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O P P 18-3228/N G

13 décembre 2018

Devenu définitif le 18 janvier 2019

PROJET DE DECISION

STATUANT SUR UNE OPPOSITION


****

LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE


INDUSTRIELLE ;

Vu le Règlement (UE) n °1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013


portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n
8 922/72, (CEE) n ° 234/79, (CE) n 8 1037/2001 et (CE) n 8 1234/2007 du Conseil ;
Vu le Code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L. 411-4, L. 411-5, L.711-4,
L. 712-3 à L. 712-5, L. 712-7, L. 713-2, L. 713-3, L. 722-1, R. 411-17, R. 712-13 à R. 712-18, R. 712-21,
R. 712-26 et R. 718-2 à R. 718-4 ;

Vu l'arrêté du 24 avril 2008 modifié, relatif aux redevances de procédure perçues par l'Institut
national de la propriété industrielle.

Vu la décision n° 2014-142 bis modifiée du Directeur Général de l'Institut National de la Propriété


Industrielle relative aux conditions de présentation et au contenu du dossier des demandes
d'enregistrement de marques.

Vu la décision n° 2016-69 du Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle


relative aux modalités de la procédure d’opposition à enregistrement d’une marque.

I.- FAITS ET PROCEDURE

a déposé, le 22 mai 2018, la demande d'enregistrement


n° 18 4 454 998 portant sur le signe verbal LEVAIN DE CHAMPAGNE.

Ce signe est présenté comme destiné à distinguer les produits suivants : « Affiches ; matières
d'emballage [rembourrage] en papier ou en carton ; emballages ; enseignes en papier ou en carton ;
étiquettes en papier ou en carton ; flyers/tracts ; images ; produits de l'imprimerie /impressions /imprimés
; imprimés graphiques ; articles de papeterie ; papier d'emballage ; prospectus ; publications imprimées ;
représentations graphiques ; reproductions graphiques ; sachets [enveloppes, pochettes] en papier ou
en matières plastiques pour I emballage / sacs [enveloppes, pochettes] en papier ou en matières
plastiques pour l'emballage ; sacs en papier ou en matières plastiques ; matières d'emballage ni en
caoutchouc, ni en matières plastiques, ni en papier ou en carton ; sacs [enveloppes, pochettes] en
matières textiles pour l'emballage / sachets [enveloppes, pochettes] en matières textiles pour l'emballage
; sacs en matière textile ; tote bag ; préparations aromatiques à usage alimentaire ; barres de céréales ;
Biscottes ; Biscuits ; biscuits de malt ; boissons à base de café ; boissons à base de cacao ; boissons à
base de chocolat ; boissons à base de thé ; Bonbons ; Brioches ; Cacao ; Café ; caramels [bonbons] ;

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Chocolat ; confiserie / sucreries ; coulis de fruits [sauces] ; crème anglaise ; crème de tartre à usage
culinaire ; crèmes glacées ; crêpes [alimentation] ; décorations au chocolat pour gâteaux ; desserts sous
forme de mousses [confiserie] ; fondants [confiserie] ; Gâteaux ; gâteaux de riz ; gaufres / bricelets ;
glaçages pour gâteaux ; glaces alimentaires ; hot-dogs ; Levain ; mousses au chocolat ; pain azyme ;
pain d'épice ; Pain ; pâtés à la viande ; pâtés en croûte ; Pâtisserie ; petits fours [pâtisserie] ; petits pains
; petits-beurre ; Pizzas ; Pralines ; Quiches ; sorbets [glaces alimentaires] ; sucreries pour la décoration
de gâteaux ; Tartes ; Thé ; tourtes ; sandwiches ».

Le 31 juillet 2018, le Directeur de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO),


Etablissement Public Administratif, a formé opposition à l’enregistrement de cette marque, pour
l’intégralité des produits désignés dans la demande d’enregistrement, en invoquant l’atteinte à une
appellation d’origine protégée.

La dénomination de l’appellation d ’origine invoquée à l’appui de l’opposition est CHAMPAGNE.

L’opposition, formée à l’encontre de l’intégralité des produits désignés dans la demande


d’enregistrement contestée, a été notifiée en date du 9 août 2018 à la déposante et cette dernière a
présenté des observations en réponse.

En date du 7 septembre 2018, l’INPI a notifié à la déposante une objection de fond et de forme
concernant certains des produits revendiqués par la demande d’enregistrement, suite à quoi la déposante
a procédé à sa régularisation dans le délai qui lui était imparti à cet effet.

II.- ARGUMENTS DES PARTIES

A.- L'OPPOSANT

L’opposant fait valoir que le signe contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE porte atteinte à l’appellation
d’origine CHAMPAGNE pour l’ensemble des produits revendiqués dans le dépôt, au regard des dispositions
françaises et de l’Union européenne.

Il invoque à cet égard les articles L. 711-4 et L.712-4 du code de la propriété intellectuelle, soulignant
que la marque LEVAIN DE CHAMPAGNE porte atteinte ou, à tout le moins, risque de porter atteinte, au nom
et/ou à la réputation et la notoriété de l’appellation d’origine CHAMPAGNE.
Il souligne à cet égard que l’appellation est intégralement reproduite dans le signe contesté et que ce dernier
est porteur d ’un jeu de mots faisant directement référence au vin de Champagne, de sorte que le
consommateur fera nécessairement un lien avec le vin bénéficiant de la célèbre appellation d ’origine
CHAMPAGNE.

Il fait en outre valoir que la demande d ’enregistrement contrevient aux dispositions de l’article 103 2.
du règlement (UE) n “ 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant
organisation commune des marchés des produits agricoles, applicable à l’appellation d’origine protégée
CHAMPAGNE.

Il invoque en particulier l’article 103 2. a) ii) dudit règlement, arguant que l’appellation d’origine
protégée CHAMPAGNE est utilisée à des fins commerciales dans le signe contesté et que cette utilisation
exploite sa réputation.
Il précise à cet égard que la marque étant destinée à être exploitée dans la vie des affaires, son dépôt
constitue une utilisation commerciale de l’appellation et qu’en tout état de cause la déposante commercialise
d’ores et déjà des sacs sous le signe LEVAIN DE CHAMPAGNE. Au soutien de cette affirmation, il fournit
des photographies publiées par la déposante sur Internet.
Il fait valoir que l’exploitation de la réputation de l’appellation d’origine CHAMPAGNE est caractérisée en
l’espèce par le fait que, compte tenu de la reprise de la dénomination de l’appellation d ’origine en tant que
telle dans le signe contesté et de l’exceptionnelle notoriété de cette appellation, le public établira
nécessairement un lien entre les produits revêtus de la marque contestée et l’appellation d’origine, ce lien

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étant renforcé par le jeu de mots compris dans le signe contesté qui fait directement référence au vin de
Champagne, la demande d ’enregistrement visant ainsi à profiter indûment de la réputation attachée à
l’appellation et au vin qui en bénéficie pour promouvoir les produits visés.

Il affirme par ailleurs qu’en tout état de cause, l’utilisation de la dénomination CHAMPAGNE dans la
demande d’enregistrement constitue une usurpation et une évocation de l’appellation d’origine au sens de
l’article 103 2. b) du règlement précité, en ce que le signe contesté reprend l’appellation et fait référence au
vin qui en bénéficie par le jeu de mots qu’il contient.

A l’appui de son argumentation sur la réputation de l’appellation d’origine CHAMPAGNE, l’opposant


fournit plusieurs décisions de justice françaises. Il soutient en outre que cette appellation reflète une image
d’excellence, de qualité et de prestige.

Il invoque par ailleurs plusieurs décisions de l’EUIPO ayant reconnu justifiées des oppositions
formées contre des demandes de marques de l’Union européenne sur le fondement de l’appellation d’origine
CHAMPAGNE.

B.- LE TITULAIRE DE LA DEMANDE D’ENREGISTREMENT

Dans ses observations en réponse à l’opposition, la déposante explicite le contexte dans lequel
s’inscrit le choix et le dépôt de la demande d’enregistrement contestée.

Sur le fond, elle conteste le bien-fondé de l’opposition au regard des dispositions françaises
invoquées, affirmant que l’opposant ne démontre en rien l’existence d ’un risque d’atteinte au nom, à
l’image, à la réputation ou à la renommée de l’appellation d ’origine CHAMPAGNE par le signe contesté.

Elle fait valoir à cet égard que contrairement à ce qu’affirme l’opposant la dénomination
CHAMPAGNE du signe contesté, précédée de la préposition « DE », ne désigne pas l’appellation
d’origine mais la région française dénommée Champagne.

Au soutien de cet argument, elle invoque et fournit un arrêt de la Cour d’appel du 26 octobre 2012
ayant statué en ce sens dans un cas d’espèce selon elle transposable.

Elle ajoute que la mention « Made in Reims » et la représentation de la cathédrale de Reims


inscrites sur les sacs qu’elle commercialise sous le signe LEVAIN DE CHAMPAGNE confortent cette
compréhension de la dénomination CHAMPAGNE du signe contesté en tant que zone géographique.

Elle affirme en outre n’avoir à aucun moment associé le signe LEVAIN DE CHAMPAGNE à des
éléments faisant référence au vin.

Elle fait en outre état de l’existence de 16 marques enregistrées en France et dont la structure
correspond selon elle à celle du signe contesté, contenant également CHAMPAGNE précédé de la
préposition DE afin de l’utiliser comme indication géographique.

Elle affirme du reste que dans le signe contesté la dénomination CHAMPAGNE fait surtout
référence à Monsieur Christophe Z dont le nom de compagnon est « Champagne ». Elle précise l’avoir
explicité ainsi dans l’une de ses publications sur Instagram : « j ’ai déposé ma marque Levain de
Champagne en hommage au compagnon boulanger du devoir du tour de France : Champagne Zunic ».

Elle conteste par ailleurs le bien-fondé de l’opposition au regard des dispositions du règlement
(UE) n °1308/2013 du 17 décembre 2013 invoqué par l’opposant.

Elle affirme à cet égard que la demande d’enregistrement ne rentre pas dans le champ
d’application de l’article 103 2. a) ii) dudit règlement qui se limite aux cas d’utilisation d ’une AOP/IGP, dès
lors que le signe contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE ne fait pas référence au vin protégé par l’AOP
CHAMPAGNE mais au territoire de la Champagne.

Elle ajoute que l’opposant n’a du reste pas démontré en quoi la réputation de l’AOP
CHAMPAGNE serait indûment exploitée.

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Elle souligne à cet égard que le jeu de mots invoqué par l’opposant est « tiré parles cheveux e t...
ne saurait donc induire en confusion le consommateur ». Elle ajoute qu’un tel jeu de mots n’est en aucun
cas volontaire. Elle précise à cet égard les raisons expliquant son choix du terme LEVAIN dans le signe
contesté.

Elle conteste par ailleurs l’application au signe contesté des dispositions de l’article 103 2. b) du
règlement UE précité. Elle invoque à cet égard un arrêt de la CJUE du 20 décembre 2017 et la notion
d’ « évocation » définie par le juge européen.

III.- DECISION

CONSIDERANT qu’il est formé opposition à l’enregistrement du signe verbal LEVAIN DE CHAMPAGNE
pour l’intégralité des produits revendiqués dans le dépôt ;

Que suite à la régularisation de la demande d ’enregistrement effectuée par son titulaire, le libellé à
prendre en considération dans la présente procédure est le suivant : « Affiches ; matières d'emballage
[rembourrage] en papier ou en carton ; enseignes en papier ou en carton ; étiquettes en papier ou en
carton ; flyers / tracts ; images ; produits de l'imprimerie / impressions / imprimés ; imprimés graphiques
; articles de papeterie ; papier d'emballage ; prospectus ; publications imprimées ; représentations
graphiques ; reproductions graphiques ; sachets [enveloppes, pochettes] en papier ou en matières
plastiques pour l'emballage / sacs [enveloppes, pochettes] en papier ou en matières plastiques pour
l'emballage ; sacs en papier ou en matières plastiques ; matières d'emballage ni en caoutchouc, ni en
matières plastiques, ni en papier ou en carton ; sacs [enveloppes, pochettes] en matières textiles pour
l'emballage / sachets [enveloppes, pochettes] en matières textiles pour l'emballage ; sacs en matière
textile ; préparations aromatiques à usage alimentaire ; barres de céréales ; Biscottes ; Biscuits ; biscuits
de malt ; boissons à base de café ; boissons à base de cacao ; boissons à base de chocolat ; boissons
à base de thé ; Bonbons ; Brioches ; Cacao ; Café ; caramels [bonbons] ; Chocolat ; confiserie /sucreries
; coulis de fruits [sauces] ; crème anglaise ; crème de tartre à usage culinaire ; crèmes glacées ; crêpes
[alimentation] ; décorations au chocolat pour gâteaux ; desserts sous forme de mousses [confiserie] ;
fondants [confiserie] ; Gâteaux ; gâteaux de riz ; gaufres / bricelets ; glaçages pour gâteaux ; glaces
alimentaires ; hot-dogs ; mousses au chocolat ; pain azyme ; pain d'épice ; Pain ; pâtés à la viande ;
pâtés en croûte ; Pâtisserie ; petits fours [pâtisserie] ; petits pains ; petits-beurre ; Pizzas ; Pralines ;
Quiches ; sorbets [glaces alimentaires] ; sucreries pour la décoration de gâteaux ; Tartes ; Thé ; tourtes
; sandwiches ».

CONSIDERANT que le droit antérieur invoqué par l’opposant est l’appellation d’origine protégée
CHAMPAGNE, désignant un « vin » ;

Que l’opposant établit que cette appellation, consacrée initialement en tant qu’Appellation d ’Origine
Contrôlée en France par un décret du 29 juin 1936, est devenue en 2009 une Appellation d’Origine
Protégée relevant du règlement (UE) n °1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du
17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles ;

Qu’il fournit à cet égard un extrait du Registre des Appellations d’Origine Protégées et des Indications
Géographiques Protégées établi par l’article 104 du règlement (UE) n °1308/2013 précité, faisant état
de l’enregistrement de l’appellation protégée CHAMPAGNE pour un « vin avec appellation d ’origine
protégée ».

CONSIDERANT que l’opposant fait valoir que le signe contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE porte
atteinte à l’appellation d’origine CHAMPAGNE pour l'ensemble des produits revendiqués dans le dépôt,
au regard des articles L. 711-4 et L. 712-4 du code de la propriété intellectuelle et des dispositions de
l’article 103 2. a) ii) et b) du règlement (UE) n “ 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du
17 décembre 2013.

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CONSIDERANT qu’aux termes de l’article L 711-4 du code de la propriété intellectuelle, « ne peut être
adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment : (...) d) A une
appellation d'origine protégée ou à une indication géographique » ;

Que l’article L 712-4 de ce même code dispose que « Pendant le délai mentionné à l'article L. 712-3,
opposition à la demande d'enregistrement peut être faite auprès du directeur de l'Institut national de la
propriété industrielle par : r bis Le directeur de l'Institut national de l'origine et de la qualité, dès lors
qu'il y a un risque d'atteinte au nom, à l'image, à la réputation ou à la notoriété d'une appellation d'origine
ou d'une indication géographique mentionnées aux articles L. 641-5, L. 641-10, L. 641-11 et L. 641-11-
1 du code rural et de la pêche maritime » ;

Qu’enfin, il peut être considéré, à la lecture de l’article L. 722-1 du code précité, qu’une « atteinte portée
à une indication géographique » est caractérisée en cas de « violation de la protection qui lui est
accordée par le droit de l'Union européenne ou la législation nationale », ce texte précisant que « pour
l'application du présent chapitre, on entend par " indication géographique " : a) Les appellations
d'origine définies à l'article L. 115-1 du code de la consommation ; b) Les indications géographiques
définies à l'article L. 721-2 ; c) Les appellations d'origine et les indications géographiques protégées en
vertu du droit de l'Union européenne » ;

Qu’il résulte de ces dispositions que dans le cadre d’une procédure d’opposition, une demande
d’enregistrement contestée doit être refusée à l’enregistrement lorsque, et dans la mesure où, l’usage
de cette marque pour les produits et services objets de l’opposition serait de nature à enfreindre les
règles de protection accordées à une « indication géographique » (au sens de l’article L.722-1 du code
de la propriété intellectuelle) par le droit de l’Union européenne ou la législation nationale.

CONSIDERANT que la protection accordée par le droit de l’Union européenne à l’appellation d’origine
protégée CHAMPAGNE est fixée par le règlement (UE) n “ 1308/2013 du Parlement européen et du
Conseil du 17 décembre 2013, notamment dans son article 103 2.

CONSIDERANT que l’opposant invoque à titre principal l’atteinte à l’appellation d’origine protégée
CHAMPAGNE par la demande d’enregistrement en ce qu’elle enfreindrait les dispositions de l’article
103 2. a) ii) du règlement (UE) n “1308/2013 précité ;

Que l’article 103 2. a) ii) dudit règlement dispose qu’ « une appellation d'origine protégée (...), ainsi que
le vin qui fait usage de cette dénomination protégée (...), sont protégés contre : a) toute utilisation
commerciale directe ou indirecte de cette dénomination protégée : ii) dans la mesure où ladite utilisation
exploite la réputation d'une appellation d'origine (...), et ce même pour des produits non comparables ;

Qu’il convient dès lors d’examiner le bien-fondé de l’opposition au regard de ces dispositions.

CONSIDERANT qu’en l’espèce, la demande d’enregistrement porte sur le signe verbal LEVAIN DE
CHAMPAGNE, présenté en lettres majuscules d’imprimerie droites et noires ;

Que la dénomination protégée au titre de l’appellation d’origine invoquée est le nom CHAMPAGNE ;

Que force est de constater que cette dénomination protégée CHAMPAGNE se retrouve intégralement
dans le signe contesté, au sein duquel elle est nettement perceptible et individualisée ;

Qu’en outre, le signe contesté, en ce qu’il est phonétiquement identique à l’expression « le vin de
Champagne », se comprend à l’oreille comme la désignation même du vin bénéficiant de l’appellation
d’origine invoquée ;

Qu’à cet égard, les produits en cause, parmi lesquels ne figure plus le « levain », ne sont pas de nature
à remettre en cause cette compréhension auditive spontanée du signe contesté ;

Qu’ainsi, le signe contesté étant déposé à titre de marque et dès lors aux fins d’être utilisé dans le
commerce, l’usage de la marque LEVAIN DE CHAMPAGNE pour les produits en cause apparaît de
nature à constituer une utilisation commerciale de la dénomination protégée CHAMPAGNE au sens de
l'article 103 2. a) du règlement précité.

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CONSIDERANT qu’il y a lieu à présent de rechercher si, au regard des produits en cause, cette
utilisation de la dénomination protégée CHAMPAGNE serait de nature à exploiter la réputation de
l’appellation d ’origine CHAMPAGNE au sens du ii) de l’article 103 2. a) du règlement, ainsi que l’invoque
l’opposant ;

Que l’analyse de cette condition conduit à examiner et évaluer la réputation attachée à l’appellation
invoquée, et à rechercher si l’utilisation de la dénomination protégée dans le signe contesté pour les
produits en cause permettrait au titulaire de la demande d’enregistrement de profiter indûment de la
réputation de l’appellation ;

Qu’il convient de préciser qu’en application d’une jurisprudence constante, les appellations d’origine
bénéficiant d’une renommée particulière doivent jouir d’une protection plus large que celles qui n’ont
pas une telle réputation ou n’ont qu’une connaissance locale ;

Que la notion de profit indûment tiré de la renommée a trait aux situations dans lesquelles la marque
contestée est susceptible de bénéficier de la renommée du signe invoqué en exploitant son prestige ;

Qu’un tel risque sera particulièrement élevé lorsque le signe invoqué a acquis une renommée
« particulière », dans le sens où il reflète une image d’excellence, de confiance ou de qualité, ou
véhicule un quelconque autre message susceptible d'influencer le choix du consommateur en faveur
des produits et/ou services du signe contesté ;

Qu’en l’espèce, l’opposant fait valoir que l’appellation d ’origine CHAMPAGNE « bénéficie d ’une
notoriété exceptionnelle », qu’elle « a acquis une renommée mondiale particulièrement importante qui
dépasse le territoire français, comme cela a déjà été reconnu par diverses juridictions françaises » ;

Qu’il fournit à cet égard plusieurs décisions de justice et les cite comme ayant expressément reconnu
que « l ’appellation Champagne avait acquis depuis plusieurs siècles, tant en France qu’à l ’étranger,
une notoriété et un éclat particuliers », qu’elle bénéficiait d’une « exceptionnelle notoriété tant en France
qu’à l ’étranger», qu’elle était « porteuse d ’un renom et d ’un très important prestige, et ceci tant en
France qu’à l ’étranger », ainsi que d ’une « identité forte », figurant « parmi les appellations d ’origine
contrôlées les plus connues » ;

Qu’il ajoute que cette appellation CHAMPAGNE reflète une image d’excellence, de qualité et de
prestige ;

Que ces arguments, confortés par une jurisprudence constante, ne sont pas contestés par la
déposante ;

Que le signe contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE apparaît phonétiquement identique à l’expression


« le vin de Champagne », qui constitue la désignation même du produit bénéficiant de l’appellation
d’origine invoquée ;

Qu’il en résulte que pour un consommateur qui prendrait connaissance de la marque phonétiquement,
le signe contesté se comprend immédiatement et spontanément comme la désignation du célèbre vin
d’appellation d’origine CHAMPAGNE, et ce au regard de l’ensemble des produits en cause ;

Que s’il est vrai que sur le plan purement visuel, la dénomination CHAMPAGNE du signe contesté,
précédée des termes LEVAIN DE, est susceptible de se comprendre comme une référence à la région
Champagne en France, comme le fait valoir la déposante, cette circonstance n’écarte pas la perception
de l’appellation d’origine CHAMPAGNE en tant que telle sur le plan phonétique ;

Que l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 26 octobre 2012 invoqué par la déposante n’apparaît à cet
égard pas transposable, le cas d ’espèce étant différent ;

Que la référence à l’appellation d’origine CHAMPAGNE inhérente au signe contesté ne saurait être
écartée pour des motifs tenant aux conditions d ’exploitation du signe LEVAIN DE CHAMPAGNE par la
déposante ou aux raisons personnelles expliquant le choix et le dépôt du signe, invoqués par la
déposante ;

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Qu’en particulier, ne peuvent être prises en considération les mentions « Made in Reims » et la
représentation de la cathédrale de Reims figurant sur les sacs qu’elle commercialise sous le signe
contesté, ces éléments ne figurant pas dans le signe contesté tel que déposé ; que de même, ne peut
être retenue l’argumentation de la déposante selon laquelle la dénomination CHAMPAGNE du signe
contesté ferait référence à Monsieur Christophe Z dont le nom de compagnon est « Champagne », rien
dans le signe contesté ne permettant au consommateur de l’entendre ainsi ;

Qu’il convient à cet égard de préciser que le bien-fondé d’une opposition doit uniquement s’apprécier
au regard du signe contesté tel qu’il a été déposé et tel que le public peut ainsi le percevoir ;

Qu’en outre, il importe peu que le signe LEVAIN DE CHAMPAGNE ne soit pas associé à d'autres
éléments faisant référence au vin, comme l’invoque la déposante, la présence de tels éléments
n’apparaissant pas nécessaire pour reconnaître la référence à l’appellation d’origine CHAMPAGNE
dans le signe contesté tel que déposé ;

Qu’ainsi, au regard de l’ensemble des produits en cause, le signe contesté, en ce qu’il fait référence
au vin bénéficiant de la célèbre et prestigieuse appellation d ’origine CHAMPAGNE, amènera
nécessairement le consommateur à opérer un lien entre ces produits et l’appellation d’origine ;

Que ce lien est de nature à influencer le consommateur des produits désignés par la marque contestée,
faisant bénéficier à ces derniers de l’image d’excellence, de qualité et de prestige attachée à
l’appellation d’origine CHAMPAGNE et au vin pour lequel elle est protégée ;

Que contrairement à ce qu’affirme la déposante, ces circonstances, invoquées à juste titre par
l’opposant, suffisent à établir que le signe contesté, appliqué aux produits en cause, permettrait à son
titulaire de tirer un profit indû de la réputation de l’appellation d’origine CHAMPAGNE ;

Que le caractère indû du profit tiré de l’utilisation de la dénomination protégée CHAMPAGNE dans le
signe contesté ne saurait être écarté par les affirmations de la déposante selon lesquelles le jeu de
mots inhérent au signe contesté serait involontaire et qu’il n’existerait aucun synonyme du mot LEVAIN
qui désigne un élément essentiel dans l’histoire et le parcours de Monsieur Z ;

Que de même, il importe peu qu’aucun risque de confusion ne soit à craindre entre les signes en cause,
rétablissement d ’un tel risque n’étant pas requis pour caractériser l’atteinte à l’appellation d ’origine au
vu des dispositions précitées ;

Qu’ainsi, le signe contesté, appliqué aux produits désignés, apparaît de nature à exploiter indûment la
réputation de l’appellation d’origine protégée CHAMPAGNE.

CONSIDERANT qu’est inopérant l’argument de la déposante relatif à l’existence de 16 marques en


vigueur en France dont les signes auraient une structure analogue à celle du signe contesté, contenant
la dénomination CHAMPAGNE précédée de la préposition DE ;

Qu’en effet, le bien-fondé d'une opposition doit uniquement s'apprécier eu égard au seul droit antérieur
invoqué et à l'atteinte susceptible d'être portée à ce droit par l'enregistrement de la seule demande
contestée, indépendamment de la coexistence éventuelle d'autres marques, les ayant-droits étant seuls
juges de l'opportunité des actions à engager.

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CONSIDERANT ainsi, que l’usage à titre de marque du signe contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE pour
désigner les produits en cause apparaît de nature à enfreindre les règles de protection accordées à
l’appellation d ’origine protégée CHAMPAGNE par l’article 103 2. a) ii) du règlement (UE) n “ 1308/2013
du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 ;

Que le signe verbal contesté LEVAIN DE CHAMPAGNE ne peut dès lors pas être adopté comme
marque pour les produits qu’il désigne sans risquer de porter atteinte au nom, à l’image, à la réputation
ou à la notoriété de l’appellation d ’origine protégée CHAMPAGNE.

CONSIDERANT que l’opposant invoque à titre subsidiaire l’atteinte à l’appellation d’origine protégée
CHAMPAGNE par la demande d’enregistrement en ce qu’elle enfreindrait également les dispositions
de l’article 103 2. b) du règlement (UE) n “ 1308/2013 précité ;

Que toutefois, il n’y a pas lieu d ’examiner le bien-fondé de l’opposition au regard de cette disposition,
dès lors que celle-ci a été reconnue totalement justifiée au vu des dispositions de l’article 103 2. a) ii)
du règlement (UE) n “ 1308/2013.

PAR CES MOTIFS

DECIDE

Article 1 : l'opposition est reconnue justifiée.

Article 2 : la demande d'enregistrement est rejetée.

Nathalie GAUTHIER, juriste

Pour le Directeur général de


l’Institut national de la propriété industrielle

Christine B
Responsable de pôle

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