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1. LA FÉCONDATION
La fécondation représente les phénomènes corrélés, contemporains ou conséquents à
la rencontre du spermatozoïde et de l'ovocyte. Elle aboutit à la fusion des gamètes
qui réalisent un œuf ou zygote diploïde, début de l'embryogenèse.
Lorsqu'elle a lieu dans le milieu extérieur, elle est dite externe ; c'est le cas, par
exemple, chez certains animaux aquatiques. Par opposition, elle est dite interne
lorsqu'elle se déroule dans la filière génitale, comme c'est le cas pour l'animal
terrestre, les Mammifères dont l'homme.
1.2. L'OVOCYTE
Le ou les ovocytes de deuxième ordre (voir ovulation, chap. 12, § 3) atteignent
l'ampoule dans les 2 h qui suivent la ponte. L'antipéristaltisme tubaire permet l'ascen-
sion spermatique de l'isthme jusqu'au tiers externe de la trompe, siège habituel de la
rencontre des gamètes. Ceux-ci cohabitent pendant 2 ou 3 jours et c'est l'arrêt des
mouvements antipéristaltiques de la trompe qui va permettre la descente de l'œuf dans
la cavité utérine vers le 20e jour du cycle, c'est-à-dire avant la période des règles
manquantes.
Les ovules non-fécondés survivent environ 24 h et sont éliminés dans l'utérus et / ou
phagocytés par les macrophages. Les stéroïdes ovariens contrôlent les mouvements
de la trompe ; les œstrogènes ont le pouvoir d'augmenter le péristaltisme alors que la
progestérone les diminue, si bien que certaines pilules progestatives ralentissant le
transit tubaire du blastocyste ont été incriminées dans le déterminisme de la grossesse
extra-utérine en cas d'échec de la méthode.
14 - FÉCONDATION - GESTATION - LACTATION 455
Zone pellucide
Globules polaires
Figure 14.1 - Œuf, 1er jour (dans le tiers externe de la trompe)
2. LA MIGRATION TUBAIRE
L'œuf de Mammifères, ayant peu de réserves, est destiné, s'il veut assurer son
évolution, à s'implanter rapidement dans la muqueuse utérine, c'est la nidation.
456 ENDOCRINOLOGIE ET COMMUNICATIONS CELLULAIRES
L'œuf fécondé lors de son transit tubaire commence une série de mitoses qui
engendrent des cellules de plus en plus petites, les blastomères.
Cette segmentation a une chronologie précise ; deux blastomères sont présents à la fin
du 1er jour suivant la fécondation ; entre la 36e et la 40e h, c'est le stade à
quatre blastomères, entre la 40e et la 50e h le stade à huit blastomères, qui précède la
morula retrouvée habituellement après la 72e h.
A raison d'une division par 24 h, l'œuf multiplie ses cellules dont certaines, à la péri-
phérie, sont plus petites (les micromères) que les blastomères centraux (les
macromères). La membrane pellucide englobe la totalité de cette morula.
Vers le 5e jour de l'évolution de l'œuf, apparaissent des lacunes intercellulaires qui
vont secondairement réaliser une cavité unique : la cavité blastocystique distinguant
une couche cellulaire périphérique que sont les cellules trophoblastiques et le
bouton embryonnaire (futur embryon). La migration tubaire dure 3 jours, le
blastocyste, du fait des mouvements ciliaires de la muqueuse tubaire, du péristaltisme
de la musculeuse et du courant endoluminal, va tomber dans la cavité utérine où il
sera libre pendant 48 h avant de prendre contact avec la muqueuse endométriale vers
le 6e jour de sa vie (fig. 14.2).
a b c
Bouton embryonnaire
Trophoblaste
Cavité blastocystique
3. LA NIDATION
Le début de la nidation a lieu vers le 20-21e jour du cycle, avant la période des règles
manquantes, alors que l'endomètre est en pleine phase sécrétoire, au maximum de sa
vascularisation, de son épaisseur et de son activité glandulaire.
Vers le 7-8e jour, les cellules trophoblastiques périphériques constituent le syncytio-
trophoblaste distinct des cellules plus internes du cytotrophoblaste (voir fig. 14.3).
Vers le 10e-12e jour, le syncytium périphérique est lacunaire, l'œuf est enfoncé dans
le chorion endométrial, au contact des vaisseaux spiralés porteurs d'éléments nutritifs.
14 - FÉCONDATION - GESTATION - LACTATION 457
Trophoblaste
Chorion endométrial
4. LA GESTATION
L'utérus augmente progressivement en volume. Long de 5,5 cm chez la jeune femme
non-enceinte, il s'élève au-dessus de la symphyse pubienne.
458 ENDOCRINOLOGIE ET COMMUNICATIONS CELLULAIRES
L’élévation est de :
– 9 cm à 3 mois ; la longueur totale du fœtus est alors de 11,5 cm ;
– 19 cm à 5 mois ; " 26 cm ;
– 34 cm à 9 mois ; " 50 cm.
La zone d'implantation, région vasculaire à la fois fœtale (villosités choriales) et
maternelle (endomètre utérin), constitue le placenta. Le fœtus y est relié par le cordon
ombilical, dans lequel chemine une veine et deux artères.
Le tableau 14.1 précise la durée de la gestation et le nombre des nouveaux-nés en
fonction de l’espèce.
Tableau 14.1 - Durée de la gestation et nombre des nouveaux-nés
en fonction de l’espèce
4.1. LE PLACENTA
L'histologie du placenta varie selon l'importance de la pénétration des villosités du
chorion à l'intérieur de la muqueuse endométriale. Ainsi, il est possible de distinguer
(fig. 14.4) :
• le placenta épithélio-chorial où le chorion est appliqué contre l'épithélium
endométrial (cheval, porc…). Il y a donc simple juxtaposition des structures
maternelles et des structures d'origine ovulaire ;
14 - FÉCONDATION - GESTATION - LACTATION 459
Sang maternel
Endothélium vasculaire maternel
Chorion
Sang fœtal
Il assure la nutrition du fœtus, lui transmettant les acides aminés, les glucides, les
acides gras, les électrolytes et les vitamines nécessaires à son développement. L'eau
passe par osmose. Elle sert au fœtus et au renouvellement du liquide amniotique. Les
sels minéraux suivent l'eau. Le placenta permet enfin l'élimination des déchets de
l'embryon, qui seront excrétés par les reins de la mère.
Dès le milieu de la gestation, le fœtus avale, en outre, le liquide amniotique qui
repasse dans le sang maternel par l'intermédiaire du placenta. En l'absence de ce
mécanisme (atrésie de l'œsophage du fœtus ou trouble de la déglutition chez un
anencéphale), le liquide amniotique s'accumule (hydramnios).
Unité fœto-placentaire
Compartiment maternel Compartiment placentaire Compartiment fœtal
Cholestérol
Cortico-
surrénale
Progestérone Sulfate
Cortico- de DHA
Sulfate de DHA
surrénale
Œstrone
17 β-œstradiol
Foie
Sulfate de
16 α-hydroxy-DHA
Œstriol
100
50 HCG
40
Progestérone
30
20
Œstrogènes
10
2 3 4 5 10 15 20 25 30 35 40
Nidation
Grossesse
Cycle fécond
Figure 14.6 - Courbes d'évolution des hormones
au cours de la grossesse chez la femme
Son taux augmente très rapidement jusqu'au 3e mois (environ 11 000 ng / ml),
décroît au 4e mois, puis prend la forme d'un plateau avec une légère remontée
(environ 3 000 ng / ml) vers le 8e mois. Ce taux décroît ensuite pour s'annuler au
moment de la parturition (expulsion du placenta) 2.
Chez le mâle, l'hormone placentaire stimule les cellules de Leydig (action de
type LH) et favorise la migration du testicule cryptorchide en position scrotale.
Chez le rat, elle apparaît le 8e jour et sa concentration est maximale le 13e jour de
la gestation.
• l'hormone placentaire lactotrope, HPL ou CGP ou HCS (human chorionic
somato-mammotrophin) est une protéine (PM 22 000) de 191 AA qui présente
des analogies de structure avec la GH et la prolactine, évoquant un précurseur
commun. Elle est sécrétée par le syncytiotrophoblaste sans participation fœtale.
2 Le dosage de β-HCG libre et d'HCG effectué 14 à 16 jours après une fécondation in vitro
permettrait de prédire l'évolution normale ou la survenue d'une fausse couche chez les
patientes.
464 ENDOCRINOLOGIE ET COMMUNICATIONS CELLULAIRES
180
160
P
140
Progestérone (ng/ml)
120
100
40
80
Œstradiol (pg/ml)
30
60
O
20
40
10
20
0 0
2 5 8 11 14 16 19 Jours de gestation
a - Evolution des œstrogènes (O) et de la progestérone (P) (d'après Matt et coll., 1986)
100
90
80
70
Prolactine (ng/ml)
60
50
40
30
20
10
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 1718 19 20 21 22 23 Jours de grossesse
b - Evolution de la prolactine (d'après Morishige et Rothchild, 1974)
Figure 14.7 - Courbes d'évolution des hormones au cours de la gestation chez la rate
HCG (mg/ml)
a - HCG
12 500
10 000
7 500
5 000
2 500
5 10 15 20 25 30 35 40 Semaines
HLP (µg/ml)
b - HLP
7
RIA (dosage
radioimmunologique)
6
EIA (dosage
5 immuno-enzymologique)
9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 Semaines
Figure 14.8 - Courbes d'évolution de l'HCG et de l'hormone lactogène
(d'après Gaspard, 1979)
Comme l'hormone de croissance avec laquelle elle présente une parenté structurale
et fonctionnelle, elle facilite :
– l'anabolisme protidique,
– la sécrétion d'insuline,
– la lipolyse,
et agit aussi comme antagoniste de l'insuline.
Si les cellules des îlots de Langerhans ne peuvent s'hyperplasier ou si l'insuline
sécrétée est inefficace, on se trouve dans une situation d'hyperglycémie liée à la
sécrétion d'HPL : c'est le diabète gestationnel.
La fonction lactogénique de l'hormone lactogène placentaire est discutable ; elle a
plutôt un rôle de préparation à la lactogenèse. Son rôle métabolique est complexe
(elle agit sur les AGL, l'équilibre azoté, la sécrétion d'aldostérone).
Chez le rat, l'hormone lactogène placentaire est présente sous deux formes pen-
dant la gestation : une forme est produite préférentiellement au début et au milieu
de la gestation, alors que l’autre forme est produite durant les derniers jours. Les
466 ENDOCRINOLOGIE ET COMMUNICATIONS CELLULAIRES
deux formes ne dérivent pas d'un précurseur commun et leurs rôles sont diffé-
rents : la première est un facteur lutéotrope, tandis que la seconde est un facteur
mammotrope. La forme lutéotrope est peut-être un facteur inhibiteur de la
sécrétion de prolactine hypophysaire qui s'interrompt au milieu de la gestation (et
s'élève considérablement dès la mise bas).
• de la prolactine serait également sécrétée par le placenta (Rosenberg et coll.,
1980) (voir fig. 14.7.b).
positif, suivant la sensibilité du test utilisé, dès le 1er jour après le début présumé
des règles manquantes.
Tableau 14.2 - Dosage de l’HCG par les méthodes biologiques
– Chez la chèvre, la vache, la chienne, la lapine, son origine est ovarienne et son
taux décroît brutalement avant la parturition. Son rôle serait indirect, par
inhibition de la synthèse des prostaglandines.
– Chez la brebis, la rate, son origine est mixte, ovarienne et placentaire et la
diminution de la progestérone est modérée. On peut prouver expérimenta-
lement que cette diminution n'est pas la condition nécessaire de la parturition.
– Chez la jument et les Primates, la progestérone plasmatique ne s'abaisse pas de
façon significative avant le travail. Des mécanismes complexes ont été
invoqués qui impliquent toutefois la progestérone : diminution locale, variation
de la proportion progestérone libre / progestérone conjuguée, modification des
récepteurs utérins.
• Les œstrogènes jouent un rôle facilitant les contractions du myomètre.
– Chez la chèvre, le taux des œstrogènes augmente progressivement pendant la
gestation, puis plus rapidement 4 à 5 jours avant la mise bas (leur origine
pourrait être fœtale).
– Chez la brebis, le taux d'œstradiol est bas en cours de gestation, il augmente
brutalement dans les 24 h précédant la parturition ; l'élévation du rapport
œstradiol / progestérone entraînerait la libération de prostaglandine F2α.
– Chez le cobaye, la vache, la brebis, l'administration d'œstrogènes peut provo-
quer la mise bas.
– Chez la femme, si le taux d'œstrogènes augmente progressivement au cours
de la grossesse, il ne subit pas d'augmentation nette avant le travail. Si les
œstrogènes favorisent le développement du myomètre et l'accroissement de la
sensibilité à l'ocytocine, ils ne suffisent pas pour déclencher le travail. Ils ne
semblent pas non plus favoriser la libération de prostaglandines F.
5.2. LE POST-PARTUM
Il correspond à la restauration de la muqueuse de l'utérus et du vagin.
Le volume de l'utérus décroît progressivement, la plaie placentaire se cicatrise. Les
tests de grossesse deviennent négatifs en 4 à 8 jours (sinon, risque de chorio-
épithéliome).
L'aménorrhée (arrêt des règles) cesse au bout de 5 à 6 semaines chez la femme qui
n'allaite pas, c'est le “retour de couches”. Elle est prolongée chez la femme qui allaite.
14 - FÉCONDATION - GESTATION - LACTATION 471
6. LA LACTATION
Elle nécessite :
• une préparation hormonale réalisée pendant la gestation ;
• et l'intervention du nouveau-né.
L'hypophyse joue un rôle fondamental :
• pratiquée avant l'accouchement, l'hypophysectomie empêche la montée laiteuse ou
lactogenèse ;
• pratiquée au cours de la sécrétion lactée (galactopoïèse), l'hypophysectomie
l'arrête.
10
7
8
Influx nerveux
issus de la PIF
succion du mamelon
LH-RH
Prl
6 FSH
LH
ocytocine
Ocytocine
4
3
Diminution de la
concentration plasmatique
10 de la progestérone
lors de la mise bas
9
5 6'
1 Corps jaune
gravidique
Œstrogène + progestérone
Ovaire
6.5. LE LAIT
Le liquide des premiers jours de la lactation (période de la montée laiteuse ou lacto-
genèse) constitue le colostrum. Il est moins sucré et plus riche en protéines (en
particulier en anticorps) que le lait (tab. 14.3). Il est laxatif et débarrasse le nouveau-né
de son méconium (premières selles), éliminant les résidus de l'assimilation du liquide
amniotique.
Tableau 14.3 - Composition chimique du lait de femme
au début de la lactation (les valeurs sont données en g / l)
Femme Vache
Glucides : lactose 70 g 47 g
Lipides 36 g 36 g
Protides 13 g 34 g
Calcium 340 mg 1 200 mg
Magnésium 30 mg 120 mg
Sodium 140 mg 500 mg
Potassium 580 mg 1 500 mg
Fer 0,7 mg 0,5 mg
Zinc 2,8 mg 3,5 mg
Phosphore 140 mg 950 mg
Chlore 420 mg 950 mg
• Les glucides sont constitués par un sucre spécial, le lactose. On en retrouve dans
l'urine de la femme enceinte (à ne pas prendre pour de la glycosurie).
• Les lipides sont caractérisés par une teneur élevée en acides gras à chaîne courte.
Ils sont faciles à hydrolyser et très digestes.
• Les protides sont constitués essentiellement :
– de caséine (30 g / l) qui précipite sous l'action de la présure ou d'acides dilués.
Elle forme le “caillé” des fromages ;
– de lactalbumine et de lactoglobuline.
• Matières minérales : K, Na, Ca, Mg… Le rapport Ca est voisin de 1,39.
P
• Vitamines : A, B, C (20 mg / l), D.
La lactation constitue pour le nourrisson un véritable “cordon lacté” permettant
également le transfert d'hormones, mais aussi de virus 4. En revanche, la protection
du nouveau-né humain par les anticorps maternels (qui l'immunisent pendant près de
6 mois contre la plupart des maladies infectieuses) est assuré plutôt par les anticorps
(IgG), qui ont traversé le placenta dans la période embryonnaire prénatale, que par les
anticorps (surtout IgA) sécrétés au cours de la phase colostrale. Néanmoins, le lait de
femme constitue, pour le nouveau-né, le meilleur aliment qui puisse lui être donné.
De nombreuses statistiques démontrent que la mortalité et la morbidité (en particulier
les diarrhées) sont moins élevées chez les enfants nourris au sein.
Si les courbes de poids d'enfants nourris au lait de vache sont plus ascendantes que
celles des bébés nourris au sein, cela est dû à une rétention d'eau et de sel, et non à une
vraie croissance.
Les laits “maternisés” sont des laits dont chaque constituant a été amené aussi près
que possible du niveau du constituant homologue du lait humain. Mais ils sont
dépourvus d'anticorps, des bactéries apportées par le colostrum qui implantent une
flore utile toute la vie, et d'un composé sucré : le facteur bifidus, absent dans le lait de
vache, et qui assure le développement d'une flore intestinale favorable.
Enfin et surtout, la qualité du lait maternel évolue de jour en jour, suivant des
interactions mère-enfant spécifiques à chaque cas, indépendamment du lien affectif
établi par la tétée, dont les implications sur le développement du futur adulte ne sont
encore que soupçonnées.