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L’argumentation

I. DEFINITION :
Argumenter c’est exprimer un jugement et le justifier, c’est-à-dire donner des raisons, afin de
convaincre quelqu’un du bien-fondé de ce jugement.
L’argumentation n’est pas un domaine réservé à quelques auteurs. Nous argumentons dans la
vie de tous les jours dès que nous essayons de faire triompher notre point de vue, le discours
politique prend presque toujours la forme de l’argumentation, la publicité use de procédés
argumentatifs, …
II. LES CARACTERISTIQUES DU DISCOURS ARGUMENTATIF
Sa fonction est de convaincre et de persuader le destinataire (défense d’un point de vue, critique
d’une position), l’amener à modifier une opinion pour en partager une autre, le pousser à faire
quelque chose qu’il n’avait pas au départ l’intention de faire, etc. Le locuteur s’implique donc
dans son discours et les marques de sa présence sont nettement visibles.
Pour s’assurer du caractère argumentatif d’un texte et identifier la thèse soutenue par l’auteur,
il faut observer que :
➢ Les marques d’énonciation sont à considérer :
- Les marques éventuelles de la présence de la première personne sont : les pronoms personnels
(je, nous), les adjectifs et les pronoms possessifs (mon, notre, me, le mien, …).
- A la différence des marques de la première personne, le pronom indéfini « on » peut être
ambigu dans son usage. Il peut avoir 3 valeurs différentes :
• « On » est l’équivalent de « tout le monde », « les gens ».
• « On » est l’équivalent de « nous ». Dans ce cas, le « je » de l’auteur du texte
argumentatif peut être englobé par ce « on » et le « on » renvoyer à l’expression du
jugement de l’auteur.
• Mais « on » peut également exclure le « je » et désigner de manière dévalorisante
d’autres personnes que lui.
➢ Le locuteur n’est généralement pas neutre en s’exprimant. Les termes indiquant un
jugement formulé par l’auteur sont : les termes valorisants ou dévalorisants, les verbes
modaux (ex : verbes de devoir ou de commandement : il faut, nous devons, ...), les procédés
de l’amplification (hyperboles, adverbes d’intensité, …)
➢ L’organisation typographique renvoie à une pensée claire, surtout en ce qui concerne la
division en paragraphes qui marque généralement les étapes du raisonnement.
➢ Les connecteurs logiques ou chronologiques permettent de souligner les articulations de la
pensée.
➢ La phrase d’ouverture, lorsque la construction est rigoureuse, présente brièvement le thème
du texte et cet effet d’annonce oriente le lecteur dans sa compréhension du texte.
➢ Une brève conclusion reprend parfois, en fin de texte, la formule initiale et signale que,
phrase après phrase, le rédacteur vous a bien conduit sur le lieu annoncé.
On exprime un jugement dans les types d’écrits suivants : articles de presse, note de synthèse,
rapport, fiche de lecture, exposé, critique de film, discours politique, plaidoyer, …
On exprime une opinion ou un jugement en général quand on veut justifier ce qu’on pense ou
présenter un avis sur une question. On s’appuie pour cela sur des arguments.
III. METHODOLOGIE
Une argumentation efficace, réellement convaincante, implique une véritable démarche
intellectuelle et une organisation réfléchie du discours.
Trois types d’argumentation sont possibles pour exposer le point de vue de l’auteur :
✓ Soutenir une thèse : Tous les arguments doivent converger pour convaincre le lecteur
du bien-fondé de la thèse soutenue. Défendre sa thèse veut dire exposer et développer
toute une démonstration pour appuyer et prouver la justesse de son opinion. (Cette thèse
doit être clairement exprimée avant la démonstration).
✓ Réfuter une thèse : il s’agit de mettre à jour la faiblesse d’une thèse à laquelle on
s’oppose, de révéler ses contradictions, de critiquer les arguments sur lesquels elle se
fonde. Dans ce cas, l’argumentation ou la démonstration veut prouver que cette opinion
est sans fondement.
✓ Débattre ou discuter de la validité d’une thèse : l’argumentation doit procéder à la
confrontation de thèses divergentes ou opposées. Il s’agit de faire triompher la thèse à
soutenir sur une thèse adverse dont les arguments sont exposés et examinés.
Pour exposer son point de vue ou pour réfuter celui d’un autre, l’auteur peut organiser son
raisonnement en utilisant :
✓ l’énumération : l’auteur expose sa thèse ou la thèse contraire puis énumère les
arguments qui justifient ce point de vue.
✓ la concession : l’auteur présente une thèse en énumérant les arguments qui la
soutiennent, puis il expose son propre point de vue en employant des arguments qui le
valorisent par rapport à la thèse précédente.
✓ l’induction : l’auteur présente des arguments puis en arrive à une conclusion qui
constituera sa thèse.
✓ l’opposition directe entre arguments et contre-arguments.
IV. LES ARGUMENTS :
Il faut d’abord distinguer les arguments proprement dits de leur illustration :
➢ Les arguments : Ce sont les idées qui permettent de démontrer logiquement la thèse. Ils
ont une portée générale et sont orientés vers la même conclusion « ma thèse est exacte ».
Ils sont élaborés à partir de sa culture, de ses sentiments, de ses valeurs.
➢ L’illustration : C’est une donnée particulière qui vient à l’appui de la démonstration
logique. Elle sert à justifier une idée (un argument), à préciser une notion générale en
exposant un cas particulier, à prouver, à authentifier une affirmation.

1. Les types d’arguments :


Une thèse peut être soutenue par des arguments de natures diverses. On peut distinguer
deux catégories :
➢ Les arguments fondés sur la logique :
Ils tirent leur validité de leur aspect rationnel et convainquent le lecteur par l'adhésion
intellectuelle. C'est le cas de :
- l'argument par déduction, qui part d’un principe (d’une cause) général pour
aboutir) à une conséquence logique.
Ex : Cette montre est suisse, or les montres suisses sont de bonne qualité, donc
cette montre est de bonne qualité.
- l'argument par induction, qui effectue la démarche inverse, remontant de la
manifestation concrète (observation, expérience, exemple) à un principe général
 Ex : On observe toujours que les hommes recherchent les concentrations urbaines,
quitte à souffrir de leur encombrement. C'est bien la preuve que l'humanité s'épanouit
dans la communauté. ➔ Nous avons une observation (« On observe… ») puis la règle
qui en découle (« c’est bien la preuve que… »).

- l'argument par analogie, qui, pour établir un phénomène, le rapproche d'un


autre qui lui est apparenté. Il fait appel aux images et à la comparaison.
 Ex : La nuit a certainement une influence très grande sur les peines morales,
puisqu'elle en a sur les peines physiques. ➔ L’idée que la nuit a une influence
sur les peines morales résulte de l’analogie avec l’influence de la nuit sur les
peines physiques.

➢ Les arguments empiriques (fondés sur l’expérience) :


Ils tirent leur validité du réel et persuadent le récepteur par les éléments référentiels qu'il
peut connaître et confirmer. C'est le cas de :
- l'argument d'autorité, qui s'appuie sur une citation, ou sur une opinion dont on
souligne la valeur communément admise (un témoignage, une donnée chiffrée,
un constat scientifique qui servent de preuves). L’argumentateur fait alors
référence à un ouvrage célèbre, à un auteur ou à un spécialiste reconnu par son
rayonnement et sa compétence.
Ex : Selon une étude menée à l'université de Pittsburgh (Etats-Unis), les
personnes qui visitent le plus souvent les médias sociaux sont plus à risques de
développer des troubles du comportement alimentaire comme l'anorexie ou
la boulimie.
- l'argument par les valeurs, qui s'appuie sur les repères moraux d'une société
Ex : L'usage compulsif du téléphone portable dans les lieux publics compromet
la qualité de l'espace républicain.
- l'exemple argumentatif, qui donne à l'exemple une portée générale.
Ex : L'humanité est sans doute en progrès, mais le grave dérèglement du climat montre
assez qu'un pas en avant ici peut se payer d'un recul ailleurs. ➔ L’exemple du
dérèglement climatique suffit à remettre en question l’idée de progrès.

2. Les types d’illustrations :


Parmi les types d’illustrations possibles, nous pouvons distinguer :
✓ Le témoignage : un fait vécu par un autre personnage vient appuyer le propos.
✓ La preuve : un fait précis confirme des propos qui pourraient être contestés.
✓ La référence : l’œuvre, la renommée (célébrité) d’un écrivain donnent du poids à
ce qui est dit.
✓ Les chiffres traduisent un fait en valeur (chiffres réels, date, pourcentage).

✓ Le cas particulier ou exemple illustratif : il illustre, rend une idée générale plus
concrète.
Application

Exercice 1
Voici des propositions en rapport avec l’intelligence artificielle où l’idée principale de
l’argument est séparée de son illustration. Réunissez les paires et dites si l’argument ainsi
recréé est favorable ou défavorable à l’IA.

A. Cette technologie qui ne cesse d’évoluer a commencé à bouleverser nos modes de vie, et va
continuer à le faire dans le futur.
B. Les IA spécialisées dans la santé brassent des données hypersensibles.
C. Selon une étude PwC menée cette année auprès de 22 000 personnes dans 11 pays, 50 % des
emplois de bureau pourraient disparaître d'ici à 2029, et 30 % des emplois liés à la finance et à
l'assurance sont menacés.
D. Ces IA sont très efficaces pour remplir une tâche spécialisée mais elles ne peuvent raisonner,
communiquer, manipuler des concepts, etc. Une IA qui reconnaît un chat dans une image ne
maîtrise pas le concept de chat.
E. L’emploi est l'un des domaines où l'on peut craindre le pire.
F. L’arrivée des voitures autonomes, des robots chirurgiens, des algorithmes avocats ou des
majordomes virtuels est déjà programmée.
G. L’intelligence artificielle actuelle est encore très loin de ce que peut réaliser un humain.
H. Elles connaissent l'historique et les traitements de milliers de patients, faisant craindre qu'un
jour, ces données soient utilisées à de mauvaises fins.

Exercice 2
Pour chacune des propositions suivantes en rapport avec la voiture électrique, dites de
quel type d’argument il s’agit et justifiez votre réponse.
- En moyenne, effectuer 100 kilomètres en voiture électrique coûte environ 2 euros en
électricité, contre 8,50 euros de carburant avec un modèle diesel équivalent ou 11,50 euros s’il
s’agit d’un véhicule à essence. Avec une telle équation, plus vous réaliserez de kilomètres à
l’année, plus rouler en voiture électrique sera financièrement intéressant.
- Manifestement vous ne connaissez rien à la voiture électrique, et vous avez oublié qu’il y a
des Tesla. J’en ai une depuis quelques mois. Je n’ai jamais eu une voiture aussi fantastique. Je
n’ai plus envie de conduire une autre voiture que cette Tesla, qui roule presque toute seule sur
autoroute et qui est extrêmement sûre.
- Depuis plus de dix ans, des équipes de recherche du monde entier en débattent à coups
d’analyses de cycle de vie, ces études qui quantifient les conséquences sur l’environnement
d’un objet depuis l’extraction des métaux nécessaires à sa fabrication, jusqu’à sa mise au rebut.
Entre 2010 et 2019, au moins 85 études de ce type ont été réalisées ! Un point fait consensus :
produire un véhicule électrique demande beaucoup plus d’énergie, et émet deux fois plus de
gaz à effet de serre que de produire un véhicule thermique, du fait de la production de sa batterie
et de sa motorisation.
- « Comment justifier de détruire des territoires comme le bassin des Salinas Grandes et la
lagune de Guayatayoc*, occupés par quelque 7.000 habitants, 33 communautés autochtones et
ethniques, et tout un mode de vie fondé sur la coresponsabilité et la démocratie directe,
comment donc justifier cette destruction au nom de la lutte contre la pollution de l’air dans des
villes, une contamination à laquelle ces communautés n’ont pris aucune part ? »
* Lieux d’extraction du lithium contenu dans les batteries d’ordinateur, de téléphone et de voitures électriques.

Exercice 3
A la sortie de la chanson Le Déserteur, écrite par Boris Vian en 1955, M. Paul Faber,
conseiller municipal à Paris, demande qu’elle soit censurée. Vian lui répond dans une lettre
où il se révolte contre la guerre.
Voici d’autres arguments employés par Vian dans sa lettre. Dites de quel type d’argument
il s’agit à chaque fois.
a/ On ne règle pas ces problèmes en dix lignes : mais l’un des pays les plus civilisés du monde,
la Suisse, les a résolus, je vous le ferai remarquer, en créant une armée de civils ; pour chacun
d’eux, la guerre n’a qu’une signification : celle de se défendre. Cette guerre-là, c’est la bonne
guerre. Tout au moins la seule inévitable. Celle qui nous est imposée par les faits.
➔ ………………………………………………………………………………………………
d/ Oui, cher monsieur Faber, figurez-vous, certains militaires de carrière considèrent que la
guerre n’a d’autre but que de tuer les gens. Le général Bradiey par exemple, dont J’ai traduit
les mémoires de guerre, le dit en toutes lettres.
➔ ……………………………………………………………………………………………
b/ Il est des militaires de carrière qui considèrent la guerre comme un fléau inévitable et
s’efforcent de l’abréger. Lorsque l’on voit une guerre prendre fin en un mois par la volonté d’un
homme, on est forcé de croire que celle-là au moins n’était pas inévitable. Demandez aux
anciens combattants d’Indochine - à Philippe de Pirey, par exemple (Opération Sachis, chez
Julliard) - ce qu’ils en pensent. Ce n’est pas moi qui vous le dis - c’est quelqu’un qui en revient.
➔ ………………………………………………………………………………………………
c/ D’ailleurs mourir pour la patrie, c’est fort bien : encore faut-il ne pas mourir tous — car où
sera la patrie ? Ce n’est pas la terre — ce sont les gens, la patrie. Ce ne sont pas les soldats : ce
sont les civils que l’on est censé défendre — et les soldats n’ont rien de plus pressé que de
redevenir civils, car cela signifie que la guerre est terminée.
➔ ………………………………………………………………………………………………

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