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COURS DE MODES ALTERNATIFS DE

RESOLUTION DES CONFLITS (M.A.R.C.)


Me Louis GAKPA - Greffier

Juriste-Fiscaliste

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INTRODUCTION

Pour les pays modernes, la justice étatique est l’institution voulue, structurée et mise
en place par le législateur et dont les litiges ou conflits qui surviennent doivent être
tranchées par les tribunaux dotés de pouvoir juridictionnel, celui de dire le droit.

L’organe juridictionnel classique, dans l’œuvre de « dire le droit », connait de


nombreuses failles qui mettent le justiciable le plus souvent et depuis fort
longtemps dans une zone d’inconfort juridique. En plus de la lourdeur et de la
lenteur traditionnelles qui caractérisent l’administration en général, on reproche à
la justice étatique d’être trop coûteuse, encombrée et parfois corrompue. De moins
en moins, les justiciables font confiance à leur justice.

Cet désamour pour la justice étatique a détourné bon nombre de citoyens de


l’appareil juridictionnel et judiciaire, et fait naître chez lui le souci de rechercher une
voie différente, une justice alternative pour résoudre les difficultés qu’ils rencontrent.

Les modes alternatifs de résolution des conflits (M.A.R.C.), peuvent être définis comme
des modes volontaires et non juridictionnels de résolution des conflits. Ainsi, chaque
fois que les parties en conflit décident de ne pas soumettre leur différend au tribunal
et d’y trouver elles-mêmes une solution par des modes amiables, on parle de modes
alternatifs de résolution des conflits (M.A.R.C.).

Comme leurs noms l’indiquent, ces modes sont alternatifs à la justice étatique, une
voie parallèle à celle-ci, une possibilité nouvelle de trouver des réponses
satisfaisantes aux litiges. Au contraire de la justice étatique, les modes alternatifs de
résolution des conflits sont respectueux de la volonté des parties ; Celles-ci, sont
libres d’y recourir.

La faveur aux modes amiables est millénaire. Elle appartient à la sagesse des nations
et à la pensée antique : «accord vaut mieux que plaid » dit-on.

Le développement vertigineux des M.A.R.C. apparait comme un remède aux maux


dont souffre la justice étatique. On les retrouve diversement dans tous les secteurs
du droit et dans tous les pays.

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Cette diversité nous conduit, dans un souci pédagogique, à passer en revue les
différents modes alternatifs en insistant sur un mode qui est l’arbitrage qui est de plus
en plus institutionnalisé.

TITRE I : L’ARBITRAGE

L’arbitrage est un mode alternatif de résolution des conflits dans lequel un tiers choisi
par les parties, l’arbitre, intervient pour prendre des décisions qui les engagent. C’est
l’un des modes non étatique des règlements de litige. Nous avons pour preuve son
institutionnalisation très croissante dans le monde.

L’arbitrage est l’un des modes sinon le plus important mode non étatique de
règlement des litiges ; nous en avons pour preuve son institutionnalisation à travers
le monde. Son importance commande dès lors la nécessité d’appréhender son
objet, c'est-à-dire son concept avant d’en examiner le mécanisme.

CHAPITRE I : LE CONCEPT D’ARBITRAGE

L’intérêt suscité par l’arbitrage invite à en apprécier la notion avant d’en examiner les
sources.

Section1 : La notion d’arbitrage

L’étude de l’arbitrage nous conduit à interroger l’histoire pour pouvoir apprécier


l’évolution et en préciser la nature juridique.

Paragraphe 1 : historique et évolution

L’arbitrage est une notion qui correspond à une pratique fort ancienne qui a évolué
dans le temps.

A – L’historique de l’arbitrage

L’arbitrage, mode alternatif de résolution des conflits par excellence plonge ses
racines dans les deux grandes civilisations de l’antiquité : les civilisations grecques et
romaines.

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Dans la Grèce antique, l’arbitrage était déjà une pratique connue. Ainsi, DEMOSTHENE
(384-322 av. J-C), disait déjà de l’arbitrage en ces termes : « Si les parties ont un
différend concernant leurs obligations privées et désirent choisir un arbitre, il est licite
qu’elles désignent qui leur plaît. Mais lorsqu’elles ont choisi un arbitre par accord
mutuel, il faut qu’elles s’en tiennent fermement à sa décision et qu’elles ne fassent pas
appel de celle-ci devant un autre tribunal, la sentence doit être définitive…», c’est-à-dire
suprême.

De ce qui précède, on peut dire qu’à cette époque reculée, l’arbitrage était déjà
conçu et pratiqué comme de nos jours.

De même, à Rome, l’institution était déjà connue elle serait apparue dès les 6éme et
7éme siècle av J-C. Peu après cette époque, CICERON disait de l’arbitrage qu’il est «…
le moyen de ne pas gagner un bon procès ni, de perdre complètement un mauvais
procès ». On voit déjà en filigrane l’adage « un mauvais arrangement vaut mieux
qu’un bon procès » que conseillent depuis toujours les praticiens du droit.
L’origine de l’arbitrage se révèle également dans les saintes écritures, des deux plus
grandes religions : le christianisme (G.31-37) et l’islam.

L’arbitrage, institution traditionnelle, a résisté à l’usure du temps et a resurgi dans


notre époque moderne où il connait une forte institutionnalisation.

B- L’évolution de l’arbitrage

La plupart des Etats modernes ont adopté l’arbitrage, dans sa signification


traditionnelle en tant que mode de résolution des conflits. Mais ce mode traditionnel
a évolué dans son organisation. Mais de nos jours, l’arbitrage se formalise de plus en
plus dans le sens de son institutionnalisation.

Au plan interne des Etats, on assiste à l’adoption d’une abondante législation qui
favorise le recours à l’arbitrage et la création de centres et de cours d’arbitrage.

Au niveau international, les Etats et même les organismes privés professionnels se


regroupent pour trouver un cadre institutionnel pour le règlement des litiges qui
naissent dans leurs relations et l’exploitation de leurs activités professionnelles.

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Aussi assiste-t-on à la conclusion de conventions internationales dont le but est de
mettre en place des institutions arbitrales permanentes (O.H.A.D.A., C.I.R.D.I.,
C.N.U.D.C.I., C.C.I.). Cette évolution de l’arbitrage invite à déterminer sa nature
juridique.

Paragraphe 2 : La nature juridique de l’arbitrage

L’arbitrage revêt une nature hybride qui tient à la fois du contrat et de la juridiction.

A- La nature contractuelle de l’arbitrage

Elle se manifeste aussi bien dans le fondement du pouvoir de juger reconnu aux
arbitres que dans la liberté des parties dans la procédure d’arbitrage.

Le caractère contractuel de l’arbitrage tient à l’idée que la justice des arbitres, a son
fondement dans la volonté des parties en litige, volonté affirmée par la convention
d’arbitrage.

En effet, l’arbitrage suppose une convention, expression de la volonté des parties de


recourir à cette forme de justice privée. Le principe de la notion contractuelle de
l’arbitrage est confirmé par l’Article 21 de l’acte uniforme relatif à l’arbitrage, en ces
termes : « En application d’une clause compromissoire ou d’un compromis
d’arbitrage, toute partie à un contrat... Peut soumettre un différend d’ordre
contractuel à la procédure d’arbitrage… ». Ainsi, la décision de recourir à l’arbitrage
prise par l’une des parties, sans l’accord de l’autre partie ne peut déclencher le
mécanisme de l’arbitrage.
La nature contractuelle de l’arbitrage se retrouve également dans la procédure
d’arbitrage. L’article 14 de l’AUA, offre une grande liberté aux parties qui peuvent
recourir soit directement, soit par référence à un règlement d’arbitrage, régler la
procédure arbitrale. Elle peut en outre soumettre celle-ci à la procédure de leur choix. Il
s’ensuit que l’autonomie de la volonté, caractéristique des contrats domine toute
entière, la procédure d’arbitrage.

Cependant, l’expression « arbitrage » connote dans l’idée du juriste une signification


juridictionnelle. En effet, les parties soumettent librement leur litige à un arbitre qui
va rendre une décision. Ce qui restitue à l’institution sa nature juridictionnelle.
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B - la nature juridictionnelle de l’arbitrage

La nature juridictionnelle est liée à la décision de l’arbitre qui est un acte


juridictionnel .Le critérium de l’acte juridictionnel est si divers qu’il peut s’attacher
soit aux effets de l’acte, à son objet, soit encore à un processus d’élaboration.

Au plan des effets, la décision des arbitres, comme tout autre acte juridictionnel, est
revêtu de l’autorité de la chose jugée, une telle qualité attachée à cette décision par
la volonté du législateur confère à l’arbitrage sa nature juridictionnelle, ainsi la
sentence arbitrale acquiert dès son prononcé l’autorité de la chose jugée
relativement aux litiges qu’elles tranchent.

De même, la nature juridictionnelle de l’arbitrage se révèle par son objet qui est celui
de trancher leur litige (Art.15 AUA).

Un autre critère de qualification d’acte juridictionnel a trait à la procédure ayant


concouru à sa réalisation. Ainsi l’acte est juridictionnel si son émission est
sanctionnée par une procédure destinée à donner des garanties à ses destinataires.
En effet, le tribunal arbitral dont la saisine ouvre une instance qui se termine par
une sentence, confirme la nature juridictionnelle de l’arbitrage.

Cette nature juridictionnelle de l’arbitrage influe nécessairement les caractères


de l’arbitrage.

Paragraphe 3 : Les caractères de l’arbitrage

IL résulte du type d’organisation que les parties ont voulu imprimer à leur
arbitrage. D’une manière générale, on distingue trois grands caractères de l’arbitrage.
On a d’une part arbitrage institutionnel et arbitrage ad hoc ensuite arbitrage civil et
arbitrage commercial et enfin arbitrage interne et arbitrage international.

A- Arbitrage institutionnel et Arbitrage ad hoc

1) L’arbitrage institutionnel
Ici, l’arbitrage est formalisé et confié à une institution ou une organisation qui
tranche les litiges selon une procédure préétablie par un règlement arbitral.
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Ainsi en est-il de la Cour commune de justice et d’arbitrage (C.C.J.A.) créée par le
traité de l’OHADA et dont le siège se trouve à Abidjan. Cette Cour n’est en principe
pas une juridiction. L’arbitrage institutionnel présente de façon générale trois
caractéristiques principales.
-L’existence d’autorité chargée d’administrer les arbitrages (organisation et police de
l’instance arbitrale). L’institution d’arbitrage est partagée entre les fonctions
d’administration de la justice arbitrale et les fonctions purement juridictionnelles.
-L’existence d’un règlement d’arbitrage dont l’objet est de régir l’instance arbitrale.
-L’existence d’un secrétariat qui exerce dans taches matérielles de fourniture (salles…)
aux arbitres et assure la liaison entre les parties et eux et parfois les experts.

Ces caractéristiques de l’arbitrage institutionnel le distinguent fondamentalement de


l’arbitrage ad hoc.

2) L’arbitrage ad’ hoc


C’est celui qui met en relation les arbitres et les parties en l’absence de toute
institution permanente d’administration de l’arbitrage. D’une façon générale,
l’arbitrage ad’ hoc et l’arbitrage institutionnel peuvent coexister.
B- Arbitrage civil et Arbitrage commercial
Le critère de distinction des deux types d’arbitrage est la définition de la
commercialité des litiges en cause .Ainsi l’arbitrage est civil lorsque les relations ayant
suscité le litige ont un caractère civil, imprégnant au litige sa nature civile ainsi dans
l’ordre interne la plupart des Etats n’admettent pas la possibilité pour les parties au
litige de recourir à l’arbitrage chaque fois que leur contestation à un caractère civil.
C’est le cas de la COTE D’ IVOIRE, avant l’entrée en vigueur du traité de l’OHADA.
En revanche quand le litige a un caractère commercial, possibilité est reconnue aux
parties de saisir un arbitre ou un tribunal arbitral aux fins de règlement du différend.
Et, le litige est commercial lorsque la contestation est née à l’occasion des relations
commerciales entre les parties.
Dans le cadre de l’OHADA, aucune distinction n’est faite entre un arbitre civil et un
arbitre commercial. Tous les litiges peuvent faire l’objet d’une convention d’arbitrage.
Ainsi, l’AUA « a vocation à s’appliquer à tout arbitrage (art.1, AUA).

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C- Arbitrage interne et Arbitrage international
L’arbitrage est interne ou national lorsqu’il est pratiqué au plan local des Etats, devant
des institutions d’arbitrage des Etats. C’est le cas lorsque deux entreprises ivoiriennes
en litige décident de recourir à l’arbitrage de la chambre de commerce d’Abidjan.
Est également, interne tout arbitrage pratiqué dans l’espace OHADA par des Etats
membres de ladite organisation. En effet, selon l’acte uniforme, lorsque tous les
éléments constitutifs de l’arbitrage notamment le litige, l’instance, procédure, se
réalisent dans l’espace OHADA, il est considéré comme se réalisant au plan interne
de l’Etat.
-L’arbitrage international recouvre une notion complexe dont il faut préciser le sens.
Dans son sens étroit, l’arbitrage international est celui qui concerne des sujets de
droit international : c’est l’arbitrage de droit international public. Ce type d’arbitrage
n’a aucun rapport avec la matière qui nous intéresse ici. L’arbitrage de droit
international public se réalise par le moyen de négociations diplomatiques devant
aboutir à des règlements pacifiques des différends entre sujets de droit international.
Il est à noter toutefois que dans le cadre de certaines organisations internationales
telle que l’OMC que ce type d’arbitrage se juridictionnalise de plus en plus dans les
litiges d’ordre économique qui opposent ses membres.
Est également international, tout arbitrage soumis à une convention internationale
ou au règlement d’une institution international d’arbitrage. Dans ce sens, l’arbitrage
institué par l’OHADA est un arbitrage international tout comme celui prévu par la
convention de Washington du 18 mars 1965 créant le centre international de
résolution des différends relatifs aux investissements(CIRDI).
L’arbitrage du CIRDI, international par sa source est aussi qualifié de mixte ou
d’arbitrage traditionnel. En effet, il est mis en place pour trancher les litiges portant
sur les investissements et qui opposent un sujet de droit international, généralement
un Etat à une personne privée étrangère.
D’une manière générale, dans les rapports entre personnes privées, le caractère
international de l’arbitrage résulte du critère économique. Ainsi, l’arbitrage est
international lorsqu’il met en cause les intérêts du commerce international. En
d’autres termes, un arbitrage commercial est international quand l’intérêt
économique en jeu dépasse les frontières d’un pays.

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Dès, lors il ne trouve son fondement que dans les contrats internationaux conclus
entre les parties ayant des nationalités différentes.
Ce type d’arbitrage est particulièrement réglementé par la plupart des Etats comme
c’est le cas en France.
L’analyse de la notion d’arbitrage nous a permis d’examiner l’histoire, d’en
déterminer la nature juridique et les caractères. Mais elle ne suffit pas à
appréhender tout le concept d’arbitrage. Aussi est- il intéressant d’étudier les
sources pour restituer à l’arbitrage tout son concept.

Section 2 : Les sources de l’arbitrage.

Les sources juridiques de l’arbitrage sont de deux ordres :


- Les sources internes
- Les sources internationales

Paragraphe 1- Les sources internes

Elles relèvent Du droit national, c’est-à-dire, interne de chaque Etat .Nous nous
intéresserons successivement aux sources de l’arbitrage français et celui de l’espace
OHADA.

A- Les sources en droit français


En droit français, l’arbitrage est régi par de nombreux textes. Le code civil, en son
article 2060, en exclut l’accès aux litiges relatifs à l’Etat et à la capacité des
personnes. Initialement limité aux différends d’ordre commercial, l’accès à
l’arbitrage est étendu par la volonté du législateur français à tous les litiges (nature
civile) intervenus entre professionnels. Ainsi, la loi du 15 mai 2001 modifiant l’article
2061 du code civil français soumet à l’arbitrage tout litige né de contrats conclus à
raison d’une activité professionnelle civile ou commerciale. Après le code civil qui
délimite le champ d’application de l’arbitrage, le nouveau code de procédure civile
vient encadrer la procédure arbitrale. Les articles 1442 et suivants définissent les
règles d’accès à l’arbitrage (art.1442).Ils déterminent les principes de procédure,
notamment la liberté des parties (Art.1460 CPC). Celles-ci gardent le contrôle de
l’affaire et conduisent l’instance arbitrale à leur guise.

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En vertu de cette liberté, les parties peuvent, aux termes de l’article 1474 nouveau
du Code Procédure Civile demander à l’arbitre de statuer en amiable composition,
en équité, c’est-à-dire de trancher le litige qui les oppose en écartant l’application
d’une règle de droit en raison des circonstances de l’espèce. Ce qui donne à l’arbitre
plus de pouvoir que le juge qui ne peut qu’appliquer la règle de droit.
Les dispositions du nouveau code procédure civile français sont confirmées par
celles de l’article 631 du code de commerce qui reconnaissent et définissent la
clause compromissoire comme moyen de mise en œuvre du mécanisme de
l’arbitrage.

De ce qui précède, en France, le droit de l’arbitrage trouve son sa source dans les
grands textes constituant l’épine dorsale du droit privé, droit qui encadre de façons
générale, la vie et l’activité des particuliers. Ce droit français de tout temps influencé
les droits des pays africains notamment d’Afrique francophone.

B - L’ESPACE OHADA
Dans l’espace OHADA, la distinction entre les sources antérieures de celles du régime
communautaire de l’OHADA s’impose.
1) Le droit interne antérieur des Etats

D’une manière générale, les Etats africains sont restés en marge de


l’abondante activité législative suscitée par le développement de l’arbitrage. En
cette matière comme toute autre, les Etats africains francophones se sont
largement inspirés du droit français.
En Côte D’ivoire, l’arbitrage était méconnu du droit ivoirien et le code de procédure
civile de1972 n’y a laissé aucune place. C’est la Cour suprême qui, par un arrêt du
04/04/1989, a admis la validité de l’arbitrage en droit ivoirien obligeant, ainsi le
législateur règlementer la matière. La loi 93-671 du 03 aout 1993, adoptée à cet effet
est « une copie conforme » du droit français de l’arbitrage. Elle reprend le texte
français en ces dispositions les plus contestables. Ainsi, aux termes de l’article 1, al 1 et
2 de cette loi, « la clause compromissoire ne peut être valablement stipulée en matière
interne qu’entre les commerçants ».Dès lors, la voie de l’arbitrage est fermée aux
litiges intervenants entre non commerçants à l’occasion de leur activité civile
comme le recommandait le droit français.

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Mais à la différence de celui-ci qui a évolué, le droit ivoirien de l’arbitrage est resté
en l’état. Le législateur ivoirien n’y a apporté aucune réforme. Comme en Côte
d’ivoire, le législateur togolais qui a été le premier à moderniser le droit de
l’arbitrage, l’a fait de manière très limitée. En effet, il s’est largement inspiré de «
l’ancien droit français »de l’arbitrage pour créer le droit togolais de l’arbitrage issu
du code de procédure civil du 15 mars1982 cette réforme du droit togolais a connu
son aboutissement dans les années 90.

Le droit sénégalais de l’arbitrage s’inspire à la fois du droit français (inspiration


traditionnelle) et de la loi type de la CNUDCI (Conférence des Nations Unies relative
au droit commercial international) pour ce qui est de l’arbitrage international.
Contrairement aux droits français et ivoirien, les droits sénégalais et malien donnent la
possibilité à l’Etat de compromettre à l’ exception des contestations touchant à
l’exercice de la puissance publique. En revanche, le droit sénégalais reprend à son
compte la prohibition de la clause compromissoire dans les matières autres que
commerciales. Toute cette législation largement inspirée du droit français est
remise en cause par le nouveau droit de l’arbitrage découlant du traité de l’OHADA
et de l’Acte Uniforme relatif à l’arbitrage.
2) Le régime communautaire de l’OHADA

Dans l’espace OHADA, le droit de l’arbitrage a trois sources essentielles. Ce sont le


traité constitutif de l’organisation, l’acte uniforme relatif à l’arbitrage(A.U.A) et le
règlement d’arbitrage de la cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA).

L’acte créateur de l’OHADA a été signé à Port LOUIS en ÎLE MAURICE le 17 octobre
1993 par 17 pays d’Afrique occidentale et centrale. Son objet est, dans un souci
d’intégration économique, d’harmoniser les législations éparses des Etats membres
dans le domaine des droits des affaires.

Ce traité contient deux grandes catégories de dispositions qui ont trait à l’arbitrage.
Il s’agit de l’art. 2 qui définit les matières juridiques qui devront faire l’objet de
d’harmonisation. Ce texte inclut l’arbitrage dans ses dispositions. Dès lors, cette
matière devra être harmonisée. De même le traité de l’OHADA consacre, en son
titre IV art 21-26, l’arbitrage.

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L’Acte uniforme relatif à l’arbitrage est adopté le 11 mars 199 à Ouagadougou et
entre en vigueur le 11-06-1999. Son champ d’application géographique est limité à
l’espace OHADA.

Au plan matériel, il s’applique conformément à L’article 1, à tout arbitrage. Comme


on le voit, ce texte ne distingue pas entre arbitrage commercial et arbitrage civil, de
même qu’il ne comporte aucune prohibition de la clause compromissoire dans les
matières non commerciales. Dès lors, l’A.U.A. corrige les lacunes des législations
internes antérieures qui ne reconnaissent pas l’arbitrage civil. En effet, l’art 10 du
traité de l’OHADA abroge toute disposition contraire antérieure à son adoption.

Le règlement d’arbitrage (R.A.) de la CCJA est fondé sur les Art 21et suivants du
traité mais principalement sur l’Art. 26. Ce texte a pour objet l’organisation de
l’arbitrage institutionnel. Manifestation de la volonté des Etats membres de
l’organisation d’où il tire sa force obligatoire le Règlement arbitral de la CCJA, se
distingue de plupart des règlements d’arbitrage par sa nature publique.

Le R.A. s’applique aux litiges d’ordre contractuel soumis à l’arbitrage de la CCJA. Le


contrat, fait générateur de la contestation doit être rattaché à un Etat partie au traité
constitutif soit par son lieu d’exécution qui, en tout ou en partie, doit être situé dans
un Etat partie, soit par le domicile ou par la résidence habituelle de l’une des parties
dans un Etat membre.

Le RA de la CCJA est comme tous les RA, une sorte de code de procédure civile qui
définit les différents aspects de l’instance arbitrale depuis la saisine du tribunal
jusqu’au prononcé de la sentence. Mais, le RA de la CCJA présente une particularité
par rapport aux autres règlements ce qui ne s’arrête pas seulement au prononcé de
sentence et à sa correction. Il va au-delà pour envisager sa reconnaissance et son
exécution forcée.

Les dispositions du R.A. de la C.C.J.A. tout comme les autres sources de l’arbitrage de
l’espace OHADA ne peuvent lier que les Etats membres de cette organisation. Elles
ne concernent pas les Etats tiers.

Paragraphe 2 : Les sources internationales.


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Les sources internationales de l’arbitrage sont essentiellement constituées par
les conventions internationales et dans une certaine mesure par la pratique arbitrale.

A- Les conventions internationales

Nous distinguons la convention de New York du 10/06/1958 des autres conventions


internationales.

1) Les conventions de New York du 0/0601958


Cette convention a pour objet la reconnaissance et l’exécution des sentences
arbitrales étrangères. L’idée est de favoriser l’application nationale des sentences
arbitrales. Plusieurs Etas membres de l’OHADA sont parties à cette convention. Elle
fixe les règlements de reconnaissance et d’exécution des sentences rendues dans
un Etat autre que celui où leur application est dictée.
La convention de New York pose une règle importante quant à l’efficacité de ses
dispositions. Selon l’art 7 AU, la convention n’a, aucune autorité sur un traitement
plus favorable à la reconnaissance et à l’exécution d’une sentence étrangère qui
résulterait soit d’un traité soit de la législation interne du pays où la sentence est
invoquée. Ainsi, se trouve écarté le principe traditionnel de la suprématie des traités
sur la loi interne puisque la convention s’efface devant une législation interne plus
favorable.

2) Les autres conventions

On peut les regrouper en deux grandes catégories. Se retrouvent dans la première


catégorie, les conventions internationales dont l’objet porte sur un arbitrage
spécifique. Il en est ainsi de la convention de Washington du 18/03/1965 relative au
règlement des différends relatifs aux investissements entre les Etats et ressortissants
d’autres Etats. Tous les Etats membres de l’OHADA, à l’exception de la Guinée
équatoriale, sont parties à cette convention. La convention de Washington a mis en
place un centre d’arbitrage : le centre international pour le règlement des différends
relatifs aux investissements (CIRDI).

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La spécificité de l’arbitrage CIRDI tient à ce qu’il ne porte que sur les différends d’ordre
juridique en rapport direct avec un investissement. Ce différend doit mettre en
présence un Etat et une personne privée, physique ou morale d’un autre Etat.

Dans la seconde catégorie de conventions internationales, c'est-à-dire celles qui ne


portent pas spécialement sur l’arbitrage mais susceptibles de contenir des
dispositions relatives à l’arbitrage, se trouvent les accords de coopération en
matière judiciaire. Ce sont notamment l’accord de non-agression et d’assistance en
matière de défense (A.N.A.D ; du 21/04/1987(Burkina, Ci, Mauritanie, Mali, Niger,
Sénégal, Et Togo). IL en est de même de la convention de coopération en matière de
justice entre les pays de l’EXOCAM du 12 sept1961 (Cameroun, Centrafrique, Congo,
CI, bénin, Gabon, Burkina, Madagascar, Mauritanie, Niger, Togo).

A toutes ces conventions, s’ajoute la pratique arbitrale.

B - La pratique arbitrale
En cette matière, nous ne considérons que la pratique de l’arbitrage institutionnel
en raison de son développement. On peut retenir deux éléments qui constituent la
source de l’arbitrage. Il s’agit d’ abord des règlements d’arbitrage qui constituent
une source du droit de l’arbitrage en ce qu’ils organisent le déroulement complet de
l’instance. Il en de même de la jurisprudence des tribunaux d’arbitrage pour peu
qu’elle soit diffusée commentée. Ainsi, elle pourrait dégager les principes généraux
de règles de conflits de lois. Elle pourrait aussi jouer un rôle important dans
l’élaboration de règles matérielles fondées sur les usages, la pratique contractuelle
et les principes généraux du droit.

Chapitre 2 : Le recours à l’arbitrage.

Le recours à l’arbitrage donne à examiner successivement le champ


d’application de l’arbitrage, sa mise en œuvre et la procédure arbitrale.

Section 1 : Le domaine d’intervention de l’arbitrage

L’arbitrage couvre un vaste domaine. Il s’agit de façon générale des droits dont les
parties ou leurs titulaires ont la libre disposition.

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Ce qui exclut du champ d’application de l’arbitrage, ceux dont les titulaires n’ont pas
la libre disposition, c'est-à-dire les droits extrapatrimoniaux.

Paragraphe1 : Les conflits d’intérêt économique

Les conflits d’intérêt économique ou encore les droits patrimoniaux sont le


domaine privilégié de l’arbitrage. Ils couvrent d’une manière générale le domaine
des contrats. Ainsi, la voie de l’arbitrage est ouverte à toutes les matières qui
peuvent faire l’objet de contrat.

Les conflits d’intérêt économique, champ d’intervention par excellence de l’arbitrage


sont, soit individuels, soit collectifs.

A- Les conflits individuels

Ce sont ceux qui mettent en jeu un intérêt individuel opposant deux personnes ou
deux parties. Ces conflits peuvent naître en toute matière pouvant faire l’objet de
contrat. Il s’agit de façon synthétique du droit des affaires, dans son sens le plus large.
Les conflits individuels se rencontrent le plus souvent dans le cadre de l’entreprise. Ils
opposent l’employeur et le salarié, à l’occasion du contrat de travail ou même deux
salariés au sein de l’entreprise, dans le cadre des relations de travail.
Les conflits individuels se rencontrent également au sein de l’entreprise, entre
détenteurs de capitaux. Ainsi en est-il des contestations touchant aux intérêts
personnels des associés. C’est aussi le cas du litige né de la divergence d’opinion sur
la conduite des affaires sociales entre deux actionnaires ou groupes d’actionnaires.

Dans toutes ces hypothèses, les parties peuvent recourir à l’arbitrage pour trouver
une solution au litige qui les oppose.

B - Les conflits collectifs

Ce sont les différends qui mettent en présence un intérêt collectif, qui opposent des
employeurs à un groupe de salariés.
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Les conflits collectifs d’ordre économique tendent à modifier les relations juridiques
entre salariés et employeurs, en vue d’établir un nouvel équilibre social.
Les litiges collectifs se rencontrent également en matière social (droit du travail, droit
des sociétés pour les litiges entre détenteurs de capitaux, etc.).
La résolution de ces types de conflits peut faire intervenir un arbitre ou un tribunal
arbitral.
Le domaine d’intérêt de l’arbitrage tel que analysé ci- dessus n’est pas illimité. Il
s’intéresse aux contrats pour ignorer toutes les matières qui ne peuvent faire l’objet
de contrat.

Paragraphe 2 : Les limites du champ d’application

Deux limites essentielles sont faites au champ d’intervention de l’arbitrage. Ce sont


d’une part l’ordre public et d’autre part les conflits d’intérêt familial.

A - L’ordre public

L’ordre public peut être littéralement défini comme la tranquillité et la sécurité qui
doivent être assurées aux citoyens.
L’ordre public c’est une notion fluide et difficile à préciser. L’ordre public suppose
un conflit entre l’intérêt général, celui de la communauté, protégé par l’Etat et les
intérêts privés, particuliers des individus qui composent ladite communauté. La
notion d’ordre public marque la suprématie de certaines règles légales protégeant
les intérêts généraux et l’ordre dans l’Etat sur les règles conventionnelles inspirées
des intérêts particuliers. Dès lors, toutes les matières intéressant l’ordre public ne
peuvent faire l’objet de convention. Or, l’arbitre n’intervient que sur les droits dont
les parties ont la libre disposition ; on ne peut y recourir pour trancher les litiges
nés des matières dans lesquelles les parties ne peuvent valablement contracter.

A-1 Les conflits familiaux

Comme les matières protégées par l’ordre public, les conflits familiaux constituent
également une limite au recours à l’arbitrage.
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Ces conflits portent également sur les droits dont les intéressés n’ont pas la libre
disposition. Les conflits familiaux obéissent de façon générale à un certain contrôle
judiciaire pour la sauvegarde des intérêts essentiels qui ne peuvent être abandonnés
à la liberté contractuelle.

Ainsi, toutes les questions intéressant la famille (filiation, adoption, mariage, divorce,
succession) ne peuvent être tranchées par la voie de l’arbitrage.

Section 2 : La mise en œuvre du mécanisme de l’arbitrage

Paragraphe 1 : La saisine de l’organe arbitral

Pour recourir à l’arbitrage, il est indispensable pour les parties de conclure une
convention d’arbitrage, soit avant le litige (clause compromissoire) soit après
(contrat compromis d’arbitrage).

A- La clause compromissoire

Il s’agit d’une clause que les parties insèrent dans le contrat et qui a pour but de
préciser qu’en cas de difficultés nées de l’exécution du contrat, les parties renonceront
à leur droit de saisir le juge au profit d’un arbitre ou d’un tribunal arbitral. Une telle
clause doit être acceptée de toutes les parties en cause. Il suit de là que le
désaccord de l’une des parties suspend ladite clause.

La clause compromissoire découlant de la volonté des parties de préférer la voie de


l’arbitrage à celle de la justice ne peut résulter que d’un contrat. Il s’agit là d’une
position logique car l’arbitrage ne peut porter que sur une difficulté née de
l’exécution d’un contrat passé entre les parties, sur des droits dont elles ont la libre
disposition.

Longtemps enfermé en matière commerciale, la validité de la clause compromissoire


est maintenant admise en matière civile. Elle est valable en toute matière et même
les pouvoirs publics peuvent y recourir sauf dans les matières qui exigent l’emploi de
la puissance publique.

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La clause compromissoire est souscrite par les parties au moment de la conclusion du
contrat pour s’accorder sur l’attitude à adopter en cas de difficulté dans l’exécution
du contrat. Mais les parties peuvent également exprimer leur volonté de soumettre
le litige né à un arbitrage par un compromis d’arbitrage.

B - Le compromis d’arbitrage
Le compromis d’arbitrage est en quelque sorte une convention d’arbitrage. En
effet, lorsque les parties n’ont pu insérer dans leur contrat une clause
compromissoire, elles peuvent recourir à l’arbitrage dès la survenance d’une
contestation née de l’exécution du dudit contrat.
Le compromis d’arbitrage non seulement exprime la volonté des parties de recourir
à l’arbitrage mais détermine et fixe les règles et principes de procédure qui
gouvernent l’instance arbitrale et également le choix des arbitres.
Le compromis d’arbitrage définit les relations entre les arbitres et les parties. Il
détermine par ailleurs leurs pouvoirs et responsabilités. Ainsi, dans l’arbitrage, les
parties ont la libre direction du déroulement de l’instance.
Comme on le voit, le compromis d’arbitrage s’apparente à une sorte de code de
procédure défini par les parties et qui s’impose aux parties, aux arbitres et même à
l’organe arbitral dont il détermine la composition.

Paragraphe 2 : La composition de l’organe arbitral

L’organe arbitral est composé d’arbitres dont les modes de désignation et les pouvoirs
sont déterminés par les parties à travers la convention d’arbitrage.

A- Le choix des arbitres

Aux termes de l’art. 5 de l’AU, « les arbitres sont nommés, choisis, révoqués ou
remplacés conformément à la convention des parties ». Ce texte affirme ainsi
expressément que la désignation des arbitres est subordonnée à la volonté des
parties. Ce n’est qu’à défaut de cette volonté ou en cas d’insuffisance de celle-ci que
les dispositions (Règlement arbitral de la CCJA) légales en la matière trouvent à
s’appliquer.

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Le choix des arbitres peut dépendre de nombreux facteurs (complexité ou au
contraire relative simplicité du litige, importance des facteurs techniques etc.), dont
les parties sont particulièrement bien placées pour en apprécier l’importance et
l’incidence sur la composition du tribunal arbitral.

L’art.8 de l’Acte uniforme, prévoit que « le tribunal arbitral est constitué soit d’un seul
arbitre, soit de trois arbitres ». Le nombre d’arbitres imposé par l’Acte uniforme
constitue une limitation à la liberté des parties.

Les parties peuvent désigner directement les arbitres soit dans la clause
compromissoire soit dans le compromis d’arbitrage. La désignation des arbitres
dans la clause compromissoire apparait exceptionnelle en raison du caractère
éventuel du litige au moment de la conclusion du contrat. En revanche, on conçoit
aisément qu’une telle désignation soit effectuée lorsque la convention d’arbitrage
est constituée d’un compromis. La clause compromissoire pourrait cependant
désigner le ou les arbitres par référence à leur fonction.

Le plus souvent la clause ne désigne par des arbitres, ni par le nom, ni par la fonction,
mais établit une procédure de désignation. Fréquemment, la clause prévoit que
chacune des parties désignera un arbitre, le troisième arbitre étant choisi par les
arbitres désignés par les parties.
Les parties peuvent également désigner indirectement les arbitres. La désignation
indirecte suppose que les parties s’adresseront à un tiers qui sera chargé de
désigner les arbitres. Le tiers dont il s’agit peut-être une personne physique ou une
personne morale. C’est le cas quand les parties décident de recourir à un arbitrage
institutionnel qui est alors tenu de procéder à la désignation des arbitres.

Toutefois, les règlements d’arbitrage précisent clairement que leur intervention, en


tant qu’autorité de nomination est subsidiaire par rapport à la volonté des parties.
Ce n’est qu’en cas de désaccord des parties sur la nomination des arbitres que
l’institution procèdera à cette désignation.

Comme on le voit, en matière de nomination des arbitres, le principe est celui de la


primauté de la volonté des parties avec pour corollaire la désignation directe par
celle – ci.
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On ne peut faire entorse à ce principe que lorsque les parties n’arrivent pas à
s’accorder sur le choix du ou des arbitres. En ce cas, le juge étatique est autorisé, à
la demande de l’une des parties, à se substituer à la partie défaillante pour la
nomination de l’arbitre : c’est l’assistance judiciaire à la constitution du tribunal
arbitral prévue par les art.5 et 8 de l’acte uniforme.

Une fois nommés, les arbitres exercent leur mission conformément à la convention
d’investiture qui précise leur statut.

A- Le statut des arbitres

Aux termes de plein l’Art. 6 de l’Acte Uniforme, « l’arbitre doit être une personne
». Il doit « avoir le exercice ses droits civils » et « demeurer indépendant et impartial
vis-à-vis des parties ».

L’exigence de la qualité de personne physique implique que la personne morale ne


peut être arbitre. De même, le plein exercice des droits civils suppose la capacité de
l’arbitre. Cette capacité doit être appréciée d’après la loi personnelle de l’arbitre qui,
dans l’espace OHADA, est la loi nationale de l’arbitre. La capacité de l’arbitre doit en
outre être pleine et entière. Ce qui exclut de la qualité d’arbitre, toute personne
frappée d’une interdiction de faire le commerce. En revanche, nul ne peut être
empêché d’être désigné arbitre en raison de sa nationalité. On en déduit qu’une
personne physique étrangère peut, sans nul doute exercer la fonction d’arbitre.

L’arbitre doit par ailleurs être indépendant et impartial vis-à-vis des parties. Cette
exigence vise à rejeter la notion de « l’arbitre-partie » reconnue dans certains
systèmes juridiques, notamment aux USA.

La condition d’indépendance, doublée ou non de l’impartialité, se retrouve dans la


plupart des législations et des règlements d’arbitrage.
L’exigence de l’indépendance suppose l’absence de relation de travail, de
collaboration ou de parenté entre l’une parties et un arbitre. D’une manière générale,
il s’agit de toute circonstance, d’une intervention de l’arbitre qui favoriserait les
intérêts de l’une des parties. Une telle relation ou circonstance est prohibée dans la
mesure où elle ferait peser des soupçons de partialité sur l’arbitre.
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Ce qui constituerait une cause légitime de récusation au profit de l’autre partie. La
récusation d’un arbitre n’intervient que pour cause révélée après sa nomination.

Les faits de dépendance et de partialité sont révélés par la mise en œuvre de


l’obligation d’information qui pèse sur les arbitres. En effet, l’art. 7 de l’Acte uniforme,
précise en son al 2 que « si l’arbitre suppose en sa personne une cause de récusation,
il doit en informer les parties et ne peut accepter sa mission qu’avec leur accord
unanime et écrit ». Ce qui met les parties devant leur responsabilité : ou bien, elles
décident d’user de leur droit de récusation ; ou bien, elles y renoncent, estimant que
les faits révélés ne sont pas de nature à entacher l’indépendance et l’impartialité de
l’arbitre et donc de poursuivre sa mission.

Le recours à l’arbitrage suppose une convention manifestant l’accord des deux parties
à cette forme de règlement de litige. Au contraire du juge étatique qui ne peut refuser
de juger, nul n’est obligé d’être arbitre dans une affaire donnée. Il suit de là que
l’arbitre doit accepter sa mission et en informer les parties par écrit. C’est le contrat
d’arbitrage ou contrat d’investiture, contrat synallagmatique par excellence, qui
définit les droits et obligations des parties (les parties au litige et les arbitres).

Il pèse sur les arbitres, l’obligation d’être indépendant et impartial, de respecter


l’égalité des droits des parties au cours de l’instance. De même, l’arbitre a l’obligation
de poursuivre sa mission jusqu’à son terme. Il doit également se conformer aux
prescriptions des parties contenues dans la convention d’investiture. Il doit encore
respecter la procédure établie par les parties pour la résolution de leur conflit.

En contrepartie des obligations des arbitres, les parties doivent les rémunérer par le
paiement des honoraires. En pratique, ces honoraires sont très élevés.

Trois méthodes permettent de fixer les honoraires des arbitres :

-la méthode ad valorem, permet de calculer la rémunération du litige en fonction du


taux du litige ;

-la deuxième, dite per diem, a pour but de fixer le montant par rapport à un taux
journalier ou horaire qui s’applique aux prestations de l’arbitre ;

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- la troisième fixe un montant forfaitaire et global.

Dans l’arbitrage CCJA, la méthode retenue est celle de la fixation ad valorem comprise
dans une fourchette de pourcentage minimum et maximum. Ainsi, pour un litige dont
le taux est compris entre 25milions et 125millions, le montant des honoraires de
l’arbitre est de 1,5 % mini et 5,00% maxi du taux du litige. Le montant obtenu prend
en compte le temps passé, la rapidité, de la procédure et la complexité du litige. De
façon habituelle, le paiement des honoraires s’effectue par le versement de
provisions fixées par la Cour. Elles sont dues en principe en parts égales par les parties.

Le montant des honoraires et plus généralement les frais de l’arbitrage, ne constitue


pas l’objet du litige, il n’a donc pas à figurer dans la sentence et même s’il y figure, il
n’est nullement couvert l’autorité de la chose jugée attachée à la sentence. En
revanche, la répartition des honoraires ou des frais de l’arbitrage entre les parties fait
partie de l’objet du litige.

A la fin de l’arbitrage, l’arbitre non encore payé dispose d’une action en paiement de
ses honoraires contre les parties en vertu du contrat qui les lie.

La question de la responsabilité de l’arbitre laisse entrevoir des idées opposes. La


première, surtout localisée aux USA vise, à conférer aux arbitres une large immunité.
En raison de la mission juridictionnelle qu’il exerce, ce régime qui lui est appliqué est
calqué sur celui du juge étatique. La seconde idée pose le principe que l’arbitre est un
prestataire de services et, à ce titre, il doit répondre de ses négligences et fautes
comme n’importe quel professionnel, prestataires de services. En effet, la négligence
de l’arbitre cause sans aucun doute des dommages aux parties.

La question de l’immunité des arbitres est unanimement acceptée en doctrine en


raison de la fonction juridictionnelle qu’ils exercent. Mais elle s’en remet aux
législations nationales pour l’accorder en l’absence de conventions internationales en
la matière. En cette matière, l’acte uniforme sur l’arbitrage dans l’espace OHADA, ne
contient aucune disposition sur l’immunité des arbitres. Fort curieusement, le traité
constitutif confère, en son art.49, une immunité diplomatique aux arbitres nommés
par la Cours (CCJA) à l’exception de ceux désignés par les parties.

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Section 3 : La procédure arbitrale

Elle obéit à des principes de procédure qui gouvernent le déroulement de l’instance


qui aboutit au prononcé de la sentence arbitrale.

Paragraphe1 : Les principes de procédure.

Les principes qui gouvernent la procédure arbitrale sont nombreux. Nous


n’évoquerons que les plus importants à savoir, la liberté, l’égalité et le principe du
contradictoire.
A- La liberté des parties et des arbitres

Elle se manifeste de deux manières :

1) Le choix de la procédure arbitrale


Le principe de la liberté dans la procédure arbitrale est incontestable. Il est affirmé
avec fermeté par la quasi-totalité des règlements d’arbitrage. Ainsi, l’art. 14 de l’Acte
uniforme précise clairement que les parties peuvent élaborer elles - mêmes les règles
de procédure arbitrale ou soumettre leur arbitrage à « la loi de procédure de leur
choix ». Elles le feront soit directement, en rédigeant leurs propres règles de
Procédure, le plus souvent en s’appuyant sur un règlement arbitral notamment celui
de la Conférence des nations unies sur le droit commercial international(CNUDCI),
soit en optant pour une loi de procédure déjà établie.
Le défaut ou l’absence de volontés des parties est suppléé par le principe de la
volonté des arbitres. Ils pourront alors, comme, les parties déterminer directement
ou non les règles de procédure que le tribunal arbitral suivra.
La liberté des parties dans la conduite de l’instance arbitrale est si poussée que les
règlements d’arbitrage notamment celui de la CCJA ne contiennent que des règles de
procédure résiduelles et supplétives.

2) Le choix du droit applicable

La liberté des parties qui domine la procédure arbitrale apparait sans limites. En effet,
le principe de la liberté permet aux parties de choisir, en même temps qu’elles
déterminent les règles de procédure, le droit applicable à leur litige.

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Aux termes de l’art.15 al1de l’Acte uniforme, les arbitres ne peuvent appliquer au
fond du litige que des règles de droit déterminées par leur parties et à défaut,
choisissent les règles qu’elles considèrent comme étant les plus appropriées à la
résolution de leur litige.

Une telle liberté permet aux parties d’ignorer royalement la loi en vigueur en la
matière, pour se tourner vers les usages et la pratique. Les parties peuvent demander
aux arbitres de trancher les litiges en équité, au détriment du droit positif en vigueur.
On dit que l’arbitre statue en amiable composition.

La très grande liberté des parties ou des arbitres dans la procédure arbitrale comporte
toutefois des limites. Celles-ci sont contenues dans les art.9 de l’Acte uniforme et 18
de la loi type de la CNUDCI qui posent les principes d’égalité de traitement entre les
parties.

B – les principes d’égalité et du contradictoire

Le principe d’égalité suppose que les parties doivent être traitées de la même
manière par les arbitres. Participe de l’égalité, le fait pour les arbitres de donner la
possibilité aux parties de faire valoir leurs prétentions dans les mêmes conditions.

Le principe d’égalité de traitement entre les parties et son corollaire celui de faire
valoir leurs prétentions doivent être rapprochés du principe du contradictoire prévu
à l’art.26 de l’Acte uniforme. Le principe contradictoire suppose que les parties aient
dans les mêmes conditions, été en mesure de faire valoir leurs droits.

Ces exigences sont consubstantielles à l’idée même de justice qui n’échappe pas à
l’arbitrage. En effet, cette idée repose sur un débat contradictoire pour permettre à
un tiers impartial et désintéressé, le juge ou l’arbitre, de trancher le litige qui lui est
soumis.

Les principes ci-dessous énuméré font partie de l’ordre public procédural dont le non
respect devrait entraîner, en principe, l’annulation de la sentence arbitrale.

Paragraphe 2 : Le déroulement de l’instance arbitrale

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Le déroulement de l’instance commence avec l’introduction de l’instance qui ouvre
la possibilité aux arbitres d’instruire l’affaire.

A- L’introduction de l’affaire

L’instance est introduite par la saisine de l’arbitre. La saisine du tribunal arbitral


n’obéit à aucune forme particulière. Il peut être saisi conjointement par les deux
parties à travers un compromis ou un procès-verbal signé par les parties et les
arbitres. Celui- ci constate la saisine des arbitres et l’acceptation de leur mission. La
saisine du tribunal arbitral peut aussi se faire par une seule des parties.

L’organe arbitral est réputé saisi lorsque la demande des parties exprime clairement
la volonté de voir les arbitres trancher le litige considéré. Dès lors, la partie qui prend
l’initiative de la saisine doit faire un exposé sommaire des circonstances de l’affaire
et de ses prétentions. En la forme, la partie demanderesse doit utiliser un procédé
laissant preuve de la date de la saisine de l’arbitre, notamment un envoi recommandé
adressé aux arbitres et à la partie défenderesse.

Celle-ci doit présenter dans des formes identiques ses prétentions et ses moyens de
défense aux arbitres et au demandeur : c’est la réponse à la demande d’arbitrage.

Il peut arriver que le défendeur ne réponde pas et donc ne se présente pas devant
l’organe arbitral. Dans cette hypothèse, les arbitres doivent s’assurer de l’existence
de la convention d’arbitrage et de ce que la partie défenderesse a reçu notification
de l’introduction de l’instance. Dans l’affirmative, la procédure doit suivre son cour.
Dans le cas contraire, notamment lorsque il n’y a pas de convention d’arbitrage, la
procédure ne peut avoir lieu.
Immédiatement après la saisine, les arbitres peuvent ordonner l’organisation
préliminaire de l’instance. Celle-ci a pour objet de régler les derniers détails avant
l’examen au fond de l’affaire.

B- L’instruction de l’affaire

Elle porte sur l’examen des écritures et des pièces, l’audition des parties, les
témoignages et même le recours à des expertises.

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Les écritures sont normalement constituées de mémoires de toute nature
(demande, défense, réplique, notes écrites voire de correspondances). Ils doivent
être communiqués à toutes les parties et aux arbitres par tout moyen laissant trace
écrite (reçu, lettres recommandées etc.) Les pièces sont des documents pouvant
permettre aux parties d’établir la preuve des faits qu’elles soulèvent à l’appui de
leurs prétentions (écrits, plans, photographies, maquettes, représentations
graphiques, etc.

L’arbitre peut inviter les parties à faire la preuve des faits qu’elles invoquent
conformément au droit de la preuve. Il peut également inviter les tiers lorsqu’ils
détiennent une pièce nécessaire à la manifestation de la vérité de les lui
communiquer. Le tiers n’est tenu de le faire. Pour briser la résistance de la partie ou
du tiers, l’arbitre peut solliciter l’aide des autorités judiciaires lorsqu’elle est
nécessaire à l’administration de la preuve.

L’audition des parties est également un moyen d’instruction de l’affaire par les
arbitres. Elle doit obéir au principe du contradictoire qui gouverne les débats.
L’audition peut être ordonnée d’office ou à la demande de l’une des parties. Celles-
ci peuvent se faire représenter par leurs représentants dûment accrédités ou être
assistés de leurs conseils. Les arbitres peuvent entendre séparément les parties s’ils
l’estiment nécessaire. Dans ce cas, les conseils ou représentants des deux parties
assistent à cette audition. La défaillance de l’une des parties n’entache pas le
caractère contradictoire des débats.

L’audition des parties est constatée par un procès-verbal signé par les parties les
arbitres. L’art.19 du règlement d’arbitrage autorise l’arbitre à instruire l’affaire par
tous les moyens appropriés. Dès lors, il peut également entendre tout témoin, soit
d’office ou à la demande de l’une des parties. Il est évident que les témoins ne
déposent pas sous serment, l’arbitre étant une personne privée, il n’a pas qualité pour
recevoir le serment des témoins.

Lorsque la cause l’exige, l’arbitre peut ordonner la nomination d’office ou à la


demande de l’une des parties d’un ou de plusieurs experts. L’expert désigné doit être
indépendant des parties sinon il peut faire l’objet de récusation de la part des parties.

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L’expert doit éclairer les arbitres et même les parties sur les questions d’ordre
technique. Le rapport d’expertise doit être communiqué aux parties qui pourront le
discuter contradictoirement.
L’instruction de l’affaire doit obéir à tous les principes de procédure pour garantir la
validité de la sentence arbitrale qui en résulterait.

Paragraphe 3 : La sentence arbitrale

Au terme de l’instruction, l’affaire est mise en délibéré par le tribunal arbitral avant
de rendre sa décision, la sentence, qui produit des effets juridiques dès son
prononcé.

A- Le prononcé de la sentence.
1) La mise en délibéré

La sentence arbitrale est prononcée après la mise en délibéré de l’affaire. En effet,


le tribunal arbitral met l’affaire en délibéré lorsqu’il s’estime suffisamment informé.
Pendant cette période les arbitres préparent leur décision.

La mise en délibéré n’obéit à aucun formalisme. L’essentiel est qu’il y ait une
confrontation de points de vue entre les arbitres. Il n’est pas nécessaire que les
arbitres se retrouvent physiquement. Il suffit seulement qu’ils aient pu échanger par
tout moyen de communication écrit ou oral.

Le délibéré doit obéir au principe du secret. Il ne doit donc être porté à la


connaissance des parties ni d’un tiers. Le non respect du secret constitue une faute
de nature à engager la responsabilité des arbitres.

A la fin de la période du délibéré, la sentence est rendue, dans le cadre


d’un arbitrage à trois arbitres, à la majorité des voix (art.19 al.2 AU). « A défaut de
majorité, le président du tribunal arbitrale statuera seul.»(art.22, al.3)

2) Les mentions de la sentence

La sentence arbitrale doit contenir certaines mentions. Celles-ci peuvent être rangées
en deux grandes catégories. Les premières, ont pour objet d’identifier la sentence.

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Il s’agit notamment des noms, prénoms, et dénomination des parties et de leur
domicile ou siège social...

Les secondes expriment le caractère juridictionnel de la sentence arbitrale. Ce sont


d’une part, l’exposé des prétentions respectives des parties, de leurs moyens et des
différentes étapes de la procédure ; et d’autre part, l’obligation de motivation de la
sentence.

Les mentions qui identifient la sentence ainsi que celles qui exposent la prétention
des parties ne sont pas prescrites à peine de nullité. En revanche, celle qui prévoit la
motivation de la sentence est prescrite à peine de nullité. Sous omission et même sa
simple insuffisance constitue une cause d’annulation de la sentence. Il s’agit d’une
formalité substantielle dont l’inobservation entraîne la nullité de la sentence. La
motivation de la procédure découle d’une loi de procédure. En effet, juger sans
motifs n’est naturellement pas juger.
L’Acte Uniforme ne prévoit pas le dispositif au nombre des mentions de la sentence.
Cette exigence est cependant consubstantielle à la notion de sentence. En effet, la
décision, c’est-à-dire le fait de un litige d’ordre juridique, équivaut, dans le
vocabulaire judiciaire au dispositif du jugement. Dès lors, la sentence doit contenir un
dispositif, peu importe la forme qu’il doit prendre. Il suffit tout simplement qu’on
retrouve dans le corps de la sentence une décision relative au litige.

En dehors des mentions précitées, la sentence doit être signée par les arbitres qui
l’ont rendue. Le refus de signer la sentence par un arbitre n’entache nullement son
efficacité. La sentence doit seulement en porter mention.

3) Les différentes formes de sentence

L’article 22 de l’Acte uniforme précise que la sentence dessaisit l’arbitre du litige qui
lui est soumis. La sentence est soit complète ou partielle et dessaisir, totalement ou
partiellement, l’arbitre selon quelle vide l’intégralité du litige ou n’en règle qu’une
partie. L’une et l’autre sont définitives.

La sentence partielle peut porter sur un point précis du litige. C’est le cas de l’art.11,
al.3 de l’Acte uniforme qui permet au tribunal arbitrale de statuer sur sa compétence.
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S’il s’estime compétent, il rend une sentence qui tranche la question de compétence,
sans toutefois vider l’intégralité du litige. De ce point de vue, les sentences complète
et partielle doivent être distinguées des ordonnances de procédure qui n’ont pas pour
objet de trancher le fond du litige ni partiellement ni intégralement.

A ces deux catégories de sentence, il faut ajouter la sentence additionnelle qui


suppose que le tribunal arbitral a cru rendre une sentence complète alors qu’il a
omis de statuer sur un point de droit. Lorsqu’il est saisi à cet effet par l’une des
parties, le tribunal pourra rendre une sorte de sentence partielle.

Il existe une autre forme de sentence appelée sentence d’accord parties. La sentence
d’accord parties n’a pas la substance d’une sentence. Elle n’en revêt que la forme. En
effet, les parties s’accordent pour régler leur litige avant que les arbitres ne rendent
leur sentence. Elles demandent alors aux arbitres de constater cet accord dans la
forme d’une sentence arbitrale. Dans sa substance, la sentence d’accord parties est
une transaction qui, selon l’art.16, al.2 de l’Acte uniforme est un mode d’extinction
de litige.

L’intérêt pour les parties de recourir à la sentence d’accord parties plutôt qu’à la
transaction est que la première Peut bénéficier des règles relatives à l’exécution
forcée des sentences arbitrales alors que la transaction bien que revêtue de la chose
jugée ne peut être exécutoire sauf si elle a été passée par acte authentique.
B - Les effets de la sentence

La sentence arbitrale a un effet décisoire et est revêtue de la chose jugée. Elle peut
en outre être exécutoire.

1) la force décisoire de la sentence

La sentence, une fois rendue, dessaisit l’arbitre du litige qu’il a tranché. Le


dessaisissement de l’arbitre se réalise même si la sentence fait l’objet d’un recours
en annulation et est annulée par la suite.

En pratique, les arbitres ne peuvent être dessaisis tant que la sentence n’est pas
protée à la connaissance des parties. Aussi, peuvent-ils la modifier s’ils s’accordent
tous pour la réviser dans le délai d’arbitrage.
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Le dessaisissement du tribunal connaît quelques limites. Celles-ci tiennent à
l’interprétation de la sentence, à la rectification d’erreurs matérielles affectant la
sentence et à la possibilité de rendre des sentences additionnelles. Les arbitres
peuvent procéder à la correction d’erreurs matérielles (erreur de saisie dans le texte
de la sentence ou de calcul des allocations). Mais ils ne peuvent en aucune manière
prétexter de la rectification pour procéder à la modification de la sentence. En tout
état de cause, les arbitres ne peuvent rendre une sentence interprétative,
rectificative ou additionnelle que s’ils ont été saisis à cet effet, par l’une des parties.
La sentence rendue à cette fin doit donner lieu à un débat contradictoire préalable,
faute de quoi, elle est sujette à annulation.

L’exercice de pouvoir d’interprétation, de rectification ou de complément peut


rencontrer quelques difficultés procédurales notamment lorsqu’il est impossible de
réunir le tribunal arbitral qui a rendu la sentence. Dans cette hypothèse, le pouvoir
d’interprétation, de rectification ou de complément de la sentence est dévolu au juge
national compétent (art.22, al.5 de l’AU). Dans l’arbitrage du CCJA, un autre arbitre
est désigné par la Cours, après observation des parties.

2) L’autorité de la chose jugée

Aux termes de l’art.23 de l’Acte uniforme, la sentence arbitrale est revêtue, dès son
prononcée, de la chose jugée relativement au litige qu’elle tranche.

Cet effet de la sentence est confirmé par le Règlement arbitral de la CCJA, en son
art.27. Ce texte précise que les sentences rendues sur la base du règlement « ont
l’autorité définitive de la chose jugée… au même titre que les décisions rendues par
les juridictions… ».

En pratique, l’autorité de la chose jugée revêt deux effets diamétralement opposés.


Négativement, l’autorité de la chose jugée permet d’invoquer l’exception de chose
jugée toutes les fois que le litige tranché par la sentence serait porté devant une
juridiction étatique. Positivement, la sentence revêtue de l’autorité de la chose jugée
constitue un titre qui favorise la mise en œuvre des mesures conservatoires.

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Dès lors, une sentence arbitrale permet de pratiquer une saisie attribution de
créance.

La sentence peut également revêtir un effet exécutoire.

3) la force exécutoire de la sentence

Un fois rendue, la sentence est obligatoire mais elle n’est pas exécutoire. Elle ne
donne donc pas droit immédiatement à des mesures d’exécution forcée qui exigent
le recours à la force publique. Cette situation trouve son explication dans l’idée que
l’arbitre, au contraire du juge, n’a pas d’impérium.

Pour être exécutoire, la sentence arbitrale doit être revêtue de la formule exécutoire
: c’est l’exequatur. Cette formule est opposée, au terme d’une procédure où le juge,
saisi de l’exéquatur, va vérifier que la sentence remplit certaines conditions de fond.

Dans le cadre de l’arbitrage CCJA, la requête d’exequatur est adressée au président


de la Cours ou un juge délégué à cet effet. La sentence peut être exécutée
volontairement en absence de toute procédure d’exequatur, en raison de son
caractère obligatoire.

Le tribunal arbitral peut prononcer l’exécution provisoire de la sentence à la demande


de l’une des parties. L’exécution provisoire demandée peut être refusée par l’arbitre
par une décision motivée.

C - LES VOIES DE RECOURS

Les voies de recours contre la sentence arbitrale obéissent, dans le cadre de


l’arbitrage OHADA, à un double régime : les voies de recours prévues par l’Acte
uniforme et celles choisies par le Règlement arbitral de la CCJA. Mais les deux régimes
reproduisent sensiblement les mêmes voies de recours qui respectent les mêmes
conditions. Nous n’en examinerons que deux catégories d’entre elles, à savoir les
voies de recours ordinaires et les voies de recours extraordinaires contre la sentence.

1) La voie de recours ordinaire

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Dans le cadre de l’arbitrage, il existe une voie de recours ordinaire : c’est le recours
en annulation ou recours en contestation de validité selon qu’il s’agit de l’arbitrage
OHADA (AU) ou de l’arbitrage CCJA. L’une et l’autre obéissent aux mêmes conditions
de fond.

D’un point de vue matériel, seules les sentences arbitrales peuvent faire l’objet de
recours en annulation. Il s’agit donc des sentences définitives, complète ou partielle,
c’est-à-dire celles qui vident l’intégralité ou en partie le litige. Les deux régimes de
recours en annulation obéissent à la même procédure.
Du point de vue du délai, le recours est introduit dès le prononcé de la sentence
(CCJA) ou dans le mois de sa signification.

Dans l’arbitrage de l’acte uniforme, le recours est porté devant le juge étatique
compétent, alors que dans l’arbitrage CCJA, il est porté devant la Cour.

Le recours en annulation a un effet suspensif. Il est ainsi lorsque le tribunal arbitral a


ordonné l’exécution provisoire de la sentence.

Ce sont :

- L’absence, la nullité ou l’expiration de la condition d’arbitrage ;

- La violation par le tribunal arbitral d’une règle d’ordre public international des
Etats signataires du traité constitutif de l’OHADA ;

- Le non-respect du tribunal arbitral de la mission qui lui a été confiée ;

- Non respect des principes de procédure (du contradictoire, d’égalité des parties
et de la possibilité pour elles de faire valoir leur prétention, du secret);

L’art.26, al.5 et 6 de l’Acte uniforme, prévoit deux autres moyens d’annulation de la


sentence arbitrale. Il s’agit d’une part de la constitution irrégulière du tribunal arbitral
ou de la désignation irrégulière de l’arbitre unique ; et d’autre part, de l’absence de
motivation de la sentence.

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Dans l’arbitrage de l’Acte uniforme, le juge étatique chargé d’examiner le recours en
annulation n’a pas de pouvoir d’évocation de sorte qu’après l’annulation de la
sentence, la partie la plus diligente peut, si elle le souhaite, engager une nouvelle
procédure arbitrale (art. 29). Il en est autrement de l’arbitrage de la CCJA qui, elle,
dispose du pouvoir d’évoquer l’affaire, à la demande des parties. Dans ce cas, elle
peut statuer au fond. Lorsque les parties n’en font pas la demande, il est procédé
comme dans l’arbitrage de l’Acte uniforme.

Le rejet du recours en annulation emporte caractère d’exécutoire de la sentence.


Mais le recours en annulation est fermé à la partie qui, en connaissance de cause,
s’abstient d’invoquer sans délai une irrégularité et laisse poursuivre l’arbitre. Elle est
réputée, dans ce cas, avoir renoncé à s’en prévaloir. Par ailleurs, les parties peuvent
renoncer à cette voie de recours dans leur convention d’arbitrage.

2) les voies de recours extraordinaires

L’Acte uniforme et le Règlement de la CCJA prévoit deux voies de recours


extraordinaires. Ce sont la demande en révision et la tierce-opposition.

a- Le recours en révision

Ce recours est exercé par l’une des parties en cas de découverte d’un fait nouveau
inconnu du tribunal arbitral avant le prononcé de la sentence. Le fait nouveau doit
avoir un caractère décisif, de nature à modifier la décision des arbitres. Le recours
doit être porté devant le tribunal arbitral. En cas d’impossibilité de réunir le tribunal,
la demande sera certainement portée devant la juridiction étatique compétente.
L’Acte uniforme est muet sur le délai du recours en révision. Logiquement, ce recours
devrait être exercé dès que la partie adverse a eu connaissance du fait nouveau
ouvrant droit à la révision.

La demande en révision remet en cause la chose jugée par le tribunal arbitral pour
qu’il soit statué à nouveau, en fait et en droit. On dit que le recours en révision a un
effet dévolutif. Dès lors, les parties à l’instance arbitrale initiale doivent être présentes
à l’instance en révision.

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b- La tierce-opposition

La tierce-opposition est ouverte à toute personne physique ou morale qui n’a pas été
appelée à l’instance arbitrale et dont la sentence préjudicie les droits. Les tiers dont
il s’agit sont les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées à la convention
d’arbitrage et à la sentence, ni appelées à l’instance arbitrale. Si en revanche, le tiers
a été appelé à l’instance et qu’il a refusé d’intervenir, la voie de la tierce-opposition
lui est fermée.

Le tiers opposant doit en outre justifier d’un préjudice que la sentence a pu lui causer.
Il peut s’agir notamment d’un codébiteur solidaire qui n’a pas été appelé à l’instance
(ou un copropriétaire face à une sentence qui a autorisé un usufruitier à consentir un
bail commercial, d’un droit de crédit-bail à l’encontre d’une sentence constatant la
vente de la chose, objet du crédit-bail). La tierce opposition doit être portée devant
le tribunal arbitral.

Lorsque la tierce-opposition est recevable, la sentence est rétractée par le tribunal


arbitral à l’égard du tiers opposant, pour ce qui concerne les dispositions qui lui sont
préjudiciables.

Titre II : Les Autres Modes alternatifs de résolution des Conflits

L’arbitrage est le mode alternatif de résolution des conflits le plus important en raison
de son institutionnalisation mais n’en est pas le seul. Il existe de nombreux autres
modes alternatifs de résolution des conflits que nous analyserons successivement.

Chapitre 1 : Les principaux modes alternatifs


L’usage de l’adjectif « principal » n’entend pas établir une hiérarchie entre les
modes alternatifs de résolution des conflits mais doit plutôt s’entendre des modes
les plus usuels, les plus connus du public. Nous les examinerons successivement.

Section1 : La médiation

L’étude de la médiation exige d’examiner sa notion, comment y recourir et l’organe


de médiation, en l’occurrence le médiateur.

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Paragraphe1 : La notion de médiation

Elle suppose la définition et la détermination du champ d’intervention de la médiation


avant d’en appréhender les sources.

A- définition et champ d’application de la médiation.


1) Définition de la médiation

La médiation est un mode alternatif de résolution des conflits basé sur


l’intervention d’un tiers neutre, le médiateur, dont le rôle est de rapprocher les
parties en conflit, avec leur consentement, et de les aider à trouver une solution
satisfaisante et équitable sans jamais les obliger en rien. Ainsi, les parties résolvent
elles-mêmes leur différend en parvenant à un accord, avec le concours d’un tiers
indépendant auquel elles se sont adressées.

Selon certains professionnels (chambre professionnelle de la médiation et de la


négociation ; 1er syndicat de médiateurs), la médiation est le seul moyen, assisté par
un tiers qui promeut la liberté de décisions des parties à un conflit. Pour eux, la
médiation est plus une discipline à part entière, autonome qu’un simple mode de
résolution des conflits. Ce qui fait d’elle un mode privilégié de règlement des litiges
dont il convient de déterminer le champ d’application.

2) Le champ d’application de la médiation

Le champ d’application de la médiation est très vaste. A la différence de l’arbitrage,


la médiation intervient quasiment dans les conflits de toute nature, dans toutes les
branches du droit, notamment en droit civil, droit des affaires, droit pénal, droit fiscal,
etc.

Ainsi, pour les conflits entre particuliers, c'est-à-dire entre personnes physiques,
entre personnes morales et personnes physiques ou entre personnes morales,

relativement à la famille, la séparation, patrimoine ou de voisinage on a


successivement, la médiation familiale, conjugale, patrimoniale ou citoyenne. De
même, la médiation intervenue au sein de l’entreprise pour des différends relatifs à
la rupture de contrat et aux relations internes entre employés et ou l’employeur est
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dénommée médiation d’entreprise. Elle intervient également dans les différends
entre particuliers et personnes morales (consommation, construction, travaux :
médiation consumériste) ; différends économiques interentreprises : médiation
économique (qui concerne la concurrence, les marques de fabrique, les fournitures,
etc.) ; entre les services publics et leurs usagers (ombudsman) ; dans le droit de
l’environnement : gestion des ressources naturelles (médiation environnementale).

D’une manière générale, la médiation s’applique partout où il existe une relation


contractuelle.

B - Les sources de la médiation

D’une manière générale, les sources de la médiation sont à la fois législative


réglementaire et contractuelle. En France, il existe deux formes de médiation à
savoir, la médiation conventionnelle instituée au début des années 1980 et la
médiation judiciaire instaurée par un décret du 22 juillet 1996.

La médiation conventionnelle trouve sa source dans la convention des parties et la


pratique des associations spontanées et syndicats de médiateurs. La médiation
judiciaire qui s’inscrit dans le courant d’une procédure judiciaire est ordonnée par le
juge. L’une comme l’autre obéissent à un code de la médiation, outil d’initiative privée
au service de professionnels de la médiation dans tout domaine et secteur. Ce code
retrace les textes législatifs et réglementaires français et européens. Il propose en
outre la pratique de la médiation par les nombreuses organisations professionnelles
de la médiation et dans le secteur public.

En côte d’ivoire, la médiation entre personnes privées repose essentiellement sur


l’initiative privée, la pratique des particuliers. Seule, la médiation entre les services
publics et leurs usagers est organisée de façon officielle et confiée par la Constitution
au Médiateur de la République.

Cette forme de médiation qui tire son origine de l’ombudsman suédois a été
introduite dans le droit ivoirien par la Constitution de 1960 et reprise par celle de
2000. Aux termes de l’art.115 de la Constitution, « le Médiateur de la République » est
une autorité indépendante investie d’une mission de service public.
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Ses attributions, son organisation et son fonctionnement sont prévus par la loi. D’une
manière générale, l’instauration de cette médiation a pour objet de désengorger les
juridictions.

Paragraphe 2 : Le recours à la médiation

On peut recourir à la médiation de deux manières : Soit par une clause de médiation
; soit par un accord de médiation.

A- La clause de médiation

Comme la clause compromissoire en matière d’arbitrage, la clause de médiation


est insérée dans le contrat initial des parties. C’est une disposition du contrat qui
stipule que les parties envisagent, au moment de la conclusion du contrat, qu’en cas
de conflit né de l’exécution du présent contrat, elles choisiront la voie de la
médiation au détriment de tout recours judiciaire. Une telle stipulation qui lie la
volonté des parties pour l’avenir doit être expresse et émaner du consentement
mutuel des parties au contrat.

De ce qui précède, nous pouvons affirmer que la clause de médiation s’apparente à


tous égards à la clause compromissoire et se démarque de l’accord de médiation.

B- L’accord de médiation

Dans les situations conflictuelles, les parties qui désirent saisir un médiateur aux
fins de lui soumettre leur litige peuvent conclure un accord de médiation. L’accord
de médiation nécessite le libre consentement des parties qui ont la capacité de
décider. La médiation vise un accord durable fondé sur l’engagement et la qualité
relationnelle. Les parties prévoient dans cet accord le choix du médiateur et les
obligations réciproques qui les lient.

Elles définissent avec précision la mission du médiateur et éventuellement la durée


de la médiation. Il en est de même des responsabilités encourues par les parties en
cas de rupture anticipée de la médiation.

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L’accord de médiation peut être judiciarisé, c'est-à-dire, homologué par un juge ou
non judiciarisé, écrit sous forme juridique. Cet accord peut rester sous seing privé
(SSP), c'est-à-dire écrit et signé par les parties. Ce qui n’enlève rien à son caractère
contractuel. Selon les cas, l’accord peut être un compromis, un protocole, etc.

Paragraphe 3 : Le médiateur

Le médiateur est un tiers neutre, impartial et indépendant qui s’interpose entre les
parties pour les aider à trouver une solution à leur litige. Comment est-il désigné ?
Quel est son rôle et quelles sont les responsabilités qu’il encourt.

A- La désignation du médiateur

Les règles de désignation du médiateur varient selon qu’il s’agit de la médiation


contractuelle ou de la médiation judiciaire.

1) La médiation contractuelle

Dans le cadre de la médiation contractuelle, le médiateur est librement désigné par


les parties, soit dans la clause de médiation, soit dans l’accord de médiation.

Le choix du médiateur dans la clause de médiation apparait comme générique.


Il est rarement envisagé en tant que personne physique. Dans cette clause, le
médiateur est presque toujours une personne morale, c’est-à-à dire une société,
une association, une chambre de commerce ou syndicale (chambre
professionnelle).

Le médiateur peut également être désigné dans l’accord de médiation qui


intervient à la naissance du conflit. Dans cet accord qui cristallise une situation de
fait réel et vraisemblable, les parties peuvent nommément désigner une personne
physique qu’elles investissent comme médiateur.

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La nomination du médiateur dans la médiation conventionnelle diffère de celle qui
prévaut dans la médiation judiciaire.

2) La médiation judiciaire

Dans cette forme de médiation, les parties n’ont pas la maitrise du règlement de leur
conflit. La médiation judicaire suppose que les parties aient choisi la voie judiciaire.
Elle est donc proposée au cours de l’instance judiciaire par le juge. Si elle est acceptée
par les parties, le juge rend une ordonnance de médiation et désigne un médiateur.
Le médiateur judiciaire est donc nommé par le juge dans l’ordonnance de médiation
qui détermine l’étendue et la durée de sa mission.

Le médiateur judiciaire, bien qu’investi par le juge, exerce son activité, sa mission en
toute indépendance, de manière impartiale et neutre comme le médiateur
conventionnel. Dès lors, le mode de désignation n’influe aucunement sur la façon
d’accomplir la mission qui lui a été par les parties ou le juge.

B- le rôle et la responsabilité du médiateur

A la différence de l’arbitre, le médiateur ne tranche pas le litige au sens de lui trouver


une solution judiciaire, il ne juge pas. Son rôle est d’aider les parties à trouver un
accord, une solution elles-mêmes. Il intervient pour faciliter une relation ou la
compréhension d’une situation conflictuelle et laisse les parties, seules décisionnaires
de l’accord qui résultera de leur discussion qu’il anime. En effet, la médiation ne
consiste pas à instruire mais à instruire, une cause, mais à offrir aux parties la
possibilité de comprendre quels sont des intérêts en présence et de les concilier, en
trouvant une solution judicieuse et créative adaptée à leur besoin. De ce point de vue,
la médiation s’oppose à l’arbitrage. En effet, elle est un processus dont les parties
sont les acteurs principaux, le médiateur n’a qu’un rôle de conseil qui présente des
suggestions.

Malgré la nature particulière, la médiation est assortie de rémunération par les


parties. Mais en réalité, cette rémunération n’est en rien comparable à celle de
l’arbitrage qui exige des frais extrêmement coûteux.

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Dans l’accomplissement de sa mission, le médiateur encourt naturellement une
responsabilité. Celle-ci ne peut être que contractuelle d’autant plus qu’il tient sa
mission d’un contrat. Il pèse sur lui une obligation de moyen, c'est-à-dire qu’il doit
respecter avec conscience, dans l’exercice de sa mission, les règles de l’art, l’éthique
de la profession. Il n’est donc pas soumis à une obligation de résultat, ce qui
l’obligerait à trouver coûte que coûte la solution voulue par les parties, c’est-à-dire le
règlement du litige.

Lorsque les parties parviennent à trouver un accord, le litige est aussitôt résolu. En
revanche, dans l’hypothèse ou aucun accord n’a pu être trouvé, les parties peuvent
soit se diriger vers un autre médiateur ou choisir la voie judiciaire pour la résolution
du conflit qui les oppose. Elles peuvent également, au moment de s’engager dans
la voie de la médiation ou par une convention préalable, prévenir que si le médiateur
ne parvient pas à faire émerger une solution, celui-ci peut se transformer en arbitre
pour trancher le litige. Cette pratique qui combine l’arbitrage et la médiation s’est
développée aux Etats-Unis et prend la dénomination de Med-Arb.

La médiation se confond, selon certains auteurs, avec la conciliation. Mais en réalité, il


existe quelques différences qui les séparent substantiellement.

Section 2 : La conciliation

Pour appréhender la conciliation il est nécessaire d’en déterminer la notion, de


préciser le mode de désignation du conciliateur avant d’en examiner la procédure.

Paragraphe 1 : La notion de conciliation

Il s’agit d’en donner la définition et le champ d’application.

A- La définition de la conciliation

La conciliation est le mode alternatif qui consiste dans l’intervention d’un tiers qui,
après avoir écouté les parties et analysé leur point de vue, propose une solution
pour régler leur conflit. Au regard de cette définition, la conciliation se distingue de
la médiation et davantage de l’arbitrage. La conciliation laisse transparaître
naturellement la liberté des parties qui peuvent l’accepter ou la refuser.
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B- Champ d’application de la conciliation

A la différence de la médiation qui a un champ d’application large, la conciliation ne


peut intervenir que dans les conflits portant sur les droits dont les parties ont la libre
disposition. Il s’agit ici d’un point de rencontre avec l’arbitrage. En conséquence, elle
ne peut en aucune manière traiter des questions qui relèvent de l’état des personnes,
notamment l’état civil, le droit de la famille etc. qui relèvent exclusivement de la
compétence des tribunaux. Il en est de même des litiges avec l’Administration qui
ressortissent de la compétence du médiateur de la République.
La conciliation tire sa source des textes législatifs et réglementaires. Ainsi, en Côte
d’Ivoire, elle constitue une procédure préalable, obligatoire à la résolution de
certaines questions dont le juge est saisi. Il s’agit notamment de la conciliation
imposée par le code de procédure civile en matière de divorce. Une telle formalité
est prescrite à peine de nullité de la procédure de divorce. Dans l’espace OHADA, il
est également prévu la conciliation préalable, obligatoire de l’Acte uniforme relatif
aux procédures simplifiées de recouvrement et de voies d’exécution, en ses art.12 et
26.

Paragraphe-2 : La désignation du conciliateur

Le conciliateur peut être désigné par le juge ou par les parties. D’une manière
générale, il est nommé par le juge, avec l’accord des parties. Ce peut être le juge
chargé de l’affaire objet de la contestation entre les parties. C’est le cas de la
conciliation obligatoire en matière de procédure de divorce et de la conciliation
imposée par l’Acte uniforme relatif aux procédures de recouvrement simplifié de
l’OHADA.

En France, il existe une catégorie de conciliateurs appelés conciliateurs de justice qui


sont des bénévoles désignés par ordonnance du premier président de la cour d’appel,
sur proposition du juge d’instance et après avis du procureur général près ladite cour.

L’ordonnance de désignation fixe également le ressort territorial dans lequel ils


doivent exercer leur fonction et la durée de leur mission. Celle-ci ne peut excéder une
période d’un an. A la fin de cette période, et sur avis du juge d’instance et du
procureur, le conciliateur peut être reconduit pour une nouvelle période de deux ans.
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Le conciliateur peut également être désigné en matière de commerciale par les
parties en dehors de toute intervention du juge. C’est le cas lorsque la conciliation est
proposée et acceptée par les parties après des négociations infructueuses. Dans cette
hypothèse, le conciliateur est rémunéré par les deux parties et ses honoraires sont
validés par le juge. Dans ce cas, le conciliateur ne peut être un conseil déjà rémunéré
par l’entreprise, ni un ancien juge sauf si celui-ci a quitté ses fonctions depuis plus de
cinq ans.

Paragraphe 3 : La procédure de conciliation

Elle tient à la saisine du conciliateur et au déroulement de la procédure.

A- La saisine du conciliateur

Le conciliateur peut être saisi soit directement par les parties soit par le juge.

La saisine directe par les parties peut se faire par tout moyen, notamment par
téléphone, courrier ou même par une visite à l’une de ses permanences. Lorsqu’il est
saisi par le juge, celui-ci lui délègue ses pouvoirs de conciliation en application des
dispositions de la loi (CI, la loi relative au divorce et à la séparation de corps et Acte
uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement ; France : lois des 8-02-
95 et 28-12-98).

B- Le déroulement de la procédure de conciliation

Lorsque les parties se trouvent devant le conciliateur, le cas échéant


accompagnées d’une personne de leur choix (conseil ou toute autre personne), hors
la présence de tout public, celui-ci les écoute successivement et tente par un débat
organisé de les emmener à dégager la solution idoine.

De ce qui précède, nous constatons que la conciliation obéit aux mêmes principes
qu’en matière de procédure arbitrale. En effet, la procédure de conciliation est
respectueuse du principe du contradictoire corollaire de celui de l’égalité.

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En outre, elle obéit à la confidentialité des débats. Par ailleurs, le conciliateur, agissant
quasiment comme un juge ou en arbitre, se soumet au principe d’impartialité et de
neutralité.

Dans l’hypothèse d’une conciliation réussie, le conciliateur dresse obligatoirement ou


facultativement un constat d’accord. Celui-ci est établi en autant d’exemplaires que
de parties et signés par les parties et le conciliateur. Un exemplaire de cet accord est
transmis au juge qui y appose obligatoirement ou facultativement la formule
exécutoire. Dès lors, le constat d’accord ou protocole d’accord acquiert valeur de
jugement.

En cas d’échec de la conciliation, les parties peuvent choisir une autre voie alternative
(arbitrage), ou se tourner vers le juge qui tranchera leur litige, conformément au
droit.

Section3 : La négociation.

La négociation est le moyen le plus courant, utilisé directement par les


parties en conflit ou par l’intermédiaire de leurs représentants. Elle intervient dans
plusieurs domaines (syndicale, sociale, commerciale). Nous analyserons
succinctement la définition et l’issue ou les résultats de la négociation.

Paragraphe 1 : La définition de la négociation

La négociation c’est la recherche d’un accord entre les parties ayant des intérêts
opposés. Elle consiste pour les parties en conflit de formuler des offres ou demandes
au cours des pourparlers dans l’espoir de trouver une solution amiable à leur
contestation. Ainsi, par la négociation, les parties parviennent elles-mêmes ou par
l’intervention d‘un tiers à résoudre leur conflit sans recourir à la justice. Les tiers dont
il s’agit sont des personnes qui les représentent et défendent leurs intérêts,
mandatées par elles à cette fin. Des lors, les tiers n’ont aucun pouvoir de décision
juridictionnelle. Ils n’ont de pouvoirs que ceux découlant de la volonté des parties.

La négociation est apparemment le mode alternatif le moins couteux, le plus efficace,


le plus rapide des règlements des conflits. Ceci est tellement vrai qu’il peut y avoir
négociation après l’arbitrage ou même après l’ouverture d’une procédure judiciaire.
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Paragraphe 2 : L’issue de la négociation.

La négociation peut aboutir à un échec ou à un accord. Dans cette dernière


hypothèse, l’accord des parties met fin au litige qui les oppose.

L’accord résultant d’une négociation est le plus souvent formalisé par un contrat dont
les dispositions doivent être respectées par les parties.

Dans l’hypothèse où la négociation aboutit à un échec, les parties ont la possibilité,


selon le cas, de recourir à une autre voie amiable ou tout simplement de se tourner
vers la justice étatique qui devient ainsi la voie ultime sinon principale de résolution
des conflits.

Chapitre 2 : Les marcs les moins usités

Ils sont nombreux mais nous n’évoquerons que deux, à savoir la transaction et
l’expertise.

Section1 : La transaction

C’est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou
préviennent un conflit à naître.

La transaction repose sur des concessions réciproques. Elle se rapproche de la


négociation dont elle constitue l’achèvement par le fait qu’elle met en présence les
parties, sans l’intermédiaire d’une tierce personne. Les parties elles-mêmes
s’accordent pour trouver une solution à leur conflit. On dit qu’elles transigent.

La transaction s’éloigne de l’arbitrage qui à un caractère juridictionnel dont est


dépourvu la transaction. Mais la transaction, comme l’arbitrage, produit entre les
parties autorité de chose jugée.

La transaction peut se rencontrer également en matière administrative, pénale, ou


fiscale. En cette dernière matière, le fisc et le contribuable peuvent transiger sur la
dette d’impôt de celui-ci soit en l’allégeant, soit en lui proposant un échéancier pour
lui permettre de régler sa dette. Une telle possibilité existe entre l’Administration et
son cocontractant, personne privée.
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La transaction qui est revêtue de l’autorité de la chose jugée permet aux parties
d’épuiser le litige qui les oppose. Ce qui la distingue fondamentalement de l’expertise
avec laquelle elle partage, dans une moindre mesure la même nature.

Section 2 : L’expertise

L’expertise consiste à faire appel à un professionnel pour requérir son avis sur
une question technique dont la connaissance échappe aux juges, à l’arbitre ou même
aux parties.

L’expertise est presque toujours judiciaire. Il en est ainsi lorsqu’il est ordonné par le
juge à l’occasion d’un procès pour lui apporter des éclaircissements sur une question
d’ordre technique. Mais elle peut être conventionnelle. C’est le cas lorsque les
parties, de leur propre initiative et en dehors de tout recours au juge, décident de
requérir l’avis d’un expert qui les éclairera sur une question technique, objet du litige
qui les oppose.

L‘expert judiciaire est un professionnel qualifié dans un domaine autre que celui du
droit. Il est préalablement inscrit sur une liste d’experts judiciaires auprès d’une cour
d’appel. Professionnel avéré, il est missionné par un acte écrit du juge qui requiert
ses avis. L’expert un auxiliaire de justice occasionnel du juge dans le cadre de la
mission qui lui est confiée par la juridiction.

L’expertise donne lieu à un rapport, le rapport d’expertise qu’il communique au juge


et à toutes les parties. Ses conclusions ne s’imposent pas au juge. L’expert ne juge
pas, il éclaire le juge ou les parties. L’expert judiciaire prête serment avant de livrer
son expertise au juge.

L’expertise conventionnelle ou technique a pour objet de donner aux parties un


certain nombre de constatations. Celles-ci ont en principe une valeur contraignante,
sauf convention contraire des parties. Dès lors, l’expertise peut contribuer à mettre
fin à une contestation née entre les parties dès l’instant où celle-ci est dissipée par
les conclusions du professionnel qu’est l’expert.

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Chapitre3 : Les avantages des modes alternatifs

Les modes alternatifs de résolution des conflits présentent d’importants avantages.


Ceux-ci s’apprécient par rapport à la justice étatique dont ils se démarquent. Les
avantages tiennent à la libre volonté des parties qui les dominent et se précisent
davantage dans la procédure suivie qui en détermine les caractères.

Section 1 : La libre volonté des parties

D’une manière générale, les modes alternatifs sont dominés par la liberté des
parties. En effet, celles-ci ont la libre direction de la procédure. Elles ont le libre choix
de recourir à la justice étatique ou d’y renoncer. Lorsqu’elles y renoncent elles
peuvent utiliser, en fonction de la nature du litige, telle ou telle voie amiable. Quand
elles portent leur choix sur l’une d’entre elle, elles en gardent la direction de la
procédure et son déroulement. Ainsi, en matière d’arbitrage, comme dans toutes les
autres voies amiables, les parties désignent librement le tiers auxquels elles confient
le règlement de leur litige. En cette matière, les parties peuvent même intimer l’ordre
aux tiers de régler leur litige en écartant les règles de droit applicable et d’appliquer
leurs propres règles qui serviront à trancher leur litige. On dit que l’arbitre statue en
équité. Une telle liberté ne peut se percevoir au cours d’une procédure judiciaire où
tout leur est imposé depuis le tiers chargé de trancher leur cause jusqu’à l’exécution
de la décision rendue par celui-ci.

La liberté des parties qui commande la procédure utilisée dans les MARC lui imprime
ce caractère.

Section 2 : Les caractères communs aux modes alternatifs

Les modes alternatifs recèlent un certain nombre de caractères qui marquent leur
séparation d’avec la justice étatique. Ces caractères se rencontrent de façon générale
dans la procédure suivie.

Paragraphe1 : La célérité

Le monde des affaires étant mû par la célérité, les modes alternatifs leur offrent cet
avantage de voir leurs affaires se dérouler rapidement et de de donner solution au

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litige qui oppose les parties dans un temps relativement court. La célérité qu’offrent
les modes alternatifs se présente dès lors comme un remède à la lenteur tant
décriée à la justice étatique. En effet, plusieurs facteurs font que la justice étatique
ne peut se dérouler rapidement pour le bonheur des justiciables. Le volume
d’affaires portées devant elle l’engorge systématiquement.

Ajoutés à cela, les délais trop longs des délibérés et renvois successivement de
même que l’exercice des multiples voies de recours qui impriment à la justice
judiciaire une lenteur avérée. Or, les procédures adoptées par les MARC ne
connaissent pas la technique d’enrôlement et par conséquent, les parties n’ont pas
à attendre la tenue d’une première audience. Les délais du déroulement de la
procédure d’instruction de la cause dépendent de la volonté des parties et des voies
de recours sont le plus souvent exclues.

Ainsi il arrive fréquemment que les litiges reçoivent une solution quelques semaines
seulement après que les procédures aient été engagées.

Paragraphe 2 : La simplicité de la procédure

La procédure dans les modes alternatifs se ramène davantage à une négociation qu’à
une procédure judiciaire. En effet, chacune des parties s’adresse à un tiers constitué
dans une atmosphère emprunte de moins de solennité qu’elle ne ferait à l’audience
d’un tribunal.
De même, l’administration de la preuve est soumise à moins de rigueur que devant
la juridiction, toute preuve pertinente pouvant être admise.

Elle n’obéit pas à des règles contraignantes, mais à des règles simples, concises et
claires. En effet, les parties étant maîtresses de leur procès en matière d’arbitrage,
elles tirent profit de cette très grande souplesse : l’audience peut se dérouler sur les
lieux où le litige est né ou même pendant une heure tardive.

Paragraphe 3 : la discrétion et la confidentialité

C’est la caractéristique principale qui marque la procédure des MARC. Les débats se
déroulent à huis clos, c’est-à-dire, hors la présence du public, en privé. Ce qui
préserve le maintien des relations d’affaires entre les parties. Cette confidentialité
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attire les milieux d’affaires qui préfèrent préserver l’image de leurs sociétés et
éviter toute forme de publicité qui leur serait préjudiciable. Ainsi, la discrétion et la
confidentialité débouchent sur la sauvegarde de relations de partenariat.

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