Utilisation de L'internet Chez Les Étudiants en Médecine À Batna (Algérie), Rouen (France) Et Sousse (Tunisie)

UTILISATION DE L'INTERNET CHEZ LES ÉTUDIANTS EN MÉDECINE À
BATNA (ALGÉRIE), ROUEN (FRANCE) ET SOUSSE (TUNISIE)
Joël Ladner, Nadir Boussouf, Ahmed Ben Abdelaziz, Soumeya Benmaïza, Omar
Alaoua, Marie-Pierre Tavolacci
S.F.S.P. | « Santé Publique »
2010/6 Vol. 22 | pages 637 à 646

ISSN 0995-3914
DOI 10.3917/spub.106.0637
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2010-6-page-637.htm
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Utilisation de l’internet chez les étudiants
en médecine à Batna (Algérie),
Rouen (France) et Sousse (Tunisie)
Internet use among medical students in Batna (Algeria),
Rouen (France), Sousse (Tunisia)
Joël Ladner (1), Nadir Boussouf (2), Ahmed Ben Abdelaziz (2), Soumeya Benmaïza (3),
Omar Alaoua (2), Marie-Pierre Tavolacci (3)
Résumé : L’objectif de l’étude était d’évaluer l’utilisation de l’internet par les étudiants dans
trois facultés de médecine francophones, Batna (Algérie), Rouen (France) et Sousse (Tunisie)
et d’identiﬁer leurs habilités dans la recherche de ressources pédagogiques. En 2008, une
ÉTUDES
étude transversale a été conduite dans les trois facultés. Un auto-questionnaire anonyme a
recueilli des informations sur l’équipement des étudiants, l’intérêt de l’internet dans le
cursus des études médicales et sur les trois dernières recherches de ressources
pédagogiques faites sur l’internet. À Batna, 300 étudiants ont été inclus, 182 à Rouen et 87
à Sousse. Près de 80 % des étudiants utilisaient l’internet pour la recherche de ressources
pédagogiques. Les étudiants de Batna et Sousse déclaraient plus fréquemment manquer
de formation pour l’utilisation de l’internet que les étudiants de Rouen. Au total,
1 288 recherches sur l’internet ont été analysées. Pour une recherche, le temps moyen était
de 61,9 minutes (écart type [ET] = 65,9) à Batna, 26,3 minutes (ET = 30,2) à Rouen et
42,6 minutes (ET = 51,0) à Sousse (p < 10–4). Le jugement de réussite des recherches a été
estimé satisfaisant chez moins d'un étudiant sur deux. Il s’avère important de conseiller et
de guider les étudiants à travers les informations médicales multiples et de qualité variable
retrouvées sur l’internet. Cette fonction de facilitation vers une nouvelle source de savoir est
de la responsabilité des enseignants.
Mots-clés : Internet - études médicales - pédagogie.

Santé publique 2010, volume 22, n° 6, pp. 637-646
(1) Département d’Épidemiologie et Santé Publique CHU et UFR de médecine Rouen, DESP - HCN – CHU, 1, rue
de Germont, 76031 Rouen cedex, Rouen, France.
(2) Direction des Système d’Information, Centre Hospitalier Universitaire de Sahloul, Sousse, Tunisie.
(3) SEMEP. Centre Hospitalier Universitaire de Batna, Batna, Algérie.
Correspondance : J. Ladner Réception : 11/11/2009 - Acceptation : 08/07/2010

638 J. LADNER, N. BOUSSOUF, A. BEN ABDELAZIZ et al.
Summary: The objective of this study was to evaluate the use of the Internet by students in
three francophone Faculties of Medicine, in Batna (Algeria), Rouen (France) and Sousse
(Tunisia), and to identify and assess students’ research skills in seeking educational
resources. In 2008, a cross-sectional study was conducted in the three faculties. An
anonymous self-administered questionnaire gathered information on the students’ IT
equipment, the interest and relevance of the Internet in the curriculum of medical studies,
and information on the last three research efforts for educational resources done using the
Internet. In Batna, 300 students were enrolled, 182 in Rouen and 87 in Sousse. Nearly 80% of
students used the Internet to research educational resources. Students in Batna and Sousse
more frequently reported a lack of appropriate or sufficient training for Internet use than
students in Rouen. In total, 1288 Internet searches were analyzed. For an individual research
effort on the Internet, the average time was 61,9 minutes (standard deviation [SD] = 65,9) in
Batna, 26,3 minutes (SD = 30,2) in Rouen and 42,6 minutes (SD = 51, 0) Sousse (p < 10–4).
Less than one in two students considered their research successful. It is important to provide
advice and guidance to students on how to use and interpret the multiple types and sources
of medical information of varying quality that are found on the Internet. It is the responsibility
of teachers to fulfill this role and help to facilitate the navigation of this new source of
information.
Keywords: Internet, medical studies, education.
Introduction
Les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) couvrent
un ensemble d’outils basés sur l’informatique et sur les réseaux, dont
l’internet, qui permettent l’accès ou le partage d’informations [4].
L’utilisation croissante des TIC est devenue un sujet d’actualité et un enjeu
pédagogique dans le domaine de l’éducation universitaire, et plus
particulièrement dans l’éducation médicale [8, 19, 23, 27]. Les différentes
ressources pédagogiques et formats de formation en ligne proposés
aujourd’hui sont devenus de nouvelles sources d’apprentissage pour les
étudiants en médecine [5, 14, 20, 23].
Parmi les TIC, l’internet est actuellement la technologie de l’information la
plus utilisée dans l’enseignement universitaire et dans la formation profes-

sionnelle continue, en raison de sa disponibilité croissante et de sa diffusion
rapide [4, 19]. Il permet à travers la mise en ligne de documents papiers et
d’images (liens hypertextes, vidéos, auto-évaluations immédiates…), une
interactivité entre les enseignants et les apprenants, offrant ainsi des nou-
velles possibilités pédagogiques, au même titre par exemple que les exer-
cices dirigés classiques dans l’enseignement présentiel [4, 18, 23].
Ces dernières années, des études ont montré une large appropriation de
l’outil internet par les étudiants en médecine dans le cadre de leur formation
dans quelques pays occidentaux [2, 5, 8, 17, 21, 22] et en Afrique sub-
saharienne [1]. Ces travaux se sont essentiellement intéressés aux
équipements, aux lieux de connexion à l’internet, au temps passé sur le Web,
à l’utilisation de l’email, à des mises en situation et à l’utilisation de sites
spécifiques dédiés à la formation des étudiants [26].
Malgré le recours de plus en plus fréquent à l’internet en éducation
médicale, de nombreuses questions restent aujourd’hui posées, notamment
son utilisation comme outil d’apprentissage et son efficacité dans
l’acquisition des compétences cliniques [8, 11, 19]. Plus immédiatement, des
ÉTUDIANTS EN MÉDECINE ET INTERNET 639
questions pratiques se posent aussi autour de la place de l’internet chez les

étudiants en médecine dans des situations concrètes (telle la préparation des
examens nationaux validants), les difficultés rencontrées par les étudiants
sur l’internet, leur efficacité pour la recherche de ressources pédagogiques
ou encore les besoins de formation des étudiants pour une meilleure
utilisation de l’internet.
Les objectifs de ce travail étaient d’étudier l’utilisation de l’internet des étudiants
en médecine dans le cadre de leur formation dans les facultés de médecine
francophones de Batna (Algérie), Rouen (France) et Sousse (Tunisie) et d’identifier
leurs habilités dans la recherche de ressources pédagogiques médicales.
Méthodes
Dans le cadre de la mise en place d’une collaboration pédagogique entre
les services de santé publique des facultés de médecine de Batna, Rouen et
Sousse, une étude transversale a été conduite dans ces trois facultés. Les
trois facultés de médecine sont des UFR de Médecine et de Pharmacie, parmi
les 9 facultés en Algérie, les 29 en France et les 5 en Tunisie. En 2008, la
faculté de médecine de Batna comptait 3 000 étudiants et 150 enseignants,
4 650 étudiants et 181 enseignants à Rouen, 1 600 étudiants et 290 ensei-
gnants à Sousse. Toutes les trois avaient une bibliothèque avec un accès
gratuit à l’internet. Entre janvier et mai 2008, les étudiants en médecine
de Batna (3e, 4e et 5e année), de Rouen (3e, 4e et 5e année) et de
Sousse (3e année) ont complété un auto-questionnaire anonyme lors
d’enseignements présentiels (non obligatoires) de santé publique.
Le questionnaire comportait trois parties. La première partie recueillait
l’âge, le genre et des informations sur l’équipement des étudiants en TIC : la
possession d’un ordinateur personnel, d’un ordinateur portable, le type de
connexion (ADSL, Wifi) et la disponibilité d’une adresse email personnelle. Il
était demandé aussi aux étudiants s’ils consultaient des sites francophones

ou dans d’autres langues (anglophones, arabophones) pour la recherche de
ressources pédagogiques.
La deuxième partie du questionnaire portait sur la place et l’intérêt de
l’internet dans le cursus des études médicales, notamment en complément des
enseignements habituels organisés dans les trois facultés de médecine : la

recherche de ressources pédagogiques complémentaires aux ensei-gnements
facultaires, la qualité et la similarité des documents retrouvés sur le Web
comparés aux documents pédagogiques remis par les enseignants et leur
utilité pour la préparation des examens. Cette seconde partie évaluait aussi
l’intérêt de l’internet dans la préparation des examens de fin de deuxième cycle
pour l’accès aux filières de spécialités : les Épreuves Classantes Nationales
(ECN) en France et le Résidanat en Algérie et en Tunisie. Les difficultés pour
rechercher des ressources pédagogiques sur l’internet étaient aussi recueillies,
sous forme de catégories : manque de formation à l’utilisation de l’internet
dans ce contexte, insuffisance de personnes compétentes disponibles dans les
facultés pour aider les étudiants. Le coût d’accès à l’internet en tant que facteur
limitant était collecté. Le souhait de pouvoir échanger par email avec les
enseignants était aussi demandé.
La dernière partie du questionnaire concernait les trois dernières

recherches de ressources pédagogiques (cours et compléments de cours)
menées par les étudiants sur l’internet : le type de documents recherchés
(cours et polycopiés, recommandations et référentiels, cas cliniques, lectures
critiques d’articles, informations pratiques sur les études médicales, autres),
le mode d’accès (accès direct à une adresse URL ou via un moteur de
recherche), le temps estimé de recherche (en minutes) et le résultat de la
recherche, mesuré par la satisfaction de l’étudiant, notée à l’aide d’une
échelle de Lickert à 5 points (de 5 = très satisfait à 1 = très insatisfait).
Tous les résultats ont été exprimés en pourcentages, excepté l’âge, variable
quantitative exprimée sous forme de moyenne avec son écart-type (ET) et sa
médiane (M). Les variables qualitatives ont été comparées par le test de χ2,
l’âge par analyse de variance entre les trois facultés. Les données ont été
saisies sur Epi Info (6.0) et analysées sous Statview® (SAS, Institute Inc.).
Résultats
Au total, 569 étudiants ont été inclus dans l’étude : 300 à Batna, 182 à
Rouen et 87 à Sousse. Respectivement à Batna, Rouen et Sousse, le sexe
ratio homme-femme était de 0,35, 0,28 et 0,36 (p = 0,59) ; l’âge moyen était
de 21,8 ans (ET = 1,6, M = 22,0), 22,2 ans (ET = 1,7, M = 21,0) et 21,9 ans
(ET = 1,1, M = 22,0) (p < 10–4).
L’équipement informatique des étudiants dans les trois facultés est
présenté dans le tableau I. Pour la recherche de ressources pédagogiques,
les sites consultés étaient exclusivement francophones chez 87,0 % des
étudiants à Batna, chez 78,4 % des étudiants à Rouen et chez 70,1 % des
étudiants à Sousse (p = 0,001). L’intérêt des étudiants pour la recherche de
ressources pédagogiques sur l’internet et la préparation des examens
nationaux (ECN, Résidanat) pour l’accès au troisième cycle sont présentés
dans le tableau I. Près de 80 % des étudiants utilisaient l’internet pour la

recherche de ressources pédagogiques, sans différence significative entre les
trois facultés.
Au total, 1 288 recherches de cours et compléments de cours sur l’internet
ont été analysées dans notre étude, dont 752 recherches (58,4 %) à Batna,
360 (27,9 %) à Rouen et 176 (13,7 %) à Sousse. Des documents de type

polycopiés ont été recherchés par un étudiant sur deux à Rouen, et par près
de un étudiant sur quatre à Batna et Sousse. La recherche d’informations sur
les cursus des études médicales a concerné plus de 20 % des étudiants de
Batna et Sousse, seulement 7 % des étudiants de Rouen (tableau II). Un
moteur de recherche a été utilisé dans 72,9 % des recherches chez les
étudiants de Batna, dans 74,3 % à Rouen et 64,8 % des recherches à Sousse
(p = 0,07). Pour une recherche, le temps moyen estimé était de 61,9 minutes
(ET = 65,9 ; M = 60,0) à Batna, 26,3 minutes (ET = 30,2 ; M = 20,0) à Rouen
et 42,6 minutes (ET = 51,0 ; M = 30,0) à Sousse (p < 10–4). Pour ces trois
dernières recherches, le jugement de la réussite par les étudiants est
présenté dans la figure 1. Il a été estimé satisfaisant et très satisfaisant chez
58,9 % des étudiants à Batna, chez 61,1 % des étudiants à Rouen et chez
43,5 % des étudiants à Sousse (p < 10–4).
100
26,6
80 41,7 40,9
16,9
60 Très satisfaisant
Satisfaisant
% 17,2 Moyennement satisfaisant
25,2 19,5
Peu satisfaisant
40
Très peu satisfaisant
22,6
23,4
20 22,7
8,4
10,1 8,8 13,6

0 2,4
Batna Rouen Sousse
Figure 1 : Satisfaction des étudiants sur les trois dernières recherches faites sur l’internet chez
les 569 étudiants en médecine à Batna (Algérie), Rouen (Rouen) et Sousse (Tunisie) en 2008
(N = 1 288).
Tableau I : Description des équipements informatiques et opinion des étudiants sur l’intérêt de
l’internet en complément de la formation facultaire, pour la préparation des examens d’accès
au 3e cycle et les difficultés de recherche sur Internet à Batna, Rouen et Sousse en 2008 (les
résultats sont exprimés en pourcentages) (N = 569)
Batna Rouen Sousse

p
(n = 300) (n = 182) (n = 87)
Équipement des étudiants
Posséder un ordinateur personnel 58,7 82,3 82,7 < 10–4

Posséder un ordinateur portable 7,3 72,5 36,8 < 10–4
Avoir une adresse email 51,8 98,9 64,4 < 10–4
Avoir une connexion ADSL 50,0 93,3 54,0 < 10–4
Avoir une connexion WiFi 3,0 60,9 20,7 < 10–4
Internet dans le cursus des études médicales

Utilisation pour la recherche de ressources 81,1 76,0 77,0 0,37
pédagogiques
Similarités des ressources trouvées avec 52,7 76,6 50,6 < 10–4
les enseignements facultaires
Qualité des documents retrouvés sur l’internet 56,0 56,8 61,0 0,72
Utilité des ressources pour la préparation des examens 39,7 58,5 48,3 0,001
facultaires
Préparation des examens d’accès au 3e cycle
(ECN, Résidanat)
Internet est une ressource importante 81,0 81,8 74,7 0,36
Internet est une aide plus utile que les livres 44,5 9,5 27,6 < 10–4
spécifiques d’aide à la préparation
Tableau I : Description des équipements informatiques et opinion des étudiants sur l’intérêt de
l’internet en complément de la formation facultaire, pour la préparation des examens d’accès
au 3e cycle et les difficultés de recherche sur Internet à Batna, Rouen et Sousse en 2008 (les
résultats sont exprimés en pourcentages) (N = 569)
Batna Rouen Sousse

p
(n = 300) (n = 182) (n = 87)
Difficultés liées à l’utilisation de l’internet
Manque de formations 47,0 16,3 44,9 < 10–4
Manque des personnes compétentes 83,9 46,7 71,3 < 10–4
Manque de conseils 74,5 65,7 70,1 0,12
Coût financier excessif 59,9 48,8 54,0 0,06
Souhait de communiquer par email avec les enseignants 79,9 85,8 70,1 0,01
Tableau II : Objet des trois dernières recherches de ressources pédagogiques faites sur
l’internet chez les 569 étudiants en médecine à Batna (Algérie), Rouen (Rouen) et Sousse
(Tunisie) en 2008 (les résultats sont exprimés en pourcentages) (N = 1 288)
Batna Rouen Sousse

p
(n = 752) (n = 360) (n = 176)
Cours 26,6 52,0 24,0 < 10–4
Recommandations 4,9 6,9 3,6 0,21
Cas cliniques 18,5 13,2 31,7 < 10–4
Lecture critique d’article 7,4 3,7 5,4 0,06
Informations pratiques sur les études 23,5 7,4 21,0 < 10–4
Autres 19,0 16,7 14,4 0,34
Discussion

Dans les trois facultés, l’accès des étudiants en médecine à l’internet est
élevé, près de huit étudiants sur 10 utilisent l’internet comme un outil de
recherche de ressources pédagogiques complémentaires dans un contexte
d’apprentissage. Les étudiants considèrent le Web comme une ressource
importante, faisant de l’internet un outil à part entière dans la formation en

médecine, complémentaire des enseignements, qu’ils soient à la faculté ou à
l’hôpital en stage hospitalier. Même si la disponibilité de l’outil informatique
est encore inégale entre les trois facultés, étendue à Rouen et à Sousse, plus
restreinte à Batna, le recours à l’internet a pris une place importante en tant
que ressource de connaissances.
Notre travail présente deux limites importantes. D’une part, l’exhaustivité de
notre étude varie selon les trois facultés, elle est de l’ordre de 90 % à Batna,
62 % à Rouen et 70 % à Sousse. L’effectif total de notre échantillon est
important, compte tenu de l’homogénéité des résultats par faculté, il peut être
considéré comme représentatif de la population des étudiants. Les cours
n’étant pas obligatoires, on peut faire l’hypothèse que les étudiants les plus
assidus assisteraient au cours. Leur utilisation de l’internet peut s’avérer soit
forte pour la recherche de ressources complémentaires aux cours, soit au

contraire faible du fait de connaissances acquises lors des enseignements
présentiels. De plus, il est important de placer ces résultats dans une
perspective d’utilisation de l’internet par les étudiants à un moment donné et
la représentation est limitée, car évolutive dans le temps. Notre étude peut
constituer un point de repère pour les trois facultés de médecine : – d’un point
de vue local, la description de la situation actuelle pourrait amener à des
améliorations par les autorités facultaires ; – d’un point de vue national, les
trois facultés sont certainement représentatives, par leur taille et le profil des
étudiants inscrits, des facultés dans leurs trois pays respectifs, les résultats
pourraient leur être aussi utiles. Par ailleurs, ce type d’étude, renouvelable
dans le temps, peut être aussi utilisé pour suivre les évolutions et les directions
possibles de développement dans une faculté [21]. Une seconde limite est
l’utilisation d’un auto-questionnaire, avec un biais possible de déclaration. La
qualité des informations collectées a été jugée satisfaisante, nous n’avons pas
supprimé de questionnaires complétés de façon aberrante, nous avons aussi
très peu supprimé de questions mal remplies.
L’équipement informatique est dans l’ensemble élevé, similaire à Rouen et
à Sousse, puisque plus de 80 % des étudiants possédaient un ordinateur
personnel, surtout un ordinateur portable à Rouen ; la possession d’un
ordinateur personnel est un peu plus faible à Batna. Nos résultats sont
différents de ceux retrouvés dans la littérature. Peu d’études ont été
conduites en France, et pas d’étude récente, ont permis de suivre les
évolutions dans un contexte où les progrès technologiques et pédagogiques
sont rapides. Dans une étude conduite en 2005 chez 361 étudiants à
Strasbourg, Becmeur et al. [2] ont montré qu’un étudiant sur deux ne
possédait pas d’ordinateur personnel, 72 % des étudiants avaient une
connexion haut débit, ce qui montre un développement rapide de ce type de
connexion, qui équipe 93 % des étudiants de Rouen et plus de 50 % des
étudiants de Batna et Sousse. Par contre dans notre travail, la différence
d’accès au Wifi est nettement plus marquée entre les trois villes.
En Belgique en 2000, chez 330 étudiants en médecine, Reading et al. ont

rapporté que 54 % des étudiants avaient accès à l’internet [21] ; 74 % dans
l’étude de Ricard et al. à Paris en 2004 [22]. Au Danemark entre 1998 et 2002,
parmi une population de 1 150 étudiants en médecine, 72 % avaient un
ordinateur et 80 % utilisaient régulièrement l’internet, 90 % avaient une
adresse mail [5]. Dans une étude conduite chez 1 160 étudiants à Vienne en
2004, 74 % des étudiants possédaient un ordinateur personnel, plus de 97 %
avaient accès à l’internet, dont 49 % par ADSL [17]. En Afrique sub-
saharienne, l’utilisation de l’internet était élevée chez les étudiants en
profession de santé dans deux études : 72 % en Tanzanie [24], 76 % au
Nigeria [1], mais plus de 90 % de ces étudiants ne possédaient pas
d’ordinateur personnel, l’accès à l’internet se faisant dans les bibliothèques
universitaires ou dans des cybercafés. Dans une enquête réalisée auprès de
277 étudiants issus de différentes facultés en France en 2004, les étudiants
de lettres et de sciences humaines étaient moins familiers dans l’utilisation
de l’informatique que les étudiants des filières scientifiques. Les étudiants
littéraires présentaient un niveau d’anxiété face à la technologie plus
élevé [6]. Les auteurs ont aussi montré que les effets plus ou moins incitatifs
des cultures disciplinaires sur les conduites d’utilisation de l’internet
pouvaient être compensés par la qualité des infrastructures informatiques

disponibles sur le campus universitaire [6]. En 2005, une étude conduite à
l’Université de Montréal auprès de 7 555 étudiants a montré que les TIC
favorisaient la concentration, l’écoute active et la prise de notes [3].
Comparée à la population générale, l’utilisation de l’internet est très forte
dans nos trois populations d’étudiants en médecine, surtout chez les
étudiants de Batna et Sousse. L’Algérie compte 3,5 millions d’utilisateurs,
avec un taux de pénétration de 10,4 %. La France compte plus de 40 millions
d’utilisateurs, avec un taux de pénétration de 62,7 %. En Tunisie, un taux de
pénétration de 26,7 % pour près de 2,8 millions d’utilisateurs [13]. L’utili-
sation de l’internet est élevée, puisqu’elle concerne près de 80 % des
étudiants dans nos trois populations. Ce recours élevé peut s’expliquer par
différentes raisons. La pénétration de l’internet est plus forte chez les jeunes
comparée à la population générale (qui inclut des personnes plus âgées). La
population d’étudiants en médecine est généralement issue de milieux socio-
économiquement élevés [16], où la disponibilité de l’internet est plus
grande [7]. Mais aussi le développement des TIC dans le domaine de la for-
mation médicale initiale, comme par exemple l’enseignement de l’anatomie
adaptée aux progrès de l’imagerie, l’apparition de très nombreux sites Web
consacrés à la formation (initiale et continue) ces dernières années [4].
L’internet est un outil généralisé largement utilisé par les étudiants, le
recours à l’internet se fait en routine, il est aussi comme un outil
complémentaire aux méthodes et supports d’enseignement habituels dans les
facultés [19, 25]. Néanmoins, près de un étudiant sur deux à Batna et à Sousse
déclare avoir des difficultés à utiliser l’internet par un manque de compétences
et de formation adaptée. La demande de conseils, formation et de tutorat est
très forte dans ces deux populations. Les temps de recherche sont très longs,
plus de 60 minutes à Batna et plus de 42 minutes à Sousse en moyenne pour
un seul document recherché. Même en tenant compte des différences d’accès
au haut débit dans les trois pays, un apprentissage et l’acquisition d’habiletés
devraient permettre de réduire les pertes de temps liées à l’utilisation du Web

pour la recherche de ressources pédagogiques. Chez les étudiants rouennais,
la situation est sensiblement différente : seulement 16 % ont exprimé un
besoin de formation, ce résultat pouvant être expliqué en partie par
l’organisation d’un enseignement facultaire d’informatique médicale au début
du 2e cycle des études et l’acquisition de compétences, même si cet

enseignement n’est pas seulement ciblé sur la recherche de documents en
ligne. Par contre, près de deux tiers des étudiants de Rouen ont souhaité avoir
des conseils, résultats similaires à Batna et Sousse, comme si cet
enseignement d’informatique médicale devait être poursuivi, peut-être plus
ciblé sur l’utilisation de l’internet, comme outil de recherche de ressources
pédagogiques en médecine. Dans les trois facultés, les deux types de
documents les plus fréquemment recherchés sont les compléments de cours et
les cas cliniques en ligne, résultats similaires à ceux retrouvés par Ricard et al.
à Paris et Healy et al. à Dublin [11, 22]. Ce résultat souligne une stratégie
pragmatique des étudiants, les contrôles de connaissances dans le 2e cycle à
la faculté, mais aussi pour les examens nationaux (ECN, résidanat), portent
essentiellement sur des dossiers cliniques et des connaissances théoriques
(questions rédactionnelles, QROC, QCM).
Dans notre étude, plus des trois-quarts des étudiants souhaitent une
interaction directe avec leurs enseignants par l’intermédiaire d’échanges
d’emails pour pouvoir poser des questions après un enseignement, obtenir
des ressources complémentaires, voire établir un tutorat actif avec les
enseignants [5, 12, 21, 22]. Mais pour les enseignants, recevoir une série
d’emails quotidiennement provoquerait rapidement une gestion impossible
et une saturation. L’organisation de forums et de « chats » pourrait être une
solution. Du côté étudiant, l’interactivité et l’intérêt pédagogique seraient
forts, grâce aux questions et réponses immédiates. Du côté enseignant, une
gestion plus facile, plus rapide permettrait aussi d’un point de vue
pédagogique, de renforcer et d’insister sur des notions mal comprises ou
insuffisamment acquises lors des enseignements présentiels ou travaux
dirigés, aboutissant à un retour post enseignement, qui pourrait être
considéré comme une évaluation utile des enseignements par l’enseignant.
En conclusion, même si la disponibilité de l’internet est encore inégale
parmi les étudiants en médecine à Batna, Rouen et Sousse, il occupe
aujourd’hui une place importante en tant que ressources de connaissances.
L’internet est devenu un outil largement généralisé et communément utilisé
chez les étudiants. Néanmoins, il s’avère important de conseiller et de guider
les étudiants à travers les informations médicales multiples et de qualité
variable retrouvées sur l’internet. Cette fonction de facilitation vers une
nouvelle source de savoir est de la responsabilité des enseignants [4, 19].
Des recherches complémentaires sont aujourd’hui nécessaires pour évaluer
la place des ressources issues de l’internet dans l’organisation des
connaissances, des apprentissages et des raisonnements cliniques [28].
REMERCIEMENTS
Nous remercions les étudiants en médecine de Batna, Rouen et Sousse qui ont accepté avec
gentillesse de participer à cette étude.
Ce travail a été présenté en partie à la conférence Internet et Pédagogie Médicale, Marrakech

(Maroc), 2-4 novembre 2008.
BIBLIOGRAPHIE
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poor setting. Afr Health Sci 2008;8:40-3.
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communication par les étudiants en quatrième année d’études de médecine à la faculté de Strasbourg
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BATNA (ALGÉRIE), ROUEN (FRANCE) ET SOUSSE (TUNISIE)

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2010/6 Vol. 22 | pages 637 à 646

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questions pratiques se posent aussi autour de la place de l’internet chez les

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enseignements habituels organisés dans les trois facultés de médecine : la

La dernière partie du questionnaire concernait les trois dernières

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360 (27,9 %) à Rouen et 176 (13,7 %) à Sousse. Des documents de type

10,1 8,8 13,6

Batna Rouen Sousse

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Internet dans le cursus des études médicales

Batna Rouen Sousse

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importante, faisant de l’internet un outil à part entière dans la formation en

forte pour la recherche de ressources complémentaires aux cours, soit au

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pouvaient être compensés par la qualité des infrastructures informatiques

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du 2e cycle des études et l’acquisition de compétences, même si cet

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