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Mobilité durable

Louiselle Sioui, Ing PhD

Planifier la mobilité durable

Résumé

Le domaine des transports est au cœur de changements profonds, renforcé par l’engouement plus
global qu’inspire la mise en œuvre du développement durable. Il ne s’agit plus planifier et agir
uniquement en termes de transport, mais plus largement en termes de mobilité durable. Ce texte
explique d’abord le contexte ayant mené à ce changement de paradigme, ainsi que ce en quoi consiste
la mobilité durable. Ensuite, il présente plusieurs grands principes fondamentaux de la mobilité durable,
qui s’appliquent pour le transport des personnes et celui des marchandises.

Une transformation du domaine des transports

Qu'est-ce que la mobilité durable?

Les notions principales en matière de mobilité durable

Conclusion

Références

Pour en savoir plus

Une transformation du domaine des transports

Durant les décennies précédant les années 1990, la planification des transports s’inscrivait dans la
logique traditionnelle Prévoir et fournir. Cette logique repose sur l’hypothèse que les demandes de
déplacements et de circulation automobile sont croissantes. Les planificateurs tentent donc de prévoir
cette croissance et, puisque le temps en déplacement est perçu comme une perte monétaire, leur
objectif principal est de minimiser les temps de trajet routier et, par le fait même, de minimiser la
congestion automobile. Sans contrainte ni d’espace ni de budget, la solution mise de l’avant est la
réalisation de nouvelles constructions routières. À l’époque, les augmentations de capacités routières
sont considérées comme des synonymes de compétitivité économique et de création de richesse.
Dans le milieu des années 1990, on constate que la seule augmentation de la capacité routière ne
permet pas de diminuer la congestion : en fait, plusieurs facteurs interreliés entrent en jeu, notamment
l’augmentation de la capacité routière elle-même, de la population active, de la possession automobile,
de l’activité économique et de l’étalement de l’urbanisation. De plus, les coûts d’entretien des
infrastructures routières grugent le budget autrefois alloué aux nouvelles constructions routières. Une
nouvelle logique de planification reposant sur la gestion de la demande est mise de l’avant : le Nouveau
réalisme. Elle met l’accent sur la conservation des réseaux existants, sur la fiabilité des systèmes et sur la
stabilisation des temps de parcours.

Simultanément à cette nouvelle logique, la volonté de mise en œuvre du développement durable prend
de l’ampleur et accroît les préoccupations liées aux impacts négatifs de l’utilisation abondante de
l’automobile sur l’environnement, notamment le bruit, la pollution de l’air et la consommation de
pétrole. C’est plus tard, au début du XXIe siècle, que la dimension sociale du développement durable
(santé publique, qualité de vie, équité d’accès, etc.) devient une réelle préoccupation. Issu à la fois de la
logique de gestion de la demande et du développement durable, le principe de mobilité durable guide
aujourd’hui les planificateurs et les acteurs dans le domaine des transports.

Qu'est-ce que la mobilité durable ?

Il n’existe pas de définition unique de la mobilité durable. Être à la recherche d’un mode de vie durable
implique nécessairement de tendre vers une mobilité durable, car, parmi d’autres facteurs, la mobilité
est requise pour combler nombre de besoins ou de désirs : elle s’avère essentielle au mode de vie. Le
concept de mobilité durable cherche d’abord à favoriser l’accès aux activités, aux biens et aux services.
En parallèle, il vise à réduire le nombre de véhicules motorisés dans l’espace public, qu’ils soient
stationnés ou en circulation. En effet, ces véhicules engendrent de nombreux effets négatifs que l’on
cherche à minimiser : pollution, coût de construction et d’entretien des réseaux de transport, accidents,
utilisation d’espace au sol peu valorisé, fragmentation de l’habitat naturel, perte de temps en
congestion, participation à la sédentarité des modes de vie, etc.

Le Cadre d’évaluation de la mobilité durable (Sioui, 2014) est un outil interactif offrant un tour d’horizon
des impacts bénéfiques ou néfastes de la mobilité des personnes sur les trois dimensions du
développement durable (Figure 1).

Figure 1. La Pieuvre, schéma statique des enjeux de la mobilité durable (Figure 3-3 dans Sioui, 2014)
fiche.1

Les différentes variantes de définitions de la mobilité durable découlent généralement d’une extension
du concept de développement durable à la mobilité ou aux transports. Les trois dimensions du
développement durable (environnementale, sociale, économique) servent souvent de guide lors de la
recherche des enjeux principaux liés à la mobilité durable. La définition proposée par le ministère des
Transports du Québec dans l’encadré en est un exemple. Notons qu’en raison de la présence d’acteurs
très différents, la mobilité des personnes et celle des marchandises sont souvent abordées séparément.
Elles sont pourtant reliées, notamment par le fait qu’elles partagent souvent les mêmes réseaux de
transport.

S’inspirant de la définition du Centre pour un transport fiche.2durable (2002), le ministère des


Transports du Québec définit la mobilité durable dans son Plan stratégique 2017-2020 (MTMDET,
2018a). La mobilité durable :

permet de satisfaire aux principaux besoins d’accès, d’échange et de développement d’une manière
sécuritaire et compatible avec la santé des personnes et des écosystèmes, de façon socialement
responsable et équitable entre les hommes et les femmes et entre les générations;

offre un choix de modes de transport accessibles et abordables, qui fonctionnent efficacement,


soutiennent une économie dynamique et contribuent au développement des communautés sur tout le
territoire;

respecte l’intégrité de l’environnement en limitant les émissions polluantes, les déchets ainsi que la
consommation d’espace, d’énergie et d’autres ressources, de même qu’en réutilisant et en recyclant ses
composantes et en minimisant les sources de nuisances sonores.

Les notions principales en matière de mobilité durable

Durant les dernières décennies, le nombre de déplacements motorisés privés s’est accru. Cette
croissance résulte de plusieurs phénomènes interdépendants, dont l’émancipation des femmes et leur
accession au marché du travail, la croissance de la population, la hausse du niveau de vie des ménages,
le développement peu dense des nouvelles zones urbaines, etc.
Or, on se préoccupe de plus en plus des impacts négatifs de cette croissance des déplacements
motorisés privés sur la santé publique, sur l’aménagement du territoire, sur l’environnement et sur
l’économie. On cherche donc à réduire les impacts négatifs des transports motorisés. Une infographie
du Sustainable Urban Transport Project (2016) propose 10 principes à suivre pour un transport urbain
durable.

Les sept sections suivantes présentent un survol des principales notions et pistes de solution à
considérer en planification de la mobilité durable :

Limiter le nombre de déplacements effectués sans limiter l’accès aux opportunités;

Encourager la multimodalité par un transfert modal de l’auto-solo vers des modes actifs et collectifs;

Favoriser l’intermodalité;

Rendre les réseaux de transport universellement accessibles;

Modifier l’aménagement du territoire;

Promouvoir les véhicules propres;

Innover grâce aux technologies de l’information.

Limiter le nombre de déplacements effectués sans limiter l'accès aux opportunités

Une des solutions mises de l’avant pour réduire la circulation routière est de limiter directement la
croissance du nombre de déplacements. Toutefois, cet objectif est délicat, car il peut entrer en
contradiction avec un autre objectif fondamental de la mobilité : celui d’amélioration de l’accès aux
activités, aux opportunités d’emploi, aux biens et aux services. Ainsi, les planificateurs en transport
cherchent principalement à réduire le nombre de déplacements qui génèrent beaucoup d’impacts
indésirables, tels que ceux motorisés à essence, notamment en auto-solo et par camion pour le
transport des marchandises.

On vise notamment la réduction des déplacements de type « taxi familial » : plusieurs personnes se
déplacent pour reconduire et aller chercher des membres de leur famille, alors que ce n’est pas eux qui
réalisent l’activité, mais bien leur passager. Un exemple sont les parents qui effectuent plusieurs aller-
retour en voiture pour amener leur enfant à l’école ou à une activité parascolaire. Une solution réside
dans l’organisation d’un transport sécuritaire, que ce soit un pédibus pour les plus jeunes, un parcours
piéton et cyclable sécuritaire, ou un transport par autobus adapté aux besoins des jeunes. Vélo-Québec
en 2015 propose le programme À pied, à vélo, ville active pour accompagner les milieux municipaux, de
la santé et scolaire dans cette démarche.
Aussi, le recours à Internet et à l’informatique se substitue à certains déplacements. Les destinations
vers certains des points de service sont de moins en moins courantes. Par exemple, aller à la banque est
remplacé par une gestion en ligne du portefeuille. De plus, les communications et les services à distance
rendent de plus en plus efficace le télétravail.

Dans le domaine des marchandises, on s’aperçoit que la distribution locale multiplie le nombre de
camions voyageant vides ou presque vides. Des stratégies d’amélioration de la chaîne logistique en
entreprise peuvent être mises de l’avant. La ville de La Rochelle en France a instauré en 2001 un
système de livraison de marchandises par camionnettes, permettant de regrouper l’acheminement local
des marchandises au centre-ville, et ainsi réduire dans cette zone le navettage de camions (Projet Elcidis
de la Commission européenne, 2002).

Encourager la multimodalité par un transfert modal de l'auto-solo vers des modes actifs et collectifs

Réduire le nombre de véhicules en circulation et stationnés implique de transférer des déplacements


réalisés en véhicule motorisé vers des modes collectifs ou actifs.

Dans le domaine de la mobilité personnelle, il s’agit principalement d’amener les citoyens à passer du
mode auto-solo (auto-conducteur seul dans sa voiture) vers un mode collectif (transport en commun,
covoiturage) ou un mode actif (marche, vélo, trottinette, planche et patins à roulettes). Idéalement, tous
les transferts modaux se font dans le sens proposé à la Figure 2, soit de l’auto-solo vers le covoiturage
collectif (avec un voisin, un collègue, etc.), vers le transport en commun, vers le transport actif. En effet,
suite à une intervention, il n’est pas souhaité que des déplacements initialement réalisés à pied ou en
autobus soient maintenant faits en covoiturage… de la même façon, l’objectif n’est pas que les cyclistes
effectuent dorénavant leur trajet en autobus. Bien que cela semble évident, en pratique, une
amélioration à un service de transport peut vraisemblablement attirer des usagers qui n’étaient a priori
pas visés.

Figue 2.Transfert modal visé pour la mobilité des personnes

fiche.3
Il est également de mise de favoriser la multimodalité, qu’Équiterre (2011) nomme Cocktail transport, ce
qui sous-entend d’offrir une variété d’options de transport, et donc d’améliorer l’offre des transports
collectif et actif. Il est également de mise de sensibiliser les citoyens à choisir l’option la plus appropriée
à chaque déplacement. L’Association des transports du Canada (ATC, 2014) a résumé les stratégies
possibles à mettre en place pour influencer le choix modal.

Aussi, il est reconnu que la possession d’une automobile facilite le recours par défaut au mode
automobile. L’accès à un service d’autopartage rend au contraire moins systématique le recours à
l’automobile, car il encourage une réflexion sur le mode approprié pour chaque activité planifiée, qui
dépend de la distance à parcourir, de l’horaire, des objets transportés, etc. Le vélopartage est un autre
mode partagé qui améliore la flexibilité modale des individus.

Quant au transport des marchandises, actuellement, c’est le transport par camion qui prédomine sur le
continent nord-américain. Cela va probablement de pair avec la croissance des livraisons à domicile et
du principe « juste-à-temps » appliqué dans la gestion des stocks de marchandises. Puisqu’incombant
majoritairement au secteur privé, il en découle une organisation fragmentée, avec très peu de vision
d’ensemble. Adopter un point de vue multimodal implique de penser à d’autres modes plus collectifs,
par exemple aux transports aérien, ferroviaire et maritime. D’ailleurs, des initiatives sont mises de
l’avant au sein du ministère des Transports (MTMDET, 2018b) sous forme de programmes de subvention
à l’amélioration des plateformes intermodales en transport de marchandises et de l’efficacité
énergétique.

Favoriser l'intermodalitéfiche.6

Pour plusieurs raisons, comme un manque de flexibilité ou de proximité des services de transport en
commun, l’automobile demeure l’option mise de l’avant par les citoyens… Dans ces cas, une solution
préconisée est basée sur l’intermodalité, qui implique l‘utilisation de plusieurs modes de transport lors
d’un même déplacement. Les agencements modaux possibles sont multiples. Les plus couramment
mentionnés sont l’automobile (comme conducteur ou passager) et le transport en commun, ainsi que la
marche et le transport en commun.

Pour les planificateurs, leur rôle est de faciliter le passage d’un mode à l’autre lors des déplacements.
Cela comprend notamment de s’assurer d’un maximum de connectivité entre les différents réseaux de
transport, de la présence d’infrastructures de stationnement, d’aires de débarquement et d’attente
confortables et sécuritaires, ainsi que d’une signalisation efficace. Paradoxalement, le succès du bimodal
automobile conducteur & transport en commun s’accompagne d’une problématique de stationnement
aux abords du point d’accès au transport en commun.
En transport des marchandises, les lieux de transfert modal, nommés « pôles logistiques », peuvent être
améliorés en termes, par exemple, de fluidité de la circulation, de sécurité, d’adaptation de la géométrie
aux véhicules de grande dimension, de facilité d’accès, etc. Un document du Conseil de la science et de
la technologie (2010) dresse le portrait des pratiques, des acteurs, des défis et des solutions pour mieux
comprendre et améliorer les chaînes logistiques en général.

Rendre les réseaux de transport universellement accessibles

Par souci d’équité sociale, les personnes les plus vulnérables de notre société ne doivent pas être
contraintes soit à rester chez elle, soit à acheter une automobile.

D’un côté, les personnes qui ne peuvent conduire – notamment les jeunes, les personnes à mobilité
réduite et les personnes âgées – doivent pouvoir accéder autrement qu’en auto aux services de santé,
aux commerces et, dans le cas des jeunes, aux établissements scolaires. Au Québec d’autant plus, la
proportion de personnes âgées est appelée à augmenter. Les infrastructures de transport doivent donc
être aménagées pour ces groupes vulnérables, en facilitant et en sécurisant les accès piétons et
cyclables. Les éléments critiques sont les points d’accès et de transfert en transport en commun, les
véhicules de transport en commun, les intersections de rue, les traversées de rue, etc.

D’un autre côté, même si elles détiennent un permis de conduire, la possession d’un véhicule pèse très
lourd dans le budget des personnes à faible revenu. Lorsqu’elles ne peuvent se payer un véhicule,
l’accès aux emplois devient une problématique importante et devient source d’exclusion sociale. Ainsi, il
incombe aux planificateurs d’assurer une offre de transport qui réponde au besoin des personnes à
faible revenu, tant en termes tarifaire que de desserte. Alors que le transport en commun est reconnu
comme un service de transport peu coûteux individuellement, d’autres options sont également à
considérer : marche, vélo, autopartage, etc.

Modifier l'aménagement du territoire

L’environnement bâti joue un rôle non négligeable en ce qui a trait aux choix de mobilité, notamment en
influençant les distances de déplacement et l’attractivité des transports actifs et collectifs. S’attaquer à
ces enjeux nécessite une meilleure intégration entre la planification de l’aménagement du territoire et
des transports. Le Ministère des transports de l’Ontario en 2012 publie un guide répertoriant les
pratiques d’aménagement favorables au transport en commun.
D’abord, durant les dernières décennies, l’utilisation de l’automobile a influencé fiche.8l’aménagement
des nouveaux quartiers, ainsi que les choix de localisation des domiciles, des emplois, des écoles et des
commerces. De façon générale, cela a permis de parcourir plus rapidement de longues distances, et
ainsi contribué à l’éloignement entre les lieux résidentiels et les lieux d’activités. La lutte pour la
réduction des distances parcourues et l’utilisation accrue des transports actifs implique notamment de
favoriser la densité du bâti et la diversité des usages. La densité résidentielle, en augmentant la
demande de déplacements, a notamment pour effet de faciliter l’implantation et la performance du
transport collectif. En ce qui concerne la mixité, il est possible de l’améliorer par exemple en intégrant
davantage de services de proximité dans la trame urbaine (souvent actuellement à vocation unique, par
exemple résidentielle). Les quartiers aménagés dans cette optique de densité, de mixité et de proximité
au transport en commun se nomment Transit-Oriented Development « TOD » (Communauté
métropolitaine de Montréal, 2017).

Ensuite, un autre levier d’action lié à l’aménagement concerne le parc de stationnements. Alors que le
stationnement est souvent considéré comme un droit, sa présence peut soulever diverses
problématiques et être source de divergences : perception de manque de places de stationnement,
compétition entre résidents et non-résidents, partage de la voie entre le stationnement sur rue et les
autobus et les cyclistes, enjeux de tarification, etc. De plus, ces infrastructures occupent un espace non
négligeable qui pourrait être valorisé à d’autres fins : bâtiments ou espaces verts au lieu de
stationnements hors-rue, voies réservées aux bus ou aux cyclistes au lieu des stationnements sur rue,
etc. L’abondance et la gratuité des espaces de stationnement que l’on retrouve souvent en milieu péri-
urbain favorise l’utilisation de l’automobile, de même qu’elle engendre une gestion non optimale de
l’offre de stationnement. Des exemples de solution consistent à limiter le nombre d’espaces de
stationnement et à optimiser leur usage en intégrant des pratiques de gestion de ces espaces. Les
nouvelles technologies offrent par exemple des possibilités d’adaptation des tarifs selon l’achalandage,
de même que la possibilité d’une variabilité horaire. Une étude réalisée en 2015 pour la région de
Montréal fait une synthèse des différents outils de gestion du stationnement, ainsi que des données à
rassembler pour quantifier l’offre de stationnement (Paulhiac Scherrer, Meloche & Morency, 2015). La
Ville de Montréal en 2016 s’est dotée d’une Politique de stationnement dans laquelle elle énonce ses
principes directeurs et ses stratégies d’action.

Enfin, la convivialité des rues et un espace urbain de qualité sont favorables aux piétons et aux cyclistes.
Planifier à l’échelle humaine implique notamment de veiller à insérer les infrastructures de transport
dans le paysage, ainsi que de limiter les impacts négatifs de la circulation de véhicules. Dans ce dernier
cas, des exemples d’interventions sont la réduction de la vitesse affichée, la présence d’obstacles pour
réduire la vitesse des véhicules, des barrières végétales pour réduire l’exposition au bruit et à la
pollution, un éclairage adéquat la nuit, etc. Également, les pistes cyclables, les traverses piétonnes et les
saillies de trottoir sont des infrastructures pour accroître le sentiment de sécurité des piétons et
cyclistes. Ces éléments, et bien d’autres, sont véhiculés par le concept de « code de la rue » (Bruneau &
Morency, 2016).

Promouvoir les véhicules propres

En ce début de XXIe siècle, la quasi-totalité des véhicules motorisés (véhicules fiche.7particuliers comme
véhicules lourds) carbure au pétrole, sous forme d’essence ou de diesel. Cela pollue non seulement l’air,
mais également l’eau et les sols. De plus, les émissions de gaz à effet de serre qui résultent de la
combustion au pétrole des véhicules motorisés contribuent aux changements climatiques planétaires.

Des véhicules à consommation de pétrole faible ou nulle sont de plus en plus présents sur le marché.
Par exemple, l’intégration de la récupération d’énergie au freinage, ainsi que de capteurs d’énergie
solaire, permettent au véhicule d’avoir une plus faible consommation d’essence. Aussi, des véhicules
entièrement électriques voient le jour; ceux-ci doivent être branchés au réseau électrique pour se
recharger entre deux déplacements. Cet aspect requiert des interventions de la part notamment des
planificateurs en transport et en aménagement du territoire: organiser le développement du réseau de
recharge électrique, ainsi que faciliter l’achat de véhicules électriques autant pour les particuliers que
pour les entreprises propriétaires d’une flotte de véhicules (autopartage, taxi, autobus, camions
d’entreprises privées, services policiers et ambulanciers, etc.). Au Québec, le Plan d’action en
électrification des transports 2015-2020 (MTMDET, 2015) encadre les interventions en ce sens.

Innover grâce aux technologies de l'information (STI)

Les nouvelles technologies de l’information peuvent être mises à profit à la fois par les usagers, par les
opérateurs des systèmes et services de transport et par les planificateurs. De manière générale, les
technologies favorisent la circulation de l’information en temps réel. La connaissance en temps réel de
l’état d’un réseau de transport, de son niveau de congestion et de la présence d’incidents renseignent
non seulement les usagers sur le trajet à éviter, mais ils aident également les opérateurs à réagir plus
efficacement. Lorsque ces données sont analysées sur une longue période, les planificateurs peuvent
identifier plus efficacement les modifications permanentes à apporter au réseau, et ce, afin d’améliorer
la fiabilité, la fluidité et la sécurité de la circulation sur le réseau.

Les technologies GPS et de cartes à puce, ainsi que diverses applications sur les téléphones intelligents,
rendent possible la collecte de données sur les déplacements. La connaissance des préférences des
usagers permet d’améliorer la compréhension des dynamiques de mobilité par les planificateurs. Ces
informations posent d’ailleurs des enjeux concernant le stockage, la confidentialité et le partage de ces
données.
En raison d’une plus grande facilité à jumeler l’offre et la demande, l’intégration des technologies de
l’information aux téléphones intelligents améliore les possibilités de partage, tant celui des véhicules
que des stationnements. En milieu rural ou périurbain, le transport en commun à la demande pourrait
ainsi connaître un essor. L’industrie du taxi est également actuellement touchée par cette
transformation.

De plus en plus, les réseaux de transport deviennent eux aussi intelligents. Cette évolution se fait de pair
à l’intégration des véhicules connectés (exemple donné à la Figure 3) et, bientôt, des véhicules
autonomes lesquels sont en voie de devenir une réalité incontournable. Aujourd’hui sous forme de
simples outils d’aide à la conduite, les véhicules entièrement autonomes permettront, à terme,
d’améliorer non seulement la sécurité routière, mais aussi la fluidité de la circulation. Ils posent aux
planificateurs des enjeux complexes en termes de gouvernance et d’intégration à l’offre de services en
transport collectif. Le concept de « Mobilité en tant que service » (Mobility as a Service, nommée «
MaaS », expliquée par Kargas & Hietanen, 2016) trace par ailleurs une piste d’évolution vers une société
s’éloignant radicalement de la dépendance à la propriété de l’automobile.

Figure 3. Exemple d’outil montrant l’emplacement de l’autobus en temps réel. Une image tirée de STL
Synchro, circuit 24 Ouest, Laval, 16 juillet 2018

fiche.9

Enfin, les données sur les réseaux (historiques et en temps réel) alimentent les calculateurs de trajet, qui
offrent un potentiel intéressant pour aider les individus à faire de meilleurs choix de mobilité, par
exemple pour mieux planifier les heures de départ et d’arrivée, pour établir le meilleur trajet selon les
circonstances, ou pour utiliser un moyen de transport différent. Un autre exemple constitue l’intégration
des modes de paiement afin d’assurer à la fois une simplicité d’utilisation pour l’usager et une
modulation tarifaire qui reflète les variations spatio-temporelles de la demande de transport et
influence les choix modaux.

Conclusion

Les sept sections présentées ci-dessus sont en fait un survol des notions, des enjeux et des pistes de
solution sur lesquels il est primordial de se concentrer lors de la mise en œuvre et de la planification de
la mobilité durable. Cela laisse présager des changements profonds à venir dans l’offre et la demande de
mobilité. Actuellement, au Québec, c’est la Politique de mobilité durable – 2030 (MTMDET, 2018c) qui
définit les orientations poursuivies par le Gouvernement du Québec.

Toutes ces notions doivent être planifiées de front pour diminuer les multiples impacts négatifs de la
mobilité actuelle. Au Québec, une percée des voitures électriques diminuera certes la consommation de
pétrole et les émissions de polluants… sans toutefois enrayer les problèmes de congestion et
d’occupation d’espace. Il est donc impératif d’orchestrer un arrimage de cette percée avec l’arrivée des
véhicules autonomes, pour obtenir une optimisation de la flotte globale de véhicules, et donc de
l’espace alloué aux transports. Ces efforts doivent être déployés en simultanéité avec l’émergence de la
Mobilité en tant que service pour organiser ces changements autour d’un partage de l’usage de
l’automobile, le tout afin de diminuer la possession automobile personnelle sans toutefois restreindre
l’accès aux activités. Cette réduction de la motorisation individuelle, jumelée à la mise en valeur des
nouvelles technologies de l’information, est appelée à simplifier l’utilisation des transports collectifs, à
encourager l’utilisation rationnelle de l’automobile et à favoriser la multimodalité.

Références

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Bruneau, J.-F. & Morency, C. (2016). Évaluation du potentiel d’application d’une démarche « Code de la
rue » pour le Québec et identification des enjeux et stratégies liés à sa mise en œuvre. Rapport finale du
Projet R703.1 pour le MTMDET, Polytechnique Montréal.

Commission européenne. (2002). Elcidis Electric Vehicle City Distribution : Final report.

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Équiterre. (2011). Cocktail transport.

Kargas, C. & Hietanen, S. (2016). MaaS : a precursor to Automated-MaaS. Article d’Actualités de


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Gouvernement du Québec.

Paulhiac Scherrer, F., Meloche, J.-P., et Morency, C. 2015. Pour une connaissance et une gestion
renouvelées du stationnement – Propositions théoriques et méthodologiques. Rapport final pour le
Conseil régional de l’environnement Montréal et le Centre intégrée universitaire de santé et de services
sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.

Sioui, L. (2014). La pieuvre et le cercle pour évaluer la mobilité durable. Fiche no 10 – Synthèses de
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Vélo-Québec. (2). À pied, à vélo, ville active : 10 ans de partenariats structurants.

Ville de Montréal (2016). Politique de stationnement.


Pour en savoir plus

AddÉnergie inc. (2017). Le circuit électrique.

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collectivités canadiennes.

ATC. (2016). Se déplacer intelligemment – Inventaire des options de réduction de la consommation


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CargoM. (2018). Grappe métropolitaine de logistique et transport de Montréal.

Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire. (2011). L’aménagement
et l’écomobilité : Guide de bonnes pratiques sur la planification territoriale et le développement
durable. Gouvernement du Québec.

Ministère des transports du Québec. (2014). Stratégie nationale de mobilité durable – Une approche
responsable et novatrice. Gouvernement du Québec.

Ministère des Transports du Québec. (2018). Enquêtes origine-destination. Gouvernement du Québec.

Comment citer ce texte ?

Louiselle Sioui, Ing PhD (2018). « Planifier la mobilité durable ». Dans GAGNON, C. (éditrice). Guide
québécois pour des Agendas 21e siècle locaux : applications territoriales de développement durable
viable, [En ligne] http://demarchesterritorialesdedeveloppementdurable.org/mobilite-durable/ (page
consultée le jour mois année).

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