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La pratique de la méditation
Beaucoup de courants de la pensée extrême-orientale semblent
converger ou se concrétiser dans la pratique de la méditation
que l’on retrouve sous différents noms dans toutes les cultures
de l’Asie (Dhyana, Jhana, Chan, Zen…). Les finalités de ces
pratiques peuvent varier considérablement d’une école de
pensée à l’autre.
La méditation bouddhiste prends en Chine le nom de Chan et au
Japon le nom de Zen, des techniques différentes qui visent à
obtenir des états de conscience spécifiques appelés “satori” ou
“kensho” assimilables à un éveil de la conscience, provisoire
pour le kensho, définitif pour le satori.
L’école chinoise rinzaï qualifiée de “subitiste” (Linzi) critique
les états de transe prolongés et enstatiques que cherchent à
obtenir les pratiques méditatives de certaines autres écoles
(soto) et définit le but de la pratique comme un “éveil subit”
sans modification ni altération particulière de la conscience
quotidienne. Cette expérience particulière du satori se traduisant
naturellement et obligatoirement par une plus grande efficacité
dans les actes de la vie quotidienne.
La culture des états modifiés de la conscience en extrême-
orient
Il semble que pour l’extrême-orient la compréhension du monde
réel ainsi que l’efficacité dans les domaines pratiques ne soit pas
liée exclusivement à la compréhension intellectuelle mais plutôt
à des états de conscience particuliers. La pensée extreme-
orientale étant par essence pragmatique et syncrétiste, tous les
courants philosophiques évoqués plus haut peuvent se retrouver
dans la pratique des arts martiaux.
Face à une situation extrême au cours de laquelle son pays se
trouvait en guerre contre la Chine, le 13e Dalaï-Lama,
prédécesseur de l’actuel, expliquait qu’il entrait en état de
méditation “... Afin d’élever son esprit et lui permettre de
trouver une solution aux problèmes de son pays”.
Les arts martiaux se sont développés dans des contextes divers.
Contexte de guerre, de résistance à un envahisseur pour certains
ou d’exaltation idéologique pour d’autres.
D’autres arts martiaux se sont développés dans un contexte de
prospérité avec une recherche esthétique, gymnique ou de la
performance sportive.
La référence à l’esprit guerrier est courante de nos jours dans les
séminaires de motivation des cadres des entreprises japonaises
(L’idée d’une “guerre économique” contre le reste du monde fut
longtemps évoquée dans les années 80 par le MITI).
Cet “esprit des arts martiaux” a été aussi fréquemment cité et
commenté dans les techniques modernes de « dynamisation »
des cadres dans les entreprises occidentales européennes et
américaines.
On y fait aussi fréquemment référence dans les stages
d’évolution personnelle ou développement personnel
s’inscrivant dans l’esprit du courant des thérapies humanistes
américaines (human potential movement).
Sont aussi fréquemment cités en exemple, les traités chinois de
stratégie tels que le Sunzi fa bing (l’art de la guerre de Sunzi) ou
les “trente-six stratagèmes” qui sont les fondements intellectuel
et tactique de nombreuses écoles d’arts martiaux asiatiques mais
aussi des écoles de guerre occidentales...
Les arts martiaux sont des pratiques répandues dans toutes les
cultures et que l’on retrouve sous des formes diverses à toutes
les époques de l’histoire du monde.
Les arts martiaux utilisent et induisent par leur pratique
certaines formes spécifiques de trance ou d’états modifiés de la
conscience. Ces états sont indispensables pour supporter les
rigueurs de l’entrainement traditionnel et sont le seul moyen
d’affronter les risques d’un combat qu’il soit sportif ou réel.
Ces techniques sont issues de “l’art de la guerre” d’anciennes
civilisations et s’inscrivent dans divers contextes culturels:
défense de la communauté, résistance à un envahisseur ou à un
agresseur interne ou étranger.
Ces contextes sont souvent particulièrement exigeants et
rigoureux, la peur y est omniprésente ainsi que la recherche de
formes de réassurance.
Dans ce cadre, la trance est assimilable à un mode se survie,
c’est le seul moyen de vivre normalement dans une situation
constante de menace, de défi ou de risque vital.
L’affrontement à mains nues ou au « corps à corps » semble être
une constante de toutes les cultures humaines et ne semble pas
avoir totalement disparu à l’époque moderne ou les
affrontements inter humains sont devenus plus
« technologiques ».
Cette « trance martiale » est caractérisée par un silence intérieur
associé à une vigilance particulière et à une imperturbabilité.
Les combattants ne sentent pas ou peu la douleur au moment du
combat. Le temps ainsi que l’espace acquièrent des propriétés
particulières et semblent subir diverses distorsions dans l’esprit
des combattants. Des ressources particulières apparaissent
conduisant souvent à des actes particulièrement efficaces
(“geste ultime”) ou à des comportements héroïques, c’est à dire
émancipés de toute peur.
Ces transes martiales sont induites et accentuées par des rituels
spécifiques composés de gestes sacrés, de formules, de danses
ou de chants rituels (dont l’effet sur les combattants à pu être
comparé à celui du rituel du Naven décrit par Gregory Bateson)
Nous terminerons cette présentation par une évocation de la
figure du “guerrier solitaire” dans la technique
cinématographique. Les ralentis des films de John Woo
évoquent la distorsion temporelle de la trance. Cette technique
est particulièrement utilisée dans son film “ the killer” au
moment des scènes de meurtres. On retrouve le même type de
procédé dans toute la filmographie du cinéma d’arts martiaux.
Le ralenti évoque la dilatation ou l’allongement subjectif du
temps. Les prises de vues évoquent l’absence de vécu
émotionnel ou le contrôle total des émotions, la vigilance
accrue, la sensation d’accélération de l’esprit dans le combat
ainsi que le caractère sacré de ce combat, fut il un acte criminel.
Le silence intérieur et la vigilance deviennent un mode de vie
chez le héro tueur incarné par l’acteur Chow Yun Fat au même
titre que chez le personnage incarné par Alain Delon dans “le
Samouraï” de Melville dont le film de John Woo est largement
inspiré. Le monde semble s’écouler autour de ces deux
personnages comme un spectacle lent, vécu depuis l’extérieur et
totalement maîtrisé. L’irruption de l’émotion à travers le
personnage de la chanteuse aveugle est dans ces deux films le
signe du commencement de la fin, car le héros redevient humain
et donc vulnérable.
BIBLIOGRAPHIE