ils sont associés à trois critères secondaires : antécédents familiaux (50 % des
cas), mouvements spontanés périodiques pendant le sommeil ou l’éveil : " 4
mouvements de 0,5-10 secondes se répétant toutes les 5 à 90 secondes et index
de mouvements périodiques " 5 mouvements/h et une réponse partiellement
positive aux médicaments dopaminergiques.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

Il est important de rechercher un SJSR lors de l’évaluation clinique des enfants


TDAH de par la comorbidité élevée entre ces deux pathologies (Cortese et al.,
2005 ; Hvolby, 2014 ; Owens, 2008).
Deux hypothèses physiopathologiques sont émises quant à cette association.
Premièrement, l’existence d’un dysfonctionnement dopaminergique commun aux
deux troubles et, deuxièmement, plus indirect, l’efficacité des agonistes dopami-
nergiques dans ces deux pathologies. Une autre hypothèse explorée est l’exis-
tence d’une carence en fer dans la physiopathologie du SJSR avec une efficacité
d’une supplémentation en fer dans les MPS et le SJSR. Dans le TDAH, une carence
martiale pourrait contribuer à la symptomatologie ; une supplémentation en
fer pourrait améliorer les symptômes d’inattention et d’hyperactivité chez des
enfants présentant ce trouble.
172 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Dès lors, il paraît nécessaire d’avoir une attention particulière lors de l’évaluation
des patients TDAH car les sujets avec SJSR peuvent « mimer » des symptômes
de TDAH et les sujets TDAH peuvent aussi présenter un SJSR.
Le syndrome de mouvements périodiques de jambes pendant le sommeil (MPJS)
s’exprime sous forme de secousses pseudo-rythmiques des membres inférieurs. Ils
peuvent provoquer des micro-éveils et sont objectivables au cours d’un enregis-
trement polysomnographique du sommeil. Un index de mouvement périodiques
pendant le sommeil (IMP) > 15/h (>5/h chez l’enfant), des mic ro-éveils objec-
tivés par polysomnographie et une plainte de sommeil agité avec somnolence
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diurne excessive (SDE) définissent le trouble Ce syndrome est souvent associé
au SJSR et constitue un facteur prédictif de ce trouble.

TDAH et troubles respiratoires du sommeil


!

Les troubles respiratoires du sommeil regroupent un ensemble de pathologies


variées dont les plus fréquentes sont le ronflement, le syndrome d’hypoventi-
lation et le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS). Le SAOS se
caractérise par la survenue anormale pendant le sommeil d’épisodes fréquents
d’obstruction complète ou partielle des voies aériennes supérieures. La sévérité
du SAOS est estimée par le nombre d’apnées et d’hypopnées par heure de sommeil
(index d’apnées/hypopnées (IAH). Une apnée se définit par une cessation totale
de flux d’air pendant au moins 10 secondes. Une hypopnée est une baisse de
plus de 50 % du flux d’air pendant au moins dix secondes ou une diminution plus
subtile du flux associée à une désaturation en oxygène (>3%) ou un micro-éveil.
Un index d’apnées/hypopnées >5/ heure est reconnu comme pathologique par
l’AASM) et >10/h en France. Chez l’enfant, la cotation est différente avec un index
d’apnées/hypopnées >1/H pathologique. Les troubles respi ratoires du sommeil
ont été associés régulièrement à des déficits neuro-cognitifs et des troubles du
comportement incluant des symptômes d’inattention et d’hyperactivité (Hvolby,
2014 ; O’Brien, 2009 ; Owens, 2008).
La relation entre troubles respiratoires du sommeil et TDAH reste controversée.
Plusieurs éléments peuvent contribuer à ces données contradictoires, comme le
choix des critères de sélection (diagnostic clinique de TDAH) ou bien symptômes
de TDAH (évalués par des questionnaires). De façon similaire, il existe une
variabilité dans les cut-off choisis pour poser le diagnostic de SAOS chez l’enfant
(parfois IAH>1/heure pour d’autres IAH>5/heure). La récen te méta-analyse de
Sedkly (Sedky, Bennett, & Carvalho, 2014) suggère que les enfants avec un
trouble respiratoire du sommeil présentent fréquemment des symptômes de
TDAH, somnolence et troubles du sommeil 173

TDAH. De plus, il existe une diminution des symptômes de TDAH lors d’une prise
en charge efficace du trouble respiratoire. Dès lors, il paraît indispensable qu’il y
ait une évaluation systématique des troubles respiratoires chez les sujets TDAH
avec un traitement de ce trouble du sommeil s’intégrant dans la prise en charge
globale du sujet.
Une hypothèse possible expliquant le lien entre TDAH et SAOS est la fragmen-
tation du sommeil combinée aux épisodes d’hypoxie. En effet, un sommeil
fragmenté conduit à un sommeil non réparateur, qui, combiné aux épisodes
d’hypoxie et d’hypercapnie avec les lésions cellulaires chimiques conséquentes,
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pourrait être à l’origine d’altérations neurologiques en particulier au niveau
du cortex préfrontal. Ainsi, ces lésions préfrontales pourraient être à l’origine
d’inattention, d’impulsivité, de difficultés d’organisation et de planification.

TDAH et troubles du rythme circadien veille-sommeil


!

Les rythmes circadiens sont des rythmes biologiques endogènes d’environ


24 heures retrouvés chez tous les organismes vivants. Un trouble du rythme cir-
cadien se définit par une altération du système circadien, ou de ses mécanismes
d’entraînement, ou par défaut d’alignement du rythme circadien endogène avec
l’environnement extérieur. Le syndrome de retard de phase du sommeil (SRPS)
est le plus fréquent des troubles intrinsèques du rythme circadien. Sa prévalence
est estimée autour de 0,1 % chez les adultes et de 7 % chez les adolescents.
L’agenda de sommeil, tenu pendant au moins 2-3 semaines avec idéalement une
période de vacances, permet d’objectiver facilement le retard de phase. Dans
les cas où la réalisation de l’agenda est difficile ou ses résultats difficilement
interprétables, l’actimétrie peut être un outil utile, pendant au moins 7 jours,
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

l’enregistrement devant inclure des journées scolaires/travaillées et des journées


de repos. L’actimètre se présente sous la forme d’une petite montre noire portée
au poignet non dominant ; il permet l’enregistrement du nombre et de l’intensité
des mouvements au cours de cette période.
La réalisation de deux nuits de polysomnographie peut aussi avoir un intérêt : la
première nuit avec des horaires soumis aux contraintes soci ales, et la seconde,
avec les horaires « idéaux » du patient. Il est également possible d’objectiver le
retard de phase circadien par le dosage de la mélatonine salivaire pendant 24h
qui révèle un décalage du pic de sécrétion. Le décalage du pic de mélatonine chez
les sujets présentant un SRPS suggère un rythme circadien endogène supérieur
à 24h, remarquable surtout lorsque l’exposition lumineuse fait défaut.
174 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Van der Heijden et al. (Van der Heijden, Smits, Van Someren, & Gunning, 2005)
révèlent qu’un tiers des enfants présentant un TDAH se plaignent de difficulté
d’endormissement chronique. De plus, ils caractérisent ces difficultés d’endor-
missement comme spécifique d’un SRPS. En effet, ces auteurs ont comparé
quatre-vingt-sept enfants présentant un TDAH et une difficulté d’endormis-
sement chronique et trente-trois enfants présentant un TDAH sans difficulté
d’endormissement à l’aide d’une mesure de mélatonine salivaire nocturne (DLMO).
Les résultats obtenus montrent un décalage de sécrétion chez les enfants TDAH
avec difficulté d’endormissement chronique. Par ailleurs, à qualité de sommeil
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égale, l’heure de réveil de ces derniers survient plus tardivement. Tous ces
éléments sont fortement évocateurs de SRPS chez certains enfants présentant un
TDAH. Une étude d’évaluation subjective du sommeil à l’aide du questionnaire
de préférence circadienne (Composite Scale of Morningness, CSM) révèle une pré-
férence circadienne tardive chez des enfants présentant un TDAH (Caci, Bouchez,
& Baylé, 2009). De plus, observant une forte association entre inattention et
préférence circadienne tardive, les auteurs suggèrent que cette préférence soit
un endophenotype du sous-type inattentif du TDAH.
D’autres études se sont intéressées aux effets de la mélatonine sur les symptômes
du TDAH.
Deux études randomisées contrôlées et en double aveugle ont été conduites
chez des enfants présentant un TDAH et une plainte d’insomnie d’endormisse-
ment chronique (Van der Heijden, Smits, Van Someren, Ridderinkhof, & Gunning,
2007 ; M. D. Weiss, Wasdell, Bomben, Rea, & Freeman, 2006). Dans l’étude en
cross-over de Weiss et al. (M. D. Weiss et al., 2006), vingt-sept enfants TDAH
traités par psychostimulants ont reçu soit de la mélatonine (5 mg/j) puis un
placebo, soit le contraire, pendant trente jours. Les auteu rs ont ainsi constaté
une diminution significative de la latence d’endormissement dans le groupe traité
par mélatonine. De même, Van der Heijden et al. (Van der Heijden et al., 2007)
ont également observé les effets bénéfiques sur la latence d’endormissement
de l’administration de mélatonine (3-6 mg) pendant quatre semaines chez cent
cinq enfants présentant un TDAH non traités.
Une préférence circadienne tardive est également signalée chez des adultes
présentant un TDAH. Une association entre un polymorphisme de la région 3’UTR
du gène CLOCK (circadian locomotor output cycles kaput) et le TDAH chez l’adulte
a été décrite dans une étude et suggère l’implication du gène CLOCK dans la
susceptibilité à développer ce trouble. Dans une étude comparative sujets TDAH
adultes et sujets contrôles, Baird et al ont montré que les gènes CLOCK BMAL1
et PER2 avaient une rythmicité circadienne pour les sujets contrôles mais qui
TDAH, somnolence et troubles du sommeil 175

étaient absentes chez les sujets TDAH (Baird, Coogan, Siddiqui, Donev, & Thome,
2012).

TDAH, insomnie et réduction du temps de sommeil


!

Plainte d’insomnie, réduction de l’efficacité du sommeil et diminution de la


qualité du sommeil sont des plaintes fréquemment rapportées par les enfants
et les parents des sujets TDAH. Ces difficultés comportementales existent de
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l’endormissement, au réveil et « tout au long de la nuit », avec des latences
d’endormissement augmentées, des difficultés d’endormissement variées (résis-
tance au coucher, interruptions lors des routines du coucher). Des problèmes de
continuité du sommeil sont aussi décrits avec une grande variabilité entre les
nuits chez les enfants TDAH. Enfin, il est nécessaire d’évaluer les activités dans
lesquelles peuvent s’engager les sujets, tels que les jeux vidéo ou Internet.

TDAH et hypersomnolence d’origine centrale


!

Plusieurs pathologies s’intègrent dans cette catégorie, les principales sont la


narcolepsie et l’hypersomnie idiopathique, caractérisées par une somnolence
diurne excessive.
La narcolepsie, ou maladie de Gélineau, se définit, par une somnolence excessive
avec des accès incoercibles de sommeil, des accès éventuels de cataplexie, des
hallucinations et des paralysies du sommeil (symptômes auxiliaires). Dans l’hyper-
somnie idiopathique, la somnolence diurne excessive et les attaques de sommeil
sont généralement plus longues et moins irrésistibles que dans la narcolepsie. Les
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symptômes auxiliaires sont absents. La narcolepsie avec cataplexie (type 1) est


associée dans 85 à 95 % des cas à un déficit en hypocrétine/orexine (neuropep-
tide hypothalamique), mis en évidence par des taux faibles voire indétectables
dans le liquide céphalo-rachidien. Peu d’études ont étudié la comorbidité entre
TDAH et narcolepsie (Lopez, Barateau, Chenini, & Dauvilliers, 2014 ; Ohayon,
2013 ; Oosterloo, Lammers, Overeem, de Noord, & Kooij, 2006). Dans l’étude
d’Ohayon comparant une population de 320 sujets narcoleptiques à 1 464 sujets
contrôles, la présence de TDAH dans l’enfance était respectivement 5.4 % et
2.5 %.
176 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

L IENS ENTRE TDAH, SYMPTÔMES DE TDAH


ET SOMNOLENCE DIURNE EXCESSIVE

La somnolence diurne excessive (SDE), symptôme fréquent peut s’évaluer à l’aide


d’échelles cliniques ou bien de mesures électrophysiologiques. La plus utilisée est
l’échelle d’Epworth reposant sur l’auto-appréciation de la probabilité de somnoler,
cotée de 0 (jamais d’assoupissement), à 3 (risque élever de s’assoupir) dans huit
situations de la vie quotidienne, impliquant différents niveaux d’activité (lecture,
conduite automobile...). Un score supérieur ou égal à 11 indique une somnolence
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diurne excessive. Concernant les mesures objectives, le te st itératif de latence
d’endormissement (TILE) et le test de maintien d’éveil (TME) sont classiquement
utilisés en médecine du sommeil pour évaluer la SDE. Réalisé après une nuit
de polysomnographie, le TILE se déroule de 9 à 18 heures, en ci nq périodes de
20 minutes espacées de 2 heures chacune, où le sujet est allongé sur un lit dans
l’obscurité avec pour consigne : « Allongez-vous calmement, fermez les yeux
et essayez de dormir ». Une somnolence pathologique modérée correspond à
des endormissements en moins de 8 minutes alors qu’une somnolence sévère
correspond à des endormissements en moins de 5 minutes en moyenne.
Le TME, se réalise sous forme de siestes effectuées à 10h, 12h , 14h et 16h. Le
sujet est invité à s’assoir dans le lit ou dans un fauteuil et doit lutter contre
le sommeil avec comme consigne : « Restez éveillé, luttez contre le sommeil
le plus longtemps possible : gardez les yeux ouvert, regardez devant vous. »
Une somnolence modérée s’exprime par une latence moyenne d’endormissement
inférieure à 33 minutes alors qu’une somnolence sévère correspond à une latence
moyenne d’endormissement inférieure à 19 minutes.

De la somnolence diurne excessive aux symptômes de TDAH


!

Les symptômes de TDAH ont été explorés dans des populations d’adultes narco-
leptiques (Modestino & Winchester, 2013 ; Oosterloo, et al., 2006). Oosterloo et
al. (Oosterloo, et al., 2006) ont retrouvé des symptômes de TDAH chez 18.9 %
des sujets narcoleptiques. Dans l’étude de Modestino (Mode stino & Winchester,
2013), des symptômes de TDAH dans l’enfance étaient plus fréquemment retrou-
vés chez les sujets narcoleptiques que chez les sujets témoins. Ces données ont
conduit certains auteurs a proposé un modèle de TDAH impliquant un déficit
d’alerte. L’hyperactivité motrice, pour certains enfants TDAH, pourrait être une
contre mesure pour rester éveillé. De plus, l’utilisation de psychostimulants
dans le traitement du TDAH et l’amélioration des symptômes de TDAH avec le
TDAH, somnolence et troubles du sommeil 177

modafinil (traitement classiquement utilisé dans la narcol epsie) (Loland et al.,


2012) renforcent l’idée d’un déficit d’alerte dans le TDAH.

Du TDAH à la somnolence diurne excessive


!

Les sujets TDAH se plaignent souvent de somnolence dans des situations peu
stimulantes même s’ils sont assez reposés. Ainsi, l’existe nce d’une somnolence
diurne subjective (utilisant des questionnaires) a été souvent rapportée chez
des enfants et des adultes TDAH.
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Considérant les mesures objectives (TILE), des résultats contradictoires sont
observés. (Chervin et al., 2014 ; Chervin et al., 2006 ; Lecendreux, Konofal,
Bouvard, Falissard, & Mouren-Simeoni, 2000).
En population adulte, les études sont plus restreintes. Oosterloo a montré que
37 % des sujets TDAH adultes présentaient une SDE subjective (Oosterloo, et al.,
2006). Une étude récente a montré que les sujets TDAH somnolents présentaient
des latences d’endormissement plus courtes au TILE, néanmoins les moyennes
n’étaient pas significativement différentes comparées aux sujets témoins (Sedky,
et al., 2014).
Utilisant le TME, notre équipe a montré qu’un pourcentage élevé de sujets TDAH
adultes présentaient une somnolence diurne excessive objective (Bioulac et al.,
2015). En effet, 35 % des sujets (n=14) exprimaient une somnolence sévère à
14.2 min (pathologique #19 min). 11 des sujets ne présentaient pas de trouble
du sommeil organique associé. Ainsi, émerge la question de l’existence, au sein
des sujets TDAH, d’un sous-groupe de sujets somnolents. Ces résultats sont
concordants avec une origine centrale de la SDE, en faveur de l’hypothèse d’un
« hypoarousal state » comme dans la narcolepsie. Une application clinique serait
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d’utiliser dans ce sous-groupe de sujet des molécules éveil lantes (telles que le
modafinil, utilisé dans la narcolepsie) plutôt que les psychostimulants.

Proposition d’un modèle


!

De ces observations, nous proposons un modèle intégratif tentant d’explorer


les liens entre TDAH, symptômes de TDAH, somnolence diurne excessive et les
troubles du sommeil comorbides (Figure 8.1). En effet, comme vu précédemment
les sujets TDAH présentent fréquemment des troubles du sommeil, troubles du
sommeil pouvant induire une somnolence diurne excessive aggravant le pronostic
du TDAH. Mais il faut garder à l’esprit qu’il existe aussi un sous-groupe de sujets
TDAH-somnolents (non induit par des troubles du sommeil).
178 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Dès lors, il est nécessaire lors de l’évaluation d’un sujet TDAH que soient explorés
et pris en charge les troubles du sommeil ainsi que leur somnolence. Néanmoins,
les troubles du sommeil peuvent aussi induire des symptômes de TDAH qui
peuvent être confondus avec un TDAH. Dans cette situation, le traitement seul
des troubles du sommeil devrait s’accompagner de la disparition des symptômes
de TDAH.

C ONCLUSION
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L’exploration des liens entre TDAH et troubles du sommeil pose la question
complexe de l’origine de ces liens. S’agit-il de troubles intrinsèques au TDAH ?
S’agit-il de comorbidités ? Ou bien, s’agit-il de diagnostics erronés, les symp-
tômes de troubles primaires du sommeil mimant les symptômes du TDAH ?
La compréhension des liens entre sommeil et TDAH soulève de nombreuses
questions. L’hétérogénéité clinique du TDAH et la fréquence de ses comorbidités
psychiatriques et cognitives permettent d’envisager l’existence de sous-groupes
dans ce trouble. Identifier phénotypiquement ces sous-groupes permettrait la
réalisation d’études plus spécifiques et de proposer des stratégies thérapeutiques
diversifiées.
D’un point de vue clinique, l’exploration du sommeil avec recherche de troubles
primaires du sommeil doit être systématique dans le TDAH, lors du diagnostic
positif, différentiel et de recherche de comorbidités. Les éventuels troubles du
sommeil doivent être traités car ils peuvent mimer ou aggrav er les symptômes
comportementaux diurnes du TDAH.
TDAH, somnolence et troubles du sommeil 179

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Figure 8.1. Modèle intégratif explorant les liens entre TDAH, symptômes de TDAH
et somnolence diurne excessive.

B IBLIOGRAPHIE
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

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Chapitre 9

TDAH, comportements d’agression


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physique et criminalité

Grégory Michel, Julie Salla, Olivier Grondin

L ’ÉTUDE DES COMPORTEMENTS d’agression, de la violence chez l’enfant est un phé-


nomène complexe qui comprend des enjeux importants sur le plan dévelop-
pemental. Les problèmes associés à l’agression physique durant l’enfance sont
nombreux, et s’étendent à la délinquance, l’usage de substances et la criminalité
au cours de l’adolescence et l’âge adulte, jusqu’aux problèmes plus larges tels
qu’une mauvaise adaptation scolaire et sociale etc. (Pingault et coll, 2013).
Cependant, l’étude de l’agression physique chez l’enfant est compliquée par une
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définition et une évaluation difficile via des outils qui mélangent des comporte-
ments d’agression physique, de transgression, de désobéissance, des conduites
désordonnées, des comportements antisociaux (Tremblay et coll., 2016). La
plupart des études limitent la définition d’un acte agressif à ceux ayant un
impact négatif (lésions corporelles ou mentales) sur la « victime » sans réfé-
rence à l’intention de nuire. En effet, l’intention de nuire à autrui apparaît dans
la deuxième année de vie, alors que les comportements agressifs apparaissent
plus tôt (Kagan, 1974). Dans ce chapitre nous nous interrogerons sur les liens
existant entre TDAH, agressivité et comportements violents en tenant compte
de la comorbidité, des médiateurs, ainsi que des trajectoires de développement
de l’agression physique de la petite enfance à l’âge adulte.
182 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

TDAH ET COMORBIDITÉ AVEC LE TC ET LE TOP

Le terme de « comorbidité psychiatrique » signifie la présence de deux ou plu-


sieurs troubles chez un même individu, laquelle est établie par évaluation cli-
nique systématique. Le phénomène de comorbidité psychiatrique a été analysé
sur des populations générales et cliniques. L’intérêt pour la comorbidité ne
réside pas uniquement dans une combinaison de troubles définis par un système
classificatoire. La présence de troubles comorbides est aussi heuristique sur le
plan clinique, développemental et étiologique. Un trouble comorbide peut avoir
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une incidence sur la symptomatologie et sur le devenir du trouble considéré.
Aussi, de nombreux auteurs insistent sur l’importance et la nécessité de prendre
en compte la comorbidité dans la compréhension de l’étiologie du trouble et de
son traitement. Sur le plan terminologique, on peut distinguer les concepts de
comorbidité « successive » et comorbidité « concurrente ». Dans le cas, d’une
comorbidité successive, un trouble précède un second (distinction entre le carac-
tère primaire et secondaire), alors que dans le cas d’une comorbidité concurrente
les deux troubles apparaissent et agissent de façon simultanée.
Le TDAH est rarement isolé, et la littérature internationale fait apparaître une
comorbidité à la fois élevée et très diversifiée notamment avec d’autres troubles
externalisés tels que le Trouble des Conduites (TC) et le Trouble Oppositionnel
avec Provocation (TOP). Il a été rapporté à partir de la synthèse de 21 études
publiées entre 1987 et 1997 examinant les liens entre TC ou TOP et TDAH une
comorbité parfois très élevée avec des taux de prévalence très variables (Angold
et coll., 1999). Par exemple, la comorbidité des enfants présentant un TC/TOP
avec le TDAH variait entre 3 et 41 %. Concernant la comorbité des enfants
présentant un TDAH avec un TC/TOP était encore plus large puisqu’elle s’étendait
entre 14 et 100 %.

Trouble des Conduites (TC)


!

Le TC et le TOP s’inscrivent dans le DSM-5 dans les troubles perturbateurs, du


contrôle des impulsions et des conduites à la différence du TDAH qui rejoint
les troubles neurodéveloppementaux. Le TC se définit comme un ensemble de
conduites répétitives et persistantes, dans lequel sont bafoués les droits fon-
damentaux d’autrui ou les normes et règles sociales correspondant à l’âge du
sujet.
Un certain nombre de caractéristiques ont été rattachées au sous-groupe d’en-
fants présentant un TDAH et un TC. La comorbidité entre ces deux types de
TDAH, comportements d’agression physique et criminalité 183

trouble serait associée à des difficultés sur le plan relationnel (rejets par les
pairs, absence d’ami proche, interactions dysfonctionnelles avec les parents...),
académique (mauvaise scolarité...) et social (conduites de délinquance...) qui
sont beaucoup plus importantes chez ces enfants (Gresham et coll., 1998) et
s’accentuent avec le temps. Les enfants présentant cette co morbidité auraient
davantage de comportements antisociaux et illégaux durant l’adolescence et
seraient plus souvent incarcérés (Soderstrom et coll., 2004). Toutes ces difficul-
tés seraient liées à des symptômes plus sévères que dans le cas d’un TC isolé.
Cette comorbité très étudiée chez les garçons a aussi été soulignée chez les filles.
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Par exemple, l’étude de Young et coll (2005) a montré chez des adolescentes que
l’hyperactivité constituait un facteur de risque pour le développement ultérieur
du TC et prédisait des difficultés scolaires et relationnelles avec les pairs.

Le Trouble Oppositionnel avec Provocation (TOP)


!

Le TOP correspond à des comportements négatifs ou hostiles, par lesquels l’en-


fant conteste et refuse d’obéir. Il se montre opposant vis-à-vis de l’autorité (cf.
parents), en colère et souvent susceptible et vindicatif.
Certains auteurs et classifications regroupent le TOP avec le TC dans une même
catégorie générique (troubles disruptifs, troubles du comportement perturba-
teur). D’autres, en revanche, plaident pour une distinction entre ces deux troubles
dans la mesure où tous les enfants ayant un TOP ne présentent p as ou ne vont
pas présenter un TC (Greene et coll., 2002). L’étude de Greene et coll. (2002)
a examiné les liens entre TOP et TC à partir de 1600 enfants âgés de 10 ans et
répartis en trois groupes : un groupe présentant un TOP (N=643), un second un
TC (N=262) et un troisième un TOP et TC (N=675). Les résultats ont montré que
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

sur l’ensemble des enfants présentant un TOP, seuls 27,7 % présentaient un TC. Il
a aussi été souligné que le groupe d’enfants ayant un TOP se caractérisait par un
niveau de comorbidité psychiatrique plus élevé notamment a vec le TDAH ainsi
qu’avec les troubles dépressifs, anxieux et bipolaires et un dysfonctionnement
social et familial plus important que les autres groupes. Comme pour le TDAH,
il semblerait que ce groupe associant TC et TOP constituerait un sous-groupe
spécifique avec une trajectoire développementale singulière.
En résumé, il apparaît que, globalement, la comorbidité du TC/TOP avec le TDAH
est souvent associée à une augmentation de la symptomatologie dans chacun des
troubles. La plupart des études épidémiologiques expliquent cette co-occurrence
par l’existence d’une continuité hétérotypique entre le TDAH pendant l’enfance
et le TC à l’adolescence. Ce type de données renvoie au modèle du stepping-stone
184 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

(tremplin) dans lequel le TDAH est la première marche, puis le TOP la deuxième
marche dans la progression vers le TC. Ces trois troubles pourraient refléter
différentes phases de manifestations cliniques d’une même inclinaison subsyn-
dromique. Il s’agirait d’une comorbidité successive expliquée par des processus
communs à ces trois troubles. Le TDAH durant l’enfance serait d’autant plus
prédictif du TC qu’il serait associé au trouble oppositionnel avec provocation
(TOP). L’étude de Whittinger et coll (2007) réalisée chez 151 enfants âgés suivis
entre 6 et 13 ans a montré que les enfants présentant à la fois un TDAH et un
TOP avaient près de trois fois plus de risque de développer un TC à l’adolescence.
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TDAH, COMPORTEMENTS ANTISOCIAUX ET CRIMINALITÉ

TDAH prédictif de la criminalité


!

Plusieurs études ont montré que le TDAH était un trouble prédictif des com-
portements antisociaux et violents ainsi que de la criminalité. Par exemple, la
relation entre TDAH dans l’enfance et la criminalité ultérieure a été soulignée par
des taux d’arrestation variant entre 39-57 % chez les jeunes souffrant de TDAH
(Barkley et coll., 2004). De plus, plusieurs études ont montré que jusqu’à 70 %
des mineurs délinquants répondent au diagnostic du TDAH (Vreugdenhil et coll.,
2004). L’étude longitudinale « CLASS » (The Cardiff Longitudinal ADHD Sample
Study) réalisée sur 5 ans a permis de montrer que les enfants qui présentaient
un TDAH à 9-10 ans avaient des niveaux élevés de comportements antisociaux et
criminels ainsi qu’un usage de substances à 14-15 ans (Langley et coll., 2010).

Importance de la comorbidité
!

Nous avons précédemment souligné combien le TDAH est un trouble qui présente
une forte comorbidité notamment vis-à-vis du TOP et du TC, ce qui rend ainsi
difficile la part uniquement attribuable au TDAH dans le développement des
comportements antisociaux et criminels. Sibley et coll (2011) ont réalisé une
étude longitudinale de l’enfance à l’adolescence en testant la comorbidité dans
les liens entre TDAH et délinquance. Les auteurs ont constitué quatre groupes de
diagnostic : Gr 1 = TDAH, Gr 2 = TDAH + TC, Gr 3 = TDAH + TOP, Gr 4 = contrôle.
Les résultats ont montré que seul le Groupe 2 TDAH + TC présentait le plus haut
risque de délinquance alors que le TDAH seul et TDAH + TOP montraient un risque
accru par rapport au groupe témoin mais très inférieur au groupe 2.
TDAH, comportements d’agression physique et criminalité 185

Une étude Norvégienne a également exploré sur 20 ans l’association entre les
troubles mentaux dans l’enfance et la criminalité à l’âge adulte à partir du
Registre National de la Criminalité. Sur les 541 patients, 24 % ont été reconnus
coupables d’activités criminelles (Mordre et coll., 2011). Les analyses ont montré
que le TDAH était associé à la criminalité uniquement s’il était associé au TC.
D’autres études ont testé le poids de la symptomatologie hyperactive et inatten-
tive durant l’enfance dans la prédiction de la criminalité. Par exemple, l’étude
de Pingault et coll (2013) a montré parmi un échantillon de 2 741 enfants que
les trajectoires élevées d’hyperactivité entre 6 et 12 ans étaient associées à un
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taux de criminalité élevé à l’âge de 25 ans dans les analyses bivariées, alors que
dans les analyses multivariées la significativité était beaucoup plus marginale.
Aucun résultat significatif n’a été souligné entre l’inatte ntion et la criminalité.
En revanche, un niveau élevé d’agression physique au cours de l’enfance était
fortement associé à la criminalité à l’âge adulte.
Ainsi, le TDAH durant l’enfance ne prédit pas directement les comportements
antisociaux et criminels. Le TDAH serait un précurseur de la délinquance, de com-
portements violents uniquement en présence de troubles comorbides (ex : TOP,
TC) ou en présence d’adversité et/ou de comportements à risques concomitants
(ex : niveau élevé d’agression physique).

TDAH ET T ROUBLES DE LA PERSONNALITÉ

L’étude des liens entre TDAH et comportements violents a conduit certains


auteurs à analyser cette relation sous l’angle des troubles de la personnalité
notamment ceux les plus associés aux conduites antisociales et violentes : le
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trouble de la Personnalité Borderline (TPB) et le Trouble de la Personnalité


Antisociale (TPA).

TDAH et Trouble de la Personnalité Borderline


!

Certaines caractéristiques du TPB semblent similaires aux troubles disruptifs


tels que le TDAH, le TOP ou TC qui partagent une importante comorbidité. En
effet, on y retrouve l’impulsivité, la dysrégulation émotionnelle et comporte-
mentale, l’hostilité, les conflits interpersonnels, les problèmes de concentra-
tion/d’attention présents dans le TPB. Ce dernier est un trouble grave de la
personnalité qui se définit par une dysrégulation marquée de l’affect et du
contrôle du comportement, une instabilité dans les relations interpersonnelles,
186 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

des difficultés identitaires avec des conduites à risques (Michel & Purper-Puakil,
2006). On y retrouve également comme dans le TDAH des difficultés fonction-
nelles et adaptatives dans les sphères sociales, scolaires, professionnelles ainsi
que des comportements antisociaux, violents et suicidaires. Une étude longi-
tudinale réalisée auprès de garçons issus d’un échantillon clinique (âgés entre
7 et 12 ans) a examiné la prédiction de troubles psychopathologiques durant
l’enfance dans le TPB à 24 ans (N=142). Le TDAH et le TOP étaient davantage
prédictifs du TPB à l’âge adulte (8.5 % de l’échantillon) que le TC, les troubles
anxieux et dépressifs (Burke & Steep, 2012).
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TDAH et Troubles de la personnalité antisociale (TPA)
!

et psychopathique (TPP)

Les principaux travaux reliant le TDAH et la personnalité antisociale (TPA) et


psychopathique (TPP) sont basés sur l’étude développementale du Trouble des
Conduites (TC). Rappelons que la TPA est le prolongement du TC à l’âge adulte
Selon Frick (2003) il existerait des facteurs psychopathologiques repérables dès
l’enfance et prédictifs de la TPA et la TPP. Les caractéristiques telles qu’une
froideur affective, une insensibilité et une tendance à charmer définiraient à
la fois un fonctionnement antisocial et psychopathique che z l’adulte ainsi que
le trait de personnalité « Callous-Unemotionnal » (CU). Ce trait CU relevant
d’éléments narcissiques, et caractérisé par l’absence d’empathie constituerait
un sous-groupe spécifique définissant une forme prodromique de la TPA et de
la TPP chez l’adulte. Une étude de Frick et coll (2003) réalisée chez 98 enfants
d’âge moyen 12 ans a montré que les enfants présentant le trait CU se carac-
térisaient par des niveaux d’agression, de violence proactive élevés ainsi que
par davantage de symptômes du TOP (92 % des cas) ainsi que du TDAH (48 %
des cas). Cependant, l’étude récente de Waller et coll (2015 ) a montré à partir
d’un suivi longitudinal d’enfants que les trajectoires développementales du trait
CU n’étaient pas toujours reliées à celles du TDAH et du TOP. La trajectoire CU
pouvait être complètement indépendante de celles du TDAH et du TOP et prédire
des comportements antisociaux.
TDAH, comportements d’agression physique et criminalité 187

TDAH ET DÉVELOPPEMENT DE L’ AGRESSION PHYSIQUE


DÈS LA PETITE ENFANCE

L’agression physique chronique commence généralement durant la petite enfance


et se maintient jusqu’à l’âge adulte. Dans les cas les plus graves, elle est pré-
dictive de problèmes d’adaptation sociale, de délinquance, de comportements
antisociaux et criminels (Tremblay, 2008). Des facteurs de risques biologiques et
environnementaux ont été identifiés (Nagin et Tremblay, 2001). Par exemple, les
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garçons sont sur-représentés et on retrouve également des f acteurs environne-

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mentaux pendant la grossesse ou au moment de la naissance : mères jeunes lors
de leur première grossesse, mères peu scolarisées, faibles revenus des familles,
parents ayant des antécédents de problèmes de comportement et/ou criminels
etc. (Nagin et Tremblay, 2001). Plus précisément, parmi les caractéristiques des
enfants de moins de 24 mois associées à des trajectoires d’agression physique
chronique, il a été retrouvé des facteurs génétiques, un tempérament difficile,
un déficit de développement cognitif (incluant le langage), une hyperactivité et
un comportement oppositionnel.
Les comportements d’agression physique qui débutent dès l’enfance sont géné-
ralement accompagnés de plusieurs symptômes d’opposition et d’hyperactivité
(Tremblay, 2008). Notons que l’hyperactivité, l’agression physique et l’opposition
observée chez les enfants d’âge scolaire sont toujours présents dès la petite
enfance (Wichstrom et coll, 2012). Dans l’étude longitudinale des enfants du
Québec (ELDEQ), les enfants les plus hyperactifs à 18 mois ont deux fois plus
de risque d’être sur une trajectoire élevée d’agression physique de 18 à 60 mois.
Les enfants les plus oppositionnels à 18 mois ont trois fois plus de risque d’être
sur cette trajectoire élevée d’agression physique. L’anal yse multivariée indique
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que les enfants à la fois oppositionnels et hyperactifs à 18 mois sont quatre


fois plus à risque d’être sur la trajectoire élevée d’agression physique (Tremblay,
2008). Cependant, il est difficile de conclure que l’hyperactivité et l’opposition
sont les causes spécifiques d’une trajectoire élevée d’agression physique puisque
ces trois comportements sont associés précocement entre eux.
Aussi, des études qui ont analysé les liens entre des trajectoires conjointes
d’opposition, d’hyperactivité et d’agression physique, pendant les années d’école
élémentaire et la violence à l’adolescence, ont montré que les trajectoires d’hy-
peractivité et d’opposition ne prédisaient pas les problèmes de violence à la
fin de l’adolescence lorsque les trajectoires d’agression p hysique étaient prises
en compte dans les analyses statistiques (Broidy et coll., 2003). Les études
de trajectoires pendant les années d’école primaire et secondaire montrent que
188 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

les trajectoires d’agression physique, d’hyperactivité et d’opposition sont très


semblables (Broidy et coll., 2003). Cependant, les individus ne sont pas nécessai-
rement sur les mêmes trajectoires pour chacune des catégories de comportements
perturbateurs. Aussi, Nagin et Tremblay (2001) ont montré que seulement 28 %
des garçons sur une trajectoire d’hyperactivité chronique étaient également sur
une trajectoire d’agression physique chronique. En revanche, 72 % des garçons
sur une trajectoire d’agression physique chronique étaient également sur une
trajectoire d’hyperactivité chronique.
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Une récente étude a analysé le développement de la comorbidité des trois
catégories de symptômes : hyperactivité, opposition, et agression physique,
au cours de la petite enfance à partir d’une cohorte de naissance (N=2045)
d’enfants Canadiens (Carbonneau et coll., 2015). Les résul tats ont montré que
la comorbidité était très répandue dans les années préscola ires de 1½ à 5 ans,
en particulier pour les garçons. Aucun des enfants qui ont suivi une trajectoire
haute pour l’un des trois symptômes n’était sur une trajectoire basse pour un
autre symptôme. Les enfants qui étaient hyperactifs ou agressifs (physique) de
l’âge 1½ à 5 ans, avaient peu de chances de présenter un bas niveau sur les deux
autres catégories. Les enfants qui présentaient des niveaux élevés d’agression
physique, d’hyperactivité et d’opposition-impulsivité (10 % des garçons et 3.7 %
des filles) étaient également ceux qui présentaient les indicateurs les plus mau-
vais en termes d’adaptation scolaire, d’apprentissage, d’aptitudes cognitives à la
fin de la première année d’école.

C ONCLUSION

Ainsi, le TDAH durant l’enfance ne prédit pas directement les comportements


antisociaux et criminels. Les enfants TDAH seraient donc vulnérables vis-à-vis de
la délinquance, de comportements violents uniquement en présence de troubles
comorbides tels que le TC et le TOP ou en présence d’adversité et/ou de com-
portements à risques concomitants. Sur le plan clinique, ce sont surtout les
symptômes relevant de l’hyperactivité et de l’impulsivité qui sont reliées aux
conduites violentes, alors qu’il ne semble pas avoir de lien avec l’inattention.
Au-delà de la comorbidité précoce, un intérêt tout particulier doit être porté aux
enfants préscolaires présentant un niveau élevé d’agressivité physique chronique.
En effet, ce sont essentiellement ces enfants qui deviendront des adolescents et
des adultes présentant des comportements antisociaux sévères et violents. Il est
donc indispensable de mettre en place des actions préventives soutenues dans
le temps auprès de cette jeune population.
TDAH, comportements d’agression physique et criminalité 189

B IBLIOGRAPHIE

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Wichstrøm, L., Berg-Nielsen, T. S., Angold, A.,
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Chapitre 10

Épidémiologie du TDAH
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Cédric Galéra, Flore Moulin, Manuel Bouvard

L ’ÉPIDÉMIOLOGIE est la discipline qui étudie les phénomènes de santé à l’échelle


des populations. Elle se décline en trois axes principaux. Un axe descriptif,
permettant de décrire les troubles et les maladies en termes de répartition,
fréquence et gravité. Un axe analytique qui a pour objectif l’identification des
facteurs contribuant à l’émergence ou à l’évolution des troubles/maladies ainsi
que des conséquences qui y sont associées. Un axe évaluatif, permettant d’étudier
l’effet d’interventions sur les troubles/maladies. Au travers de ces trois axes
l’épidémiologie représente un outil puissant pour renseigner les décisions de
santé publique (e.g. quelle est l’importance d’une pathologie et quelles res-
sources lui attribuer ? Quelles politiques de prévention mener ?) et pour conduire
des travaux de recherche (e.g. quels sont les facteurs étiologiques associés à une
maladie ? Quel est l’effet d’une intervention sur une maladie ?). Sur un plan pra-
tique, l’épidémiologie s’appuie sur l’observation et la comparaison d’échantillons
issus de la population générale ou de populations cliniques dans lesquels de nom-
breuses mesures sont souvent réalisées (e.g. mesures clini ques, para-cliniques,
données sociodémographiques, psychométriques, sociales et biologiques). Ceci
implique la manipulation d’un grand nombre d’observations et de variables, ce
qui nécessite l’utilisation de bases de données et d’outils mathématiques et
statistiques plus ou moins complexes.
Cette discipline variée, qui a permis des progrès dans la compréhension des
mécanismes des troubles/maladies et qui guide les politiques publiques de
santé, a tout naturellement trouvé un champ d’application dans le domaine
du Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité (TDAH). Depuis l’étude princeps
Épidémiologie du TDAH 193

menée dans l’île de Wigth (Royaume-Uni) par Mickael Rutter et ses collègues
dans les années 1970 (Rutter, 1976), de nombreuses données sur le TDAH,
sa fréquence, ses facteurs de risques et ses conséquences possibles ont été
recueillies. Ces données ont largement contribué à une meilleure caractérisa-
tion de l’importance quantitative du TDAH et de ses conséquences délétères à
court, moyen et long terme. Elles ont aussi ouvert des pistes sur les facteurs
étiologiques possiblement impliqués dans les causes du TDAH, alimentant ainsi
la recherche et la genèse d’hypothèses physiopathologiques sur les mécanismes
sous-jacents. Enfin, les données épidémiologiques renseignent l’efficacité des
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interventions médicamenteuses et non médicamenteuses ciblant le TDAH. Dans
le cadre de ce chapitre nous exposerons de façon non exhaustive les principales
données de l’épidémiologie descriptive, analytique et évaluative appliquée au
domaine du TDAH.

E PIDÉMIOLOGIE DESCRIPTIVE

Prévalence du TDAH chez l’enfant et l’adolescent


!

La prévalence internationale estimée du TDAH chez l ’enfant et l’adolescent est


comprise entre 3,4 % et 5,5 % (Polanczyk et coll. 2015). Ce résultat est issu de
travaux méta-analytiques s’appuyant sur un nombre important d’études (>100).
Leurs buts étaient d’estimer la prévalence du TDAH et d’étudier les facteurs
associés aux variations des estimations dans les différentes recherches. Ces
méta-analyses montrent que la prévalence reste stable dans le temps et paraît
faiblement influencée par la localisation géographique ou l’année de réalisation
des études. Cependant il y a une sous-représentation des études provenant de
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pays à faible revenu par habitant. Les différentes procédur es méthodologiques


expliquent l’hétérogénéité dans les estimations de la prévalence. En particulier,
il faut souligner que les études utilisant la Classification Internationale des
Maladies (CIM, trouble hyperkinétique ; www.who.int/classifications/icd/en/)
qui propose des critères diagnostiques plus restrictifs, et les études utilisant des
critères de retentissement fonctionnels rapportent des prévalences inférieures.
Les études utilisant les enseignants comme informants génèrent des estima-
tions plus élevées. Les données françaises disponibles sont cohérentes avec ces
estimations (Lecendreux et coll. 2011). À partir d’une enquête téléphonique
en population générale portant sur 1012 participants âgés de 6 à 12 ans, les
auteurs ont estimé une prévalence du TDAH en France comprise entre 3,5 % et
5,6 %.
194 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Du fait de l’évolution des critères diagnostiques du DSM-5 (Diagnostic and Sta-


tistical Manual of Mental Disorders ; www.DSM5.org/) (i.e. âge de début avant
12 ans et non 7 ans ; comorbidité possible avec les troubles du spectre autis-
tique) la question d’une augmentation de l’estimation de la prévalence dans les
futures études est posée.
Au total, le TDAH représente une des conditions et un des motifs de consultation
parmi les plus fréquents en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent.
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Prévalence du TDAH chez l’adulte
!

La prévalence estimée du TDAH à l’âge adulte est de 2,5 % (travail méta-


analytique basé sur 6 études) (Simon et coll. 2009). Des données françaises
sont disponibles sur cette association et proposent une estimation voisine (Caci
et coll. 2014). Avec l’âge, il semble que près de 2/3 des personnes présentant
un TDAH dans l’enfance présentent soit un retentissement fonctionnel soit
un niveau de symptômes sub-syndromique à l’âge adulte. Cependant, il faut
souligner que si l’on considère que seulement 15 à 20 % des jeunes présentant
un TDAH continuent à remplir les critères diagnostiques du TDAH à l’âge adulte,
l’estimation de 2,5 % semble donc en désaccord avec l’idée que le TDAH à l’âge
adulte fait toujours suite à un TDAH dans l’enfance. C’est justement l’hypothèse
signifiant que le TDAH adulte est un trouble neuro-développemental qui a été
remise en question récemment par Moffitt et ses collègues (Moffitt et coll.
2015). En s’appuyant sur la cohorte de naissance de Dunedin dans laquelle 1037
participants ont été suivis de la naissance jusqu’à l’âge de 38 ans, les données
montraient chez 6 % des participants un TDAH dans l’enfance et chez 3 % un
TDAH à l’âge adulte. Cependant il y avait une discordance diagnostique entre
l’enfance et l’âge adulte puisque 90 % des adultes diagnostiqués avec TDAH
n’avaient pas de diagnostic de TDAH dans l’enfance et que réciproquement 95 %
des participants avec un diagnostic de TDAH dans l’enfance ne présentaient
plus le diagnostic de TDAH à l’âge adulte. Ces résultats, s’ils sont confirmés
par d’autres études, soulèvent la possibilité que le TDAH adulte représente une
condition distincte du TDAH de l’enfance pour une proportion importante des
sujets.
La diminution du nombre de symptômes nécessaires chez les adultes (5 critères
et non 6) dans le DSM-5 soulève, comme chez l’enfant et l’adolescent, la question
d’une augmentation future de l’estimation de la prévalence du TDAH à l’âge
adulte.
Épidémiologie du TDAH 195

Variations selon le sexe


!

Chez les enfants et adolescents le ratio selon le sexe est déséquilibré, à l’image de
ce qui est observé dans d’autres troubles neuro-développementaux (e.g. troubles
des apprentissages et spécifiques du langage, troubles du spectre autistique) et
externalisés (e.g. trouble oppositionnel avec provocation, trouble des conduites).
Il varie de 4 à 8 garçons pour une fille en population clinique et de 2 à 4 garçons
pour une fille en population générale (Polanczyk et coll. 2015). Chez les adultes
le ratio selon le sexe est plus équilibré, voisin de 1 homme pour 1 femme (Simon
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et coll. 2009).

Comorbidités cliniques psychopathologiques


!

et neuro-développementales

Une comorbidité est associée au TDAH dans plus de la moitié des cas. Le niveau
de comorbidité est plus élevé dans les études portant sur des échantillons
cliniques que dans les études portant sur des échantillons issus de la population
générale. La co-occurence de différents troubles (i.e. association entre TDAH
et un ou plusieurs autres troubles), observée cliniquement et mesurée dans les
études épidémiologiques, peut s’expliquer de plusieurs façons. D’une part, elle
peut trouver son origine dans des vulnérabilités communes. TDAH et comorbidités
pourraient ainsi correspondre à des conditions distinctes ayant des vulnérabilités
communes biologiques et/ou environnementales. Cette co-occurence peut aussi
trouver son origine dans la notion de chevauchement symptomatique inhérente
aux syndromes psychiatriques décrits dans les classifications diagnostiques. Dans
le cadre de ce chapitre nous n’approfondirons pas ces questions et resterons à
un niveau descriptif des associations.
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Le TDAH est fréquemment associé à des comorbidités psychopathologiques exter-


nalisées et internalisées qu’il précède dans le temps. On retrouve notamment
chez 15 à >30 % des jeunes avec TDAH un trouble oppositionnel avec pro-
vocation (TOP) ou un trouble des conduites (TC) comorbide (Jensen et coll.
2015). On note aussi une comorbidité anxio-dépressive dans 20 à 25 % des
cas (Kooij et coll. 2012), prévalence qui augmente avec l’âge. Les addictions
sont fréquemment associées au TDAH avec un sur-risque 2 à 3 fois supérieur de
présenter une addiction et un âge plus précoce d ’addiction chez les personnes
avec TDAH (Bernardi et coll. 2012). Cette association semble médiée par le
TOP/TC comorbide pour la plupart des substances à l’exception du tabac. Le
trouble disruptif avec dysrégulation émotionnelle (TDDE), récemment apparu
dans le DSM-5, pourrait être fréquemment associé au TDAH, bien qu’il existe
196 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

à ce jour peu d’études sur le sujet. Un des intérêts de ce nouveau diagnostic


est de diminuer le diagnostic comorbide du trouble bipolaire pédiatrique, qui
a été sur-estimé dans les années 2000 (en particulier aux U.S.A.) du fait de
l’utilisation de critères phénotypiques trop larges.
Au-delà des troubles psychopathologiques le TDAH est associé dans 20 à 25 % des
cas à des conditions neuro-développementales telles que les troubles spécifiques
du langage, les troubles des apprentissages, les troubles moteurs, les troubles
du spectre autistique et la déficience intellectuelle (Jensen et coll. 2015).
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D’autres caractéristiques cliniques et ne correspondant pas à des troubles carac-
térisés sont fréquemment observées dans le TDAH. Il s’agit des problèmes de
dys-régulation émotionnelle et de perturbations neuropsychologiques (dysfonc-
tions exécutives et non exécutives) dans 20 à 50 % des cas de TDAH (Alderson
et coll. 2013 ; Nigg et coll. 2005 ; Willcutt et coll. 2005).
Au total, la fréquence et la variété des comorbidités associées au TDAH en font
une condition cliniquement hétérogène et complexe.

Prévalence d’enfants traités par médicament ciblant


!

l’attention

Il existe de grandes variations d’un pays à l’autre concernant les prévalences


d’enfants et d’adolescents traités par médicament ciblant l’attention. Dans cer-
tains pays les niveaux de prescription sont élevés (e.g. U.S.A., Islande, Norvège,
Suède, Australie, Belgique, Allemagne, Canada) (Organe International de Contrôle
des Stupéfiant, rapport 2014, www.incb.org, accès 20 janvier 2016) et parfois
supérieurs à la prévalence estimée du TDAH, comme dans certains états des U.S.A
(Zuvekas et coll. 2012). Dans d’autres pays ils sont au contraire bas du fait d’une
absence de ressources ou de législations et/ou pratiques plus restrictives. En
France les données les plus récentes montraient une prévalence de prescription
de psychostimulants de 0,2 % (Kovess et coll. 2015).

É PIDÉMIOLOGIE ANALYTIQUE

L’épidémiologie analytique est riche de designs variés et complémentaires. Il


s’agit d’études observationnelles classiques (i.e. cohortes, cas-témoins) ou quasi-
expérimentales (e.g. études génétiquement informées s’appuyant sur des échan-
tillons de jumeaux, d’adoptés, d’enfants issus de procréation médicalement
Épidémiologie du TDAH 197

assistée ; études de migration). Plus récemment, les bases de données scandi-


naves portant sur des populations entières (i.e. tous les in dividus d’une classe
d’âge d’un pays) permettent l’étude des facteurs de risque et des conséquences
du TDAH en prenant en compte le lien de parenté entre les individus. Ces diffé-
rents designs permettent ainsi d’étudier les influences de facteurs de risque sur
l’émergence du TDAH. Ceci renseigne sur les facteurs de risque potentiellement
causaux du TDAH, ce qui permet à la fois une meilleure compréhension des méca-
nismes et fournit des cibles potentielles pour des interventions. La meilleure
compréhension des conséquences possibles du TDAH est aussi utile sur un plan
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pragmatique puisque leur repérage précoce et leur prévention permettent de
diminuer le retentissement fonctionnel et les complications évolutives du TDAH.

Facteurs de risque du TDAH


!

L’hypothèse de travail principale sur les origines du TDAH est qu’il s’agit d’une
condition d’origine multifactorielle impliquant de nombreux facteurs de risque
biologiques (notamment génétiques), environnementaux (e.g. expositions
diverses à des toxiques et environnement social) et épigénétiques (i.e. Modifica-
tion de l’expression des gènes en fonction des influences environnementales).
Ces facteurs contribueraient par leurs interactions à l’émergence du TDAH. Ils
agiraient de façon diachronique dès la conception et tout au long de la vie
de l’individu. Le TDAH est donc conçu comme une condition hétérogène sur le
plan étiologique. En d’autres termes, derrière le phénotype clinique existeraient
divers chemins causaux et différents groupes de facteurs de risque associés
au TDAH. L’épidémiologie classique et l’épidémiologie génétique ont permis
d’identifier un grand nombre de ces facteurs de risques. Cependant, bien que
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

ces facteurs soient statistiquement associés au TDAH, leur lien causal reste pour
l’instant difficile à montrer.

Facteurs de risque génétiques

Les études de jumeaux, qui explorent de façon globale le poids des facteurs
génétiques et environnementaux, suggèrent l’importance des facteurs géné-
tiques dans l’émergence du TDAH. Ainsi la proportion de variance phénotypique
impliquant des facteurs génétiques (i.e. héritabilité) est voisine de 75 %, ce
qui en fait une des plus élevée parmi les conditions psychiatriques et neuro-
développementales (Sullivan et coll. 2012). Les études de jumeaux suggèrent le
rôle de différents facteurs de risques génétiques dont cert ains seraient stables
dans le temps et le rôle d’autres facteurs dont l’influence varierait selon l’âge des
198 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

individus (Pingault et coll. 2015). Cependant l’implication de facteurs génétiques


n’est pas synonyme de causalité. D’une part, cette implication peut se faire
par le biais d’une interaction entre variables génétiques et environneme ntales,
les caractéristiques génétiques représentant alors des facteurs de vulnérabi-
lité ne s’exprimant que dans un contexte environnemental donné. D ’autre part,
l’estimation de l’héritabilité est régulièrement interrogée car susceptible d’être
biaisée par la non prise en compte d’interactions Gène x Environnement et
d’interactions Gène x Gène. Enfin, les études moléculaires, dont le but est
d’identifier des polymorphismes de l’ADN associés au TDAH, restent à ce jour
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relativement décevantes. Malgré des méta-analyses d’études de gènes candi-
dats suggérant un effet faible de variants génétiques fréquents impliqués dans
les voies dopaminergiques et sérotoninergiques, les études d’association pan-
génomiques restent négatives et n’ont pas pour l’instant identifié de façon
probante de polymorphismes génétiques fréquents et associés au TDAH. Certains
syndromes neuro-génétiques (e.g. Syndrome de Williams, microdélétion 22q11.2),
délétions ou duplications rares (<1%) semblent impliqués de façon plus probante
dans le TDAH avec une taille d’effet plus importante (Thapar et coll. 2014).

Facteurs de risque environnementaux

De nombreuses études épidémiologiques observationnelles ont montré des asso-


ciations statistiquement significatives entre des facteurs de risque environne-
mentaux et le TDAH. La taille des effets est le plus souvent faible et suggère
le rôle de contributions multiples. Ces risques environnementaux sont princi-
palement des facteurs pré- et péri-nataux, des facteurs psycho-sociaux, des
toxiques environnementaux et des facteurs diététiques. Il faut souligner qu’une
association statistique n’implique pas de façon systématique de lien de causalité.
Une association peut être le reflet de : 1/ l’effet d’un tiers facteur non mesuré
dit facteur de confusion (le facteur de confusion qui est associé au facteur
environnemental mesuré est en réalité en « cause » dans le TDAH) ; 2/ d’une
causalité inverse (le TDAH est à l’origine de l’exposition environnementale) ; 3/
d’un biais méthodologique de sélection (erreur systématique conduisant à la
sélection d’un échantillon non représentatif de la population cible).
Les facteurs de risque pré- et péri-nataux retrouvés dans le TDAH sont : les
expositions in utero au tabac, à l’alcool, aux substances psycho-actives illicites,
aux toxiques environnementaux (e.g. plomb, pesticides), au stress maternel ;
le retard de croissance intra-utérin et la prématurité (Thapar et coll. 2013).
Des facteurs de confusion sont ici possibles comme l’illustre le lien entre le
tabagisme maternel pendant la grossesse et le TDAH de l’enfant. En effet les
Épidémiologie du TDAH 199

études génétiquement informées et quasi expérimentales suggèrent le rôle de


facteurs de confusion joué dans cette association. Par exemple une récente étude
danoise portant sur des apparentés (Obel et coll. 2015) a pu montrer qu’une
fois pris en compte le degré de relation familiale, le sur-risque de présenter
un TDAH (Hazard Ratio 2.0, 95 % IC 1.9–2.1) devenait non significatif (Hazard
Ratio 1.1, 95 % IC 0.9–1.2). Cela suggère le fait que l’association entre taba-
gisme pendant la grossesse et TDAH est liée à l’association entre le tabagisme
et d’éventuels facteurs de vulnérabilités génétiques et/ou environnementaux
communs (qui jouent donc le rôle de facteurs de confusion). Un autre travail
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(Thapar et coll. 2009) a étudié le lien entre tabagisme pendant la grossesse
et TDAH de l’enfant dans un échantillon de >800 familles ayant bénéficié de
reproduction assistée. Le tabagisme était significativement associé au TDAH
chez les femmes génétiquement reliées à l’enfant (ovocyte d’origine maternelle)
et ne l’était pas chez les femmes non génétiquement reliées à l’enfant (dons
d’ovocytes ou d’embryons). Ce résultat va dans le sens de l’existence de facteurs
de confusions d’origine génétique. Malgré l’importance des facteurs de confusion
un effet direct du tabac pendant la grossesse n’est cependant pas à écarter
même s’il reste modeste (Melchior et coll. 2015).
Des facteurs diététiques (déficits en acides gras polyinsaturés et minéraux ; excès
de sucres et colorants artificiels ; aliments riches/pauvres en IgG) pourraient
être associés au TDAH (Thapar et coll. 2013). Cependant l’absence de preuve
suffisante de la précédence temporelle limite l’inférence sur un lien causal.
Des facteurs psycho-sociaux sont associés au TDAH. Ainsi, u n bas statut socio-
économique familial est associé à un doublement du risque de TDAH chez les
enfants (Russell et coll. 2015). D’autres variables telles que la négligence, les
abus physiques et sexuels, les conflits entre les parents et l es pratiques paren-
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

tales coercitives sont associées à un sur-risque de TDAH (Fuller-Thomson et coll.


2015). Un lien causal est cependant difficile à montrer. De plus les relations
parents-enfants négatives et TDAH de l’enfant, pourraient relever d’une causalité
inverse. Parmi les facteurs psychosociaux la déprivation psycho-sociale précoce
et sévère pourrait cependant avoir une influence causale. Une cohorte d’enfants
roumains adoptés au Royaume-Uni a été suivie dans le temps jusqu’à l’âge adulte
(Stevens et coll. 2008). Avant leur adoption, ces enfants ont été exposés à
des déprivations institutionnelles majeures portant à la fois sur les aspects
sociaux et nutritionnels. Ce groupe a ensuite été comparé à un groupe d’enfants
adoptés originaire du Royaume-Uni, non exposé à une déprivation majeure. Les
résultats montrent qu’à l’adolescence, le groupe d’enfants roumains présentait
un sur-risque de TDAH (25 % versus 6 %). Une durée d’institutionnalisation en
200 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Roumanie > 6 mois était corrélée à une plus grande sévérité des symptômes.
Cette étude, bien que réunissant plus de critères de causalité que la plupart des
études portant sur les facteurs environnementaux, n’écarte cependant pas la
possibilité d’une confusion par des facteurs génétiques.

Liens entre facteurs génétiques et environnementaux

Le fait de considérer facteurs génétiques et environnement aux comme des fac-


teurs indépendants est interrogeable. Facteurs génétiques et environnementaux
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sont potentiellement interdépendants et les distinguer peut être une démarche
erronée. Deux principaux types de relations entre gènes (G) et environnements (E)
sont modélisés : les corrélations gènes-environnements (rGE) et les interactions
gènes-environnements (GxE).
On parle de rGE lorsque le génotype influence le risque d’exposition environ-
nementale. C’est possiblement le cas pour l’association entre tabagisme mater-
nel pendant la grossesse et TDAH de l’enfant, comme décrit précédemment.
L’hypothèse est faite que le génotype maternel transmis à l’enfant va influencer
chez la mère le tabagisme pendant la grossesse et chez l’enfant la présence d’un
TDAH. Il s’agit alors d’une rGE passive. Un autre exemple est l’association entre
parentalité et TDAH (Harold et coll. 2013). Le phénotype TDAH de l’enfant (sous
influence du génotype parental transmis à l’enfant) va lui-même influencer la
parentalité. Il s’agit ici de rGE réactive.
On parle de GxE lorsque les effets de l’environnement varient selon le génotype. Il
existe alors une vulnérabilité génétique qui s’exprimera ou non selon le contexte
environnemental. Un substrat moléculaire possible aux GxE est épigénétique.
Des phénomènes tels que des méthylations de l’ADN ou des phosphorylations de
protéines histones sont associés à des modifications durables et transmissibles
de l’expression des gènes. Il est important de noter que malgré le caractère
intellectuellement séduisant et prometteur du concept de GxE, il n’y a pas à
l’heure actuelle d’étude répliquée montrant des GxE dans le TDAH et ayant un
niveau de preuve scientifique suffisant.
Au total la présence de rGE et GxE non encore identifiées pourrait expliquer
en partie le décalage entre une héritabilité élevée et la pauvreté des facteurs
génétiques identifiés sur un plan moléculaire. Les travaux de recherche dans
ce domaine doivent se poursuivre en articulant les outils épidémiologiques,
biostatistiques et génétiques.
Épidémiologie du TDAH 201

Conséquences longitudinales du TDAH


!

Le TDAH est associé à un ensemble de conséquences délétères tout au long de la


vie des individus, avec un impact sur la qualité de vie (Danckaerts et coll. 2010).
Au-delà des associations transversales à l’âge adulte, les études longitudinales
(population générale ou suivi d’échantillons cliniques de TDAH) ont montré
le lien entre TDAH dans l’enfance et l’adolescence et conséquences négatives
ultérieures. En particulier on retrouve de nombreux comportements à risque pour
la santé ainsi que des difficultés en termes de santé mentale, de santé physique,
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de devenir académique et socio-professionnel.
Les études épidémiologiques ont ainsi mis en évidence des associations significa-
tives entre le TDAH et les consommations de substances psycho-actives (tabac :
rapport de cotes (RC) = >2 ; alcool : RC = 1,3 à 2 ; cannabis : RC > 1,5 ; cocaïne
et autres drogues : RC > 2), les accidents de la voie publique (RC >1,5), les com-
portements suicidaires et le suicide accompli (RC > 1,5 à 2), l’obésité (RC = 1,2
chez les enfants et RC = 1,5 chez les adultes), les comportements sexuels à risque
(RC = 1à >3), l’échec académique (obtention d’un moins bon diplôme, arrêt pré-
maturé de la scolarité), les difficultés socio-professionnelles (chômage, plus bas
niveau occupationnel), la criminalité (niveaux plus élevés d’incarcération) (Nigg
et coll. 2013). Le trouble des conduites et les consommations de substances
psycho-actives jouent un rôle important dans les conséquences évolutives du
TDAH, bien que le TDAH semble fortement et indépendamment associé à la
consommation de tabac et aux difficultés académiques. Les traumatismes et les
accidents seraient à l’origine d’une mortalité prématurée accrue dans la popu-
lation TDAH. Une étude de registre danoise (Dalsgaard et coll. 2015) portant
sur près de 2 millions d’individus, dont 32000 personnes avec un diagnostic
formel de TDAH, a montré une mortalité prématurée 1,5 fois supérieure chez les
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

personnes avec TDAH par rapport aux non TDAH, ceci en ajustant sur les autres
problèmes externalisés (TOP, TC). Cette association était surtout expliquée par
une sur-représentation des accidents.

Trajectoires développementales du TDAH


!

L’approche nosographique (e.g. Classification Internationale des Maladies) du


TDAH est catégorielle. Cette approche est particulièrement utile en pratique
clinique puisqu’elle permet de prendre des décisions diagnostiques (un patient
présente un TDAH ou non) et donc thérapeutiques (un traitement est proposé
ou non). Cependant la réalité phénotypique et clinique du TDAH suggère qu’il
s’agit d’une condition évolutive avec l’âge dont les symptômes peuvent varier
202 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

en intensité. L’approche de type « trajectoire développementale » qui permet


de décrire les variations de l’intensité et dans le temps peut donc constituer
une représentation pertinente et complémentaire du TDAH. L’épidémiologie et
la biostatistique sont des outils qui permettent de modéliser les trajectoires
développementales des symptômes du TDAH à partir de données longitudinales
mesurées de façon répétée dans le temps sur des échantillons issus de la popu-
lation générale. Des groupes pathologiques peuvent alors être définis et il est
possible d’en étudier les facteurs de risque et les conséquences, comme pour le
TDAH catégoriel.
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Il existe un nombre restreint d’études ayant modélisé l’évolution des symptômes
du TDAH dans le temps. Certaines études ont étudié les trajectoires chez les
enfants d’âge préscolaires et d’autres chez les enfants d’âge scolaire jusqu’à
l’adolescence (Galera et coll. 2011 ; Pingault et coll. 2011). Ces études mettent
en évidence généralement entre 2 et 4 trajectoires d’hyperactivité-impulsivité
et d’inattention. Ces trajectoires présentent des niveaux d’intensité de type
faible/modéré/élevé. Les trajectoires tendent à présenter une forme descendante
dans le temps, à l’exception de la trajectoire d’inattention qui est ascendante
à l’âge préscolaire et qui devient descendante ensuite. La trajectoire de niveau
élevé est considérée comme étant pathologique. Elle regroupe entre 3 et > 10%
des individus. Plusieurs études en ont déterminé les facteurs de risque et d’autres
en ont étudié les conséquences. Comme pour le TDAH catégoriel, les facteurs
de risque d’appartenance aux trajectoires de niveau élevé sont principalement
les facteurs de risque pré- et péri-nataux (bas poids de naissance prématurité,
exposition au tabac et autres toxiques) et les facteurs psycho-sociaux (bas statut
socio-économique familial, bas niveau éducatif parental, séparation parentale).
Parmi les conséquences négatives étudiées et retrouvées notamment les difficul-
tés académiques et différents problèmes d’ajustement à l’âge adulte (Pingault
et coll. 2011). Il faut souligner que ces résultats corroborent les résultats des
études utilisant l’approche catégorielle du TDAH. Il est intéressant de noter que
des études de jumeaux ont permis la modélisation de trajectoires développemen-
tales et donc la détermination de l’héritabilité des trajectoires (Pingault et coll.
2015). L’héritabilité estimée à partir des trajectoires est similaire à l’héritabilité
estimée à partir du TDAH catégoriel, voisine de 70 à 75 %.
Épidémiologie du TDAH 203

E PIDÉMIOLOGIE ÉVALUATIVE

L’épidémiologie permet d’évaluer l’efficacité des interventions (non médica-


menteuses et médicamenteuses) proposées dans le TDAH, principalement en
s’appuyant sur des études expérimentales (e.g. essais randomisés contrôlés) et
quasi-expérimentales (e.g. utilisation de scores de propension dans des études
observationnelles). Il existe une multitude d’études dans le domaine des inter-
ventions sur le TDAH. Dans le cadre de ce chapitre nous nous limiterons à
présenter les revues Cochrane et les principales méta-analyses non Cochrane
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résumant l’information disponible la plus récente. Il est important de souligner
que l’absence de preuve suffisante pour l’efficacité d’une intervention ne signifie
pas que cette intervention n’a pas d’intérêt. Cela signifie qu’il y a une insuffi-
sance de données scientifiques ce qui incite à faire de nouvelles études mieux
conduites et plus informatives.

Revues Cochrane
!

Le principe des revues Cochrane est de faire la synthèse des données d’essais ran-
domisés contrôlés à l’aide de méta-analyses. Plusieurs revues se sont intéressées
à différentes interventions proposées dans le TDAH (www.cochrane.org).
Concernant les interventions médicamenteuses, le travail méta-analytique le
plus abouti a étudié l’effet du méthylphénidate chez plus de 12 000 individus
généralement âgés de 3 à 18 ans (Storebo et coll. 2015). Il suggérait que
le méthylphénidate pouvait améliorer à court-terme les symptômes du TDAH
rapportés par les enseignants, les comportements généraux rapportés par les
enseignants, la qualité de vie rapportée par les parents. La taille des effets
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apparaissait difficile à estimer du fait de la qualité des données insuffisante. Il


y avait une augmentation significative d’effets indésirables non graves. Chez les
adultes une autre revue concluait à un effet bénéfique du méthylphénidate sur les
symptômes d’hyperactivité-impulsivité et d’inattention ainsi que sur la condition
clinique globale (Epstein et coll. 2014). Les amphétamines semblaient montrer
une efficacité à court terme chez les adultes avec un niveau plus élevé d’effets
secondaires (Castells et coll. 2011). D’autres revues ne montraient pas de niveau
de preuve satisfaisant pour justifier l’utilisation des antidépresseurs tricycliques
chez les enfants/adolescents avec TDAH, de la rispéridone ou des amphétamines
chez les personnes présentant une déficience intellectuelle comorbide du TDAH,
de l’homéopathie ou de la supplémentation en acides gras poly-in saturés dans
le TDAH. Pour ce qui est du TDAH comorbide de tics, les alpha agonistes et
204 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

l’atomoxétine semblent représenter une alternative lorsque les psychostimulants


exacerbent les tics.
Concernant les interventions non médicamenteuses seules les interventions
psycho-éducatives parentales ont montré une amélioration sur les comporte-
ments des enfants/adolescents avec TDAH et sur la diminution du stress parental.
D’autres interventions telles que l’acupuncture, l’entraînement aux habiletés
sociales, la méditation et la thérapie familiale n’ont pas montré leur efficacité.
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Principales revues et méta-analyses non Cochrane
!

Concernant les interventions médicamenteuses ont été suggérées une efficacité


à court terme sur les symptômes du TDAH du méthylphénidate à libération immé-
diate (Maia et coll. 2014), avec une efficacité comparable de l’atomoxétine, une
possible supériorité des amphétamines, un possible effet des psychostimulants
vis-à-vis du tabagisme (i.e. Diminution). Il n’y a pas d’étude disponible montrant
l’efficacité des interventions médicamenteuses à long terme.
Parmi les interventions non médicamenteuses une efficacité faible sur les symp-
tômes du TDAH a été suggérée pour certaines interventions diététiques (e.g.
supplémentation en acides gras poly-insaturés, l’exclusion de colorants alimen-
taires et certaines restrictions alimentaires) (Heilskov Rytter et coll. 2015). Les
interventions ciblant la parentalité semblaient associées à une amélioration des
symptômes du TDAH des jeunes (Coates et coll. 2015). Les interventions compor-
tementales semblaient efficaces sur la parentalité et les problèmes de conduites
(Daley et coll. 2014) mais pas sur les symptômes du TDAH. La remédiation
cognitive a montré une efficacité sur l’amélioration de la mémoire de travail mais
pas sur les symptômes du TDAH ni sur les performances académiques (Cortese et
coll. 2015). Chez les enfants âgés de moins de 6 ans les interventions comporte-
mentales à destination des parents ou des écoles semblaient plus efficaces que
le méthylphénidate sur les comportements de l’enfant (Charach et coll. 2013).
L’activité physique modérée pourrait améliorer les fonctions exécutives chez les
enfants avec TDAH (Grassman et coll. 2014). L’intérêt du neuro-feedback reste
pour l’instant discuté.
Épidémiologie du TDAH 205

C ONCLUSION

Le TDAH est un des troubles comportementaux parmi les plus prévalents chez les
enfants et adolescents. Il touche près de 5 % des jeunes d’âge scolaire concernés,
avec une prédominance masculine et représente un motif de consultation fré-
quent en pédopsychiatrie. Le TDAH est aussi un trouble qui concerne autour de
2 % des adultes, avec un sexe-ratio plus équilibré. La fréquence et la variété des
comorbidités - à la fois psychopathologiques et neuro-développementales - qui y
sont associées tout au long de la vie, font du TDAH une condition cliniquement
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hétérogène et complexe. Cette hétérogénéité est aussi étiologique puisque de
nombreux facteurs de risque, de nature environnementale et génétique, contri-
buent à l’émergence du TDAH. L’évolution longitudinale du TDAH montre que de
nombreuses conséquences délétères sont associées au trouble. Le retentissement
est potentiellement large, tant en termes de qualité de vie, d’insertion sociale et
professionnelle, de réussite académique, que d’expositions à des traumatismes
et conduites à risque diverses. Ce retentissement fait du TDAH une question
de santé mentale d’envergure sur un plan sanitaire. Le fait que le TDAH puisse
débuter précocement dans la vie des individus soulève logiquement la question
des interventions les plus à même de diminuer l’incidence du trouble ainsi que
ses conséquences au long cours. Des interventions médicamenteuses et non
médicamenteuses sont disponibles mais leur effet à moyen et long terme reste
encore insuffisamment documenté sur le plan méta-analytique. L’épidémiologie
souligne l’importance du TDAH en termes de santé publique et ouvre des pistes
sur ses causes potentielles. Elle est aussi un outil qui permet d’évaluer les
interventions proposées en pratique courante et dans le domaine de la recherche.
L’utilisation de bases de données cliniques et en population générale, françaises
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

et internationales, contribuera à une meilleure compréhension du TDAH.

B IBLIOGRAPHIE

Alderson, R. Matt, Lisa J. Kasper, Kris- C. Blanco. (2012). “The Lifetime Impact
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Chapitre 11

TDAH et addictions
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May Boumendjel, Melina Fatseas, Ruben Miranda,
Amine Benyamina

L de déficit attentionnel et hyperactivité (TDAH) est un trouble qui est


E TROUBLE
fortement présent dans la population de patients ayant un trouble de l’usage
de substances (TUS). En effet ces patients ont un risque plus élevé d’avoir une
comorbidité addictive toutes substances confondues. Ce risque est diminué si le
diagnostic et le traitement sont mis en place de manière précoce. Il est donc
important de questionner les patients ayant un TDAH sur leurs consommations
et de rechercher un TDAH chez les patients addicts.
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É PIDÉMIOLOGIE

En population générale
!

La prévalence estimée du TDAH et du trouble de l’usage de substances (TUS) varie


entre 5,4 à 31,3 %1 selon les critères DSM-IV, cette prévalence voit son estima-
tion augmentée si l’on considère les critères DSM-5 du TDAH. Ces variations dans
les prévalences peuvent être dues aux différences de méthod ologie des études
et sont fonction des différents questionnaires utilisés. 50 % des adolescents et
adultes avec un trouble de l’usage de substances ont un diagnostic sur la vie
entière de TDAH2 .
210 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

En population spécifique
!

La prévalence du TDAH en Psychiatrie générale varie de 5 %3 à 15,9 %, selon les


études et la population analysée. Dans la population de pers onnes incarcérées
en Amérique du Nord4 , on observe qu’environ 40 % répondent au diagnostic de
TDAH.
Un TDAH est diagnostiqué chez 20 à 30 % des patients ayant un TUS, et 40 %
des patients ayant un TDAH ont une comorbidité addictive1,5 .
Prédominance du trouble addictif chez les patients TDAH : 25 à 50 % des patients
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ayant un TDAH auraient un abus ou une dépendance aux substanc es psychoac-
tives.
La prévalence de TUS chez les patients ayant un TDAH a été estimée supérieure à
la population générale (environ 31 % versus 14-16 %6 ) et ceci indépendamment
des substances7 .

É TIOLOGIE

Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer le lien entre le TDAH et le


TUS :
➙ La neurotransmission dopaminergique (DA) est au centre des modèles théo-
riques pour ces deux pathologies.
➙ La neuro-imagerie montre une diminution de la libération de DA striatale et
une perturbation des circuits neuronaux entre le cortex cingulaire antérieur
et le striatum avec le cortex préfrontal. Ces circuits sont en effet au cœur des
déficits d’inhibition dans ces deux pathologies8 .
➙ Facteurs génétiques communs, présence de trouble de TUS chez les proches de
patients avec TDAH ou encore TDAH chez les proches de sujets ayant un TUS9 .
Certaines théories expliquent la fréquence élevée de consommation de sub-
stances, comme une forme d’automédication, tout particulièrement pour le
tabac.

G ÉNÉTIQUE

Il existe quelques publications rapportant l’hérédité du TDAH chez les enfants,


même si aucun gène n’a été identifié. En revanche, dans la population de patients
TDAH et addictions 211

adultes cette hérédité a peu été étudiée, et encore moins chez les patients
présentant une comorbidité addictive10 .
Il apparaît, dans certaines études, une plus faible hérédité chez les personnes
souffrant d’un trouble encore présent à l’âge adulte, par rapport aux enfants
ayant un TDAH.

F ACTEURS DE RISQUE
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Le genre
!

Il s’agit d’un facteur de risque de développer un trouble ; en effet le TDAH est


3 fois plus fréquent chez les garçons que chez les filles et ceci en population
pédiatrique. Les filles ont en revanche plus souvent le sous- type d’inattention,
ce qui rend plus difficile le diagnostic et cela pourrait expliquer le sexe ratio par
biais de diagnostic.
Les femmes sont plus à risque pour le développement d’une comorbidité
addictive11 .

Le niveau d’éducation
!

Il semblerait que le niveau d’éducation ne soit pas un facteur de sévérité ou de


protection quant à la présence d’un TDAH.
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Comorbidité
!

Le trouble des conduites, le trouble oppositionnel et le trouble bipolaire ont


été mis en évidence comme étant des facteurs de risque de présence d’une
comorbidité précoce chez les patients ayant un TDAH12,13 .
L’impulsivité et principalement la désinhibition, les prises de décisions impul-
sives et la recherche de sensations sont des facteurs de risque pour le dévelop-
pement d’addictions chez les patients ayant un TDAH14 .
La présence d’un trouble de l’usage de l’alcool majore le ris que de comorbidité
au TDAH avec un risque augmenté d’épisode dépressif, trouble bipolaire type I,
trouble de la personnalité borderline ou antisociale15 .
212 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

C LINIQUE

Stratégie diagnostique
!

L’évaluation doit se faire un peu à distance de la consommation afin de minimiser


les symptômes induits.
Les symptômes se chevauchant, le diagnostic reste en pratique complexe, ce
d’autant plus que le diagnostic n’a pas été posé dans l’enfance et qu’il s’agit d’un
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diagnostic rétrospectif16 . Il est donc nécessaire d’effectuer une évaluation systé-
matique de tous les patients présentant une addiction légèrement à distance de
la consommation afin de rechercher la présence d’un TDAH comorbide qui néces-
site une prise en charge conjointe. Il paraît également nécessaire d’utiliser des
questionnaires comme une aide au diagnostic de TDAH chez les personnes ayant
un trouble addictif. l’« ADHD Self Report Scale V1.1 » (ayant une sensibilité de
66 % et une spécificité à 84 % chez les patients avec addictions aux substances),
ou la « Conners Adult ADHD Rating Scale » ainsi que la « Wender Utah Rating
Scale » sont des questionnaires qui sont très utiles. L’entretien semi-structuré
pour le TDAH : la « DIVA » étant le gold standard pour le diagnostic, mais ce
dernier n’est pas encore validé chez les patients ayant un TUS comorbide17 .

Particularités cliniques
!

Les études cliniques de la population de patients ayant une comorbidité d’ad-


diction et de TDAH ont permis de mettre en évidence que le sous type mixte
est le plus souvent constaté lorsque la comorbidité de TUS est présente18,19 . De
plus les symptômes d’hyperactivité et d’impulsivité ont ét é mis en lien avec la
consommation de cannabis et de tabac.
Le début précoce de la consommation est plus souvent lié au sous-type hyperac-
tivité/impulsivité et non avec l’inattention20 .
Il semblerait que ces patients manifestent un certain nombre de symptômes
ou de traits tel que l’impulsivité, l’anxiété et les traits névrotiques. Ces traits
sont des facteurs de risque pour « la recherche de nouveauté », ce qui augmente
la possibilité de développer une addiction, et ceci pourrait être prédit dès la
maternelle21 .
Il a été mis en évidence que la « perte de contrôle comportementale » et que la
« désinhibition comportementale » étaient des traits retrouvés chez les patients
ayant une comorbidité.
TDAH et addictions 213

Particularités par produit


!

Le TDAH a été associé à un trouble de l’usage de tabac, cannabis et substances


illicites. Le choix de la substance semble être dépendant de la présence ou non
d’un traitement. En effet, il semblerait que l’on retrouve une prévalence moins
forte de patients ayant un trouble de l’usage de l’alcool s’ils sont traités, ceci
pourrait dépendre des effets secondaires désagréables dus à l’interaction entre
l’alcool et les traitements stimulants22 .
Une méta-analyse démontre une augmentation du risque de développer une
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addiction chez les patients ayant un TDAH avec un odd ratio à 1,35 en ce qui
concerne l’alcool, et à 2,36 en ce qui concerne le tabac. En re vanche, très peu
d’études concernent es autres produits ou addictions23 .

Tabac

Le tabac est l’une des substances les plus consommées par les adultes avec TDAH,
avec un début précoce lié à l’intensité du trouble attentionnel, car avec ce pro-
duit, les personnes améliorent leurs capacités d’attention et de concentration24 .
On observe une augmentation du nombre de cigarettes quotidiennes chez le
jeune adulte, particulièrement chez les patients souffrant de troubles de l’atten-
tion, la nicotine fonctionnant comme stimulant ; mais ce lien semble diminuer
avec l’âge, le traitement stimulant, quant à lui, semble diminuer le nombre de
cigarettes par jour11 . Environ 40 à 50 % des enfants ayant un TDAH fumeront de
manière quotidienne, mais il existe peu d’information dans la littérature quand
au déroulement de ces addictions (quantité, fréquence, sévérité, retentissement
à moyen et long terme)21,25 .
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Alcool

La consommation d’alcool reste également très souvent rencontrée en clinique.


Elle est majorée par les symptômes du TDAH. L’alcool est décrit par nos patients
comme un anxiolytique, une façon de ne pas s’ennuyer et de se décontracter
surtout au début de la consommation, avant que la dépendance physique ne
s’installe. La consommation impulsive d’alcool est très fréquente chez les adultes
avec TDAH, mais cette fréquence n’est que très peu supérieure à celle de la
population générale (OR=1,27, CI= 0.85, 1.89, p=0,25). Le trouble de l’usage de
l’alcool quant à lui est 1,7 fois plus présent chez les patients ayant un TDAH25 .
214 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Les pays ayant des centres de soins en addictologie avec une plus forte pré-
valence de troubles de l’usage de l’alcool semblent avoir une moins grande
prévalence de TDAH.

Cannabis

L’utilisation de cannabis est très présente chez les patients ayant un TDAH (OR=
2.78, CI=1.64, 4.74, p<0.001) ; Le trouble de l’usage de cannabis est 1,5 fois
plus prévalent chez ces patients (OR= 1.58, CI=1.16, 2.14, p=0.003)25.
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La présence d’un trouble oppositionnel majore le risque de trouble de l’usage de
du cannabis (OR= 2.33, CI=1.4-3.87, p<0.01) par rapport aux patients ayant un
TDAH sans trouble oppositionnel7 .

Cocaïne

Chez les patients ayant un trouble de l’usage de cocaïne (TUC), 35 % présente-


raient un TDAH, 78 % d’entre eux sont des hommes, 93 % d’entre eux ont un
trouble des conduites et 47 % un trouble de la personnalité de type antisociale.
En revanche, 21 % des patients ayant un TDAH développent un TUC (deux fois
plus que les sujets contrôles).
La présence d’un trouble oppositionnel majore le risque de trouble de l’usage de
cocaïne avec (OR= 2.97, CI=1.06-4.8,57, p<0.05) par rapport aux patients TDAH
sans trouble oppositionnel7 .
Biederman et coll. avaient déjà montré en 1998 que la fréquence des troubles
liés à l’abus de substances psychoactives est deux fois plus élevée chez les
adultes hyperactifs que chez les non hyperactifs.

Opiacés

Le TDAH est diagnostiqué chez 19 à 35,2 % des patients en soins pour troubles
de l’usage des opiacés. Ces patients présentent plus volontiers un autre trouble
comorbide tel que trouble anxieux généralisé ou trouble obsessionnel compulsif,
un trouble de personnalité antisocial ou encore un trouble dysthymique. Ces
patients ont par ailleurs une plus forte addiction ainsi qu’un usage de tabac plus
sévère et une qualité de vie médiocre26 .
TDAH et addictions 215

Troubles du Comportement Alimentaire

Il s’agit de troubles qui sont fréquemment retrouvés chez le s femmes ayant un


TDAH. L’hyperphagie compulsive est en lien avec l’impulsivité27 . La boulimie
avec ou sans conduite de purge et l’anorexie mentale paraissent plus volontiers
liées aux troubles de l’attention.

Jeux pathologiques
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Les liens entre jeux pathologiques et TDAH ont été très peu étudiés28 . Ils pour-
raient être liés aux déficits neurologiques dans les zones cé rébrales contrôlant
les fonctions exécutives et les capacités d’autorégulation. Cette comorbidité
est associée à des facteurs de gravité tels que la sévérité du jeu pathologique,
la fréquence des troubles psychiatriques comorbides, un risque suicidaire aug-
menté, un haut niveau d’impulsivité29,30 . Une étude est en cours ayant pour
objectif l’identification des facteurs prédictifs psychosociaux chez les joueurs
pathologiques.

Addiction sexuelle

Le TDAH est souvent en lien avec l’addiction sexuelle, mais les études spécifiques
manquent. Il semble être plus volontiers présent chez les hommes.

Achats pathologiques

Des liens récents ont été mis en évidence, mais nous manquons de recherches sur
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le sujet. L’impulsivité et la recherche de sensations semblent être les symptômes


appartenant aux deux pathologies31,32 . Il s’agit d’un trouble plus fréquemment
retrouvé chez les femmes ayant un TDAH.

C OMORBIDITÉS

Les patients ayant une comorbidité de TDAH et d’addiction ont une plus forte
prévalence de comorbidités psychiatriques et retentissement social33 .
Ces patients présentent un trouble de la personnalité et notamment les troubles
borderline ou antisociaux, troubles des conduites ou de troubles oppositionnels.
216 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Le trouble bipolaire peut être comorbide avec une prévalence 2 fois plus grande
chez les patients ayant un TDAH comorbide par rapport aux patients ayant un
trouble bipolaire simple.
Le trouble anxieux est un diagnostic évoqué fréquemment lorsqu’un TDAH est
diagnostiqué34 .

D IAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
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Il est important de savoir différencier le TDAH des autres troubles, en particulier
chez les patients ayant un trouble de l’usage de substances, car les implications
thérapeutiques qui en découlent sont primordiales.

Trouble bipolaire
!

C’est l’un des diagnostics différentiels le plus important, car un certain nombre
de symptômes peuvent être similaires comme l’agitation, l’impulsivité35 .

Trouble anxieux
!

Il est fortement en lien avec le TDAH et peut être un diagnostic différentiel à


discuter36 .

Trouble de la personnalité
!

Tout d’abord, les caractéristiques du TDAH sont représentées par un manque


d’intérêt dans les activités criminelles, la ruse, la cruauté, et sont fréquemment
observées dans les cas de troubles de conduite. Le deuxième point concerne les
principales inquiétudes et les conflits des patients TDAH avec un trouble de la per-
sonnalité borderline. Les patients atteints de TDAH ne manifestent généralement
pas d’inquiétudes concernant les relations interpersonnelles, que les patients
borderline sont susceptibles d’avoir. Les angoisses caractéristiques des patients
atteints de TDAH impliquent généralement l’auto-reproche, l’autodérision et la
basse estime de soi associées à des symptômes de TDAH, comme la courte durée
d’attention, l’agitation et l’impulsivité37 .
TDAH et addictions 217

N EURO - IMAGERIE

Les études de neuroimagerie des sujets avec TDAH et TUS ont montré des déficits
dans la libération de dopamine (DA) sur les connexions entre le striatum et
le cortex cingulaire antérieur et entre le striatum et le cortex préfrontal8 . Ces
mêmes circuits ont été mis en évidence dans des études chez des primates et des
rongeurs et suggèrent le rôle central de l’inhibition de la réponse dans les deux
pathologies. Le substrat anatomique de cette tâche est un circuit qui comprend
le cortex préfrontal ventrolatéral, le cortex cingulaire et les ganglions de la
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base38 .
Les deux pathologies partagent également l’impact du circuit méso-limbique de
la récompense.
Rubia et coll. suggère que les altérations du circuit fronto-striatal-cérébelleux
pourraient être liées aux symptômes de TDAH alors que les altérations du cir-
cuit orbito-fronto-striatal pourraient montrer la comorbidité aux troubles du
comportement (TC) pendant l’enfance et l’adolescence39 .
Van Wingen et coll. montrent des réductions du striatum plus importantes chez
les patients avec comorbidité TDAH et addiction à la cocaïne par rapport aux
patients TDAH sans addiction40 .
Ces mêmes régions sont concernées dans les addictions comportementales (cybe-
raddiction, addiction à la pornographie, jeu pathologique, jeux vidéo). Menossi et
coll. retrouvent des régions similaires impliquées dans l’addiction à la nicotine41 .
Malgré les similitudes entre les deux pathologies, les déficits fonctionnels et
structurels des addictions impliquent un plus grand nombre de circuits et méri-
teraient davantage de recherche d’évidences scientifiques.
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N EURO - COGNITION

Depuis les formulations modernes du TDAH, le dysfonctionnement cognitif est à


la base explicative du trouble.
En 1997, Barkley propose une théorie unifiée du TDAH. Un dérèglement des
capacités d’inhibition expliquerait les différents éléments du TDAH (inattention,
impulsivité, hyperactivité). Cette théorie, qui a généré une grande quantité
d’articles, a été très controversée. D’autres auteurs ont montré que la dysfonction
exécutive n’est ni nécessaire ni suffisante à expliquer la symptomatologie du
TDAH, particulièrement sur les déficits motivationnels de ces patients42 .
218 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Plus tard, il a été défini un modèle à deux voies de développement de TDAH. Un


déficit fonctionnel dans les interconnexions du réseau qui forment le cortex pré-
frontal dorsolatéral et médian, cortex cingulaire antérieur, ganglions de la base,
cervelet et régions temporo-pariétales, provoque des défauts de contrôle exécutif
qui seraient liés à un dysfonctionnement de l’inhibition comportementale43 .
Les altérations du système de récompense (voie méso-limbico-striatal) explique-
raient les réponses sur les tâches d’aversion au délai, de prise de décisions et de
sensibilité à la récompense caractéristique des TDAH.
Plus récemment le modèle dual a été reformulé comme une altération des fonc-
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tions exécutives « chaudes » et « froides ». Font partie des fonctions exécutives
« froides » : la mémoire de travail, la capacité de planification et d’inhibition. Les
fonctions exécutives « chaudes » sont celles qui dépendent des renforcements
et motivations des sujets. Les tâches d’aversion au délai, de prise de décisions
et de sensibilité à la récompense évaluent ses fonctions39 .
Le modèle de double voie du TDAH a donné lieu à des modèles similaires sur le
développement des addictions. McClure et Bickel proposent un modèle à double
voie pour expliquer le développement des addictions : la voie préfrontale du
contrôle exécutif et la voie dépendant du système dopaminergique mésencé-
phalique qui renforce les comportements automatiques liés aux récompenses44 .
D’autres auteurs développent des modèles explicatifs semblables21 .
Cependant, le lien entre TDAH et TUS n’est pas assez connu.

Niveau intellectuel
!

Les adultes avec TDAH ont des scores plus faibles que les adultes non-TDAH lors
des tests d’intelligence. Toutefois, cette différence est faible et cliniquement
non significative.
Un QI plus élevé pourrait jouer un rôle protecteur sur le déficit fonctionnel
et les symptômes du TDAH à l’adolescence et l’âge adulte45 . Cependant, cer-
taines études ont rapporté que le QI peut augmenter le risque d’apparition de
symptomatologie psychiatrique et des addictions à l’âge adulte46,47 .

Fonctions attentionnelles
!

Les sujets adultes TDAH présentent des temps de réaction plus lents et une
variabilité de réponses plus importants lors des tâches d’attention qui mettent
en jeu la régulation de l’intensité du flux attentionnel, la vigilance et l’attention
TDAH et addictions 219

soutenue48–50 . La bibliographie sur les déficits de la sélectivité de l’attention,


attention sélective et attention partagée, chez les sujets TDAH adultes est plus
rare.
Chez les sujets présentant une addiction à l’alcool, rares sont les études qui
signalent des troubles attentionnels. Certaines études dé crivent des difficultés
d’attention partagée51,52 , d’autres des difficultés d’attention sélective sur un
groupe de sujets avec addiction à l’alcool ou à la cocaïne53 , ou encore des
difficultés d’attention sélective chez un groupe de jeunes patients adultes binge-
drinkers54 .
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Pour ce qui concerne la consommation de cocaïne, on retrouve certaines évi-
dences sur les effets à long terme de cette consommation sur les tâches d’at-
tention soutenue55–57 mais aucune étude ne note de différences de performance
dans des tâches d’attention sélective ou partagée.
Par ailleurs, la consommation de cannabis a été associée à des altérations
d’attention sélective58 et d’attention soutenue59 .
Pour résumer, le profil des déficits attentionnels chez les sujets TDAH est sem-
blable à celui-ci des sujets avec addiction aux stimulants, mais diffère du profil
des sujets alcooliques et consommateurs de cannabis.

Fonctions exécutives
!

Les déficits de contrôle exécutif (fonctions exécutives) du TDAH sont largement


reportés dans la littérature60 .
De la même manière, certaines théories décrivent les troubles addictifs comme le
résultat de la dérégulation induite par les substances des systèmes de la récom-
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pense et de la motivation61,62 et le contrôle exécutif sur les comportements liés


à la récompense63 .
Nigg et coll. ont mesuré le temps de réaction du signal d’arrêt (SSRT) de la Stop
Signal Task64 . Celle-ci corrélait le développement de TUS à la fin de l’adolescence
avec les questionnaires d’évaluation du TDAH et les troubles du comportement.
TDAH et TC ont été corrélés avec les diagnostics de TUS postérieurs. Toutefois,
le questionnaire de TDAH ne le prédit pas, ce qui suggère un effet indépendant
du fonctionnement exécutif sur la vulnérabilité à l’abus de substances.
Aytaclar et coll. ont montré sur un groupe à risque familial élevé de TUS que les
déficits exécutifs prédisent l’usage de substances au début de l’adolescence65 .
Tamm et coll. ont étudié les fonctions exécutives chez des je unes adultes avec
TDAH consommateurs habituels de cannabis pendant la dernière année. Seule
220 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

la variable de prise de décision de la Iowa Gambling Task a été corrélée avec la


consommation66 .
Crunnelle et coll. ont retrouvé des différences significatives sur les tâches d’inhi-
bition à composante motrice (Stop Signal Task) et purement cognitives (Aversion
au délai) entre les patients avec une dépendance à la cocaïne et TDAH et les
patients TDAH sans dépendance67 .
Les déficits exécutifs sont un élément important impliqué dans l’étiologie du
TDAH, jouant un rôle dans l’évolution de la maladie et dans l ’association à des
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comportements addictifs postérieurs. Cependant, ces liens sont encore assez
méconnus et mériteraient d’être davantage explorés.

Mémoire de travail
!

La mémoire de travail est également altérée chez les TDAH et chez les TUS mais
les évidences scientifiques de l’apparition comorbide des deux pathologies ne
sont pas concluantes66 .

Cognition sociale
!

La cognition sociale implique la capacité de reconnaitre ses propres émotions et


celles des autres, la capacité à réfléchir sur les états mentaux des autres (théorie
de l’esprit) et le traitement de l’humeur, l’empathie et les normes sociales.
Les déficits de cognition sociale sont déjà présents pendant l’enfance des sujets
TDAH et incrémentent le risque d’une comorbidité psychiatrique à l’âge adulte68 .
Bihlar Muld et coll observent sur un groupe TDAH/TUS des comportements
antisociaux plus précoces et persistants que sur le groupe TUS69 .

P RISE EN CHARGE

La prise en charge de patients ayant une comorbidité de TDAH et de TUS nécessite


une prise en charge des deux troubles afin de favoriser la diminution voire l’arrêt
de l’addiction.
TDAH et addictions 221

Pharmacologique
!

Traitement du TDAH

La thérapeutique la plus étudiée même en cas de comorbidité reste le méthyl-


phénidate. Il convient d’utiliser les formes à libération prolongée pour minimiser
le risque addictif70 . Par ailleurs, des études longitudinales semblent montrer
qu’il existe une diminution de la prévalence du TUS chez les patients traités
(10 %) par rapport à la prévalence retrouvée de cette comorbidité en population
générale (30 %) et majoritairement chez les hommes71–73 . Le traitement semble
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être un facteur protecteur et ceci d’autant plus qu’il a été démarré avant l’âge
de 13 ans; Par ailleurs le fait d’avoir eu un traitement stimulant dans l’enfance
n’augmente pas le risque de développer un trouble de l’usage de substances74,75 .
En revanche, chez les rats ayant reçu un traitement stimulant, on observe
une augmentation de prise d’alcool à l’âge adulte lorsqu’ils sont désinsérés
socialement et vivent seuls.
Le traitement pharmacologique semble être un bénéfice chez les patients TDAH
indépendamment du type d’addiction constaté76 . Une méta-analyse récente
montre des résultats mitigés de l’effet pharmacologique sur le TUS ; en effet
même s’il existe une efficacité du traitement stimulant sur les symptômes de
TDAH, l’effet bénéfique n’a pas été démontré sur la réduction ou l’abstinence de
la consommation77 .
Quelques thérapeutiques sont expérimentées comme les sels mixtes d’amphé-
tamine qui ont montré leur efficacité chez les patients ayant un TDAH et une
addiction à la cocaïne avec une réduction des symptômes de TDAH et de consom-
mation de cocaïne70 .
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Traitement du trouble de l’usage de substances

Il est important d’utiliser les thérapeutiques usuelles addictolytiques pour


chaque substance. Ceci aurait un effet bénéfique sur la composante impulsive et
diminuerait l’effet du toxique sur le circuit de la récompense, ce qui permettrait
de minimiser le risque du retentissement des addictions not amment au niveau
socio-professionnel.

Psychothérapeutique
!

La plupart des travaux insistent sur l’intérêt d’une prise en charge sur le modèle
des thérapies cognitivo-comportementales (TCC) pour les adultes. Des entretiens
222 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

de motivation, afin d’aider le patient à avancer dans son processus d’évolution


vers un changement d’habitudes (pour l’addiction et pour la gestion du problème
d’hyperactivité), de la psycho-éducation (sur la prise du traitement, un style de
vie sain etc.) et la mise en place d’un soutien familial permettant l’intégration
de la famille, dans un rôle de co-thérapeutes de soutien sont des démarches
essentielles à entreprendre pour une évolution favorable de ces patients.

Prise en charge intégrée


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Les dernières recommandations pour la prise en charge d’adolescents ayant la
comorbidité prônent une prise en charge intégrée mêlant une prise en charge
associant pharmacologie, psychoéducation et remédiation cognitive78 .

Thérapie cognitivo-comportementale

Il semblerait que l’intégration de pharmacothérapie et de thérapie cognitivo-


comortementale puisse être une perspective prometteuse dans la prise en charge
de patients ayant un TDAH et TUS, mais il n’existe pas d’études pertinentes dans
cette indication.

Neuro-feedback

La thérapie par neuro-feedback est efficace chez les patient s ayant un TDAH 79 ,
en particulier sur les symptômes d’impulsivité. Chez les pa tients ayant un TUS,
les preuves restent encore nécessaires80 .

Mindfulness

La thérapie de pleine conscience montre son efficacité chez l es patients ayant


un TDAH. On observe un bénéfice sur les distractions ainsi qu’une meilleure
capacité à repriser les pensées. Il en résulte une meilleure attention sur les
tâches, un meilleur achèvement de tâches, une diminution de l’impulsivité,
une amélioration de la gestion émotionnelle et comportementale ainsi qu’une
amélioration du fonctionnement professionnel et social. Ces constatations sont
tout aussi présentes dans l’efficacité de cette thérapeutique chez les patients
ayant un TUS81 .
TDAH et addictions 223

Remédiation cognitive

Des thérapies de remédiation cognitive se sont développées tant pour les patients
TUS82 que pour les patients atteints de TDAH. Aucune étude n’a inté gré la spé-
cificité de la problématique cognitive des patients ayant un TUS et un TDAH.
Toutefois cette approche semble tout à fait justifiée étant donné que les deux
pathologies ont des particularités qu’il faut intégrer dans la thérapie.
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P RONOSTIC

La présence de la comorbidité entraîne une plus forte sévérité de l’addiction


et un début précoce comparé aux autres patients ayant un TUS. De plus, on
retrouve de plus fortes comorbidités lorsque ces deux troubles coexistent à savoir
un plus fort risque de passage à l’acte suicidaire, des traits antisociaux, un plus
fort risque de dépression, une chronicité de la consommation, une augmentation
du nombre d’hospitalisations et une évolution au long court plus sévère.

C ONCLUSION

Devant la présence d’une addiction, il est très important de rechercher un TDAH.


Les stratégies diagnostiques ne sont pas consensuelles, il est donc important
devant des symptômes qui se chevauchent de rechercher activement un TDAH.
Les évidences en termes d’étiologies et de thérapeutiques restent encore à mieux
définir, mais il existe des thérapeutiques efficaces qui doivent être mises en
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

place le plus précocement possible afin d’améliorer le pronostic de ces patients


rendu plus sévère par la comorbidité.

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Chapitre 12

TDAH et accidents de la route


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Stéphanie Bioulac, Cédric Galéra

L A CONDUITE est une tâche complexe qui implique l’interaction de fonctions


cognitives, perceptuelles et motrices. Logiquement les perturbations de
l’attention, l’impulsivité et les dysfonctions exécutives sont susceptibles de
générer des difficultés dans la conduite et en conséquence de possibles acci-
dents. Depuis les années 1990, le Trouble Déficit de l’attention/Hyperactivité
(TDAH) est reconnu comme facteur de risque de survenue d’accident de la route.
Dans les premiers travaux, le risque estimé d’accidents de la route était de 3
à 4 fois supérieur chez les personnes avec TDAH comparé au risque chez les
personnes sans TDAH (Barkley et coll., 1993). Des travaux plus récents mon-
traient cependant un risque relatif (RR) d’accident plus bas. Chez les conducteurs
présentant un TDAH le RR était entre 1,2 et 1,5 fois supérieur par rapport aux
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

conducteurs sans TDAH, risque comparable à celui des maladies cardio-vasculaires


(Chang et coll., 2014 ; Vaa, 2014). Ces différences s’expliquent par une meilleure
prise en considération des variables de confusions (en particulier le trouble
des conduites et le trouble oppositionnel avec provocations) et de la durée
de l’exposition à la conduite dans les analyses plus récentes de l’association
entre TDAH et accidents de la route. Bien qu’inférieur à ce que l’on pensait
le sur-risque d’accident reste cependant significatif. De plus, la surmortalité
prématurée chez les personnes avec TDAH semble en grande partie liée à la
survenue d’accidents (Dalsgaard et coll., 2015). Reconnaître l’association entre
TDAH et risque d’accident de la route est donc crucial. Malgré les efforts menés
en sécurité routière, au-delà de la surmortalité, les accidents sont toujours
pourvoyeurs de handicaps chroniques lourds, en particulie r chez les jeunes. La
230 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

meilleure prise en compte du TDAH, condition identifiable et pouvant bénéficier


d’interventions précocement, est pertinente afin de diminuer l’incidence des
accidents de la route. Dans ce bref chapitre nous présentons les principaux
travaux épidémiologiques et expérimentaux s’intéressant au lien entre TDAH et
accidents de la route.

A PPORT DES ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES


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Parmi les troubles psychiatriques, le TDAH représente une sous-population possi-
blement plus à risque d’accidents de la route et de conséquences associées. Un
ensemble de travaux épidémiologiques ont été menés sur cette thématique. Ils
reposent sur des échantillons de conducteurs ou de personnes accidentées ainsi
que sur des registres ou autres bases de données de surveillance. Les mesures
correspondent le plus souvent soit à des questionnaires remplis par les sujets
eux-mêmes, soit à des données fournies par des tiers informants (e.g. Assurances,
police, autres).
Une récente étude (Aduen et coll., 2015) a comparé un groupe de 275 personnes
avec TDAH, un groupe de 251 personnes présentant une dépression et un groupe
contrôle de 1 828 participants sans trouble psychiatrique (groupe témoin). Par
rapport au groupe témoin, le groupe avec TDAH présentait un sur-risque signifi-
catif d’infractions multiples au code de la route (Rapport de Cote (RC) = 2,3), un
sur-risque significatif de collisions multiples (RC = 2,2), un sur-risque significatif
de collision responsable (RC = 2,1), un sur-risque significatif de collisions mul-
tiples (RC = 2,2). Le groupe avec dépression présentait seulement un sur-risque
significatif de blessures suite à l’accident (RC = 2,4). Au-delà des véhicules à
quatre roues l’association entre TDAH et accidents concerne aussi les véhicules à
deux roues (Kieling et coll., 2011) comme cela a été retrouvé dans un échantillon
de convenance brésilien (N=101). Dans une étude de registre suédoise (Chang et
coll., 2014), 17 408 personnes avec TDAH ont été suivies sur 3 ans. Hommes et
femmes présentaient un sur-risque de survenue d’accident de la route grave (i.e.
entraînant une hospitalisation ou un décès) avec un Hazard Ratio (HR) voisin
de 1,4. Il est intéressant de noter que pendant les périodes de traitement il y
avait une réduction significative du risque d’accident de 58 % chez les hommes
(HR=0,42). Le possible effet bénéfique des traitements médicamenteux du TDAH
a été évoqué dans de nombreuses études (voir revue de Fuermaier et coll., 2014).
Cependant la plupart de ces données reposaient sur des échantillons de faible
taille ce qui limite leur validité.
TDAH et accidents de la route 231

Certaines études épidémiologiques apportent des éléments à la réflexion sur


l’interprétation de l’association entre TDAH et accident de la route. Elles sou-
lignent notamment les rôles possibles des distractions externes, du sommeil, des
émotions et de l’agressivité lors de la conduite ou encore de la persistance du
TDAH à l’âge adulte. Dans une étude française menée chez 777 conducteurs acci-
dentés et hospitalisés aux urgences (El Farouki et coll., 2014), l’effet combiné du
TDAH et de la distraction externe était associé à un sur-risque (RC = 5.8) d’être
responsable d’un accident de la route alors que le TDAH seul était associé à un
sur-risque significatif mais plus faible (RC = 1,5). Cela suggère une vulnérabilité
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accrue des personnes avec TDAH vis-à-vis des distractions externes survenant
lors de la conduite. Il est intéressant de souligner que les distractions internes
(i.e. vagabondage des pensées) bien qu’associées au risque d’être responsable
d’un accident (Galera et coll., 2011), n’avaient pas de rôle de modificateur
de l’effet du TDAH. Une autre étude française portant sur 36 140 usagers des
autoroutes (Philipp et coll., 2015) a retrouvé une association significative entre
TDAH et « presque » accident en lien avec des problèmes de sommeil (RC = 1,4)
et « presque » accidents en lien avec des problèmes d’inattention (RC = 1,9). Les
auteurs soulignaient l’importance de prendre en compte les problèmes de sommeil
chez les personnes avec TDAH dans le risque de survenue d’accident de la route.
Une autre étude (Richards et coll., 2006) a retrouvé chez des jeunes adultes
avec TDAH une plus grande fréquence lors de la conduite : 1/d’émotions à type
de colère ; 2/d’agressivité dans l’utilisation du véhicule ; 3/de comportements
à risque. L’étude de Thompson et coll. (2007) a aussi montré que l ’association
entre TDAH dans l’enfance et accidents de la route était médiée par la persistance
du TDAH à l’âge adulte. Le RR d’accident des conducteurs avec TDAH associé à
un trouble externalisé comorbide (e.g. trouble opposition nel avec provocation
ou trouble des conduites) est supérieur au RR chez les conduc teurs avec TDAH
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non comorbide (Vaa, 2014). Ainsi dans les échantillons de conducteurs avec
TDAH majoritairement comorbide (>50% des cas) le RR estimé était égal à 1,86
(1,27-2,75). Dans les échantillons de conducteurs avec TDAH non comorbide le
RR estimé était égal à 1,31 (0,96-1,81).
Parmi les infractions possibles il semble que le TDAH soit surtout associé à des
dépassements de limitation de vitesse (Vaa, 2014). La vitesse pourrait donc être
une variable intermédiaire entre le TDAH et le risque d’accident de la route. Ainsi
la recherche de stimulation par la vitesse a été évoquée comme une des raisons
des dépassements de limitation de vitesse. Il est aussi intéressant de noter que
les études épidémiologiques n’ont pas permis de préciser si les infractions au
232 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

code de la route commises étaient intentionnelles (les infractions intention-


nelles étant associées à un sur-risque d’accidents) ou s’il s’agissait d’erreurs non
intentionnelles (les erreurs n’étant pas associées à un sur-risque d’accidents).

A PPORT DES ÉTUDES EXPÉRIMENTALES

De façon parallèle aux études épidémiologiques, des études expérimentales ont


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été menées chez les sujets TDAH, visant à explorer les performances de conduite
des sujets (le plus souvent en simulateurs de conduite, parfois en conduite
réelle) et l’impact des traitements médicamenteux.
Le domaine des simulateurs de conduite constitue une application relativement
bien développée de la réalité virtuelle. Il en existe de nombreux types avec divers
degrés d’immersion (allant d’une immersion par visiocasque, jusqu’au simulateur
avec véritable coque de voiture et projection d’un circuit autoroutier en trois
dimensions). Le nombre de franchissements inappropriés de lignes latérales, la
déviation standard de la position du véhicule sur la voie (stabilité de la trajec-
toire) et la vitesse (vitesse moyenne et variabilité de la vitesse) du véhicule
correspondent aux variables classiquement enregistrées par les simulateurs.
Il existe maintenant plusieurs travaux ayant utilisé cette technologie (pour
revue Vaa, 2014). Lors d’utilisation de simulateur de conduite, les sujets TDAH
ont présenté plus de pertes de contrôle du véhicule et d’accidents que les sujets
témoins. Les études ont retrouvé une conduite automobile irrégulière avec une
variabilité de la direction et des temps de réactions plus lents. Certains travaux
explorant l’efficacité des médicaments psychostimulants, sont en faveur d’une
amélioration des performances de conduite chez les sujets traités. Cependant,
les bénéfices des stimulants sont limités dans le temps et certains auteurs ont
montré une détérioration des performances de conduite en fin de journée. Ainsi la
méta-analyse de Vaa (2014) met en avant que ces études menées sur simulateurs
s’accordent sur des performances moindres des sujets TDAH versus des sujets
contrôles. De plus, il apparaît que le traitement médicamenteux a un impact
positif sur les performances de conduite des sujets TDAH sur des paramètres tels
qu’une diminution de la variabilité de vitesse et les franchissements de lignes.
S’intéressant de façon plus spécifique aux types d’erreurs é mises par les sujets
TDAH, il semble que les comportements à risques repérés sont plus souvent des
erreurs ou fautes de conduites (Reason et coll. 1990 ; Rosenbloom et coll. 2011)
et non des infractions ou des violations « délibérées » au code de la route.
TDAH et accidents de la route 233

Des études plus récentes ont exploré certains des mécanismes cognitifs impliqués.
En référence à différents modèles de l’attention comme le modèle de Kahneman
(1973). Ce modèle repose sur le concept de ressources attentionnelles, la façon
dont un sujet recrutera ses ressources attentionnelles étant très dépendante
de la tâche en elle-même mais aussi du contexte de la tâche. Ainsi, l’équipe
de Reimer (Reimer et coll. 2010), a imaginé un protocole d’étude explorant le
concept de doubles tâches. Le scénario était constitué de deux situations. Dans
un environnement « très stimulant » (conduite en ville), le sujet devait avoir une
conversation téléphonique (le sujet devant énoncer une consigne pour composer
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le numéro et prendre un rendez-vous). L’autre situation était un environnement
peu « stimulant » (conduite sur autoroute) avec un test d’attention soutenue
(une version auditive du classique CPT (Continuous Performance Test). Ce travail
mené chez 60 sujets (25 sujets TDAH et 35 sujets contrôles), montrait un pattern
de réponse complexe chez les sujets TDAH : 1.lors du scenario d’autoroute, les
sujets TDAH avaient des difficultés à maintenir une vitesse constante avec une
vitesse supérieure aux limites indiquées ; 2.lors du scenario urbain, les sujets
TDAH mettaient plus de temps pour observer les panneaux de signalisation
(pauses plus longues, en moyenne 0,5 seconde de plus que les sujets contrôles),
avec un niveau d’accélération plus lent que les sujets contrôles suivant l’arrêt. De
façon similaire, les réponses obtenues lors des deux taches étaient distinctes. Ces
résultats apparaissent en faveur de difficultés de régulation de l’attention chez
le sujet TDAH. En effet, dans le scenario urbain, les sujets TDAH présentaient
de moins bonnes performances lors de la tâche au téléphone. Ceci pouvant être
sous-tendu par divers mécanismes tels que la distraction, p lus de prudence ou
bien la combinaison des deux. Dans le scénario sur autoroute, les sujets TDAH
ont présenté des performances correctes au CPT, pouvant s’expliquer par le faible
effort cognitif nécessaire lors de la conduite sur autoroute (recrutement de peu
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

de ressources attentionnelles). Ainsi, les sujets TDAH arrivaient à se concentrer


efficacement sur la seconde tâche du CPT. Ce protocole expérimental met l’accent,
en illustrant le concept de double tâches, dans la situation de conduite, de
l’importance de prendre en compte le contexte de la tâche : avec une conduite
plus sécure dans un contexte « stimulant » « urbain » et une conduite moins
sécure et qui peut être plus dangereuse sur autoroute dans un « environnement
moins stimulant ». Ce type d’étude soulève aussi les liens étroits existants entre
motivation et attention, posant la question : vers quoi le sujet TDAH va diriger
son attention durant la période de conduite ?
La somnolence est aussi maintenant un facteur bien reconnu en accidentologie
(Philip et coll., 2010). Fort de cela et de la fréquence des troubles du sommeil
234 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

chez les sujets TDAH, Bioulac et coll. ont exploré l’impact de la somnolence sur
les performances de conduite chez les sujets TDAH. Les sujets TDAH présentaient
une somnolence diurne excessive évaluée objectivement par un test de maintien
d’éveil. Cette étude a inclus 40 sujets TDAH versus 19 sujets témoins. Au sein
du groupe TDAH, 35 % des sujets TDAH présentaient une somnolence diurne
pathologique (Test de Maintien d’Éveil <20 min, pour une normale > à 34 min).
Ce travail a montré que lors d’un scénario de conduite sur autoroute, les sujets
TDAH somnolents exprimaient des performances de conduite significativement
altérées comparées aux sujets TDAH non somnolents et contrôles (avec une
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difficulté à maintenir une trajectoire stable) (Bioulac et coll., 2015). Ce travail
suggère que la somnolence diurne excessive peut être un facteur aggravant les
mauvaises performances de conduite des sujets TDAH.

C ONCLUSION

Les données sur la conduite automobile chez les sujets TDAH soulignent la com-
plexité de ce domaine de recherche. Si les premiers travaux sur ce sujet avaient
essentiellement montré un lien entre l’augmentation du risque d’accidents chez
le sujet TDAH et les dimensions d’impulsivité et d’inattention, il apparaît que
de nombreux autres facteurs doivent être pris en considération, notamment des
variables telles que la mauvaise régulation des émotions, la motivation, ou la
somnolence. La poursuite des recherches dans ce domaine s’avère nécessaire
afin d’améliorer la compréhension du phénomène, de déterminer l’efficacité
des traitements existants (e.g. psychostimulants, remédiation cognitive) et de
proposer de nouvelles interventions. Le champ reste ouvert et les nouvelles
technologies développées par l’industrie automobile (e.g. dispositifs embarqués
de détection et d’alerte de l’inattention, conduite autonome des véhicules)
pourraient à l’avenir contribuer à diminuer la part d’accidents liés à l’inattention
et au TDAH.
TDAH et accidents de la route 235

B IBLIOGRAPHIE

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Chapitre 13

Suicide et TDAH chez l’adulte


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et l’enfant

Flore Moulin, Cédric Galéra

L E TROUBLE DÉFICITde l’attention/hyperactivité (TDAH) se caractérise par la per-


sistance d’inattention et/ou d’hyperactivité/impulsivité, affectant le fonc-
tionnement et le développement de l’individu [3]. Bien qu’initialement décrit
comme un trouble de l’enfance, les recherches ont montré qu’en fonction des
critères de définition, les symptômes persistaient à l’âge adulte dans 15 à 76 %
des cas [5].
Malgré des efforts importants de santé publique axés sur les stratégies de pré-
vention du suicide, le taux de suicide n’a que peu ou pas diminué dans la plupart
des pays industrialisés, et ce dernier reste un des enjeux majeurs en psychiatrie.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

En 2006 aux États-Unis, ce dernier représentait la 11e cause de mortalité tandis


qu’en France le suicide représentait la 2e cause de mortalité chez les jeunes de
15-24 ans en 2010.
Alors qu’il existe une littérature abondante sur le risque suicidaire dans la
dépression, les troubles psychotiques, les troubles de la personnalité, ainsi que
dans la dépendance à l’alcool et la toxicomanie, peu de données existent sur
le comportement suicidaire chez les adultes et les enfants atteints de Trouble
Déficit de l’Attention-Hyperactivité (TDAH) et ceci, malgré une prévalence de ce
trouble de plus de 2.5 % chez les adultes [35] et de plus de 5 % chez les enfants,
et une persistance de ces symptômes de 30 % à l’âge adulte [27]. Certaines
revues de littérature ont déjà mis en évidence un lien direct entre TDAH et
suicide. [11], [19] tout en expliquant les mécanismes possibles impliqués.
238 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

Ces dernières années ont vu apparaître une recherche importante dans le domaine
du TDAH de l’âge adulte. Elles soulignent notamment que le TDAH impacte néga-
tivement la qualité de vie des adultes et en particulier s’associe à un risque plus
élevé de comportement suicidaire, mais aussi à une augmentation du risque de
dépression, de toxicomanie, de comportement antisocial, et de dysfonctionne-
ments cognitifs notamment dans le contrôle de l’inhibition et dans les fonctions
exécutives[36]. Les recherches sur les enfants TDAH ont montré également que
le trouble était associé à un risque plus important d’idéations suicidaires, de
tentatives de suicide (TS) et de suicide complété.
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La revue de littérature suivante résume les associations les plus importantes
entre le TDAH et le suicide, ainsi que les explications les plus plausibles à cette
association.

R ISQUE SUICIDAIRE DANS LE TDAH

Suicide et enfant TDAH


!

Un risque suicidaire accru chez les enfants et les adolescents avec un TDAH a été
identifié à plusieurs reprises dans la littérature. Déjà dans les années 1970, une
étude [38] décrit une augmentation significative de TDAH chez les adolescents
qui tentaient de se suicider, association confirmée par la suite par plusieurs
groupes [13], [24].
En examinant un groupe de 900 sujets diagnostiqués TDAH, une étude française
trouve une association positive entre les symptômes d’hyperactivité-inattention
et le risque de suicide au cours de la vie chez de jeunes garçons adolescents,
alors qu’aucune association n’est retrouvée chez les filles [12].
Du fait de la continuité, voire de l’apparition [27] de ce trouble à l’âge adulte,
plusieurs études se focalisent alors sur des populations TDAH adultes.

Suicide et adulte TDAH


!

De même, chez les adultes, plusieurs études font un lien entre suicide et TDAH.
Une étude américaine [16] observe ainsi que les jeunes femmes diagnostiquées
TDAH dans l’enfance souffrent de comportements suicidaires plus à risque que les
sujets contrôles. Dans leur étude portant sur une populatio n Coréenne, Park et
al. [32] montrent une association forte entre les adultes TDAH et le suicide. En
Suicide et TDAH chez l’adulte et l’enfant 239

France également, une étude montre un risque accru de suicid e chez les sujets
souffrant de TDAH [30].
2 études sur les détenus montrent une association : Putnins [37] suit 900 jeunes
prisonniers dans des centres de détention en Australie du Sud, et montre une
association prospective entre TDAH et comportement suicidaire. L’association
reste significative même en ajustant sur les tentatives de suicide antérieures,
un possible facteur confondant (une tentative de suicide dans le passé étant
prédictive d’une rechute). Dans une autre étude sur les détenus, des résultats
similaires sont retrouvés [44] avec un risque suicidaire accru chez les TDAH.
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E XPLICATIONS POSSIBLES DE L ’ AUGMENTATION
DU RISQUE DE SUICIDE CHEZ LES TDAH

Les explications possibles d’une augmentation du risque de suicide en lien avec


le TDAH sont multiples : comorbidités associées au TDAH et reconnues pour être
en lien avec le suicide, troubles cognitifs et traits de personnalité spécifiquement
retrouvés chez les patients TDAH pouvant être en lien avec un comportement
suicidaire, désordres neurobiologiques liés à la fois au TDAH et au suicide et la
possible et controversée influence du traitement prescrit dans le cadre du TDAH.

Comorbidités
!

Schizophrénie

Les études faisant le lien entre TDAH, suicide et schizophrénie ne sont pas
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

nombreuses. Même si les troubles psychotiques sévères ne sont pas plus souvent
retrouvés chez les patients TDAH qu’en population générale, une étude [9]
réalisée en population psychiatrique de schizophrènes, montre que 15 patients
sur 27 atteints de schizophrénie souffrent également de TDAH. Les patients
avec une comorbidité de TDAH présentent donc une augmentation du risque de
suicide par rapport aux contrôles.

Dépression

Chez les adultes, une étude sud-coréenne [32] montre une association positive
significative entre symptômes de TDAH, suicide et épisode dépressif majeur
dans un échantillon de 6 081 adultes en Corée. Cette association est également
240 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

retrouvée avec les troubles de l’anxiété, les TOC, les ESPT, la phobie sociale, le
trouble somatoforme, et les problèmes de sommeil, après avoir contrôlé pour
l’âge et le sexe.
Une étude hongroise menée chez des enfants [22] compare le nombre de comor-
bidités chez les enfants et adolescents atteints de TDAH, ces dernières étant
significativement plus élevées chez les adolescents. De plus, une différence
significative est retrouvée entre les hommes et les femmes, les femmes étant
plus à risque que les hommes de faire une dépression et d’avoir un comportement
suicidaire [18]. Une étude comparative de 2 groupes de patients de différents
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sous-types de TDAH (inattentif de type 1 versus type mixte avec déficit de
l’attention et hyperactivité) a montré que les 2 groupes de patients étaient plus
à risque de développer certaines comorbidités psychiatriques et avaient plus
souvent bénéficié d’un service de santé mentale que les contrôles. De même
en comparaison avec le TDAH de type 1, les adultes TDAH mixtes étaient plus
à risque de se suicider, ce qui accentuait les possibles différences entre les
sous-types de TDAH en termes d’association avec le suicide [28].
Une étude américaine portant sur 60 adolescents hospitalisés en psychiatrie,
[29] montre que lorsqu’elle était associée au TDAH, la dépression conduisait à
plus de suicide "réussi" chez les adolescents. Les patients exprimaient également
un désir plus fort d’en finir. De plus, une étude réalisée chez de jeunes étudiants
souffrant de troubles de l’humeur retrouve une association entre symptômes
d’hyperactivité-inattention et dépression majeure associée à des idées noires
[34].

Abus de substances

L’abus de substance, une comorbidité fréquente dans le TDAH, est également


associé à une augmentation du risque de suicide.
Dans une étude anglaise s’intéressant aux abus de substance, la prévalence
des TDAH non diagnostiqués atteignait les 12 % [17], et les patients avec les
2 diagnostics avaient significativement plus de problèmes au quotidien, ainsi
qu’un plus grand taux de consommation d’alcool, de tentative de suicide et de
dépression.
Dans une étude datant de 2008 portant sur 1761 adultes avec un diagnostic
de dépendance à la cocaïne et aux opioïdes, des Américains [1] montrent une
prévalence du TDAH de 5.2 %, versus 0.8 % dans le groupe contrôle et une
association forte entre TDAH et tentative de suicide. De même, une étude cas-
témoins avec des patients adultes alcoolo-dépendants retrouve une prévalence
Suicide et TDAH chez l’adulte et l’enfant 241

de comorbidités TDAH plus élevée dans le groupe avec antécédents maternelle ou


paternelle d’alcoolisme que dans le groupe de patients alcoolo-dépendants avec
uniquement une histoire paternelle d’alcoolisme, ainsi qu’un plus grand nombre
de comportement suicidaire pour le groupe avec les 2 parents alcooliques [8].

ESPT

Concernant l’association avec l’État de Stress Post-Traumatique (ESPT), 2 études


ont établi un lien entre suicide et TDAH. Dans un groupe de 117 enfants, ce
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syndrome était significativement associé avec une symptomatologie de TDAH et
la présence d’idéation suicidaire [10]. Chez les adultes également, ce symptôme
était retrouvé comme prédicteur à la fois de TDAH et de suicide (étude militaire
basée sur un échantillon de 320 soldats, population particulièrement à un risque
d’ESPT [15].)

Syndrome de fatigue chronique et anxiété

Une équipe espagnole [41] a récemment reporté une prévalence de 29.7 % de


TDAH dans un échantillon de 158 patients présentant un syndrome de fatigue
chronique (SFC) : Les patients avec TDAH et SFC associés avaient un début de
SFC plus précoce, plus de symptômes d’anxiété et de dépression, et un risque
plus élevé de suicide que ceux présentant un SFC isolé. Semiz et al. [42] ont
interviewé 105 militaires avec un trouble de la personnalité antisociale, et
65 % d’entre eux souffraient également de TDAH. Les sujets présentant à la fois
une symptomatologie anxieuse et un TDAH, avaient un début plus précoce et
présentaient plus de gestes d’auto-agressivité et de TS que les sujets TDAH ne
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.

présentant pas d’anxiété.

Troubles cognitifs et traits de personnalité


!

Indécision

Si les patients TDAH ont plus tendance à prendre des décisions « risquées » et à
retarder le moment de la prise de décision, l’indécision est aussi une vulnérabilité
par rapport aux conduites suicidaires comme le rapporte une étude réalisée dans
une large population psychiatrique [20]. Chez l’enfant, l’adolescent et l’adulte
les tests neurocognitifs montrent une association entre TDAH est et troubles
décisionnels [25], [43]. Miller et al. [26] ont ainsi observé dans un groupe de
242 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

jeunes femmes de 17-25 ans, une association entre le diagnostic TDAH posé
dans l’enfance (entre 6 et 12 ans) et la prise de « mauvaise » décision.

Déficit de l’attention et impulsivité

Un des symptômes phares du TDAH est l’inattention. Une étude américaine [21]
après avoir comparé des mesures attentionnelles entre des p atients dépressifs,
avec et sans histoires de comportement suicidaire, et des patients contrôles
sans dépression met en évidence que les troubles de l’attention étaient signifi-
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cativement plus élevés chez les patients dépressifs avec une histoire de suicide
que dans les 2 autres groupes (patients dépressifs sans histoire de suicide et les
contrôles).
L’impulsivité joue également un rôle important dans la prise de décision chez
les patients TDAH. Ce trait de personnalité caractérisé par peu ou pas de pré-
méditation, de réflexion ou de considération sur les conséquences influence
bien souvent le geste suicidaire chez l’enfant et l’adulte TDAH. Chez les enfants,
Rosenthal [39] décrit un possible rôle de l’impulsivité et de l’hyperactivité dans
l’induction d’un geste suicidaire. Une étude française a identifié les mécanismes
de défenses associés à l’impulsivité et aux TS dans une population de 77 dépres-
sifs [7], et montre ainsi une association positive entre impulsivité et nombre
de TS. Dans une étude rétrospective de 104 adultes suicidaires, les traits de
personnalité associés à l’impulsivité contribuent également aux TS [23].

Neurobiologie commune du TDAH et du suicide


!

Au niveau neurobiologique, le TDAH est un trouble complexe trouvant ses ori-


gines dans des facteurs à la fois génétiques et épigénétiques, et résultant en
des changements de voies signalétiques, de systèmes de neurotransmissions,
d’expression de gènes et de neuroplasticité ; L’efficacité des psychostimulants
tels que les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la NA (ISRNa) dans le traite-
ment de ce trouble suggère un rôle dans la neurotransmission dopaminergique
et noradrénergique, mais aussi dans la transmission sérotoninergique. Une étude
a montré que des patients adultes souffrant de troubles bipolaires avec une
histoire de TDAH présentaient une concentration significativement plus basse
de dopamine HVA dans le LCR ainsi que de sérotonine 5-HIAA [40]. De façon
intéressante, un niveau plus bas de 5 HIAA était associé à un risque augmenté
de suicide chez des patients avec troubles de l’humeur [2], [31].
Suicide et TDAH chez l’adulte et l’enfant 243

Le TDAH est parfois considéré comme faisant partie du syndrome de déficit


de récompense. Cette récompense déficiente est associée à une insuffisance
de transmission dopaminergique dans le système de récompense du cerveau,
résultant en un craving anormal, (pour les drogues illicites et l’alcool) et par
conséquent, à une susceptibilité accrue à l’abus de substance. Un niveau dimi-
nué de dopamine dans le nucleus accumbens (un composant du système de
récompense) a aussi été retrouvé en post mortem dans les cerveaux de suicidés
dépressifs. [6]
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Implication du traitement du TDAH dans le suicide
!

Les psychostimulants (Méthylphenidate) et les inhibiteurs sélectifs de la recap-


ture de la Sérotonine et de la Norépinephrine (Atomoxétine) sont les 2 principaux
médicaments utilisés dans le traitement du TDAH, après avoir prouvé qu’ils dimi-
nuaient les symptômes du TDAH à la fois chez les enfants et les adultes, et qu’ils
permettaient une amélioration du niveau de fonctionnement des patients. Cepen-
dant, des rapports récents remettent en cause la sécurité de ces médicaments
dans le TDAH. En 2005, à la fois the Food and Drug Administration (États-Unis)
et Santé Canada, ont alerté sur une augmentation des idées suicidaires chez
les enfants traités par atomoxétine dans des essais contrôlés sous placebo. Une
méta-analyse averti en 2008 le grand public, après avoir reviewé 12 études
comparant les résultats d’enfants traités par atomoxétine et placebo. Une idéa-
tion suicidaire était retrouvée chez 5 (0.4 %) des 1 357 enfants ayant pris de
l’atomoxétine, mais chez aucun des 851 patients sous placebo [4]. Suite à cette
annonce, les soignants ont donc été invités à surveiller de près les enfants et
adolescents sous atomoxétine, notamment l’apparition de symptômes comme
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l’agitation, l’irritabilité et les modifications de comportement.


Les recommandations européennes sur la façon de gérer les effets secondaires
du TDAH mettent l’accent sur le fait qu’au Royaume-Uni, la prévalence de geste
auto-agressifs, chez les 11-15 ans avec troubles hyperkiné tiques, est de 8.5 %
et la prévalence de comportements suicidaires chez les enfants traités avec des
médicaments pour le TDAH dans des essais contrôlés randomisés est seulement
de 0.4 % [14]. Les auteurs concluent ainsi que même si ce taux d’événements
relativement bas observés dans les essais peut-être lié à l’exclusion des sujets
suicidaires à l’entrée dans l’essai, un temps d’observation trop court, ou un
manque d’évaluation systématique et de signalement, il n’y a que peu, ou pas,
de preuves que le taux observé de suicide chez les enfants traités soit plus élevé
que dans la population générale. De plus, l’imputabilité médicamenteuse requiert
244 T ROUBLE D ÉFICIT DE L’ATTENTION AVEC OU SANS H YPERACTIVITÉ DE L’ ENFANT À L’ ADULTE

des études expérimentales et des études comparatives. Or ces dernières posent


le problème de critères valides définissant les idées suicidaires, le comportement
suicidaire, difficile à standardiser d’un point de vue clinique. Concernant les
adultes traités par atomoxétine, il n’y a pas à ce jour d’évidence d’augmentation
du risque suicidaire.
Concernant le traitement des adultes TDAH, certaines données indiquent une
efficacité à court terme et une sécurité des médicaments util isés, mais il n’y a
pas d’études à long terme sur les sujets.
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À ce jour, une étude seulement a examiné les conséquences à l’âge adulte d’une
médication par psychostimulant dans l’enfance, dans un groupe relativement
petit de 32 sujets : pour 20 jeunes adultes, le traitement n’a eu aucune réper-
cussion à l’âge adulte, mais pour 11 d’entre eux, les effets positifs ont persisté
longtemps après l’arrêt du traitement. Des doses plus élevées de traitements
étaient ainsi associées à moins d’alcoolisme et de TS. De plus, plus la durée de
traitement était grande, meilleure était la performance cognitive des patients
[33].
Les recherches futures devront être axées sur l’influence du traitement sur le
risque suicidaire.

C ONCLUSION

Il existe donc un nombre de preuves important concernant l’idée d’une associa-


tion entre TDAH (incluant les adultes avec TDAH) et augmentation du risque
suicidaire. Cela est grandement lié aux comorbidités associées à ce trouble. Il
est essentiel à l’avenir de sensibiliser les soignants sur le problème du risque du
suicide chez les patients adultes atteints de TDAH, spécialement, les psychiatres
et les médecins généralistes, qui sont bien souvent en première ligne pour ces
patients. De même, il est important d’accroître notre connaissance du TDAH et
ses risques intrinsèques dans la population générale, spécifiquement dans les
familles incluant des patients TDAH et dans l’environnement professionnel.
Une détection précoce du TDAH, un traitement adapté ainsi que la prise en
charge de ses comorbidités peuvent réduire le risque de TS et ainsi modifier
considérablement le pronostic.
Suicide et TDAH chez l’adulte et l’enfant 245

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Conclusion

La perspective développementale,
un enjeu pour la compréhension
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des troubles

Manuel Bouvard

L ETDAH EST AUJOURD’HUI sorti des vains et inutiles débats sur son existence,
son appartenance culturelle, ses idéologies causalistes et ses contradictions
thérapeutiques. Les conséquences délétères sur le fonctionnement du sujet sont
bien documentées avec une altération majeure chez l’enfant de la scolarité et des
relations sociales et familiales, et chez l’adulte du fonctionnement professionnel
et le risque de développer un abus de substances. En outre, la comorbidité
fréquente avec les troubles des conduites ou les troubles émotionnels aggravent
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le pronostic de ce trouble au cours du temps.


Il existe aujourd’hui des outils validés et reconnus pour le diagnostic et l’évalua-
tion fonctionnelle chez l’enfant et chez l’adulte. Néanmoins, le diagnostic à l’âge
adulte reste plus difficile du fait de la comorbidité fréquente et de l’absence de
formation des psychiatres d’adulte dans ce domaine.
Aujourd’hui, nous disposons d’outils fiables pour le diagnostic et l’évaluation
fonctionnelle de ce trouble, de son retentissement, et de recommandations
claires sur les enjeux de son suivi. Le consensus existe, au niveau internatio-
nal, pour en reconnaître le mécanisme neurodéveloppementa l et en considérer
la plurifactorialité étiopathogènique. La pluralité et la complémentarité d’in-
terventions thérapeutiques psychologiques, environnementales, familiales et
médicamenteuses sont la règle.
250 LA PERSPECTIVE DÉVELOPPEMENTALE , UN ENJEU POUR LA COMPRÉHENSION DES TROUBLES

Pour autant, le retard au diagnostic chez l’enfant, les difficultés de diagnostic


chez l’adulte, la non mise en place des recommandations en matière d’interven-
tions thérapeutiques sont encore, en France, le constat répété des études de
santé publique. De nombreuses questions surgissent au fur et à mesure que se
développent nos connaissances. Les questions sont plus importantes que les
polémiques, en tous les cas pour les patients.
La publication récente en 2014 de recommandations HAS sur le dépistage et le
diagnostic du TDAH par les médecins généralistes est venue souligner la recon-
naissance par les pouvoirs publics du problème de santé publique que constitue
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ce trouble. La reconnaissance de ce trouble par la HAS et le développement à
venir de centres de référence constituent des avancées certaines.
Au-delà du TDAH, l’approche développementale est importante dans la compré-
hension et le traitement des troubles psychiatriques. L’étude des processus déve-
loppementaux dans d’autres pathologies comme la schizophrénie ou la phobie
sociale a déjà fait l’objet de multiples publications. La trajectoire développemen-
tale d’un trouble constitue sans doute en psychiatrie une des dimensions de la
recherche, dans le champ de la génétique comme des sciences cognitives. Elle
est sans doute aussi un enjeu de la clinique et du soin...

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