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danneville
DEA de Droit Privé Fondamental
Avocat au Barreau de l’Aveyron
Monsieur le Président,
Vous m’interrogez sur la licéité, et plus précisément sur la conformité à la protection des
Appellations d’Origine Protégées (AOP), de l’étiquetage d’un fromage persillé au lait de
brebis pasteurisé, fabriqué par la SOCIETE FROMAGERE DE RODEZ (Groupe LACTALIS),
qui comporte la dénomination de vente « BLEU DE BREBIS » et qui est commercialisé
sous la marque semi-figurative SOCIETE, enregistrée dans les registres de l’INPI sous le
n° 4268498.
3, boulevard de la Capelle
12100 MILLAU
05 65 58 12 32 / 06 51 64 77 82
Fax : 09 71 70 52 84
benedicte.danneville@gmail.com
Des sanctions pénales peuvent aussi s’appliquer en cas d’atteinte à la protection des
AOP :
En l’espèce, le fait que le BLEU DE BREBIS litigieux soit commercialisé sous la marque
SOCIETE et sous ce packaging porte, à mon sens, atteinte à la protection de l’AOP.
- Enfin et surtout, la marque SOCIETE est liée à l’AOP Roquefort dans l’esprit du
consommateur, de sorte qu’il existe un risque de confusion : l’ovale vert évoque
à lui seul le Roquefort ; la SOCIETE DES CAVES elle-même a soutenu ce risque de
confusions dans le dossier RONCARIFORT ou RONCARIBLUE (pour mémoire, il
s’agissait d’une contrefaçon de Roquefort, fabriquée et commercialisée par un
tiers en Espagne sous la marque TGT entourée d’un ovale vert) ; au besoin, des
études auprès de consommateurs pourraient confirmer ce lien.
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Le risque de confusion est encore renforcé en l’espèce par le fait qu’il s’agisse d’un
fromage bleu, visible au travers d’une fenêtre transparente de la face principale de
l’emballage et d’apparence visuelle similaire au Roquefort, qu’il est mentionné sur
l’étiquetage que c’est du lait de brebis (100 %) qui est mis en œuvre, que l’origine
aveyronnaise du produit est mise en exergue et enfin que ce fromage soit présenté sous
des dimensions, dans un conditionnement et sous des couleurs proches de ceux que la
SOCIETE DES CAVES utilise pour commercialiser le Roquefort.
Pour toutes ces raisons, le produit litigieux, tel qu’il est présenté à la vente à ce jour,
avec la marque commerciale semi-figurative SOCIETE, est susceptible de constituer un
détournement ou un affaiblissement de l’Appellation d’Origine Protégée Roquefort, et
porte donc atteinte, à mon sens, aux articles précités définissant le cadre civil de la
protection des AOP.
Cette présentation est également susceptible d’entrainer des sanctions pénales, sur le
fondement des articles du Code de la consommation précités, le consommateur étant
manifestement et a minima induit en erreur.
Il est en effet difficile de concevoir que la SOCIETE DES CAVES mette sur le marché, sans
aucune concertation ni information préalable, un produit qui porte atteinte à la
notoriété du Roquefort et à la protection de l’Appellation, alors que dans un même
temps, elle est le premier fabricant de Roquefort AOP, participe à ce titre à la vie et à la
gouvernance de l’Organisme de Défense et de Gestion de l’Appellation Roquefort, et
préside la CONFEDERATION GENERALE DE ROQUEFORT un an sur deux, et en
l’occurrence à ce jour.
Celui qui défend l’intérêt collectif ne devrait pas faire le choix de son intérêt individuel
quand ce dernier porte atteinte à l’intérêt collectif.
Ce « conflit d’intérêts » avait déjà été soulevé en 2006/2007, alors que la SOCIETE DES
CAVES avait sorti un produit identique sous la dénomination de vente PERSILLE et sous
la marque commerciale LOU PERAC.
L’Appellation Roquefort était alors évoquée à la marge, mais ce qui avait ému
unanimement les opérateurs de la filière à l’époque, c’est le fait que ce soit le principal
fabricant de Roquefort AOP qui créait lui-même la concurrence du Roquefort sans les
contraintes de l’AOP.
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II – Sur les obligations et la responsabilité de la CONFEDERATION GENERALE DE
ROQUEFORT
Bien évidemment à l’égard de tiers, mais également, à l’égard de ses membres, puisque
la loi ne distingue pas.
La CGR a qualité pour engager les actions civiles et pénales précitées, ou y intervenir si
l’action était engagée par l’INAO, la DGCCRF ou tout autre opérateur qui y aurait intérêt
(de la filière ou hors filière).
L’opérateur concerné doit bien évidemment dans ce cas s’abstenir de tout vote au sein
du Conseil d’administration dans la prise de décision et le suivi de l’affaire.
Il est également possible que l’INAO somme prochainement la CGR de prendre position
sur la question, comme cet organisme a pu le faire antérieurement sur d’autres dossiers
impliquant des opérateurs de la filière.
L’avis strictement juridique sur le sujet est exposé en première partie de la présente
consultation.
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Il appartient maintenant aux professionnels de statuer, selon le processus de résolution
interne précité.
La célérité s’impose compte tenu du fait que le Député européen ait aussi appelé à
« boycotter » la prochaine fête de Roquefort.
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