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Introduction

« L'arbitrage est l'institution par laquelle un litige est soustrait à la connaissance


des juges investis par l'état et confié, pour être solutionné, par les parties, d'un commun
accord, à des personnes privées n'ayant donc aucune délégation de la puissance
publique »1.

Cette institution repose donc sur « des arbitres qui font, en somme, office de
juges privés, lesquels sont habilités, avec le consentement des parties, à dire le droit,
mais qui ne disposent pas de pouvoir coercitif et ne peuvent contraindre à l'une
quelconque des parties à exécuter la sentence arbitrale, si cette partie, était d'accord en
principe au départ sur la formule de l'arbitrage, a cessé de donner son accord pour son
exécution ».

« L'arbitrage est une institution qui permet à des parties en conflit de confier à des
arbitres qu'elles choisissent la mission de trancher leurs litiges.

Il s'agit d'une solution alternative de règlement des différends, au lieu de


s'adresser à la justice étatique, on s'adresse à de simples particuliers qui ne sont pas
investis officiellement du pouvoir de rendre la justice »2.

L'arbitrage est une véritable justice privée où l'arbitre est un juge privé dont la
fonction temporaire est d'instruire et de juger une affaire conflictuelle.

Le législateur marocain préfère définir un arbitrage comme ayant pour objet de


faire trancher un litige par un tribunal arbitral qui reçoit des partis de la mission de
juger en vertu d’une convention d’arbitrage.3

Néanmoins, la clarté de la définition ne nous dispense pas de tenter de


différencier la notion d’arbitrage des notions voisines.

CARACTÉRISTIQUES DE L’ARBITRAGE :
1
ADOLPH RUOLT « Code de Procédure Civile annoté », associations des œuvres sociales des magistrats et
fonctionnaires de la justice page 106.
2
MOHAMED EL MERNISSI « arbitrage commercial et règlement des litiges » L'actualité juridique n° 18
septembre 1999.
3
Code de procédure civile article 306

1
L’arbitrage et une notion fondée sur une base contractuelle, en effet, les arbitres
tiennent leur mission et leur pouvoir d’une convention privée, que ce soit le
compromis d’arbitrage ou le contrat contenant la clause compromissoire.

Lors de l’arbitrage, les arbitres jouissent des pouvoirs conférés au juge étatique
lors du déroulement des audiences des juridictions étatiques.

De ce fait, se pose le problème de caractériser l’arbitrage de sa nature


contractuelle ou juridictionnelle.

En effet, on peut caractériser l’arbitrage de nature hybride, c'est-à-dire qu’il a


autant un caractère contractuel que juridictionnelle.

Les principales caractéristiques de l’arbitrage sont :

La rapidité :

Le tribunal arbitral qui est désigné pour trancher un différend donné a tout le
temps et la disponibilité pour accomplir cette mission.

En effet, contrairement aux tribunaux juridictionnels tenus à respecter les


horaires administratifs et caractérisés par le nombre énorme de dossiers par magistrat ;
le tribunal arbitral peut se tenir à n’importe quelle heure suivant la disponibilité des
parties et se consacre en temps et en travail à ce même différend afin de le trancher et
d’apporter le but recherché par les parties à travers leur option pour l’arbitrage.

La simplicité et flexibilité :

Le recours à l’arbitrage n’exige ni taxes ni honoraires d’avocats, les parties


peuvent choisir entre un arbitrage ad hoc ou institutionnel, c’est là le sens même de la
loi 08-05 relative à l’arbitrage au Maroc à travers l’article 319 qui Distingue entre
l'arbitrage ad hoc et l’arbitrage institutionnel, la différence réside au fait que dans le
deuxième cas les institutions d’arbitrage disposent de leur procédure ainsi que de leurs
normes applicables aux différends, alors que pour l’arbitrage ad hoc, il revient aux
parties de convenir tous les détails de l’arbitrage.

Discrétion :

Le recours à l’arbitrage permet aux parties une discrétion du traitement de leur


différend ainsi que du différend en lui même, la discrétion de l’arbitrage a été
soulignée par le législateur à l’article 326 qui a même lié cette discrétion aux termes
prévus par la loi pénale.

1
C’est là une volonté du législateur de souligner le caractère privé et totalement
discret de l’arbitrage, ce qui permettrait aux parties de recourir à ce mécanisme sans
avoir à se soucier de la sécurité des informations liées à leur différend ; c’est même
une motivation du choix de ce mode.

Une exception à ce principe peut résider en la possibilité de recours en appel


pour l’annulation de la sentence arbitrale vu le caractère public des audiences.

DISTINCTION AVEC DES NOTIONS VOISINES :

Pour bien le déceler, l’arbitrage devrait être différencié de certaines notions


voisines :

Arbitrage et expertise :

Ce concept auquel le législateur marocain a consacré la loi45.00 et que le code


de procédure civile traite aux articles59-66, est assez différent de l’arbitrage.

En effet, la mission de l’expert consiste d’apporter au juge une assistance


technique en en répondant aux questions précises finalement sans se mêler des
questions juridiques.4

Alors que l’arbitre et appelé à trancher un différend en référence à une


procédure convenus contractuellement entre les partis à ce même différents sans avoir
de restriction à puiser dans ce qui est technique ou juridique.

Arbitrage et conciliation :

Si la conciliation consiste à trouver une solution pouvant satisfaire les partis et


que la décision ou plutôt la proposition du conciliateur ne devient applicable qu’après
l’adhésion des partis, l’arbitrage lui consiste à trancher les différents à travers des
décisions qui s’applique obligatoirement au parti avant même leur adhésion, dans ce
cas ils ont adhéré en ayant opté pour l’arbitrage.

Mais, l’arbitre peut se trouver souvent dans une situation en arbitrage ou il


cherche à ce que la décision soit satisfaisante aux parties.

Arbitrage et contentieux judiciaire :

En plus du contentieux judiciaire d’arbitrage à la faculté de pouvoir intervenir


pour compléter un contrat ou le révisé dans des circonstances diverses.

4
CPC art 59 al 4

1
Alors que le contentieux judiciaire n’a pas cette faculté, en plus des différences
de formalisme et de conditions de forme et d’organisation.

RAISONS DE CHOIX DE L’ARBITRAGE:

Les motivations ou les raisons qui poussent au choix de l’arbitrage au lieu de la


justice étatique sont diverses.

En effet, les parties peuvent faire le choix de l’arbitrage au détriment de la


juridiction étatique pour deux types de raisons ; des raisons relatives au déroulement
ou à la forme du procès juridictionnel ou des raisons relatives au contenu des
jugements étatiques.

Raisons relatives à la forme :

Dans ce cas des parties cherchent à surmonter les inconvénients qu’ils trouvent
au déroulement de la justice étatique et qui ne se voient pas capables de subir, tels : la
lenteur de la justice juridictionnelle, sa cherté, l’excès du formalisme de ses
procédures.

Il y a aussi la raison d’une discrétion que les parties peuvent aller chercher un
arbitrage puisque la juridiction étatique ne pourra de leur garantir.

Le juge étatique étant qualifié en matière juridique, les parties peuvent se voir
dans l’obligation d’aller chercher en arbitrage un juge capable d’assimiler et de
comprend la complexité des relations les interdépendances en les partis dans leur détail
technique et ceci grâce à sa qualification ou son expérience en la matière.

Raisons relatives au fond :

Des parties qui font choix de l’arbitrage au lieu de recourir à la justice étatique,
peuvent faire en raison de leurs recherches d’une autre solution que celle que peut
apporter le juge étatique.

En effet, les agents économiques peuvent être à la recherche d’une justice et


d’une équité compatible avec les Usages et les coutumes de leurs activités
commerciales ainsi que de leur traitement sectoriel des différents problèmes posés par
l’exercice de leur profession.

Dans ce cas, on peut assister à une sorte de rejet du droit juridique, ceci ne peut
être équivalent du rejet de l’équité puisque le recours à l’arbitrage en lui-même
matérialise une recherche d’équité.

1
Ce problème est clair quand les parties font appel à l’arbitrage comme une sorte
de consensus pouvant intervenir avant même l’incidence du différend ou matérialiser
une entente pour le règlement du différend au moment où celui –ci intervient, la
différence dans ce cas réside au fait que des parties en ayant agi ainsi prennent en
considération la continuité de leurs relations après l’arbitrage sans que leur entente et
leurs relations ne puissent être secouées par le différend ; chose qui ne saura être
maintenu dans le cas du recours à la justice étatique qui matérialise une sorte
d’affrontement ou de consécration du différend est même de son approfondissement.

Cependant, lors du déroulement de l’instance arbitrale certains problèmes


peuvent se poser, il en est du cas des mesures provisoires et conservatoires qui peuvent
être demandées au tribunal arbitral pour conserver les droits des parties ou pour
permettre de conserver une situation ou des preuves.

1
Première partie
La convention d’arbitrage
« La convention d’arbitrage est l’engagement des parties de recourir à
l’arbitrage pour régler un litige né ou susceptible de naître concernant un rapport de
droit déterminé, de nature contractuelle ou non contractuelle.

La convention d’arbitrage revêt la forme d’un compromis d’arbitrage ou d’une


clause d’arbitrage. »

« La clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un


contrat s'engagent à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement
à ce contrat »..

« Le compromis est la convention par laquelle les parties à un litige né


soumettent celui-ci un tribunal arbitral».

Contrairement à la clause compromissoire qui est conclue avant la naissance du


litige, le compromis est signé une fois le litige né.

1
Chapitre I- L’autonomie de la clause
compromissoire :

Le principe de l’autonomie de la clause compromissoire signifie que le sort


réservé à la clause compromissoire est indépendant du celui du contrat principal, ainsi
la nullité prétendue du contrat principal n’affecte pas cette clause, ce qui est une
dérogation à la règle selon laquelle l’accessoire suit le principal. On considère à cet
égard, que la clause compromissoire est un contrat dans le contrat, ou autrement dit, un
contrat sui-generis, que sa validité ne sera pas appréciée par les causes de nullité du
contrat principal.

En outre, cette autonomie signifie également que la clause compromissoire est


régie par une loi distincte de celle du contrat principal, elle a à cet effet un régime
juridique propre.

Le principe d’autonomie de la clause compromissoire a été consacré pour la


première fois par la jurisprudence française dans l’arrêt Gosset5, et confirmé par l’arrêt
Hecht6 dont la Cour de cassation avait pour objectif de mettre à l’abri la clause
compromissoire des prohibitions de droit interne français7.

Cette consécration de ce principe a également pour intérêt d’accorder un


pouvoir à l’arbitre, puisque son application permet à l’arbitre saisi d’un litige
concernant la nullité d’un contrat, de statuer sur sa validité, et de ne pas se retirer pour
le seul motif de l’inexistence du contrat principal. Ce pouvoir lui permet aussi de
trancher sur la validité de la clause compromissoire, et à cet effet de ne pas attendre un
jugement d’un tribunal étatique sur cette validité pour s’occuper par la suite de
l’affaire, ce qui diminue de la valeur de l’arbitrage qui est reconnu par son rapidité, et
sa confidentialité.

A cet égard, ce principe assure à l’arbitrage une efficacité pour s’affranchir de


certains obstacles soit de certaines législations hostiles à cette institution, soit des
parties qui prétendent à la nullité ou à l’inexistence de certains contrats pour se
soustraire de l’arbitrage, ce qui constitue des manœuvres dilatoires. C’est pourquoi on

5
Civ., 1re, 7mai, Gosset, Annie Toubi Anna : Le domaine de la loi du contrat en DIP, Dalloz, 1972.
6
Cass. Civ. (1ere), 4/07/1972, « Hecht c/ Société Buisman’s », revue critique, 1974, p. 82, note Level.
7
L’ancien article 1006 du code de procédure civile français, aujourd’hui repris par l’article 2061 du code civil
français, qui interdit de conclure une clause compromissoire. J-B. Racine, « L’arbitrage commercial international
et l’ordre public », L.G.D.J., 1999, p.184.

1
considère que la clause compromissoire est « un contrat dans le contrat », du fait
justement de cette autonomie qui la caractérise8.

Cette conception du principe d'autonomie est ce qu'il est juste d'appeler la


conception traditionnelle de la notion. Prise dans ce sens, l’autonomie a
essentiellement deux conséquences. D'une part, elle permet de relever l'absence de
«contagion » des vices qui pourraient affecter le contrat principal à la clause
compromissoire qu'il contient. D'autre part elle autorise la clause compromissoire à
être soumise à une loi différente de celle qui régit le contrat principal. (Section I)

Mais peut-on alors réellement parler d' « autonomie» de la clause? Certains


auteurs ont voulu voir dans cette clause un second contrat à part entière, distinct du
contrat principal, auquel cas, le terme « autonomie» serait approprié. Mais il n'en reste
pas moins que cette autonomie a des limites, ce qui inviterait dès lors à envisager la
clause compromissoire comme un accessoire du contrat principal. (Section II) Quelque
soit la qualification retenue pour la clause compromissoire, un constat s'impose de lui-
même: son autonomie de principe remporte la quasi unanimité.

8
http://www.lettresdudroit.com/?&c=1&m=0&l=1&o=0&idarticle=126

1
Section I- L’autonomie de la clause compromissoire
par rapport au contrat principal :

Cette conception du principe d'autonomie est ce qu'il est juste d'appeler la


conception traditionnelle de la notion.

Prise dans ce sens, l’autonomie a essentiellement deux conséquences. D'une


part, elle permet de relever l'absence de «contagion » des vices qui pourraient affecter
9

le contrat principal à la clause compromissoire qu'il contient. D'autre part, elle autorise
la clause compromissoire à être soumise à une loi différente de celle qui régit le contrat
principal. (§1).

Mais peut-on alors réellement parler d' « autonomie» de la clause? Certains


auteurs ont voulu voir dans cette clause un second contrat à part entière, distinct du
contrat principal, auquel cas, le terme « autonomie» serait approprié. Mais il n'en reste
pas moins que cette autonomie a des limites, ce qui inviterait dès lors à envisager la
clause compromissoire comme un accessoire du contrat principal. (§2).

§1- Signification de l'autonomie matérielle :

L'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal est


également qualifiée d' « autonomie matérielle». Deux conséquences se rattachent à
l'autonomie ainsi entendue. Tout d'abord, la clause compromissoire survit au contrat
principal, de sorte qu'elle n'est pas atteinte par la nullité ou la résolution de celui-ci (A)
; ensuite, les lois qui régissent d'une part le contrat et, d'autre part, la clause peuvent
être distinctes (B).

C’est la règle posée par l’article 318 de loi 08-05 qui dispose que : « La clause
d'arbitrage est réputée être une convention indépendante des autres clauses du
contrat. La nullité, la résiliation ou la cessation du contrat n'entraîne aucun effet
sur la clause d'arbitrage comprise dans ledit contrat lorsque celle-ci est valable en
soi ».

9
C. Blanchin., L'autonomie de la clause compromissoire: UII modèle pour la clause allribrllive de juridictio1l ?,
Paris, L.G.O.J., Travaux et Recherches Panthéon-Assas Paris li, 1994, (spéc. P 38).

1
A- Survie de la clause compromissoire au contrat
principal :

S'il est établi que la règle d'autonomie matérielle prémunit la clause


compromissoire contre un grand nombre de vices qui pourraient affecter le contrat
principal (a), des doutes subsistent quant à l'extension du principe en cas d'inexistence
ou de nullité ab initio du contrat en question (b).

a) Absence de vices affectant le contrat principal :

René David10 a parfaitement décrit le scénario à l'occasion duquel la question


relative à l'autonomie de la clause peut entrer en jeu:

« Il arrive souvent que le litige survenu entre les parties mette en cause le
point de savoir si le contrat conclu entre ces parties est ou non valable ou s'il n'a pas
été résolu. Une difficulté peut naître à ce sujet lorsque l'arbitrage est prévu par une
clause compromissoire insérée dans un contrat. Une partie allègue que ce contrai
est nul ou a cessé d'exister... N’est-ce pas dire en même temps que la clause
compromissoire contenue dans ce contrat est nulle ou a cessé d'exister, et peut-on
encore donner effet à cette clause? ) ».

Bien évidemment les parties peuvent rendre leur convention d’arbitrage


réellement indépendante, en concluant par acte séparé un accord en vue de soumettre
leurs litiges futurs à 1’arbitrage. Ainsi les vicissitudes du contrat n'affecteront pas
l'accord en lui-même, puisqu'il s'agira de deux conventions matériellement distinctes.
Pourtant M.Mezger11 estime que, même conclue par acte séparé, la convention
arbitrale fait corps avec le contrat auquel elle se rapporte, ce qui n'est pas totalement
faux puisque, comme nous le verrons, le contrat principal et les litiges relatifs à ce
contrat sont l'objet même de la convention d’arbitrage.

Néanmoins, force est de constater que le plus souvent les parties insèrent la
convention d'arbitrage dans le contrat principal. Cependant, même dans cette dernière
hypothèse, l'autonomie peut parfois aller de soi. C'est le cas notamment si la clause a
fait l'objet d'une approbation expresse, ou lorsqu'elle prévoit expressément que la
question de la nullité ou de la résolution du contrat seront soumises à l'arbitrage, ou
encore quand elle renvoie à des normes internationales qui reconnaissent l'autonomie.
Mais que se passe-t-il si la clause compromissoire se contente, en termes très généraux
de prévoir l'arbitrage pour les litiges qui pourront s'élever relativement au contrat?
10
R. David, L’arbitrage dans le commerce international. Paris, Economica, 1992, (spéc. n° 209).
11
E. Mezger, « Compétence-Compétence des arbitres et indépendance de la convention arbitrale dans la
Convention dite Européenne sur l'Arbitrage Commercial International de 1961», Essais Minoli, AIAlUTET,
1974, P 321.

1
Une tendance actuelle très nette se dégage en faveur de la reconnaissance de
l'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal. « Les vices
qui ont pu affecter la validité de la convention de fond (et inversement) ne mettent
pas en cause les éléments correspondant de la convention d'arbitrage »12.

A vrai dire, l’incidence de la nullité de la clause compromissoire sur le contrat


principal laisse la doctrine et la jurisprudence assez indifférentes sur le sujet: on
conclut rapidement à une nullité partielle, qui fait que la clause en question disparaît
tandis que le contrat subsiste13.

En revanche, la problématique inverse, celle qui ferait que la clause survivrait


au contrat, est beaucoup plus impressionnante et spectaculaire. II existerait, en effet,
certains cas d'immunisation14 de la clause compromissoire: la nullité15, la résiliation, ou
la résolution du contrat auquel la clause se rapporte, serait sans effet sur elle. De
même, la novation ne pourrait avoir pour effet de priver d'efficacité la clause
compromissoire insérée dans le contrat.

Pour Pierre Mayer16, les vices du consentement relèvent également le plus


souvent de la séparabilité. II prend, en effet, l'exemple de l'erreur sur une qualité
substantielle de la chose objet du contrat, pour en conclure que cela n'a aucun rapport
avec la volonté de recourir à l'arbitrage. En revanche, il reste beaucoup plus réservé
pour ce qui est de la contrainte physique ou morale, ou encore des manœuvres
frauduleuses, dans la mesure où le vice atteindra nécessairement la clause
compromissoire. L'illicéité du contrat reste, pour lui, le domaine par excellence de la
séparabilité, dans la mesure où il estime que le fait que le contrat ait un objet illicite ne
remet pas en cause le recours à l'arbitrage.

Aujourd'hui, la survie de la clause compromissoire à la disparition du contrat est


globalement admise, mais il reste quelques points obscurs qui laissent place au débat
concernant le problème de l'inexistence du contrat et de sa nullité ab initio.

b) Difficultés: nullité ab initio et inexistence du contrat principal :

12
J.Robe « L'arbitrage: droit interne, droit international privé », 6ième éd, Paris, Dalloz, 1993, (spéc. P 250 5.).
13
P. Simler, La nu/lité partielle des actesjuridiques, Paris, L.G.DJ., 1969, (spéc. P 102).
14
Expression empruntée à M. le Conseiller J.-P. Ancel, « L'actualité de l'autonomie de la clause
compromissoire», Trav. Corn. fr. dT. int. priv., 1991-1992, p 75.
15
Par exemple : Casso civ., 18 mai 1971,/mpex, J.O.I., 1972, P 62, note B. Oppetit.
16
P. Mayer, « Les limites de la séparabilité de la clause compromissoire », Rev. am., 1998, p 359.

1
Le problème de la nullité ab initio a surtout été soulevé par les juridictions et les
auteurs anglais. En effet, le sens de leur jurisprudence, depuis un arrêt de 1942 17,
faisait du principe d'autonomie un principe reconnu mais limité aux contrats « voidable
», à l'exclusion des contrats « void ». Cette distinction avait été dénoncée par le Juge
Steyn ; il est d'ailleurs à l'origine du changement de position de l’Angleterre sur le
sujet de la « separability».

En revanche, l'inexistence du contrat semble toujours constituer un obstacle à


l'autonomie: cette remarque ne vaut pas seulement pour l'Angleterre. La Cour de
Cassation française a en effet décidé, dans un arrêt L. et B. Cassia, en date du 10 juillet
199018, que: «en matière d'arbitrage international, l'autonomie de la clause
compromissoire trouve sa limite dans l'existence, en la forme, de la convention
principale qui contiendrait la clause invoquée ». Mais il faut bien voir, comme le
souligne Eric Loquin, annotateur de l'arrêt, que le problème de l'inexistence est fort
différent de celui de la nullité. En effet, il explique:

« L’inexistence de la convention principale suppose l'absence totale de


consentement, ou ce qui revient au même l'impossibilité de prouver l'existence de
celui-ci. Cette absence de consentement concerne aussi bien la convention
d'arbitrage que le contrat principal ».
Ainsi, aucune convention, ni d'arbitrage, ni principale, n'a été conclue.

B- Différenciation des lois applicables à la clause


compromissoire et au contrat :

Cette question est relativement peu étudiée par les auteurs, même si elle est
toujours rappelée comme autre conséquence du principe d'autonomie dans sa première
signification. Deux situations sont envisageables: les parties peuvent choisir
délibérément une loi différente pour leur clause compromissoire (a) ; mais que se
passe t’il si elles n'ont rien choisi? (b).

a) Possibilité de deux lois différentes :


La question est de savoir si la détermination de la loi applicable à la validité de
la clause compromissoire est elle-même influencée par la notion de séparabilité. On
peut assez facilement être porté à croire, dans la mesure où l'on considère que la clause
compromissoire est « autonome » par rapport au contrat qui la contient, qu'elle peut
tout à fait être régie par une loi différente de celle qui est applicable à celui-ci. Et, en
effet, il est admis que l'autonomie matérielle permet aux parties de choisir deux lois

17
Heyman v. DarwitlS Lld, [1942] A.C. 356.
18
Casso 1(rc civ., 10 juillet 1990, L. et B. Cassia. 1.0.1., [992. P 168, note E. Loquin.

1
différentes pour la substance du contrat et pour la clause d'arbitrage 19. D'après M.
Maye20, ce « dépeçage» est légitime selon les tendances modernes du droit
international privé. fi est vrai que la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles dispose en son article 3§1 que : «par leur
choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie
seulement de leur contrat ».

D'ailleurs un tel «dépeçage» pourrait dans certaines circonstances, être justifié,


notamment si l'on songe à la question de l'arbitrabilité du litige: la loi applicable à la
convention d'arbitrage pourrait bien être plus favorable que la lex contractus. Or, la
majeure partie des Etats cherchent à favoriser, dans la mesure du possible, le recours à
l'arbitrage.

Malgré cette motivation certaine en faveur du «dépeçage », il convient de


relativiser son importance dans la mesure où ce cas de figure ne présente en réalité que
peu d'intérêt pratique: il est en effet rare de rencontrer l’exemple d'une clause
compromissoire qui aurait été soumise par les parties à une loi autre que la lex
contractus.

b) Le silence des parties :

La question se pose alors dans ces termes: en cas de silence des parties sur la loi
applicable à la clause compromissoire, la lex contractus s'étend-t-elle à cette clause?

On serait bien évidemment tenté de répondre par l'affirmative puisque,


s'agissant d'une clause d'un contrat elle devrait en principe être soumise, à défaut de
disposition contraire, à la loi qui gouverne celui-ci. Pourtant c'est une solution toute
différente qu'adopte la Convention de New York 21. L'article V.1.(a) de cette
convention prévoit effectivement qu'à défaut d'une indication sur la loi applicable à la
clause, celle-ci est soumise à la loi du pays où la sentence a été rendue, étant précisé
que ce cas est limité à l'aspect de l'exécution de la sentence.

A noter que d'après Yves Derains, qui a observé la jurisprudence


internationale22, différentes tendances apparemment inconciliables se dessinent en
matière de droit applicable à la clause compromissoire: les solutions oscillent entre
19
Par exemple: art. 3121 du Code civil du Québec.
20
P. Mayer. note précitée 12.
21
Convention de New York du 10 juin 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales
étrangères. Les grandes nations commerçantes sont devenues parties à cette convention : Etats-Unis, Russie,
Japon, France, Suisse, Allemagne. Canada, Royaume-Uni; ainsi que certains pays d'Afrique et d'Amérique
Latine.
22
Y. Derains, « Les tendances de la jurisprudence arbitrale internationale», lO.I., 1993, P 829.

1
droit du contrat, droit du lieu de l'arbitrage, et volonté des parties. Mais dans chaque
hypothèse, c'est une plus grande faveur envers la validité de la clause qui est
privilégiée.

§2- Limite au principe d'autonomie: la séparabilité :

Nombre d'auteurs dénoncent l'utilisation du terme «autonomie », et estiment


qu'il existe des formules beaucoup plus appropriées pour désigner le principe qui sous-
entend une certaine distance de la clause compromissoire vis-à-vis du contrat
principal.

Ainsi M. Mayer a fait sienne l'expression anglaise de « séparabilité » 23, tandis


que M. Motulsky parle d' « indépendance » de la clause. Dans chaque hypothèse, il
s'agit de souligner que la clause, tout en étant détachable du contrat, dépend parfois de
celui-ci.

Ainsi la «séparabilité » se situe à mi-chemin entre la conception qui voit dans la


clause compromissoire un second contrat à part entière et celle qui se contente
d'appréhender la convention d'arbitrage comme une simple clause d'un contrat unique
(A). Ne devrait-on pas en définitive renouer avec la notion d'accessoire pour
comprendre et cerner la clause compromissoire? (B).

A- Séparabilité: la clause compromissoire comme


contrat ou comme simple clause?

Concevoir la clause compromissoire comme un contrat autonome semble être la


tendance actuelle (a). Néanmoins, force est de constater que la clause compromissoire
est avant tout une clause (b).

a) La clause compromissoire comme contrat autonome :

Lorsque l'on parle de l'autonomie matérielle de la clause compromissoire, il est


en effet tentant de l'envisager comme un second contrat, autonome et distinct, qui se
surajouterait au contrat principal :
« Le mot 'autonomie', utilisé à propos des rapports entre la convention
d'arbitrage et le contrat auquel elle se rapporte, donne à penser que ce sont deux
entités dont les sorts ne sont en aucune façon liés »24.

23
P. Mayer,op.cit, p.12.
24
P. Maye, op.cit, p.12.

1
Il n’y aurait par conséquent, d'une part le contrat principal énonçant les
obligations substantielles des parties, et, d'autre part, un « contrat parallèle» contenant
la clause compromissoire. Cette thèse, qualifiée d'artificielle par Pierre Maye, trouve
son origine dans des décisions anglaises, notamment dans l'arrêt Bremer Vulkan25.

Il est vrai, comme nous l'avons vu, que la disparition de la clause n'a pas en
principe d'incidence sur l'existence du contrat, et qu'inversement, les vices susceptibles
d'affecter le contrat principal n'ont pas forcément pour effet de rendre la clause
compromissoire caduque. Est-ce à dire pour autant qu'il s'agit là de deux conventions
différentes? Oui, à en croire M. Motulsky26 qui explique, après avoir pris soin de
rappeler que la convention d'arbitrage peut être conclue par acte séparé ou bien incluse
au contrat, que l’unité matérielle de «l'acte-instrumentum» n'exclut pas la dualité
intellectuelle des « actes-negotia». Telle est l'argumentation qu'il développe à l'appui
de sa position :

« Il y a, de toute nécessité deux conventions ; car, selon sa rédaction


habituelle, la clause compromissoire entend régler 'les différends auxquels le
présent contrat pourra donner lieu : c'est assez dire que le 'contrat' constitue l'objet
de la clause et que celle-ci se place donc, logiquement à l'extérieur ».

b) La clause compromissoire, clause d'lin contrat unique :

Adam Samuel, constate que la théorie qui fait de la clause compromissoire un


autre contrat, remplace peu à peu l'approche traditionnelle qui voit dans cette clause
une simple partie du contrat27.

Il souligne pourtant que cette dernière n'implique pas que le sort de la clause
compromissoire doive suivre celui des autres dispositions du contrat et que, bien au
contraire, the one-contract theory est parfois plus à même de rendre compte des règles
qui peuvent exister en Angleterre relativement à cette question.

Certes, on ne peut se contenter, en la matière, d'une vison purement formaliste


qui se limiterait à constater que matériellement la clause fait bien partie du contrat. En
effet, un même instrumentum peut parfaitement regrouper deux négociations. Mais
encore faut-il que : l'unité formelle soit démentie par une volonté manifeste de
séparation intellectuelle. Le simple fait que les parties n'aient conclu qu'un seul contrat

25
Bremer Vulkanv. South India Shipping Corp., [1981] A.C. 909, 980.
26
H. Motulsky, sous l'arrêt Gosset, note précitée 33 ; position partagée par B. Edelman.
27
A. Samuel, « Separability in English Law - Should an Arbitration Clause Be Regarded as an Agreement
Separate and Collateral to a Contraet in Which It [s Contained ?», 1. [nt'l. Arb, sept 1986, P 95.

1
suggère qu'elles voulaient unir les clauses qu'elles y inséraient, sinon pourquoi
n'auraient-elles pas conclu directement deux conventions par acte séparé?

En effet, il faut bien voir que deux negocia cela signifie que « chacun constitue
un tout se suffisant à lui même », avec toutes les conséquences qui peuvent en
découler, notamment au niveau de la durée, de l'inexécution, de la nullité de chacune
des conventions. On peut donc admettre qu'un même écrit abrite deux conventions,
mais encore faut-il que l'intention des Parties soit claire à ce sujet. Or, il semble
impossible de traiter la clause compromissoire comme un contrat totalement
autonome: son existence ne se justifie que pour et par le contrat principal, puisqu'il
constitue l'objet même de la clause arbitrale.

La clause se propose en effet de soumettre à l'arbitrage tous les litiges qui


pourraient naître à l'occasion du contrat; elle ne peut dès lors pas être
contractuellement «désintéressée» par rapport au contrat. On peut même aller plus loin
et dire qu'elle constitue « un élément du régime contractuel voulu par les parties».
Ainsi, tout en étant différent des dispositions substantielles du contrat principal, elle en
constituerait un élément à part entière au même titre que les formalités de paiement ou
de livraison. Pierre Mayer en conclut que « la clause compromissoire est donc bel el
bien une clause parmi d'autres, dans un contrat unique»28.

Le recours à la notion d'accessoire permet d'apporter des solutions satisfaisantes


aux problèmes de qualification qui viennent d'être mis en lumière.

B- La notion d'accessoire: fondement et limite de la


séparabilité :

Le terme « séparabilité », rend mieux compte de ce que constitue réellement


l'autonomie matérielle de la clause compromissoire: si la clause en question suit
parfois un destin différent du contrat principal, et même lui survit, il n'en reste pas
moins qu'elle dépend dans une certaine mesure, de lui. La notion d'accessoire exprime
parfaitement cette ambivalence, et c'est pourquoi elle constitue à la fois le fondement
(a) et la limite de la séparabilité (b).
a) Fondement de la séparabilité de la clause compromissoire :

Pierre Mayer est un des fervents défenseurs du recours à la notion d'accessoire


pour expliquer l’autonomie matérielle de la clause compromissoire à l’égard du contrat
principal. Il est certes favorable au principe de séparabilité qu’il juge « conforme au

28
P. Mayer, op.cit, p.12.

1
bon sens et aux prévisions raisonnables des parties» et dont la reconnaissance s'impose
vu « les avantages pratiques» que la séparabilité offre.

Néanmoins, il persiste à affirmer que « la séparabilité n'indique que la


possibilité de séparer lorsque la volonté présumée des parties est en ce sens, il n'en
demeure pas moins que la clause compromissoire est partie intégrante du contrat, et
l'accessoire des droits qu’il crée»29. Cette position n'est pas isolée: M. Siro1er partage
en effet ce point de vue.

Quand bien même la clause compromissoire aurait une « réelle valeur


autonome », cet auteur exclut la qualification d'acte complexe au contrat assorti d'une
clause compromissoire; pour lui, celle-ci est « par nature même accessoire »,
puisqu'elle ( ne se conçoit pas en dehors d'un contrat principal, même si elle est
contenue dans un acte distinct ». Il ajoute même que « les qualificatifs 'accessoire' et
'autonome' ne sont donc foncièrement pas antinomiques, du moins dans ce cas précis
».

b) Limite à la séparabilité de la clause compromissoire :

Si la notion d'accessoire explique que la clause compromissoire puisse être


séparable du reste du contrat, elle justifie également sa non-séparabilité.

En considérant la clause d'arbitrage comme véritablement autonome, on


pourrait légitimement s'interroger sur ce qu'il advient d'elle lorsque le contrat principal
qui la contient matériellement est cédé, ou encore en cas de cession de créance ou de
subrogation. Doit-on lui faire suivre le sort du contrat et par conséquent continuer à
rappliquer à la situation nouvellement créée, ou, au contraire, doit-on la laisser en
dehors, ne pas la transmettre, ni lui faire régir les nouveaux rapports? Cette dernière
option a parfois été retenue30. Pourtant, force est de constater que la clause
compromissoire constitue bel et bien une modalité du contrat, ou même de la créance
cédée, et qu'en conséquence, elle ne saurait dans de telles circonstances être séparée du
contrat principal.
M. Mayer en conclut que « le domaine de séparabilité doit donc être restreint
aux hypothèses où le refus de donner effet à la clause, par solidarité avec le reste du
contrat, soustrairait à l'arbitrage des questions que les parties ont voulu y soumettre » 31,
et de reprendre les exemples déjà évoqués plus haut d'extinction et de nullité du contrat
principal, ainsi que ceux de la réalisation d'une condition résolutoire ou la non-
réalisation d'une condition suspensive.
29
P. Mayer, « L'autonomie de ('arbitre international », Rec. Cours La Haye, 1989, V, t 217. P 327, (spéc.P 3465.).
30
Voir: Ph. Fouchard, « L'arbitrage et les tiers », Rev. arb. , 1988, P 429 5., (spéc. p 469 et 472).
31
P. Mayer, note précitée 12.

1
L'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal n'est
pas absolue, c'est pourquoi d'autres expressions « séparabilité », par exemple sont
davantage appropriées.

Section II- L'autonomie de la clause compromissoire


par rapport à la loi étatique :
Il s'agit cette fois d'une conception beaucoup plus novatrice du principe
d'autonomie qui diffère totalement de l'approche traditionnelle: il n'est plus question du
contrat principal, mais de la soumission de la norme à un droit.

1
Jusqu'ici la loi applicable à la clause compromissoire était déterminée par la
méthode des conflits de lois; on pouvait alors juger de la validité et de l'existence de la
clause en question, grâce à la loi ainsi désignée. C'est désormais une règle matérielle
relative à la clause en matière internationale qui a été adoptée. Il s'agira d'établir la
nécessité et le contenu de cette règle. (§1).

Mais, sauf à admettre le concept d'un «contrat sans loi », la clause


compromissoire ne peut être laissée sans contrôle. Ainsi ce second aspect de
l'autonomie trouve ses limites dans l'appréciation de la volonté des parties, mais aussi,
et surtout, dans le respect de l'ordre public international. (§2).

§1- Signification de l'autonomie de rattachement :

L'adoption d'un principe d'autonomie de la clause compromissoire à l’égard de


toute loi étatique marque l'abandon de la méthode des conflits de lois au profit d'une
règle matérielle (A). Encore faut-il s'interroger sur le contenu de la règle matérielle
ainsi dégagée (B).

A- Abandon de la méthode conflictualiste :

La méthode conflictualiste telle qu'elle existe encore dans de nombreux


systèmes pose, en effet, certains problèmes; problèmes qui ont parfois justifié son
abandon au profit d'une règle matérielle jugée simplificatrice par certains auteurs.

La méthode consiste à rechercher le système juridique avec lequel un rapport de


droit précis entretient les liens les plus étroits, afin de déterminer quelle sera la loi
applicable à ce rapport. Mais une telle détermination concernant la clause
compromissoire n'est pas sans poser certains problèmes, que ce soit pour trouver
quelle catégorie légale est en cause, ou pour choisir les points de rattachement
(connecting factors).

S'agissant de la catégorie légale, force est de constater que divers éléments


variés, tels que la capacité des parties, leur pouvoir de signature, la forme ou encore le
contenu de la clause d'arbitrage, viennent parasiter l'identification précise du problème.

Mais la difficulté essentielle vient du fait que la clause compromissoire semble


se trouver à mi-chemin entre procédure arbitrale et contrat principal. En effet,

1
l’hésitation est possible lorsqu'il s'agit de caractériser la clause d'arbitrage: est-elle à
rattacher au fond ou à la forme? Est-elle « procédural » ou « substantive» ?

Dans un premier temps, la clause compromissoire a été rattachée à la loi


gouvernant la procédure arbitrale. En effet, un courant de pensées influencé par la
vision anglo-saxonne de la procédure, plus large que l'acceptation communément
admise, avait caractérisé la clause d'arbitrage comme étant procédurale. D'ailleurs cette
position avait été confirmée par les travaux de l'Institut de Droit International32 .

Mais différents arguments rendaient cette solution assez maladroite dans de


nombreuses hypothèses: notamment lorsque la loi gouvernant la procédure arbitrale
n'était pas celle du lieu de l'arbitrage, ou encore lorsque les parties préféraient ne pas
décider de la loi applicable à la procédure de façon définitive, réservant ainsi aux
arbitres une marge appréciable de flexibilité et de possibilité d'agir au cas par cas.
Mais l'argument déterminant était celui selon lequel, bien que concernant un aspect de
la procédure, la clause d'arbitrage n'en demeurait pas moins un contrat. C'est ce qui
conduisit les auteurs et les cours à abandonner l'assimilation de la clause à la procédure
arbitrale.

Mais, même en retenant comme catégorie légale celle du contrat principal, les
hésitations sont toujours de mise. Si les parties ont décidé de la loi devant s'appliquer à
leur contrat, rien ne permet d'affirmer que cette même loi devrait régir la clause
d'arbitrage, puisque celle-ci est fort différente dans son objet du contrat qui la contient.

Dans l'hypothèse où les parties n'auraient rien prévu, la méthode des conflits de
lois invite à rechercher de quel système légal l'accord litigieux est le plus proche. Mais
encore faut-il savoir si c'est le contrat principal ou la clause compromissoire qui doit
entretenir les liens les plus étroits avec le système légal envisagé. La tendance générale
pousse à considérer que la loi du contrat principal pourrait influencer celle applicable à
la clause d'arbitrage. C'est notamment le cas lorsque les parties ont choisi un pays dont
la loi serait celle qui gouvernerait leur contrat et qui serait en même temps le lieu
choisi pour l'arbitrage. La difficulté est bien plus grande si cette identité de pays, et
donc de loi, n'existe pas.

Ainsi le choix de la loi applicable à la clause compromissoire ne peut se


contenter d'être guidé uniquement par la loi applicable au contrat principal. L'adoption
pure et simple de la lex contractus non seulement va à l'encontre de l'autonomie de la
clause dans sa première signification, l'autonomie matérielle, mais, en plus, constitue

32
Par des résolutions de 1957 et 1959, cet Institut avait décidé que la validité de la clause compromissoire devait
être soumise à la loi du lieu de l'arbitrage, faisant ainsi de la clause un élément de la procédure arbitrale.

1
une négation de l'idée de neutralité qui prédomine au choix de l'arbitrage comme mode
de règlement des conflits.33

Le problème n'est pas moins épineux s'agissant des points de rattachement, si


l'on retient la loi du lieu où la clause compromissoire a été conclue, il est évident
qu'elle n'aura pas un lien de connexité révélateur avec la situation, puisque le lieu de
conclusion d'un contrat peut parfaitement être le fruit du hasard. De même, le lieu du
siège de l'arbitrage a parfois une faible valeur localisatrice. Il n'en reste pas moins que
c'est bien souvent ce facteur de rattachement qui est retenu, non plus par rapport à la
nature procédurale de la clause, mais bel et bien comme point de rattachement le plus
révélateur.

En définitive, aucune solution arrêtée ne se dégage réellement, et René David


constate d'ailleurs, à propos des règles de conflit de lois applicables à la clause
compromissoire, qu'il « n'apparaît pas qu'en aucun pays la jurisprudence applique des
principes bien définis, les formules que l'on trouve à ['occasion dans les arrêts ... ne
constituent pas autre chose qu'une motivation jugée opportune pour justifier la solution
donnée dans l'espèce »34. C'est dire combien la méthode conflictualiste entraîne des
soucis de prévisibilité.

C’est la règle matérielle qui permet indéniablement d'échapper aux


particularismes des législations nationales, et elle « a le mérite d'accentuer le
détachement de l'arbitrage international du carcan des droits internes, trop peu
nombreux encore à ne pas s'être développés qu'en fonction des préoccupations d'ordre
interne »35.

B- Contenu de la règle matérielle :

Le second aspect du principe d'autonomie de la clause compromissoire,


consacré en France par une règle matérielle, signifie que celle-ci est autonome par
rapport à toute loi étatique
En effet, l'autonomie ainsi comprise, dans cette seconde acception, rend
beaucoup mieux compte de son étymologie grecque qui signifie « faculté de se régir
par ses lois propres». Il s'agit de l'aspect le plus moderne, le plus « ambitieux » 36, de
l'autonomie de la clause compromissoire.

33
E. Gaillard, sous l'arrêt Dalico, note précitée 2.
34
R. David, note précitée 5, (spéc. nO 242).
35
Y. Derains, obs. sous la sentence C.C.1. rendue en 1991 dans l'affaire No. 6840 : J.D.I., 1992, P 1030.
36
P. Mayer, sous rarrêt Cotrmav, note précitée 35.

1
§2- Limite au principe d'autonomie: le contrôle de la
clause :

L'existence et la validité de la clause compromissoire sont « contrôlées» d'un


double point de vue. Il faut d'abord tenir compte de la volonté commune des parties,
tout en sachant que si cette volonté est nécessaire, elle n'est pas suffisante. Il faut
ensuite vérifier que l'ordre public international est respecté. Cette seconde question
demandera de plus amples développements. Référence à la volonté commune des
parties

L'arbitrage repose sur le consensualisme, la clause compromissoire n'échappe


pas à cette règle (A) ; pourtant la référence à la volonté des parties ne saurait être
suffisante (B).

A- Référence à la volonté commune des parties :

L'arbitrage repose sur le consensualisme, la clause compromissoire n'échappe


pas à cette règle ; pourtant la référence à la volonté des parties ne saurait être
suffisante.

Le processus même de l'arbitrage repose sur un principe de consensualisme. En


effet, les parties font le choix et la démarche de soustraire leurs litiges aux instances
étatiques pour les soumettre à une justice privée. Elles peuvent s'entendre par la suite
sur l'aspect qu'elles souhaitent donner à chaque étape de l'arbitrage: cela concerne
aussi bien l'identité des arbitres, que les règles qui régiront la procédure, ou encore le
droit qui va être appliqué au fond du litige. Ainsi l'arbitrage est à la fois issu de la
volonté des parties et soumis à celle-ci: les parties initient le procédé (par la conclusion
d'une clause d'arbitrage) et l'organisent. De manière générale, on peut constater, avec
M. OPPETIT : qu' « en matière d'arbitrage le domaine de la loi régresse constamment
au bénéfice de celui de la volonté»37.

Il est certain que l'on ne peut se contenter de relever que les parties sont
tombées d'accord sur le principe de l'arbitrage en incluant une clause compromissoire
dans leur contrat. Quelque soit la valeur que l'on semble aujourd'hui accorder à
l’autonomie de la volonté, elle ne peut, à elle seule, fonder l’existence et la validité de
la clause d'arbitrage. Ce serait là lui octroyer une importance que la majeure partie de
la doctrine ne semble pas prête à lui reconnaître. On retrouve, en effet, les oppositions
formulées à l’encontre du « contrat sans loi». Un contrat ne peut exister en soi..

37
B. Oppetit, sous l'arrêt Hechl. Casso 1èn: civ., 4 juillet 1972. 1.D.I., 1972, P 843.

1
Pour que son existence soit constatée, et son autorité reconnue, encore faut-il
que ce contrat, en tant que processus de rencontre des volontés créatrice de droits et
d'obligations, soit « permis », « autorisé », par une norme qui lui est antérieure et
justifie sa légitimité: « la force obligatoire du contrat ne se conçoit pas sans l'appui
d'une règle extérieure aux contractants, qui la consacre»38.

B- Limite fixée par l’ordre public international :

L'ordre public est une notion qui « exprime en termes généraux le schème des
valeurs dont la tutelle sert essentiellement un ordre juridique déterminé. L'ordre public
est donc le schème axiologique de tout groupe normatif articulé et qui, figé parfois en
préceptes, d'autres fois en principes, remplit la fonction positive de doter d'un caractère
formel de jus cogens les propositions juridiques qui le définissent substantiellement, et
la fonction négative qui fournira à l'interprète juridique le filtre technique qui lui
permettra de définir les valeurs essentielles du système, tant face à des normes
juridiques qu'à des situations nouvelles »39.

Chapitre II- Formation de la convention


d’arbitrage :

38
B. Goldman, sous l'arrêt Hecht, note précitée 109.
39
- V.I.Strenger : « la notion de lex mercatoria en droit du commerce international ».RACDI.1991.P :207.

1
La convention d’arbitrage est conclue par écrit et représente l’accord par lequel
les parties intéressées s’obligent a ce qu'un litige déterminé ou déterminable soit
solutionné par des personnes physiques dénommées arbitres, qui sont élues ou bien
désignées conformément a l’accord. Pour qu’une telle convention soit valable, c’est-a-
dire pour qu’elle puisse produire ses effets, elle doit être conclue par les personnes qui
ont la pleine capacité d’exercice des droits, et les litiges doivent être patrimoniaux, a
part ceux qui visent : « des droits sur lesquels la loi ne permet pas de faire une
transaction ».

Comme tout contrat, la convention arbitrale doit aussi réunir des conditions
essentielles de validité, nommément: la capacité de contracter, le consentement valable
des parties, un objet déterminé et une cause licite.

La convention arbitrale peut être conclue soit sous la forme d’une clause
compromissoire, soit sous celle d’un accord indépendant. La clause compromissoire
sera inscrite dans le contrat principal, sa validité étant indépendante de celle du contrat
dans lequel elle a été inscrite, alors que le compromis est une convention indépendant,
conclue après la naissance du litige.

La sanction de nullité de la convention arbitrale entre en vigueur lorsqu’elle


n’est pas conclue par écrit, et l’absence de la convention entraine la compétence des
instances de jugement dans la solution du litige.

Section I- Les conditions de fond de formation de


conventions d’arbitrage :

1
Comme toutes les conventions, celle ayant pour objet le recours à l'arbitrage
suppose que les parties aient donné leur consentement, que cette convention ait un
objet et une cause licites et qu'elles aient la capacité de la conclure.

Les questions spécifiques qui peuvent nous retenir sont ici abordées au travers
du pouvoir de conclure une convention d'arbitrage et au travers de l'arbitrabilité.
S'agissant d'une convention, la capacité qui est exigée est la même que celle requise
pour passer n'importe laquelle des autres conventions intéressant le commerce
international.

La convention d’arbitrage pour être valable, doit réunir les conditions de droit
commun en général et en particulier le consentement et la capacité, et les personnes
qui peuvent compromettre sont citées par la loi.

Dans ce cadre nous allons traiter deux points essentiels à savoir : le


consentement à l’arbitrage (§1) et l’arbitrabilité (§2).

§1- le consentement à l’arbitrage :

Qu'il soit interne ou international, l'arbitrage repose généralement sur le


consentement des parties. C'est donc à juste titre que celui-ci a été qualifié de pierre
angulaire de l'arbitrage. Effectivement, c'est sur ce consentement que la justice privée
s'est longtemps appuyée pour justifier sa légitimité, revendiquer son autonomie et
conquérir un nouvel espace de liberté.

Solidement porté par le consentement qui lui sert de fondement, l'arbitrage n'a
cessé de se développer au point d'apparaître de nos jours comme le mode normal de
règlement des litiges du commerce international. On le dit particulièrement adapté au
règlement de telle ou telle catégorie de litiges, manière d'affirmer sa vocation à étendre
son emprise. Parvenu à l'âge adulte, c'est donc tout naturellement que l'arbitrage
cherche à s'affranchir du caractère exceptionnel que lui imprime sa subordination au
consentement, lequel apparaît de plus en plus comme un îlot de résistance à son
expansion, sinon à son efficacité.

La résistance du formalisme ne devait être définitivement vaincue qu'au XV et


XVIème siècles.
Le consensualisme a triomphé dans le code civil français avec l'article 1108 qui
n'exige pour la validité d'une convention que quatre conditions :
- Le consentement de celui qui s'oblige
- La capacité de celui qui s'oblige

1
- l'objet de l'engagement ;
- et la cause licite de l'obligation.

Par conséquent, les formes ne sont plus indiquées comme une condition de la
validité du contrat. Le consensualisme a des avantages certains .Tout d'abord, il est
moral.

L'individu est tenu par sa volonté exprimée : il ne peut pas revenir sur ce qu'il a
promis, en invoquant une quelconque violation de la forme. En outre, il est plus simple
: c'est à dire que les exigences de forme peuvent être compliquées et ouvrir de
nombreux cas de nullité d'où résulte une grande incertitude sur la valeur du contrat.

Mais il ne faut pas non plus négliger les inconvénients du consensualisme. En


effet, il peut en résulter une incertitude grave sur le contenu du contrat : qu'est ce que
les parties ont exactement voulu .Il est donc utile, sinon nécessaire, que les intéressés
conservent la preuve des termes du contrat, ce qui nécessite, la plupart du temps, que,
soit dressé un écrit.

Cet acte écrit est exigé, en général, en tant que moyen de preuve, à partir du
moment où les engagements des parties excèdent un certain montant, qui est de 10 000
DHS, conformément aux dispositions de l'article 443 du DOC ou bien de 5000 F en
droit français (article 1341 du code civil).

Mais, il arrive que le législateur soit plus exigeant, qu'il impose l'acte écrit
quelle que soit la valeur de l'obligation ; (vente immobilière, vente de fonds de
commerce, vente de navires, contrat de société ...)

Il s'agit alors tantôt de protéger la volonté des parties, dont l'attention est attirée
par la nécessité de signer un écrit, tantôt de faciliter les formalités de publicité.

Les articles 2 du D.O.C. et 1108 du C. civ. fr., exigent pour la formation des
obligations qui dérivent des conventions et autres déclarations de volonté : < une
déclaration valable de volonté portant sur les éléments essentiels de l'obligation> ;
donc un consentement de la personne qui s'oblige.

A- Les conditions de validité du consentement :

1
En, plus de son extériorisation, et le fait d'avoir été donné en toute liberté, le
consentement doit émaner d'une personne saine d'esprit.

- La personne qui s'oblige doit être saine d'esprit :

S'agissant, on le rappelle, de personnes juridiquement capables, qui ne sont


frappées d'aucune incapacité légale, une première condition de validité de leur
consentement et qu'elles soient saines d'esprit.

Certes, la personne atteinte d'aliénation mentale ou de déficience intellectuelle


grave, peut être placée sous un régime d'incapacité, ce qui résout le problème de son
inaptitude à donner un consentement valable.

Mais, très souvent aucune mesure légale n'aura été prise, ce qui fait qu'elle reste
juridiquement capable et que le problème se pose, en dehors du système juridique des
incapacités, de savoir si son consentement peut avoir quelque efficacité juridique.

- Il faut que le consentement soit extériorisé :

La deuxième condition de validité du consentement est son extériorisation c'est


d'ailleurs une condition assez complexe. Certes, il va de soi qu'une volonté purement
interne, qui ne s'est pas encore exprimée, ne peut produire aucun effet.

Cependant, le droit marocain, à l'instar du droit français, hésite à donner pleine


et seule efficacité à la volonté exprimée, à la simple déclaration de volonté. S'il est
nécessaire que la volonté soit extériorisée d'une façon quelconque, on ne saurait pour
cela négliger entièrement la volonté interne, réelle.

Encore la volonté peut elle s'exprimer de façons variées. Les plus claires sont
l'écrit et la parole, parfois le geste (ainsi dans les ventes aux enchères).Mais on
reconnaît aussi que la volonté peut être tacite c'est-à-dire qu'elle peut s'induire d'une
série de circonstances, sans qu'il y ait eu une véritable extériorisation.

- Il faut que le consentement soit sérieux

Donné par un individu sain d'esprit, exprès, le consentement doit encore être
sérieux.
Il existe des consentements donnés, "pour rire", d'humeur, la jurisprudence
française ne se hâte pas de les déclarer inefficaces, ce qui serait dangereux pour la
stabilité du commerce juridique.

1
Le consentement doit aussi porter sur ce que la partie a vraiment voulu. Or,
elle a pu se tromper, commettre une erreur, ou être trompée, être victime d'un do].

B- Les vices du consentement :

La théorie des vices du consentement plonge ses racines dans le droit romain,
mais a subi de profondes transformations.

En effet, le droit romain, formaliste, attachait assez peu d'importance aux


qualités du consentement. Aussi, la violence et le dol étaient ILS sanctionnés en tant
que délits civils.

Seule l'erreur était un véritable vice du consentement, mais elle n'est apparue
que tardivement, à condition d'être grave et dans les seuls contrats typiquement
consensuels, tels que la vente.

§2- L’arbitrabilité :
Le domaine de l’arbitrage est doublement limité, toutes les personnes ne
peuvent pas y avoir recours et toutes les matières ne peuvent pas y être soumises. Nous
examinerons dans un premier lieu les personnes pouvant recourir à l’arbitrage (A),
alors que dans un deuxième lieu, les matières pouvant être soumises à ce mode de
règlement de litige (B).

A- Les personnes qui peuvent recourir à l’arbitrage :


On croit souvent que l’arbitrage se limite aux différends qui opposent des
personnes appartenant au milieu d’affaires. En fait, il est vrai que la majorité des
arbitrages mettent en cause des industriels ou des commerçants. En réalité, cependant
le domaine de l’arbitrage est plus large sans être cependant général en raison des
risques entrainés par la renonciation aux garanties offertes par les juridictions
étatiques. Par conséquent tout le monde ne peut pas compromettre, c'est-à-dire recourir
à l’arbitrage.

Ainsi l’article 308 de la loi 08-05 prévoit à cet effet que : « Dans le respect des
dispositions du dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913) formant code des
obligations et des contrats, tel que modifié et complété, et notamment de son article
62, toutes personnes capables, physiques ou morales, peuvent souscrire une
convention d'arbitrage sur les droits dont elles ont la libre disposition, dans les
limites et selon les formes et procédures prévues par le présent chapitre.

1
Peuvent notamment faire l'objet d'une convention d'arbitrage les litiges
relevant de la compétence des tribunaux de commerce en application de l'article 5
de la loi n° 53-95 instituant des juridictions de commerce ».

a) Les personnes physiques :

Au terme de l’article 308 du CPC « toutes personnes capables, physiques ou


morales, peuvent souscrire une convention d’arbitrage sur le droit dont elles ont
la libre disposition, dans les limites et selon les formes et procédure prévues par le
présent chapitre ».

Par conséquent les mineurs et les majeurs incapables qui y sont assimilés, ont la
capacité de recourir à l’arbitrage, par l’intermédiaire de leur représentant légal.
Toutefois le compromis ne peut, en raison de son importance, être considéré comme
un simple acte d’administration. En cas d’administration légale, l’administrateur doit
donc avoir l’autorisation du juge de tutelle.

La participation des mineurs à une procédure d’arbitrage est peu fréquente. Elle
présente néanmoins un intérêt pour le règlement de litiges familiaux, notamment ceux
qui prennent naissance à l’occasion de l’ouverture des successions et surtout des
partages. Bien que la question soit discutée, la présence d’un incapable ne paraît pas
empêché les parties de donner aux arbitres la qualité d’amiables compositeurs ou de
renoncer aux voies de recours. Lorsque l’incapable est étranger, sa capacité de
compromettre doit s’apprécier au regard de la loi qui régit son statut personnel.

La personne qui fait l’objet d’un redressement judiciaire n’est pas atteinte d’une
incapacité. Mais le jugement d’ouverture peut le dessaisir plus au moins complètement
de la gestion de son patrimoine. Il faut donc avant de compromettre avec elle,
consulter le jugement afin de savoir si l’intéressé doit être autorisé ou représenté par
l’administrateur au redressement judiciaire. Toutefois l’arbitrage ne s’applique pas à la
procédure collective elle-même. Le redressement et la liquidation des entreprises sont
de la compétence exclusive des juridictions d’Etat qui doivent suivre la procédure
fixée par la loi de commerce de 1996 selon le titre V. En effet, ces procédures mettent
en jeu des intérêts trop nombreux et trop diversifiés pour pouvoir être confiés aux
arbitres40.
Par ailleurs, l’article 578 du co.com dispose qu’en cas de : « redressement
judiciaire », le juge commissaire peut autoriser le syndic ou le chef de l’entreprise… à
compromettre ou à transiger. En outre, si l’objet du compromis ou de la transaction est
d’une valeur indéterminée ou excède la compétence en dernier ressort du tribunal de

40
Yves Guyon, l’arbitrage. Economica, 1995, p 16, 17.

1
commerce, le compromis ou la transaction est soumise à l’homologation de cette
juridiction. Toute modification au compromis et notamment prorogation du délai est
en principe soumise aux mêmes conditions, quoi que l’article 578 ne le prévoit pas
expressément.

En outre, le compromis passé antérieurement à l’état de liquidation des biens


devra obliger le syndic car il ne s’agit pas d’une action née de la liquidation du bien.
Ce compromis s’analyse à cet égard comme une prorogation conventionnelle de
compétence, encore faudra-t-il attendre une jurisprudence confirmative en l’absence de
dispositions expresses en la matière.

Mais quand l’action est née de la liquidation des biens, le syndic peut
compromettre. En effet, en vertu de l’article 625 du co.com, « le syndic peut, avec
l’autorisation du juge commissaire et le chef de l’entreprise entendu et dûment appelé,
compromettre et transiger sur celles qui sont relatives à des droits et actions
immobiliers ». L’alinéa 2 de cette disposition est identique à celle de l’alinéa 2 de
l’article 578 du co.com et concernant l’exigence de l’homologation du tribunal au cas
où l’objet du compromis est d’une valeur indéterminée ou excède la compétence en
dernier ressort de cette juridiction.

Ces dispositions vont, en définitive, dans le sens de l’article 1074 du COC


suivant lequel, « le liquidateur des biens ne peut… ni compromettre…, s’il n’y est
expressément autorisé »41.

Soulignons d’autre part que l’article 308 exige la capacité des personnes qui
désirent compromettre. Notons à cet égard, les règles générales de la capacité des
personnes physiques, tant que l’article 3 du COC que l’article 12 du nouveau code de
commerce renvoi à la Moudawana, tout en apportant des précisions relatives aux
personnes capables ou non d’accomplir des actes civiles ou commerciaux. Ainsi
l’article 3, alinéa 2 COC dispose que toute personne est capable d’obliger et de
s’obliger, sauf si elle n’en est déclarée incapable par la moudawana. Ensuite les
articles 4 à 13 du COC prévoit le rôle du représentant légal du mineur ou de
l’incapable (père, tuteur ou curateur), voir l’autorisation du mineur à exercer le
commerce ou l’industrie. Il n’en va pas autrement d’après le code de commerce
l’article 14 et 16.

En vertu de l’article 133 de la moudawana, a plein capacité pour exercer ses


droits civils, tout individu qui, ayant atteint l’âge de la majorité jouit de la plénitude de
ses facultés mentales et dont la prodigalité n’a pas été établie. Il s’en suit qui sont
41
Abdellah BOUDAHRAIN, l’arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc, Al Madariss,
Casablanca 1999, p 40, 41.

1
incapables les mineurs et les prodigues, d’autres textes prévoient le cas d’incapacité
particulière (article 578. C.com, l’article 38 du co. Pénal)42.

b) Les personnes morales de droit privé :

Les personnes morales de droit privé, sociétés, groupement d’intérêt


économique et associations, ont la capacité de recourir à l’arbitrage, puisque l’article
308 ouvre cette faculté à toutes les personnes. Mais il faut déterminer l’organe qui a le
pouvoir d’engager la personne morale dans la procédure d’arbitrage.

Précisons dans ce cadre là, que les personnes morales peuvent désigner un
mandataire pour les représenter ou les assister. Si les règles du DOC en matière de
mandat valent également pour les mandataires conventionnelles d’une société
commerciale. Il faudra aussi tenir compte tant d’une nouvelle loi régissant tel ou tel
type d’entreprise individuelle de ses statuts, voir la décision de ces organes dirigeants,
de tant plus que la législation en vigueur ne vise pas spécialement le recours à
l’arbitrage.

Ainsi, en ce qui concerne la société en nom collectif, la société en commandite


simple ou par action et la société à responsabilité limitée, se sont généralement, le ou
les gérants agissant au nom de la société vis-à-vis des tiers qui peuvent, entre autres
compromettre.

Quant à la société en participation, ayant un caractère occulte, chaque associé


contracte en son nom personnel à l’égard des tiers, il est en vertu de l’article 88 alinéa
3 de la loi 5-96, seul engagé par ses actes même dans le cas où il révèle le nom des
autres associés. Toutefois, il lui y est possible de convenir de mettre en indivision
certains apports et ainsi les associés pourront désigner l’un d’eux pour compromettre
en leur nom.
En ce qui concerne les sociétés anonymes, les personnes habilitées à
compromettre peuvent être le président du conseil d’administration ou, par délégation
de cet organe le directeur général. Il en va de même lorsqu’il s’agit d’une société
(anonyme) à directoire ou à conseil de surveillance. Mais dans ce cas particulier, outre
le président du directoire ou, le cas échéant, le directeur général unique, les statuts de
la société peuvent attribuer le même pourvoir de représentation, avec possibilité de
compromettre, au conseil de surveillance ou à un ou plusieurs autres membres du
directoire.

42
Abdellah BOUDAHRAIN, l’arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc, Al Madariss,
Casablanca 1999, p 38, 38.

1
Il faut donc s’en rapporter aux statuts. Lorsque ceux-ci n’ont rien prévu,
l’organe compétent est, selon la nature et l’importance du litige, soit celui chargé de
l’administration courante, c'est-à-dire habituellement le président, soit celui compétent
en matière d’actes de disposition, c'est-à-dire le conseil d’administration, voire
l’assemblée. Ces incertitudes font que la participation d’une association à une
procédure arbitrale entraîne toujours un risque car on peut craindre que l’association,
si elle perd son procès, prétende qu’elle n’a pas été régulièrement représentée.

c) Les personnes morales de droit public :

En ce qui concerne l'arbitrage interne, le principe est celui de l'interdiction pour


les personnes publiques de compromettre. Ce principe connaît toutefois quelques
exceptions parmi lesquelles celles, figurant à l'article 311 de la loi 08-05 relative à
l’arbitrage au Maroc.

Quant à la législation française ces exceptions sont énumérées dans l’article


2060 du code civil français, relative à certaines catégories d'établissements publics à
caractère industriel et commercial qui peuvent être autorisés à compromettre par
décret.

L’article 311 de la loi 08-05 relative à l’arbitrage au Maroc dispose que «les
entreprise publique soumise au droit des sociétés commerciales peuvent conclure des
conventions d’arbitrage dans les formes et conditions déterminées par leur conseil
d’administration ou de surveillance ou par leur organe de gestion ;

Nonobstant des dispositions du 2ème alinéa de l’article 317 ci-dessous, les


établissements publics peuvent conclure des compromis d’arbitrage dans les formes
et conditions déterminées par leur conseil d’administration. Les conventions
comportant des clauses d’arbitrage font l’objet d’une délibération spéciale du
conseil d’administration »

Pour la législation française, l’article 2060 du code civile énonce que : «comme
contraire à l’ordre public, l’arbitrage sur les contestations intéressant les collectivités
publiques et les établissements publics ». Par conséquent, les personnes publiques ne
peuvent pas passer de conventions d’arbitrage. Ce principe d’interdiction subsiste pour
l’arbitrage interne contrairement à l’arbitrage international.

Le Conseil d’Etat Français43 a réaffirmé ce principe en 1986 comme un principe


résultant des principes généraux du droit public français. Cette interdiction touche les

43
C.E., Avis, 6 mars 1986 : Grands avis du Conseil d’Etat, p. 219.

1
établissements publics industriels et commerciaux, ainsi que les établissements publics
administratifs. Cela concerne également l’Etat et les Collectivités publiques. Ce
principe peut faire l’objet de nombreuses dérogations en droit de l’arbitrage interne.

En effet, l’article 2060 du code civil français en son alinéa 2 énonce que
«toutefois, des catégories d’établissements publics à caractère industriel et
commercial peuvent être autorisées par décret à compromettre ». Cette possibilité
d’arbitrage est ouverte à EDF (Electricité de France), à GDF (gaz de France) ou encore
aux charbonnages de France. Cependant, cela ne concerne que le compromis.

B- les matières qui peuvent être soumises à l’arbitrage :

Le recours à l’arbitrage n’est pas admis dans les matières qui intéressent l’ordre
public. La formule n’est claire qu’en apparence, car le domaine de l’ordre public n’est
nettement délimité ni en droit interne ni en droit international.

litiges internes :

Dans l’ordre interne l’arbitrage est expressément exclu par l’article 309 du COC
pour tout ce qui concerne l’état et la capacité des personnes. Dans les autres domaines,
il est difficile de donner une réponse précise car l’arbitrage ne paraît exclu que si
l’ensemble de la matière relève de l’ordre public. Au contraire la présence d’une règle
d’ordre public isolé n’empêche pas l’arbitrage. Simplement le tribunal arbitral doit
appliquer la règle d’ordre public à peine de nullité de sa sentence.

En effet l’article 309 du CPC stipule que « sous réserve des dispositions de
l’article 308 ci-dessus, la convention d’arbitrage ne peut concerner le règlement
des litiges relatifs à l’état et à la capacité des personnes, ou aux droits personnels
qui ne peuvent faire l’objet du commerce ».
On relèvera d’abord que le DOC dispose en son article 57 que « les choses, les
faits et les droits incorporels qui sont dans le commerce peuvent seules former
objet d’obligation ; sont dans le commerce toutes les choses au sujet desquelles la
loi ne défend pas expressément de contracter ». Cette règle générale relative à
l’objet des obligations contractuelles laisse présagé l’existence d’une diversité de
règles impératives, plus ou moins formelle qui concourt à restreindre le domaine de
l’arbitrage. Parmi ces règles, les unes sont édictées par le CPC et les autres découlent
des dispositions particulières attribuant compétence aux seuls juges d’Etat, notamment
lorsqu’il s’agit de protéger les droits des tiers.

Toutefois, ces règles sont perméables à des entorses de plus en plus fréquentes :

1
Les dons et legs d’aliments, de vêtements et de logements : l’interdiction de
compromettre sur cette matière se justifie par la considération des besoins du
bénéficiaire, celui-ci devant être protégé par l’intervention des juridictions étatiques.
On peut même ajouter qu’étant d’ordre public, le bénéficiaire ne peut renoncer aux
obligations alimentaires légales, quoi qu’en pratique une épouse accède à l’exigence
de l’époux qui veut se dérober de ses obligations envers ses enfants en contre partie
d’une répudiation, un droit régalien reconnu au mari. Cette interdiction ne concerne
pas cependant les stipulations d’aliment ou de logement à titre onéreux puisque, ans ce
cas, l’état de nécessité n’est pas évident ;

L’état et la capacité des personnes : ces matières ne peuvent être soumises à


l’arbitrage car il n’est pas permis de compromettre dans des matières dont on n’a pas
la libre disposition. De plus, il s’agit là de l’un des cas communicables au ministère
public ;

L’ordre public : à cet égard, les articles 309 et 310 du CPC se contente de
donner une énumération indicative. De fait, on ne peut compromettre à l’occasion des
litiges concernant des actes ou des biens soumis à un régime de droit public ; des
litiges mettant en cause l’application d’une loi fiscale ; des litiges mettant en cause des
lois relatives à la taxation des prix, au cours forcé, aux changes et aux commerces
extérieures ; des litiges concernant la nullité et la dissolution des sociétés.

Toutefois des dérogations possibles à ces règles, outre les textes particuliers
précédemment évoqués à propos du régime juridique de l’arbitrage interne tant le fisc
que la caisse sociale ne sont pas opposés à un règlement transactionnel, au lieu de
l’arbitrage, avec les redevables et débiteurs des impôts et cotisations d’assurances
sociales. Dans cette optique, le législateur comme le gouvernement n’ont pas manqué
de prévoir des dispositions de prescriptions anticipées en matière fiscale ou de sécurité
sociale afin d’encourager les contribuables et les employeurs à honorer leur obligation
sans qu’il soit recours aux tribunaux de l’Etat.

En ce qui concerne les nullités et les dissolutions des sociétés, l’interdiction y


afférente vise essentiellement la protection des tiers, à l’instar de ce qui a été révélé en
matière de liquidation des biens et de règlement judiciaire à l’occasion de l’examen de
la situation des incapables particuliers44.

Soulignons enfin que les litiges intéressant les propriétés industrielles (brevets,
marques,…), peuvent être soumis à des arbitres, du moment que la matière n’intéresse
pas l’ordre public et porte sur des droits dont les parties ont la libre disposition.
44
Abdellah BOUDAHRAIN, l’arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc, Al Madariss,
Casablanca 1999, p 46, 47.

1
Toutefois l’hésitation la plus grande se rencontre en matière de droit de la
concurrence, si les pratiques anticoncurrentielles sont susceptibles d’exercer une
influence sur un marché, l’arbitrage n’est pas possible, car l’intérêt des tiers, et même
l’intérêt public sont en jeu. En revanche les pratiques qui n’affectent pas le marché
paraissent pouvoir être soumises à des arbitres. Tel sera notamment, le cas des refus
individuels de contracter et des actes de concurrence déloyale.

Par conséquent l’ordre public ne suffit pas à prohiber l’arbitrage de manière


générale malgré les termes restrictifs des articles du CPC. On assiste à une avancé
continue de l’arbitrabilité dans tout le domaine du contentieux lié aux affaires.
L’arbitrage n’est plus un mode exceptionnel de règlement des différends qui opposent
des commerçants. Il tend à devenir un recours tout aussi naturel que l’instance
juridictionnel, dès lors que le litige met en cause des intérêts patrimoniaux ou
professionnels, et cela même si les parties n’ont pas la qualité de commerçants45.

Les litiges internationaux :

Selon la définition tautologique donnée par l’article 327-40 du CPC, l’arbitrage


international est celui qui met en cause des intérêts de commerce international et dont
l’une des parties au moins a son domicile ou son siège à l’étranger : « un arbitrage est
international si :

1- les parties à la convention d’arbitrage ont au moment de la


conclusion de la dite convention, leurs établissements des Etats différents ;
ou
2- Une des lieux ci-après est située hors de l’Etat dans lequel les
parties ont leur établissement :
a- le lieu de l’arbitrage, s’il est stipulé dans la convention
d’arbitrage ou déterminé en vertu de cette convention ;
b- tous lieux où doit être exécutée une partie substantielle
des obligations issue de la relation commerciale ou le lieu avec lequel
l’objet du différend a le lien le plus étroit ; ou
3- les parties sont convenues expressément que l’objet de la
convention d’arbitrage a des liens avec plus d’un pays ».

Le domaine de l’arbitrage international est donc plus vaste pour les raisons
suivantes :

45
Yves Guyon, l’arbitrage. Economica, 1995, p. 20, 21.

1
D’une part, l’ordre public et moins présent en matière commerciale que dans les
autres domaines, puisque notamment les différends commerciaux ne mettent pas en
cause l’état et la capacité des personnes, qui sont par nature d’ordre public.

D’autre part l’ordre public est moins contraignant dans le commerce


international que dans le commerce interne. Par exemple le droit monétaire qui est
d’ordre public en matière interne, n’est que supplétif dans les relations internationales.

Enfin le commerce international couvre des activités qui seraient civiles en droit
interne, notamment les activités agricoles et immobilières.

Section II- les conditions de forme :

La forme est, ici encore, au service du fond. Si l'on s'interroge sur la forme de la
convention d'arbitrage, c'est pour être sûr du consentement des parties à l'arbitrage : la

1
forme et la preuve sont donc intimement mêlées. Le consentement est, en lui-même,
une condition de fond, toujours nécessaire. C'est son expression qui nous intéresse ici.

L'écrit n'est pas requis comme condition de validité, mais il reste nécessaire au
moins pour des questions de preuve et donc d'efficacité. En effet, l'article 1499 du
Nouveau Code de procédure civile dispose que :

L'existence d'une sentence arbitrale est établie par la production de l'original


accompagné de la convention d'arbitrage ou des copies de ces documents réunissant
des conditions requises pour leur authenticité.

Nous allons traiter dans ce cadre, deux points essentiels : l’exigence d’un écrit
et les moyens de preuve.

§1- l’exigence d’un écrit :

L'existence d'une sentence arbitrale est établie par la production de l'original


accompagné de la convention d'arbitrage ou des copies de ces documents réunissant
des conditions requises pour leur authenticité.

L'absence d'écrit risque donc de paralyser la sentence arbitrale si celle-ci n'est


pas spontanément exécutée par l'une des parties.

Il faut distinguer dans ce cadre entre la clause compromissoire et le compromis.

A- La clause compromissoire :

A peine de nullité, la clause compromissoire doit être stipulée par écrit dans la
convention principale ou dans un document auquel celle-ci se réfère et doit, soit
désigner le ou les arbitres, soit prévoir les modalités de leur désignation.

En droit interne et schématiquement, cette clause est valable relativement à


des actes qui sont commerciaux pour toutes les parties en cause. Elle ne l’est pas
dans un contrat unissant un commerçant à un non commerçant (actes mixtes) ou
dans un contrat de travail.
Lorsque le contrat est international, la règle de l’autonomie de la clause
compromissoire conduit à tenir pour valable une telle clause serait-elle insérée dans
un acte mixte ou civil (pour autant que le problème en cause soit arbitrable, ce qui
n’est pas le cas, par exemple, des questions relatives à l’état des personnes).

1
Mais même insérée dans un contrat de travail international, la clause
compromissoire demeure nulle. Ces règles concernent le domaine dans lequel peut être
signée une clause compromissoire, ainsi que sa forme et son contenu.

L’article 309 dispose que « sous réserve des dispositions de l’article 308 ci-
dessus la convention d’arbitrage ne peut concerner le règlement des litiges relatifs
…. à la capacité des personnes ou aux droits personnels qui ne font pas l’objet de
commerce ».

L'article 317 de la loi marocaine sur l’arbitrage prévoit que la clause


compromissoire doit être stipulée par écrit, soit dans la convention principale, soit dans
un document auquel celle-ci se réfère. Il s'agit ici d'éviter toute incertitude sur
l'existence de la clause compromissoire qui permet, depuis la réforme de 06-12-2007,
de recourir directement à l'arbitrage. En cas de non respect de cette formalité la
sanction prononcée est la nullité de la clause compromissoire.

Pour la législation Française l’article 1443 al 1 du CPC énonce que « la clause


compromissoire doit, à peine de nullité, être stipulée par écrit dans la convention
principale ou dans un document auquel celle-ci se réfère ».

En cas de non-respect de cette formalité la sanction prononcée est la nullité de


la clause.

Néanmoins, selon l’article 1445 du code civil français, cette nullité ne


s’étendrait pas au contrat principal, et ne concernerait que la clause elle-même.

Le même article admet le cas où une clause compromissoire figure par écrit
dans un document auquel la convention fait référence. Ce type de clause est appelée «
clauses d’arbitrage par référence ». Il suffit pour que la clause soit opposable, que le
contrat signé renvoie explicitement au document contenant la clause. Par exemple des
conditions générales de ventes, ou encore des contrats-type.

B- le compromis :

Conformément à l'article 313 de la loi marocaine n° 08-05 énonce que le


compromis doit être constaté par un écrit. Cet écrit est exigé à titre de preuve "ad

1
probationem" et non pas "ad validitatem" comme c'est le cas pour la clause
compromissoire.

Le dit article, en son alinéa 2, précise que cet écrit peut être un procès verbal
signé par l’arbitre et les parties. La preuve écrite peut également être établie par acte
notarié, acte sous seing privé ou par échange de lettre.

De même que pour la clause compromissoire, le compromis doit désigner les


arbitres ou prévoir les modalités de leur désignation. Outre ceci, l'article 315 alinéa 1
du code civil marocain prévoit qu'il doit également déterminer l'objet du litige. Cette
exigence s'explique par la nécessité de fixer avec précision la compétence des arbitres.

En cas de non respect des dispositions de l'article 315 prés cité, sera prononcée
la nullité du compromis.

Le compromis doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires. En


effet, comme la clause compromissoire, selon l’article 315 du même code, les parties
doivent préciser l’objet du différend sous peine de nullité (alinéa 1), et doivent
désigner l’arbitre ou prévoir dans la convention les moyens de désignation de celui-ci
(alinéa 2). S’il apparaît qu’un arbitre désigné par les parties n’accepte pas sa mission,
le compromis est alors caduc (alinéa 3).

§2- la preuve en matière de conventions d’arbitrage :

Dans le système de common Law, l'initiative de l'administration de la preuve et


presque entièrement entre les mains des parties. Le juge agit comme en tant qu’arbitre
en vue de fixer les règles de preuve et dire à la fin en faveur de quelle partie l’affaire a
été jugée. Le juge écoute les preuves et peut lui-même poser des questions aux
témoins, mais, dans l'ensemble, il laisse les parties présenter leurs défenses respectives
et se fait une opinion sur la base de ce qu'elles ont avancé.

En matière d’arbitrage, il s’agit en fait de la même chose, le rôle d'un tribunal


arbitral est de peser les preuves voire de décider si une prétention est justifiée. Si un
témoin dépose oralement, le tribunal doit décider si le témoin est crédible, compte tenu
de son comportement et de son objectivité ainsi que de la conformité de son
témoignage avec les autres éléments de preuve présentés au cours de l'instance. Le
tribunal tirera des conséquences de l'administration de la preuve et, dans certains cas,
du défaut d'administration de la preuve qu'il s'attendait à recevoir. Le tribunal peut
aussi tirer des conséquences préjudiciables, pour une partie, du fait qu'elle aurait gardé
le silence au cours de ses relations contractuelles alors que ce silence est incompatible

1
avec la position prise par cette partie dans la procédure d’arbitrage Cette preuve doit
répondre à certaines conditions, devant être à la fois recevable et interprétée.

En effet, pour qu'aucun doute ne subsiste sur la qualité de la preuve, il ne suffit


pas que son authenticité ait été établie, il faut aussi qu'elle soit interprétée, s'il s'agit
par exemple d'un document écrit, les circonstances dans les quelles il a été rédigé et
accueilli, l'identité et la fonction du rédacteur, ce qu'il a voulu dire ou ne pas dire, ce
qu'il a voulu cacher de crainte que ce document ne tombe en des mains étrangères.

Après la recevabilité, il y a un autre aspect de l'administration de la preuve, c'est


la question de la charge de la preuve. Dans presque tous les arbitrages internationaux,
le tribunal arbitral demande à chaque partie de prouver les faits sur les quels elle s’est
fondée. Cet usage a été consacré par le règlement d'arbitrage de la CNUDCI. Les
seules exceptions concernent des questions qui sont si évidentes et si connues que la
preuve ne s'impose pas. Le degré ou le niveau de preuve qui est exigé en pratique
devant un tribunal arbitral international ne saurait être défini avec précision, mais on
peut dire sans risque de se tromper qu'il est proche du niveau de probabilité ( qu'il ne
faut pas confondre avec la notion" d'au-delà de tout doute raisonnable" exigée par
exemple en Angleterre pour prouver le culpabilité dans un procès pénal devant un
jury)

En ce qui concerne le droit marocain, le dahir n°1-07-169 du 19 kaada 1428


(30 novembre 2007) portant promulgation de la loi N° 08-05 abrogeant et remplaçant
le chapitre VIII du titre V du code de procédure civile énonce dans le premier alinéa de
l’article327-11 :« le tribunal arbitral procède à toutes investigations par audition de
témoins, commission d’experts ou par toute autre mesure d’instruction. »

Or, il ajoute également dans son second et troisième alinéa : « si une partie
détient un moyen de preuve, le tribunal arbitral peut lui demander de le produire.

Il peut également procéder à l’audition de toute personne qu’il estime utile


d’entendre. ».

Deuxième partie
1
L’instance arbitrale

Lorsqu'elle est mise en œuvre, la convention d'arbitrage va permettre


d'organiser la résolution du litige qui oppose les parties. Alors que jusqu'à ce stade
primait plutôt la nature conventionnelle de l'arbitrage, c'est à présent sa nature
juridictionnelle qui prédomine. Les similitudes entre le procès arbitral et le procès
judiciaire sont bien réelles.

Toutefois, le premier n'en présente pas moins des spécificités liées, tant à
l'organe qui a en charge ce procès, le tribunal arbitral (Chapitre I), qu'à la procédure à
laquelle il est soumis (Chapitre II). Se pose aussi le problème de savoir quel est le droit
applicable à l’arbitrage.

Chapitre I- Le tribunal arbitral :


1
Les arbitres désignés constituent le tribunal arbitral. Les arbitres ne pourront pas
commencer à accomplir leur mission qu’après avoir exprimé leur acceptation ; le délai
ne court qu’à compter de cette acceptation ; plusieurs jurisprudences ont admis le
principe de l’acceptation tacite par les arbitres des fonctions qui leur sont confiées.
L’instance détermine les modalités de son fonctionnement.

Elle dispose d’un pouvoir très étendu. Elle n’est nullement tenue de consulter
les parties à l’arbitrage pour la gestion de son organisation, de son mode de
fonctionnement. Généralement, le tribunal arbitral applique les règles instituées par les
institutions et les centres d’arbitrage sur la base des règlements établis.

Néanmoins l’instance arbitrale doit absolument respecter le principe de la


contradiction et les droits de la défense. La constitution du tribunal arbitral ne peut
faire l’objet d’une décision du juge des référés, qui demeure incompétent pour en
prononcer l’annulation.

Section I- La constitution du tribunal arbitral :


1
L'esprit qui préside à la constitution du tribunal arbitral est pour une large part
le même en matière internationale qu'en matière interne. Les règlements d'arbitrage des
institutions d'arbitrage prévoient généralement de manière détaillée les différentes
étapes de la constitution du tribunal arbitral et s'efforcent de déjouer les manœuvres
dilatoires de certains plaideurs.

Après avoir examiné les conditions de constitution du tribunal arbitral (§1),


nous verrons comment s'opère la désignation des arbitres (§2).

§1- Les conditions de constitution du tribunal arbitral :

Le tribunal arbitral doit être composé d'un nombre impair de personnes. Celles-
ci doivent remplir un certain nombre de conditions pour exercer la mission d'arbitre
qui doit faire l'objet d'une acceptation.

A- La règle de l'imparité :

L’article 327-2 loi n° 08-05 promulguée par le dahir n° 1-07-169 du 30


novembre 2007 dispose que : « Le tribunal arbitral est constitué d'un seul arbitre
ou de plusieurs arbitres dont les parties sont libres de fixer les modalités de
désignation et le nombre, soit dans la convention d'arbitrage, soit par référence
au règlement d'arbitrage de l'institution choisie.

A défaut d'accord des parties sur le nombre des arbitres, celui-ci est fixé à
trois.

Lorsque les arbitres sont nombreux, leur nombre doit être impair sous
peine de nullité de l'arbitrage ».

L’article 327-3 ajoute que : « S'il s'avère que le ou les arbitres désignés par
la convention d'arbitrage ne remplissent pas les conditions légales pour exercer
cette fonction, ou pour toute autre cause faisant obstacle à la composition du
tribunal arbitral, il est procédé à la désignation des arbitres soit d'accord des
parties, soit conformément à l'article 327-4 ci-après ».

B-L'acceptation de sa mission par l'arbitre :

1
Article 327-6 dispose à cet effet que : « La constitution du tribunal arbitral
n'est parfaite que si le ou les arbitres désignés acceptent la mission qui leur est
confiée.

L'arbitre ayant accepté sa mission doit, par écrit, déclarer, lors de son
acceptation, toutes circonstances de nature à susciter des doutes quant à son
impartialité et son indépendance.

La preuve de l'acceptation de la mission est établie par écrit, par la


signature du compromis ou par l'accomplissement d'un acte qui indique le
commencement de la mission.

Tout arbitre doit poursuivre sa mission jusqu'à son terme ; il ne peut, sous
peine de dommage intérêts, se désister, sans cause légitime après son acceptation
et ce, après avoir adressé un avis mentionnant les motifs de son désistement ».

§2- La désignation des arbitres :

L’arbitre doit accomplir une mission juridique qui n’est pas évidente, du fait
qu’il doit se placer devant les parties comme un juge étatique et doit satisfaire par
conséquent à un ensemble de conditions légales ou de fait (A) pour qu’il soit accepter
comme arbitre légitimes .en revanche l’arbitre désigné soit qu’il travaille pour son
propre compte(ad hoc) soit qu’il est subordonné à un centre d’arbitrage spécialisé (B)
chacun des deux cas à un caractère spécifique surtout au niveau de la rémunération
qui se diffère selon la nature de l’arbitre désigné.

A- les conditions de désignation :

En plus des conditions édictées par la convention de la CNUDCI (a) la pratique


du commerce international exige un certains nombres de conditions complémentaires
et qui concerne tout court, son impartialité et son indépendance (b).

a)les conditions légales46

Deux conditions sont légalement requises pour pouvoir être nommé arbitre :

1/en premier lieu l’arbitre doit être une personne physique.

46
Voir .Yves Guyon, dans son livre « l’arbitrage » ; page35, édition ECONOMICA, 1995

1
Les personnes morales ne sont cependant pas totalement exclut de l’arbitrage
car si ils ne peuvent pas exercer les fonctions arbitrales au sens strict, c’est-à-dire
rendre une sentence, elles disposent de pouvoir d’organiser l’arbitrage.47

Les parties y trouvent l’avantage d’être guidées dans les mécanismes, souvent
complexes, de mise en place de tribunal arbitral et d’adhérer à un règlement qui fixe
généralement de manière souple, le déroulement de l’instance.

le recours à l’arbitrage institutionnel est surtout utile dans les litiges


internationaux par ce que les parties ne peuvent que difficilement bénéficient de l’aide
des juridictions d’Etat en cas de contestation lors de la désignation des arbitres .au
contraire, les organismes d’arbitrage peuvent intervenir de manière efficace.

Toutefois, l’arbitrage institutionnel n’est pas une panacée, il entraîne parfois


une certaine rigidité bureaucratique car l’organisme d’arbitrage, même s’il ne doit pas
s’immiscer dans les affaires des arbitres, contrôle le déroulement de l’instance.

En outre les parties doivent non seulement rémunérer les arbitres, mais
contribuer au frais de fonctionnement du centre, ce qui augmente le frais de l’arbitrage.

Lorsque les parties désigne directement les arbitres, sans le support d’un
organisme d’arbitrage, on parle d’arbitrage ad hoc .si le litige a un caractère
international, il est cependant recommandé de se référer à un règlement d’arbitrage
préexistant, notamment celui adopté par la commission des nation unies pour le droit
commercial international (CNUDCI).

En revanche, dans les litiges internes, les arbitrages purement ad hoc sont
fréquents et donnent bons résultats, notamment lorsque, malgré l’existence d’un
différent les parties s’entendent encore suffisamment pour mettre en place le tribunal
arbitral et fixer les règles de son fonctionnement.

Bien que d’autre question puisse se discuter, il est préférable, de ne pas designer
une personne morale comme arbitre même si le litige a un caractère international.

2/en second lieu l’arbitre doit avoir le plein exercice de ses droits civils.

Par conséquent les incapables ne peuvent pas être nommés arbitres, ce qui est
explicable car une personne dont les facultés mentales sont insuffisantes pour gérer ses
propres affaires ne saurait trancher un litige concernant autrui. Dans les arbitrages
internationaux cette capacité s’apprécie au regard de la loi personnelle de l’arbitre.

En revanches l’arbitre n’a pas besoin de jouir de ses droit civique .un étranger
peut donc être designer comme arbitre même dans un litige purement interne.
47
En pratique, nombreux sont les organismes, souvent des associations, qui interviennent en matière d’arbitrage
en proposant des modèles de clause compromissoire et en établissant des règlements d’arbitrage.

1
De même, et bien que cela soit bien contestable, une condamnation pénale
entraîne la perte des droits civiques ne met pas obstacle à l’exercice des fonctions
d’arbitre.

3/ on doit rapprocher de ses règles générale de capacité certaines cas particuliers


qui pourrait faire obstacle à l’exercice des fonctions arbitrales.

Tout d’abord si l’arbitrage est gratuit l’arbitre ne doit pas contrevenir à une des
règles de son statut professionnel qui lui interdit l’exercice d’une profession rémunéré.

La question se pose tout d’abord pour les fonctionnaires, en général, arbitre


requiert, comme tout activités libérales une autorisation donné au fonctionnaire par
son chef hiérarchique .toutefois cette autorisation n’est pas requise pour les membres
du corps enseignant public lorsque l’arbitrage découle de la nature de leurs fonctions48.

Les magistrats peuvent être nommé arbitre, une autorisation individuelle est
cependant nécessaire.

Enfin les salariés du secteur public ne peuvent être arbitre que si leurs contrats
de travail complété le cas échéant par une convention collective ne leur imposent pas
une exclusivité de bénéfice de leurs employeurs.

En second lieu l’arbitre ne doit pas avoir avec l’une des parties aux litiges un
lien préexistant de nature à compromettre son indépendance.

Cette condition qui est assez imprécise .doit s’interpréter par référence aux
dispositions applicable à la récusation des juges l’arbitre ne doit être ni parent ni allies
des parties il ne doit pas non plus avoir été leur salarie ou leurs conseil.

Cette incompatibilité vise notamment celui qui a donné une consultation à l’une
des parties à l’occasion de l’affaire soumise à l’arbitrage.

Toutefois et l’on retrouve ici la souplesse de l’arbitrage, l’incompatibilité n’est


pas un obstacle absolu à la désignation en qualité d’arbitre.

b) les conditions de fait 49:


Le choix d’un arbitre est important car c’est lui que dépend la qualité de la
sentence qui sera rendue .mais c’est aussi un choix difficile car il n’existe pas dans ce
domaine de critères ayant valeurs générales et absolues, tout est question d’espèce et
d’opportunité.

48
Tels est le cas des enseignants des disciplines juridiques.
49
Voir .Yves Guyon, « l’arbitrage » ; page38, édition ECONOMICA, 1995

1
telle personnalité parfaite apte à arbitrer tel type de litige ne sera qu’un arbitre
médiocre dans un différent d’une autre nature, toutefois quelques idée directrices
peuvent guider le choix des parties.

1/l’arbitre doit tout d’abord être indépendant et impartial.

Cette première condition doit s’entendre beaucoup plus largement que la


condition légale d’impartialité exposée ci-dessus, l’arbitre ne doit avoir aucune raison
de favoriser l’une des parties notamment bien qu’il ait souvent été designer par l’un
des plaideurs il ne doit pas au cours de délibère se comporter comme l’avocat de celui
–ci mais rechercher en son âme et conscience la solution la plus juste.

Cette première condition est difficile à remplir surtout dans les arbitrages
importants les arbitres doivent se décider uniquement en fonction du dossier sans se
laisser influencer par des considérations et influences extérieurs et sans se demander
que leur sentence entraînera pour eux des conséquences favorables ou défavorables.

En effet, l’imbrication des relations d’affaire est tel qu’un arbitre peut très bien
se rendre compte que la sentence déplaira à telle personne ou à tel organisme et le
privera à l’avenir de telle ou telle opportunité voir l’exposera à telle mesure de
rétorsion, l’impartialité oblige néanmoins l’arbitre à prendre le risque de déplaire aux
puissants lorsque ceux-ci ont tort.

2/l’arbitre doit être compétent

Cette compétence est généralement pas une compétence technique car si une
question de ce type doit être tranchée le tribunal peut designer un expert comme le
ferait une juridiction d’état.

La compétence vise avant tous les connaissances juridiques et plus


accessoirement celle des usages professionnels du milieu dans lequel est né le litige,
certes de non juristes peuvent être excellent arbitre dans les affaires qui mettent en jeu
le fait plus que le droit.

Ils risquent cependant de commettre des erreurs susceptibles de entraîner la


nullité de la sentence, l’idéal qui est difficile à atteindre est d’avoir un tribunal
composé d’arbitre dont les compétences sont complémentaires mais qui sont
néanmoins proche les unes des autre pour se comprendre sans difficultés.

Lorsque l’arbitrage a un caractère international la compétence couvre aussi les


aptitudes linguistiques.

3/l’arbitre doit être disponible

1
il s’agit tout d’abord dune disponibilité intellectuelle, c'est-à-dire d’une
ouverture d’esprit, l’arbitre doit être un homme de dialogue capable d’écouter les
plaideurs de chercher à les comprendre et de les concilier.

Mais c’est tout simplement, une disponibilité matérielle , les fonctions arbitrales
sont assez absorbant même dans les litiges simples , l’arbitre doit être près à consacrer
au dossier le temps nécessaire au moment voulu pour que la sentence soit rendu dans
le délai imparti par les parties mais cette disponibilité doit durer tout au long de
l’instance car en cas d’évolution imprévue du litige l’une des parties peut demander au
tribunal arbitral de prendre les mesures d’urgence comme le ferait le juge de référés.

B- Les modalités de désignation :

Les arbitres sont désignés par les parties puisque se sont elles qui leur donnent
mission de trancher le litige qui les oppose.

Toutefois, le mécanisme de désignation ne saurait reposer uniquement sur une


manifestation spontanée de volonté, sinon le défendeur pourrait éviter l’arbitrage en
s’abstenant de designer son arbitre, des procédures subsidiaires de désignation sont par
conséquent nécessaires afin d’éviter ses situations de blocage.

C’est ainsi qu’il mérite d’analyser l’arbitrage ad hoc comme choix plus répandu
en la matière (a) puis on verra l’arbitrage institutionnel(b), cependant il se peut qu’un
tiers ait été concerné directement par l’objet du litige ce qui crée une sorte d’arbitrage
multiparti (c).

a) arbitrage ad hoc
Dans ce cas la désignation des arbitres est organisée par a clause
compromissoire ou le compromis qui peuvent soit régler totalement le mécanisme de
désignation soit renvoyer à des dispositions édictées par d’autre textes il s’agit
notamment pour les litiges à caractères international du règlement de la CNUDCI50.

Si les parties ont décidé de recourir à un arbitre unique, elles peuvent soit
entendre sur le nom de la personne susceptible d’exercer cette fonction soit designer
un tiers qui procédera à leur nom a cette nomination.

Cette mission est souvent donné au juge de référé civile ou commercial, les
parties peuvent également convenir que s’ils ne peuvent designer amiablement
l’arbitre unique le litige sera soumis à un tribunal arbitral, cette solution parai
préférable car le recours à un arbitre unique est une solution aléatoire pour les parties,

50
Voir la loi type de la CNUDCI telle qu’adoptée par la commission des nations unies pour le droit commercial
international le 21 juin 1985 et amendée par la commission des nations unies le 7 juillet 2006.

1
car celui qui statue seule peut se tromper, et délicate pour celui qui l’exerce, l’arbitrage
unique suppose par conséquent une absolue confiance réciproque.

Si les parties préfèrent recourir vers plusieurs arbitres, comme c’est le plus
souvent le cas, le mécanisme de désignation est en général le suivant. Le demandeur
notifie au défendeur sa volonté de recourir vers l’arbitrage et lui fait connaître
l’identité qu’il a designer.

Le défendeur doit alors dans le délai fixé par la convention d’arbitrage designer
son propre arbitre .ce délai est habituellement une quinzaine de jours la convention
d’arbitrage doit prévoir le mécanisme qui permet de designer l’arbitre malgré le défaut
de réponse de défendeur généralement il donne compétence à cette effet au président
de tribunal de commerce statuant comme en matière de référé.

Les deux arbitres ainsi désignés ont alors un délai pour nommer le troisième
arbitre qui présidera le tribunal arbitral, s’il ne parvient pas à un accord la convention
d’arbitrage doit ici encore prévoir le moyen de débloquer la situation notamment par le
recours à une autorité judicaire.

L’impossibilité de se mettre d’accord est en fait un mauvaise début car il est


peut probable que les arbitres parviendront à s’entendre au moment beaucoup plus
délicats de la rédaction de la sentence .le troisième arbitre risque par conséquent de
trancher seule le litige ce qui n’est pas conforme l’esprit d’un arbitrage à trois.

Si on raison de sa rédaction défectueuses la convention d’arbitrage ne permet


pas à elle seule de designer les arbitres, le président de tribunal de commerce a une
compétence subsidiaire pour y procéder.

Cette compétence s’applique même au arbitrage internationaux lorsque ceux –ci


sont soumise à la loi marocaine, cette collaboration entre le juge d’état et le juge
arbitrale montre que cette dernière n’est pas une justice privé qui fonctionne de
manière autonome .elle est aussi un moyen de régler les différents qui est conforme à
l’intérêt général51.

Les arbitres doivent accepter leur mission, cette acceptation doit être expresse,
il résulte alors soit d’une lettre d’acceptation soit de la signature d’un procès verbal
constatant la mission impartie aux arbitres et la constitution de tribunal arbitral .mais
l’acceptation peut aussi être tacite notamment lorsque les arbitres réunissent les parties
et procèdent aux premières opérations d’arbitrage.

Toutefois dans ce cas un doute demeure car cette réunion préalable peut
justement avoir pour objet de designer les arbitre pressentis sur la nature des litiges et
sur la possibilité qu’il y a pour eux d’accepter leur mission cette incertitude est
51
En plus, le mode de désignation doit dans tous les cas respecter l’égalité des parties

1
regrettable car sauf convention contraire des parties la sentence doit être rendue dans
un délai de 6 mois à compter du jour ou le dernier arbitre a accepter sa mission.

La mise en place de tribunal arbitral est généralement assez longue de telle sorte
que les délais stipulés par la clause compromissoire sont rarement respectés .il n’est
pas facile de trouver les deux premier arbitres puis de s’entendre sur le choix de
président et de tenir une réunion d’installation de tribunal .mais à ce stade les parties se
montrent généralement conciliantes sauf si l’adversaire utilise des manœuvres
manifestement dilatoires.

b) arbitrage institutionnel :
Lorsque les parties ont recours à un organisme d’arbitrage, le règlement édicté
par celui-ci prévoit la procédure de désignation des arbitres.

Généralement il est prévu que l’arbitre unique devra être choisi par les parties
sur la liste d’arbitres agrées par l’organisme de l’arbitrage .cette solution est logique
car l’arbitre dit avoir la confiance à la fois des parties et de l’organisme d’arbitrage.

Si les parties préfèrent recourir à plusieurs arbitres , il est généralement prévu


que chacune désigne librement le sien , l’organisme d’arbitrage ayant seulement une
compétence subsidiaire peut procéder à la désignation en cas de carence de défendeur .

En revanche la désignation du troisième arbitre est le plus souvent fait


directement par l’organisme d’arbitrage qui le choisi sur la liste de ses arbitres. ce
procédé n’est qu’un pis aller car le troisième arbitre ainsi imposé au deux autre aura
parfois du mal à assurer sa responsabilité .une solution préférable consiste à laisser au
arbitre des parties une libertés de choix à l’intérieur de la liste arrêté par l’organisme
d’arbitrage. Celui-ci ne procède directement à la désignation que si les deux premiers
arbitres ne sont pas parvenus à un accord.

c) arbitrage multi partie


La constitution de tribunal arbitral entraîne des difficultés particulières lorsque
le litige intéresse des parties qui n’ont pas signer le même compromis ou la même
clause compromissoire le principe de la relativité des conventions impose de recourir à
plusieurs juridictions arbitrales alors que la connexité des questions en litiges militerait
en faveur d’un tribunal unique afin d’évite les contrariétés de décisions.

Une difficulté de même ordre se produit si le litige met en cause un tiers qui
n’ayant pas été partie à la convention d’arbitrage ne peut être assigné que devant une
juridiction étatique.

Enfin dans les groupes de société en se demande si la convention d’arbitrage


conclu par la société mère oblige les filiale et réciproquement.

1
Pour trancher ses difficultés il faut trouver un équilibre entre le caractère
contractuel et l’aspect juridique de l’arbitrage, on évitera ainsi les deux excès inverses
consistant soit à attraire dans l’arbitrage un plaideur qui n’a pas accepté d’y participer
soit à favoriser la manœuvre du prétendu tiers qui doit en réalité participer à
l’arbitrage.

Mais la seule solution satisfaisante consiste à faire conclure la même clause


compromissoire par tous ceux qui participent à l’opération susceptible de donner
naissance au litige52.

C- Difficultés de désignation du tribunal arbitral :

L’article 327-5 de la loi n° 08-05 promulguée dispose que : « Si le tribunal


arbitral n'a pas été désigné à l'avance et que les modalités et la date de sélection
des arbitres n'ont pas été fixées ou lorsque les parties n'en ont pas convenues, les
procédures suivantes sont à suivre :

1. - Lorsque le tribunal arbitral est composé d'un seul arbitre, celui-ci est
désigné par le président de la juridiction compétente sur demande de l'une des
parties ;

2. - Lorsque le tribunal arbitral est composé de trois arbitres, chacune des


parties en désigne un. Les deux arbitres désignés se mettent d'accord pour
désigner le troisième. Lorsque l'une des parties ne désigne pas son arbitre dans
les quinze jours suivant la réception d'une demande à cet effet émanant de l'autre
partie ou lorsque les deux arbitres désignés ne se mettent pas d'accord sur la
désignation du troisième dans les quinze jours suivant la désignation du dernier
d'entre eux, le président de la juridiction compétente procède à cette désignation
sur demande de l'une des parties. La présidence du tribunal arbitral est assurée
par l'arbitre choisi par les deux premiers arbitres ou par celui désigné par le
président de la juridiction ;

3 - Les procédures visées au 2° ci-dessus du présent article sont à suivre


lorsque le tribunal arbitral est composé de plus de trois arbitres ;

4 - Le président de la juridiction compétente doit veiller à ce que l'arbitre


qu'il désigne remplisse les conditions exigées par la présente loi et celles
convenues par les parties. Il prend sa décision après convocation des parties. Sa
décision est non susceptible d'aucun moyen de recours.

52
Il faut néanmoins s’assurer que le mode de désignation des arbitres respecte le principe de la légalité entre les
parties.

1
Il en sera de même chaque fois que la constitution du tribunal arbitral se
heurte à une difficulté du fait de l'une des parties ou dans la mise en œuvre des
modalités de désignation ».

Section II-La compétence du tribunal arbitral :

Les arbitres disposent toujours de la "compétence-compétence" (§1); en


revanche, leurs pouvoirs varient en fonction des règles applicables au litige, l’arbitre
est également compétent en matière des mesures conservatoires et provisoires (§2).

1
§1- le principe de la compétence-compétence :

Lorsque les parties sont convenues d’avoir recours à l’arbitrage elles se


soumettent par là même aux dispositions de la loi marocaine n°-08-05.

Si l’une des parties refuse ou s’abstient de participer à l’arbitrage, celui-ci a lieu


nonobstant ce refus ou cette abstention.

Lorsqu’une des parties soulève un ou plusieurs moyens relatifs à l’existence, à


la validité, ou à la portée de la convention d’arbitrage, la Cour, ayant constaté prima
face l’existence de cette convention, peut décider, sans préjuger la recevabilité ou le
bien fondé de ces moyens, que l’arbitrage aura lieu. Dans ce cas, il appartiendra à
l’arbitre de prendre toutes décisions sur sa propre compétence.

Sauf stipulation contraire, si l’arbitre considère que la convention d’arbitrage


est valable et que le contrat liant les parties est nul ou inexistant, l’arbitre est
compétent pour déterminer les droits respectifs des parties et statuer sur leurs
demandes et conclusions.

Sauf stipulation contraire, la convention d’arbitrage donne compétence à


l’arbitre pour se prononcer sur toute demande provisoire ou conservatoire pendant le
cours de la procédure arbitrale.

Ceux-ci sont positifs en ce sens que la convention d'arbitrage impose aux parties
de recourir à l'arbitrage international et fonde la compétence du tribunal arbitral.

L'obligation de déférer aux arbitres la convention d'arbitrage se décline en trois


principes: celui de l'obligation de déférer aux arbitres les litiges visés par la convention
d'arbitrage, l'exécution en nature de l'obligation de déférer aux arbitres lesdits litiges et
la primauté de l'obligation de déférer ces litiges sur les privilèges et immunités de
juridiction; la compétence du tribunal arbitral pour régler les litiges visés par la
convention d'arbitrage est donc le second principe, où l'on retrouve le fameux principe
de "compétence-compétence", reconnu nationalement comme internationalement par
les Conventions internationales en la matière et les droits et jurisprudences nationaux,
de même que les règlements d'arbitrage récents.

A-L’effet positif : la compétence des arbitres :

La compétence des arbitres dans l'autorisation des mesures conservatoires au


moyen des sentences trouve son fondement juridique dans la plupart des sources du
droit de l'arbitrage commercial international. L'article 17 de la loi type de la CNUDCI
sur l'arbitrage commercial international par exemple dispose que : « (sauf convention
contraire des parties), le tribunal arbitral peut à la demande d'une partie ordonner à

1
toute partie de prendre toute mesure provisoire ou conservatoire qu'il juge nécessaire
en ce qui concerne l'objet du différend »53. Les législations qui autorisent les arbitres à
ordonner ces mesures leur laissent un large pouvoir d'appréciation. Certaines n'en
fixent même pas les conditions laissant aux arbitres cette prérogative. Les conditions
généralement observées dans la pratique arbitrale sont relatives à l'urgence,
l'imminence d'un dommage irréparable, aux chances d'un succès au fond, et à la
constitution de sûretés54.

Certains auteurs ont ouvertement manifesté leur hostilité à cette interprétation


extensive des textes permettant d'établir une justification légale à la compétence des
arbitres de prononcer des mesures conservatoires55. Cette position d'ailleurs minoritaire
en doctrine ne nous parait pas conforme aux pratiques actuelles de l'arbitrage
commercial international. Ainsi qu'a pu l'observer à juste titre un autre auteur, elle
« parait trop étroitement légaliste (et semble ignorer) à la fois l'effet utile des textes et
le large consensus sur (...) la compétence des arbitres pour ordonner des mesures
conservatoires»56.

En outre, le pouvoir d'ordonner les mesures conservatoires semble inhérent au


pouvoir de juger de l'arbitre57. S'il fallait opérer un rattachement du pouvoir d'ordonner
les mesures conservatoires on ne pourrait le rattacher qu'au pouvoir de juger de
l'arbitre. Or, ce pouvoir de juger lui est conféré par la convention d'arbitrage. Du
moment où l'efficacité de la convention d'arbitrage fait l'objet d'une reconnaissance
universelle aujourd'hui58, la compétence des arbitres d'ordonner des mesures
conservatoires ne devrait plus être contestée.

La jurisprudence arbitrale de la CCI a plusieurs fois affirmé avec constance la


compétence des arbitres de prononcer des mesures conservatoires en précisant que
celle-ci résulte directement de la convention d'arbitrage59. A la limite, seule une

53
Dans le même sens cf. entre autres, art. 23 RA-CCI , art. 183 al.1 LDIP du 18 déc 1987 en Suisse ; art.39
Arbitration act de 1996 en droit anglais ; art. 1051 Code néerlandais de procédure civ.
54
Le projet d'art.17 de la loi type de la CNUDCI sur l'arb. com. inter. en cours d'adoption intègre deux de ces
conditions puisqu'il dispose que toute demande de mesure doit être fondé sur l'existence de préjudice irréparable
et la chance de succès au fond. (cf . uncitral.org ).
55
J.F. POUDRET, S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, LGDJ, Schulthess, 2002,
n°606.
56
O.CACHARD, « Les mesures conservatoires dans l'arbitrage maritime », DMF n° 646 Mars 2004, p. 228.
Dans le même sens cf. A. REINER, «Les mesures provisoires et conservatoires et l'arbitrage international
notamment l'arbitrage CCI », JDI 4, 1998 p.866 notes 36 - 37.
57
En ce sens, W. L. CRAIG, W. W. PARK et Jan PAULSSON (International Chamber of commerce arbitration,
Oceana publications, Inc. , 3rd ed. 2000 sect. 26. 05) pensent qu'il s'agit là d'un pouvoir « inhérent » à la fonction
de l'arbitre.
58
Cf. à ce propos l'art. II - 1 et 3 Conv. de New York.
59
La sentence CCI n° 6632 rendue en 1993 en anglais en ces termes illustre parfaitement cette position: « The
arbitrators have to decide on all procedural, factual or legal aspects that appear necessary for the resolution of
the dispute and as such the undoubtedly have the authority to issue the interim orders / awards»; cf. en outre
entre autres sentences CCI n° 7544 (1996), n° 7962 (1995), n° 8113 (1996), n° 7047 (1994), Bull. ASA 1995 p.
361...

1
interdiction expressément édictée dans un ordre juridique étatique devrait pouvoir
dénier à l'arbitre la compétence d'ordonner des mesures conservatoires60.

Au delà des arguments juridiques précédemment exposés, d'autres


considérations d'ordre pratique semblent justifier la compétence de l'arbitre dans
l'autorisation des mesures conservatoires. En effet, dans le contexte actuel de la
pratique du commerce international marquée par la célérité, le besoin de souplesse,
d'efficacité et d'indépendance, les juridictions étatiques et leurs règles de procédure ont
montré leur limite dans la satisfaction des besoins des justiciables du commerce
international.

Néanmoins les prérogatives de l'arbitre semblent souffrir d'un sérieux handicap


résultant du fait qu'il est dépourvu contrairement au juge de pouvoir de coercition. Il y
a donc lieu de s'interroger sur l'efficacité de ces mesures provenant de l'arbitre.

Le principe de compétence-compétence est celui qui permet aux arbitres de


statuer sur leur propre compétence. Il permet concrètement au tribunal arbitral de
poursuivre sa mission même si une des parties conteste devant lui l’existence ou la
validité de la convention d’arbitrage61. Ce principe permet aux arbitres de vérifier eux-
mêmes l’allégation : ou bien ils constatent que la convention d’arbitrage est valable, ce
qui leur permet de se déclarer compétents et de se donner la solution du litige au
fond62, ou alors, les arbitres constateront la véracité de l’allégation ; c'est-à-dire, qu’ils
constateront la nullité de la convention d’arbitrage et se déclareront incompétents.

Affirmer que les arbitres ont la compétence-compétence n’implique pas une


exclusivité des arbitres dans l’appréciation de la compétence. Elle implique une
priorité des arbitres dans l’appréciation de leur propre compétence. Priorité ; c'est-à-
dire qu’ils vérifieront en premier lieu leur compétence sous réserve des contrôles
ultérieurs par les juridictions étatiques de la compétence lors des recours éventuels en
annulation ou lors de l’exequatur63.

Le principe de compétence-compétence implique ainsi que les arbitres aient le


premier mot concernant leur compétence. Mais, il suppose aussi que les juges du
contrôle en aient le dernier.

60
En ce sens cf. dans la législation italienne art. 669 quinquies et article 818.
61
L. Gouiffès, P. Girard, P. Taivalkoski, G. Mecarelli, « recherche sur l’arbitrage en droit interne et comparé,
L.G.D.J., 1997, p. 155.
62
Navire Pella, Op.cit, p.258. « Revue droit maritime français, mars 2004, Obs. Philippe DELEBECQUE ».
63
Sentence rendue dans l’affaire n° 2476 en 1976. Journal de droit international, n°4, 1977, p. 936.

1
Le principe de Compétence-Compétence est une notion à deux facettes. Il est en
effet d'usage de dire que ce principe comporte deux aspects: l'un positif, largement
reconnu (a), l’autre négatif, plus controversé (b).

a) Aspect positif de la Compétence-Compétence :

L’aspect positif de la Compétence-Compétence, dans son expression la plus


achevée, signifie bien que l'arbitre a le pouvoir de se prononcer lui même sur sa propre
compétence, mais sa décision pourra être remise en cause de manière subséquente par
des juges étatiques. L'arbitre n'a donc pas le dernier mot.

D'ailleurs il est sans doute utile de remarquer que la solution retenue pour l'effet
positif de la Compétence-Compétence n'a rien d'original. En effet, il appartient bien à
tout juge de statuer sur sa compétence. Or, « l'arbitre exerce une fonction
juridictionnelle et l'arbitre international est même le juge ordinaire du commerce
international »64. Il semble donc normal que l'arbitre se voit reconnaître ce pouvoir, qui
constitue une simple règle de procédure. Dès lors les critiques n'ont plus lieu d'être: il
n'y a pas plus de pétition de principe concernant la compétence de l'arbitre, que pour
ce qui est de la compétence d'un juge. Il n'y a sans doute pas de raison de douter du
jugement de l'arbitre. Ce serait « faire preuve d'une méfiance injustifiée, que de
l'obliger à surseoir à statuer à la moindre contestation, peut être purement dilatoire, de
sa compétence)

Ce qu'il faut retenir pour l'essentiel de l'effet positif de la Compétence-


Compétence, c'est qu'il induit deux conséquences pour les arbitres. D'une part, comme
il a déjà été dit, l'arbitre peut juger de sa propre compétence. Et, d'autre part, il n'a pas
l'obligation d'interrompre la procédure arbitrale pour se référer à la position des juges
étatiques sur la question.

Ainsi entendu, le principe de Compétence-Compétence est quasiment


universellement reconnu. Certes il existe quelques réserves et réticences dans les pays
anglo-saxons65, la Chine semble ne toujours pas avoir admis le principet, mais
globalement l'aspect positif est favorablement accueilli par les Etats. Tout aussi
important, l'aspect négatif de la Compétence-Compétence est loin d'être aussi
unanimement reconnu.

b) Aspect négatif de la Compétence-Compétence :


64
P. Mayer. sous l'arrêt Dalico, Casso l.:rc civ.• 20 décembre 1993, Rev. crit. dt. int. priv., 1994, P 663.
65
Pour l'Angleterre: P. Gross, « Competence of Competence : An English View n, Arb. Int'I, VoI.S, No. 2, 1992, P
205. Pour les Etats-Unis: W. W. Park, « The Arbitrability Dicta in First Op/ions v. Kaplan: What Sort ofKompetenz-
Kompetenz Has Crossed the Atlantic? », Arb InCL Vol. 12, No. 2, 1996, P 137.

1
Comme il vient d'être expliqué, l'effet positif de la Compétence-Compétence
consiste à s'interroger du point de vue de l'arbitre et de son pouvoir concernant sa
propre compétence. La question est de savoir si, réciproquement, les juges étatiques
ont le devoir de se déclarer incompétents jusqu'à ce que la décision arbitrale soit
rendue. Il est important de comprendre qu'il ne s'agit ici que d'un problème de priorité:
l'arbitre prévaudra chronologiquement, et non hiérarchiquement, puisque les juges
pourront par la suite revoir la décision66.

La notion de priorité est en réalité peu reconnue dans le monde. Ainsi,


généralement, les juges étatiques conservent le droit d'intervenir pour se prononcer sur
la compétence de l'arbitre, non seulement avant le déclenchement de la procédure
arbitrale, mais aussi pendant le déroulement de celle-ci 67. L'action portée devant les
juges prend alors la forme d'une exception d'incompétence, utilisée comme défense.
Mais certains pays acceptent même qu'une action directe soit introduite pour contester
la compétence des arbitres68.

En réalité, l'effet négatif de la Compétence-Compétence est surtout perçu


comme une particularité française. Cette position atypique de la France a été très
clairement rappelée dans un récent arrêt, l'arrêt Zanzi69

D'après cette décision de la Cour de cassation, il convient de distinguer


procédure et fond.

D'un point de vue procédural, d'abord, il est affirmé que « la juridiction


étatique est incompétente pour statuer à titre principal sur la validité de la clause
d'arbitrage ». Bien entend la décision arbitrale n'est pas irréversible: elle pourra être
revue par les juges étatiques.

Pour ce qui est du fond ensuite, les juges doivent se déclarer incompétents si le
tribunal arbitral a déjà été saisi, sachant qu'à la question de savoir à quel moment
considérer qu'un tribunal arbitral est effectivement saisi, la doctrine semble admettre
que tel est le cas lorsque les arbitres ont accepté leur mission 70. Mais la règle de
priorité reconnue en France est encore plus affirmée puisque, même si les arbitres n'ont
pas encore été saisis, les juges doivent là encore se déclarer incompétents, sauf si la
convention d'arbitrage est « manifestement nulle ». D'après M. Fouchard, cette
dernière notion doit être strictement interprétée: il doit s'agir d'une nullité « évidente,
incontestable, qu'aucune argumentation sérieuse n'est en mesure de mettre en doute ».
66
A. Dimolitsa, note précitée 144.
67
Conventions: art 8 Loi-Type CNUDCI, art Il (3) de la Convention de New York. Pays: loi belge (art. 1679, al
1), loi néerlandaise (art 1022, al 1), loi suisse (art 7 LDrP), loi anglaise (art 9.4 Arhitratioll Act 1996).
68
C'est le cas de la Grèce notamment, mais aussi de la Suisse dans certaines décisions.
69
Cass. 1ier civ., 5 janvier 1999, Zanzi, Rev. arb. 1999, P 260, note Ph. Fouchard.
70
Ph. Fouchard, note sous l'arrêt ZmlZi, note précitée

1
B- l’incompétence des juges :

La convention d’arbitrage produit un effet négatif, lorsqu’elle exclut d’emblée


la compétence de n’importe quelle juridiction étatique. En effet, selon l’article 327 du
code civil marocain « lorsqu’ un litige soumis à un tribunal arbitral en vertu d’une
convention d’arbitrage, et porté devant une juridiction, celle-ci doit, lorsque le
défendeur en fait la requête avant de statuer sur le fond, prononcer
l’irrecevabilité jusqu’ a épuisement de la procédure d’arbitrage ou annulation de
la convention d’arbitrage71.

Si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi, la juridiction, à la demande du


défendeur, doit également déclarer l’irrecevabilité à moins que la convention
d’arbitrage ne soit manifestement nulle.

Le défendeur doit en faire la requête avant que la juridiction ne statue sur


le fond. Celle-ci ne peut dans les deux cas déclaré d’office l’irrecevabilité…. ».

De son coté la législation Française dans son article1458 du code de procédure


civil stipule que « dés lors qu’existe une convention d’arbitrage, les juridictions
étatiques doivent se déclarer incompétentes si elles sont saisies. Ceci est valable non
seulement dans le cas d’une saisine postérieure à la constitution du tribunal
arbitral.

Que dans celle où elle est antérieure.

Dans la dernière hypothèse, les juridictions étatiques recouvrent leur


compétence en « cas de nullité manifeste de la convention arbitrale ».

Cela peut être le cas, en cas de défaut de désignation des arbitres par exemple,
dans la clause compromissoire ou le compromis.
En effet, en cas de nullité de la clause compromissoire « non écrite », cela ne
remet pas en cause la viabilité du contrat principal. Celui-ci, en cas de contestation
sera soumis au juge de droit commun. C’est l’un des aspects de l’autonomie de la
clause compromissoire.

Pendant longtemps, le sort de la clause compromissoire était lié à celui du


contrat principal.

Par trois fois, la Cour de cassation Française, reprend presque mot pour mot la
célèbre formule de l’arrêt Gosset de 196372 rendu en matière d’arbitrage international.
« Quel que soit le sort du contrat, la clause compromissoire suit son propre destin ».

71
D. René, « L’arbitrage dans le commerce international », Economica, 1982, p. 265.
72
Civ.1er, 7 mai 1963, Bull. civ. I, n° 246.

1
Principe confirmé par les arrêts Barbot du 4 avril 2002 et Toulousy du 9 avril 2002, et
réaffirmé par l’arrêt Parisot du 20 mars 2003.

La clause compromissoire est donc considérée comme un contrat dans le


contrat. Quelle que soit la nature de l’affection du contrat principal, la clause
compromissoire survit au moins le temps de vérifier qu’elle n’est pas contaminée par
cette affection.

En droit interne de l'arbitrage, la clause compromissoire présente, par rapport à


la convention principale dans laquelle elle s'insère, une autonomie juridique qui exclut,
sauf convention contraire, qu'elle puisse être affectée par une éventuelle inefficacité de
cette convention.

En droit interne de l'arbitrage, la clause compromissoire présente, par rapport à


la convention principale dans laquelle elle s'insère, une autonomie juridique qui exclut,
sauf stipulation contraire, qu'elle puisse être affectée par une éventuelle inefficacité de
cette convention73.

La clause compromissoire présente, par rapport à la convention principale dans


laquelle elle s'insère, une autonomie juridique qui exclut, sauf stipulation contraire,
qu'elle puisse être affectée par l'inefficacité de cet acte.

De son coté, la nullité du compromis peut être également absolu. Il peut être
considéré comme caduc en cas de non acceptation par un arbitre de la mission qui lui a
été confiée.

Le compromis aura donc emporté la plupart de ses effets.

§2- la compétence des arbitres à l’égard des mesures


provisoires et conservatoires :

D'une manière générale les mesures conservatoires et provisoires peuvent être


prises par un tribunal arbitral. Au titre du droit comparé, presque toutes les
réglementations modernes sur le droit de l'arbitrage international autorisent le tribunal
arbitral à prendre, s'il le juge nécessaire, ces mesures en ce qui concerne l'objet du
litige. Il en est ainsi de l'art. 26 du règlement CNUDCI, de l'art. 17 de la loi-type
CNUDCI, pour ne citer que ces textes.

73
H. Gaudemet-Tallon, revue de l’arbitrage, n° 1, 1994, p.118 et s. ; V. Heuzé, revue critique droit international
privé, n°1, 1998, p. 94-95 ; J-F. Poudret, S. Besson, Op.cit, p. 149.

1
En droit positif français, le codificateur ne prévoit aucune disposition sur la
prise de telles mesures, seules les références jurisprudentielles et doctrinales et qui,
d'ailleurs, ont fait l'objet de controverses, légitiment la prise par le tribunal arbitral de
telles mesures.

Le législateur marocain, en s’inspirant largement de son homologue français


ainsi que de l’ensemble de réglementations internationales en matière d’arbitrage, a
donner à l’arbitre la possibilité d’octroyer des mesures conservatoires et provisoires
dans le cadre d’une sentence arbitrale.

Ainsi, l’article 327-15 de la loi 08-05 modifiant le code de procédure civile,


dispose ce qui suit : « sauf convention contraire des parties, le tribunal arbitral peut
prendre, sur demande de l’une des parties, toute mesure provisoire ou conservatoire
qu’il juge nécessaire dans la limite de sa mission.

Si la partie contre laquelle la sentence a été rendue ne l’exécute pas, la partie


en faveur de laquelle elle a été rendue peut saisir le président de la juridiction
compétente en vue d’émettre une ordonnance d’exécution ».

On s’aperçoit que le législateur marocain a donné un large pouvoir


d’appréciation à l’arbitre en matière d’octroi de mesures conservatoires et provisoires
et n’a pas pris la peine de préciser leurs types et leur porté en utilisant des termes
imprécis.

Toutefois, cet article limite cette possibilité d’octroyer ce type de mesures à


deux exceptions, à savoir notamment : la volonté contraire des parties de conférer ce
pouvoir au à l’arbitre et les limites de la mission de l’arbitre.

Le principe de compétence concurrente des juridictions étatiques et des arbitres


pour prendre des mesures provisoires ou conservatoires, est largement admis en
droit contemporain de l’arbitrage. Il est vrai, cependant, que les parties pourraient
s’interdire conventionnellement de recourir aux juridictions étatiques, pour prendre de
telles mesures pendant toute la durée de la procédure arbitrale, une telle convention
devant alors être clairement rédigée pour éviter toute équivoque à ce sujet.

En règle générale, et à défaut de convention contraire des parties, les arbitres


sont compétents pour octroyer les mesures dont il s’agit. Telle est la position
prédominante en droit international, laquelle se conçoit aisément, dès lors que « le
besoin de recourir aux mesures conservatoires et provisoires peut aussi survenir dans
le contexte d’une procédure arbitrale, en raison d’une attitude procédurière des
parties et de la durée de la procédure qui, de ce fait aussi, n’est pas toujours
aussi rapide qu’on le croit ».

1
La compétence des arbitres dans l'autorisation des mesures conservatoires au
moyen des sentences trouve son fondement juridique dans la plupart des sources du
droit de l'arbitrage commercial international. L'article 17 de la loi type de la CNUDCI
sur l'arbitrage commercial international par exemple dispose que : « (sauf convention
contraire des parties), le tribunal arbitral peut à la demande d'une partie ordonner à
toute partie de prendre toute mesure provisoire ou conservatoire qu'il juge nécessaire
en ce qui concerne l'objet du différend »74. Les législations qui autorisent les arbitres à
ordonner ces mesures leur laissent un large pouvoir d'appréciation. Certaines n'en
fixent même pas les conditions laissant aux arbitres cette prérogative. Les conditions
généralement observées dans la pratique arbitrale sont relatives à l'urgence,
l'imminence d'un dommage irréparable, aux chances d'un succès au fond, et à la
constitution de sûretés75.

Certains auteurs ont ouvertement manifesté leur hostilité à cette interprétation


extensive des textes permettant d'établir une justification légale à la compétence des
arbitres de prononcer des mesures conservatoires76. Cette position d'ailleurs minoritaire
en doctrine ne nous parait pas conforme aux pratiques actuelles de l'arbitrage
commercial international. Ainsi qu'a pu l'observer à juste titre un autre auteur, elle
« parait trop étroitement légaliste (et semble ignorer) à la fois l'effet utile des textes et
le large consensus sur (...) la compétence des arbitres pour ordonner des mesures
conservatoires»77.

En outre, le pouvoir d'ordonner les mesures conservatoires semble inhérent au


pouvoir de juger de l'arbitre78. S'il fallait opérer un rattachement du pouvoir d'ordonner
les mesures conservatoires on ne pourrait le rattacher qu'au pouvoir de juger de
l'arbitre. Or, ce pouvoir de juger lui est conféré par la convention d'arbitrage. Du
moment où l'efficacité de la convention d'arbitrage fait l'objet d'une reconnaissance
universelle aujourd'hui79, la compétence des arbitres d'ordonner des mesures
conservatoires ne devrait plus être contestée.

Les mesures conservatoires de l'arbitre dépourvu de tout pouvoir de coercition


par la force publique peuvent-elles se révéler efficaces dans la procédure d'arbitrage
74
Dans le même sens cf. entre autres, art. 23 RA-CCI , art. 183 al.1 LDIP du 18 déc 1987 en Suisse ; art.39
Arbitration act de 1996 en droit anglais ; art. 1051 Code néerlandais de procédure civ.
75
Le projet d'art.17 de la loi type de la CNUDCI sur l'arb. com. inter. en cours d'adoption intègre deux de ces
conditions puisqu'il dispose que toute demande de mesure doit être fondé sur l'existence de préjudice irréparable
et la chance de succès au fond. (cf . uncitral.org ).
76
J.F. POUDRET, S. BESSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, LGDJ, Schulthess, 2002,
n°606.
77
O.CACHARD, « Les mesures conservatoires dans l'arbitrage maritime », DMF n° 646 Mars 2004, p. 228.
Dans le même sens cf. A. REINER, «Les mesures provisoires et conservatoires et l'arbitrage international
notamment l'arbitrage CCI », JDI 4, 1998 p.866 notes 36 - 37.
78
En ce sens, W. L. CRAIG, W. W. PARK et Jan PAULSSON (International Chamber of commerce arbitration,
Oceana publications, Inc. , 3rd ed. 2000 sect. 26. 05) pensent qu'il s'agit là d'un pouvoir « inhérent » à la fonction
de l'arbitre.
79
Cf. à ce propos l'art. II - 1 et 3 Conv. de New York.

1
interne et international ? Bien que l'absence d'imperium de l'arbitre prive ses mesures
d'effet contraignant et l'oblige à requérir l'assistance du juge en cas de besoin (A), il
semble que la justice arbitrale particulièrement en matière commerciale internationale
se satisfasse parfois de procédés d'efficacité qui relèvent plutôt de la persuasion ou de
la dissuasion que de la contrainte par la force publique (B).

A- Efficacité spontanée des mesures conservatoires de


l'arbitre :

Les mesures conservatoires de l'arbitre semblent recéler en pratique une force


de persuasion capable de leur assurer une réelle efficacité en dépit de leur caractère
intrinsèquement non exécutoire80.

Certains auteurs expliquent l'obéissance volontaire des parties aux mesures


conservatoires des arbitres par leur crainte d'indisposer le tribunal arbitral et de se voir
condamner dans la sentence finale réglant l'intégralité du litige 81. Selon M. Andreas
REINER, l'exécution spontanée des mesures conservatoires ordonnées par les arbitres
serait plutôt due « à la qualité et au bien fondé des décisions prises et à l'autorité des
arbitres qui en résulte »82.

Il est certes probable que la crainte d'une condamnation future puisse justifier
l'obéissance spontanée des parties aux mesures conservatoires, si l'on se réfère aux
dispositions de l'Arbitration act anglais de 1996. Ce texte autorise en effet en son
article 41 (7) b l'arbitre à « tirer de la défaillance de la partie concernée toutes les
conséquences à son encontre qui justifient les circonstances ».

Mais l'exécution spontanée des mesures conservatoires ordonnées peut à notre


sens également s'expliquer par le souci des parties de ne pas faire entrave à la bonne
administration de la justice arbitrale à laquelle elles se sont conjointement soumises
par la convention d'arbitrage. Par ailleurs, lorsque les mesures conservatoires sont
prévues dans la convention d'arbitrage, celle-ci donne son autorité à ces mesures.

La mise en œuvre83 spontanée des mesures conservatoires présente de réels


avantages à la procédure d'arbitrage commercial international. Utilisée comme un

80
Dans l'affaire CCI n° 7544 (1996) par exemple, la partie condamnée à un payement provisionnel, au motif que
le requérant avait un intérêt légitime à demander ce payement provisionnel sous réserve de la décision finale,
s'est exécutée spontanément. Le même cas d'exécution volontaire a été observé dans la sentence n° 9278 rendue
en 1997 où les arbitres avaient ordonné le dépôt d'une certaine somme sur un compte bancaire donnant des
intérêts (rapporté par A. REINER op. cit. p.889).
81
V. en ce sens O. CACHARD, op. cit. p.228 ; LALIVE/ POUDRET/ REYMOND, Le Droit de l'arbitrage
interne et international en Suisse, 1989 : LDIP, art. 183 n°7 ; P. BERNARDINI, « Les pouvoirs de l'arbitre » in
Mesure conservatoire et provisoire en matière d'arbitrage international, Publication CCI n°519, 1993 p. 44 et
ANCEL, idem p.115.
82
A. REINER, op.cit. p. 861.
83
Jason FRY, op.cit. p. 375.

1
moyen de contrainte en faveur du requérant elle peut servir d'indicateur probable sur le
dénouement du litige et favoriser la négociation et les transactions. Elle permet de faire
l'économie d'une procédure relativement longue au fond, du temps et de l'argent. A
l'inverse elle peut facilement servir à détourner la procédure de son objectif d'efficacité
et de célérité faute de vigilance de l'arbitre. Un praticien a pu à juste titre observer à ce
propos que ces mesures peuvent « devenir un moyen dilatoire mis à la disposition
d'une partie très peu soucieuse de rapidité ».

Néanmoins il faut reconnaître qu'à côté des mesures emportant une exécution
spontanée du fait de l'obéissance volontaire des parties et des mesures ne nécessitant
aucun moyen de coercition84, il existe des mesures conservatoires dont la mise en
œuvre nécessite le recours à la force publique. Et puis, il peut arriver qu'on soit obligé
de recourir à la force lorsque les parties résistent à la mise en œuvre des mesures
prononcées. Dans les deux cas il faut recourir au juge étatique.

B-L'efficacité subordonnée à l'intervention du juge :

La question de l'intervention du juge étatique pour assurer l'efficacité des


mesures conservatoires de l'arbitre se pose à deux niveaux précis.

Le premier cas de figure concerne la solution appropriée à appliquer à la


difficulté résultant des cas de refus d'exécution volontaire des mesures prononcées par
les arbitres. A ce sujet, la question de l'opportunité d'une procédure d'exequatur
spécifique aux mesures conservatoires des arbitres se pose avec pertinence,
particulièrement dans l'arbitrage commercial international.

Intervenant sur cette question, certains auteurs marquent leur opposition à


l'exécution des sentences ordonnant des mesures conservatoires. Selon eux, ces
sentences seraient dépourvues de caractère définitif et n'auraient donc pas l'autorité de
chose jugée pouvant justifier leur exécution. Ils préconisent plutôt une mesure
d'assistance du juge d'appui qui ne nécessite pas l'application de la procédure
d'exequatur de la Convention de New York85.

Cette argumentation ne nous parait pas convaincante car elle répond à une
conception excessivement restrictive de la sentence qui la dénature. Soutenir qu'une
sentence prononçant une mesure conservatoire n'est pas définitive revient à assimiler
les caractères « définitif » et « final » de la sentence. Or l'inexactitude de cette
confusion apparaît manifestement dans la définition des deux caractères. Une sentence
définitive est celle qui règle complètement les questions concernant une partie du litige
ou le litige dans son ensemble.

84
Par exemple l'autorisation d'un appel en garantie ou l'autorisation d'un maître d'ouvrage à quitter un chantier.
85
J. - F. POUDRET, S. BESSON op. cit. n°1357.

1
La sentence finale est celle qui règle l'intégralité du litige à l'opposé d'une
sentence partielle qui n'en règle qu'une partie. Au regard de ces définitions, il apparaît
clairement qu'une sentence partielle peut être définitive du moment où elle règle
complètement les questions concernant la partie du litige sur laquelle elle porte. Tel est
justement le cas des sentences arbitrales prononçant les mesures conservatoires qui,
bien qu'étant partielles et provisoires, ont tout de même un caractère définitif dans la
durée de leur existence. Sur la base de l'autorité de chose jugée qui leur est conférée,
elles peuvent valablement faire l'objet d'une exécution forcée.

En ce qui concerne la solution alternative d'une mesure d'assistance du juge


d'appui proposée par les auteurs opposés à l'exequatur, il faut reconnaître qu'elle peut
être efficace à partir du moment où la législation des Etats où cette assistance est
requise l'autorise. Le droit suisse en l'occurrence, présente une situation favorable à
l'application de cette solution. La Loi sur le droit international privé (LDIP) de ce pays,
par exemple en son article 183 al.2 autorise le tribunal arbitral à requérir le concours
du juge étatique si « la partie concernée (par les mesures conservatoires) ne s'y soumet
pas volontairement ».

Mais la solution de l'assistance du juge d'appui, en raison du fait qu'elle n'est


pas admise nécessairement dans tous Etats, risque de connaître une application très
limitée, ce qui en réduirait considérablement la portée. L'exequatur au contraire eu
égard à la portée universelle de la Convention de New York serait d'une plus grande
efficacité dans la mesure où la mise en oeuvre des mesures conservatoires dans le cas
particulier de l'arbitrage commercial international peut être sollicitée dans des pays
différents en dehors de celui du lieu de l'arbitrage.

Le second cas de figure nécessitant l'intervention du juge pour assurer


l'efficacité des mesures conservatoires concerne les mesures dont la mise en œuvre
implique nécessairement le recours à la force publique et qui de ce fait échappent à la
compétence des arbitres.

Pour la mise en œuvre de cette catégorie de mesures conservatoires, les parties


sont naturellement obligées de s'adresser aux juges. C'est le cas par exemple des
saisies conservatoires dont la mise en œuvre peut être obtenue du juge, sur
présentation de la sentence lui en conférant le droit, par la partie bénéficiaire 86. La
collaboration entre l'arbitre et le juge qui est ainsi expressément instituée par

86
L'art.1696 - 1° du code judiciaire belge exprime implicitement ce besoin de recourir au juge en disposant que :
« ...le tribunal arbitral peut ordonner des mesures provisoires et conservatoires à la demande d'une partie à
l'exception de la saisie conservatoire ».

1
l'ensemble des textes régissant l'arbitrage commercial international 87 s'inscrit dans le
souci d'assurer l'efficacité de l'institution arbitrale88.

Sur la question de savoir s'il était possible à une partie engagée dans une
procédure d'arbitrage de s'adresser à l'autorité judiciaire en référé pour procéder à une
saisie conservatoire pour rendre indisponible les biens de l'autre partie avant que la
sentence finale ne soit rendue, la Cour de cassation française devait dans un arrêt
rendu le 20 mars 1989 répondre par l'affirmative, dans la mesure où ces mesures
n'obligeaient pas le juge à examiner le fond du litige89.

Mais l'efficacité de telles mesures provenant du juge étatique dépend de la


procédure arbitrale à laquelle elle est étroitement liée.

La loi 08-05 n’a pas beaucoup consacré à la « reconnaissance et exécution des


sentences arbitrales », mais il n'y est pas fait mention de la définition de ces notions.
On distingue la reconnaissance de l'exécution. La consécration de l' « exécution » au
lieu de « l'exequatur » révèle sans doute une mauvaise rédaction 90 parce qu'on ne voit
pas comment une sentence va être exécutée sans avoir été, au préalable, exéquaturée.

L'exequatur est défini comme un ordre d'exécution donné par une autorité
judiciaire à une sentence rendue par une justice privée. C'est justement le cas de la
sentence arbitrale. Dans cette occurrence, l'exequatur est « un bon à exécuter » et non
point un acte d'exécution.

En effet, l'exécution consiste pour le bénéficiaire d'un titre exécutoire 91, c'est-à-
dire déjà revêtu de la formule exécutoire, de mobiliser un agent d'exécution 92afin de
mettre en œuvre ou matérialiser la décision obtenue.

Sur le plan temporel, la différence entre les deux notions est encore plus nette.
En effet, la formule exécutoire précède l'exécution proprement dite. L'exequatur est la
condition sine qua non93 d'exécution forcée d'une sentence parce qu'étant dépourvu
87
Cf. entre autres en ce sens : article VI Conv. euro. de Genève ; art. 13 dernier al. AUA/ OHADA art. 23 al. 2
RACCI.
88
Cf. entre autres en ce sens : article VI Conv. euro. de Genève ; art. 13 dernier al. AUA/ OHADA art. 23 al. 2
RACCI.
89
B. GOLDMAN, « L'action complémentaire des juges et des arbitres en vue d'assurer l'efficacité de l'arbitrage
commercial international », Travaux du 60ème anniversaire de la CCI, p. 271 et s.
90
La même observation sera faite plus loin quand il s'agira d'étudier les délais pour exercer le recours en
annulation contre une sentence munie d'exequatur.
91
L'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution
donne une liste (article 33) non exhaustive des titres exécutoires dont : les décisions de justice revêtues de la
formule exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minute ; les actes et décisions juridictionnelles étrangers
ainsi que les sentences arbitrales déclarées exécutoires par une décision juridictionnelle, non susceptible de
recours suspensif d'exécution, de l'État dans lequel ce titre est invoqué.
92
L'huissier de justice notamment, accompagné au besoin de la force publique.
93
La condition sine qua non (prononcer comme ciné quoi nonne /si.ne.kwa.n ɔ n/, mot-à-mot sans quoi non) ou
condition sine qua non (la condition nécessaire) était à l'origine un terme juridique latin signifiant « sans laquelle
cela ne pourrait pas être ». Dans plusieurs langues, telles l'italien, le français et l'anglais, l'expression est utilisée

1
d'imperium, l'arbitre ne peut l'apposer sur la sentence qu'il rend. On doit faire recours
au juge étatique, qui à l'issue d'un contrôle sommaire, appose la formule exécutoire,
préalable à l'exécution.

Cette question sur la différence entre exequatur et exécution rejoint déjà celle de
la reconnaissance et de l'exequatur au point où on se demande quelle est la portée
réelle de cette distinction, et partant l'intérêt de leur consécration concurrente.

La loi 08-05 est assez laconique sur les modalités de la reconnaissance et de


l'exequatur de la sentence arbitrale puisqu'il dispose simplement que la sentence
arbitrale n'est susceptible d'exécution forcée qu'en vertu d'une décision d'exequatur
rendue par le juge. Cela ne détermine pas la juridiction compétente pour octroyer une
telle mesure, il ne réglemente guère la procédure y relative. Ces questions sont
réservées à la partie qui régit le droit de l’arbitrage interne.

Bien que la loi consacre à la fois la reconnaissance et l'exequatur, elle n'en


fixe pas pour autant des conditions différentes pour les deux opérations. En effet, la
reconnaissance et l'exequatur de la sentence arbitrale supposent que la partie qui
s'en prévaut établisse l'existence de la sentence arbitrale 94, tandis que la deuxième
condition est lorsque la reconnaissance et l'exequatur sont refusés parce que la
sentence est manifestement contraire à une règle d'ordre public. Les deux
conditions ainsi posées sont, l'une matérielle, et l'autre juridique.
S'agissant de la condition matérielle, la loi exige la production de l'original
de la sentence arbitrale, ainsi que la convention d'arbitrage. Qu'adviendra-t-il alors
si cette condition n'est pas remplie ? La sanction devrait être logiquement le refus
de la reconnaissance ou de l'exequatur. La loi permet toutefois, comme palliatif, la
fourniture des copies certifiées de ces documents, ou encore les copies remplissant
les conditions requises pour leur authenticité.
Ces pièces, si elles ne sont pas rédigées en Arabe, doivent être traduites par
des experts dont la liste est établie par les juridictions compétentes. Cette exigence
soulève une difficulté majeure dans l'arbitrage. En effet, il est possible la
conclusion d'une convention d'arbitrage par écrit ou par tout autre moyen
permettant d'en administrer la preuve. Qu'en sera-t-il donc des conventions
d'arbitrage orales ? Nous pensons alors que dans un tel cas, il serait nécessaire
d'user de tous les moyens de preuve prévus par la loi, notamment la preuve par
témoins. Mais pour éviter tout effet de surprise, il est recommandé aux parties de
faire des conventions d'arbitrage écrites.

dans tous les domaines, incluant le droit et l'économie.


94
Lexique, op. cit., p. 394

1
Chapitre II- Le droit applicable en
matière d’arbitrage :
La plupart des législations confèrent une liberté absolue aux parties de
choisir le droit applicable au litige à l’occasion d’une procédure arbitrale
internationale. Au Maroc ce principe a été consacré aux termes de l’article 327-18
du C.P.C qui dispose que :

« le tribunal arbitral tranche le litige conformément aux règles de


doit, convenues entre les parties. « si les parties ne s’entendent
pas sur les règles de droit devant être appliquées au litige, le
tribunal arbitral applique les règles objectives de droit qu’il juge

1
les plus proches du litige. Dans tous les cas, il doit prendre en
considération les clauses du contrat objet du litige, les usages et
coutumes commerciaux et ce qui est habituellement d’usage
entre les parties. «si les parties s’entendent expressément à
conférer au tribunal la qualité d’amiable compositeur, celui-ci
n’est pas tenu, dans ce cas, de se conformer aux règles de droit
et statue selon les règles de justice et d’équité sur l’objet du
litige ».

Le caractère délocalisé de l’arbitrage international est affirmé par le choix


conféré aux parties ou au tribunal arbitral de fixer le droit applicable à l’instance
arbitrale ; L’arbitre saisi d’une procédure arbitrale internationale ne dépend
d’aucun Etat ;

Les juges étatiques ne disposent d’aucun pouvoir de contrôle sur le choix du


droit applicable au fond du litige, ni sur les règles applicables, ni sur la justification
de ces règles ou leur opportunité, ni sur leur modalités d’application ou d’exécution
par l’arbitre international.

Les parties pourront, pour des raisons inhérentes à la nature du litige, choisir
des lois différentes ; Il n’est pas rare de constater dans une convention d’arbitrage
la stipulation d’une clause de gel ou de stabilisation de la loi applicable au litige au
jour du contrat. L’arbitre est absolument tenu de respecter le choix du droit
applicable fixé par les parties. Dans l’hypothèse où la loi choisie est contraire à
l’ordre public international, l’arbitre international pourra s’en écarter. Les clauses
stipulées dans les conventions d’arbitrage doivent être d’une extrême précision ; les
arbitres et les juridictions de contrôle se heurtent très souvent à des expressions
imprécises, telles que « le litige sera tranché selon les principes de la lex mercatoria
» , qui semble constituer pour certains auteurs, un véritable ordre juridique issu de
la pratique du commerce international.

C’est un ensemble de règles, d’usages, de pratiques commerciales, au plan


international, mis en œuvre par les commerçants et les opérateurs économiques ; il
s’agit de méthodes, de concepts adaptés à la pratique du commerce international.
Certains auteurs n’approuvent pas la lex mercatoria en tant qu’ordre juridique dans
la mesure où il ne s’agit que d’un ensemble de règles non codifiées. Soumettre la
procédure d’arbitrage internationale à la lex mercatoria signifierait soustraire cette
procédure à la loi et la cantonner dans un système d’usages commerciaux,
différents, et qui varient d’un pays à un autre.

1
Ce point nécessite d’étudier au préalable le droit applicable à la procédure
(section I) et ensuite les effets de la convention d’arbitrage (section II).

Section I- La loi applicable à la procédure


d’arbitrage :

Dans un arbitrage international, la loi applicable à la procédure peut être la


même que celle applicable au fond du litige, on parlera alors de loi unique. Mais en
vertu de l’autonomie de la convention d’arbitrage, rien n’interdit aux parties de
désigner une autre loi comme applicable à la procédure distincte de celle applicable
au fond. Cette désignation peut être faite par une référence expresse à la loi
proprement dite, ce qui est le cas de figure, certes rare mais simple, qui ne pose
aucun problème juridique particulier. En revanche à défaut de désignation expresse,
toute la difficulté résidera dans la manière de détermination de la loi applicable à la
procédure arbitrale. L’on s’attachera à rechercher la volonté des parties selon les
règles du droit général et parfois même selon celles du droit international privé.

1
Cependant dans un cadre international où la méfiance et la réticence des
parties à recourir aux règles des droits nationaux- surtout celles de l’une des
parties- est de mise, il a été élaboré au fil des temps des conventions internationale.
L’objectif de ces conventions est de fixer des règles conventionnelles de conflit
d’un usage plus aisé que le recours à la règle générale. Il est toutefois à signaler que
ces règles ne seront dans la plupart des cas pas directement applicables mais
permettront la détermination de la loi de la procédure qui pourra s’appliquer.
Par ailleurs, de part les références qui leur sont fréquemment fait, certains
règlements émanant de certaines institutions internationales ont fini par avoir une
valeur semblable aux conventions internationales.
C’est notamment le cas des règlements d’arbitrage de la Chambre
Commerciale Internationale (CCI) ou de ceux de la CNUDCI.

§1- Le choix de parties :

La volonté des parties ; telle est la règle directrice dans le droit commun ;
elle implique une marge de liberté aux parties d’intervenir pour mener à bien les
dispositions de leur contrat. Ce choix va donc d’une expression de volonté
commune par les parties à la compétence donnée au président du tribunal pour la
désignation du tiers arbitre le cas échéant ; à la fixation du lieu ou s’est déroulé
l’arbitrage ; ce lieu pouvant être fixé à l’étranger ; même si toutes les parties ont la
même nationalité95.

Pour ce qui est de l’arbitrage international ; le choix des parties est


totalement libre quelque soient les circonstances particulières de la cause qui aurait
pu être conduite à un choix différent. Si la plus part des arrêts passent en ignorant
l’élément retenu comme indiciaire à l’indication de la loi applicable à la
détermination de la procédure et désignant implicitement la loi du pays sur le
territoire duquel l’arbitrage doit avoir lieu.

Ce principe peut se manifester selon ce qui suit :les parties peuvent régler la se
procédure d’arbitrage directement, c'est-à-dire, qu’ils peuvent moduler les règles de
procédures comme ils l’entendent avec toute liberté.

Elles peuvent recourir à la lex mercatoria ou mettre en place une procédure


propre indépendante de toute loi étatique existante. De même les parties peuvent régler
la procédure par référence à un règlement d’arbitrage.

95
Selon jean Robert et Me Bertrand Moreau « l’arbitrage droit interne droit international » 5eme édition.

1
Deux conséquences découlent du principe d’autonomie :

 la loi applicable à la procédure n’est pas nécessairement celle applicable


au fond du litige : les parties pourront prévoir l’application de deux lois différentes une
propre à la procédure et une autre distincte régissant le fond du litige.

 la convention de new York pose une règle de conflit indirecte selon


laquelle la loi du pays de l’arbitrage ne s’appliquera qu’à défaut de stipulations
contractuelles.

La loi marocaine peut être appliquée à la procédure arbitrale :soit que les parties
se sont référés à un règlement d’arbitrage renvoyant expressément à ladite loi, soit que
l’arbitre à défaut de stipulation, et suivant les circonstances de l’affaire retient
l’application de la loi marocaine ;soit qu’une règle de conflit étrangère considère que
la loi marocaine est applicable à la procédure, notamment parce que l’arbitrage a eu
lieu au Maroc .

La procédure d’arbitrage telle que prévue en droit interne n’est pas, en principe,
applicable en matière d’arbitrage international qu’à défaut de convention contraire.il
en résulte que les parties ne sont pas tenues des règles procédurales qui régissent
l’arbitrage interne, et pourront prévoir d’autres règles distinctes.

§2- La détermination de la loi par les arbitres :

Si les parties n’ont pas convenues de la loi de procédure, cette tache reviendra à
l’arbitre. A ce propos, l’article 327-42 alinéa 2 de la loi marocaine sur l’arbitrage
énonce : « dans le silence de la convention, le tribunal arbitral règle la procédure
autant que de besoin, soit directement par référence à une loi ou à un règlement
d’arbitrage ».

1
Section II- Droit applicable au fond de litige :

les parties peuvent désigner librement une loi applicable à leur contrat, sans
qu’il y ait nécessairement un lien objectif entre ce choix et le convention, sous la seule
réserve qu’il n’y’ait pas de fraude ou de contrariété à l’ordre public .ce principe est
consacré par la plupart des systèmes de droit international, il est également consacré
par certaines conventions internationales (convention de Rome du 19 juin 1980 article
3 alinéa 1 ; de la convention de la Haye du 14 mars 1978 article 5)

En pratique les parties pourront se référer à un droit étatique, aux usages de


commerce, ou investir l’arbitre d’une mission d’amiable compositeur :

le droit de l’Etat : dans le cadre de l’arbitrage international, les parties peuvent


soumettre le règlement de leur litige à n’importe quelle loi de quelque nature soit-elle

1
ou à l’inverse décider de l’exclusion de telle ou telles lois, il n’est pas nécessaire
qu’elle ait un quelconque rapport avec les parties ou le contrat-support de la clause
arbitrale. Ainsi par exemple, un marocain et un français parties à un contrat doit être
exécuté au Japon, peuvent, valablement, investir l’arbitre de trancher le litige né ou à
naitre conformément au droit anglais.

les parties peuvent aussi dans la cadre de cette liberté de se référer à la lex
mercatoria . Cette dernière est constituée d’un ensemble de principes du droit
international et de règles de coutumières dégagées a l’issu des relations de commerce
international sans référence à droit étatique.

l’arbitre ne peut statuer en amiable compositeur que si la convention arbitrale le


prévoie expressément .dans ce cas, il tranchera en équité et écartera tant les règles de
droit que les usages de commerce s’il ne converge pas avec son sentiments d’équité

Ainsi, lorsque les dispositions de la loi choisie par les parties va à l’encontre de
l’ordre publique international, les arbitres pourront, voire, devront, refuser leur
application sous peine de voir leur sentence annulée cette disposition législative est en
harmonie avec les conventions internationales notamment celle de New York de 1958.

Toutefois, faute aux parties d’avoir désigné le droit applicable, il incombera aux
arbitres d’appliquer la loi désignée par la règle de conflit .en pratique la loi plus étroits
et, plus particulière ,l’état de domicile ou de résidence de la partie qui fournit la
prestation caractéristique.

Les arbitres ont un pouvoir égal à celui des parties dans la double limite
suivante :

le choix de la loi opéré par l’arbitre ne peut contrarier la volonté des parties.

la loi désignée par les arbitres ne doit pas contrevenir à une loi l’ordre public
international de l’état ou du lieu de l’exécution de la sentence.

1
Troisième partie
La sentence arbitrale

La définition de la sentence arbitrale n'est pas toujours aisée, la difficulté de


définir la sentence est d'autant plus grande que la plupart des textes applicables à
l'arbitrage international se sont abstenus de la définir.

1
Tel est le cas des lois récentes sur l'arbitrage international. Les auteurs de la
loi type CNUDCI ont renoncé purement et simplement à toute définition 96. Les
conventions internationales sur la reconnaissance et l'exécution des sentences
arbitrales ne définissent pas davantage la notion de sentence. Tout au plus la
convention de New York du 10 juin 1958 précise-t-elle qu'on entend sentences
arbitrales non seulement les sentences rendues par les arbitres nommés pour des cas
déterminés, mais également qui sont rendues par des organes d'arbitrage
permanents auxquels les parties se sont soumis (Art I, §2 de la convention) 97. Les
principaux règlements d'arbitrage ne contiennent pas non plus de définition de la
notion « sentence ».

Il est pourtant essentielle d'identifier avec précision les décisions des arbitres
susceptibles d'être qualifie de sentence et, en particulier, de les distinguer des
ordonnances de procédure ou des ordonnances statuant sur des mesures provisoires,
ou encore des accords pouvant intervenir entre les parties 98. D'importantes
conséquences juridiques s'attachent en effet à la qualification. Seule une véritable
sentence peuvent faire l'objet d'un recours en annulation ; seul le prononcé d'une
véritable sentence qui est susceptible de faire couvrir les délais prévus à cet effet.
Partant de ces constatations, on peut dire que la sentence arbitrale est la décision
par laquelle les arbitres, conformément aux pouvoirs que leur confère la convention
arbitrale tranchent les questions litigieuses qui leur ont été soumises par les parties.
Elle est l'aboutissement de la procédure d'arbitrage.

Chapitre I- Particularités de la sentence


arbitrale :

Il existe deux catégories de sentence arbitrale : la sentence arbitrale interne


et la sentence arbitrale internationale, pour qu'une sentence soit considérée comme
internationale, il est nécessaire que deux conditions soient réunies : le règlement
des litiges nés à l'occasion d'opérations de commerce international et que la
résidence des parties soit dans des états contractants différents99.
.
Ainsi faut-il faire la distinction entre la sentence étrangère et la sentence
rendue en matière internationale. Cette distinction est faite dans l'article premier,
96
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996.
97
P. Sanders, « Vingt années de la convention de New York de 1958 », DPCI, 1979.359.
98
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996.
99
ROBERT J., arbitrage : droit interne, droit international privé, édition : Dalloz, 1993 Paris.

1
paragraphe 1er de la convention de New York pays qui stipule que « la présente
convention s'applique à la reconnaissance et à l'exécution des sentences rendues sur
le territoire d'un État autre que celui où la reconnaissance et l'exécution des
sentences sont demandées (il s'agit de la sentence arbitrale Étrangère) 100. Elle
s'applique également aux sentences arbitrales qui ne sont pas considérées comme
sentences nationales dans l'Etat où leur reconnaissance et leur exécution sont
demandées ». Cette fois-ci il s'agit de la sentence arbitrale rendue en matière
d'arbitrage international101.

Pourquoi cette distinction est faite ? Parce que ces deux types des sentences
sont soumis à un même régime, concernant leur reconnaissance et leur exécution,
mais aux conditions différentes concernant leur annulation.

Comme les décisions judiciaires, les sentences arbitrales internes et


internationales peuvent être de plusieurs types. On distingue ainsi les sentences
définitives des sentences avant dire droit qui se divisent elles-mêmes en sentences
préparatoires, destinées à ordonner une mesure d'instruction, et en sentences
provisoires par lesquelles sont ordonnées des mesures provisoires ou qui tranchent
un point préliminaire102. C'est plutôt sur le double plan de la nature et des
conditions que la sentence arbitrale présente une spécificité à rappeler.

Section I- Nature juridique de la sentence arbitrale :

Sur ce plan deux points méritent d'être envisagés : le caractère juridictionnel


de la sentence arbitrale (§1) et le cas de la sentence au deuxième degré (§2).

§1- la sentence arbitrale : un acte juridictionnel d'une


nature particulière :

La nature juridique de la sentence a longtemps été discuté en doctrine :


avait-elle un caractère juridictionnel, contractuel ou mixte ?

Certes, la sentence met normalement fin au litige qui opposait les parties.
Etant donné le caractère juridictionnel de l'arbitrage, on peut être tenté de qualifier
100
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996
101
Pierre ECKLY, Droit du commerce international, Ellipses, édition Marketing, 2005
102
RUBELLIN - DEV1CHI J., arbitrage : nature juridique, droit interne et droit international privé, édition : LGDJ,
1965, Paris.

1
cette décision d'un acte juridictionnel. Pourtant, on ne peut vraiment l'assimiler à
une décision de justice étatique car la sentence est rendue par des juges privés et, de
ce fait, elle n'est pas arrivée sur de la formule exécutoire sacramentelle103, les
arbitres n'ayant aucun pouvoir légal.

Cela est évidemment dû à l'importance accordée au compromis, dont le


caractère contractuel imprègne tant la procédure que la sentence arbitrale, voire le
choix du droit applicable. D'ailleurs, la loi 08/05 a réservé toute une sous-section à
la notion de la sentence arbitrale. En effet, les dispositions de cette sous-section
sont les seules réservées aux règles juridiques susceptibles d'être retenues pour
solutionner le litige au fond et celles afférentes à la forme et au contenu de la
sentence.

Traditionnellement, d'autres questions non négligeables, telles celles


relatives aux différentes catégories des sentences et à la faculté de leur rectification
ou interprétation n'ont pas été abordées par la loi, seule très occasionnellement la
jurisprudence s'y prononce, sachant pertinemment qu'en intervenant, celle-ci
dessaisit ou limiter le pouvoir des arbitres à en connaître personnellement et
exclusivement104. Ce qui n'est pas le cas avec loi 08/05 qui a apporté pas mal de
précision en ce domaine.
En conséquence, c'est cette essence juridictionnelle qui permet de
caractériser l'arbitrage par rapport aux autres cas où les parties sollicitent
l'intervention d'un tiers dans le cours d'un différend : Médiation, transaction,
expertise105. Etc.

En particulier la qualification de sentence doit être écartée lorsque la


solution du litige ne repose pas sur un « acte dérisoire » de l'arbitre 106. Il y aura
alors lieu de penser qu'on est en présence d'une transaction. De même n'est pas une
sentence l'acte par lequel l'arbitre se limite à rendre un avis : le rapprochement avec
une expertise à titre privé s'imposera alors.

§2- Cas de la sentence au deuxième degré :


103
BOUDAHRAIN A., Arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc, édition AL Madariss 1999,
Casablanca.
104
Indépendamment d'une possible rectification ou interprétation d'une sentence arbitrale par celui ou ceux qui l'ont
rendu, on verra que les juges d'état peuvent aussi s'y prononcer par voie de recours, en cas notamment d'un recours en
rétractation. 11 en va autrement à l'occasion d'un arbitrage international car les arbitres sont d'abord et quasi
exclusivement compétents pour rectifier ou interpréter leurs décisions.
105
Oppetit B., Justice étatique et justice arbitrale, Etudes offertes à P. Bellet, Litec, 1991
106
RUBELLFN - DEVICHI J., arbitrage : nature juridique, droit interne et droit international privé, édition : LGDJ,
1965, Paris.

1
C'est un cas prévus par l'article 1975 du code de procédure civile français
qui stipule « la personne chargée d'organiser l'arbitrage peut prévoir que le tribunal
arbitral ne rendra qu'un projet de sentence et que si ce projet est contesté par une
des parties, l'affaire sera soumise à un deuxième tribunal arbitral » 107. Dans cette
hypothèse, le projet défini par le premier tribunal ne possède pas le caractère d'une
sentence : aura en revanche cette qualité la décision rendue au « deuxième degré »
par le deuxième tribunal appelé.

Après avoir examiné les conditions que doit remplir la sentence ainsi que
son objet, nous verrons quels sont ses effets.

Section II- Conditions de la sentence arbitrale :

La sentence doit remplir des conditions de fond et de forme.

§1- Conditions de fond :

La sentence arbitrale interne ou internationale doit vérifier trois conditions


de fond : elle doit être rendue après délibération, celle-ci devant en principe être
secrète et à la majorité des voix.

Nécessité d'une délibération :

Sa nécessité est évidente et doit être considérée comme prescription d'ordre


public visant à protéger les droits de la défense : en désignant leurs arbitres les
parties expriment le désir que ceux-ci confrontent leurs points de vue avant de
107
Article 1975 du code de procédure civile française.

1
rendre une sentence. Le cas normal sera celui d'une délibération orale. D'ailleurs,
un arrêt de la cour de cassation française108 a posé en principe qu'aucune forme
particulière ne s'impose pour le délibéré des arbitres. Évidemment la sanction de
l'absence de délibéré est la nullité de sentence, mais la preuve de cette carence, qui
incombe à la partie qui entend faire annuler la sentence, peut-être délicate à
rapporter109.

secret des délibérations :

Bien que, là encore, le droit marocain, précise nullement en matière


d'arbitrage international, il est généralement admis que le délibéré des arbitres est
secret110 cependant en matière d'arbitrage interne, L'article 327-22.de la loi 08/05
prévoit expressément que « les délibérations des arbitres sont secrètes ». Cela
signifie que les opinions échangées en cours du délibéré ne pourront être
communiquée qu'aux parties, mais n’implique nullement que la sentence ne puisse
faire apparaître qu'elle a été rendue à la majorité ou à l'unanimité 111. En outre, la
sanction de cette exigence ne saurait être qu'une éventuelle responsabilité de
l'arbitre qui l'aurait méconnu mais non l'inefficacité de la sentence.

§2- Conditions de forme :

La sentence arbitrale est un acte écrit, motivé et signé.

Ecrit obligatoire :

D'emblée, l'article 327-23 de la loi 08/05 dispose que « sentence arbitrale


doit être écrite... ». En raison de la confidentialité qu'entouré l'arbitrage, seules les
parties ont le droit de savoir quand est rendu la décision statuant sur leur litige, afin
notamment qu’elles puissent l'exécuter volontairement112. Par ailleurs, la cour
suprême a estimé que les dispositions de l'article 312 du l’ancien code de procédure
civile relatives au délai de dépôt par les arbitres de leur sentence ne sont pas d'ordre
public. C'est donc ajuste titre que le tribunal a rejeté le recours du fait que l'article
312 lui-même stipule la possibilité pour les parties de convenir de dispositions

108
Cour de cassation française, chambre civile2, 28 janvier 1981
109
Sylvain BOLLÉE, Les méthodes du droit international privé à l'épreuve des sentences arbitrales, Economica, 2004.
110
Robert J. l'arbitrage, 5èmcédition, 1983, page 310.
111
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996.
112
Jean-Claude DUBARRY, Eric LOQUIN, « Arbitrage international », RTD. Corn. 2004.

1
contraires. Cela est confirmé d'ailleurs par le maintien de la mission des arbitres au-
delà du délai initial convenu.

En outre, cette décision doit être rédigée avant l'expiration du délai du


compromis. Toutefois, en pratique, les arbitres se limitent à la dater en respectant
ce délai, à conditions que leurs délibérations aient au lieu dans le délai prévu.

La sentence arbitrale doit exposer succinctement les prétentions des parties


et doit être motivée113. Elle doit par ailleurs comporter impérativement un certain
nombre d'indications à savoir : le nom, les prénoms ou la dénomination des parties,
ainsi que leur domicile ou siège social, aux fins d'identification. La sentence
arbitrale doit comporter également le nom des arbitres qui l'ont rendues, afin de
garantir que les auteurs de la sentence sont bien les mêmes personnes que celles
investies par la convention d'arbitrage.

Motivation et signature de la sentence arbitrale :

L'obligation de motiver la sentence arbitrale est d'ordre public et s'applique à


toutes les catégories de sentences114. Conformément à la règle qui s'est toujours
appliquée même en l'absence de texte par analogie avec la justice étatique, il est
important que le texte comporte les éléments qui ont fondé la décision des arbitres.
L'insuffisance ou la contrariété de motifs constitue un cas d'ouverture au recours en
annulation de la sentence arbitrale et cela s'applique évidemment à la
sentence arbitrale interne et internationale.

Enfin, en vertu de l'article 327-25 de la loi 08/05, la sentence arbitrale doit


être signée par chacun des arbitres.

En outre, dans le cas où il y a plus de deux arbitres et si la minorité refuse de


signer, les autres arbitres en font mention et al sentence a le même effet que si elle
avait été signée par chacun des arbitres et est recevable. Quoiqu'il en soit, une
sentence valablement rendue comporte des effets non négligeables.

113
Henri MOTULSKY, Etudes et notes sur l'arbitrage, Dalloz, 1974.
114
Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002.

1
Chapitre II- la reconnaissance et
l’exequatur des sentences arbitrales :
La loi 08-05 n’a pas beaucoup consacré à la « reconnaissance et exécution
des sentences arbitrales », mais il n'y est pas fait mention de la définition de ces
notions. On distingue la reconnaissance de l'exécution. La consécration de l' «
exécution » au lieu de « l'exequatur » révèle sans doute une mauvaise rédaction 115
parce qu'on ne voit pas comment une sentence va être exécutée sans avoir été, au
préalable, exéquaturée. Nous retiendrons ici les notions d'exequatur et de
reconnaissance que nous définirons d'abord (Section I), avant de déterminer la
portée de cette distinction (Section II).

115
La même observation sera faite plus loin quand il s'agira d'étudier les délais pour exercer le recours en
annulation contre une sentence munie d'exequatur.

1
Section I- Distinction entre reconnaissance et
exequatur

Avant l'exequatur (§1), définissons d'abord la notion de reconnaissance (§2).

§1- Notion de reconnaissance :

Le sens premier de la notion est intimement lié au droit international public.


Il y désigne un acte unilatéral et discrétionnaire par lequel un État prend position
sur une situation ou un fait qui s'est produit en dehors de lui et dont il est disposé à
tenir compte. Cette définition, comme on le verra, rejoint pratiquement les mêmes
préoccupations que celle de l'exequatur, à savoir faire produire les effets à un acte
extérieur à l'ordre juridique d'un État. La consécration par la loi 08-05 de la
reconnaissance est un mimétisme de la convention de New York du 10 juin 1958.

1
On se demande alors dans quel cas une partie pourrait, indépendamment de la
procédure d'exequatur, demander la reconnaissance de la sentence ?116

Deux hypothèses plausibles se présentent. D'abord, une partie peut avoir


intérêt à l'introduction de la sentence dans l'ordre juridique pour tirer avantage de sa
force probante. En effet, bien que n'étant pas un acte exécutoire, les mentions que
contient la sentence ne peuvent être ignorées par un tribunal. Ainsi, elle peut
permettre de constater le rejet d'une prétention. En plus, on sait qu'un jugement ou
une sentence étrangère non exécutoire est un titre privé qui peut justifier une saisie
conservatoire. Pour toutes ces raisons, une partie peut valablement demander la
reconnaissance de la sentence en dehors d'une procédure d'exequatur.

Ensuite, à la double condition d'établir la preuve de l'existence de la sentence


et sa non contrariété manifeste à l'ordre public international, une partie peut
invoquer, à titre incident devant une juridiction, la reconnaissance de la sentence.
Dans ce cas, le juge saisi de l'incident peut donner effet à la sentence sans se
dessaisir au profit du juge de l'exequatur117.
§2- Notion d'exequatur :

L'exequatur est défini comme un ordre d'exécution donné par une autorité
judiciaire à une sentence rendue par une justice privée. C'est justement le cas de la
sentence arbitrale. Dans cette occurrence, l'exequatur est « un bon à exécuter » et
non point un acte d'exécution.

En effet, l'exécution consiste pour le bénéficiaire d'un titre exécutoire 118,


c'est-à-dire déjà revêtu de la formule exécutoire, de mobiliser un agent d'exécution

116
Selon le droit libanais, l’aboutissement de la reconnaissance de la sentence arbitrale présuppose, en vertu de
l’article 814 du NCPC libanais, une double condition : d’abord, le demandeur de la reconnaissance doit prouver
l’existence de la sentence. Cette preuve se fera par « la production de l’original de la sentence accompagnée de
la convention d’arbitrage, ou, à défaut, par la production d’une copie des originaux desdits documents certifiée
conforme par les arbitres ou toute autorité compétente. Et si les documents sont rédigés en langue étrangère, ils
devront être traduit en langue arabe par un traducteur assermenté ». Ensuite, « la sentence ne doit pas être
manifestement contraire à l’ordre public international ».
117
Cette hypothèse découle expressément de l'art. 1498 NCPC français. Elle n'est pas expressément prévue par
l'OHADA même si l'article 31 AU.A pose les conditions de la reconnaissance et de l'exequatur que l'article 1498
NCPCC. Cette hypothèse est critiquable parce qu'elle se concilie mal avec l'idée que la sentence a autorité de
chose jugée dès qu'elle est rendue, sauf si l'on s'assure du respect sans examen au fond des deux conditions de la
reconnaissance et de l'exequatur. V. dans ce sens, Ph. Fouchard et alliés, op. cit., no 1567.
118
L'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution
donne une liste (article 33) non exhaustive des titres exécutoires dont : les décisions de justice revêtues de la
formule exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minute ; les actes et décisions juridictionnelles étrangers
ainsi que les sentences arbitrales déclarées exécutoires par une décision juridictionnelle, non susceptible de
recours suspensif d'exécution, de l'État dans lequel ce titre est invoqué.

1
119
afin de mettre en œuvre ou matérialiser la décision obtenue.

Sur le plan temporel, la différence entre les deux notions est encore plus
nette. En effet, la formule exécutoire précède l'exécution proprement dite.
L'exequatur est la condition sine qua non120 d'exécution forcée d'une sentence parce
qu'étant dépourvu d'imperium, l'arbitre ne peut l'apposer sur la sentence qu'il rend.
On doit faire recours au juge étatique, qui à l'issue d'un contrôle sommaire, appose
la formule exécutoire, préalable à l'exécution.

Cette question sur la différence entre exequatur et exécution rejoint déjà


celle de la reconnaissance et de l'exequatur au point où on se demande quelle est la
portée réelle de cette distinction, et partant l'intérêt de leur consécration
concurrente.

Section II- Portée de la distinction entre la


reconnaissance et l'exequatur :

Nous avons vu que la reconnaissance visait beaucoup plus à établir


l'existence de la sentence sans forcément en tirer toutes les conséquences
juridiques, notamment son exécution matérielle. C'est comme s'il s'agissait
seulement de reconnaître une situation de fait que constate un titre qui n'est même
pas authentique. Tel n'est pas l'objet de l'exequatur qui vise à obtenir l'autorisation
d'exécuter la sentence sur un territoire donné. Au besoin avec le concours de la
force publique. Là s'arrêtent les différences.

En réalité, bien que la logique juridique consacre la reconnaissance et


l'exequatur comme deux notions distinctes, on constate qu'elles ont toutes les

119L
'huissier de justice notamment, accompagné au besoin de la force publique.
120
La condition sine qua non (prononcer comme ciné quoi nonne /si.ne.kwa.n ɔ n/, mot-à-mot sans quoi non) ou
condition sine qua non (la condition nécessaire) était à l'origine un terme juridique latin signifiant « sans laquelle
cela ne pourrait pas être ». Dans plusieurs langues, telles l'italien, le français et l'anglais, l'expression est utilisée
dans tous les domaines, incluant le droit et l'économie.

1
mêmes conditions de mise en œuvre. Il s'agit de la preuve de l'existence de la
sentence et de sa conformité à l'ordre public en ajoutant une autre condition
concernant les juridictions marocaine celle d’une traduction de la sentence
arbitrale. Leurs conditions procédurales sont identiques. Enfin, sur le plan
théorique, bien que des hypothèses existent où l'on peut invoquer la reconnaissance
sans forcément demander l'exequatur de la sentence, on imagine difficilement, sur
le plan pratique, un plaideur introduisant une instance juste pour la reconnaissance
de la sentence, et non pas pour l'exequatur121.

On en vient alors à conclure que la différence est davantage conceptuelle


que fonctionnelle. Aussi, compte tenu du fait qu'il ne nous a pas été donné de voir
une décision judiciaire liée exclusivement à la reconnaissance d'une sentence
arbitrale, nous utiliserons davantage l'expression exequatur dont il convient d'en
déterminer les modalités.

La loi 08-05 est assez laconique sur les modalités de la reconnaissance et de


l'exequatur de la sentence arbitrale puisqu'il dispose simplement que la sentence
arbitrale n'est susceptible d'exécution forcée qu'en vertu d'une décision d'exequatur
rendue par le juge. Cela ne détermine pas la juridiction compétente pour octroyer
une telle mesure, il ne réglemente guère la procédure y relative. Ces questions sont
réservées à la partie qui régisse le droit de l’arbitrage interne.

En réalité, les modalités d'octroi de l'exequatur soulèvent plusieurs questions


dont celles de leurs conditions (§1), les problèmes de compétence juridictionnelle
et de procédure (§2) ainsi que les suites de la décision sur l'exequatur (§3).

§1- Conditions de la reconnaissance et de l'exequatur de


la sentence arbitrale

Bien que la loi consacre à la fois la reconnaissance et l'exequatur, il n'en fixe


pas pour autant des conditions différentes pour les deux opérations. En effet, la
reconnaissance et l'exequatur de la sentence arbitrale supposent que la partie qui
s'en prévaut établisse l'existence de la sentence arbitrale122, tandis que la deuxième
condition est lorsque la reconnaissance et l'exequatur sont refusés parce que la
sentence est manifestement contraire à une règle d'ordre public. Les deux
conditions ainsi posées sont, l'une matérielle, et l'autre juridique. S'agissant de la

121
Il va de soi que la demande d'exequatur comprend nécessairement en filigrane celle sur la reconnaissance.
122
Lexique, op. cit., p. 394

1
condition matérielle, la loi exige la production de l'original de la sentence arbitrale,
ainsi que la convention d'arbitrage. Qu'adviendra-t-il alors si cette condition n'est
pas remplie ? La sanction devrait être logiquement le refus de la reconnaissance ou
de l'exequatur. La loi permet toutefois, comme palliatif, la fourniture des copies
certifiées de ces documents, ou encore les copies remplissant les conditions
requises pour leur authenticité.

Ces pièces, si elles ne sont pas rédigées en Arabe, doivent être traduites par
des experts dont la liste est établie par les juridictions compétentes. Cette exigence
soulève une difficulté majeure dans l'arbitrage. En effet, il est possible la
conclusion d'une convention d'arbitrage par écrit ou par tout autre moyen
permettant d'en administrer la preuve. Qu'en sera-t-il donc des conventions
d'arbitrage orales ? Nous pensons alors que dans un tel cas, il serait nécessaire
d'user de tous les moyens de preuve prévus par la loi, notamment la preuve par
témoins. Mais pour éviter tout effet de surprise, il est recommandé aux parties de
faire des conventions d'arbitrage écrites.
S'agissant de la condition juridique qui est la conformité de la sentence à une
règle d'ordre public, nous y reviendrons plus loin.

§2- Problèmes de compétence juridictionnelle et de


procédure

Comme d'habitude, l’esprit de notre législateur ne traite ni du problème de la


compétence juridictionnelle pour la reconnaissance ou l'exequatur, ni de celle liée à
la procédure bien sur au niveau international. Il se borne à énoncer que la décision
y relative est rendue par le juge compétent.

A- Juridiction compétente pour la reconnaissance et


l'exequatur :

La compétence juridictionnelle123 se décline toujours en compétence


d'attribution et en compétence territoriale. Avant que la France n'adopte la nouvelle
loi danoise en matière d'arbitrage - RDE nº 07-206, une partie de la doctrine 124
123
. ABDELHAMID Khalid Ahmed : « Le rôle de la justice dans l’exécution des sentences arbitrales », in
Revue des Cahiers de la Cour suprême N° 7, 2005.p 43. En arabe.
124
P.G. Pougoué et alliés, op. cit., no 245.

1
préconisait des solutions assez réalistes, notamment pour ce qui est de la
compétence d'attribution. Elle se basait à cet effet sur l'article 593 du NCPC qui,
pour ces auteurs, parce que non contraire à l'acte uniforme, « prévoit que le
jugement arbitral sera rendu exécutoire par une ordonnance du président du tribunal
de première instance ». Sur la base de ce texte, un juge français avait d'ailleurs
rendu une ordonnance d'exequatur125.

La France a, ultérieurement reprise et consacrée ce point de vue. En effet,


s'agissant de la compétence d'attribution, les demandes d'exequatur sont connues
par le président du TPI statuant seul. Il peut le cas échéant déléguer ses
compétences à un juge membre de sa juridiction126.

Quant à la compétence territoriale, deux possibilités sont prévues. Soit


l'action est exercée devant le président du TPI du « lieu où l'exécution de la
sentence est envisagée » ; soit, le cas échéant, devant celui du « domicile du
défendeur »127. Il s'agit des solutions assez classiques se basant sur la nécessité de se
rapprocher autant que possible du lieu où se trouveraient d'éventuels biens pouvant
être saisis en exécution de la sentence ; et de la théorie générale de procédure qui
veut que le défendeur soit astreint devant le tribunal du lieu de son domicile. En
application de la loi de 2003, les juridictions camerounaises ont rendu de
nombreuses ordonnances d'exequatur128 sur la base de la procédure qu'elle prescrit.

B- Procédure d'exequatur :

Aux termes de l'article 5 alinéa 2 de la loi de 2003, en cas de demande


d'exequatur, « le président du tribunal de première instance est saisi par voie de
requête (...)». Ce texte reprend par ailleurs l'article 31 AU.A en exigeant que la
demande soit accompagnée des pièces établissant l'existence de la sentence
arbitrale129.

On définit la requête comme « une demande écrite adressée directement à un


magistrat, sans mise en cause d'un adversaire, dans les cas où la situation est
urgente et où la nécessité commande qu'il soit procédé non contradictoirement ».
De ce fait, l'exequatur est accordé ou refusé sans débat contradictoire entre les
125
Président du TPI de paris, ordonnance no 1271 du 29 mars 2000.
126
Article 4 alinéa 2 de la nouvelle loi danoise en matière d'arbitrage - RDE nº 07-206
127
Article 4 alinéa 2, même loi.
128
TPI de Bafoussam, ordonnance no 191/04- 05 du 1er août 2005 ; TPI de Bafoussam, ordonnance no 101/ 05-
06 du 24 mai 2006 ; TPI de Bafoussam, ordonnance no 104/ 05- 06 du 29 mai 2006 ; TPI de Yaoundé (centre
administratif), ordonnance no 1141 du 28 mai 2007 ; TPI de Yaoundé (centre administratif), ordonnances no
1305 et 1306 du 29 juin 2007 ; et TPI de Douala Bonanjo, ordonnance no 1503 du 1er Août 2005 entre autres.
129
V. § I de cette section intitulée « les conditions de la reconnaissance et de l'exequatur ».

1
parties. Il serait même inapproprié que le juge appelle l'autre partie à l'audience
éventuelle d'autant plus qu'il n'effectue qu'un contrôle sommaire de la sentence,
souvent qualifié de « prima facie130».

Le contrôle « prima facie » se résume en ceci que le juge de l'exequatur


vérifie seulement que l'existence de la sentence est établie par celui qui s'en
prévaut, et que la sentence n'est pas manifestement contraire à l'ordre public. Il n'est
pas souhaitable que le juge étatique profite de cette occasion pour modifier, de
quelle que façon que ce soit, la sentence. Cela est contraire à l'esprit de l'arbitrage
et doit, en cas de survenance, être sanctionné par l'annulation131 dans un pourvoi en
cassation ; le contrôle approfondi de la sentence étant justement réservé pour un
éventuel recours en annulation qui incombe au juge d'appel et en présence des deux
parties. Un cas isolé est déjà survenu en France où le juge de l'exequatur est allé au-
delà des prescriptions légales en sanctionnant l'abus d'une voie de recours contre la
sentence132, ce qui ne lui était pas expressément demandé. Un tel cas n'est pas
encore survenu dans le cadre de l'application de l'A.U.A, auquel cas la CCJA nous
aurait fixé sur la position à adopter133.

En principe, la décision sur la demande d'exequatur ne peut être que soit un


acquiescement, soit un refus. On se demande alors si en cas d'insatisfaction, une
partie peut-elle exercer un recours contre celle-ci ?
§3- Suites possibles de la décision sur l'exequatur

Par rapport aux deux issues possibles de la demande d'exequatur que sont le
refus ou l'octroi de la mesure, la loi prévoit aussi deux hypothèses quant à la suite.
En résumé, la décision qui accorde l'exequatur n'est pas susceptible d'appel (A)
tandis que celle qui la refuse est susceptible de recours en cassation (B). On peut
s'interroger enfin sur l'exécution de la sentence, ou plus précisément sur le rôle du
juge du contentieux de l'exécution (C).

A- Refus de l'appel contre la décision qui accorde


l'exequatur :

130
Preuve apparente (preuve nécessitant une confirmation d'une source supplémentaire, preuve qui n'est pas
irréfutable)
131
Cass. 1re civ., 14 décembre 1983, Rev. arb., 1984.483, note M.-C Rondeau-Rivier
132
Cass. 1re civ., 14 décembre 1983.
133
Nous pensons qu'il s'agit là d'un cas où le juge statue ultra petita, et donc hors de la procédure introduite par
les parties. Par conséquent, la CCJA devrait annuler une pareille décision si elle est prise en instance ou en appel,
ou ne pas y faire droit si elle est introduite devant elle pour la première fois.

1
La décision qui accorde l'exequatur est définitive. Elle n'est susceptible
d'aucun recours.

La position de la loi paraît a priori curieuse compte tenu du fait que la


décision qui accorde l'exequatur est prise à l'issue d'une procédure non
contradictoire, celui contre qui elle s'exerce n'est donc pas au courant alors même
qu'il pourrait avoir quelques griefs légitimes à faire valoir pour paralyser les
prétentions de son adversaire.

Cette position est pourtant justifiable. En effet, le législateur a tenu compte


des enjeux sus évoqués et a, en réalité, différé l'exercice du recours contre
l'ordonnance d'exequatur. L'on sait en effet que le recours en annulation de la
sentence emporte de plein droit, dans les limites de la saisine du juge étatique,
recours contre la décision ayant accordé l'exequatur. Autrement dit, si le recours
direct n'est pas admis, le recours indirect est, en revanche, pleinement ouvert par le
biais du recours en annulation de la sentence. D'aucuns ont justifié qu'il s'agit d'une
simplification des voies de recours.

B- Possible Cassation De La Décision Qui Refuse


L'exequatur :

Quant à l'ordonnance qui refuse l'exequatur, le recours contre celle-ci est


possible. Il est même ouvert directement. Ce recours comporte néanmoins une
particularité dans la mesure où cette ordonnance n'est susceptible que de pourvoi en
cassation. La décision refusant l'exequatur correspond ainsi, dans le cadre français,
à une décision rendue en premier et dernier ressort, parce qu'elle est rendue par le
juge d'instance. Sa décision est donc directement déférée au juge de cassation sans
passer par le juge d'appel qui devrait normalement être l'intermédiaire entre les
deux juges. S'agit-il toujours du souci de célérité qui anime le droit sur l'arbitrage ?

Nous le croyons d'autant plus qu'une pareille décision correspond à une


annulation tacite de toute la procédure arbitrale et de la remise en cause des droits
de celui qui a eu gain de cause dans la procédure. D'où l'urgence de faire intervenir
rapidement le juge suprême. Celui qui bénéficie de la sentence et dont l'exequatur
lui est refusé doit par conséquent saisir la CCJA, conformément à son Règlement
de procédure, dans « (...) les deux mois de la signification de la décision attaquée
par l'avocat du requérant (...) ».

C- Rôle du juge du contentieux de l'exécution :

1
La fin de l'instance arbitrale est matérialisée par la sentence qui doit être
exécutée par les parties en litige. Un 134accent particulier est mis sur le débiteur de
l'obligation d'exécuter. Il peut s'exécuter spontanément. C'est la situation idéale. Il
arrive malheureusement qu'il ne s'exécute pas volontairement, d'où la nécessité de
recourir à l'exécution forcée. C'est dans le cadre de l'exécution forcée par l'agent
d'exécution, notamment l'huissier de justice, que des difficultés d'exécution peuvent
survenir. On parle alors de contentieux d'exécution, contentieux qu'il faut régler.

Chapitre III- Annulation et voies de


recours contre la sentence arbitrale :

Après que le tribunal arbitral ait rendu la sentence, les parties peuvent
l'exécuter spontanément. C'est l'hypothèse rêvée. Mais il arrivera aussi qu'une
partie ne soit pas satisfaite de cette sentence, et souhaite la voir par conséquent
paralysée. Celle-ci peut alors exercer l'un des recours135 prévus par la loi.

La base juridique du recours contre la sentence est bien évidement la loi sur
L‘arbitrage. Les voies de recours sont limitativement énumérées. On peut
distinguer trois situations. D'abord, les voies de recours dont la connaissance est
réservée à l'arbitre ayant statué sur l'affaire136.
134
BAHMANI Ibrahim : « L’exécution des sentences arbitrales nationales et internationales », in Revue des
Cahiers de la Cour suprême N° 7, 2005. p 91. En arabe.
135
Les voies de recours sont des moyens mis à la disposition des plaideurs pour leur permettre d'obtenir un
nouvel examen du procès ou de faire valoir les irrégularités observées dans le déroulement de la procédure. On
distingue les voies de recours ordinaires dont l'opposition et l'appel ; extraordinaires : tierce opposition, recours
en révision et pourvoi en cassation; les voies de rétractation que sont l'opposition et le recours en révision.
136
C'est une voie de recours extraordinaire et de rétractation par laquelle on revient devant les juges qui ont déjà
statué en les priant de modifier leur décision que l'on prétend avoir rendue par erreur. Ce recours n'est possible
que dans quatre cas (fraude de la partie gagnante, rétention ou falsification de pièces décisives, attestations,
témoignages, serments mensongers) et suppose une décision passée en force de chose jugée.
Compte tenu des conditions d'exercice de ces recours et notamment du fait qu'il peut y avoir impossibilité de
reconstituer le tribunal arbitral, une partie de la doctrine préconise qu'ils soient connus dans ce cas là par le juge
étatique. V. P. Meyer, commentaire de l'AU.A, in J. Issa-Sayegh et alliés, OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés, Dans le même sens, G. Kenfack Douajni, « le juge étatique dans l'arbitrage OHADA », in
Rev. cam. Arb., no 12, pp.3-13, notamment p.7.

1
Il s'agit de la tierce opposition et du recours en révision 137. Ensuite, les voies
de recours exclues par le législateur Il s'agit de l'opposition, de l'appel et du pourvoi
en cassation. Enfin, la sentence peut faire l'objet d'un recours en annulation, qui
doit être porté devant le juge.

Le recours en annulation est une voie de droit qui permet l'anéantissement


rétroactif de la sentence pour irrégularité de forme, mais surtout de fond. Il s'agit
donc d'une décision aux conséquences graves, c'est la raison pour laquelle la loi
prévoit expressément les manquements qui peuvent entraîner une pareille sanction.
Cependant, rien n'est dit sur la juridiction compétente pour en connaître, encore
moins sur la procédure à suivre devant cette juridiction. Au regard de la loi, nous
statuerons sur ces modalités.

Section I- L’annulation de la sentence arbitrale :

Il s’agit dans ce cadre d’étudier dans un premier lieu, l'annulation de la


sentence arbitrale interne et examiner, dans un second lieu, l'annulation de la
sentence arbitrale internationale.

§1- Les causes d'annulation de la sentence arbitrale


interne :

Selon l'article 327-36 de la loi 08/05 (article 1484 du le code de procédure


civile français), l'annulation de la sentence arbitrale interne ne peut avoir lieu qu'en
présence de l'une au moins de sept causes suivantes :

1. S'il a été statué en l'absence de convention d'arbitrage, sur convention


nulle ou après expiration du délai d'arbitrage ;
2. Si le tribunal arbitral a été irrégulièrement composé, l'arbitre unique
irrégulièrement désigné ou la convention des parties non respectée ;
3. Si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qu'il lui avait
conférée, a statué sur des questions n'entrant pas dans le cadre de l'arbitrage ou a
méconnu les limites de la convention.

137
C'est la voie de recours extraordinaire de rétractation ou de réformation ouverte aux personnes qui n'ont été ni
parties ni représentées dans une instance et leur permettant d'attaquer une décision qui leur fait grief et de faire
déclarer qu'elle leur est inopposable.

1
Cependant, s'il est possible de distinguer les parties de la sentence
concernant les questions soumises à l'arbitrage de celles qui ne lui sont pas
soumises, l'annulation ne porte que sur ces dernières ;

4. Lorsque les dispositions des articles 3127-23 alinéa 2, 327-24 en ce qui


concerne les noms "des arbitres et la date de la sentence et 327-25 n'ont pas été
observées ;
5. Lorsque les droits de la défense n'ont pas été respectés ;
6. Si la sentence arbitrale est rendue en violation d'une règle d'ordre public.
7. Dans le cas de non respect des formalités de procédure convenues entre
les parties ou de non application d'une loi devant être appliquée d'un commun
accord entre elles à l'objet du litige.

Les septes causes susceptibles d'entraîner l'annulation de la sentence


arbitrale interne, ont un caractère limitatif, les quatre premiers cas sont les mêmes
pour l'annulation de la sentence arbitrale internationale. Le cinquième cas est
ouvert si la sentence est nulle en application des articles 327-23,327-24 et 327-25
de la loi 08/05. Ce grief ne peut être invoqué qu'à rencontre d'une sentence interne.
Les dispositions des articles 327-23,327-24 et 327-25 sont prescrites à peine de
nullité. La nullité sanctionne ainsi la violation de certaines règles de forme dans la
rédaction de la sentence : absence de motivation ; absence de mention du nom des
arbitres qui ont rendu la sentence ; absence de date ; absence de signature de la
sentence.

L'autre cause d'annulation de la sentence arbitrale interne consiste à ce que


l'arbitre a violé une « règle porte public ». Il s'agit .de l'ordre public interne. Le même
grief existe entre les sentences internationales mais concerne la contrariété à l'ordre
public international138. Nous l'étudierons, lorsque nous regardons l'annulation de la
sentence arbitrale internationale.

C'est sous le bénéfice de ces observations que l'on examinera tour à tour
chacune des causes prévues à l'article 327-36 de la loi 08/05 en distinguant entre les
causes d'annulation devant être invoquées par les parties et la cause d'annulation
examinée d'office par le juge qui réside dans la violation de l'ordre public .

138
David René, arbitrage dans le commerce international, édition : Economica, 1982, Paris.

1
A- Les causes d'annulation devant être invoquées par
les parties :

On peut dire que les causes devant être invoquées par les parties concernent
notamment l'invalidité de la convention d'arbitrage, l'irrégularité affectant la
composition du tribunal arbitral, l'arbitre a statué sans se conformer à la mission
qu'il lui avait été conférée et la violation du contradictoire.

Invalidité de la convention d'arbitrage :

Conformément à l'article 327-36 de la loi 08/05, le recours en annulation de


la sentence arbitrale interne est ouvert lorsqu'il a été statué en l'absence de
convention d'arbitrage, sur convention nulle ou après expiration-du délai
d'arbitrage.

Parmi les causes concrètes d'annulation de la sentence arbitrale interne au


titre de ce cas d'ouverture figureront ainsi les hypothèses dans lesquelles la
convention d'arbitrage est absente ; l'arbitre par exemple a statué sans convention
d'arbitrage couvrant parfaitement le type de litige soumis, ou bien la convention
d'arbitrage ne comprend pas la signature d'une des parties impliquées par la
sentence.

L'annulation de la sentence arbitrale interne peut avoir lieu aussi lorsque la


convention d'arbitrage est nulle139. En effet, les arbitres par exemple ont été rendus
sur des droits indisponibles ou de faire la base d'une clause compromissoire
n'exprimant pas sans ambiguïté les modalités de désignation des arbitres ; ou parce
qu'un vice du consentement est venu l'infecter.

Irrégularité affectant la composition du tribunal arbitral :


La constitution du tribunal arbitral, quel que soit le mode de désignation des
arbitres est soumise à des conditions précises qui doivent être respectées. En effet,
si le tribunal arbitral a été irrégulièrement composé ou l'arbitre unique
irrégulièrement désigné, cela peut entraîner l'annulation de la sentence. À ce
niveau, on peut citer à titre d'exemple la circonstance que l'un des arbitres n'a pas le
plein exercice de ses droits civils pour agir ou l'hypothèse où l'arbitre unique
désigné par un tiers n'aurait pas l'agrément de toutes les parties.

139
Sylvain BOLLÉE, Les méthodes du droit international privé à l'épreuve des sentences arbitrales, Economica, 2004.

1
Dépassement par les arbitres des termes de la convention
d'arbitrage :

D'après l'article 327-36 n°3 de la loi 08/05 140, le recours en annulation de la


sentence arbitrale interne est recevable si l'arbitre a statué sans se conformer à la
mission qu'il lui avait été conféré.

II convient alors d'envisager ce manquement sous deux angles : d'abord, la


mission de l'arbitre consiste à trancher un litige, et donc il ne se conforme pas à sa
mission s'il tranche ultra ou infra petita141. Il est vrai que, dans cette dernière
hypothèse, l'arbitre s'est autorisé à compléter sa décision s'il a statué infra petita 142 :
ceci réserve le recours en annulation aux cas où l'arbitre aurait statué par défaut total
d'examen, car il est impossible de compléter une décision qui a tranché sur un objet
totalement étranger à celui soumis143. Ensuite, les parties ont décidé du cadre de cette
mission : ceci sera jugée selon les règles du droit ou en amiable compositeur.

En effet, les arbitres qui décideraient de trancher comme s'ils étaient amiables
compositeurs alors qu'ils ont reçu mission d'appliquer les règles du droit se placent
sans conteste dans un cas de nullité : non respect des règles qui s'imposent aux
tribunaux pour l'instruction, l'administration des preuves, la tenue des débats... Etc.

En revanche, l'inverse ne saurait être vrai sauf si la convention d'arbitrage


enferme la mission dans des limites bien précises, rien n'empêche les amiables
compositeurs de se référer aux règles de droit, celles-ci étant présumées conforme à
l’équité144.

Violation du contradictoire :
Étant donné sa portée générale, le principe contradictoire est aisément et
souvent involontairement mis à mal par les arbitres dénués d'expérience145. D'où
140
L'article 327-36 n° 3 dispose « si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée, a
statué sur des questions n'entrant pas dans le cadre de l'arbitrage ou a méconnu les limites de la convention.
Cependant, s'il est possible de distinguer les parties de la sentence concernant les questions soumises à l'arbitrage de
celles qui ne lui sont pas soumises, l'annulation ne porte que sur ces dernières ».
141
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996.
142
Pierre ECKLY, Droit du commerce international, Ellipses, édition Marketing, 2005
143
Jean-Marc Mousseron, Jacques Raynard, Régis Fabre, Jean-Luc Pierre, Droit du commerce International, Litec,
Manuel, 3e édition, 2003.
144
Henri MOTULSKY, Etudes et notes sur l'arbitrage, Dalloz, 1974
145
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996

1
l'importance du contentieux post arbitral invoquant une violation de ce principe
procédural essentiel146. En effet, une sentence ne peut être rendue que si chaque pièce
ou élément de preuve ayant encouru à la prise de décision de l'arbitre a fait l'objet
d'une communication en temps utile à toutes les parties concernées.

Pour que cette cause d'annulation de la sentence arbitrale ne soit pas trop
accueillante, il faut que la partie qui invoque le non respect du contradictoire
démontre le préjudice qui en résulte pour elle147.

Le principe du contradictoire est étroitement lié à celui d'égalité des parties 148.
Le contradictoire suppose en effet que les parties aient été également mises en mesure
de faire valoir leurs prétentions. Ce principe entretient également certains rapports
avec la régularité de la constitution du tribunal arbitral149.

B- La cause d'annulation examinée d'office par le juge :


violation de l'ordre public :

L'actualité met tour à tour au premier plan l'un ou l'autre objet qu'exercé le juge
de l'exequatur ou de l'annulation sur les sentences arbitrales. Une série importante de
décisions vient d'attirer l'attention sur un aspect moins fréquemment étudié du
contrôle : la conformité de la sentence à l'ordre public150.

La question de l'arbitrabilité des matières d'ordre public et celle de la


conformité de la sentence à l'ordre public se manifeste l'un des problèmes cruciaux de
l'arbitrage : celui de la coexistence de la justice arbitrale et de la justice étatique.
L'ordre public y joue un double rôle : il marque à la fois la place que la justice
étatique consent à partager avec la justice arbitrale, et la limite des écarts qu'elle tolère
de celle-ci lorsqu'elle l'admet à fonctionner151.

D'après les auteurs de loi sur l'arbitrage, le juge devra annuler la sentence si
l'arbitre « a violé une règle d'ordre public » (article 327-36 n°6 de la loi 08/05) 152.
Dans cette perspective, il est à noter que pour apprécier la signification du contrôle de
la conformité de la sentence à l'ordre public, il convient de le rapprocher d'un autre
contrôle, auquel le droit français se refuse à soumettre l'arbitrage, dès lorsque les
146
http://www.lexinter.net/JPTXT3/recours_en_annulation_et_principe_de_la_contradiction.htm
147
C. Kessedjian, « principe de la contradiction et arbitrage », Revue de l'arbitrage, 1995, p 381 et s.
148
C. Kessedjian, « principe de la contradiction et arbitrage », op.cit, , p 383 et s.
149
Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e, 2002.
150
P. Level, « l'arbitrabilité », Revue de l'arbitrage, 1992.213 n°26 p231.
151
Oppetit B., Justice étatique et justice arbitrale, Etudes offertes à P. Bellet, Litec, 1991.
152
L'article 327-36 n°7 dispose « ....la cour d'appel qui examine le recours en annulation prononce d'office l'annulation de
la sentence arbitrale lorsqu'elle est contraire à l'ordre public du Royaume du Maroc ou si elle constate que l'objet du
litige concerne une question qui ne peut être soumise à l'arbitrage ».

1
parties ont renoncé à l'appel, c'est-à-dire celui de la bonne application des règles de
droit en général. Pourquoi ce dernier est- il exclu ? Parce que le législateur, dans sa
sagesse, a pris conscience du fait qu'un contrôle trop étendu dénaturerait l'arbitrage 153.
.
C'est un autre type de justice, et si l'on en admet le principe, il faut éviter
d'entraver par une tutelle trop étroite ceux qui l'administrent. De plus, on risquerait de
provoquer une inflation des recours : si l'on admet trop largement à la justice étatique
(c'est-à-dire aux cours d'appel) de substituer son appréciation à celle des arbitres, les
recours seront systématiques, et il sera plus nuisible qu'utile d'avoir une première
phase arbitrale, le dernier mot appartenant aux juges étatiques154.

La jurisprudence française en matière de validité des sentences arbitrales


retient la conception moderne, large, de l'ordre public, qui l'assimile à l'impérativité
ainsi, la cour d'appel de Paris, par un arrêt du 4 novembre 1982 a annulé une sentence
pour violation des règles d'ordre public relatives à la révision du loyer des baux
commerciaux, alors que la législation des baux commerciaux dont les effets anti-
économiques ont souvent été dénoncés, est uniquement inspirée par un souci de
protection du propriétaire du fonds de commerce ; la Cour de cassation a cassé l'arrêt,
mais seulement parce qu'elle a estimé que la règle, dont elle a aussi relevé le caractère
d'ordre public, n'avait pas été violé155.

Dans un arrêt plus ancien, la même juridiction avait déclaré contraire à l'ordre
public une sentence qui avait mis en œuvre un mode d'évaluation du préjudice subi en
cas d'inexécution du contrat, qui aboutissait à permettre à la victime de fixer elle-
même le montant de son indemnisation.

Grosso modo, l'ordre public peut être concerné de deux manières. Celle qui
correspond le mieux au sens littéral de l'expression résulte de l'atteinte directement
portée par la sentence au bon ordre de la société. De intérêts généraux, distincts de
ceux des parties sont lésés, et le juge, représentant l'Etat, a vocation naturelle à assurer
leur défense. Une atteinte plus diffuse peut toutefois résulter d'une sentence qui, en
apparence, méconnaît seulement des intérêts privés, mais le fait dans des conditions
particulièrement choquantes, heurtant des principes fondamentaux du droit marocain :
la société subit alors une atteinte morale qu'elle ne peut tolérer.

Les demandes d'annulation de la sentence arbitrale interne sont portées


devant la cour d'appel statuant selon la procédure d'urgence. Cette règle résulte de

153
Pierre Mayer, « La sentence contraire à l'ordre public au fond », Rev. Arb. 1994
154
Oppetit B., Justice étatique et justice arbitrale, Etudes offertes à P. Bellet, Litec, 1991.
155
Pierre Mayer, « La sentence contraire à l'ordre public au fond », Rev. Arb. 1994

1
l'article 327 - 36 de la loi n° 08/05. Cet article précise que « la cour d'appel
statue concernant la procédure d'agence. ».

Il est à noter que la loi n'a pas défini la notion d'urgence, mais il ne faut pas
la confondre avec l'empressement que manifestent les parties à obtenir une décision
urgente1156. Apprécié en raison de la nature de l'affaire qui est en l'occurrence
l'annulation de la sentence arbitrale, et des conséquences graves et parfois
irréparable qu'un retard peut entraîner si une décision n'est pas prise
immédiatement.

Certes, la notion d'urgence est appréciée par le juge au moment où il statue.


Par ailleurs, la cour d'appel déclarée compétente est statuant selon la procédure
d'urgence ne doit jamais trancher les questions touchant au fond du litige, à moins
que la loi ne l'y autorisé. L'article 327 - 37 prévoit « lorsque la cour annule la
sentence arbitrale, il statue sur le fond dans les limites de la mission du tribunal
arbitral sauf et si l'annulation est pour lancer prononcée pour absence de convention
d'arbitrage ou pour nullité de cette convention ».
Sur le plan strictement procédural, il y a lieu d'observer que le recours en
annulation de la sentence arbitrale interne doit être porté devant la cour d'appel
dans le ressort de laquelle la sentence a été rendue, il peut être formé dès le
prononcé de la sentence mais il cesse de l'être s'il n'a pas été exercé dans les 15
jours de la notification de la sentence revêtue de l'exequatur157.

Etant précisé que la simple notification de la sentence faite aux conseils des
parties par lettre recommandée ne vaut pas signification au sens de ce texte158.

Ces délais, comme l'action en annulation elle-même, ont un caractère


suspensif, de sorte que la sentence ne peut en principe être exécutée avant
l'expiration du délai pour former un recours en annulation ou avant que la cour
d'appel ait statué sur ce recours159.

Si la cour d'appel rejette le recours en annulation, la sentence arbitrale


interne devient immédiatement exécutoire. Dans ce sens, l'article 327 -- 38 de la loi
08/05 dispose que « lorsque la cour d'appel prononce l'irrecevabilité du recours en
annulation, elle doit ordonner l'exécution de la sentence arbitrale, son arrêt est
définitif».

156
BOUDAHRAIN A., Droit judicaire privé, édition : AL Madariss, 2003, Casablanca
157
Oppetit B., Justice étatique et justice arbitrale, Etudes offertes à P. Bellet, Litec, 1991
158
BOUDAHRAIN A., Arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc, édition AL Madariss 1999,
Casablanca.
159
BRINER R., DERAINS Y., arbitrage et le droit européen, édition : Bruylant, 1997, Bruxelles.

1
§2- L'annulation de la sentence arbitrale internationale
par les juridictions marocaines :

Le domaine d'application du recours en annulation susceptible d'être formé


devant les juridictions marocaines à rencontre de certaines sentences arbitrales
internationales a été fixé de la manière la plus claire par la loi n° 08/05. En effet
l'article 327 — 51 de cette loi dispose, en son alinéa premier, que « la sentence
rendue au Maroc en matière d'arbitrage international peut faire l'objet d'un
recours en annulation dans les cas prévus à l'article 327 -49... ».

Il résulte de la formulation retenue par l'article 327 — 51 que les juridictions


marocaines ne sont compétentes pour connaître une action en annulation qu'à l'égard
des sentences rendues au Maroc. C'est dire, en particulier, que le choix de la loi
marocaine opéré par les parties ou par les arbitres pour régir la procédure arbitrale
demeure impuissante à placer une sentence sous l'empire de l'ordre juridique marocain
du point de vue des actions en annulation.

En France, cette solution rompt avec celle qu'avait dégagée la cour d'appel de
Paris avant la réforme de 1981160. Celle-ci avait suggéré, dans la logique de la
jurisprudence qui privilégiait le critère de la loi applicable à la procédure par rapport à
celui du siège pour refuser de connaître du recours en annulation des sentences « non
françaises » rendues en France, qu'elle accepterait d'admettre la compétence des
juridictions françaises pour connaître de la validité des sentences rendues à l'étranger
en application de la loi française de procédure. En effet, c'est seulement parce que la
sentence en cause avait été « rendue selon une procédure qui n'est pas celle de la loi
française » que la cour d'appel de Paris avait déclaré irrecevable le recours en
annulation formé à l'encontre d'une sentence rendue à Vienne dans une affaire
opposant une société française et une société turque. Le décret de 1981 condamne cette
jurisprudence, comme il condamne celle qui refusait de connaître des recours en
annulation contre certaines sentences rendues en France161.

La solution se justifie pleinement. Plus encore que celui du siège, le critère de la


loi applicable à la procédure ne correspondait le plus souvent à aucune intention des
parties quant à l'étendue de contrôle devant être exercé sur la sentence, ces parties
étant, dans la plupart des cas, demeurées muettes sur cette loi. Notamment, le choix de
la loi applicable à la procédure comme critère de compétence des juridictions n'aurait
pas manqué d'entraîner de graves conflits de compétences, le critère du siège étant le

160
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial
international, Litec, 1996.
161
Henri MOTULSKY, Etudes et notes sur l'arbitrage, Dalloz, 1974

1
plus souvent retenu en droit comparé et dans les conventions internationales sur la
reconnaissance et l'exécution des sentences..162

L'acceptation d'un critère de compétence plus universellement reconnu, comme


l'est celui du siège, était de nature à éviter de nombreuses difficultés 163. Celles-ci
étaient d'autant plus inutiles que le choix du siège comme critère de compétence pour
connaître des recours en annulation contre les sentences arbitrales internationales ne
préjuge en rien la question de savoir si une sentence annulée par les juridictions
étrangères du lieu du siège peut être néanmoins accueilli dans l'ordre juridique
marocain par la voie de la reconnaissance et de l'exequatur.

Avec la loi 08/05, la règle de l'incompétence des juridictions marocaines pour


connaître d'un recours en annulation contre une sentence rendue à l'étranger est
aujourd'hui si claire. En droit français, la méconnaissance par une partie de cette règle
peut entraîner sa condamnation pour procédure abusive. La cour d'appel de Paris l'a
jugée le 18 février 1986 dans une affaire dans laquelle un recours en annulation avait
été formé en France contre une sentence rendue à Londres. Après avoir rappelé le
principe que la voie du recours en annulation « est réservée par l'article 1504 du
nouveau code de procédure civile aux seules sentences rendues en France en
matière d'arbitrage international », la cour a admis que le demandeur avait, « de
mauvaise foi, porté ses critiques de la sentence arbitrale devant une juridiction
manifestement incompétente, et a, de ce fait, permis un débat en audience publique
des faits devaient rester confidentiels »164.

Le critère retenu, par l'article 327 - 51 de la loi 08/05, du lieu où la sentence a été
rendue, donne une importance capitale à ce lieu. Le caractère simple et clair d'un tel
critère ne signifie pas cependant que l'on ne puisse hésiter, dans certaines
circonstances. En particulier, lorsque les parties ou une institution d'arbitrage en
application de la volonté des parties ont fixé un siège de l'arbitrage en un lieu, il arrive
que, pour des raisons de commodités, certaines des opérations d'arbitrage se déroulent
sur une autre place. La détermination du lieu ou la sentence a été rendue au sens de
l'article 327-51 peut susciter certaines difficultés.

Si par exemple, la sentence est signée au Maroc alors que le siège de l'arbitrage a
été fixé dans un autre Etat, une partie pourrait être tentée de faire valoir que la sentence
a été rendue au Maroc et en tirer argument pour soutenir que les juridictions
marocaines sont compétentes pour connaître d'un recours en annulation.

162
Pierre ECKLY, Droit du commerce international, Ellipses, édition Marketing, 2005.
163
Jean-Michel Jacquet et Philippe Delebecque, Droit du commerce international, Dalloz, Cours, édition 3e,
2002.
164
David René, arbitrage dans le commerce international, édition : Economica, 1982, Paris.

1
Un tel risque de dissociation entre le siège juridique de l'arbitrage et le lieu où la
sentence est rendue est, sensiblement atténué lorsque l'arbitrage se déroule sous l'égide
de la CCI par la disposition du règlement de la cour d'arbitrage stipulant que la
sentence est réputée rendue au siège de l'arbitrage (art.22)165.

Selon le lieu ou la sentence aura été rendue, elle sera exposée à un recours en
annulation (sentence rendue au Maroc). L'article 327 -- 51 relatif à l'annulation renvoie
aux cas énumérés par l'article 327-49 comme ouvrant droit à l'appel de la décision qui
accorde l'exequatur.

L'article 327 - 49 n°5 cite comme cas d'ouverture de l'appel et donc du recours
annulation l'hypothèse où « la reconnaissance ou l'exécution sont contraires à l'ordre
public international ou national ». On raisonnera en général seulement par référence au
recours en annulation.

La contrariété de la sentence s'apprécie, non au niveau de la sentence elle-même,


mais à celui de sa reconnaissance ou de son exécution. Cependant, la jurisprudence ne
parait pas attacher une grande importance à cette précision. Dans son arrêt
Courrèges166.la cour d'appel de Paris a énoncé que « la sentence peut être annulée
lorsque son exécution est contraire à l'ordre public international, ce qui est notamment
le cas lorsque le tribunal arbitral a violé une règle d'ordre public international et
consacré une solution qui heurte cet ordre public ». L'annulation de la sentence
arbitrale internationale n'est encourue si son exécution heurte l'ordre public
international ou national167.

L'article 327-49 n°5 ne précise pas si la source de l'ordre public international est
marocaine, étrangère, ou encore s'il s'agit d'un ordre public « réellement international
», c'est-à-dire international par sa source. L'admission de l'une de ces sources
n'excluant pas nécessairement celle des autres, on les examinera successivement toutes
les trois.

Selon l'article 327-52 de la loi 08/05 « le recours en annulation prévu à l'article ...
est porté devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle la sentence a été rendue.. ».
Un tel critère ne peut trouver à s'appliquer qu'aux sentences arbitrales internationales
rendues au Maroc. Il est recevable dès le prononcé de la sentence et au maximum dans
les quinze jours de la notification de la sentence n'a pas été notifiée, le délai ne
commence pas à courir. Ce recours est suspensif de l'exécution sauf si l'exécution
provisoire est ordonnée.168
165
Philippe FOUCHARD, Emmanuel GAILLARD, Berthold GOLDMAN op.cit.
166
Marie-Noëlle JOBARD-BACHELLIER, «Ordre public international», Fasc. 534-2, J-CL éditions techniques
1992.
167
Revue d'arbitrage, 1992.110 note H.Synvet.
168
Article 327-53 de la loi 08/05.

1
Si le recours est admis, la sentence sera annulée. En cas de rejet du recours, la
décision de la Cour vaut automatiquement exequatur de la sentence arbitrale. Il est à
noter que la Cour d'appel ne peut statuer elle-même sur le fond du litige en raison du
renvoie opéré par l'article 327-54169.

Section II- Les voies de recours en matière


d’arbitrage :

Un recours consiste pour la partie qui a succombé à contester la validité de la


sentence arbitrale.170 Ce recours peut prendre plusieurs formes suivant sa finalité ;il
peut prendre soit la forme d'un appel devant l'autorité judiciaire tendant à ce que la
sentence soit réformée ou annulée sur un point de droit, soit la forme d'un recours en
annulation ou d'une demande de renvoi de la sentence au tribunal arbitral pour
révision.

Le recours peut prendre également, et c'est ce qui nous intéresse le plus, la forme
d'une demande en annulation au motif que l'objet du litige n'était pas arbitrable ou que
la procédure suivie n'a pas respecté les exigences d'un juste procès ou pour tout autre
motif considéré comme cas d'ouverture. L'objet du recours est clair : il consiste à
attaquer la sentence dans l'espoir qu'elle sera annulée ou du moins réformée d'une
manière qui profitera à la partie qui a formé le recours.
169
L'article 327-54 précise que « les dispositions de l'article 327-37 ci- dessus ne s'appliquent pas au recours en annulation
»et l'article 327-37 stipule que « lorsque la Cour d'appel annule la sentence arbitrale, elle statue sur le fond dans les limites
de la mission du tribunal arbitral sauf si l'annulation est prononcée pour absence de convention d'arbitrage ou pour nullité de
cette convention »
170
ASSOUSI AL ALAOUI Moulay Alkbir : « Les voies de recours relatives aux sentences arbitrales
commerciales en droit marocain », mémoire pour l’obtention du diplôme des études supérieures approfondies,
unité de formation et de recherche dans les systèmes d’arbitrage, université Med V-Souissi, Salé, 2006/2007.
p121-145 En arabe.

1
Les voies de recoures contre la sentence ou contre l'ordonnance de d'exequatur
changent d'un pays à un autre, ainsi certains systèmes étendent aux sentences arbitrales
le régime des jugements, d'autres prévoient des voies de recours propres à l'arbitrage.
Pour organiser les voies de recours contre les sentences arbitrales internationales, le
législateur marocain distingue d’une part, entre les voies de recours contre la sentence
arbitrale (§2) et les voies de recours contre l’ordonnance d’exequatur (§1), de ce fait
l’intervention du juge varie en fonction de l’objet du recours en question.

§1 : Les recours contre l’ordonnance de reconnaissance


ou d’exequatur :

En matière d’arbitrage international, l’article 327-51 al. 2 de la loi 08-05


dispose que l’ordonnance qui accorde l’exequatur d’une sentence rendue au Maroc
n’est susceptible d’aucun recours171. Toutefois, le recours en annulation emporte de
plein droit, dans les limites de la saisine de la cour, recours contre l’ordonnance du
président de la juridiction ou dessaisissement de ce président.

Cette règle a pour but de simplifier le régime des voies de recours, quant à
l’étendue du contrôle exercé par la cour d’appel, il est alors rigoureusement identique à
celui qui s’applique, à travers l’appel formé à l’encontre de la décision de
reconnaissance ou d’exequatur des sentences arbitrales172.

Contrairement aux articles 319 et 322 de l’ancien texte du CPC qui ne font pas
de distinction entre la sentence elle-même et l’ordonnance de son exequatur, l’article
327-48 de la nouvelle loi 08-05 précise que c’est l'ordonnance qui refuse la
reconnaissance ou l'exécution qui est susceptible d'appel. Alors que pour celle qui
accorde la reconnaissance ou l'exécution, l’appel n'est ouvert que dans certains cas
délimités par la loi173 :

 Lorsque le tribunal arbitral a été irrégulièrement composé ou


l’arbitre unique irrégulièrement désigné ;
 Si le tribunal arbitral a statué sans convention d’arbitrage ou sur
convention nulle ou après expiration du délai d’arbitrage ;

171
Cf. Mohamed IDRISSI AMRAOUI : « Le rôle du juge dans l’exécution des sentences arbitrales » in
séminaire : justice et affaires commerciales, programme Euro-Med justice, organisé à Athènes, du 12 au 15
Novembre 2007.
172)
Cf. FOUCHARD (Ph), GAILLARD (E), GOLDMAN (B) : « Traité de l’arbitrage commercial
international », édit. Litec, Paris, 1996.p 918.
173)
L'article 327-49 de la loi 08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre VIII du titre V du code de procédure
civile marocain.

1
 Si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui
lui avait été conférée ; c'est-à-dire a statué infra ou ultra petita.
 Lorsque les droits de la défense n’ont pas été respectés ; c'est-à-
dire le tribunal arbitral n’a pas respecté le principe du contradictoire ;
 Si la reconnaissance ou l’exécution sont contraires à l’ordre public
national ou international.

Lorsqu’il est admis, l’appel produit en principe un effet suspensif et un effet


dévolutif174. De ce fait, l’appel suspend l’exécution de la sentence. Mais il ne suspend
pas l’exécution provisoire lorsqu’elle est décidée, ainsi pour l’arbitrage international
l’article 327-53 la loi a prévu cette possibilité pour les deux voies de recours (l’appel
et le recours en annulation), en précisant que en plus de l’effet suspensif du délai de
recours, le recours exercé dans le délai est également suspensif, à moins que la
sentence arbitrale ne soit assorti de l’exécution provisoire.

Une partie de la doctrine175 a tendance à limiter la portée de l’effet dévolutif de


l’appel et à le réduire à la simple annulation de la sentence sans qu’il soit permis à la
cour d’appel de rejuger le litige au fond.

La question qui se pose ici c’est de savoir si la cour d’appel, lorsqu’elle est
saisie d’un tel recours, doit limiter son examen aux deux éléments du contrôle exercé
par le premier juge176 et sur le fondement desquels celui-ci a refusé ou accordé
l’exequatur, ou si elle doit, à l’issu d’un débat contradictoire, exercer un plein contrôle
de la sentence la conduisant à ne pouvoir réformer, le cas échéant, la décision
entreprise qu’après vérification complète du bien fondé de cette décision.

En matière d'arbitrage interne177. L’appel confère à la juridiction de second


degré la possibilité de connaître l'affaire en droit comme en fait, par conséquent le
juge d'appel peut annuler ou réformer une sentence arbitrale. Il importe de signaler
que la nouvelle loi 08-05 n’a donné la possibilité à la cour d’appel de statuer sur le
fond du litige que dans le cas d’annulation la sentence arbitrale et dans la limite de la
mission du tribunal arbitral à moins que l’annulation ne soit prononcée en raison de
l’absence ou la nullité de la convention d’arbitrage 178. Néanmoins, l'expérience nous
a montré que la plus part des cas sont des annulations que de réformation des
174)
Mohamed EL HARTI : « L’arbitrage commercial en droit marocain interne » in Travaux du colloque
organisé par le département de droit privé de la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Fès, le
4 et 5 Avril 2003. Publication de l’association de diffusion des données juridiques et judiciaires collection
conférences et journées d’études, n°2, 1ère édition 2004.
175)
Cf. Abdelhak JANATI-IDRISSI : « l’intervention du juge en amont et en aval de la sentence arbitrale » in
Revue marocaine des contentieux N° 5-6/2007.p.54.
176)
L’inexistence de la sentence ou sa contrariété manifeste à l’ordre public international.
177)
Art. 1482 NCPC français.
178)
Voir l’article 327-37 de la loi 08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre VIII du titre V du code de procédure
civile marocain.

1
sentences arbitrale. En outre la cours d'appel peut statuer en amiable composition
lorsque le tribunal arbitral est investi de cette mission.

Suite à l’absence en matière d’arbitrage international d’un texte analogue à


l’article 327-33 alinéa 2 du CPC marocain (l’équivalent de l’article 1489 NCPC
français) selon lequel, en matière d’arbitrage interne, l’appel de l’ordonnance qui
refuse l’exequatur donne à la cour d’appel la faculté de connaître de tous les griefs
susceptibles d’être adressés au fond à la sentence, a conduit certains auteurs 179 à
soutenir que la cour d’appel serait, dans une telle hypothèse, saisie d’un recours
gracieux et devrait se contenter d’exercer le même contrôle que celui qui est dévolu au
juge de l’exequatur lui-même.

D’autres auteurs se fondent sur l’intention du législateur de concentrer les


recours susceptibles d’être exercés à l’encontre de la sentence devant une seule
juridiction, la cour d’appel, pour conclure que, même si elle se trouve saisie par la voie
d’un recours à l’encontre d’une décision de refus d’exequatur, la cour d’appel doit
reconnaître, à l’issue d’un débat contradictoire, de l’ensemble des griefs susceptibles
d’être opposés à la sentence.

En droit français, le juge chargé de connaître de l’appel d’une ordonnance de


refus d’exequatur peut être appelé à se prononcer sur l’exécution provisoire de la
sentence. L’article 1479 du nouveau code de procédure civile français, applicable en
matière internationale du fait du renvoi opéré par l’article 1500 du même code, dispose
en effet que : « les règles sur l’exécution provisoire des jugements sont applicables
aux sentences arbitrales. En cas d’appel ou de recoure en annulation, le premier
président ou le magistrat chargé de la mise en état dès lors qu’il est saisi, peut (…)
ordonner l’exécution provisoire dans les conditions prévues aux articles 525 et 526 ».

Il résulte de ces textes que l’exécution provisoire « ne peut être ordonnée que
par décision qu’elle est destinée à rendre exécutoire », sauf en cas d’appel, au premier
président ou au conseiller de la mise en état, à l’accorder si elle n’a pas été
ordonnée180. Si elle été accordée en premier instance, le premier président, en cas
d’appel, peut l’arrêter « si elle est interdite par la loi » 181 ou « si elle risque d’entraîner
des conséquences manifestement excessives » (article 524 al.2).

De point de vue compétence, l’appel - intenté contre l’ordonnance qui accorde


ou qui refuse la reconnaissance ou l’exécution de la sentence arbitrale - est porté
devant la cour d’appel territorialement compétente à raison du siège de la juridiction
dont relève le président de la juridiction du commerce. L’ordonnance qui refuse
179)
FOUCHARD (Ph), GAILLARD (E), GOLDMAN (B) : « Traité de l’arbitrage commercial
international », édit. Litec, Paris, 1996.p 915.
180)
Article 525 et 526 du NCPC français.
181)
Article 524 al.1 du NCPC français.

1
l'exequatur est susceptible d'appel selon les procédures d'urgence et dans un délai de
quinze jours de sa notification182.

Au Maroc, Outre l’appel contre l'ordonnance de reconnaissance ou d’exequatur,


la sentence arbitrale rendue en matière d’arbitrage international peut faire l’objet d’un
recours en annulation dans les cas prévus à l’article 327-49.

§2- Les recours contre la sentence arbitrale.

Les réglementations modernes assimilent les sentences arbitrales aux décisions


judiciaires, en établissant à cet effet une série de recours contre les sentences arbitrales,
avec des délais variables et souvent longs et avec de longues listes de motifs qui
diffèrent énormément d’un système juridique à l’autre183. Face à un tel cadre, la loi
type CNUDCI, dans un but d’harmoniser la législation en la matière, a eu la vertu
d’améliorer cette situation de particularisme législatif, qui cause de graves soucis à
tous ceux qui interviennent dans l’arbitrage commercial international. La première
mesure d’amélioration consiste à n’admettre qu’un seul type de recours, à l’exclusion
de tout autre qui serait prévu par d’autres lois de procédure de l’Etat concerné. La
deuxième mesure de perfectionnement introduite par la loi type est l’établissement
d’une liste limitative des motifs pour lesquels la sentence arbitrale peut être déclarée
nulle par le juge national. Suivant les excellents résultats de la pratique internationale,
ladite liste, qui est contenue dans l’article 36, paragraphe 1, coïncide essentiellement
avec celle qui figure à l’article V de la Convention de New York.

La sentence arbitrale n’est, en aucun cas, susceptible de recours. Cette


interdiction été prévue par l’article 319 de l’ancien CPC, toutefois, selon la nouvelle
loi 08-05 modifiant le chapitre VIII du titre V du code de procédure civile marocain, la
sentence rendue au Maroc en matière d’arbitrage international peut faire l’objet d’un
recours en annulation dans les cas limitativement prévus à l’article 327-49 du CPC
marocain184.

En matière d'arbitrage institutionnel, le recours en annulation s'effectue devant


le centre d'arbitrage dont le règlement précise les moyens et les modalités de la
demande d'annulation185. Il faut noter que les lois modernes sur l'arbitrage, y compris

182)
Art.327-33 de la loi 08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre VIII du titre V du code de procédure civile
marocain.
183)
Voir par exemple, dans le système suisse, J. F. Poudret, « Les voies de recours en matière d’arbitrage
international en Suisse selon le concordat et la nouvelle loi fédérale », Rev. arb., 1988, pp. 595-628.
184)
Sont les mêmes cas prévus pour l’appel de l’ordonnance qui accorde la reconnaissance ou l’exécution de la
sentence arbitrale.
185)
Annulation des sentences CIRDI : sentence rendue le 21 octobre 1983 dans le litige opposant le groupe
allemand Klockner au Cameroun et annulée le 03 mai A985 ; sentence rendue le 20 novembre 1984 dans le litige
opposant le groupe américain AMCO à l’Indonésie et annulée le 16 mai 1986.

1
le droit marocain, confient le recours en annulation des sentences arbitrales à la
juridiction du siège du tribunal arbitral, même si la sentence est rendue en application
d'une loi étrangère186.

Conformément à l’article 327-52, les sentences arbitrales peuvent faire l’objet


d’un recours en annulation dans les formes ordinaires devant la cour d’appel dans le
ressort de laquelle elles ont été rendues. Ce recours est recevable dès le prononcé de la
sentence ; il cesse de l’être s’il n’a pas été exercé dans les délais dans les quinze jours
de la notification de la sentence déclarée exécutoire.

Dans la pratique, les cas d’annulation de sentences par la cour d’appel de Paris
sont rares. Il a fallu plus de 20 ans d’arbitrage international pour que cette cour annule
une sentence rendue sous l’égide de la CCI. La première annulation est l’arrêt sur les
pyramides d’Egypte. Depuis 1984, on a constaté 8 annulations de sentences arbitrales
(une tous les 2 ans)187.

Lorsqu’une sentence a fait l’objet d’une annulation dans un pays donné, il faut
solliciter l’exequatur de la décision d’annulation, sinon une sentence annulée dans ce
pays pourrait très bien être exécutée dans un autre pays. En effet, il est envisageable
qu’une sentence arbitrale frappée d’annulation ou de suspension d’exécution dans le
pays du siège de l’arbitrage soit reconnue et exécutée dans un autre pays188.

Quant aux sentences partielles, intermédiaires ou provisoires, peuvent-elles


faire l’objet d’un recours en annulation ? Les réponses à cette question varient en droit
comparé. En droit français et en droit Suisse (article 190 de LDIP) ce recours est
possible contre une sentence partielle voire une sentence de compétence 189. Au Maroc,
l’ancienne comme la nouvelle version du CPC sont muettes sur cette question.

La recevabilité du recours en annulation peut faire l’objet d’une stipulation


contraire par laquelle les parties renoncent au recours en annulation. Une
réglementation étatique clairement favorable à cette position figure dans l’article 192,
alinéa 1, de la loi suisse sur le droit international privé, qui a donné lieu dans la
Confédération à un développement jurisprudentiel opportun190, en vertu duquel la
186)
Cf. Abdelhak JANATI-IDRISSI : « l’intervention du juge en amont et en aval de la sentence arbitrale » in
Revue marocaine des contentieux N° 5-6/2007.p.54.
187)
Trois cas concernant l’absence de clause compromissoire valable. A chaque fois, c’est dans l’hypothèse
d’une personne qui a signé la clause sans avoir reçu le pouvoir de le faire ; deux cas concernent l’acte de
mission, les arbitres ayant statué ultra petita, trois cas concernent l’ordre public international.
188)
Voir dans se sens l’affaire Norsolor et l’affaire Hilmarton : dans la première affaire la cour de cassation
française a estimé que la convention de New York de 1958 n’interdit nullement de reconnaître et d’exécuter une
sentence annulée au siège de l’arbitrage (Suisse), et dans la deuxième affaire la cour de cassation française , par son arrêt du 10 mars
1993, a estimé que la décision des juridictions du siège de l’arbitrage de suspendre le caractère exécutoire de la
sentence ne fait pas obstacle à l’exécution en France au titre du droit commun.
189)
Cour d’appel de Paris, Arrêt du 10 novembre 1995, Verbiese contre SEE et autres.
190)
Dans la pratique, cependant, ce n’est qu’une possibilité que l’on offre aux parties quand il s’agit d’affaires
éminemment internationales et pourvu que la volonté de renonciation au recours soit claire et déterminée ; voir

1
renonciation au recours doit s’interpréter de façon stricte et rigoureuse, exigeant une
déclaration quasi-solennelle.

Le cas de la Suède, où la solution est l’œuvre de la jurisprudence, présente un


penchant similaire. A l’occasion du recours à l’encontre d’une importante sentence
arbitrale dans l’affaire CCI n° 2321, la Cour suprême dénia la possibilité d’admettre la
renonciation au recours en annulation intenté devant les tribunaux suédois. Dans
l’affaire en question, la Cour affirme que la clause type CCI ne peut pas être acceptée
comme une renonciation expresse au recours en annulation. Comme on peut le voir,
même si dans cette affaire précise on décida de refuser cette possibilité, la porte reste
ouverte dans le futur.

Le CIRDI constitue un cas particulier, où la sentence arbitrale ne passe pas


directement sous le contrôle étatique. En effet, le Centre prévoit dans son règlement
que le recours en annulation est examiné par une commission d’annulation nommée
par l’institution même.

Dans son effort de simplification des procédures auxquelles peuvent donner lieu
les sentences arbitrales rendues en matière international, le législateur marocain ne
prévoit que la demande de reconnaissance ou d’exécution et le recours en annulation,
de ce fait sont écartés toutes les autres voies de recours formulés contre la sentence
arbitrale. C'est-à-dire que ni l’appel proprement dit contre la sentence arbitrale, ni la
tierce opposition, ni l’action en révision ne sont recevables. Les parties ne seraient
déroger à ces règles, l’organisation des voies de recours étant traditionnellement
considérée comme d’ordre public.

L’exclusion de l’appel proprement dit (formé contre la sentence arbitrale), qui


permettrait à la cour d’appel de connaître du fond du litige, allait de soi en matière
internationale, même dans l’hypothèse dans lesquelles les parties n’ont pas pris soin de
stipuler expressément une telle exclusion. La reconnaissance de l’efficacité de la
convention d’arbitrage n’aurait en effet aucun sens si le litige devrait nécessairement
trouver son épilogue devant les juridictions étatiques à moins que les parties n’aient
accepté d’y renoncer. La nécessité d’une exclusion expresse pour éviter un tel résultat
est mal venue dans le régime de l’arbitrage interne. Elle aurait été totalement archaïque
en matière d’arbitrage international191, et ce d’autant plus que, par une décision très
critiquable, la deuxième chambre civile de la cour de cassation en France a estimé, en
matière interne, que la stipulation selon laquelle la sentence serait « définitive », ne
suffit pas à caractériser une renonciation non équivoque au droit d’interjeter appel 192.
Pourtant, les praticiens utilisent souvent cette expression dans l’intention d’exclure
arrêt du Tribunal fédéral du 9 avril 1991, Rev. arb., 1991, p. 709, avec note Y. Tschanz.
191)
Cf. sur la persistance d’une telle conception dans le droit anglais de l’arbitrage, dans lequel la possibilité
d’exclure le recours à la High court pour trancher certaines questions de droit au lieu et place des arbitres
demeure exclure dans certaines matières, Arbitration Act 1979, section 3.

1
tout appel alors qu’il faudrait dire « en dernier ressort ». Il convient de préciser que
l’exclusion de toute possibilité d’appel s’applique même lorsque les parties ont choisi
de faire régir l’arbitrage par la loi de procédure française.

A l’inverse, en matière internationale, les parties ne peuvent pas stipuler que la


sentence fera l’objet d’un appel devant les juridictions étatiques. En raison du
caractère impératif de l’organisation des voies de recours, une telle disposition est
nulle. La seule question délicate est alors celle du sort de la convention d’arbitrage
elle-même. Plusieurs décisions de la cour d’appel da Paris ont fait preuve d’une grande
rigueur en constatant que la nullité de la clause entraînait celle de l’entière convention
d’arbitrage au motif que la faculté d’appel était un élément déterminant de la volonté
des parties de recourir à l’arbitrage. Il est cependant arrivé que cette même cour
d’appel choisisse de sauver la convention d’arbitrage par voie d’interprétation. Ainsi,
par arrêt du 23 mai 1991, a-t-elle estimé que la disposition stipulant que « la sentence
à intervenir sera susceptible de recours devant la cour d’appel de Paris » n’exprime
pas la volonté claire des parties de soumettre la sentence arbitrale à la voie de
réformation de l’appel et ne peut en conséquence constituer un élément déterminant de
leur consentement dans la formation de leur convention d’arbitrage. L’ambiguïté sur la
nature du recours, voie de réformation ou précision - inutile – de l’existence d’un
recours en annulation, permet ici de valider la clause. La formule utilisée par les
parties dans l’affaire Diseno (« les parties se réservent toutefois le droit de faire appel
à la sentence devant la cour d’appel ») ne permettait pas une telle clémence.

En outre, la tierce opposition est également exclue en matière de l’arbitrage


international. Cette voie de recours aurait en effet conduit les juridictions étatiques, à
la demande de tiers, à connaître du fond du litige ; ce résultat aurait été directement
contraire à la volonté des parties de voir leurs différends tranché par des arbitres et à la
reconnaissance, particulièrement marquée en matière internationale, de la légitimité du
choix de ce mode de règlement privé des litiges. L’effet relatif de la convention
d’arbitrage et de la chose jugée par les arbitres suffit en outre à prémunir les tiers
contre toute incidence négative que la sentence pourrait avoir à leur égard. Le droit
marocain n’interdit pas cette voie de recours dans le cadre de l’arbitrage interne, ainsi
d’après l’article 327-35 du CPC : « les sentences arbitrales, même assorties de la
décision d’exequatur, ne sont pas opposables aux tiers qui peuvent, toutefois, faire
tierce opposition dans les conditions prévues par les articles 303 à 305 ci-dessus
devant la juridiction qui aurait connu de l’affaire s’il n’y avait pas eu de convention
d’arbitrage ».

192)
Cass. 2e Civ., 1er juillet 1992, Perma contre l’entreprise Maxime, in Revue d’arbitrage, 1995, p 63, note
critique Ch. Jarrosson.

1
La même observation est à relever à l’égard du recours en révision formé contre
la sentence arbitrale, qui demeure possible en matière d’arbitrage interne193, toutefois,
non prévu en matière d’arbitrage international.

En droit français, la disparition du recours en révision, ouvert avant la réforme


de 1981 contre les sentences arbitrales rendues en France, a suscité davantage de
controverses. Cette voie de recours, qui a remplacé l’ancienne requête civile, était
destinée à s’appliquer dans l’hypothèse de découverte, après le prononcé de la
sentence de l’existence d’une fraude, d’un faux ou de la dissimulation d’une pièce
décisive. Certains auteurs ont estimé que ces hypothèses étaient très rares et que les
parties disposent d’autres moyens pour faire sanctionner de telles irrégularités, « ne
saurait ce qu’au titre de la sauvegarde des droits de la défense ou de l’ordre
public »194. D’autres plus nombreux, ont au contraire regretté la suppression du recours
en révision, spécialement utile lorsque les délais de recours en annulation sont expirés
au moment de la découverte de fraude ou de faux.

Par une décision remarquée rendue dans l’affaire Fougerolle C. Procofrance, la


cour de cassation introduit de manière prétorienne un assouplissement à la règle de
l’exclusion du recours en révision. Elle a en effet jugé, tout en rejetant le grief au cas
d’espèce, qu’ « il résulte des principes généraux de droit en matière de fraude que,
nonobstant l’exclusion du recours en révision par l’article 1507 du NCPC, la
rétractation d’une sentence rendue en France en matière d’arbitrage international
doit être exceptionnellement admise en cas de fraude lorsque le tribunal arbitral
demeure constitué après le prononcé de la sentence »195.

C’est dire qu’au moins lorsque le tribunal arbitral peut être réuni, la cour de
cassation n’introduit pas de nouvelle voie de recours devant les juridictions à
l’encontre de la sentence mais permet aux arbitres eux-mêmes de tenir compte de
circonstances qui leur auraient échappé du fait de la fraude. La question des moyens de
porter remède à la fraude lorsque le tribunal arbitral ne peut plus être réuni, reste
ouverte. Une partie importante de la doctrine appelle de ses vœux d’admission, au
moins dans une telle hypothèse, d’un recours judiciaire.

Par ailleurs, sans ouvrir de nouvelle voies de recours, la jurisprudence sollicite


la notion d’ordre public au sens de l’article 1502 5 e du NCPC Français pour juger de
l’existence de manœuvres destinées induire en erreur la décision des arbitres rend,
lorsque ces manœuvres ont été efficaces, l’exécution de la sentence rendue dans de
telle conditions contraire à l’ordre public international. C’est ce qu’a jugé, dans
193)
Voir article 327-34 du CPC marocain abrogé et remplacé par la loi 08-05 du 06/12/2007.
194)
Cf. FOUCHARD (Ph), GAILLARD (E), GOLDMAN (B) : « Traité de l’arbitrage commercial
international », édit. Litec, Paris, 1996.p 932.
195)
Cass. 1er Civ., 25 mai 1992, Fougerolle C. Procofrance, JDI, 1992, 974, note E.Loquin. Rev. crit.DIP, 1992,
699, note B.Oppetit ; Rev.arb., 1993, 91 avec le commentaire de M. de Boisséson, p 3 ; yearbook, 1994.205.

1
l’affaire European Gas Turbines, la cour d’appel de Paris le 30 septembre 1993 dans
une espèce dans laquelle des documents ultérieurs en fait ressortir que l’état détaillé
des dépenses produit devant les arbitres et sur le fondement duquel la sentence a été
rendue ne correspondait à aucune réalité.

Des controverses analogues existent en droit comparé. Certaines lois récentes


ont en effet admis le jeu du recours en révision en matière d’arbitrage international 196,
tandis que d’autres l’ont écarté. C’est le cas de la loi-type de la CNUDCI, qui ne fait
pas d’avantage de l’existence de la fraude, de la corruption ou de la découverte d’un
faux, une cause distincte de l’annulation au motif que l’annulation pour violation de
l’ordre public international suffirait à couvrir la plupart de ces hypothèses. C’est le cas
également de la loi Suisse de droit international privé de 1987 ou de droit italien
résultant de la réforme de 1984(197). De nombreux auteurs ont cependant soutenus
qu’en droit Suisse, il s’agissait d’une omission involontaire, que la jurisprudence
pourrait combler sans texte. C’est ce qu’a fait le tribunal fédéral en Suisse le 11 mars
1992 suivant une démarche analogue à celle de la cour de cassation française, avec
cette différence toutefois qu’il admet que le recours puisse être porté devant le tribunal
fédéral lui-même, qui renverra, en cas de succès de l’action, devant les arbitres pour
qu’ils statuent sur le fond.

Il est en principe vrai que le juge national ne doit pas réaliser un examen de
fond de la sentence arbitrale ; mais, comme il arrive souvent, cela ne peut être affirmé
sans nuance que dans les cas non controversés. Parce que, même dans les conceptions
les plus « arbitralistes », la limite de l’ordre public impose une exception à cette
affirmation198. Il est vrai que, en cas d’erreur dans l’appréciation réalisée par les
arbitres, le fond ne fait pas en principe l’objet de révision.

L’arbitrabilité du différend gagne du terrain au fur et à mesure que l’arbitrage


devient habituel entre les participants du trafic commercial international. C’est ainsi
que des terrains traditionnellement « incommodes » à l’arbitrage, comme le droit de la
concurrence ou de la propriété industrielle, le droit des sociétés multinationales, font
aujourd’hui banalement l’objet de jugement d’arbitres internationaux199. Cependant,
cette progression dans le secteur des matières arbitrables a un prix : si l’arbitrage
s’engage sur des terrains affectés par les intérêts généraux ou par des politiques
législatives de protection, il doit tenir compte du terrain où il s’engage et être conscient
196)
Voir par exemple l’article 1068 du CPC néerlandais, Adde, en matière d’arbitrage CIRDI, l’article 51, § 1, de
la convention de Washington.
197)
Art. 838 CPC qui exclut, sauf volonté contraire des parties, l’article 831 relatif au recours en révision et tierce
opposition, Rev. Arb., 1994. 581, spéc.p. 592, avec le commentaire de P. Bernardini, p. 479.
198)
P. Fouchard, E. Gaillard et B. Goldman : « Traité de l’arbitrage commercial international », op. cit., p.
958, insistent sur le fait que la jurisprudence française n’a jamais contrôlé les appréciations de fond réalisées par
le juge, mais ils ajoutent l’exception de l’ordre public international.
199)
Mais cette appréciation est plus pratique que théorique, et encore moins de source légale. C’est une
construction basée sur la tolérance étatique.

1
qu’il traite de matières étroitement surveillées par les Etats. L’entrée de l’arbitrage
dans ces secteurs du système juridique a un rapport proportionnel avec l’augmentation
du contrôle sur le fond.

Table de matières
Première partie
La convention d’arbitrage
CHAPITRE I- L’AUTONOMIE DE LA CLAUSE COMPROMISSOIRE :...............................7

Section I- L’autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal :..................9

§1- Signification de l'autonomie matérielle :................................................................................9

A- Survie de la clause compromissoire au contrat principal :................................................10

a) Absence de vices affectant le contrat principal :............................................................10

b) Difficultés: nullité ab initio et inexistence du contrat principal :...................................12

B- Différenciation des lois applicables à la clause compromissoire et au contrat :...............12

a) Possibilité de deux lois différentes :...............................................................................12

b) Le silence des parties :...................................................................................................13

§2- Limite au principe d'autonomie: la séparabilité :.................................................................14

A- Séparabilité: la clause compromissoire comme contrat ou comme simple clause?..........14

a) La clause compromissoire comme contrat autonome :..................................................14

1
b) La clause compromissoire, clause d'lin contrat unique :................................................15

B- La notion d'accessoire: fondement et limite de la séparabilité :........................................16

a) Fondement de la séparabilité de la clause compromissoire :.........................................17

b) Limite à la séparabilité de la clause compromissoire :...................................................17

Section II- L'autonomie de la clause compromissoire....................................................................19

par rapport à la loi étatique :...........................................................................................................19

§1- Signification de l'autonomie de rattachement :....................................................................19

A- Abandon de la méthode conflictualiste :...........................................................................19

B- Contenu de la règle matérielle :.........................................................................................21

§2- Limite au principe d'autonomie: le contrôle de la clause :...................................................22

A- Référence à la volonté commune des parties :..................................................................22

B- Limite fixée par l’ordre public international :...................................................................23

CHAPITRE II- FORMATION DE LA CONVENTION D’ARBITRAGE :..............................24

Section I- Les conditions de fond de formation de conventions d’arbitrage :................................25

§1- le consentement à l’arbitrage :.............................................................................................25

A- Les conditions de validité du consentement :....................................................................27

B- Les vices du consentement :..............................................................................................28

§2- L’arbitrabilité :.....................................................................................................................28

A- Les personnes qui peuvent recourir à l’arbitrage :............................................................28

a) Les personnes physiques :..............................................................................................29

b) Les personnes morales de droit privé :...........................................................................31

c) Les personnes morales de droit public :.........................................................................32

B- les matières qui peuvent être soumises à l’arbitrage :.......................................................33

Section II- les conditions de forme :...............................................................................................37

§1- l’exigence d’un écrit :...........................................................................................................37

A- La clause compromissoire :...............................................................................................37

B- le compromis :...................................................................................................................39

§2- la preuve en matière de conventions d’arbitrage :................................................................39

1
Deuxième partie
L'instance arbitrale

CHAPITRE I- LE TRIBUNAL ARBITRAL :......................................................................42

Section I- La constitution du tribunal arbitral :..............................................................................43

§1- Les conditions de constitution du tribunal arbitral :.............................................................43

A- La règle de l'imparité :.......................................................................................................43

B-L'acceptation de sa mission par l'arbitre :...........................................................................44

§2- La désignation des arbitres :.................................................................................................44

A- les conditions de désignation :...........................................................................................44

a)les conditions légales.......................................................................................................44

b) les conditions de fait :....................................................................................................46

B- Les modalités de désignation :...........................................................................................48

a) arbitrage ad hoc..............................................................................................................48

b) arbitrage institutionnel :.................................................................................................50

c) arbitrage multi partie......................................................................................................50

C- Difficultés de désignation du tribunal arbitral :.................................................................51

Section II-La compétence du tribunal arbitral :..............................................................................53

§1- le principe de la compétence-compétence :..........................................................................53

A-L’effet positif : la compétence des arbitres :......................................................................54

a) Aspect positif de la Compétence-Compétence :.............................................................56

b) Aspect négatif de la Compétence-Compétence :............................................................57

B- l’incompétence des juges :.................................................................................................58

§2- la compétence des arbitres à l’égard des mesures provisoires et conservatoires :...............60

A- Efficacité spontanée des mesures conservatoires de l'arbitre :..........................................62

B-L'efficacité subordonnée à l'intervention du juge :.............................................................63

CHAPITRE II- LE DROIT APPLICABLE EN MATIÈRE D’ARBITRAGE :.........................68


1
Section I- La loi applicable à la procédure d’arbitrage :................................................................70

§1- Le choix de parties :.............................................................................................................70

§2- La détermination de la loi par les arbitres :..........................................................................71

Section II- Droit applicable au fond de litige :...............................................................................73

Troisième partie
La sentence arbitrale

CHAPITRE I- PARTICULARITÉS DE LA SENTENCE ARBITRALE :................................76

Section I- Nature juridique de la sentence arbitrale :.....................................................................77

§1- la sentence arbitrale : un acte juridictionnel d'une nature particulière :...............................77

§2- Cas de la sentence au deuxième degré :...............................................................................78

Section II- Conditions de la sentence arbitrale :.............................................................................79

§1- Conditions de fond :.............................................................................................................79

§2- Conditions de forme :...........................................................................................................80

CHAPITRE II- LA RECONNAISSANCE ET L’EXEQUATUR DES SENTENCES


ARBITRALES :................................................................................................................82

Section I- Distinction entre reconnaissance et exequatur...............................................................83

§1- Notion de reconnaissance :...................................................................................................83

§2- Notion d'exequatur :.............................................................................................................84

Section II- Portée de la distinction entre la reconnaissance et l'exequatur :...................................85

§1- Conditions de la reconnaissance et de l'exequatur de la sentence arbitrale.........................86

1
§2- Problèmes de compétence juridictionnelle et de procédure.................................................87

A- Juridiction compétente pour la reconnaissance et l'exequatur :........................................87

B- Procédure d'exequatur :.....................................................................................................88

§3- Suites possibles de la décision sur l'exequatur.....................................................................89

A- Refus de l'appel contre la décision qui accorde l'exequatur :...........................................89

B- Possible Cassation De La Décision Qui Refuse L'exequatur :........................................90

C- Rôle du juge du contentieux de l'exécution :....................................................................90

CHAPITRE III- ANNULATION ET VOIES DE RECOURS CONTRE LA SENTENCE


ARBITRALE :..................................................................................................................91

Section I- L’annulation de la sentence arbitrale :...........................................................................92

§1- Les causes d'annulation de la sentence arbitrale interne :....................................................92

A- Les causes d'annulation devant être invoquées par les parties :........................................93

B- La cause d'annulation examinée d'office par le juge : violation de l'ordre public :...........96

§2- L'annulation de la sentence arbitrale internationale par les juridictions marocaines :.........98

Section II- Les voies de recours en matière d’arbitrage :.............................................................102

§1 : Les recours contre l’ordonnance de reconnaissance ou d’exequatur :..............................102

§2- Les recours contre la sentence arbitrale.............................................................................105

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