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Baccalauréat ES/S

Session 2019

Épreuve anticipée : Français

Durée de l’épreuve : 4 heures

Coefficient : 2

PROPOSITION DE CORRIGÉ

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I. Question (4 points)
Quelle(s) relation(s) le poète entretient-il avec la nature dans les poèmes du corpus ?

Commencer par une présentation des 4 poèmes du corpus et du thème de la nature bien souvent
fréquenté par les poètes.

Dans les 4 poèmes du corpus, la nature permet au poète d’exprimer ses sentiments et ses souvenirs.

Tantôt la nature exprime les sentiments du poète et constitue un écho à ce que ressent le poète. Ce
traitement romantique de la nature s’illustre chez Lamartine : la poète trouve un miroir de son âme
dans le spectacle de la nature. Ce spectacle ne constitue pas un réconfort mais un double pour le
poète.

Tantôt c’est l’homme qui rejoint la nature. Les infinitifs employés par Anna de Noailles et Andrée
Chédid présentent des actions humaines qui associent l’homme à la nature. Chez Anna de Noailles, il
s’agit de « Vivre », « sentir » les éléments de la nature. Les verbes pronominaux employés par
Andrée Chédid renforcent le lien étroit qui rapproche l’homme de la nature : « se lier » « se mêler »
« s’unir ».

Chez Yves Bonnefoy, le souvenir exprimé à l’imparfait naît d’un élément identifié de la nature et
décrit : « la pluie d’été ».

II. Vous traiterez ensuite, au choix, l'un des sujets suivants (16 points)

1. Commentaire
Andrée Chédid, « Destination : arbre » (Texte C).

Ce qui frappe d’abord à la lecture du poème est le travail sur les verbes à l’infinitif qui sont comme
une succession d’actions que le lecteur, le poète, l’homme en général est invité à adopter. L’emploi
de l’infinitif maintient le lecteur dans l’incertitude et laisse une place importante à l’interprétation. Le
double sens et l’écho entre poète et lecteur sont rendus possibles par ces infinitifs sans sujet. Le
poète semble d’abord conseiller au lecteur d’agir ainsi, puis, avec le verbe « évoquer » on comprend
que la voix poétique est elle aussi incluse dans l’action qui nous relie tous à la nature.

Pour commenter ce poème, on sera donc attentif à la place que le poète se donne discrètement et à
la relation qui se tisse avec le lecteur.

L’autre élément central du poème est, bien sûr, la nature ! Elle est partout, sous de multiples formes
et surtout, elle illustre des sentiments que partagent les hommes. L’arbre vit en groupe, presque en
société, puis ailleurs, il est seul, isolé, orphelin. La personnification de l’arbre se déploie dans le
poème pour exprimer des sentiments très humains. C’est une image poétique de l’ordre du topos.
Bien souvent la nature, l’arbre, un lac (…) ont pu exprimer des sentiments humains, particulièrement

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chez les poètes romantiques du XIXème siècle. Mais l’autre mouvement est plus original : à son tour,
c’est l’homme qui devient nature, invité à s’unir aux arbres comme le lierre enroule une clôture.

I- La voix poétique dans le poème

a- Une voix poétique mystérieuse

L’emploi de verbes à l’infinitif prive le texte de toute phrase, de tout pronom personnel. Le
traditionnel « Je » lyrique est absent ce qui laisse le lecteur s’interroger sur l’agent de tous les verbes
d’actions qui émaillent le texte (on en compte 19 tout au long du texte)

b- Un appel au lecteur ?

A cette interrogation initiale, le lecteur pourra se sentir appeler par l’infinitif, sous le mode de
l’exhortation. La poétesse semble donner des conseils sur l’attitude à tenir, un chemin à suivre pour
s’associer à la nature.

c- Le travail du poète.

Mais bien vite, deux verbes à l’infinitif semblent décrire plus précisément le travail du poète en deux
étapes : « déchiffrer » et « évoquer ». Ces verbes à l’infinitif sont donc tout autant adressés à la
poétesse elle-même qu’à son lecteur. C’est la position de tout homme dans la nature.

II- La nature, écho de sentiments humains

a- Personnification de la nature

L’arbre, plus qu’un simple être vivant est étroitement associé à l’humanité. Prenant sa place dans un
« jardin », lieu fréquenté et cultivé par l’homme, il en est par la suite « orphelin » tel un enfant
abandonné. La personnification se poursuit particulièrement dans les « appels » que la poétesse sait
entendre.

b- L’arbre isolé « au cœur d’une métropole »

L’arbre de la ville que la poétesse se propre d’évoquer à partir du V16 est « un seul », le groupe
nominal est isolé par sa place dans le vers. Les strophes qui suivent le présentent sous un triste
aspect, comme écho à la tristesse des villes.

III- L’homme rendu à l’état de nature

a- Une union sacrée

L’emploi de verbes pronominaux marque un engagement de l’homme dans le processus


d’association à la nature qui est présenté dans le poème. Il s’agit de « s’unir », « se lier » « se mêler »

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Certains verbes valables aussi bien pour l’arbre que pour l’homme « renaître de l’argile »,
« s’affranchir des sols et des racines ». L’image est celle de l’arbre qui se déploie comme l’homme est
invité à le faire.

b- La nature parle à l’homme et lui permet de redécouvrir la valeur du temps.

L’antithèse des v 36 et 38 « l’éphémère » et « la durée » vient apporter une leçon sur le temps à
l’homme voyageant d’ « arbre en arbre »

Prolongement
« Correspondances » in Les Fleurs du Mal, Baudelaire

« La Nature est un temple où de vivants piliers

Laissent parfois sortir de confuses paroles;

L’homme y passe à travers des forêts de symboles

Qui l’observent avec des regards familiers. »

2- Dissertation
« Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise… », écrit Anna de Noailles (texte B, dernier
vers). Pensez-vous que ce vers puisse définir l’attitude du poète face au monde ? Vous vous
appuierez sur les textes du corpus, les œuvres que vous avez étudiées en classe ainsi que
sur vos lectures personnelles.

Le sujet interroge l’ « attitude du poète face au monde » à partir d’une citation d’Anna de
Noailles. Le candidat doit mobiliser ses connaissances sur la fonction et le rôle du poète.
On pense à la place du poète romantique, guide des peuples, mage mettant en lumière la
vérité de l’homme. Mais cette fonction portée par les romantiques, avec à leur tête Victor
Hugo est abondamment contredite par d’autres poètes au XIXème siècle. C’est notamment
le cas de Théophile Gautier, et des poètes parnassiens. Pour Théophile Gautier, qui a
défendu la théorie de « l’art pour l’art », le poète n’a pas à être utile au monde.

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Dès lors deux positions de poètes s’opposent et elles trouvent un écho dans toute l’histoire
de la poésie. Entre poésie utile et poésie ludique, entre l’engagement de certains poètes et
combat pour la beauté absolue, difficile de définir « l’attitude du poète » au singulier. Les
attitudes des poètes face au monde sont multiples et la production poétique témoigne d’une
immense diversité.

Pour répondre au sujet, le plan dialectique était approprié. Dans un premier temps, on aura
étudié l’attitude du poète rêveur et comme extérieur au monde, tel que le décrit Anna de
Noailles. Ensuite, il faudra observer d’autres façons d’être poète : le poète intégré à la
société. L’exemple typique est le poète romantique, Victor Hugo, prenant des positions
politiques dans ses poèmes, mais on pensera aussi aux poètes engagés du XXème siècle.
Enfin n’oublions pas que le poète exprime son regard original sur le monde, sa façon d’être
au monde toute personnelle. Il permet au lecteur d’accéder à un autre point de vue que le
sien propre sur la condition de l’être au monde. Comme l’a dit Rimbaud, le poète est un
« voyant », il voit une autre réalité derrière le monde et y invite son lecteur.

Problématique : La place du poète est-elle « au bord du monde » ou au contraire, ne doit-il pas se


mêler à la foule des hommes pour mieux dire ce qu’est le monde ?

I- Un poète rêveur comme extérieur au monde


a- La poésie, un divertissement ludique

Le rêveur, poète de cour, poète d’amour, n’est pas concerné par « la vraie vie ». Seul le plaisir
poétique lui importe. Depuis le XVème siècle et les grands rhétoriqueurs, mais aussi Du Bellay,
Ronsard… la poésie française est jonchée de poètes qui œuvrent pour le plaisir et le divertissement
de meurs lecteurs.

b- Un travail artistique

Loin d’être futile, ce plaisir inutile est ce qui fait la beauté de l’art. L’idée a été développée par les
Parnassiens au XIXème siècle et par Théophile Gautier défendant « l’art pour l’art » : "Il n'y a de
vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid, car c'est l'expression de
quelque besoin, et ceux de l'homme sont ignobles et dégoûtants".

II- Le poète, voix de la société


a- La poésie a un message à porter au monde

Comme le pense Victor Hugo, le poète est un guide pour le peuple. C’est ainsi qu’il vivait sa mission
de poète comme étroitement liée à son œuvre politique. Les pamphlets contre Napoléon III, Les
Châtiments, sont une manière de vivre un engagement dans le monde.

b- La poésie engagée

Lors d’événements tragiques le poète ne peut rester silencieux ou parler d’autre chose que de ce qui
concerne le monde. Nombre de poètes du XXème siècle se sont attelés à la tâche pour combattre le
fascisme ou la guerre (Aragon, Prévert, Eluard, Boris Vian…)

III- Le poète, voyant d’une autre réalité derrière le monde.


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a- Le poète expose ses sentiments humains.

Derrière le poète, il y a la condition de l’homme. Il n’y a certes pas d’utilité directe mais la place du
poète est d’être à côté de l’homme son lecteur qui apprendra de lui-même en apprenant de l’autre

b- Le voyant.

Le poète voit et transmet ce que le lecteur ne connaît pas. Baudelaire a développé cette théorie à
l’origine du symbolisme. Il voit au –delà du monde et derrière les réalités obscures, offrant une
nouvelle ère à son lecteur.

3. Invention
« Nulle part le bonheur ne m’attend », écrit Lamartine. Dans un texte poétique d’une
certaine ampleur, vous prendrez le contrepied de cette affirmation, en évoquant
l’épanouissement et la plénitude du poète au sein de la nature. Vous pourrez choisir
d’utiliser une forme versifiée ou une prose poétique.

- Le sujet d’écriture d’invention invite les candidats à une écriture poétique, en prose poétique ou en
vers. Il y a donc tout lieu d’être attentif à chaque mot choisi, non seulement pour son sens mais aussi
pour son esthétique. Les rythmes et les sonorités participent au sens. La simple prose est exclue. On
choisira donc un vers et on s’y tiendra tout au long du poème (à la manière de l’alexandrin de
Lamartine ou d’Anna de Noailles). Un autre choix peut consister à utiliser le vers libre comme Andrée
Chédid et Yves Bonnefoy. Enfin le poème en prose, tel que l’a pratiqué Baudelaire, est une dernière
possibilité.

L’ « ampleur » attendue par le sujet est celle du poème de Lamartine, souffle poétique, tout d’abord
et longueur de 25 – 30 vers environ afin de développer le lieu de la nature dans toute sa plénitude.

La nature doit être particulièrement présente dans le poème réalisé. On choisira un lieu aimé ou
connu et on aura à cœur de développer une description de ce lieu naturel. Surtout la nature sera
propice à l’éveil de sentiments épanouissant chez le poète en herbe dont le candidat joue le rôle.
Pour cela, l’emploi de la première personne du singulier paraît plus aisé. En effet, le « Je » est
particulièrement adapté à l’expression des sentiments personnels que pourra faire naître la nature.

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