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- Guénolé Loterie -
iHeart (ou I♥) est un street artiste canadien qui sévit essentiellement dans la ville de
Vancouver, qu’il décrit lui même comme une ville « jeune, dynamique et créative, mais qui est bien
trop distraite »1. C’est donc pour ces raisons que le jeune artiste la choisit souvent comme écrin
pour ces pochoirs et autres graffitis qui ont souvent pour sujet des problèmes de société. L’oeuvre
qui a fait son succès, qui l’a fait connaître, et dont nous allons parler ici, est ainsi placé dans le
Stanley Park de Vancouver, et a pour nom Nobody Likes Me. Dénonçant les réseaux sociaux et leur
influence croissante sur nos sociétés, cette oeuvre porteuse de paradoxes nous fait nous questionner
sur notre propre rapport et notre propre indépendance vis-à-vis de ces outils modernes
On y voit un jeune garçon vêtu d’un pull vert et d’un pantalon noir tenant à la main un
portable, dont la couleur verte de l’écran renvoie à son pull. L’enfant est en larme, on veut connaître
la raison de ces pleurs qui nous émeut, son visage dépeint en quelques ombre astucieuses nous fait
immédiatement éprouver de l’empathie pour lui. La raison de cette tristesse semble se trouver dans
un phylactère au dessus de lui, cependant la bulle ne contient pas de texte, mais s’apparente à une
bulle de notification du réseau social Instagram, qui explique que personne n’a commenté de photos
de l’enfant ou ne lui a envoyé de messages, que personne n’a aimé ses photos, et enfin que personne
ne s’est abonné à sa page Instagram. Le contraste est frappant entre l’âge, jeune, du garçon et
l’importance qu’il accorde à ce qu’il se passe sur les réseaux sociaux, et les répercussions que cela à
sur lui : il semble en effet désespéré, il hurle, il pleure, il se met dans tout ses états, et ce
uniquement à cause d’une notification… De sympathie, on passe rapidement à une certaine forme
de mépris pour cet enfant qui fait si grand cas de sa popularité sur la Toile. Cette oeuvre illustre et
dénonce la dépendance de plus en plus forte que l’on a à l’égard des réseaux sociaux, a fortiori des
téléphones portables, mais qu’on ignore toujours en avançant l’argument ô combien puissant « Moi
je saurais faire attention », ou « Moi je saurais faire la part des choses ». Le graffiti nous montre en
outre que cette dépendance survient d’une part de plus en plus en tôt, et d’autre part qu’elle est de
plus en plus importante, que son emprise nous fait perdre le sens de la mesure au point de surréagir
à ce que peut nous annoncer notre portable.
On retrouve cette idée dans le titre, volontairement laissé en anglais car il serait très
difficile de rendre compte du jeu de mot qui existe en anglais. « Nobody likes me » peut en effet se
traduire par « Personne ne m’aime », ou « Personne ne me like », ce qui apporte de nouveaux
éléments de compréhension à l’oeuvre de iHeart : l’enfant pourrait faire la confusion entre ces deux
idées, son monde se résumerait dès lors aux réseaux sociaux, il n’aurait de relations qu’à travers ces