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COMMENTAIRE LITTÉRAIRE

Support : BEAUMARCHAIS, Le Barbier de Séville, acte I scène 1 et scène 2 (extrait), [1775]

CORRECTION

Beaumarchais, écrivain, musicien, homme d’affaires, magistrat mais aussi espion au service de
Louis XV demeure l’un des dramaturges les plus connus du XVIII° siècle. Homme des Lumières, ses
pièces mettent en scène les inégalités sociales, critiquées avec finesse. Homme de lettres, il est à
l’origine de la Société des auteurs, laquelle permettra à ces derniers de recevoir des dividendes chaque
fois que leurs œuvres seront jouées. On connaît la réflexion attribuée à Louis XVI : « Beaumarchais a
fait beaucoup plus pour la Révolution que tous les représentants du Tiers État ». Il est vrai, en effet,
que Beaumarchais, à travers Le Barbier de Séville et surtout Le Mariage de Figaro, laissera des mots
très forts à propos des oppositions de classe qui gangrènent la société française. Ainsi, le texte présenté
est la scène d’exposition du Barbier de Séville, pièce publiée en 1775. La scène d’exposition
comprend les scènes 1 et 2 car elles présentent successivement au spectateur les personnages
principaux : le Comte Almaviva (scène 1) et Figaro (scène 2). Il nous faudra donc démontrer que
ces scènes sont bien une scène d’exposition classique. Ainsi, le dramaturge propose une exposition
de comédie avant de mettre en scène deux personnages que tout oppose. © ST

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La correction vous est présentée sous la forme d’un plan détaillé. Annales Bac Technologique 2013. ©
Éditions Hachette

I – Une scène d’exposition de comédie.

1. Les éléments classiques de l’exposition.

Les deux personnages principaux : un noble de la « cour » de « Madrid » / un valet musicien et


homme de théâtre, Figaro.

Le cadre spatio-temporel évoqué dans la didascalie : « Le théâtre représente une rue de Séville ».
L’allusion à la cour, au règne d’Isabelle comme élément du passé fait penser que l’action est
contemporaine de l’époque de Beaumarchais, même si ce n’est pas une certitude.

Les premiers éléments d’intrigue : le comte amoureux de Rosine qu’il cherche à séduire et la rencontre
fortuite avec Figaro dont on devine qu’il prendra part à l’intrigue.

2. Un sujet et un ton légers.

Le ton léger de la pièce indique qu’il s’agit d’une comédie : elle est en prose, le sujet est l’amour (« Il
est si doux d’être aimé pour soi-même ») et le monologue de la scène 2 est presque exclusivement
composé d’une chanson.

Figaro est un valet, acteur et musicien, personnage de comédie. La didascalie souligne sa joie de vivre
(« il chantonne gaiement »).

3. Les différents types de comique.

Le comique de situation : la rencontre fortuite entre Figaro et le comte alors que ce dernier est déguisé
et n’est pas tout de suite reconnu : « J’ai vu cet abbé-là quelque part ».

Comique de caractère : Figaro est un gai luron dont la joie de vivre est communicative. Le comte
déguisé a conscience qu’il est sujet à la moquerie (« Si quelque aimable de la cour pouvait le deviner à
cent lieues de Madrid […] il me prendrait pour un Espagnol du temps d’Isabelle »).

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Comique de mots : l’expression « cet abbé-là » pour désigner le comte prête à rire puisque le comte se
présente au contraire comme un Dom Juan ; elle a une valeur ironique aux yeux du lecteur / spectateur.

II – L’opposition des personnages.

1. Un noble / un homme du peuple.

Les deux personnages principaux sont présentés par deux monologues qui occupent chacun une scène
différente, ce qui a pour effet de les séparer sur le plan de la forme.

L’un est un noble qui fait référence à la cour, l’autre un valet musicien, « une guitare sur le dos
attachés en bandoulière avec un large ruban ».

Des niveaux de langue différents : Figaro emploie une langue plus simple et moins construite que
celle du comte, par exemple des interjections « Eh ! parbleu ». Le comte s’exprime de façon plus
soutenue (« Je suis las »).

2. Une opposition de comportements.

Le comte est sérieux et statique / Figaro est au contraire gai et insouciant ce qui est traduit par ses
mouvements ; il avance tout en chantant.

Le comte est dissimulé, secret quand Figaro est extraverti et bruyant.

Le comte est conscient de son rang et du comportement qu’il devrait adopter, ce qui lui inspire une
réflexion sur le bonheur qui justifie ses extravagances ; Figaro est facilement content de sa personne et
paraît par contraste bien insouciant.

3. Des centres d’intérêts différents.

Le comte est présenté comme un Dom Juan coutumier des intrigues amoureuses de cour et à la
recherche d’un amour plus véritable.

Les paroles de Figaro révèlent son épicurisme : « L’homme, sans plaisir / Vivrait comme un sot, / Et
mourrait bientôt ». Sa chanson loue entre autres « le vin et la paresse ».

Le caractère frondeur de Figaro est mis en avant également lorsqu’il raille les faiseurs « d’opéras-
comiques », et ces « messieurs de la cabale ».

L’opposition entre les deux personnages suscite d’autant plus d’intérêt que le sort les fait se
rencontrer : que va-t-il advenir de cette rencontre ?

***

Les scènes 1 et 2 de l’acte I sont bien une scène d’exposition classique. Beaumarchais nous
présente, en effet, les personnages principaux ainsi que leurs caractères. Il met aussi immédiatement
l’accent sur le comique, lequel aura semble-t-il un rôle essentiel dans la pièce comme l’ébauche
d’intrigue le laisse supposer. Tout au long de la pièce, le couple fonctionnera comme bien d’autres
couples maître / valet de comédie. Cependant, en filigrane, la critique est bien présente, laquelle
éclatera au grand jour dans le fameux monologue de Figaro que l’auteur lui offrira à la scène 3 de
l’acte V du Mariage de Figaro (1778). Notons que le diptyque sera adapté pour l’opéra par Rossini
pour Le Barbier de Séville et bien sûr par Mozart pour Le Mariage de Figaro (pièce renommée Les
Noces de Figaro). © ST

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