Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5, pp.

203-210 MÉMOIRE
© Masson, Paris, 1995

Analyse cinématique et électromyographique d'un geste

balistique de type « shoot »
P. TRUDELLE (1), G. PENINOU (2).
(1) 66, rue Anatole-Lucas, F 95100 Argenteuil. (2) Laboratoire d'analyse du mouvement de l'E.F.O.M, 118 bis, rue de Javel,
F 75015 Paris.

attraper une mouche ou la frappe d'un ballon

Cette étude est une analyse visant à
sont assimilés à des gestes balistiques du fait qu'il
comprendre l'organisation temporelle d'un
ne peut y avoir de contrôle une fois le
geste balistique du type « shoot ». Quarante mouvement lancé. Toutefois, il faut noter que
sujets ont participé à l'étude. Tous frappeurs
l'énergie est injectée au départ et à différents
du pied droit, il leur a été demandé de frapper moments du mouvement. On dit que le geste
à vide ou dans une balle en mousse en
direction d'une cible basse soit d'une cible est « préprogrammé ». Comment l'organisme
choisit le programme à mettre en place? Est-ce
haute. L'analyse s'est effectuée à l'aide de
qu'une cible modifie le type de programme
goniomètres électroniques de hanche et de
envoyé? Pour tenter de formuler des hypo-
genou, d'un EMG de surface du rectus
thèses, nous nous sommes fixés pour objectif
femoris, vastus medialis, biceps femoris et des
d'enregistrer au niveau de la cuisse l'activité
ischio-jambiers internes. Un faisceau infra-
électrique de muscles mono-articulaires, poly-
rouge permet de donner le top shoot et de
articulaires, agonistes et antagonistes. Ce travail
calibrer les courbes en fonction du shoot.
est une étude permettant de définir des
L'analyse générale a permis de déterminer standards.
que le rectus femoris est le moteur du geste
(corrélation avec l'accélération articulaire du
genou), le vastus medialis un régulateur
(corrélation avec le FIR) et les ischio-jambiers Matériel et méthode
des freins du mouvement par une activité
préprogrammée. Le rectus femoris et le vastus
medialis ont des activités dissociées.
POPULATION
Au niveau neurophysiologique, on note que
la présence d'une cible améliore la synchroni- L'étude porte sur 40 sujets plus 3 sujets lors des
sation musculaire. pré-tests. Il s'agit d'étudiants en masso-kinésithérapie ou
de masseurs-kinésithérapeutes âgés de 19 à 37 ans, tous
en bonne santé et ayant déjà l'habitude de taper dans un
ballon. La population est mixte avec une prédominance
Introduction d'hommes. Tous nos sujets « shootent » normalement
du pied droit.

La balistique est l'étude des mouvements des

projectiles. Elle est liée au fait que toute l'énergie MATÉRIEL
est injectée au début du mouvement, le mobile
poursuivant ensuite sa trajectoire. Les mouve- Le goniomètre
ments rapides de l'organisme tel le lancer, Les goniomètres sont ceux utilisés habituellement au
laboratoire; les caractéristiques et l'installation des gonio-
Tirés à part: P. TRU DELLE, à l'adresse ci-dessus. mètres sont accessibles par la bibliographie (1, 2, 3).
204 Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5
L'électromyographie
Les caractéristiques des EMG de surface sont accessi-
bles par la bibliographie (3).
Nous avons toujours installé des électrodes après les
goniomètres afin d'éviter tout décollage du sparadrap.
Pour chaque muscle, nous utilisons 2 électrodes :
1 électrode positive et 1 électrode négative. Une électrode
neutre est commune et placée sur l'épine iliaque antéro-
supérieure.
L'emplacement des électrodes
Pour les électrodes du RF, nous collons les cupules à
la jonction du tiers supérieur et du tiers inférieur de la
cuisse en plein corps charnu (révélé par contraction
statique), les électrodes sont superposées et distantes de
1 cm.
Pour les électrodes du VM, nous collons les cupules
en plein milieu du corps charnu (révélé par contraction
statique), les électrodes sont juxtaposées et distantes de
1 cm.
Pour les électrodes du BF et des IJint, nous collons
les cupules à la limite du tiers inférieur et du tiers moyen
de la cuisse juste après les tendons (révélés par contraction
musculaire), les électrodes sont dans les deux cas
superposées et distantes de 1 cm.
Afin de déterminer ces emplacements, nous nous
sommes servis des enregistrements des pré-tests et des
zones cités par Basmajian (4). Le choix des muscles de
la cuisse réside dans le fait qu'il nous semble intéressant
de connaître la chronologie de l'activité de muscles mono
et pol y-articulaires, ainsi que d'agoniste et antagoniste.
Nous dissocions les 2 ischio-jambiers car, en clinique, leurs
déchirures sont variables.
A la fin de l'installation, nous vérifions l'activité de ces
muscles par un mouvement de contraction statique en
extension et en flexion. S'il s'avère qu'il y a diaphonie
(parasitage), nous recommençons le placement des élec-
trodes incriminées.
Le faisceau infra-rouge (FIR)
Afin de déterminer le moment précis du « shoot »,
nous avons utilisé un émetteur de rayon infra-rouge
(alimenté par un transformateur 12 volts) ainsi qu'un
récepteur relié à l'émetteur par un fil électrique. L'émet-
teur est relié au boîtier interface. La rupture du faisceau
entraîne la rupture du courant alimentant un des canaux
alimentant le boîtier interface. La distance séparant les
deux boîtiers est de plus d'un mètre. Des marques au sol
ainsi que du ruban adhésif fixe le matériel au sol et permet
de replacer le matériel à la même place avant chaque
journée de prise d'informations. Nous utilisons deux boîtes
de carton afin de surélever l'émetteur et le récepteur et
le placer ainsi à hauteur de la balle.
La cible : une balle et un gobelet
Il s'agit d'une balle en mousse de 10 cm de diamètre,
de poids négligeable. Nous avons utilisé le « tee » des
golfeurs afin de permettre au sujet d'effectuer un shoot
bas ou en hauteur. Ce « tee » est en fait un gobelet en
plastique de poids négligeable et résistant aux coups reçus.
De la même manière que pour le FIR, le gobelet est placé
sur des marques au sol.
MÉTHODE
Une fois après avoir pris les renseignements habituels
sur notre sujet, nous lui expliquons les buts à atteindre.
« Il faut toucher si possible la cible du haut et la cible
du bas avec ballon et sans ballon. »
Protocole
Sur un drap blanc tendu du sol au plafond situé à
187 cm du ballon, sont disposés 2 cibles respectivement
à 40 cm et 120 cm du sol. Ces cibles sont symbolisées
par des croix réalisées à l'aide de sparadrap de couleur
et de dimension égales.
La hauteur de ces cibles a été déterminée de manière
empirique suite à nos pré-tests afin de réaliser deux shoots
différents. Le ballon est placé sur son gobelet juste en
arrière du FIR afin de couper le rayon juste au moment
où le ballon bouge. Une marge de 5 mm est conservée
afin d'éviter une rupture du rayon liée à la répercussion
des vibrations sur le ballon lors de la pose du pied d'appui.
Une marque symbolisée par une bande de sparadrap
est collée au sol à une distance de 86 cm afin d'obtenir
une chronologie complète du « shoot » : pose du pied
d'appui, armée de la jambe de frappe, frappe, relâchement.
Commence alors la phase pratique : nous demandons
au sujet de réaliser un « shoot » dans la tenue
expérimentale : pieds en chaussettes et en caleçon.
Il est demandé au sujet de frapper avec le coup de pied
afin d'uniformiser les résultats. Toutefois, si le sujet est
gêné pour réaliser le geste, nous tolérons une légère
rotation tibiale. Après quelques répétitions afin de se
familiariser avec le poids de la balle, nous équipons notre
sujet des goniomètres électroniques. Puis nous répétons
les « shoots » à vide ou avec la balle afin de familiariser
le sujet avec l'équipement. Enfin nous installons les
électrodes et redemandons au sujet de répéter quelques
« shoots » afin de se familiariser avec l'équipement
complet. Pour éviter les problèmes de tirage de fils, un
assistant sert de « poisson-pilote» et reste debout à droite
du sujet afin de faire suivre les fils et le boîtier de pré-ampli.
Nous effectuons alors un tirage au sort à l'aide d'une
pièce de monnaie afin de déterminer l'ordre de tir: si face
d'abord shoot bas avec ballon (SBB) puis shoot haut avec
ballon (SHB) puis shoot bas à vide (SBV) et enfin shoot
haut à vide (SHV); si nous obtenons pile l'étude
commence à vide: SBV, SHV, SBB et SHB.
Un étalonnage des goniomètres est effectué avant
chaque série d'enregistrement. Une fois le sujet « prêt »
pour réaliser le shoot, nous lançons l'enregistrement et
le sujet exécute un de ces 4 tirs. L'enregistrement est
 Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5 205

conservé si les EMG sont exploitables (absence de

parasitages, ligne isoélectrique stable, absence de tirages Valeurs analogiques angulaire
850
de fils...).

Analyse des résultats 800

L'enregistrement se déroule sur une période de 10 se-
condes, le système évolue sur une fréquence de 1 000 Hz,
soit un total de la 000 données par canaux. Nous utilisons 750
4 canaux pour les muscles, 2 canaux pour les goniomètres
et un canal pour le FIR. Chaque sujet représente donc H art SBB n=40
70 000 données brutes par expérience. 700
- - - - - H art SHB n=38
L'analyse se divise en différentes étapes :
- repérage du moment où le FIR est coupé : il s'agit - - H art SBV n=39
du top shoot; 650
- - - - - - . H art SHV n=37
- sélection des 499 points précédant le shoot (soit
5 dixièmes de seconde avant l'impact sur le ballon), et Durée 1 seconde
des 500 points le suivant. Nous déterminons ainsi une 600
séquence de 1 seconde, soit 1 000 points par canaux; Top-Shoot
- ces 1 000 points sont transférés dans le tableur Excel
et réduit par une « macro» afin d'obtenir 40 points. Tous FIG. 1. - Courbes angulaires de la hanche.
les points sont mis en valeur absolue afin de redresser
!'EMG et de pouvoir quantifier l'énergie électrique (qui Valeurs analogiques angulaire
serait sinon nulle). Nous passons ainsi d'une fréquence 690
1
de 1 000 Hz à une fréquence de 40 Hz;
- chaque dossier de 40 points est lissé par un cadre 670 1

de 3 afin d'obtenir des courbes aplanies; 1

- pour les goniomètres, nous dérivons une première fois 650
les valeurs pour obtenir la courbe de vitesse articulaire.
Cette courbe est également lissée par un cadre de 3. Enfin, 1 j,
IJI ~i
630
nous dérivons cette courbe une seconde fois pour obtenir IJ,j:
la courbe d'accélération articulaire. Cette courbe est
610 IJ:,
1:

également lissée par un cadre de 3. G art SBB n=40

~:
590 - ~- - - G art SHB n=38

-- - -- - - G art SBV n=39

Résultats 570
- - - - - - . G art SHV n=37

550
ANALYSE DE LA MOBILITÉ ET DE LA FLEXION Top-Shoot Durée 1 seconde
VITESSE ARTICULAIRE DE LA HANCHE ET
FIG. 2. - Courbes angulaires du genou.
DU GENOU

L'analyse de la mobilité angulaire s'effectue aucun « accident de courbe ». Les 4 types de

de manière qualitative plutôt que quantitative.
La hanche effectue un débattement articulaire
avec un « accident de courbe» correspondant
au « top-shoot ». Cet accident est visualisé par
la courbe de vitesse articulaire. Elle apparaît en
« dos de chameau » avec une première partie
supérieure à la seconde. Les 4 types de « shoot »
demandés sont sensiblement identiques. La
valeur maximale de vitesse vers la flexion est de
l'ordre de 250 degrés/sec. (fig. 1, 3).
Le genou effectue un débattement articulaire
ainsi qu'une vitesse articulaire uniforme sans
« shoot » demandés sont sensiblement identi-
ques. L'amplitude articulaire moyenne des
4 « shoots » met en· évidence un extrême
articulaire « post-shoot » supérieur à la position
de rectitude du genou en charge (fig. 2, 3).
La vitesse articulaire maximale du genou vers
l'extension est de l'ordre de 800 degrés/sec.
L'intensité de la vitesse articulaire de la
hanche est nettement inférieure par rapport à
celle du genou. Nous remarquons que la hanche
est en vitesse articulaire maximum 50 ms avant
le shoot puis le genou est à son tour en vitesse
206 Ann. Kin ésithér., 1995, t. 22, nO 5

Valeurs analogiques de vitesse articulaire Valeurs analogiques EMG

1200 400
G vit SBB n=40
1000 RF SBB n=38
350
800 ~ ~ - - - H vit SBB n=40
- - - - - RF SHB n=36
600
300 -
400 RF SBV n=36
200 250 RF SHV n=36
o
-200 200
Durée 1 seconde
-400
150
-600
Top-Shoot
-800 100

FIG. 3. - Courbes de vitesse articulaire

50
de la hanche et du genou pour S.B.B.

Durée 1 seconde
maximum 50 ms après le shoot. La courbe du
genou s'intercale parfaitement entre les
« bosses » du « dos de chameau » de la courbe Valeurs analogiques EMG
300
de la hanche. Ce qui démontrer que le geste de ----VM SBB n=33
shoot fait partie des mouvements en « chaîne 250 - ~ - - - VM SHB n=31
série» comme l'ont décrit Pierron et Leroy (5)
- - VM SBV n=35
et l'a validé Denoyelle (6).
200
En résumé, nous pouvons dire que la hanche - - - - - - VM SHV n=34

démarre le mouvement de shoot quand le genou

est en flexion maximale afin de limiter au 150

maximum l'inertie du segment jambier. Puis le

genou enchaîne le mouvement vers l'extension 100

pour donner un pic de vitesse maximum juste

après l'impact.

o " ,~
ANALYSE DE L'ACTIVITÉ DE 4 MUSCLES DE
LA CUISSE b Durée 1 seconde

FIG. 4. - Courbes d'activité du R.F. (a) et du V.M (b).

Le moyennage des EMG ne permet pas de
dire si tel muscle se contracte plus fort que tel
autre mais permet d'établir une chronologie de
l'activité électrique au cours du mouvement. Il
s'agit d'une analyse qualitative et non quantita-
tive.
L'analyse de l'activité du RF et VM du
quadriceps montre pour les 4 « shoots » le
même type de chronologie (fig. 4a, 4b).
L'activité du RF précède l'activité du VM.
Le RF présente une chute d'activité en
moyenne 100 ms après son activité maximale.
Cette chute correspond au moment précis du
shoot.
La chute d'activité du RF est compensée par
l'activité maximale du VM.
Le RF produit une deuxième bouffée d'acti-
vité en moyenne 125 ms après le shoot.
Pour les 2 « shoots » sans ballon, l'activité
du VM est perturbée! La cible semble jouer un
rôle dans le recrutement du VM. Ce muscle
apparaît comme le plus « sensible» à l'absence
de ballon (pourtant d'un poids négligeable).
L'analyse du BF et des IJint montre que
l'activité de ces 2 muscles est quel que soit le
shoot synchrone et dissociée de l'activité du RF
et du VM (fig. 5) :
- une activité précédant celle du RF et du
VM d'aspect uniforme;
- un silence électrique;
 Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5 207

Valeurs analogiques EMG Top-Shoot Valeurs analogiques

400 Valeurs analogiques EMG d'accélération articulaire
RF SBB n=38
400 15000
- - - - - VM SBB n=33
300 350 10000
- - - - - - - - - IJint SBB n=21
300 5000
200
250
o
100 200
-5000
150
o -10000
100
50 -15000
-100 Durée 1 seconde
o -20000
1
Top-Shoot Durée 1 seconde
-200

RF SSS n=38

,,1
FIG. 5. - Courbes d'activité des 4 muscles pour S.B.B .
••• VM SSS n=33

- une activité légèrement postérieure à l'acti- - G acc SSS n=40

vité maximale du VM et concomittante au shoot
d'aspect moins harmonieux.
Notons bien que cette dernière phase est, chez
certains sujets, absente et ne comprend que 2
ou 3 pics d'activité.
En résumé, le geste se déroule par la mise en
flexion du genou par les ischio-jambiers puis le
lancement du mouvement s'effectue par le
muscle RF et est complété lors de l'impact sur
la balle par le VM. L'activité des ischio-jambiers
contrôlant plus ou moins la fin du shoot. Nous
trouvons également une chronologie agoniste-
antagoniste-agoniste pour les muscles poly-
articulaires (RF et LB-IJint) connue sous le
terme de « pattern triphasique » (7).
ANAL YSE DE L'ACTIVITÉ MUSCULAIRE ET
DES ACCÉLÉRATIONS ARTICULAIRES DE LA
HANCHE ET DU GENOU
FIG. 6. - Corrélation entre l'accélération articulaire du genou
et l'activité du R.E. et du V.M
primitif et l'EMG des fléchisseurs du côté négatif
afin d'obtenir une congruence des aspects des
courbes et histogrammes.
La comparaison de l'activité du RF et du VM
par rapport à l'accélération angulaire du genou
montre un parfait accord entre les accélérations
articulaires du genou vers l'extension et l'activité
du RF. Il semble au contraire que le VM soit
un peu plus indépendant de cette accélération
(fig. 6).
La comparaison de l'activité du BF et des
IJint par rapport à l'accélération angulaire du
genou montre un parfait accord entre les
accélérations articulaires du genou vers la
flexion et les activités du BF et des IJint (fig. 7).

L'accélération angulaire de la hanche montre

un « dos de chameau » au moment du
« shoot ». Il Y a concordance suivant les
différents types de shoot. Les accélérations
articulaires relevées sont supérieures à celle de
la hanche. Elles sont de l'ordre de 10 000
degrés/sec. 2.
Pour mieux visualiser les rapports mus-
culaires, nous considérons les accélérations
articulaires vers l'extension comme négative.
Nous redressons l'EMG des extenseurs du côté
Discussion
DISCUSSION SUR LE PROTOCOLE D'ÉTUDE
L'étude d'un « shoot normal » est rendu
difficile à différents niveaux. D'une part par la
présence « d'observateurs extérieurs » : fils,
expérimentateurs, ballon inconsistant, interroga-
tions du sujet sur l'étude, d'autre part, par la
r-

208 Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, nO 5

Valeurs analogiques L'emplacement des électrodes a été déterminé

d'accélération articulaire
Valeurs analogiques EMG Durée 1 seconde pendant des pré-tests mais sur certains sujets
o 15000
présentant de trop longs segments, il a été
-20 difficile de placer les électrodes sur les ischio-
10000
-40 jambiers, les branches du goniomètre du genou
-60 5000 n'étant pas suffisamment longues pour découvrir
-80
la région explorée.
o Toutefois un geste aussi rapide nous laisse
-100
-5000
penser que le programme moteur envoyé ne peut
-120
être perturbé une fois lancé, le temps de
-140 -10000 feed-back étant trop long. Ce qui semble être
-160 corroboré par des courbes-types de même aspect
-15000 quel que soit le shoot demandé.
-180
4.2. Discussion des résultats
-200 -20000
Top-Shoot L'analyse bibliographique ne nous a pas
permis de retrouver d'étude similaire sur le geste
1 ~ IJint SSS n=21
de shoot, mis à part celle d'Uzzini-Vaillant (9),
••• SF SSS n=31 mais dont le protocole reste par trop évasif et
Denoyelle (6), dont l'étude est réalisée avec un
• G acc SSS n=40
système cinématographique mais sans analyse
EMG. La concordance entre les vitesses arti-
FIG. 7. - Corrélation entre l'accélération articulaire du genou
et l'activité du HF et des IJint. culaires de Denoyelle (6) est identique avec les
nôtres. Les études de De Proft (10) ou de
Isokawa (11) utilisent un support vidéo mais la
prise d'informations : difficultés pour placer les
précision temporelle est faible, ce qui limite
électrodes aux mêmes endroits pour nos sujets,
l'analyse de l'EMG. Des explorations EMG sur
fixité des goniomètres, vitesse de shoot variable.
Toutefois, ces distorsions ont pu être réduites les muscles ischio-jambiers sont fréquences
comme celle de Zimmermann (12) et celle de
par un protocole strict.
Durant les pré-tests, nous avons mesuré Walch (13) mais sur des gestes purs; celle de
séparément l'activité EMG de l'enregistrement Crassat (14) n'étudiait pas un mouvement lancé.
goniométrique et comparé leur concordance L'analyse des extenseurs et fléchisseurs du genou
avec les enregistrements concomitants de ou de la hanche chez des footballeurs fait l'objet
l'étude, il s'avère que nous retrouvons le même d'études grâce à Morvan (15) ou Narici (16)
type de courbes. Nous avons porté l'attention mais sur un appareillage isocinétique ne permet-
du sujet sur le fait qu'il fallait viser une cible tant pas d'analyser le geste qui, comme nous le
et nous lui avons demandé de répéter des voyons, s'effectue sur des vitesses articulaires de
« shoots » non équipés puis équipés. Les sujets l'ordre de 800 degrés/seconde.
La co activation des muscles de la cuisse lors
ne se sentaient pas gênés par l'appareillage mais
plutôt par le fait que le ballon n'offrait pas de de l'extension du genou a été étudiée par
résistance. Si nous avions mis une résistance par Draganish (17) mais sur une position décubitus
le biais d'un vrai ballon, l'activité EMG aurait ou procubitus.
été amplifiée ne permettant pas, par la suite, De ce fait, il faut trouver des références
l'analyse comparative avec les accélérations générales sur le geste balistique pour comparer
articulaires. nos résultats. Godaux et Chéron évoquent dans
Pour en finir avec l'EMG, il faut noter que leur livre sur le mouvement l'aspect neuro-
sur des mouvements uniques de ce type, il n'y physiologique du geste balistique (7). Il existe
a pas de fatigue musculaire donc pas de en fait 2 gestes balistiques : un geste avec
modification du signal EMG comme l'ont décrit uniquement une bouffée d'activité des agonis tes
Hakkinen et Komi (8). lorsque le sujet sait que le geste sera arrêté

mécaniquement par l'articulation ou par une
butée extérieure et un geste avec triple bouffée
EMG avec bouffée agoniste puis antagoniste puis
agoniste. C'est celui-ci que nous retrouvons.
Dans notre cas, l'activité des antagonistes
apparaît le plus souvent, toutefois elle est parfois
peu importante d'où l'aspect irrégulier des
courbes de freinage des ischio-jambiers par
rapport à la flexion concentrique « pré-shoot ».
L'hypothèse d'une « tension active » dévelop-
pée par le système gamma qui freinerait le
mouvement par mise en tension des fuseaux
neuromusculaires pourrait exister parallèlement
et est suspectée lorsque les courbes ne possèdent
que quelques pics. Il faut, par contre, exclure
le réflexe myo-tendineux, le délai de réponse
étant constant nous ne voyons pas comment
celui-ci pourrait s'adapter aux différentes accélé-
rations articulaires du genou.
En clinique, les ruptures des ischio-jambiers
(18, 19) sont souvent le fait d'un shoot manqué
inattendu, la pré-programmation fine liée à la
cible n'étant plus adaptée lors de l'exécution du
geste. Si le sportif avait pré-programmé ses
paramètres de manière extrême, le frein passif
du ballon n'existant plus, la rupture apparaît
comme inévitable.
Au niveau articulaire, le genou est en flexion
maximale lors du démarrage en flexion de la
hanche, ce qui permet un lancer de mouvement
avec un frein inertiel minimum. La position du
genou lors du « shoot » est aux alentours de
65° de flexion avec 30° pour la hanche, ce qui
correspond à la course d'efficacité maximum du
RF. Une nouvelle fois (3), l'organisme montre
une organisation efficace sur des gestes
fonctionnels.
Au niveau musculaire, le RF est le muscle
accélérateur du mouvement. Il lance le geste du
fait de son aspect fusiforme et de l'alignement
de ses sarcomères en série qui lui donne un
pouvoir de raccourcissement important. Le VM
interviendrait comme ajusteur fin par sa place
latérale au mouvement (20) et ses sarcomères
en parallèle. En clinique, les ruptures du RF sont
très fréquentes, la solution de l'ablation chirurgi-
cale est fréquente car les solutions de continuité
sont souvent importantes. Il serait intéressant
d'étudier l'organisation du mouvement chez des
~
Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5 209
patients opérés ainsi que le retentissement sur
la performance (reprise du niveau antérieure sur
la précision du shoot, durée d'apprentissage d'un
autre geste par rapport à un sujet norma1. ..).
RETOMBÉE EN RÉÉDUCATION
Nous retenons de précédemment 4 points
- la course musculaire des ischio-jambiers
devra être entretenu sans excès afin d'éviter un
frein articulaire passif qui finirait par léser
l'articulation;
- la course musculaire du RF doit être
importante pour favoriser le débattement arti-
culaire. Il faudra étirer ce muscle et favoriser
un renforcement des sarcomères en série en
jouant sur l'accélération articulaire, le mode
isocinétique apparaissant peu adapté;
- la reprise de l'entraînement devra s'effec-
tuer sur des gestes variés afin de solliciter le
réglage fin du muscle VM sur différents
« pattern » ;
- la reprise de l'entraînement des ischio-
jambiers dans leur rôle freinateur se fera par
l'intermédiaire de gestes répétés sur cible réelle.
Conclusion
Ce travail s'est effectué à deux niveaux: un
premier niveau analysant la validité de la
méthodologie et un second niveau analysant la
« motilité » du shoot.
La méthodologie utilisée est originale par le
fait qu'elle détermine quel muscle fournit l'éner-
gie au système balistique par l'étude des
accélérations articulaires.
Nous retrouvons un « pattern triphasique »
pour l'activité EMG et les mêmes vitesses
articulaires recherchées par analyse opto-
cinématique.
L'analyse des résultats met en évidence que
la présence d'une cible influe positivement sur
la qualité de la pré-programmation, malgré
l'apprentissage. Le RF est le muscle moteur du
shoot tandis que le VM est un muscle de réglage
fin. Les ischio-jambiers sont les muscles frein du
~=~--------~~~~~~---------~-~--~~~----
------~-----
210 Ann. Kinésithér., 1995, t. 22, n° 5
shoot avec toutefois des variations dans l'inten-
sité. Enfin, nous n'avons pas pu déterminer le
rôle différent du RF, BF et IJint lors des
différents types de shoot demandé. Les étire-
ments et l'entraînement sur un mode de varia-
tions de vitesse devrait permettre au RF
d'optimiser sa fonction lors du shoot.
La présence d'une cible permettant un meil-
leur réglage du geste, comme le montre l'activité
du VM. Il serait intéressant de comparer nos
« standards » avec ceux de professionnels.
Pour conclure, souhaitons que ces analyses
gestuelles se développent afin d'agir sur l'entraî-
nement et la prévention dans le milieu du sport.
Références
1. COUSINS SJ. A parallelogram chain designed ta mesure
human joint motion. Thesis, Univ. British Columbia, July
1975, Dept Mechanical engineering, division of
orthopaedics.
2. LAMOUREUX LW. Kinematic measurements in the study
of human walking. Bull Proth Res 1971 ; 3-84.
3. PENINOU G. Analyse du paradoxe de Lombard lors de
l'action de se lever. Études goniométriques et élec-
tromyographiques. Ann Kinésithér 1990; 17 : 433-42.
4. BASMAJIAN JV. Muscles alive. Their functions revealed by
Electromyography. Fourth Edition. Baltimore: Williams and
Wilkins Compagny, 1978.
5. PIERRON G, LEROY A. Analyse des systèmes d'organisation
en chaîne musculaire et conséquences sur la stratégie
thérapeutique. Kinésithér Sci 1987; 255 : 19-52.
6. DENOYELLE C. Analyse des vitesses développées par des
chaînes musculaires séries et parallèles. Mémoire de moni-
teur-cadre en massa-kinésithérapie, Université Région Picar-
die, Bois-Larris, 1993.
Juste un mot :
LEDDERHOSE (maladie du ...) (1894) : néofibromatose
Correspond à la maladie de Dupuytren à la main.
7. GODAUX E, CHERON G. Le mouvement. Paris : Medsi-
McGraw, 1989 : 159-61.
8. HAKKINEN K, KOMI PV. Fatiguability in voluntary and
reflex contraction after conditioning of human skeletal
muscle. Electromyogr Clin Neurophysiol 1985 ; 25 : 319-30.
9. UZZENI- VAILLANT AM. Analyse de l'activité des muscles
antérieurs et postérieurs de la cuisse. Electromyographie
cinésiologie télémétrée. Mémoire de Biomécanique, Lyon,
1981.
10. DE PROFT E. Muscle activity in the soccer kick. First world
congress ofscience andfootball. Liverpool 13-17, aprill987.
British Library Cataloguing in Publication DATA 1988.
Il. ISOKAW A M. A biomechanical analysis of the instep kick
motion in soccer. First world congress of science and football.
Liverpool 13-17, apri11987. British Library Cataloguing in
Publication DATA 1988.
12. ZIMMERMANN A. Le biceps crural. Etude électromyogra-
phique de son fonctionnement. Son rôle de stabilisation
active du genou. Certificat d'études spéciales de Rééducation
Fonctionnelle. Faculté de Médecine de Strasbourg, 1976.
13. W ALCH G. Electromyographie du muscle demi-membra-
neux dans l'ensemble des mouvements du genou. Mémoire
de Biomécanique, Lyon, 1980.
14. CRASSAT JL. Améliorer les connaissances des exercices de
kinésithérapie des muscles ischio-jambiers. Mémoire de
moniteur-cadre en massa-kinésithérapie, Université Région
Picardie, Bois-Larris, 1993.
15. MORVAN R. Explotation isocinétique des extenseurs et des
fléchisseurs du genou de footballeurs Français : premiers
résultats. Thèse Méd, Rennes, 1986.
16. NARICI MV. Maximal baIl velocity and peak torques ofhip
flexors and knee extensor muscles. First world congress of
science and football. Liverpool 13-17, april 1987. British
Library Cataloguing in Publication DATA 1988.
17. DRAGANISH LF. Coactivation of the Hamstrings and
Quadriceps during the extension of the Knee. J Bane Jt Surg
1989; 7lA : 1075-81.
18. GENETY J et al. Pathologie traumatique du muscle chez
le sportif. Encycl Méd Chir Paris Appareil locomoteur, 15151
AlO, 3-1979.
19. ROSTAN A. Les micro-ruptures musculaires: une réalité à
connaître. Méd Hyg 1983; 41 : 2574-78.
20. WEINSTABL R et al. The extensor apparatus of the knee
joint and its peripheral vasti : anatomic investigation and
clinical relevance. Surg Radial Anat 1989; 11 : 17-22.
plantaire ou « culotte de CUlr ».
M.-Ph. DURAFOURG