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À ceux qui me sont chers

Babeth, Fanny, Alain et Paul

J’étais venu ce jour-là travailler « Après un Rêve » et « Les Berceaux » chez


mon amie Emmanuelle Fruchard, chanteuse étudiante comme moi. Elle me
dit, en ouvrant le troisième volume des mélodies éditées chez Leduc : « la
plus belle mélodie de Fauré, c’est celle-là ». Et nous déchiffrâmes ensemble
« En Sourdine ». Était-ce le chromatisme wagnérien, qui avait bercé mes
oreilles d’enfant, ou « les vagues langueurs des pins et des arbousiers », qui
me rappelaient les longues journées d’été passées dans les calanques de
Marseille ? Je fus d’emblée bouleversé par ce deuxième numéro des Mélodies
de Venise. J’étais loin de me douter que l’accompagnement, voluptueux et
mélancolique, des doubles croches du piano ne me quitterait plus, des exa-
mens au Conservatoire de Paris et à la Guildhall School de Londres jusqu’à
mes premiers programmes de récitals avec piano ou avec harpe, en passant
par les concours de chant et de mélodie française.
Quelques années plus tard, c’est grâce à d’éminents artistes d’Outre-
Manche, Dame Felicity Lott, Martyn Hill et Graham Johnson, que je décou-
vris les mélodies de Reynaldo Hahn « A Chloris » et « Si mes vers avaient des
Prélude à l’après-midi d’un faune de Frédéric Montenard (1923),
Foyer Campra de l’Opéra de Toulon 2 3
ailes », mais aussi et surtout les Chansons grises composées, entre autres, Fêtes Galantes — La Bonne Chanson
d’extraits des Fêtes galantes et de La Bonne Chanson. Enfin, ce fut au tour de
Camille Maurane, avec son enregistrement légendaire de La Bonne Chanson
de Fauré, de conforter mon attirance vers ce répertoire de la mélodie fran- Peu après la parution des Fêtes galantes de Paul Verlaine en 1869, Théodore de
çaise, plus particulièrement vers la poésie de Verlaine mise en musique. Banville salue son auteur en ces termes dans le journal Le National du 19 avril :
Le sort en était jeté. Dès que paraissait un enregistrement des Songma- « Il est des esprits affolés d’art, épris de la poésie plus que de nature, qui
ker’s Almanach ou la réédition d’une anthologie de Camille Maurane, Gérard (…) veulent des Amintes et des Cydalises savamment coiffées et vêtues de
­Souzay ou Bernard Kruysen, je devais l’acheter et l’écouter en boucle. Je longues robes de satin couleur de pourpre et couleur de rose ! À ceux-là je
passais des heures chez les bouquinistes de Nice (découverts pendant l’Aca- dirai : emportez avec vous les Fêtes galantes de Paul Verlaine, et ce petit livre
démie d’été), de la rue de Rome ou de la rue Legendre à Paris pour en reve- de magicien vous rendra suave, harmonieux et délicieusement triste, tout le
nir les bras chargés de partitions. Je visitais régulièrement les rayons de la monde idéal et enchanté du divin maître des comédies amoureuses, du grand
Bibliothèque Nationale pour obtenir des copies de partitions épuisées. Je et sublime Watteau. »
ne manquais aucun récital de mélodies, (il y en avait beaucoup à l’époque !), C’est à la dimension picturale de cette poésie que Banville est immédiate-
au Châtelet, au Théâtre des Champs-Élysées, Salle Gaveau, tout autant que ment sensible. Se doutait-il que Verlaine, comme lui-même quelques années
dans les théâtres et les festivals de province. plus tôt, allait devenir le poète préféré des mélodistes français ?
Il y a quelques années, c’est en tant qu’interprète, cette fois, que j’expéri- Dès 1871, Jules Massenet ouvre le bal avec le duo « Rêvons, c’est l’Heure »,
mentai un programme de mélodies consacré aux musiciens de Verlaine pour qui sera mis en musique quelque 130 fois ! Le poème est issu de La Bonne
une émission de France Musique. Je pris alors conscience que les mélodies Chanson (1869-1870), recueil adressé à Mathilde Mauté de Fleurville, qu’il
« En Sourdine », « L’Heure exquise » et « Mandoline » pourraient constituer épouse en 1870. C’est que le poète aspirait à une vie simple et tranquille ;
les piliers d’un disque consacré au « Pauvre Lélian ». Ce disque, dont je rêvais, mais il n’aura finalement connu qu’une existence précaire et la déchéance
j’eus l’audace d’en parler au producteur du Label Hortus, rencontré grâce à progressive due à l’alcoolisme et à des amours violentes. Sa poésie reflète
mon ami chanteur Olivier Fichet. Son enthousiasme immédiat acheva de me cette dualité : parfois brutalement érotique, le plus souvent empreinte d’un
conforter dans ce choix. L’aventure démarrait, avec David Zobel, le complice lyrisme confidentiel, doucement triste, tout en nuances, avec des mots choi-
de toujours, et la participation de Françoise Masset pour les duos. sis pour leur simplicité et leurs sonorités subtiles.

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« Cette capacité à créer des formes lisses et précises, à écrire des vers d’une la vie musicale du siècle dernier, à qui l’on doit les créations d’Ariane et Barbe-
fluidité mélodieuse, animés d’un beau mouvement rythmique » – selon les Bleue de Paul Dukas, de Daphnis et Chloé de Maurice Ravel et de la version
mots de Stefan Zweig dans sa biographie du poète –, ne pouvait que séduire française d’Elektra de Richard Strauss à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de
Gabriel Fauré, qui livrera peut-être la plus émouvante version de « La Lune Paris. De Joseph Canteloube, nous avons voulu montrer un aspect moins
blanche », sans que ne lui échappe pour autant le côté sombre du poète, connu : passé à la postérité pour son harmonisation des Chants ­d’Auvergne,
développé dans la strophe centrale: « L’étang reflète, / Profond miroir, / La le compositeur n’en a pas moins livré des Verlaine magnifiques. Sa version
silhouette / Du saule noir / Où le vent pleure… ». Souvenir d’un soir de juillet de « Colloque sentimental », comme celles de Claude Debussy et de Charles
1869, où Verlaine, ivre, tente de tuer sa mère, qui brandit alors un miroir afin Bordes, données pour la première fois au disque sous forme de dialogue, for-
de mettre son fils face à sa déchéance ? Claude Debussy, de son côté, saisit la ment avec « Nocturne » de Louis Aubert les quatre duos de notre programme.
sensualité « pudique et insolente à la fois » des Fêtes Galantes (S. Zweig) dans Sur le compositeur liégeois Charles Radoux, on sait peu de choses. Sa version
sa version de « Mandoline », en même temps qu’il fait entendre le « doulou- de « La Lune blanche », pleine d’élans passionnés, nous a cependant paru
reux pressentiment » qui hante « Colloque sentimental », « sombre perle de digne d’intérêt. Quant à Alphons Diepenbrock, homme de lettres néerlan-
souffrance incertaine et sans fin » (S. Zweig). dais et compositeur autodidacte, qui a eu l’audace de mettre en musique
Sans se limiter à ces figures incontournables que sont Gabriel Fauré et l’intégralité de « Puisque l’Aube grandit », nous avons décidé de le confronter
Claude Debussy, ni à celles presque aussi célèbres de Reynaldo Hahn et au génie de Gabriel Fauré. Enfin, c’est avec Reynaldo Hahn, qui n’hésite pas
Charles Bordes, nous avons choisi, empruntant les « chemins perfides » à reprendre le titre même du recueil Fêtes galantes pour sa version de « Man-
chers à Verlaine (La Bonne Chanson), de partir à la (re)découverte de com- doline », que nous terminons ce programme.
positeurs moins connus. Ainsi de Josef Szulc, qui mena une grande partie Voilà, au long de ce chemin à la fois familier et surprenant, quelles « séré-
de sa carrière en Belgique, après avoir été formé, comme son cadet Raoul nades » nous donnerons aux auditeurs et autres « belles écouteuses »
Laparra, par Jules Massenet à Paris. Ainsi de Poldowski, de son vrai nom (« Mandoline »), pour les intriguer, les faire sourire et les séduire – car comme
Régine ­Wieniawski, dont les mélodies, fortement influencées par celles de le dit Rimbaud, qui sait de quoi il parle : « J’ai les Fêtes galantes de Verlaine.
Debussy, connurent en la personne de Jane Bathori l’une de ses plus grandes C’est fort bizarre, très drôle ; mais vraiment, c’est adorable. »
interprètes. C’est d’ailleurs à cette grande mélodiste du début du xxe siècle
qu’est dédiée « La Lune blanche » de Philippe Gaubert, acteur important de  Carl Ghazarossian

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Les Donneurs de sérénades Carl Ghazarossian ténor

C’est à Paris, lors de master-classes chant-piano, que se rencontrent ces Né à Marseille, Carl Ghazarossian est diplômé du
deux natifs du Sud de la France. Ils se retrouvent par hasard quelques années Conservatoire National Supérieur de Musique et de
plus tard lors d’un concert de musique française à New-York, avant que le Danse de Paris et de la Guildhall School of Music
Festival de Saint-Céré ne les réunisse pour leur première production en com- and Drama de Londres. Il remporte en 1998 le Prix du
mun : la Flûte enchantée de Mozart, où Carl chante le Premier Homme d’Armes Public et le Prix de la Musique française au Concours
tandis que David est chef de chant et tient la partie de Glockenspiel. Henri Sauguet de Martigues et en 2000, le Premier
Forts de leur sensibilité musicale et artistique commune et particuliè- Prix au Concours de Vivonne et le Prix Francis Pou-
rement de leur goût pour la musique de chambre, ils décident d’explorer lenc au Concours de Mélodies du Triptyque de Paris.
ensemble l’univers du récital avec piano. Ils se produisent ainsi à la Fonda- C’est grâce à Jean-Claude Malgoire qu’il fait ses premiers pas dans la musique
tion B
­ ouygues, en compagnie de la soprano Judith Gauthier, lors d’un récital des xviie et xviiie siècles. Son interprétation d’Idamante dans Idoménée de
Haydn pour la célébration du bicentenaire de la mort du compositeur, puis Campra et Idomeneo de Mozart a été unanimement saluée par la critique,
au Festival de la Vézère, avec la soprano Sophie Landy, dans un programme notamment par Michel Parouty, dans la revue Diapason, mai 2004 : « Dans le
de duo de Monteverdi à Ravel. Très vite, ils deviennent les invités régu- rôle d’Idamante dans Idoménée de Campra, Carl Ghazarossian domine par
liers des Concerts du Mercredi, donnés dans le foyer de l’Opéra de Lille : un sa présence, son assurance, sa musicalité. Dans Idomeneo, on le remarque
programme de mélodies françaises sur le thème de l’Espagne en miroir de la à nouveau, stylé, convaincant, déployant une voix dont la lumière du timbre
production de Carmen de Jean-François Sivadier, repris au Théâtre de Caen n’est pas le moindre attrait ; l’avoir choisi est d’autant plus pertinent que
et un programme Jules Massenet avec Alexis Descharmes au violoncelle, Malgoire a opté pour la version viennoise qui veut un Idamante ténor. » Par
pour le centenaire de la mort du compositeur. C’est ce désir de faire découvrir la suite, Malgoire lui offre Don Basilio et Don Curzio des Nozze di Figaro à
au public un répertoire tout imprégné de poésie, de lyrisme et de séduction Tourcoing et à l’Opéra de Rennes et Emmanuelle Haïm l’engage pour Don
que veut refléter le nom de leur duo, qui sera aussi celui de leur premier Curzio à l’Opéra de Lille et au Théâtre des Champs-Élysées. Toujours avec
disque : Les Donneurs de sérénades, chers à Watteau et à Verlaine. Malgoire, il est Bastien dans Bastien und Bastienne au Théâtre du Châtelet.

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Au même moment, il commence à interpréter la musique de Monteverdi: Françoise Masset soprano
Pastor et Spirito dans L’Orfeo à Tourcoing et au Théâtre des Champs-­Élysées,
puis au Festival d’Aix-en-Provence dans la production du tandem René
Jacobs / Trisha Brown et plus récemment le rôle-titre de cette œuvre au Elle a reçu sa formation musicale, vocale et univer-
Kunstfestspiele Herrenhausen de Hanovre. Il décide alors de créer, en com- sitaire aux CNR de Douai et de Paris, au Centre de
pagnie du violiste Ronald Martin Alonso, l’Ensemble CantopiantO, dédié à la Musique Baroque de Versailles et à la Sorbonne.
musique de ce compositeur. Sur scène, en concert et au disque, elle interprète
« Ses capacités vocales et scéniques exceptionnelles » (Christiane Itzel un répertoire diversifié, du baroque au contempo-
dans Opérette n°162, février 2012) sont particulièrement appréciées chez rain. Ses rôles, les spectacles qu’elle a conçus et les
Offenbach. Il a ainsi chanté Arthur dans Vent du Soir au Festival d’Etretat, ouvrages qu’elle a créés (dont la Médée de Michèle
Frontignac dans La Créole à Tourcoing et à La Réunion, Gardefeu dans La Vie Reverdy à l’Opéra de Lyon), témoignent de sa curio-
parisienne à l’Opéra de Metz et, dans les Contes d’Hoffmann, les quatre Valets sité et de son goût pour les rencontres  musicales. Le récital (avec piano,
au NYE Opera de Bergen (Norvège) et Nathanäel et Spalanzani à l’Opéra orgue, harpe, guitare, théorbe et luth) et la musique de chambre sont des
National de Lyon et à Tokyo. domaines qu’elle aime privilégier. L’Académie du disque lyrique lui a décerné
Sa musicalité et sa diction irréprochable dans de nombreuses langues étran- en 2010 l’Orphée d’or de la meilleure interprète de mélodies pour l’album
gères en font un interprète de choix dans l’exercice difficile du récital. Il se Les Compositeurs de Marceline Desbordes-­Valmore enregistré avec le pianiste
produit au Festival de Saint-Céré, au Festival de la Dame des Aulnes et à Nicolas Stavy.
la Villa Arnaga (Pays basque), à la Maison de Claude Debussy et au Musée Cette saison, elle chante en tournée les rôles d’Hébé, Émilie et Adario dans
Maurice Denis (Saint-Germain-en-Laye), dans le Foyer de l’Opéra de Lille les Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau, avec Les Paladins, sous la direc-
ainsi qu’à la Villa Kérylos (Beaulieu-sur-Mer). À Paris, il a donné des récitals tion de Jérôme Corréas. Elle a chanté auparavant avec le même ensemble
dans les Salons de l’Hôtel de Ville, à l’Hôtel Potocki et à l’Hôtel de Soubise. dans deux opéras de Claudio Monteverdi mis en scène par Christophe Rauck :
On a pu l’entendre en duo avec le harpiste Julien Marcou aux Journées de la L’Incoronazione di Poppea (rôles d’Ottavia et de Fortuna) et Il Ritorno d’Ulisse in
Harpe en Arles, ainsi qu’au Festival de Gargilesse. patria (rôles d’Eumete et de Fortuna).

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Trois nouveaux enregistrements sont sortis récemment : les Leçons de David Zobel chef de chant & pianiste collaborateur
ténèbres de François Couperin avec la soprano Monique Zanetti (Hérisson),
des airs profanes et spirituels d’Orazio Michi (première mondiale) avec La
Gioannina, ensemble unissant Rémi Cassaigne aux théorbe, luth, guitare, et Né à Toulouse, David Zobel mène une carrière de
Nanja Breedijk à la harpe triple (Agogique), et les Trois Prières d’André Caplet pianiste accompagnateur et de chef de chant tant
avec le Quatuor Debussy et la harpiste Marielle Nordmann (Timpani). en France qu’à l’étranger. Il se produit régulière-
Le critique Ivan Alexandre la salue comme « l’une de nos rares, de nos der- ment avec la mezzo-soprano Joyce DiDonato dans
nières diseuses, qui sait où placer l’accent tonique et l’accent pathétique des lieux prestigieux tels que la Scala de Milan, le
dans l’Isis de Lully comme dans une chanson de Kosma… » Lincoln Center de New York, le Wigmore Hall de
Londres, le Théâtre du Liceu et celui de La Mon-
naie, le Théâtre des Champs-Élysées, ainsi qu’au
Festival Rossini de Pesaro et au Festival d’Edimbourg. Au printemps 2011, il
rejoint la mezzo américaine pour une grande tournée aux Etats-Unis qui se
conclut par leur premier concert au Carnegie Hall de New York. Le concert
est considéré par la critique du New York Times comme l’un des dix meilleurs
événements musicaux de la saison 2011 à New York ! L’été 2012, ils passent
par Paris, Londres, Berlin, Baden-Baden et Munich, puis ils se produisent
en Amérique du Sud, notamment au Teatro Colon de Buenos Aires. Depuis,
on a pu les entendre à nouveau au Carnegie Hall à l’automne 2014, ainsi que
pour une deuxième tournée en Amérique du Sud. Leurs prochains concerts
sont prévus au printemps 2016 à Helsinki, au Staastsoper de Vienne et au
Concertgebouw d’Amsterdam. Avec elle, il a enregistré un premier disque
intitulé The Deepest Desire dédié aux mélodies de Bernstein, Copland et Jake

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Heggie, acclamé par la critique internationale et récompensé par un « Diapa- David Zobel est diplômé du Conservatoire de Toulouse, du Conservatoire
son d’Or » de l’année 2007. National de Paris ainsi que de la Juilliard School de New York. Il est égale-
David Zobel accompagne aussi d’autres chanteurs tels que le ténor français ment boursier de la fondation Fulbright. Il a par ailleurs était salué par la
Yann Beuron et le baryton américain Stephen Salters en Europe et aux États- critique, dans le London Times comme « pianiste exceptionnel » ou encore
Unis. Par ailleurs, il est associé à plusieurs concours internationaux tels que dans le New York Times, comme possédant à la fois « un touché puissant et
le Hans Gabor Belvédère à Vienne, le Reine Elisabeth à Bruxelles ou bien raffiné ainsi qu’un son pur et lumineux ».
encore le concours Operalia présidé par Placido Domingo.
David Zobel est aussi chef de chant dans plusieurs théâtres français et
étrangers tels que le Théâtre du Châtelet, le Staatsoper de Vienne, le Het
Muziektheater d’Amsterdam, l’Opéra de Montpellier, le Festival de Radio
France à Montpellier, l’Opéra de Monte-Carlo, le Festival d’Aix-en-Provence,
le Théâtre Stanislavski de Moscou. Il a été chef de chant permanent à l’Opéra
de Zurich de 2012 à 2014 et est aussi un pianiste régulier du Festival de Saint-
Céré, où il fit ses débuts et où il revient avec un plaisir toujours renouvelé.
Sa carrière de chef de chant l’amène à travailler sous la baguette des chefs
suivants : Alain Altinoglu, Patrick Davin, Stéphane Denève, Christoph von
Dohnànyi, Christoph Eschenbach, Antonino Fogliani, Lawrence Foster,
Patrick Fournillier, Sir John Elliot Gardiner, Samuel Jean, Patrick Lange,
Fabio Luisi, Carlo Rizzi, Jérémie Rohrer, Nello Santi, ou bien encore Marc
Minkowski. Avec ce dernier, il participe à la création scénique en Russie de
Pelléas et Mélisande. Cette production reçoit le « Masque d’Or » de « Meilleur
Opéra de l’année » pour la mise en scène d’Olivier Py et la direction de Marc
Minkowski. Philippe Béziat en réalise un film : Le Chant des aveugles.

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I had come that day to work on ‘Après un Rêve’ and ‘Les Berceaux’ at the
home of my friend Emmanuelle Fruchard, a voice student like me. Opening
the third volume of songs published by Leduc, she told me: ‘the most beau-
tiful song by Fauré is this one’. And together we read through ‘En Sourdine’.
Was it the Wagnerian chromaticism, once a lullaby to my child’s ears, or
‘les vagues langueurs des pins et des arbousiers / the vague lengths of the
pines and arbutus’, which reminded me of the long summer days spent in the
Calanques of Marseille? I was instantly overwhelmed by this second number
of the Songs of Venice. I was far from suspecting that the sensual and melan-
cholic semiquavers’ accompaniment in the piano, would never forsake me,
from the examinations at the Paris Conservatoire and the Guildhall School
of London, through voice and French song competitions to my first recital
programmes with piano or harp.
A few years later, it was thanks to eminent artists from across the Channel
such as Dame Felicity Lott, Martyn Hill and Graham Johnson that I discov-
ered the songs of Reynaldo Hahn, ‘A Chloris’ and ‘Si mes vers avaient des

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ailes’, but also – and above all – the Chansons grises consisting, among other Fêtes Galantes — La Bonne Chanson
things, of extracts from the Fêtes galantes and La Bonne Chanson. Lastly came
Camille Maurane’s turn, with his legendary recording of Fauré’s La Bonne
Chanson, to clinch my attraction to this repertoire of French song, and in Shortly after Paul Verlaine’s Fêtes galantes came out in 1869, Théodore de
particular the poetry of Verlaine set to music. Banville hailed their author with the following words in the newspaper
The fate was sealed. Immediately after the release of a recording of the Le  National of 19 April: ‘There are art-crazed minds, enamored of poetry
Songmaker’s Almanach, or the reissue of an anthology by Camille Maurane, more than of nature, who […] want Amintes and Cydalises deftly coiffed
Gérard Souzay or Bernard Kruysen, I just had to buy it and listen to it over and dressed in long satin robes, purple- and rosecoloured. To those I would
and over. I spent hours in the vintage bookshops of Nice (discovered dur- say: take along the Fêtes Galantes by Paul Verlaine, and this little magician’s
ing the summer academy) and of the rue de Rome or rue Legendre in Paris, book will make you feel suave, harmonious and deliciously sad: all of the
coming home with arms score-laden. I regularly delved into the holdings of ideal, enchanted world of the divine master of amorous plays, the great, sub-
the French National Library to obtain copies of out-of-print scores. I never lime Watteau’. It was the pictural dimension of this poetry that immediately
missed a song recital (there were many in those days!), at the Châtelet, the caught Banville’s fancy. Did he suspect that Verlaine, as it had been the case
Théâtre des Champs-Élysées, the Salle Gaveau, not to mention the provin- for him a few years earlier, was to become the favourite poet of the masters
cial halls and festivals. of french art songs?
A few years ago, while performing a recital of songs devoted to Verlaine’s In 1871, Jules Massenet was the first to take to the floor with the duet
musicians, for a France Musique broadcast, I came to realize that the songs ‘Rêvons, c’est l’Heure’, which would eventually be set to music some
‘En Sourdine’, ‘L’Heure exquise’ and ‘Mandoline’ might constitute the pil- 130  times! The poem comes from La Bonne Chanson (1869-1870), a collec-
lars of a record devoted to ‘Pauvre Lelian’ / ‘Poor Lelian’ (Paul Verlaine’s tion addressed to Mathilde Mauté de Fleurville, whom he married in 1870.
anagram). I took the bold step of mentioning this record I was dreaming of For the poet longed for a simple and quiet life, yet he ultimately was to
to the producer of the Hortus label, encountered thanks to my singer friend have but a precarious existence and gradual degeneration due to alcoholism
Olivier Fichet. His immediate enthusiasm was the ultimate endorsement of and violent love affairs. His poetry reflects this duality: at times savagely
my choice. The adventure was launched, with David Zobel, the perennial erotic, most often full of confidential lyricism, gently mournful, replete with
accomplice, and Françoise Masset’s participation for the duets. nuances, with words chosen for their simplicity and subtle sonorities.

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‘This ability to create effortless, precise forms, to write lines of melodious Lune blanche’ by Philippe Gaubert, a significant actor in the musical life of
fluidity’, to put it in the words of Stefan Zweig in his biography of the poet, the last century, to whom we owe the premieres, at the head of the Orchestre
could not but appeal to Gabriel Fauré, who would provide perhaps the most de l’Opéra de Paris, of Ariane et Barbe-Bleue by Paul Dukas, Maurice Ravel’s
moving version of ‘La Lune blanche’, without shirking the poet’s murky side, Daphnis et Chloé and the French version of Elektra by Richard Strauss. Of
developed in the central strophe: ‘L’étang reflète, / Profond miroir, / La sil- Joseph Canteloube we wished to show a lesser-known aspect: acknowl-
houette / Du saule noir / Où le vent pleure’ / ‘The pond reflects, mirror in edged by posterity thanks to his harmonization of the Chants d’Auvergne, the
depth, the silhouette of the black willow where the wind weeps’. Recollection composer proposed no less magnificent Verlaines. His setting of ‘Colloque
of a July evening in 1869 when Verlaine, drunk, attempted to kill his mother, sentimental’, and those of Claude Debussy and Charles Bordes presented in
who was brandishing a mirror – in order to bring her son face to face with his dialogue form recorded here for the very first time, comprise along with Louis
degeneration? Claude Debussy, for his part, captures the sensuality of the Aubert’s ‘Nocturne’ the four duets in our programme.
Fêtes Galantes, ‘at once proper and insolent’ (Zweig), in his version of ‘Man- About the Liège composer Charles Radoux little is known. Nevertheless, his
doline’, while giving voice to the ‘pained foretaste’ that haunts ‘Colloque version of ‘La Lune blanche’, full of passionate outbursts, struck us as worthy
sentimental’, ‘somber pearl of uncertain, endless suffering’ (Zweig). of interest. As for Alphons Diepenbrock, a Dutch literary figure and self-
Not limiting ourselves to the figures of Gabriel Fauré and Claude Debussy, taught composer, who had the audacity of setting to music ‘Puisque l’Aube
indispensable as they are, nor to the almost equally famous ones of grandit’ in its entirety, we decided to bring it face to face with the genius of
­Reynaldo Hahn and Charles Bordes, but by setting forth on the ‘chemins per- Gabriel Fauré. Lastly, it is with Reynaldo Hahn, who was bold to take up the
fides’ / ‘deceitful trails’ dear to Verlaine (La Bonne Chanson), we have chosen very title of the collection Fêtes galantes for his setting of ‘Mandoline’, that
to undertake a (re)discovery of less well-known composers. So it is with Josef we conclude this programme. There you are, throughout this journey at once
Szulc, who pursued a major portion of his career in Belgium after having been familiar and surprising, what ‘serenades’ we have offered our listeners –
trained, like his younger colleague Raoul Laparra, by Jules Massenet in Paris. both the gents and the ‘belles écouteuses’ of ‘Mandoline’ – to intrigue them,
So it is as well with Poldowski, whose real name was Régine Wieniawski and bring on a smile and beguile them! For, as Rimbaud puts it (and he knew what
whose songs, greatly influenced by those of Debussy, enjoyed in the person he was talking about): ‘I have Verlaine’s Fêtes galantes. It’s quite bizarre,
of Jane Bathori one of their greatest interpreters. Indeed it is to this great art great fun; but really, it’s delightful’.
songs’ performer from the beginning of the 20th century that is dedicated ‘La  Carl Ghazarossian

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Les Donneurs de sérénades Carl Ghazarossian tenor

It was in Paris, in voice/piano master classes, that these two natives of Born in Marseille, Carl Ghazarossian is a graduate of the Conservatoire
southern France first met. They came together again by chance some years National Supérieur de Musique et de Danse in Paris and the Guildhall School
later during a concert of French music in New York, prior to the Festival de of Music and Drama in London. In 1998, he won the Audience Prize and the
Saint-Céré reuniting them for their first production in common: The Magic Prize for French Music at the Henri Sauguet Competition in Martigues, and
Flute by Mozart, in which Carl sang the First Armed Man while David was the in 2000 the First Prize at the Vivonne Competition and the Francis Poulenc
vocal coach and played the glockenspiel part. Prize in the French Art Song Competition of the Triptyque de Paris.
Matching their musical and artistic sensibilities and particularly their taste It was thanks to Jean-Claude Malgoire that he took his first steps in 17 th
for chamber music, they decided to explore together the universe of Recital. – and 18th – century music. His performance of Idamante in Idoménée by
Thus they played at the Fondation Bouygues, with the soprano Judith Campra and Idomeneo by Mozart was unanimously acclaimed by the critics,
­Gauthier, in a Haydn recital for the celebration of the composer’s death, particularly Michel Parouty in the magazine Diapason, May 2004: ‘In the role
then at the Festival de la Vézère, with the soprano Sophie Landy, in a duo of Idamante in Idoménée by Campra, Carl Ghazarossian dominates by his
programme from Monteverdi to Ravel. Very quickly they became regular presence, self-assurance and musicality. In Idomeneo, one takes further note
guests of the Wednesday Concerts, given in the foyer of the Opéra de Lille: of him, stylish, convincing, unfurling a voice whose timbral glow is not the
a programme of French art songs on the theme of Spain, reflecting Jean-­ least of its appealing features; to have chosen him is all the more appropriate
François Sivadier’s production of Carmen, revived at the Théâtre de Caen, as Malgoire opted for the Viennese version which requires a tenor for Ida-
and a Jules ­Massenet programme with Alexis Descharmes on cello, for the mante’. Later, Malgoire offered him Don Basilio and Don Curzio in Le Nozze
centenary of the composer’s death. It is the urge to make known to audi- di Figaro in Tourcoing and at the Opéra de Rennes and Emmanuelle Haïm
ences a répertoire fully pervaded by poetry, lyricism and seduction, that the engaged him for Don Curzio at the Opéra de Lille and the Théâtre Champs-
name of both their duo and disc title aims to reflect: ‘The Serenade Givers’ Élysées. Once again with Malgoire, he was Bastien in Bastien und Bastienne at
dear to Watteau and Verlaine. the Théâtre du Châtelet.
At the same time he began to sing Monteverdi’s music: Pastor and Spirito in
L’Orfeo in Tourcoing and the Théâtre des Champs-Élysées, then at the Festival

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d’Aix-en-Provence in the René Jacobs and Trisha Brown production and more Françoise Masset soprano
recently the title role of this opera at the Kunstfestspiele ­Herrenhausen in
Hanover. This led him to create, with the gambist Ronald Martin Alonso, the She received her musical, vocal and university training at both of the Regional
CantopiantO Ensemble, devoted to the music of this composer. Conservatoires of Douai and Paris, at the Centre de Musique Baroque in
His ‘exceptional vocal and stage abilities’ (Christiane Itzel in Opérette no. 162, ­Versailles and at the Sorbonne. On stage, in concert and on recordings she
February 2012) are peculiarly appreciated in Offenbach’s works. Thus he performs a diversified repertory, from the Baroque to contemporary. Her
sang Arthur in Vent du Soir at the Festival d’Étretat, Frontignac in La Créole roles, the shows she has conceived and the works she has premiered (among
in Tourcoing and in La Réunion, Gardefeu in La Vie parisienne at the Opéra them Médée by Michèle Reverdy at the Opéra de Lyon), bear witness to her
de Metz and, in Les Contes d’Hoffmann, the Four Valets at the Nye Opera of curiosity and her taste for musical encounters.
Bergen (Norway) and Nathanaël and Spalanzani at the Opéra National de The recital (with piano, organ, harp, guitar, theorbo and lute) and chamber
Lyon and in Tokyo. music are the areas to which she readily gives precedence. The Académie
His musicianship and irreproachable diction in numerous foreign languages du disque lyrique in 2010 awarded her the Orphée d’or for the best song
make him a interpreter of choice in the difficult exercise of Recital. He per- interpreter, for the album Les Compositeurs de Marceline Desbordes-Valmore
formed at the Festival de Saint-Céré, at the Festival de la Dame des Aulnes recorded with the pianist Nicolas Stavy.
and at the Villa Arnaga (Basque Country), at the Maison de Claude Debussy This season, she is singing on tour the roles of Hébé, Émilie and Adario in Les
and the Maurice Denis Museum (Saint-Germain-en-Laye), in the Foyer of the Indes Galantes by Jean-Philippe Rameau, with Les Paladins, under the direc-
Opéra de Lille as well as at the Villa Kérylos (Beaulieu-sur-Mer). In Paris, he tion of Jérôme Corréas. Previously she has sung with the same in two Claudio
has given recitals in the salons of City Hall, at the Hôtel Potocki, the Hôtel Monteverdi’s operas directed by Christophe Rauck: L’Incoronazione di Poppea
de Soubise. He also performed at the Journées de la Harpe in Arles and the (roles of Ottavia and Fortuna) and Il Ritorno d’Ulisse (roles of Eumete and
Festival de Gargilesse with the harpist Julien Marcou. Fortuna). Three new recordings were recently released: the Leçons de ténèbres
by François Couperin with the soprano Monique Zanetti (Hérisson label);
secular and sacred arias by Orazio Michi (world premiere) with La Gioannina,
an ensemble bringing together Rémi Cassaigne playing theorbo, lute, guitar,
and Nanja Breedijk on the triple harp (agOgique label) and the Trois Prières by

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André Caplet with the Quatuor Debussy and the harpist Marielle Nordmann He faithfully collaborates in various international competitions such as the
(Timpani label). The critic Ivan Alexandre has hailed her as ‘one of our very Hans Gabor Belvédère in Vienna, the Queen Elisabeth in Brussels or the
rare, last diseuses, who knows how to put the tonic accent and the pathetic Operalia competition presided by Placido Domingo.
accent in Lully’s Isis just as in a chanson by Kosma…’ David Zobel is also singing coach and works in several French and foreign
theaters such as the Théâtre du Châtelet in Paris, the Staatsoper of Vienna,
David Zobel singing coach and collaborative pianist the Het Muziektheater in Amsterdam, the Opéra and the Festival de Radio
France in Montpellier, the Opéra de Monaco, the Festival d’Aix-en-Provence,
Born in Toulouse, David Zobel pursues a dual career as a collaborative pianist the Stanislawski Theatre in Moscou. He has been permanent vocal coach
and as a singing coach, in France as well as abroad. He performs regularly at the Zurich Opera from 2012 to 2014 and is a regular pianist of the Festi-
with the mezzo-soprano Joyce DiDonato in prestigious venues such as the val de St Céré where he made his debut and returns with renewed pleas-
Scala in Milan, the Lincoln Center in New York, the Wigmore Hall in London, ure. He collaborates with the following conductors: Alain Altinoglu, Patrick
the theatres of the Liceu and La Monnaie, the Théâtre des Champs-Élysées, Davin, Stéphane Denève, Christoph von Dohnànyi, Christoph Eschenbach,
the Rossini Festival in Pesaro and the Edinburg Festival in Scotland. In spring ­Antonino Fogliani, Lawrence Foster, Patrick Fournillier, Sir John Elliot
2011, he joined forces with the American mezzo for a grand tour through Gardiner, Samuel Jean, Patrick Lange, Fabio Luisi, Nello Santi and Marc
the United States that ended with their first concert in New York’s famous Minkowski. For the latter, he participated in the Russian stage premiere
Carnegie Hall. The concert was deemed by the New York critics to be one of of Pelléas et Mélisande. This production was awarded the ‘Masque d’Or’ for
the ten finest musical events of the 2011 New York season! In summer 2012 the ‘Best Opera of the Year’ (direction Olivier Py) and for the best conductor
they traveled via Paris, London, Berlin, Baden-Baden and Munich, then they (Marc Minkowski). Philippe Béziat made of it the movie Le Chant des aveugles.
performed in South America, particularly in the mythical Teatro Colon of David Zobel is a graduate of the Conservatoire de Toulouse, the Conserv-
Buenos Aires. The Deepest Desire, a recording they made together, devoted atoire National Supérieur de Paris as well as the Juilliard School of New
to songs by Bernstein, Copland and Jake Heggie, has been acclaimed by York. He has also been a Fulbright grant recipient. He has furthermore been
international critics and rewarded with a Diapason d’Or for the year 2007. acclaimed by the critics, in The London Times as an ‘exceptional pianist’ or in
He also accompanies other singers such as the French tenor Yann Beuron The New York Times, for possessing at once ‘a powerful, refined touch as well
or the American baritone Stephen Salters in Europe or the United States. as a pure, luminous sound’.

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Les Donneurs de Sérénades
Carl Ghazarossian ténor  David Zobel piano
Avec la participation de Françoise Masset * soprano

Fêtes Galantes — La Bonne Chanson de Paul Verlaine

En général, les compositeurs ont choisi d’intituler leur mélodie du titre du poème
emprunté à Verlaine. Cependant La Lune blanche luit dans les bois est mis en musique 11 Colloque sentimental de Joseph Canteloube * 3'50
sous le titre L’Heure exquise par Poldowski et Hahn, Nocturne par Aubert et Apaisement
par Radoux. Mandoline est titré Fêtes Galantes par Hahn. 12 La Bonne Chanson de Raoul Laparra 2'32
13 La Bonne Chanson de Charles Bordes 1'42
14 Mandoline de Claude Debussy 1'27
1 Mandoline de Gabriel Fauré 1'53 15 Colloque sentimental de Claude Debussy * 3'34
2 En Sourdine de Gabriel Fauré 3'15 16 En Sourdine de Josef Szulc 3'34
3 Puisque l’Aube grandit de Gabriel Fauré 1'50 17 En Sourdine de Raoul Laparra 2'15
4 La Lune blanche luit dans les bois de Gabriel Fauré 2'17 18 En Sourdine de Claude Debussy 3'15
5 J’allais par des Chemins perfides de Gabriel Fauré 1'46 19 Mandoline de Poldowski 1'40
6 Colloque sentimental de Charles Bordes * 3'43 20 L’Heure exquise de Poldowski 2'12
7 Puisque l’Aube grandit d’Alphons Diepenbrock 6'04 21 La Lune blanche de Philippe Gaubert 1'44
8 Mandoline de Josef Szulc 1'19 22 Nocturne de Louis Aubert * 2'30
9 La Lune blanche de Josef Szulc 3'31 23 L’Heure exquise de Reynaldo Hahn 2'01
10 Apaisement de Charles Radoux 2'15 24 Fêtes galantes de Reynaldo Hahn  2'04

 durée totale  62'13


Fêtes galantes, 1869 La Bonne Chanson, 1870

« Mandoline » « En Sourdine » iv

Les donneurs de sérénades Calmes dans le demi-jour Puisque l’aube grandit, puisque voici l’aurore,
Et les belles écouteuses Que les branches hautes font, Puisque, après m’avoir fui longtemps, l’espoir veut bien
Échangent des propos fades Pénétrons bien notre amour Revoler devers moi qui l’appelle et l’implore,
Sous les ramures chanteuses. De ce silence profond. Puisque tout ce bonheur veut bien être le mien,

C’est Tircis et c’est Aminte, Fondons nos âmes, nos cœurs C’en est fait à présent des funestes pensées,
Et c’est l’éternel Clitandre, Et nos sens extasiés, C’en est fait des mauvais rêves, ah ! c’en est fait
Et c’est Damis qui pour mainte Parmi les vagues langueurs Surtout de l’ironie et des lèvres pincées
Cruelle fait maint vers tendre. Des pins et des arbousiers. Et des mots où l’esprit sans l’âme triomphait.

Leurs courtes vestes de soie, Ferme tes yeux à demi, Arrière aussi les poings crispés et la colère
Leurs longues robes à queues, Croise tes bras sur ton sein, À propos des méchants et des sots rencontrés ;
Leur élégance, leur joie Et de ton cœur endormi Arrière la rancune abominable ! arrière
Et leurs molles ombres bleues Chasse à jamais tout dessein. L’oubli qu’on cherche en des breuvages exécrés !

Tourbillonnent dans l’extase Laissons-nous persuader Car je veux, maintenant qu’un Être de lumière
D’une lune rose et grise, Au souffle berceur et doux A dans ma nuit profonde émis cette clarté
Et la mandoline jase Qui vient à tes pieds rider D’une amour à la fois immortelle et première,
Parmi les frissons de brise. Les ondes de gazon roux. De par la grâce, le sourire et la bonté,

Et quand, solennel, le soir Je veux, guidé par vous, beaux yeux aux flammes douces,
Des chênes noirs tombera, Par toi conduit, ô main où tremblera ma main,
Voix de notre désespoir, Marcher droit, que ce soit par des sentiers de mousses
Le rossignol chantera. Ou que rocs et cailloux encombrent le chemin ;

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iv (suite) vi xx

Oui, je veux marcher droit et calme dans la Vie, La lune blanche J’allais par des chemins perfides,
Vers le but où le sort dirigera mes pas, Luit dans les bois ; Douloureusement incertain.
Sans violence, sans remords et sans envie : De chaque branche Vos chères mains furent mes guides.
Ce sera le devoir heureux aux gais combats. Part une voix
Sous la ramée… Si pâle à l’horizon lointain
Et comme, pour bercer les lenteurs de la route, Luisait un faible espoir d’aurore ;
Je chanterai des airs ingénus, je me dis O bien-aimée. Votre regard fut le matin.
Qu’elle m’écoutera sans déplaisir sans doute ;
Et vraiment je ne veux pas d’autre Paradis. L’étang reflète, Nul bruit, sinon son pas sonore,
Profond miroir, N’encourageait le voyageur.
La silhouette Votre voix me dit : « Marche encore ! »
Du saule noir
Où le vent pleure... Mon cœur craintif, mon sombre cœur
Pleurait, seul, sur la triste voie ;
Rêvons, c’est l’heure. L’amour, délicieux vainqueur,

Un vaste et tendre Nous a réunis dans la joie.


Apaisement
Semble descendre
Du firmament
Que l’astre irise…

C’est l’heure exquise.

32 33
Fêtes galantes, 1869

« Colloque sentimental »

Dans le vieux parc solitaire et glacé,


Deux formes ont tout à l’heure passé.

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,


Et l’on entend à peine leurs paroles.

Dans le vieux parc solitaire et glacé,


Deux spectres ont évoqué le passé.

– Te souvient-il de notre extase ancienne ?


– Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ?

– Ton cœur bat-il toujours à mon seul nom ?


Toujours vois tu mon âme en rêve ? – Non.

– Ah ! les beaux jours de bonheur indicible


Où nous joignions nos bouches ! – C’est possible.

– Qu’il était bleu, le ciel, et grand, l’espoir !


– L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

Tels ils marchaient dans les avoines folles,


Et la nuit seule entendit leurs paroles.

34 Colloque sentimental de René Magritte (1945), Collection particulière (© ADAGP, Paris 2015)
Carl Ghazarossian tient à remercier :
Patrick Benham, Pierre Berger, Claude-Henri Bonnet,
Glenn Chambers, Bertrand Chuberre, Jessica Falvo,
Flora Fernandez, Ingrid Fersing, Olivier Fichet,
Emmanuelle Fruchard, Judith Gauthier, Estelle Kaïque,
Claude Lavoix, Sarah Nancy, Lorraine Nubar, David Pollard,
Dominique Riber, Alicia Roqué Alsina,
Ken Storer et Corine Verset.

Remerciements à Gérard Fauvin pour


son attention constante et amicale pour le réglage
de son magnifique Bechstein.

Enregistré sur un piano Bechstein 1888,


collection Gérard Fauvin (Pétignac)

direction artistique : Dominique Daigremont


prise de son, montage : Roger Lenoir / Apml
mixage mastering : Isabelle Davy / Hortus Lyon

traduction : Kurt Lueders

visuel de couverture :
Prélude à l’après-midi d’un faune de Frédéric Montenard (1923),
Foyer Campra de l’Opéra de Toulon

crédits photographiques :
p.2, Khaldoun Belhatem  p.9, Sophie Deiss
p.11, Patrizia Dietzi  p.13, Joyce DiDonato

graphisme : Samuel Avequin

boutique en ligne : www.editionshortus.com

© hortus 2015

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