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Thierry Percy
Enfin, je tiens à remercier mes parents, qui m’ont soutenue tout au long de
l’élaboration de ce mémoire.
I.
II.
Introduction ................................................................................................................................ 1
Partie 1 : Contexte : les fintechs ................................................................................................. 3
1.1. Définition ......................................................................................................................... 3
1.2. Facteurs de développement du phénomène ..................................................................... 4
1.2.1. Baisse de l’offre de crédits bancaires aux PME ........................................................ 5
1.2.2. Hausse de l’offre d’épargne ...................................................................................... 7
1.2.3. Internet et les nouvelles technologies ....................................................................... 8
1.2.4. Capital humain .......................................................................................................... 8
1.2.5. Démographie ............................................................................................................. 9
1.3. Typologie ......................................................................................................................... 9
1.3.1. Le crowdfunding ..................................................................................................... 10
1.3.2. Le prêt en peer-to-peer ........................................................................................... 11
1.3.3. Le merchant finance ............................................................................................... 11
1.3.4. Le financement des échanges commerciaux ........................................................... 12
1.4. Financement des créances commerciales ...................................................................... 12
1.4.1. Financement traditionnel ........................................................................................ 13
a) Définition et fonctionnement .................................................................................... 13
b) Le marché du factoring en Belgique ......................................................................... 16
c) Le factoring inversé .................................................................................................. 18
1.4.2. Financement via des plateformes en ligne .............................................................. 19
Partie 2 : Etudes existantes ....................................................................................................... 23
2.1. Le marché du financement alternatif ............................................................................. 23
2.1.1. Marché global ......................................................................................................... 23
2.1.2. Marché européen ..................................................................................................... 24
2.2. Evaluations de l’impact des fintechs sur les banques .................................................... 27
2.2.1. Menace versus opportunité ..................................................................................... 27
2.2.2. Réponses stratégiques et formes de collaboration .................................................. 36
2.3. Evaluations de l’impact des fintechs sur les entreprises financées................................ 44
2.4. Conclusions ................................................................................................................... 46
Partie 3 : Etude empirique ........................................................................................................ 47
3.1. Objectifs......................................................................................................................... 47
III.
Introduction
L’objectif de ce mémoire est de déterminer l’impact des fintechs, plus précisément des
nouvelles formes de financement des créances commerciales qu’elles proposent, sur les
banques. La question de recherche est la suivante : quel est l’impact sur les banques du
développement de fintechs sur le marché du financement de créances commerciales ? Il
s’agira de déterminer si les fintechs représentent une menace ou une opportunité pour les
banques et leurs activités de factoring. Les réponses stratégiques que les banques doivent
mettre en place face à l’arrivée de ces nouveaux acteurs sur le marché du financement des
créances commerciales seront également étudiées.
fintechs. La deuxième partie est consacrée à la présentation d’études sur les fintechs. Des
chiffres ainsi que les tendances du marché du financement alternatif sont d’abord présentés.
Le cœur de cette partie est constitué par la présentation d’études analysant l’impact des
fintechs sur les banques. L’impact de ces nouveaux acteurs sur les entreprises financées est
également brièvement abordé. Cette partie se clôture en exposant quelques hypothèses
théoriques issues des études présentées qui pourront être testées empiriquement via les
interviews des banques et des fintechs. La troisième et dernière partie de ce mémoire est
consacrée à l’analyse de ces interviews et constitue donc l’étude empirique. Elle présente
d’abord les objectifs de cette étude, la méthodologie utilisée et les acteurs rencontrés. Ensuite,
les sections centrales de cette troisième partie sont l’analyse des interviews et la discussion
des résultats de cette analyse. Enfin, pour clôturer ce mémoire, la conclusion résume les
principaux axes de ce travail et les résultats de l’étude empirique.
3.
Cette première partie est consacrée à l’analyse du contexte dans lequel s’inscrivent les
nouvelles formes de financement des créances commerciales. La première section définit le
concept de Fintech. La deuxième section présente les facteurs qui ont contribué à l’émergence
des fintechs. La troisième section fournit une typologie des diverses solutions de financement
proposées par les fintechs. Enfin, la quatrième section expose le financement des créances
commerciales dans sa forme traditionnelle, d’une part, et dans sa forme nouvelle telle que
proposée par les fintechs, d’autre part.
1.1. Définition
Bien que le mot Fintech soit utilisé depuis plus de 40 ans, il n’a actuellement pas de
définition communément acceptée (Schueffel, 2016). De plus, d’après Google, l’expression
« what is fintech » représente la cinquième requête la plus fréquente associée au terme Fintech
au cours des cinq dernières années (Google, 2017). C’est ce constat qui a motivé Schueffel
(2016) à réaliser une étude dont l’objectif est de fournir une définition du terme Fintech qui
soit acceptée tant par les théoriciens que par les praticiens. L’auteur a pour ce faire recherché
tous les articles scientifiques existants mentionnant le terme Fintech et a réalisé une analyse
sémantique des définitions proposées afin d’en faire ressortir les points communs. Sa
recherche a débouché sur plus de 200 articles scientifiques mentionnant le terme Fintech, dont
13 en fournissent une définition1. Sur base de son analyse sémantique, l’auteur introduit la
définition suivante : « La Fintech est une nouvelle industrie financière qui applique la
technologie pour améliorer les activités financières » (Schueffel, 2016, p. 45). Comme le
souligne l’auteur, une définition n’est jamais bonne ou mauvaise mais peut être plus ou moins
adaptée au contexte considéré et est également susceptible de changer avec le temps.
1
Notons que l’étude de Schueffel (2016) se concentre uniquement sur la littérature anglophone et exclut donc
toute définition du terme Fintech proposée dans une autre langue que l’anglais.
4.
Une autre définition intéressante est proposée par le forum économique mondial,
d’après lequel Fintech désigne « l’utilisation de la technologie et de business models
innovants dans les services financiers » (Drummer, Koenitzer, Stein, Tufano, & Ventura,
2015, p. 3). Il s’agit de nouvelles solutions de financement qui s’appuient sur des innovations
technologiques. Aussi qualifiées de non-banking (Le Pendeven & Mariage, 2015), ces
solutions se caractérisent par la désintermédiation financière (Drummer et al., 2015). En effet,
les prêteurs et emprunteurs sont directement mis en relation, le plus souvent via une
plateforme en ligne. Alors que le rôle d’intermédiaire financier joué par les banques tend à se
détériorer (voir section 1.2.), Internet permet de rassembler de nombreuses personnes en un
lieu virtuel, les plateformes, afin de se faire rencontrer une offre et une demande (Le
Pendeven & Mariage, 2015). Les fintechs se distinguent aussi du système bancaire
traditionnel par leur absence d’effet levier sur les capitaux propres : 1€ de capitaux propres
pourra être utilisé pour faire un prêt ou un investissement d’un montant maximum de 1€ (Le
Pendeven & Mariage, 2015). Une conséquence importante de cette caractéristique est que les
fintechs permettent d’investir dans des projets plus risqués, sans craindre de perdre plus que le
montant investi, contrairement aux banques.
Enfin, notons qu’une distinction peut être faite entre « Fintech » et « une fintech ».
Comme l’indique Schueffel (2016), la différence dépend du niveau d’analyse considéré : sans
déterminant, il s’agit de l’industrie, tandis qu’avec le déterminant, il s’agit d’un acteur de
l’industrie (entreprise, start-up).
services financiers. C’est l’avènement de la Fintech 3.0, ère sur laquelle se penche ce
mémoire.
Les fintechs telles que nous les connaissons aujourd’hui ont donc commencé à se
développer après la crise de 2007-2008. Comme nous le verrons dans cette section, la crise est
un élément déclencheur de ce phénomène mais il existe d’autres facteurs expliquant son
développement. Ceux-ci sont exposés dans ce qui suit.
Cortet et al. (2013) identifient trois caractéristiques qui rendent le financement des
PME risqué pour les banques et autres prêteurs. Premièrement, il est difficile d’établir un
profil de risque d’une PME en raison du manque d’information de qualité quant à sa
solvabilité. On peut parler ici d’asymétrie d’information, comme le soulignent Drummer et al.
(2015). Deuxièmement, les provisions pour le risque sont élevées, ce qui représente un coût
important par rapport au montant financé. Troisièmement, il y a un manque d’infrastructures
permettant d’avoir une vision en temps réel de la santé financière des PME. Ce risque élevé
que représente le financement des PME est souvent supérieur à l’appétit pour le risque des
banques, ce qui explique leur réticence à leur octroyer des crédits (Drummer et al., 2015).
De plus, bien que la politique de taux bas adoptée par la Banque centrale européenne
après 2008 ait permis aux banques d’augmenter leur offre de crédits, cette hausse s’est
2
La politique micro-prudentielle concerne les régulations au niveau des banques tandis que la politique macro-
prudentielle concerne les régulations au niveau du système bancaire et financier dans son ensemble (Basel
Committee on Banking Supervision, 2010). La première est centrée sur les risques individuels tandis que la
deuxième est centrée sur les risques systémiques.
6.
produite au détriment des entreprises les plus risquées qui ont été plus impactées que les
autres par le durcissement des conditions d’obtention de crédits suite à la crise (Block,
Colombo, Cumming et Vismara, 2017 ; Le Pendeven & Mariage, 2015). La figure 1.1 ci-
dessous illustre l’évolution de la perception de la contrainte de crédit par les entreprises entre
2008 et aujourd’hui. Les données utilisées proviennent de l’enquête trimestrielle sur
l’appréciation des conditions de crédit réalisée par la Banque nationale de Belgique.
L’indicateur utilisé correspond au « pourcentage d'entreprises qui considèrent les conditions
de crédit actuelles comme défavorables » (Banque nationale de Belgique, 2017).
Figure 1.1 : Pourcentage d’entreprises considérant les conditions de crédit actuelles comme
défavorables, selon la taille de l’entreprise, au cours de la période 2008-2017 (données
trimestrielles)
60
50
40
% 30
20
10
Source : graphique réalisé sur base de données provenant de la Banque nationale de Belgique (2017)
baisse du niveau de l’indicateur au cours des trimestres qui suivent est plus marquée pour les
moyennes et grandes entreprises tandis qu’elle est moins prononcée pour les petites et très
grandes entreprises. A partir de 2010, la perception de la contrainte de crédit s’améliore pour
toutes les entreprises. Cependant, durant le restant de la période, le pourcentage d’entreprises
considérant les conditions de crédit comme défavorables est presque systématiquement
supérieur pour les entreprises de petite taille par rapport aux autres tailles d’entreprises. Ceci
confirme donc la plus grande difficulté rencontrée par les petites entreprises de se financer par
crédit bancaire suite à la crise.
Il est important de noter, comme le souligne Davis (2011), que la réduction de l’offre
de crédit bancaire aux PME suite à la crise était en partie inévitable et peut être considérée
comme un retour à la normale. En effet, au cours des années qui ont précédé la crise de 2007-
2008, les conditions de crédit étaient anormalement favorables car nous étions au cœur d’une
bulle de crédit.
Parallèlement à cette baisse de l’offre de crédit des banques aux PME, la crise
financière a eu pour effet d’entrainer une hausse de l’offre d’épargne et donc des liquidités
disponibles (Le Pendeven & Mariage, 2015). En effet, tant les investisseurs que les
entreprises sont à la recherche de nouveaux placements pour leurs liquidités et trésorerie. Cela
s’explique notamment par le fait que la crise a généré un sentiment de méfiance générale vis-
à-vis des banques et institutions financières (Dietz, Khanna, Olanrewaju, & Rajgopal, 2015 ;
Le Pendeven & Mariage, 2015) mais également par le fait d’une incertitude quant aux futures
perspectives économiques (Davis, 2011 ; Le Pendeven & Mariage, 2015). Face à cette
incertitude, de nombreuses (petites) entreprises remboursent leurs prêts bancaires et
augmentent leurs liquidités afin de limiter les risques liés à des changements défavorables
dans les conditions de remboursement ou d’obtention de crédit (Davis, 2011).
8.
De plus, la baisse des taux d’intérêt par les banques centrales suite à la crise a détourné
les investisseurs des obligations car leur rendement a diminué (Block et al., 2017). Cela les a
donc poussés à se diriger vers d’autres opportunités d’investissement, présentant une
rentabilité plus élevée, notamment les fintechs (tant pour leur propre financement que pour le
financement de leurs entreprises clientes).
Comme nous venons de le voir, suite à la crise, nous sommes dans une situation où,
d’une part, les PME ont difficilement accès à un financement auprès des banques et, d’autre
part, des sources de financement existent et cherchent une alternative aux placements
bancaires. Il existe donc à la fois une demande et une offre de financement, toutes deux
insatisfaites des banques et du système financier classique. Cela représente une opportunité
pour que se développent des structures permettant de se faire rencontrer cette offre et cette
demande. C’est cette opportunité qu’ont saisie les fintechs et ce, grâce à « la puissance
d’Internet et l’efficacité des nouvelles technologies pour rassembler toutes les offres et
demandes en un même lieu » (Le Pendeven & Mariage, 2015, p. 13). De plus, le
développement de fintechs a été facilité par une baisse importante du coût de la capacité
informatique qui permet de traiter la masse de données désormais disponibles (Dietz et al.,
2015). En effet, comme le rapportent Dietz et al. (2015) sur la base d’un témoignage d’un
entrepreneur, une fintech peut aujourd’hui être développée en utilisant le cloud public et ne
nécessite plus un lourd investissement dans des serveurs informatiques.
Arner et al. (2015) expliquent cette fuite de capital humain par le fait que de nombreux
professionnels de la finance ont perdu leur emploi suite à la crise de 2007-2008 ou ont vu
9.
leurs conditions salariales se dégrader. Ils ont donc vu la Fintech comme une opportunité
d’appliquer leurs compétences à un nouveau secteur. Ces auteurs ajoutent que les jeunes
diplômés d’aujourd’hui constituent également une main d’œuvre disponible et adéquate pour
les fintechs. En effet, ces derniers sont très qualifiés et font face à un marché du travail dans
lequel il est difficile de trouver un emploi.
1.2.5. Démographie
1.3. Typologie
Cette section propose une typologie des diverses solutions de financement offertes par
les fintechs. Une attention privilégiée est ici portée sur le financement des entreprises et plus
particulièrement des PME.
Comme l’illustre la figure 1.2 ci-dessous, les fintechs offrent des solutions de
financement ciblant diverses parties du bilan. Au passif, les capitaux propres peuvent être
financés grâce au crowdfunding. Les dettes à court terme peuvent être financées grâce aux
solutions de prêt en peer-to-peer, de merchant finance et de financement des échanges
commerciaux (trade finance). Le prêt en peer-to-peer permet également de financer des dettes
à long terme. A l’actif, les créances commerciales peuvent être financées grâce au
financement de factures (appelé factoring) et au financement de la supply chain (aussi appelé
factoring inversé). Ces différentes formes de financement offertes par les fintechs sont
brièvement détaillées dans les points qui suivent. Le financement des créances commerciales,
objet de ce mémoire, sera développé de manière plus détaillée dans la section 1.4.
10.
1.3.1. Le crowdfunding
Block et al. (2017) identifient quatre formes de crowdfunding, selon que celui-ci soit
basé sur la récompense, sur le don, sur le prêt ou sur l’investissement (en fonds propres).
Dans la première forme de crowdfunding, tant des particuliers que des entreprises peuvent
demander un financement pour leur projet et la récompense accordée aux apporteurs de fonds
peut prendre différentes formes (un produit ou un service, l’invitation à des évènements liés
au projet financé...). Pour le crowdfunding basé sur le don, ce sont des particuliers ou des
organisations non gouvernementales qui recherchent des fonds en vue de financer un projet à
caractère social. Le crowdfunding basé sur le prêt comprend notamment le prêt en peer-to-
peer et le financement de factures. Ces deux formes de financement peuvent être considérées
comme des formes de financement à part entière et seront présentées dans les sections qui
suivent. Enfin, le crowdfunding basé sur l’investissement en fonds propres permet à une
entreprise de vendre des parts dans ses capitaux propres à des investisseurs.
11.
Le prêt en peer-to-peer, aussi appelé prêt sur place de marché (marketplace lending),
consiste à « prêter de l’argent à des emprunteurs sans passer par un intermédiaire financier
traditionnel tel qu’une banque » (Drummer et al., 2015, p. 12). Ces prêts passent par une
plateforme sur Internet.
Une distinction peut également être faite entre les types de produits de crédit qui sont
offerts par ces plateformes (Drummer et al., 2015). Le prêt à terme est un prêt le plus souvent
sans garantie, d’une durée de 3 à 18 mois. La ligne de crédit renouvelable est un produit de
crédit flexible approprié pour les besoins en fonds de roulement. L’avance de fonds au
commerçant (merchant cash advance) consiste à avancer une certaine somme à une entreprise
en fonction de ses prédictions de ventes futures (Tozzi, 2009). La plateforme prélève ensuite
un pourcentage sur les payements quotidiens par carte de crédit des clients de l’entreprise.
Les investisseurs sur ces plateformes de prêt en peer-to-peer sont principalement des
investisseurs institutionnels, dont l’appétit pour le risque est plus élevé que les investisseurs
particuliers (Drummer et al., 2015).
Notons que cette solution de financement existe également pour les prêts aux
particuliers.
Les solutions des fintechs ciblant le financement des échanges commerciaux (trade
finance en anglais) permettent aux PME de vendre leurs marchandises sur les marchés
internationaux. Il s’agit souvent d’une activité risquée, particulièrement pour les PME, car il
s’écoule généralement quelques semaines, voire mois, entre le moment où la marchandise est
commandée et le moment où elle est livrée (Drummer et al, 2015). La gestion de ce risque
peut se faire soit par les partenaires commerciaux eux-mêmes, via des transactions ouvertes
(open account transaction)3 ou des transactions payées à l’avance (cash-in-advance
transaction)4, soit par les banques, via des lettres de crédit 5 ou une assurance crédit. Les PME
ne disposent souvent pas des moyens financiers leur permettant de se protéger elles-mêmes
contre le risque associé aux échanges commerciaux et elles se voient souvent refuser un
financement auprès des banques (Drummer et al., 2015). Des fintechs se sont donc
développées pour offrir une solution en ligne de financement des échanges commerciaux aux
PME et ainsi leur permettre d’être actives sur les marchés internationaux.
3
Dans une transaction ouverte, le vendeur supporte le risque en expédiant la marchandise avant d’en recevoir le
payement (Drummer et al., 2015).
4
Dans une transaction payée à l’avance, l’acheteur supporte le risque en payant la marchandise avant d’être livré
(Drummer et al., 2015).
5
« Une lettre de crédit est une lettre d’une banque garantissant que le payement d’un acheteur à un vendeur sera
reçu à temps et au bon montant. En cas d’incapacité de l’acheteur à payer, la banque devra couvrir le montant
total ou restant dû de l’achat. » (Investopedia, 2017).
13.
Comme cela a été mentionné dans la section 1.3, deux solutions existent pour financer
les créances commerciales : le financement de factures, appelé factoring, et le financement de
la supply chain, appelé factoring inversé. Le factoring est une forme de financement des
créances commerciales plus couramment utilisée que le factoring inversé. C’est sur cette
première solution de financement que se penche ce mémoire. Sa définition et son
fonctionnement sont tout d’abord présentés, suivis d’un aperçu du marché du factoring en
Belgique. Le factoring inversé est brièvement abordé dans le dernier point.
a) Définition et fonctionnement
Société de factoring
6 4 5
3
1
Débiteur (client du
Client (fournisseur)
fournisseur)
2
Source : adapté de Soufani (2002b)
14.
Une 7ème étape peut s’ajouter aux précédentes en cas de défaut de payement dans le chef du
débiteur (le client du fournisseur). Elle consistera pour le fournisseur à rembourser la société
de factoring. Nous verrons par la suite que le fournisseur ne supporte pas toujours le risque de
défaut de son client et que cela dépend du type de factoring choisi (avec ou sans recours).
On distingue le factoring avec recours du factoring sans recours (Klapper, 2006). Dans
le premier cas, la société de factoring a un droit de recours vis-à-vis de son client en cas de
15.
défaut de payement du débiteur. Cela signifie qu’elle pourra exiger de son client qu’il lui paye
la créance commerciale si le débiteur ne la paye pas lui-même. Dans le deuxième cas, la
société de factoring supporte la majeure partie du risque de défaut du débiteur car elle ne
dispose pas de ce droit de recours. Comme le souligne Klapper (2006), la formule la plus
souvent adoptée dans les pays développés est le factoring sans recours. A l’inverse, dans les
pays émergents, c’est le factoring avec recours qui domine et ce, en raison de la difficulté
d’évaluer la solvabilité des débiteurs. Notons que dans le cas du factoring sans recours, un
certain partage du risque de défaut entre la factor et son client existe. En effet, comme cela a
déjà été mentionné, la réserve que se constitue le factor en n’avançant pas 100% du montant
de la facture peut lui permettre de couvrir en partie le risque de défaut.
Il existe aussi une distinction entre le factoring avec et sans notification (Klapper,
2006). Le factoring avec notification signifie que la société de factoring informera le débiteur
que la créance commerciale lui a été cédée. En cas de factoring sans notification, le débiteur
n’aura pas connaissance de cette cession. Notons qu’en Belgique, la notification du débiteur
en cas de cession de créance commerciale est obligatoire (Code civil, article 1690, alinéa 2).
Soufani (2002b) souligne qu’il est important de distinguer deux types de sociétés de
factoring : celles qui sont détenues par des banques et celles qui sont indépendantes. Les
premières sont caractérisées par une grande taille (mesurée par le chiffre d’affaires et le
nombre d’employés) et elles représentent environ 93% du marché du factoring en termes de
chiffre d’affaires. Les deuxièmes sont plus petites et couvrent environ 7% du marché. Cette
différence de taille entre les deux types d’acteurs a un impact sur les clients qu’ils servent sur
16.
le marché. En effet, les petites sociétés de factoring tendent à offrir leurs services à des petites
entreprises, ayant un chiffre d’affaires peu élevé et un nombre limité de factures. Cela
s’explique par le fait que les petits factors ont des ressources limitées. Au contraire, les
grandes sociétés de factoring ont des ressources plus importantes, bénéficient d’économies
d’échelles ainsi que d’un accès à coût réduit à de nombreuses informations via leur banque
mère et peuvent donc servir de plus grands clients.
Le factoring (dans sa forme moderne) est né aux Etats-Unis à la fin du 19ème siècle
(EU Federation for the Factoring and Commercial Finance Industry [EUF], 2016). Cette
forme de financement était alors utilisée dans l’industrie textile. Elle s’est progressivement
diffusée en Europe où elle a connu un essor à partir des années 1960.
Comme l’illustre la figure 1.4 ci-dessous, le marché du factoring n’a cessé de croître
en Belgique au cours de ces dix dernières années. Le volume total de factoring est passé de
19,2 milliards d’euros en 2007 à 62,846 milliards d’euros en 2016. Cela représente une
croissance de 227% sur la période et de 14,38% en moyenne par an.
Figure 1.4 : Evolution du volume total de factoring (en milliards d’euros) en Belgique de
2007 à 2016
70
Volume de factoring en milliards d'euros
60
50
40
30
20
10
0
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016
volume total de factoring représentait 5,6% du PIB belge en 2007, il s’élève désormais (en
2016) à 14,9% du PIB. La Belgique est le deuxième pays européen présentant le plus grand
volume de factoring en pourcentage de son PIB. Elle se situe juste après Chypre (16,30% en
2016) et juste avant le Royaume-Uni (13,77% en 2016) (EUF, 2017). Sa part de marché sur le
marché européen du factoring s’élevait à 4,2% en 2016.
Figure 1.5 : Evolution du volume total de factoring en pourcentage du PIB de 2007 à 2016
16
14
Volume de factoring en % du PIB
12
10
0
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016
Source : graphique réalisé sur base de données provenant de EUF (2017) et de Eurostat (2017)
La croissance du factoring observée ces dernières années peut s’expliquer par les
changements réglementaires imposés par Bâle II et Bâle III (BNP Paribas Fortis, 2016b). En
effet, comme mentionné dans la section 1.2.1, ces réglementations ont exigé des banques
qu’elles aient plus de fonds propres pour couvrir le risque de leurs activités. Cela a eu pour
conséquence une diminution de l’offre de crédits au profit de l’offre de services de factoring,
les exigences de fonds propres liées à cette dernière étant moins élevées que celles liées à la
première. Ce basculement des prêts bancaires vers le factoring n’a pas seulement touché les
entreprises (clientes) les plus risquées mais également celles présentant une bonne solvabilité
(BNP Paribas Fortis, 2016b). Bien que les PME soient souvent perçues comme étant la
principale source de la croissance du marché du factoring (Soufani, 2002a), cette croissance
est également générée par les plus grandes entreprises qui voient dans le factoring une forme
avantageuse de financement.
c) Le factoring inversé
entreprises avec un bon score de solvabilité. Cette relation avec les petites entreprises
(fournisseurs) permettra à la banque de leur offrir d’autres produits. Troisièmement, la bonne
solvabilité du débiteur bénéficie également au fournisseur car il obtient un financement à un
taux intéressant qu’il n’aurait pas pu obtenir sans l’intermédiaire du débiteur (Fransoo et al.,
2013). De plus, alors que le factoring classique requiert d’évaluer le risque de crédit d’une
multitude de débiteurs, le factoring inversé repose sur l’évaluation du risque de crédit d’un
seul grand débiteur. Le factoring inversé s’avère donc plus approprié que le factoring pour
financer les créances commerciales dans les pays où il est difficile d’obtenir de l’information
quant au risque de crédit d’une entreprise (Klapper, 2006).
Depuis quelques années, des services de factoring sont offerts par de nouveaux acteurs
sur le marché : les fintechs. Celles-ci ont décelé le potentiel que représentent les PME et
utilisent la technologie et de nouveaux business models pour leur offrir une solution de
financement de leurs créances commerciales (Cortet et al., 2013). En effet, le factoring
traditionnel, offert par les banques, n’est souvent pas adapté aux PME car il nécessite un
engagement sur du long terme et sur un volume fixe et important de factures (Drummer et al.,
2015). Les plateformes en ligne rendent le financement des créances commerciales plus
facile, rapide et flexible. Les entreprises peuvent connecter leur logiciel comptable à la
plateforme et une fois qu’elles y sont reliées, elles peuvent demander le financement de
factures individuelles. Grâce à l’automatisation importante du processus de traitement de la
demande, le financement est perçu presque instantanément.
Cortet et al. (2013) identifient trois modèles de plateformes pour le financement des
créances commerciales : le programme de financement des créances commerciales initié par
l’acheteur, la passerelle de financement de la supply chain, et la plateforme d’escompte
dynamique.
Le premier modèle est centré sur l’acheteur, une entreprise de grande taille, qui est mis
en relation avec son fournisseur, généralement une PME, par l’intermédiaire d’une plateforme
de prêt à laquelle ils se connectent. La plateforme permet de financer les factures du
fournisseur qui ont été approuvées par l’acheteur. Il peut s’agir ici d’un modèle de
confirmation (de la facture par l’acheteur), c’est-à-dire de factoring, ou de factoring inversé
(reverse factoring). Ce modèle profite à toutes les parties concernées. En effet, l’acheteur a la
possibilité d’étendre son délai de payement, le prêteur gagne un intérêt sur le montant financé
20.
Le deuxième modèle consiste en une place de marché qui met en relation des
entreprises (fournisseurs) à la recherche d’un financement et des investisseurs à la recherche
d’un placement. Les fournisseurs et les investisseurs se connectent à cette plateforme et celle-
ci se charge d’associer offre et demande. Contrairement au premier modèle, la plateforme ne
finance pas elle-même la créance commerciale. Son avantage réside dans l’évaluation du
risque du fournisseur qu’elle réalise sur base de diverses données sophistiquées. Elle peut
donc fournir à l’investisseur des informations précises quant au profil de risque de
l’emprunteur. Ainsi, la décision de financement peut être prise plus rapidement et plus
facilement par l’investisseur, ce qui permet au fournisseur d’obtenir un financement presque
instantané de sa facture.
Tout comme les autres solutions de financement Fintech (présentées à la section 1.3),
les différentes solutions de financement des créances commerciales apportées par les fintechs
partagent trois caractéristiques : la désintermédiation, l’automatisation et l’importance de la
technologie (big data) (Le Pendeven & Mariage, 2015). En effet, grâce aux plateformes en
ligne, les prêteurs et emprunteurs sont directement mis en relation. De plus, l’automatisation
est importante et elle permet de réduire le coût du financement. Enfin, la technologie est
également très importante car elle permet d’analyser la masse de données désormais
disponibles et d’en ressortir une évaluation du risque plus objective. Les fintechs développent
en effet des algorithmes permettant d’évaluer le risque d’une entreprise sur base d’une
multitude de critères. Les banques, quant à elles, utilisent un nombre limité de critères pour
évaluer le risque. De plus, les critères qu’elles utilisent sont exclusivement financiers et donc
tournés ver le passé tandis que les critères utilisés par les fintechs sont davantage tournés vers
le futur. Par conséquent, les fintechs sont plus à même d’évaluer et donc de financer de jeunes
entreprises. Une meilleure évaluation du risque leur permet également de fixer un prix pour le
financement qui est plus adapté au niveau de risque. Bien que ce prix soit souvent plus élevé
que celui imposé par une banque, il est en phase avec la rentabilité attendue plus élevée.
Notons que les modèles d’évaluation du risque utilisés par les fintechs de financement de
créances commerciales tiennent aussi compte du comportement passé de leurs clients sur la
plateforme. En effet, une accumulation d’expériences positives avec un client
(remboursements sans problèmes) va permettre à la fintech de lui accorder un financement à
un tarif plus avantageux (Drummer et al., 2015).
Des modèles de financement de créances commerciales par des fintechs belges seront
présentés dans la partie 3 de ce mémoire.
22.
23.
Cette deuxième partie est consacrée à la présentation d’études sur les fintechs. La
première section présente quelques statistiques sur les fintechs et le marché du financement
alternatif qu’elles constituent. La deuxième section présente des études analysant l’impact des
fintechs sur les banques. La troisième section aborde brièvement l’impact des fintechs sur les
entreprises financées. La quatrième section conclut cette partie en mentionnant les éléments
théoriques importants à prendre en compte dans l’analyse empirique qui suivra.
Cette section est divisée en deux sous-sections. La première présente les tendances
globales du secteur des fintechs. La deuxième se penche sur l’Europe.
Figure 2.1 : Evolution des investissements en fintechs (en millions de dollars, axe de gauche)
et du nombre de transactions (axe de droite) de 2010 à 2015
Comme le notent Dickerson, Gagliardi & Skan (2016), l’année 2015 fut marquée par
l’entrée en bourse de plusieurs fintechs, telles que PayPal, certaines ayant une capitalisation
boursière supérieure à celle de nombreuses institutions financières traditionnelles. Les auteurs
ajoutent qu’il existe également 20 fintechs « licornes », c’est-à-dire des fintechs valorisées à
plus d’un milliard de dollars. D’après Williams-Grut (2016), ce nombre s’élèverait désormais
à 27. Cependant, comme le soulignent Dickerson et al. (2016), à côté de ces belles réussites,
certaines fintechs échouent, telles que Powa, fintech britannique active dans le payement
mobile et qui a fait faillite en 2016 après avoir atteint une valorisation de 2,7 milliards de
dollars en 2015. Bien que cela pourrait impacter négativement la confiance des investisseurs,
les auteurs constatent que les investissements en fintechs au cours du premier trimestre de
2016 ont connu une hausse de 47% par rapport à la même période en 2015.
6
Etant donné que cette étude est publiée en septembre, les chiffres de 2016 ne sont pas encore connus.
25.
l’Asie-Pacifique et les Etats-Unis pour l’Amérique. Les auteurs mentionnent également que la
Chine est le leader mondial du financement alternatif.
Il est intéressant de noter que la Belgique représente le plus grand marché en Europe
(hors Royaume-Uni) pour le financement de créances commerciales sur des plateformes en
ligne. Le volume total de transactions sur ces plateformes s’élevait en 2015 à 35 millions
d’euros. La Belgique est suivie par la France et le Danemark.
L’étude du Cambridge Centre for Alternative Finance révèle également que le volume
moyen de financement de créances commerciales est d’un peu plus de 44.000€ par transaction
en 2015 et que les entreprises financées sont principalement actives dans les secteurs de la
vente au détail et le commerce de gros, les services professionnels, ainsi que le secteur
manufacturier et l’ingénierie. En ce qui concerne le profil des investisseurs sur les plateformes
de financement de créances commerciales, les investisseurs institutionnels occupent une place
de plus en plus importante et représentaient 37% du volume total financé en 2015 (en Europe
hors Royaume-Uni). Les auteurs constatent une tendance à l’institutionnalisation en Europe
continentale, non seulement pour ce qui est du financement des clients des plateformes, mais
aussi pour ce qui est du financement des plateformes elles-mêmes.
En ce qui concerne les modèles de financement, le marché britannique est dominé par
le prêt en P2P aux particuliers, suivi par le prêt en P2P aux entreprises. Le financement de
créances commerciales arrive à la quatrième place avec £325 M de volume financé. Cela
correspond à un peu plus de 440 M€7, ce qui est largement supérieur aux 81 M€ de volume
total pour l’Europe hors Royaume-Uni. En revanche, le taux de croissance annuel moyen de
ce modèle de plateforme sur la période 2013-2015 fut nettement inférieur à celui de l’Europe
hors Royaume-Uni puisqu’il a été de 99% (contre 877% pour l’Europe).
Tout comme pour l’Europe et le reste du monde, le rôle joué par les investisseurs
institutionnels est de plus en plus important au Royaume-Uni.
Parmi les études présentées ci-dessous, beaucoup se penchent sur le financement par
prêt. Celui-ci est comparable au financement de créances commerciales dans le sens où il
remplit la même fonction de fournir des liquidités (McCarthy & Mills, 2016). Le financement
de créances commerciales peut donc être et est souvent considéré comme une sous-catégorie
de prêt dont la garantie est la facture client.
Plusieurs études se sont intéressées à l’impact des fintechs sur les banques. Pour
certaines, les fintechs menacent les banques et leurs revenus, pour d’autres, il s’agirait plutôt
7
Pour la conversion des livres sterlings en euros, le taux de change utilisé est celui du 31/12/2015, soit 1 livre
sterling = 1,3572 euros (Exchange-Rates.org, 2017).
28.
d’une opportunité. Dans tous les cas, les banques doivent réagir à l’arrivée des ces nouveaux
entrants sur le marché.
PwC (2017) a réalisé une étude dans laquelle elle a interrogé divers acteurs du secteur
financier, essentiellement des banques et des fintechs. Au total, 1308 personnes ont été
interrogées, principalement des CEO, responsables de département et responsables IT, dans
71 pays couvrant les 5 continents. Il ressort de cette étude que, parmi les banques et
institutions financières traditionnelles, près de 9 personnes interrogées sur 10 (88%) craignent
de voir leurs revenus diminuer et accaparés par les fintechs. PwC estime la perte à 24% des
revenus. Certains secteurs seraient plus touchés que d’autres, notamment les payements, les
transferts d’argent et la finance personnelle.
Dans une étude, McKinsey propose également une estimation de la perte potentielle de
revenus des banques suite à l’arrivée des fintechs sur le marché (Drummer, Jerenz, Siebelt &
Thaten, 2016). Elle estime que les banques pourraient perdre de 29 à 35% de leurs revenus
dans l’hypothèse où elles ne réagissent pas à l’arrivée des fintechs sur le marché. Cette perte
de revenus proviendrait d’une réduction des marges et d’une perte de clients. Cependant, si
elles opèrent une transformation digitale, l’impact sur leurs revenus peut être positif.
Drummer et al. (2016) affirment que les banques ont les moyens d’opérer cette
transformation. En effet, elles disposent d’une importante clientèle leur permettant de
bénéficier d’économies d’échelles sur leurs investissements dans des nouvelles solutions
digitales. Elles ont également suffisamment de fonds pouvant être investis dans de nouvelles
technologies ou dans des collaborations avec les fintechs. Enfin, elles bénéficient de leur
image de marque. Toutefois, certaines banques rencontrent des difficultés à répondre à la
concurrence des fintechs car elles ne sont pas centrées sur le client, ont des objectifs en conflit
avec celui d’innover, ou privilégient une stratégie globale plutôt que de mettre en place des
actions spécifiques.
Dans son étude, la banque internationale Citi (2016) compare la digitalisation que
connaît actuellement le secteur bancaire et financier avec la digitalisation qu’ont connue
d’autres industries telles que la musique, les vidéos, la réservation de voyages et la presse.
Dans ces autres industries, la digitalisation a causé une perte de 44% de part de marché en
29.
moyenne pour les acteurs traditionnels sur une période de 10 ans. Cela représente une perte de
revenus d’environ 30%. Citi (2016) a également pu constater que cette perte de part de
marché est relativement stable les premières années et s’accélère à partir de la quatrième
année suivant l’arrivée des nouveaux entrants sur le marché. Pour le moment, l’impact des
fintechs sur les parts de marché et les revenus des banques reste limité.
Dans leur article, McCarthy & Mills (2016) s’intéressent au prêt aux petites
entreprises et considèrent que le marché a désormais évolué vers une deuxième phase suite à
l’arrivée des fintechs et du prêt via des plateformes en ligne. La première phase fut une phase
de perturbation durant laquelle de nombreuses fintechs proposant divers business models se
sont rapidement développées sur le marché et étaient perçues par certains comme une menace
pour les acteurs traditionnels. La deuxième phase, que le marché connaît actuellement, est
caractérisée par une réaction des banques et institutions financières traditionnelles sous la
forme de partenariats avec les fintechs et/ou de développement de nouvelles solutions en
interne.
D’après les auteurs, l’impact des nouvelles plateformes de prêt serait d’augmenter la
taille du marché en comblant un vide sur celui-ci plutôt que de prendre des parts de marché
aux banques. Néanmoins, ces dernières sont menacées et l’impact sur leur part de marché
dépendra de la stratégie qu’elles mettront en place pour répondre à cette menace. Cette
hypothèse d’augmentation de la taille du marché est également avancée par une étude de
McKinsey se penchant sur le marché du financement de la supply chain (Herath, 2015). Il
ressort de cette étude que le marché du financement de la supply chain est en croissance mais
est sous-exploité par les financeurs. En effet, seulement 10% des revenus potentiels globaux
de ce marché sont exploités actuellement. Cela s’explique notamment par le fait que les
financeurs se concentrent sur les entreprises présentant un bon rating de solvabilité et
négligent la possibilité de financer des entreprises présentant un risque de défaut plus élevé.
Tout comme McCarthy & Mills (2016), Culkin, Davis & Murzacheva (2016)
s’intéressent au financement des petites entreprises. Leur étude se concentre sur les
plateformes de prêt en peer-to-peer et de crowdfunding au Royaume-Uni et cherche à en
mesurer l’impact sur les acteurs traditionnels du marché du financement des PME. Les
30.
Une première hypothèse est que les plateformes de prêt en P2P et de crowdfunding
représentent un nouveau marché caractérisé par une innovation des business models et qui
peut susciter une destruction créatrice des acteurs traditionnels du financement des PME.
Cette destruction créatrice, qui est une notion introduite par Schumpeter, implique que les
banques et institutions financières classiques devront changer pour continuer à être
compétitives sur le marché du financement des PME. L’analyse empirique suggère que cette
hypothèse est vérifiée car les avantages concurrentiels des plateformes en ligne, tels que la
rapidité du traitement de la demande de financement, la flexibilité, et la transparence sur le
coût du financement, représentent une menace pour les banques et institutions financières
classiques et pourraient conduire à une destruction créatrice.
La troisième hypothèse est que les fintechs offrent maintenant leurs services aux autres
segments du marché du financement des entreprises (et pas seulement au segment composé
des start-ups et PME, sensibles au prix) et font face, sur ces segments, à de nouveaux entrants.
Cela les conduit à développer des innovations structurelles sous forme de nouveaux business
models afin de faire face à cette concurrence. Les auteurs ont également pu confirmer cette
hypothèse empiriquement.
Ces deux dernières hypothèses sont confirmées par Ketterer (2017) qui affirme que les
plateformes de prêt en P2P ont d’abord ciblé le segment des PME et des individus non
31.
bancarisés, segment non servi par les banques traditionnelles. Progressivement, ces
plateformes se sont développées pour cibler les segments plus rentables des plus grandes
entreprises, venant directement concurrencer les banques. L’auteur ajoute que pour certaines
plateformes, ce développement a (également) consisté en des alliances et partenariats avec les
banques.
Concernant les segments de clients visés par les fintechs, une étude de Citi (2016)
portant sur une centaine de fintechs indique que près de 60% des fintechs en nombre et
environ 75% en volume de capital investi ciblent les segments des particuliers et des PME.
Citi (2016) ajoute que ces segments représentent environ 50% des profits du secteur bancaire.
Cette étude soutient donc les deux dernières hypothèses citées dans le sens où la majorité des
fintechs qui existent aujourd’hui ciblent les segments des particuliers et des PME et qu’une
partie d’entre elles (40%, en nombre) ciblent les autres segments du marché.
La quatrième hypothèse émise par Culkin et al. (2016) suggère que les plateformes de
prêt en P2P et de crowdfunding forment un marché caractérisé par des innovations
discontinues, ce qui rend l’adaptation des acteurs traditionnels compliquée. Cette hypothèse
est également supportée par les données empiriques.
La cinquième et dernière hypothèse postule que l’arrivée des fintechs sur le marché
crée des fluctuations structurelles dans l’économie, ce qui forme un nouveau contexte pour les
banques et institutions financières classiques. Dans leur analyse empirique, les auteurs
mentionnent que les fintechs ont profité des conditions favorables existant après la crise
financière de 2007-2008 pour se développer et introduire ces fluctuations structurelles dans
l’économie, en réponse aux limites des banques et acteurs traditionnels de la finance.
La banque internationale Citi a publié un rapport étudiant l’impact des fintechs sur les
banques dans lequel elle indique qu’en Europe et aux Etats-Unis, le secteur financier est à un
point de basculement (Citi, 2016). En effet, les fintechs ont l’innovation mais elles n’ont pas
encore atteint une taille suffisante pour réellement concurrencer les banques et institutions
financières traditionnelles. Ces dernières doivent donc agir vite pour adopter les innovations
avant que les fintechs n’atteignent une taille critique. En Chine, par contre, le marché a passé
ce point de basculement car les fintechs ont déjà autant, voire plus, de clients que les banques.
32.
Citi (2016) mentionne également que les fintechs qui prospéreront à long terme et qui
représentent la plus grande menace pour les banques sont celles qui adoptent une stratégie de
différenciation plutôt qu’une stratégie de domination par les coûts. Il est en effet plus facile
pour les banques de répondre à une baisse des prix sur des produits et services existants
(même si cela peut prendre quelques années) que de répondre à une différenciation en termes
de segment de clients qui est ciblé, de technologie ou de business model. Citi (2016) note
également que les activités bancaires et financières les plus menacées par les fintechs sont les
activités à faible intensité capitalistique (tels les payements).
Dickerson et al. (2016) distinguent deux types de fintechs : les concurrentielles, qui
viennent directement concurrencer les banques, et les collaboratives, qui peuvent apporter de
la valeur aux banques et contribuer à leur évolution. Bien que les fintechs concurrentielles
représentent une part plus importante des investissements totaux en fintechs (56% en 2015), la
croissance des investissements entre 2014 et 2015 fut plus importante pour les fintechs
collaboratives (138% contre 23%). Cela montre clairement une tendance à la collaboration
entre les fintechs et les acteurs bancaires traditionnels.
L’enquête de PwC (2017) révèle également qu’alors que les fintechs visaient
initialement à concurrencer les acteurs financiers traditionnels, la tendance est de plus en plus
à la collaboration. En effet, le pourcentage de banques engagées dans un partenariat avec les
fintechs est passé de 42% en 2016 à 54% en 2017 (globalement). De plus, 82% (81% en
Belgique) des banques et institutions financières prévoient d’intensifier la collaboration avec
les fintechs dans les 3 à 5 ans à venir. Leurs motivations sont la possibilité d’externaliser la
recherche et le développement (R&D) ainsi que la rapidité d’adoption des innovations. De
33.
plus, pour 63% des banquiers interrogés, les fintechs représentent une opportunité d’étendre
leur offre de produits et de services. Les motivations des fintechs pour collaborer avec les
banques sont non seulement le financement, mais aussi l’acquisition de clients et la possibilité
de tester leurs modèles sur de grandes bases de données.
Malgré cette tendance à la collaboration, les banques investissent environ dix fois plus
dans leurs propres technologies que dans les fintechs et ces investissements technologiques
sont principalement dirigés vers les technologies existantes plutôt que vers les nouvelles
technologies (Dickerson et al., 2016). PwC (2017) souligne également cette concentration sur
le renouvellement des systèmes existants et suggère que les banques et institutions financières
traditionnelles devraient plutôt suivre le comportement des fintechs et investir dans les
technologies émergentes si elles veulent améliorer l’expérience du client.
Selon Dickerson et al. (2016), les banques tendent de plus en plus à reconnaître les
fintechs comme une opportunité plutôt qu’une menace. Cependant, certains freins empêchent
les banques de tirer pleinement parti de cette opportunité. Tout d’abord, des entreprises telles
que Google, Apple, Facebook, Amazon et Alibaba (connues sous l’acronyme GAFAA)
représentent une menace de plus en plus importante pour le secteur bancaire. D’une part, elles
définissent les standards digitaux et les attentes en matière de digitalisation que les
consommateurs transposent aux autres industries (dont la finance), et d’autre part, elles
tendent de plus en plus à offrir des services financiers à leurs clients. L’enquête de PwC
(2017) révèle également que l’innovation vient principalement d’acteurs extérieurs au secteur
financier, tels que les réseaux sociaux ou les plateformes d’e-commerce. Ensuite, des
fonctions de support des banques sont maintenant prises d’assaut par des fintechs et peuvent
être fournies de manière plus efficace par ces dernières. Les banques devront donc s’allier
avec ces fintechs pour améliorer leur efficacité avant que celles-ci n’atteignent une taille
critique et les concurrencent directement.
Dans leur article, Milne & Parboteeah (2016) se penchent sur le prêt en peer-to-peer et
étudient l’impact de ces nouvelles plateformes sur les banques. Pour les auteurs, bien que les
plateformes de prêt en P2P présentent de nombreux avantages concurrentiels par rapport aux
banques, elles ne constitueraient pas une menace pour ces dernières. Ces avantages
concurrentiels sont les suivants : un rendement intéressant pour les investisseurs et un coût
relativement faible pour les emprunteurs, l’accès au crédit à des consommateurs et petites
34.
entreprises qui n’auraient pas obtenu de crédit auprès d’une banque, un service plus rapide,
plus flexible et plus transparent grâce à l’utilisation de la technologie, et un caractère plus
responsable et social du crédit. Parmi ces avantages concurrentiels, la principale menace pour
les banques est probablement d’ordre technologique. En effet, les acteurs bancaires
traditionnels rencontrent souvent des difficultés à moderniser leurs anciens systèmes et
consacrent la majeure partie de leurs budgets technologiques à la maintenance de systèmes
existants plutôt qu’à leur réforme, comme cela a déjà été souligné par Dickerson et al. (2016)
et PwC (2017).
Cependant, d’après les auteurs, les plateformes de prêt en P2P seraient des
compléments plutôt que des substituts aux banques. Ils basent cette affirmation sur le fait que
le rôle central d’une banque est de fournir des liquidités à ses clients plutôt que d’être un
intermédiaire entre des déposants et des emprunteurs, qui est le rôle principal des plateformes
de prêt en P2P. Ces dernières peuvent difficilement jouer un rôle de fournisseur de liquidités
car elles n’ont pas accès aux marchés monétaires ou aux banques centrales. De plus, les
banques présentent certains avantages concurrentiels par rapport aux plateformes de prêt en
P2P, notamment le support de l’Etat, qui peuvent constituer des barrières à l’entrée sur leur
marché.
Milne & Parboteeah (2016) considèrent dès lors que les banques devraient collaborer
avec ces plateformes ou développer leur propre plateforme en interne. Cela leur permettrait
d’offrir un service supplémentaire à leurs clients existants et faciliterait l’accès au crédit à
certains clients.
Bunea, Kogan & Stolin (2016) étudient la menace que représentent les fintechs pour
les banques en analysant les rapports annuels des banques aux Etats-Unis et les
communications de celles-ci par rapport à la concurrence des fintechs. Leur étude couvre les
rapports annuels des années 2013 à 2016. Il ressort de leur analyse que seulement 14 banques,
soit 3% du total en nombre, ont explicitement fait référence aux fintechs dans leur rapport
annuel. Cela contraste avec les pourcentages élevés de banques se considérant menacées par
les fintechs tels que révélés par de nombreuses enquêtes anonymes, notamment celle de PwC
(2017) où ce pourcentage s’élève à 88%. Par ailleurs, ces références aux fintechs sont toutes
apparues soudainement dans les rapports annuels de 2016 alors qu’elles étaient inexistantes
dans les rapports précédents. Les auteurs expliquent cela par un comportement d’imitation. Il
35.
apparaît que ces 14 banques sont caractérisées par leur grande taille car elles représentent près
d’un tiers du secteur bancaire américain en termes d’actifs. Les auteurs ont également pu
constater que ces banques semblent être plus proactives face à l’arrivée des fintechs sur le
marché, par rapport aux banques qui ne mentionnent pas cette nouvelle concurrence dans
leurs rapports annuels.
Un aperçu de la perception des fintechs par les banques en Belgique est donné par le
magazine Trends-Tendances et son université d’été de juin 2016 (Buron, 2016). Lors de cet
évènement, la question suivante a été posée à des banquiers et acteurs des fintechs : « Les
fintechs vont-elles remplacer les banquiers et les assureurs traditionnels ? » (Buron, 2016, p.
52). Bien que les fintechs menacent les revenus des banques qui pourraient diminuer de 10%
à 40% dans les prochaines années, les banques belges les considèrent plutôt comme une
opportunité. Il est en effet ressorti du débat que banques et fintechs ont intérêt à collaborer. La
collaboration peut prendre différentes formes telles qu’une acquisition ou un partenariat et il
conviendra d’analyser laquelle est la plus adéquate. Différents types de collaboration seront
présentés dans la section suivante. Dans cette collaboration, les banques peuvent apporter leur
importante clientèle ainsi que les informations dont elles disposent sur celle-ci, leur expertise
financière, leur image de marque et leur licence bancaire, tandis que les fintechs peuvent
apporter leur agilité, leur rapidité, leur flexibilité et leur technologie. Cette dernière peut
permettre aux banques d’améliorer leur efficacité tant au niveau externe, vis-à-vis de leurs
clients, en leur apportant une solution en phase avec leurs attentes, qu’au niveau interne, en
permettant à leurs processus de fonctionner en temps réel. Les banques ne pourront pas rester
indifférentes à l’émergence des fintechs et devront réagir, soit en ajoutant à leurs services
traditionnels un nouveau service séparé inspiré des modèles fintechs, soit en transformant leur
offre traditionnelle pour y intégrer une dimension Fintech.
Comme le soulignent Drummer et al. (2015), l’impact des fintechs sur les banques et
institutions financières classiques dépendra en partie de l’attitude des régulateurs face à
l’arrivée de ces nouveaux entrants sur un marché qui est très régulé.
36.
Que les fintechs représentent une menace ou une opportunité, les banques doivent
réagir à leur arrivée sur le marché. Certaines choisiront de développer leur propre solution en
interne ou de réformer leurs systèmes, d’autres s’ouvriront à la collaboration, d’autres encore
feront les deux. Dans cette section, diverses études proposant les possibilités de réponses
stratégiques qui s’offrent aux banques sont présentées.
8
Le « FinTech Innovation Lab » est un programme destiné aux entrepreneurs et start-ups qui a pour but de les
assister dans le développement de leur fintech grâce aux conseils de cadres de banques (Dickerson, Masood &
Skan, 2015). Il a été fondé en 2010 par le « Partnership Fund for New York City and Accenture » et est présent
dans les villes de New York, Londres, Hong Kong et Dublin.
37.
en place par les banques. Premièrement, les banques doivent agir de manière ouverte face à
l’innovation. Cela signifie qu’elles doivent s’ouvrir à des innovateurs externes afin de leur
permettre d’apporter leurs propres solutions technologiques aux banques. Cela s’inscrit dans
le mouvement open source qui est à l’origine de nombreux développements technologiques
récents. Deuxièmement, les banques doivent collaborer avec les start-ups de l’industrie
technologique. Cela suppose de surmonter les obstacles culturels qui sont le principal frein à
la collaboration. Ceci est confirmé par l’enquête de PwC (2017) qui ajoute que les anciennes
technologies des banques et les incertitudes quant à la régulation sont également perçues
comme étant d’importants freins à la collaboration. Troisièmement, les banques doivent
investir dans les fintechs. En effet, les banques pourraient ainsi apporter aux fintechs les
capitaux dont elles ont besoin pour se développer tout en profitant de leurs innovations
technologiques pour réformer leurs services et business models.
Pour Dickerson et al. (2016), trois scénarios sont envisageables. Premièrement, les
banques restent centrales pour leurs clients et investissent massivement dans les fintechs, ce
qui conduit à des gains de productivité et leur permet de réduire les coûts pour les clients.
Deuxièmement, les banques occupent un rôle moins important pour leurs clients et leurs
services peuvent être utilisés en complément à d’autres solutions. Troisièmement, les banques
ne dominent plus le marché car les fintechs sont plus efficaces. Leur rôle est lié au fait
qu’elles sont très régulées et est celui d’intégrateur de supply chains composées de plusieurs
plateformes. Les auteurs précisent que différents scénarios peuvent s’appliquer aux différentes
branches d’activité des banques.
Ces auteurs estiment que la plus grande menace pour les banques n’est pas les fintechs
mais plutôt le manque de vision stratégique claire. Ils suggèrent les actions stratégiques à
déployer à court, moyen et long terme. A court terme, les banques devront faire des
investissements tactiques dans des technologies facilement adoptables en vue d’améliorer
leurs business models et elles devront répandre l’idée de rupture technologique au sein de
l’organisation. A moyen terme, il s’agira de s’assurer d’avoir les compétences digitales
nécessaires, de placer le client au centre de la stratégie et de développer un programme
d’investissement technologique pluriannuel. A long terme, les banques devront remettre en
question et réformer leurs business models en vue de construire un écosystème autour de leurs
38.
clients et elles devront également prendre plus de risques dans leurs investissements en
innovations.
Pour PwC (2017), l’innovation doit être au cœur de la stratégie des banques et
institutions financières. Elle doit être intégrée et liée aux autres objectifs de l’organisation
plutôt qu’être une initiative séparée. PwC (2017) a pu constater dans son enquête que c’est
déjà le cas pour la majorité des institutions financières (56%). PwC (2017) recommande aux
acteurs financiers traditionnels d’avoir une équipe dédiée à la surveillance des nouvelles
technologies afin de comprendre leur potentiel de disruption. Drummer, Jerenz, Siebelt &
Thaten (2016) considèrent également que pour s’adapter à la nouvelle concurrence, tant les
banques que les fintechs doivent proactivement surveiller le marché et ses développements.
De plus, un facteur clé de succès pour prospérer sur le marché dans les années à venir sera de
se centrer sur le client, de l’écouter en vue de bien répondre à ses besoins (PwC, 2017).
PwC (2017) note également un intérêt croissant des banques pour la blockchain9,
notamment pour ses applications en gestion de la supply chain et en financement des
échanges commerciaux (trade finance). Citi (2016) souligne également le potentiel de la
blockchain qui pourrait permettre de transformer les anciens systèmes des banques et les
rendre plus efficaces.
Dans leur article, Dietz et al. (2015) présentent six impératifs digitaux pour les
banques ainsi que six facteurs de succès pour les fintechs en vue de performer et prospérer sur
les marchés financiers.
9
« La blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations, transparente, sécurisée, et
fonctionnant sans organe central de contrôle » (Blockchain France, 2017).
39.
En ce qui concerne les banques, les auteurs suggèrent qu’elles ne doivent pas répondre
à la potentielle menace que représentent les fintechs au niveau individuel mais plutôt à la
potentielle menace qu’elles représentent globalement. Cela signifie que les banques doivent
investir dans leur digitalisation. Les auteurs identifient six impératifs digitaux. Premièrement,
les banques devront construire les infrastructures nécessaires pour collecter et analyser les
données sur leurs clients et utiliser ces données de manière scientifique dans leurs prises de
décision. Deuxièmement, les banques devront répondre aux nouveaux besoins des
consommateurs (opérations en temps réel, via différents canaux), largement induits par les
acteurs non bancaires, et devront leur offrir une expérience client unique. Un troisième
impératif digital pour les banques concerne le marketing et consistera à développer des
capacités de marketing digital. Quatrièmement, les banques devront simplifier et digitaliser
leurs processus afin de pouvoir concurrencer des fintechs dont les coûts peu élevés constituent
un avantage concurrentiel. Cinquièmement, les banques devront rapidement investir dans les
nouvelles technologies. Elles pourront pour ce faire opter pour une « architecture à deux
vitesses » qui consistera à moderniser les technologies existantes dans un premier temps avant
de complètement réformer leurs systèmes. Enfin, un sixième impératif digital pour les
banques consistera à moderniser leurs structures organisationnelles et décisionnelles en vue
d’être plus réactives et de prendre des décisions plus rapidement. En effet, la plupart des
banques basent actuellement leurs décisions sur le consensus. Ce sixième impératif est
important car il supporte les cinq autres.
Dietz et al. (2015) considèrent que les fintechs qui parviendront à croître et à avoir un
impact sur les acteurs financiers traditionnels devront remplir six critères de succès.
Premièrement, elles devront trouver les moyens d’acquérir des clients à un faible coût.
Deuxièmement, les fintechs devront être capables de réduire le coût de leurs services pour les
clients ainsi que le temps de traitement d’une demande de financement grâce au caractère en
ligne de leurs activités. Troisièmement, les fintechs devront être capables d’utiliser la masse
de données auxquelles elles ont accès (big data) de manière innovante afin de mieux
comprendre les besoins des consommateurs et d’y répondre en proposant de nouveaux
produits et services ou de nouvelles manières de les offrir. Quatrièmement, les fintechs
devront cibler les segments de clientèle les plus porteurs pour une création de valeur durable.
Les auteurs identifient trois segments appropriés aux fintechs : la génération Y, les petites
entreprises et les personnes ou entreprises n’ayant pas ou peu accès aux services bancaires. Il
s’agit de segments sensibles au prix et ouverts aux nouvelles solutions offertes par les
40.
fintechs. Un cinquième facteur de succès consistera pour les fintechs à collaborer avec les
banques et institutions financières traditionnelles. Les auteurs parlent ici de « coopétition »
(contraction de coopération et compétition (concurrence)). Enfin, un sixième facteur de succès
pour les fintechs sera de gérer et respecter les régulations. Pour les auteurs, les fintechs ne
pourront réussir et prospérer qu’à condition de répondre à ces six facteurs de succès et de les
combiner pour développer un business model durable.
McKinsey a réalisé une étude portant sur différents acteurs du marché du financement
de la supply chain et couvrant 21 pays (Herath, 2015). L’objectif est de comprendre les
nouveaux besoins des clients (acheteurs et fournisseurs) sur ce marché, d’analyser les
solutions apportées par les fintechs et de déterminer comment les banques devraient réagir. La
méthodologie utilisée consiste en des interviews de 70 trésoriers et directeurs financiers de
multinationales, une enquête sur plus de 250 entreprises fournisseurs, des discussions avec
des fintechs actives sur ce marché ainsi que les points de vue de 10 experts sur l’état actuel et
les évolutions futures du marché.
L’analyse du marché indique qu’il y a une inadéquation entre les facteurs clés de
succès sur lesquels se concentrent les banques et les facteurs clés de succès que les acheteurs
et fournisseurs jugent importants. Pour ces derniers, la simplicité, la rapidité et la facilité
d’intégration des fournisseurs au programme de financement sont les facteurs les plus
importants. Cela requiert d’importantes capacités opérationnelles. Celles-ci sont souvent
négligées par les banques. A l’inverse, les fintechs s’appuient sur la technologie pour
développer et renforcer ces capacités opérationnelles. Les fintechs proposent également de
nouveaux business models qui révolutionnent le marché et elles étendent leurs services au-
delà du financement pour couvrir l’intégralité de la supply chain. McKinsey estime que les
fintechs possèdent 10 à 15% du marché global du financement de la supply chain.
En ce qui concerne la manière dont les banques doivent réagir à l’émergence des
fintechs sur le marché du financement de la supply chain, Herath (2015) identifie trois cas de
figure : les banques offrant déjà des services de financement de la supply chain, les banques
n’offrant pas de tels services mais, dans un cas, traitant (pour d’autres services) avec des
grandes entreprises et des multinationales, et, dans un autre cas, traitant avec des PME. Dans
le cas des banques déjà actives dans le financement de la supply chain, l’auteur recommande
de procéder en trois étapes. Il s’agit tout d’abord d’identifier les opportunités d’amélioration
41.
De nombreux auteurs sont donc d’accord sur le fait que les banques et les fintechs
doivent travailler ensemble. Les auteurs d’une étude menée par PwC (2015) sont du même
42.
avis. Dans leur article, ils s’intéressent à la collaboration entre banques et fintechs et se
penchent plus précisément sur les différentes formes de collaboration possibles entre les
banques et les plateformes de prêt en P2P aux Etats-Unis.
D’après PwC (2015), les avantages que les banques peuvent mettre à profit dans une
relation de collaboration avec les fintechs sont l’historique de données sur leurs clients,
l’image de marque, l’expérience dans leurs diverses activités bancaires et les relations de long
terme avec leurs clients. De plus en plus de banques collaborent avec les fintechs car elles
peuvent ainsi bénéficier de rendements plus élevés et d’un accès à des clients qu’elles
n’auraient pas pu servir autrement. Cependant, certaines banques sont réticentes à collaborer
avec les fintechs car elles y voient un danger de cannibalisation de leurs propres services, un
risque réputationnel ou une inadéquation avec leur appétit pour le risque.
La marque blanche est une forme de partenariat plus avancée qui est intéressante pour
la banque lorsque celle-ci ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour investir dans
de nouvelles technologies. Elle permet à la banque d’intégrer dans le prolongement de ses
services la technologie d’une fintech. Cette technologie peut constituer un processus à part
entière ou servir uniquement de soutien aux processus existants de la banque.
Une troisième et dernière forme de collaboration identifiée par les auteurs est le
développement conjoint de produit, où chaque partie apporte ses forces et atouts pour
développer un nouveau produit. Il peut s’agir par exemple du développement d’un modèle
d’évaluation de la solvabilité (credit scoring).
McCarthy & Mills (2016) identifient quatre types de réponses stratégiques que les
banques peuvent mettre en place suite à l’arrivée des fintechs sur le marché du prêt aux petites
entreprises. Ils classifient ces réponses selon deux dimensions : le temps et l’investissement
requis, et le degré d’intégration avec les fintechs.
fintechs de se développer. Drummer et al. (2016) ont également identifié ces deux formes de
collaboration. Pour McCarthy & Mills (2016), cette stratégie permet aux banques d’avoir un
retour sur investissement et de tester les idées des fintechs en vue d’identifier celles qui
pourraient créer des synergies avec leurs activités. Concernant le fonds de capital à risque,
Block et al. (2016) notent qu’en plus du retour sur investissement, les investisseurs sont
intéressés par l’accès à de nouvelles technologies ainsi qu’à de nouveaux marchés ou
segments de clients. Toutefois, ils soulignent qu’aux Etats-Unis notamment, les start-ups
préfèrent ne pas entamer ce genre de collaboration trop tôt dans leur cycle de développement,
en vue de protéger leur technologie. La stratégie de l’incubation à long terme requiert un
important investissement en temps et en argent et confère un faible degré d’intégration avec
les fintechs (McCarthy & Mills, 2016).
La quatrième et dernière réponse stratégique est appelée par les auteurs construire ou
acheter. Elle consiste à développer sa propre solution en interne ou à acquérir une fintech. Elle
est très coûteuse et confère un haut degré d’intégration. Drummer et al. (2016) mentionnent
qu’un des avantages de l’acquisition d’une fintech par une banque est qu’elle permettrait à
cette dernière d’avoir accès aux compétences digitales des employés de la fintech. Cependant,
McCarthy & Mills (2016) notent que l’acquisition de fintech est une réponse stratégique qui
est encore très peu utilisée en raison des obstacles et coûts réglementaires qu’elle implique.
Les auteurs soulignent également qu’il n’existe pas une seule bonne stratégie et que le
choix de la stratégie à adopter dépendra de l’objectif poursuivi par la banque et des moyens
qu’elle souhaite investir.
Jusqu’à présent, les fintechs ont été étudiées sous l’angle de leur impact sur les
banques, qui est l’objet de ce mémoire. Il est également intéressant d’étudier leur impact sur
les entreprises financées. Cette section présente deux études sur ce sujet.
Dans leur étude, Barkley & Schweitzer (2017) s’intéressent à l’impact des fintechs sur
les entreprises financées. Ils se concentrent sur les petites entreprises et utilisent comme
variables d’impact la croissance de leurs revenus, la croissance de leur emploi ainsi que leur
satisfaction avec le financement. Le financement par une fintech est comparé au financement
par une banque ainsi qu’à une situation de refus de financement par le prêteur. Les auteurs
utilisent des données provenant d’une étude sur le crédit aux petites entreprises réalisée par la
45.
banque centrale américaine. Leur étude leur permet de tirer trois conclusions. Tout d’abord,
les petites entreprises qui se financent auprès d’une fintech ont des caractéristiques
semblables aux petites entreprises qui se voient refuser leur demande de financement. Ensuite,
l’impact du financement par une fintech sur la croissance des revenus et de l’emploi d’une
entreprise ne diffère pas significativement de l’impact sur ces variables lorsque le
financement est fourni par une banque ou lorsqu’il est refusé. Enfin, les différences en termes
de satisfaction sont très marquées et sont telles que les entreprises financées par une banque
sont plus satisfaites que les entreprises financées par une fintech (75% de taux de satisfaction
contre 48,2%), elles-mêmes plus satisfaites que les entreprises qui se voient refuser un
financement (8,5% de taux de satisfaction). Cela signifie que les fintechs doivent améliorer le
taux de satisfaction de leurs clients si elles veulent être compétitives par rapport aux banques.
Selon les auteurs, la difficulté pour les fintechs réside dans leur capacité ou non à assurer la
bonne compréhension de leurs tarifs. En effet, étant donné l’absence de régulation de ces
nouveaux acteurs, il n’est notamment pas requis des fintechs qu’elles communiquent le taux
annuel effectif global. Cela peut conduire les emprunteurs à une mauvaise interprétation des
termes de crédit qui sont parfois sous-estimés. Cela résulte alors en un faible taux de
satisfaction de l’expérience de financement par une fintech.
Les résultats en termes de taux de satisfaction sont à nuancer. En effet, étant donné
que les entreprises se finançant auprès d’une fintech ont des caractéristiques semblables aux
entreprises se voyant refuser une demande de financement ailleurs, il peut être intéressant de
comparer ces deux groupes. La comparaison indique alors que les entreprises financées par
une fintech sont presque six fois plus satisfaites que celles qui se voient refuser un
financement (taux de satisfaction de 48,2% par rapport à 8,5%).
Une autre étude s’intéressant à l’impact des fintechs sur les entreprises et individus
financés est celle de Ketterer (2017). Elle se penche plus précisément sur l’impact des fintechs
sur l’accès au financement et suggère que cet accès est facilité pour les PME et pour les
46.
individus non bancarisés. Cela s’explique notamment par les nouveaux business models et les
nouvelles techniques d’évaluation de la solvabilité. Le digital permet en effet d’avoir accès à
davantage de données sur les clients et d’évaluer plus précisément leur solvabilité à un
moindre coût.
2.4. Conclusions
Les études présentées ci-dessus sont intéressantes pour l’analyse empirique qui va
suivre. Elles mettent en effet en avant différentes hypothèses théoriques qui pourront être
testées grâce aux interviews de fintechs et de banques belges.
Tout d’abord, bien que certaines études considèrent les fintechs comme une menace
pour les banques, la plupart indiquent qu’elles seraient plutôt une opportunité, du moins en
Europe et aux Etats-Unis où la tendance est à la collaboration. Il s’agira de tester
empiriquement cette hypothèse et de déterminer si cela est également le cas pour la Belgique.
Ensuite, les études présentées soulignent le fait que les segments de clients ciblés par
les fintechs sont principalement composés de particuliers et de PME. Comme l’ont mentionné
McCarthy & Mills (2016), les fintechs combleraient un vide sur le marché. Certains auteurs,
notamment Culkin et al. (2016) et Ketterer (2017), indiquent que les fintechs tendent à cibler
également des segments composés par des plus grandes entreprises.
Innover, réformer les anciens systèmes, investir dans les nouvelles technologies,
placer le client au centre de la stratégie, collaborer avec les fintechs sont un ensemble de
réponses stratégiques que les banques devront mettre en place pour prospérer à long terme. La
partie 3 de ce mémoire permettra de déterminer ce que certaines banques belges font déjà et
ce qu’elles ont l’intention de faire dans les années à venir.
Cette partie est consacrée à l’étude empirique des fintechs de financement de créances
commerciales et de leur impact sur les banques. Elle est divisée en cinq sections. La première
précise les objectifs de cette étude empirique. La deuxième section présente la méthodologie
utilisée pour réaliser l’analyse et répondre à la question de recherche. La troisième section
décrit les différents acteurs rencontrés. La quatrième section consiste en l’analyse des
interviews. Enfin, la dernière section clôture cette partie par une discussion des résultats.
3.1. Objectifs
L’étude empirique s’intéresse également au point de vue des fintechs sur la question et
sur la manière dont elles perçoivent les banques. Représentent-elles plutôt une menace ou une
opportunité ? Il s’agira également de déterminer les ambitions futures de croissance et de
développement des fintechs et la possibilité ou non de leur substitution aux banques pour ce
qui est des services de factoring. L’analyse empirique cherchera à déterminer si les fintechs
sont ouvertes à la collaboration avec les banques et, dans l’affirmative, à déterminer les
formes de collaboration envisagées et/ou déjà mises en place.
Enfin, cette étude empirique cherchera également à tester les différentes hypothèses
identifiées dans la partie 2 de ce mémoire.
48.
3.2. Méthodologie
Les deux banques interrogées représentent conjointement 55,6% de part de marché sur
le marché belge du factoring : 38,6% pour BNP Paribas Fortis Factor (A. de Fournoux & P.-
O. Maes, interview personnelle, 12 mai 2017), qui est le leader, et 17% pour ING Commercial
Finance (N. van Klinkenberg, interview personnelle, 26 juin 2017), qui est le troisième plus
grand acteur bancaire sur ce marché (après KBC Commercial Finance et avant Belfius
Commercial Finance qui détiennent respectivement 34% et 10% de part de marché (N. van
Klinkenberg, interview personnelle, 26 juin 2017)). Cependant, ces deux banques ne
constituent pas un échantillon de taille statistiquement significative et leurs réponses doivent
dès lors être considérées pour leur valeur indicative (et non représentative du marché belge du
factoring).
En ce qui concerne les fintechs interrogées, celles-ci sont les deux uniques acteurs
présents en Wallonie pour le financement de créances commerciales.
Ces deux fintechs et ces deux banques seront présentées de manière plus détaillée dans
la section suivante.
Les personnes rencontrées chez les fintechs sont Xavier Corman, co-fondateur et CEO
de Edebex, et Frédéric Lodewyk, associé fondateur et CEO de Koalaboox. Concernant les
banques, les personnes rencontrées sont Pierre-Olivier Maes, Head of Sales & Marketing, et
Alexandre de Fournoux, Innovation Strategy Officer, au sein du Global Factoring
Competence Centre de BNP Paribas Fortis10, et Nicolas van Klinkenberg, Head of ING
Commercial Finance BeLux.
Les entretiens réalisés sont de type semi-directif et reposent sur des guides d’entretien
(voir Annexe 1). Les questions des guides d’entretien ont été rédigées sur base d’une analyse
10
La banque étudiée ici est BNP Paribas Fortis Factor et les deux personnes rencontrées travaillent au sein du
Global Factoring Competence Centre de BNP Paribas Fortis qui est un centre de compétence dédié aux activités
de factoring de la banque à travers l’Europe et ciblant les entreprises actives à l’international (BNP Paribas,
2010). Notons que Pierre-Olivier Maes a participé au lancement de BNP Paribas Fortis Factor en Belgique en
2010 avant de rejoindre le Global Factoring Competence Centre en 2014 (A. de Fournoux & P.-O. Maes,
interview personnelle, 12 mai 2017).
49.
comparative des différents acteurs utilisant les informations disponibles sur leurs sites web
ainsi que sur base des apports théoriques présentés dans la partie 2 de ce mémoire. Les
retranscriptions de ces entretiens sont disponibles à l’Annexe 2.
3.3.1. Edebex
« Fondée en 2013, la place de marché Edebex propose aux entreprises d’optimiser leur
trésorerie en vendant leurs factures clients – leurs créances – à des investisseurs qui ont trop
de trésorerie et souhaitent la valoriser. » (Edebex, 2017). Il s’agit d’une plateforme
d’appariement entre des vendeurs et des acheteurs de créances commerciales. Cela correspond
donc au modèle de place de marché tel qu’identifié par Cortet et al. (2013) et présenté dans la
partie 1 de ce mémoire (section 1.4.2). Nous avons vu également dans la partie 1 que le
factoring est un ensemble de services financiers complémentaires. Dans le cas d’Edebex, le
service est centré sur le financement de facture mais il intègre également le suivi du débiteur
et l’assurance crédit.
Quatrièmement, Edebex informe le débiteur par courrier que la facture a été rachetée
par un investisseur et qu’il faudra en effectuer le payement sur le compte de ce dernier.
L’abonnement couvre les frais de gestion du compte. La mise en vente constitue un frais fixe
par facture qui comprend l’audit de la facture, c’est-à-dire la communication avec le débiteur
ainsi que l’assureur crédit. Les frais de services sont des frais variables qui dépendent de la
solvabilité du débiteur et du montant de la facture. Ils couvrent la mise en relation avec les
investisseurs, le suivi du débiteur et l’assurance contre le risque de défaut de payement du
débiteur (auprès d’Euler Hermes). Le discount acheteur, exprimé en pourcentage du montant
de la facture, correspond à la rémunération de l’investisseur et varie en fonction du rating de
solvabilité du débiteur (tel qu’il a été déterminé par Euler Hermes) et de la date d’échéance de
la facture.
En moyenne, la vente d’une facture coûte 4% de son montant, ce qui signifie que le
vendeur pourra en recevoir 96% de sa valeur. Les détails quant aux montants des différentes
composantes du coût sont présentés dans le tableau 3.1 (à la rubrique frais).
Sur son site web, Edebex met en avant les différents avantages qu’offre sa plateforme.
Pour les vendeurs de factures, les principaux avantages sont : l’accessibilité de cette forme de
financement quelque soit la situation financière de l’entreprise, la rapidité, la liberté de choisir
les factures qui sont mises en vente, ainsi que la transparence sur les tarifs. Concernant
l’accessibilité, Edebex insiste sur le fait que c’est la solvabilité du débiteur qui est importante.
Pour les acheteurs de factures, les avantages mis en avant par Edebex sont : la rentabilité, les
rendements bruts annuels pouvant atteindre 12%, l’assurance crédit, qui rend les
investissements sûrs, la liquidité du placement financier car l’argent est investi à très court
terme (quelques semaines), la simplicité, et la solidarité (l’acheteur participe au financement
de l’économie).
Enfin, notons que Edebex a déjà financé pour plus de 100 millions d’euros de factures
depuis son lancement en 2013.
52.
3.3.2. Koalaboox
Le service de suivi des débiteurs permet aux entreprises d’être informées lorsqu’un de
leurs clients a payé et de savoir quelles factures sont payées ou impayées. En effet, la liaison
du compte Koalaboox avec les comptes bancaires permet d’associer automatiquement les
payements reçus aux factures. De plus, Koalaboox se charge d’envoyer des rappels aux
débiteurs, automatiquement ou à la demande. Si la facture n’est pas payée à son échéance,
Koalaboox démarre son processus de recouvrement.
l’entreprise dans les 24 heures. Ce financement est limité : « le montant total des factures
financées à un moment donné ne peut pas dépasser un certain plafond » (Koalaboox, 2017),
qui varie entre 25.000€ et 450.000€, selon la taille et la solvabilité l’entreprise. Il s’agit d’une
solution de financement qui bénéficie tant au vendeur de la facture qu’à son débiteur. En effet,
au moment de la confirmation de la facture, le débiteur peut choisir entre trois avantages : une
réduction de 0,05% sur le montant de la facture, un délai de payement supplémentaire de 15
jours, ou le versement des 0,05% à une œuvre caritative.
Le service de payement des factures d’achat permet d’une part d’enregistrer ses
factures fournisseur sur la plateforme afin de visualiser les factures qui doivent être payées
ainsi que leurs échéances et d’autre part de les payer directement depuis la plateforme.
La tarification des services se fait par forfaits mensuels. Il existe différentes formules,
le tarif variant en fonction du nombre de clients facturés et des services choisis. En ce qui
concerne le financement de facture, des frais variables de 2,99% du montant de la facture sont
également appliqués et se décomposent en un escompte de financement et une assurance
contre le risque de défaut de payement. Une entreprise qui vend ses créances commerciales
sur Koalaboox recevra 96,80% du montant de la facture. Les détails quant aux montants des
différentes composantes du coût sont présentés dans le tableau 3.1 (à la rubrique frais).
Les avantages de cette plateforme tels qu’ils sont mis en avant par Koalaboox sont :
l’accessibilité des services à de nombreuses entreprises (indépendants, sociétés, ASBL,
starters), la rapidité, la simplicité d’utilisation de la plateforme, et un financement gagnant-
gagnant, profitant tant au vendeur de la facture qu’à son débiteur.
BNP Paribas Fortis Factor (BNPPFF) est une filiale à 100% du groupe BNP Paribas
Fortis (BNP Paribas Fortis Factor [BNPPFF], 2017). Créée en 1965, cette société bénéficie de
plus de 50 ans d’expérience et se positionne comme leader sur le marché belge du factoring.
54.
Elle fait partie du réseau international que forment les 14 filiales du groupe BNP Paribas
Factor.
Comme la plupart des banques actives dans le factoring, BNPPFF offre 3 services
différents à ses clients : la gestion des débiteurs, le financement de factures et l’assurance
crédit.
L’assurance crédit permet à une entreprise de s’assurer jusqu’à 100% contre le risque
de défaut de payement de ses débiteurs.
En plus de ces trois services, BNPPFF offre également un service de reverse factoring,
permettant à ses clients de financer (plus rapidement) leurs créances fournisseurs.
Le coût du factoring va dépendre de différents facteurs tels que les services choisis, le
chiffre d’affaires de l’entreprise financée, le montant moyen de ses factures et le nombre de
débiteurs. En ce qui concerne le financement de factures, le coût se compose principalement
55.
de deux éléments : un intérêt de financement, qui correspond à un index (le plus souvent
l’Euribor11) plus un spread, et une commission d’affacturage, qui est un pourcentage des
factures et est donc basée sur le chiffre d’affaires cédé (A. de Fournoux & P.-O. Maes,
interview personnelle, 12 mai 2017). Les frais évènementiels constituent un troisième élément
du coût.
Il est important de noter que BNPPFF offre ses services de factoring aux entreprises
dont le chiffre d’affaires annuel est au minimum 500.000€ (BNPPFF, 2017).
ING Commercial Finance (INGCF) est une filiale d’ING qui a démarré ses activités en
2007 (N. van Klinkenberg, interview personnelle, 26 juin 2017) et qui offre également trois
services de factoring : gestion des débiteurs, financement des créances commerciales, et
assurance crédit (ING Belgique, 2017a).
11
« Euribor est l’abréviation de Euro Interbank Offered Rate. Euribor est le taux d’intérêt moyen auquel 25/40
banques européennes de premier plan (le panel de banques) se consentent des prêts en euros. » (Euribor-rates.eu,
2017).
56.
pourcentage des créances cédées, et les autres frais tels que les frais de compte (N. van
Klinkenberg, interview personnelle, 26 juin 2017).
ING Invoice Solutions offre donc deux services à ses clients : la facturation et le
financement de créances commerciales (ING Belgique, 2017b).
Le service de facturation permet de créer ses devis et factures et de les envoyer à ses
clients. Il permet également d’en faire le suivi grâce à la visibilité qu’apporte la plateforme
sur les factures payées et échues. Dès qu’un payement est reçu sur un compte bancaire ING, il
est automatiquement associé à la facture et le client est notifié du payement de son débiteur.
Une notification est également prévue lorsque la facture est échue mais non payée de manière
à permettre au client d’envoyer les rappels à ses débiteurs. De plus, ces documents ainsi que
des rapports comptables peuvent être transmis à son comptable.
La tarification des services se fait par abonnements mensuels. Il existe trois formules
différentes qui offrent les mêmes services mais varient selon le nombre d’utilisateurs pouvant
se connecter à la plateforme. En ce qui concerne le financement de factures, un coût fixe de
3% du montant de la facture est également appliqué. Il comprend les frais administratifs et les
57.
intérêts. Il couvre également l’assurance contre le risque de défaut de payement que ING
prévoit pour chaque facture financée. Les détails quant aux composantes du coût sont
présentés dans le tableau 3.1.
3.4. Analyse
Cette section est consacrée à l’analyse des interviews des quatre acteurs qui viennent
d’être présentés. Elle est divisée en quatre sous-sections. La première s’intéresse aux
segments de clientèle ciblés par les différentes entreprises. La deuxième se penche sur
diverses composantes de l’offre de produits et services de factoring de ces acteurs et sur ce
qui les différencie. La troisième vise à déterminer si les fintechs sont une menace ou une
opportunité pour les banques et présente également la perception des banques par les fintechs.
La quatrième expose les réponses stratégiques des banques à l’arrivée des fintechs sur le
58.
Tant Edebex que Koalaboox affirment avoir l’impression de combler un vide sur le
marché et de servir des clients qui n’auraient pas pu trouver un financement ailleurs,
notamment auprès d’une banque. Edebex atteste même avoir permis à certains de ses clients
d’éviter la faillite. Ce sentiment est partagé par INGCF et BNPPFF qui reconnaissent que les
fintechs profitent au segment des très petites entreprises et des professionnels qui ont
désormais accès à un produit auquel ils n’avaient pas accès avant. Cela confirme donc
l’hypothèse de McCarthy & Mills (2016) qui affirmaient que les plateformes de prêt
combleraient un vide sur le marché plutôt que de prendre des parts de marché aux banques.
En ce qui concerne les segments de clients ciblés par les banques, il ressort des
interviews que l’ensemble des segments du marché sont couverts. En effet, BNPPFF cible les
59.
grosses entreprises, appelées les corporates, mais également le segment retail, c’est-à-dire les
petites entreprises, et même les entreprises en création, bien qu’elle soit plus réticente à servir
ce segment étant donné le faible historique disponible pour évaluer le risque. Notons que les
produits offerts à ces différents segments ne seront pas les mêmes. Cela sera développé de
manière plus détaillée dans la section suivante.
INGCF identifie quatre segments cibles : les corporates ou corps, qui sont des grandes
entreprises internationales ou belges, les grandes mid-corps familiales, qui sont des
entreprises de taille intermédiaire, les PME ou petits mid-corps, et les professionnels, qui sont
des petites entreprises dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 500.000€. Initialement, INGCF
servait principalement les segments des mid-corps et des PME. Progressivement, la banque
s’est développée pour servir également les corps. Ces trois segments forment ce que l’on
appelle le marché traditionnel, qui est caractérisé par le fait que les clients cèdent un
portefeuille de créances commerciales. Récemment, ING a développé une offre s’adressant au
segment des professionnels : ING Invoice Solutions (voir section 3.3.4).
En ce qui concerne les secteurs d’activité des clients, les banques et les fintechs
servent les mêmes segments, c’est-à-dire les secteurs traditionnels de l’affacturage tels que la
construction, le transport, la grande distribution, l’industrie textile, le secteur manufacturier,
etc. Il s’agit, comme le souligne le CEO d’Edebex, d’activités intensives en main d’œuvre.
Les entreprises intensives en main d’œuvre peuvent en effet faire face à des problèmes de
trésorerie étant donné qu’elles ont d’importantes charges salariales mais que leurs clients les
payent généralement après un certain délai (30 ou 60 jours).
L’analyse des segments de clients ciblés par les banques et les fintechs permet de
confirmer la deuxième hypothèse de Culkin et al. (2016) selon laquelle les fintechs ciblent
des start-ups et des PME. En revanche, la troisième hypothèse émise par ces auteurs,
postulant que les fintechs ciblent désormais également les autres segments du marché, ne
semble pas encore vérifiée en ce qui concerne Edebex et Koalaboox, bien que cette dernière
observe une tendance à l’augmentation de la taille moyenne de ses clients. Cela s’explique
probablement par le fait que ces deux fintechs sont encore relativement jeunes. En effet, il est
important de rappeler que l’étude de Culkin et al. (2016) porte sur le Royaume-Uni, pays en
avance sur la Belgique pour ce qui est du développement de fintechs. Notons également que
ces auteurs mentionnent dans leur deuxième hypothèse que le segment des start-ups et des
PME est mieux servi par les fintechs que par les banques et qu’il n’attire pas nécessairement
60.
ces dernières, particulièrement dans le cas du prêt en P2P. L’analyse des segments de clientèle
ciblés sur le marché belge du factoring révèle que les banques interrogées sont présentes sur
ce segment (comme c’est le cas pour le crowdfunding dans l’étude de Culkin et al. (2016)).
La performance des fintechs belges par rapport à celle des banques belges en matière de
financement de créances commerciales sur ce segment de clientèle doit encore être évaluée.
Comme l’illustre le tableau 3.1, l’offre de produits et de services des différents acteurs
interrogés varie sur plusieurs aspects.
Tout d’abord, les banques exigent un chiffre d’affaires annuel minimum pour pouvoir
offrir leurs services de factoring à un client. Cette exigence est principalement liée au coût
d’acquisition du client qui est relativement élevé en raison du travail manuel qui est
nécessaire pour réaliser les diverses analyses (non automatisées). Pour BNPPFF, ce coût
d’acquisition est tel que, en-dessous du chiffre d’affaires minimum, le service de factoring
coûterait trop cher au client. INGCF analyse plutôt ce coût d’acquisition sous l’angle de la
rentabilité pour la banque et le compare à ce que les clients leur rapportent. En réalité, les
banques interrogées offrent également, ou en tout cas cherchent à offrir, leurs services de
factoring aux clients dont le chiffre d’affaires est inférieur au minimum exigé. L’offre est
alors axée sur le digital, qui permet de réduire le coût d’acquisition en éliminant l’intervention
humaine, et se fait donc sous une autre forme.
Comme cela a été mentionné dans la section 3.3.3, BNPPFF exige de ses clients qu’ils
aient un chiffre d’affaires annuel minimum de 500.000€. Pour ces clients-là, l’offre qui leur
est faite est une offre classique de factoring. BNPPFF est actuellement en train de lancer une
offre au forfait pour ses petits clients. Cela implique de travailler de manière beaucoup plus
standardisée. Notons qu’une tendance à la baisse du minimum exigé de chiffre d’affaires est
observée chez BNPPFF au cours des dernières années. En effet, le minimum exigé était
encore de 2 millions d’euros en 2010-2011. Cela s’explique par le développement de produits
plus adaptés aux petits clients.
Chez INGCF, le chiffre d’affaires annuel minimum exigé s’élève à 4 millions d’euros.
Il est d’application pour les segments des PME, des mid-corps et des corps. Contrairement à
BNPPFF qui tend à diminuer ce minimum, INGCF l’a instauré en 2012, pour une question de
rentabilité, et le maintient stable depuis. En effet, avant 2012, INGCF n’imposait pas de
61.
chiffre d’affaires minimum à ses clients. Pour les clients appartenant au segment des
professionnels, ING propose comme produit de factoring ING Invoice Solutions. Il s’agit
d’un service à la fintech qui ressemble un peu à la plateforme Koalaboox dans le sens où la
banque vise à être présente dans l’écosystème du client en se connectant à un logiciel de
facturation et de gestion de factures et en proposant directement sur ce logiciel un
financement des factures. Notons également que l’offre faite aux PME par INGCF correspond
à un produit de factoring traditionnel qui tend à être proposé en ligne. Ce service en ligne est
encore en cours de lancement et il sera opérationnel d’ici six mois à un an. A l’inverse, l’offre
faite aux corps et aux mid-corps est une offre sur mesure gérée manuellement, c’est-à-dire
qu’elle nécessite un contact humain.
Les fintechs, quant à elles, n’imposent pas de chiffre d’affaires minimum. Edebex
exige par contre de ses clients que leurs factures soient supérieures à 5000€, montant en-
dessous duquel le coût serait trop élevé pour le client (proportionnellement au montant de la
facture cédée). Notons que Edebex fixe également une limite supérieure au montant de la
facture mais qu’il s’agit uniquement d’une limite théorique liée au fait que son simulateur
n’est pas configuré pour traiter des factures supérieures à 500.000€. Dans la réalité, des
factures supérieures à ce montant sont acceptées bien qu’elles soient plutôt rares. Koalaboox
n’a pas d’exigences particulières quant au montant des factures financées mais impose une
limite de financement à ses clients, allant de 25.000€ à 450.000€ selon la taille du client. Elle
justifie cela par le fait qu’elle souhaite éviter qu’un client représente une part trop importante
de son portefeuille global de clients. Cette limite est donc amenée à évoluer avec la taille de
l’entreprise (Koalaboox). Les banques imposent également une limite de financement à leurs
clients mais celle-ci peut être bien plus élevée (jusqu’à 500 millions d’euros chez INGCF),
étant donné que les banques servent aussi des entreprises de plus grande taille.
En ce qui concerne le délai moyen d’obtention des liquidités, c’est-à-dire le temps qui
s’écoule entre la demande de financement et le moment où ce financement est perçu, il n’y a
pas de différences significatives entre les différents acteurs interrogés. Ce délai est
généralement compris entre 24 et 72 heures. Seule INGCF se démarque par un financement
en temps réel. Cela contredit partiellement les arguments de rapidité avancés par les fintechs.
Cependant, chez les banques, les étapes précédant le financement (contrat, analyses des
débiteurs, etc.) prennent souvent plus de temps car elles ne sont pas digitalisées. Dans
l’ensemble, les fintechs sont donc plus rapides que les banques.
62.
Un autre point de comparaison des fintechs par rapport aux banques concerne le
contrat de factoring. En effet, on pourrait penser que chez les banques les clients sont coincés
dans un contrat de factoring duquel il est difficile de sortir et qu’ils seraient plus libres chez
une fintech. Les interviews ne permettent pas de confirmer cette hypothèse. En effet, bien que
le contrat de factoring soit absent chez Edebex, il existe chez Koalaboox et les deux banques
interrogées mais il n’est en général pas contraignant. Les clients sont libres de rompre le
contrat et cela ne leur coûte rien.
Un lien peut être établi entre cette notion de qualité du portefeuille de débiteurs et le
fait que les banques exigent généralement de leurs clients qu’ils transmettent toutes leurs
factures. Cela permet en effet d’avoir une meilleure répartition du risque. Cette cession
complète du portefeuille est d’application chez BNPPFF mais pas chez INGCF où, tout
comme chez les fintechs, les clients sont libres de financer les factures qu’ils souhaitent.
Néanmoins, d’après Alexandre de Fournoux, l’exigence de cession complète du portefeuille
de débiteurs est amenée à disparaître à l’avenir, du moins pour les petits clients, étant donné
l’offre des fintechs qui proposent de la sélection de factures. Cela nécessitera d’évaluer le
risque différemment, ce qui passera probablement par l’utilisation des nouvelles technologies.
63.
Enfin, un dernier élément de comparaison des différents acteurs interrogés est le coût
du service de factoring. Pour rappel, ce coût est expliqué dans la section 3.3 et est détaillé
dans le tableau 3.1. En moyenne, le financement d’une facture coûte un peu plus cher sur la
plateforme Edebex que sur la plateforme Koalaboox (4% du montant de la facture contre
2,99% du montant de la facture). La comparaison de ce coût avec celui des banques n’est pas
possible car les banques communiquent peu sur le coût du factoring et surtout parce qu’elles
n’expriment pas le coût en pourcentage du montant de la facture. D’après les banques
interrogées, les fintechs sont chères et plus chères que les banques. Les fintechs ont donc un
désavantage sur ce point. Cependant, elles ciblent généralement des clients qui sont refusés
par les banques et qui sont prêts à payer ce prix plus élevé. Néanmoins, comme l’a soulignée
l’étude de Barkley & Schweitzer (2017) présentée dans la partie 2, il n’est pas toujours facile
pour les clients des fintechs d’interpréter correctement les prix annoncés et de les comparer
aux prix pratiqués par les banques. Les fintechs ne communiquent par exemple pas sur le taux
effectif global qui permettrait la comparaison avec les banques. Par conséquent, certains
clients sous-estiment le coût du financement auprès d’une fintech.
Il a également été demandé aux différents acteurs interrogés de préciser leur Unique
Selling Proposition, c’est-à-dire ce qui les différencie des autres et qui fait qu’un client
viendra chez eux plutôt que chez un autre acteur du marché. Le Unique Selling Proposition de
INGCF est de s’adapter à la demande du client en lui offrant un contrat sur mesure.
Concernant la partie financement de la plateforme ING Invoice Solutions, le Unique Selling
Proposition est la facilité avec laquelle le client peut obtenir un financement, simplement en
cliquant sur un bouton, et la rapidité avec laquelle ce financement peut être obtenu.
Pour Alexandre de Fournoux, BNPPFF offre ses produits aux clients de la banque et
une composante de son Unique Selling Proposition est donc de permettre aux clients de la
banque d’être mono bancaires. BNPPFF se différencie également de ses concurrents (fintechs
et banques) par sa présence internationale et donc le fait qu’elle soit capable de servir des
64.
clients ayant des activités d’exportation ou des filiales à l’étranger. Enfin, Alexandre de
Fournoux affirme que le choix de factor par le client dépendra aussi du tarif.
Ce que Koalaboox offre à ses clients et qui la différencie des autres sociétés offrant
des services de factoring est une solution intégrée de facturation, de gestion de ses débiteurs et
de financement. Koalaboox a vocation à offrir à ses clients un outil pour gérer leur entreprise.
Les deux banques interrogées sont d’accord pour dire que les fintechs ne représentent
pas une menace mais sont plutôt une opportunité. Il s’agit selon elles d’une concurrence qui
est bonne pour le marché et ses clients. L’arrivée des fintechs sur le marché du financement
de créances commerciales permet à la banque de se remettre en question en vue de se
transformer. C’est une évolution normale du marché à laquelle il faut s’adapter. Si la banque
parvient à s’adapter, cela ne représente pas une menace. Nicolas van Klinkenberg souligne
que cette adaptation requiert un important investissement, tant en argent qu’en temps, ainsi
que la mise en place d’autres modes de management. Il ajoute qu’il existe plusieurs difficultés
auxquelles la banque fait face dans son adaptation à ce nouveau contexte, principalement en
ce qui concerne le capital humain et les systèmes informatiques anciens de la banque qui ont
été construits au fil du temps. Cela rejoint ce que plusieurs études ont mentionné, notamment
celle de Milne & Parboteeah (2016) ou celles de Dickerson et al. (2016) et de PwC (2017) qui
mettaient en avant le fait que les banques ont tendance à moderniser les systèmes existants
plutôt que les réformer. Pour les banques interrogées, les fintechs représentent également une
opportunité de collaboration. Ce sujet sera développé dans le point suivant.
Plusieurs études présentées dans la partie 2 suggéraient que les fintechs pourraient
menacer les revenus des banques. PwC (2017), notamment, a estimé la perte potentielle à
65.
24% des revenus. Pour BNPPFF et INGCF, la menace pesant sur leurs revenus serait
négligeable car les fintechs sont encore très petites et le marché est tellement grand qu’il y a
de la place pour tout le monde. Cela contraste donc avec les 88% de banquiers et cadres
financiers craignant de voir leurs revenus diminuer au profit des fintechs dans l’étude de PwC
(2017). Il est important de rappeler que cette étude soulignait une variabilité de l’impact selon
le secteur, le secteur des payements, par exemple, étant potentiellement plus menacé.
Lorsque l’on s’intéresse aux parts de marché de ces deux acteurs, on peut se rendre
compte que les fintechs ne sont pas (encore) une menace pour les banques. En ce qui concerne
l’évolution des parts de marché des banques, la tendance est à la hausse pour INGCF tandis
qu’elle est à la baisse pour BNPPFF. Ces dernières années INGCF a connu une croissance de
ses activités supérieure à la croissance du marché et elle est passée d’environ 10% de part de
marché en 2011 à 17% en 2017. Nicolas van Klinkenberg explique cette hausse par la
coopération avec ING banque dont la part de marché est supérieure à celle d’INGCF et qui a
permis à l’activité de factoring de croître rapidement depuis son lancement en 2007. D’autres
développements ont également participé à cette croissance, notamment la syndication de
dossiers de factoring que INGCF a introduit sur le marché belge en 2012 et qui permet à
plusieurs factors de financer conjointement un très grand client et ainsi partager le risque.
BNPPFF a quant à elle connu une baisse de sa part de marché qui est passée de 60% il y a
environ dix ans à 38,6% en 2017. Bien que sa croissance fût inférieure à celle du marché,
BNPPFF n’a cessé de croître et sa part de marché actuelle est supérieure à la part de marché
de BNP Paribas Fortis (en tant que banque). Pierre-Olivier Maes explique la tendance à la
baisse de la part de marché par un accroissement de la concurrence bancaire suite aux accords
de Bâle II et III (cf. partie 1, section 1.2.1). En effet, de nombreuses banques ont alors poussé
leurs clients vers du factoring plutôt que vers un crédit classique, la consommation en fonds
propres étant moindre dans le cas du factoring. En ce qui concerne les parts de marché des
fintechs, celles-ci sont, comme le mentionne Xavier Corman, proches de zéro sur le marché
du factoring. Bien que Edebex et Koalaboox soient en croissance, les volumes qu’elles
réalisent sont encore trop petits pour avoir un impact sur les parts de marché des banques.
Edebex considère que la menace qu’elles pourraient représenter est assez faible car il est très
compliqué pour les banques de faire ce qu’une fintech fait. En effet, cela nécessite qu’elles
réinventent leur métier et donc qu’elles prennent des risques. De plus, d’après Xavier
Corman, l’investissement nécessaire sera probablement plus important que celui consenti par
les fintechs car les banques ne sont pas forcément équipées pour opérer cette transformation.
Pour lui, la banque pourra devenir une menace lorsqu’elle aura réussi à développer un service
semblable à celui offert par les fintechs. Cependant, même si les banques faisaient la même
chose que les fintechs, cela pourrait être une opportunité selon Edebex car cela ferait parler du
produit qui est souvent méconnu.
Il ressort également des interviews que les fintechs seraient des compléments aux
banques plutôt que des substituts, ce qui confirme ce que Milne & Parboteeah (2016)
mentionnaient par rapport aux plateformes de prêt en P2P. En effet, les deux fintechs
interrogées ne pensent pas pouvoir se substituer complètement aux banques pour ce qui est
des services de factoring. Tout comme les banques, elles considèrent qu’il y a de la place pour
les deux acteurs sur le marché, qu’elles n’offrent pas le même produit et ne ciblent pas la
même clientèle. Cela va dans le sens du sentiment qu’ont Edebex et Koalaboox de combler un
vide sur le marché, tel que mentionné précédemment. De plus, INGCF ne pense pas que son
nouveau produit à caractère fintech, ING Invoice Solutions, pourrait remplacer son offre
traditionnelle de produits de factoring. Il s’agit pour elle de deux produits distincts. En effet,
ING Invoice Solutions est caractérisé par une approche par facture tandis que l’offre
traditionnelle est caractérisée par une approche par client ou par portefeuille. Cela signifie que
pour ING Invoice Solutions, toute la gestion se fait par facture et le coût est calculé par
facture, contrairement au factoring traditionnel où la gestion se fait par client et le coût est
calculé par client. Chaque approche est applicable à un produit mais pas à l’autre. L’approche
par client n’est pas applicable au segment des professionnels (ciblé par IIS) car les clients y
sont très nombreux (près d’un million au total). L’approche par facture est quant à elle plus
appropriée au segment des professionnels car chaque client a un nombre limité de débiteurs et
donc de factures, contrairement aux autres segments de clientèle où les débiteurs par client
sont très nombreux.
Enfin, il a été demandé aux banques si elles perçoivent une différence en termes de
menace potentielle selon le business model proposé par les fintechs. Pour INGCF et BNPPFF,
s’il devait y avoir une menace, celle-ci serait équivalente quelque soit le business model.
Cependant, tant Nicolas van Klinkenberg que Alexandre de Fournoux affirment qu’il y a des
67.
business models dans lesquels ils ne croient pas. C’est particulièrement le cas pour le modèle
de place de marché. Les arguments avancés par Alexandre de Fournoux sont le risque de
manque de réactivité et la difficulté de trouver à la fois des clients vendeurs de factures et des
investisseurs pour acheter ces factures. Pour Nicolas van Klinkenberg, ce modèle ne serait pas
suffisamment proche du client. Or, pour lui, il est important d’établir une relation continue
avec le client et de se placer au centre de son écosystème. C’est également ce que
recommandaient de nombreuses études présentées dans la partie 2.
Il est important de noter aussi que pour Alexandre de Fournoux, la vraie menace
viendrait plutôt des entreprises telles que les GAFA(A) car elles ont d’importantes capacités
d’investissement, elles disposent de nombreuses données sur leurs clients, la digitalisation est
au cœur de leur stratégie, et elles viennent concurrencer les banques en développant des
services financiers. Cela rejoint ce que Dickerson et al. (2016) mentionnaient dans leur
article.
Pour INGCF, la stratégie principale face à l’arrivée des fintechs sur le marché du
financement des créances commerciales et de la digitalisation en général est de modifier les
produits existants en les digitalisant plutôt que d’apporter des nouveaux produits sur le
marché. Néanmoins, cette deuxième option est également envisagée puisque INGCF a pour
objectif de rentrer dans la supply chain du client en proposant du financement de stock ou de
commandes (appelé trade finance, cf. partie 1, section 1.3.4). De plus, ING a récemment
lancé un nouveau produit avec la plateforme ING Invoice Solutions. Ce lancement s’inscrit
dans une stratégie visant à couvrir tous les segments du marché. ING a en effet constaté que le
segment des professionnels n’était pas encore servi par les factors et représentait un marché
important. La banque est donc entrée sur ce segment de marché, en proposant dans un premier
temps une plateforme de gestion de factures et en y ajoutant le financement dans un deuxième
temps (en février 2017). Cette plateforme existe pour le moment uniquement en Belgique. A
l’avenir, elle pourrait être étendue à d’autres pays et ainsi entrer dans la stratégie d’ING au
niveau du groupe en favorisant le factoring cross-border, qui permet d’acheter des créances
d’entreprises étrangères à partir de la Belgique. Notons qu’une telle concurrence de la part de
banques internationales pourrait alors menacer les fintechs. Néanmoins, Nicolas van
68.
Klinkenberg n’est pas de cet avis car il estime que le marché est suffisamment grand pour
permettre aux fintechs de se développer.
Pour BNPPFF, la stratégie à adopter face à l’arrivée des fintechs sur le marché du
financement des créances commerciales est d’à la fois offrir des nouveaux produits et de
modifier la manière d’offrir les produits existants. En ce qui concerne l’offre de nouveaux
produits, ceux-ci sont encore en phase de développement et ne peuvent donc pas encore être
dévoilés. Notons toutefois que ces nouveaux produits font appel au digital pour réduire le coût
d’acquisition du client et ainsi cibler les petits clients. En vue de développer des nouveaux
produits et des nouveaux services, BNPPFF tente de diffuser un esprit d’innovation dans toute
l’entreprise. Cela rejoint ce que PwC (2017) mentionnait lorsqu’elle recommandait que la
culture d’innovation ne soit pas réservée uniquement au département R&D et qu’elle soit
déployée dans toute l’organisation. Concernant la manière d’offrir les produits existants,
BNPPFF tend, comme le suggéraient Dietz et al. (2015) dans leurs impératifs digitaux, à
digitaliser son marketing en passant par les canaux digitaux et à offrir des parcours clients
entièrement digitalisés. La banque souhaite également offrir des parcours clients différents
selon le segment de clientèle. De manière plus générale, le groupe BNP Paribas a développé
un plan de transformation de la banque pour la période 2017-2020 qui s’articule autour de
cinq axes : implémenter des nouveaux parcours client, améliorer le modèle opérationnel,
travailler différemment, adapter les systèmes d’information, et mieux utiliser les données pour
servir les clients (BNP Paribas, 2017). Ce dernier axe a également été évoqué par Alexandre
de Fournoux qui mentionne qu’il faut utiliser les données dont la banque dispose pour fournir
de la valeur ajoutée aux clients, ce qui rejoint ce que Dietz et al. (2015) recommandaient dans
leurs impératifs digitaux pour les banques. Enfin, Alexandre de Fournoux ajoute aussi la
possibilité d’utiliser la technologie de la blockchain étant donné ses liens avec le factoring et
l’automatisation qu’elle permet. Cela confirme ce que PwC (2017) et Citi (2016)
mentionnaient par rapport à l’intérêt croissant des banques pour cette technologie et le
potentiel qu’elle représente pour la transformation des anciens systèmes des banques.
Les deux banques interrogées insistent sur l’importance de se centrer sur le client, ce
qui rejoint ce que plusieurs auteurs ont avancé dans leurs études, présentées dans la partie 2,
notamment Dickerson et al. (2016) et PwC (2017). INGCF a vocation à faire partie de
l’écosystème de son client, ce qui a été identifié par Dickerson et al. (2016) comme une action
stratégique à déployer à long terme. BNPPFF a pour but de garder la relation avec le client et
de chercher à lui apporter de la valeur ajoutée. Ce dernier point est très important pour
69.
Alexandre de Fournoux car il estime que d’ici dix ans, tout le monde offrira le même produit
sur une plateforme et la transparence sur les prix sera telle que, pour faire de la marge, la
banque devra proposer autre chose qu’un simple service de financement. Selon lui, ce sera sur
la valeur ajoutée que le client basera son choix et il sera prêt à payer plus pour cette valeur
ajoutée. Apporter de la valeur ajoutée nécessite de mieux connaître son client afin de mieux
répondre à ses besoins. Il s’agit, pour Alexandre de Fournoux, du grand enjeu actuel.
Les interviews ont aussi cherché à tester l’hypothèse selon laquelle une des réponses
possibles des banques suite à l’arrivée des fintechs sur le marché du financement de créances
commerciales serait de baisser leurs prix. En effet, plusieurs études présentées à la partie 2,
notamment celles de Dietz et al. (2015) et de Milne & Parboteeah (2016), suggèrent que les
fintechs bénéficient d’un coût relativement faible. Cette hypothèse n’est pas vérifiée par les
interviews car, comme cela a déjà été mentionné, les fintechs sont plus chères que les
banques. Les banques ne doivent donc pas modifier leur politique tarifaire, du moins pas tant
que les fintechs n’ont pas réussi à réduire leurs coûts. Selon Nicolas van Klinkenberg, le
travail humain reste relativement important chez les fintechs, ce qui explique pourquoi leur
coût est élevé. Pour lui, les fintechs pourraient représenter une menace et demanderaient une
réaction en termes de tarifs de la part des banques lorsqu’elles seront parvenues à réduire leurs
coûts. Il ajoute que la banque devra être suffisamment digitalisée pour pouvoir absorber cette
réduction de prix. Dietz et al. (2015) ont également mentionné le coût important des fintechs
dans leur étude et suggéraient que la réduction de ce coût constitue un facteur de succès qui
permettra aux fintechs de croître et d’avoir un impact sur les acteurs financiers traditionnels.
Alexandre de Fournoux rappelle que les fintechs ne ciblent pas le même segment de clients
que les banques et qu’elles peuvent donc se permettre de fixer un prix plus élevé. Il
mentionne également que la stratégie de prix est fonction du segment de clients et que le prix
pratiqué par les banques n’est donc pas comparable au prix pratiqué par les fintechs. Il ajoute
que les banques doivent d’abord être capables d’offrir un service équivalent aux fintechs,
c’est-à-dire un parcours client entièrement digitalisé, avant de se poser la question du prix.
b) Collaboration
Les deux banques interrogées sont ouvertes à la collaboration avec les fintechs. Elles
considèrent que cela pourrait leur apporter une amélioration du service client grâce à des
méthodologies innovantes ainsi qu’une certaine rapidité et flexibilité dans le développement
de nouvelles solutions étant donné que les fintechs ne sont pas freinées par un historique,
70.
contrairement aux banques. Alexandre de Fournoux ajoute que les fintechs peuvent également
leur apporter leurs capacités informatiques, notamment leur capacité d’algorithme, leur
capacité à traiter des masses de données et leur capacité à intégrer leur solution à des logiciels
partenaires. De leur côté, les banques peuvent apporter aux fintechs leurs connaissances en
matière d’analyse du risque ainsi que leurs connaissances relatives aux lois. Les deux banques
interrogées notent en effet que les fintechs rencontrent souvent des difficultés à se conformer
aux lois et n’investissent pas nécessairement dans cette matière car elles sont encore trop
petites et ne sont donc pas encore visibles. Pour BNPPFF, la banque peut aussi apporter à la
fintech sa capacité à trouver facilement du financement sur le marché ainsi que son expertise
et ses compétences dans le métier du factoring, ce qui permettrait à la fintech de croître en
volume. INGCF mentionne également l’apport en termes de connaissance que la banque a du
client (sur son comportement, ses besoins).
Les deux fintechs interrogées sont elles aussi ouvertes à la collaboration avec les
banques mais elles mentionnent toutes les deux le fait que la collaboration entre les deux
acteurs dépendra beaucoup des banques. Elles mentionnent notamment le fait qu’au sein des
banques, certains sont en faveur de la collaboration avec les fintechs, d’autres pas, et qu’il est
difficile pour les banques de prendre une décision. Cela rejoint ce dont Dietz et al. (2015)
parlaient dans leur étude lorsqu’ils affirmaient que les décisions des banques sont
généralement basées sur le consensus. Ces auteurs recommandaient dès lors aux banques de
réformer leurs structures organisationnelles et décisionnelles en vue de surmonter cet
obstacle. Koalaboox ajoute aussi qu’il faut rester prudent car certains banquiers considèrent
les fintechs comme un danger et pourraient donc vouloir les attaquer. Selon Edebex, la
collaboration avec les banques n’est pas indispensable et ce serait plutôt les banques qui
viendraient vers les fintechs pour voir ce qu’elles font.
Edebex voit la collaboration avec les banques comme un moyen de mieux satisfaire
les clients des deux parties. En effet, la banque pourrait renvoyer à Edebex des clients qui
seraient mieux servis par cette dernière, et inversement. Cela correspond au programme de
référence identifié par PwC (2015) et présenté dans la partie 2 de ce mémoire (section 2.2.2).
Pour Koalaboox, la collaboration avec les banques permettrait d’avoir accès à du capital, à
des fonds pour le refinancement de leurs activités de factoring ainsi qu’à un réseau. Leur
apport à la banque serait de l’innovation et de la capacité à créer des nouveaux produits. En ce
qui concerne la forme de collaboration, Koalaboox est en faveur de partenariats à long terme
qui lui permettraient de continuer à innover et développer de nouvelles solutions. Néanmoins,
71.
Frédéric Lodewyk mentionne que s’il était dans la position du banquier, il favoriserait
l’acquisition de la fintech ou la prise de participation dans le capital de la fintech car il juge
qu’il est plus facile d’acheter que de refaire.
INGCF considère effectivement qu’il est intéressant d’investir dans une fintech car
cela peut lui permettre de développer plus rapidement sa digitalisation ou d’internaliser un
développement externe et le sauvegarder. Nicolas van Klinkenberg mentionne que les fintechs
sont assez instables étant donné leur statut de start-up et que le fait de les racheter ou
d’acheter des parts permet de s’assurer que le produit qu’elles développent existera toujours,
même en cas de faillite. Pour Alexandre de Fournoux, l’investissement dans une fintech
dépendra des synergies qui peuvent exister entre la fintech et la banque ainsi que du type de
fintech et ce qu’elle propose. Tout comme INGCF, il affirme que cet investissement
permettrait d’accélérer la transformation digitale de la banque. Il ajoute que ça permettrait
d’acquérir de nouveaux clients et de déployer plus facilement un esprit d’innovation au sein
de la banque grâce à une collaboration plus étroite.
Une autre forme de collaboration avec les fintechs que INGCF a mis en place est le
développement conjoint de produit, tel qu’identifié par PwC (2015) et décrit dans la partie 2.
72.
Enfin, INGCF collabore également avec la fintech Data.be qui est une plateforme
collectant des données sur de nombreuses entreprises belges provenant de sources telles que
la Banque Carrefour des Entreprises, la Banque Nationale, la Sécurité Sociale, ou encore le
SPF Justice (Data.be, 2017). Cela permet à INGCF de collecter plus facilement des données
sur ses clients et de contrôler leur qualité ainsi que celle de leurs débiteurs.
entreprise active dans le big data en utilisant des données de partenaires. La collaboration
peut également consister à mettre à disposition des locaux pour des start-ups et
éventuellement proposer aux clients de la banque de collaborer avec ces start-ups. BNP
Paribas Fortis a notamment participé à la création de Co.Station BXL en 2015 qui est un
espace de coworking permettant aux start-ups de se développer grâce au soutien des
entreprises partenaires et favorisant la collaboration entre les différents acteurs en présence
(BNP Paribas Fortis, 2016a).
Différentes formes de collaboration entre les banques et les fintechs sont donc
possibles et, d’après les deux banques interrogées, il n’y aurait pas de modèle idéal de
collaboration. Ces dernières considèrent que la forme de collaboration à mettre en place
dépendra des intérêts de la banque dans la fintech et des synergies qui peuvent exister.
Nicolas van Klinkenberg mentionne notamment qu’une acquisition pourrait s’avérer utile
pour maîtriser la technologie et le développement de la fintech. Il ajoute qu’une alternative à
l’acquisition serait une prise de participation significative dans la fintech de sorte que la
banque puisse gérer et influencer la stratégie suivie par la fintech. Alexandre de Fournoux
affirme qu’il est important de rencontrer les fintechs (et les start-ups en général) pour discuter
avec elles et voir comment elles peuvent apporter de la valeur à la banque et de quelle
manière il faudrait collaborer.
Bien que les banques soient ouvertes à la collaboration avec les fintechs, certains
obstacles doivent être surmontés pour que cette collaboration soit possible. Pour INGCF, un
frein à la collaboration concerne la différence de culture vis-à-vis du risque entre fintechs et
banques, les deuxièmes étant plus averses au risque que les premières. Cette inadéquation de
l’appétit pour le risque a également été avancée par PwC (2015) comme une raison expliquant
la réticence de certaines banques à collaborer avec les fintechs. PwC (2015) mentionnait aussi
le risque réputationnel que la collaboration peut représenter. Ce point de vue est partagé par
BNPPFF et INGCF pour qui la taille de la banque, son historique et sa responsabilité vis-à-vis
de la banque nationale et de ses clients fait qu’elle ne peut pas agir comme une fintech car elle
est plus exposée à ce risque réputationnel.
3.5. Discussion
L’analyse des interviews a démontré que les banques et les fintechs ne ciblent pas les
mêmes segments de clients. Néanmoins, il apparaît que les banques tendent à cibler les
segments servis par les fintechs. De plus, on peut s’attendre à ce que ces dernières ciblent
74.
également les segments de clients actuellement servis par les banques. En effet, l’étude de
Culkin et al. (2016) a montré que c’est déjà le cas au Royaume-Uni. Il y aurait donc une
certaine convergence dans les segments de clientèle ciblés par les deux acteurs, ce qui
impliquerait plus de concurrence sur le marché. Cependant, les banques et les fintechs se
considèrent comme des compléments plutôt que des substituts et affirment que la taille du
marché est suffisante pour permettre à chacun de se développer.
Il n’est dès lors pas surprenant d’apprendre que les fintechs ne sont actuellement pas
perçues par les banques comme étant une menace mais plutôt comme étant une opportunité.
Cette perception est renforcée par l’analyse des parts de marché des différents acteurs. Celle-
ci a en effet démontré que les fintechs n’ont pas encore eu d’impact significatif sur la part de
marché des banques et que leur part de marché sur le marché du factoring est minime.
Cependant, les fintechs pourraient devenir une menace pour les banques, surtout si ces
dernières ne font rien face à leur arrivée sur le marché. En effet, Edebex et Koalaboox sont en
croissance et affirment trouver facilement du capital pour se financer. Koalaboox est même
déjà rentable (depuis novembre 2016), ce qui n’est par contre pas le cas pour Edebex qui est
encore en phase de développement. De plus, ces deux fintechs bénéficient d’un bon taux de
fidélité de leurs clients. Au-delà d’une extension géographique, Koalaboox prévoit aussi
d’ajouter de nouveaux services à son offre existante. Edebex, quant à elle, prévoit plutôt
d’élargir son offre à de nouveaux clients, en gardant le même produit mais en le proposant
dans d’autres pays et en faisant varier des caractéristiques telles que le montant des factures
financées.
75.
Les banques doivent donc saisir l’opportunité que représente pour elles l’arrivée des
fintechs sur le marché du financement des créances commerciales avant que les fintechs ne
deviennent une menace. L’analyse a montré que les banques interrogées ont déjà entamé leur
transformation digitale ainsi que des collaborations avec les fintechs.
De leur côté, les fintechs doivent rester vigilantes et continuer à investir dans leur
développement. En effet, bien que les banques ne soient actuellement pas perçues par les
fintechs interrogées comme étant une menace mais plutôt comme étant des partenaires
potentiels, elles pourraient devenir une menace dans les années à venir. Comme cela a été
développé dans l’analyse, Edebex considère la menace actuelle des banques comme très faible
étant donné la difficulté que ces dernières rencontrent dans le développement de business
models semblables à ceux des fintechs. Néanmoins, ING a démontré qu’elle en était capable
avec le lancement de ING Invoice Solutions. Rappelons que cette plateforme a pu être mise
en place grâce à une collaboration avec des fintechs. Toutefois, comme l’a souligné Xavier
Corman, de tels développements de la part de banques peuvent bénéficier aux fintechs en
faisant connaître le produit. De plus, on peut supposer que les fintechs bénéficient d’un first
mover advantage ou avantage du premier entrant.
Conclusion
Pour conclure, nous avons vu dans la partie 1 que les fintechs sont un phénomène
récent et se sont principalement développées suite à la crise financière de 2007-2008. Cette
dernière fut un élément déclencheur car elle a résulté en une diminution des prêts bancaires
octroyés aux PME ainsi qu’en une hausse des liquidités disponibles. Des fintechs se sont alors
développées pour répondre à la demande de financement des PME en mobilisant ces
liquidités. D’autres facteurs permettent également d’expliquer l’émergence des fintechs,
notamment Internet et les nouvelles technologies, la disponibilité des ressources humaines ou
encore des facteurs d’ordre démographique. Nous avons vu également que les solutions de
financement offertes par les fintechs sont diverses et couvrent plusieurs parties du bilan.
Parmi ces solutions, le financement des créances commerciales a fait l’objet de ce mémoire.
Cette forme de financement est intéressante à étudier, particulièrement dans le cas de la
Belgique, car nous avons vu que la marché belge du factoring est en croissance et que la
Belgique est un des pays européens où le factoring est le plus important en pourcentage du
PIB. Enfin, nous avons vu qu’il existe trois modèles de fintechs offrant du financement de
créances commerciales : un modèle de financement de factures grâce à un fonds, un modèle
de place de marché mettant en relation vendeurs de factures et investisseurs, et un modèle
d’escompte dynamique optimisant le moment du payement de la facture.
blanche ou encore l’acquisition. Parmi les réponses stratégiques que les banques doivent
mettre en place, la digitalisation, l’innovation et la concentration sur le client sont également
recommandées par les études présentées.
Au terme de l’étude empirique réalisée dans ce mémoire, il apparaît que les fintechs de
financement de créances commerciales ne représentent pas une menace pour les banques
étudiées mais constituent plutôt une opportunité. Cette perception est supportée par l’analyse
des segments de clientèle qui a montré que ces deux acteurs ne ciblent pas les mêmes clients
et que les fintechs combleraient un vide sur le marché. L’analyse des parts de marché va
également dans ce sens. De plus, nous avons vu que l’offre et le positionnement des fintechs
et des banques diffère. Dès lors, la conclusion générale de cette étude est que l’impact de
l’arrivée des fintechs sur le marché du financement des créances commerciales est positif pour
les banques plutôt que négatif. En effet, cela permet aux banques de se remettre en question et
de revoir leur manière de fonctionner ainsi que la manière de proposer leurs services de
factoring. Nous avons vu que les banques interrogées ont déjà entamé leur transformation
digitale et que des nouveaux produits, tels que ING Invoice Solutions, sont déjà sur le marché
ou en cours de développement. Les fintechs représentent également une opportunité de
collaboration. Nous avons vu que les banques étudiées ont déjà établi diverses collaborations
avec les fintechs, notamment le développement conjoint de produit, l’incubation, la marque
blanche ou encore le refinancement de fintechs.
Les banques sont donc en bonne voie pour saisir l’opportunité que représentent pour
elles l’arrivée des fintechs sur le marché du financement des créances commerciales. Elles
sont encouragées à continuer dans cette voie et à consentir les investissements nécessaires tant
que les fintechs sont encore petites. En effet, vu leur croissance, les fintechs pourraient
devenir une menace dans les années à venir en l’absence d’une réaction adéquate des banques.
Nous avons vu par exemple qu’en Chine, les fintechs ont déjà atteint la taille des banques et
les concurrencent donc directement. Il est également recommandé au management des
banques de revoir leur structure organisationnelle et décisionnelle en vue d’être plus réactives
et de faciliter la prise de décision. Il s’agit en effet d’un obstacle important qu’il convient de
79.
surmonter en vue de mettre en place une stratégie. Enfin, un aspect central de la stratégie à
adopter en réponse à l’arrivée des fintechs sur le marché sera très certainement de collaborer
avec ces fintechs et, plus globalement, avec les start-ups technologiques. Il est donc
recommandé aux banques qu’elles rencontrent ces fintechs et ces start-ups et qu’elles étudient
les formes de collaborations envisageables. Dans cette optique, la mise en place d’un
incubateur semble constituer une bonne entrée en la matière.
En ce qui concerne les fintechs, il est recommandé qu’elles continuent à investir dans
leur développement afin de maintenir leur avantage du premier entrant. En effet, nous avons
vu que les banques tendent à servir les segments de clients ciblés par les fintechs et à proposer
des produits semblables à ceux offerts par les fintechs. Dès lors, la concurrence sur le marché
va probablement s’accroître dans les années à venir. Cela pourrait avoir comme conséquence
de pousser les prix à la baisse. Etant donné les prix élevés pratiqués actuellement par les
fintechs, il est recommandé qu’elles baissent leurs prix afin d’être compétitives dans le futur.
Une autre recommandation au management des fintechs (et qui concerne également les
banques) est de se centrer sur le client et de lui apporter de la valeur ajoutée. Au vu des
perspectives d’avenir, les différents acteurs sur le marché du financement de créances
commerciales devront se différencier sur la valeur ajoutée apportée au client, comme le
suggérait Alexandre de Fournoux. Cela pose la question de la pérennité du modèle de fintech
de type place de marché, qui se limite à offrir un financement et ne serait pas suffisamment
centré sur le client, comme le mentionnait Nicolas van Klinkenberg.
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