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François Duvalier

40ème président de la république d'Haïti


François Duvalier

François Duvalier, président à vie d'Haïti.


Fonctions
Président de la République nationale d'Haïti
22 octobre 1957 – 21 avril 1971
(13 ans, 6 mois et 30 jours)
Élection 22 septembre 1957
Réélection 14 juin 1964
(président à vie)
Prédécesseur Antonio Kébreau
(président du
gouvernement)
Successeur Jean-Claude Duvalier
Membre du Conseil militaire de
gouvernement
5 avril 1957 – 26 mai 1957
(1 mois et 21 jours)
Président Antonio Kébreau
(président du Conseil
militaire de
gouvernement)
Secrétaire d'État haïtien à la Santé publique
et au Travail
14 octobre 1949 – 10 mai 1950
(6 mois et 26 jours)
Président Dumarsais Estimé
Prédécesseur Antonio Vieux (Santé
publique)
Louis Bazin (Travail)
Successeur Joseph Loubeau (Santé
publique)
Emile Saint-Lot (Travail)
Sous-secrétaire d'État haïtien du Travail
26 novembre 1948 – 14 octobre 1949
(10 mois et 18 jours)
Président Dumarsais Estimé
Biographie
Date de naissance 14 avril 1907
Lieu de naissance Port-au-Prince (Haïti)
Date de décès 21 avril 1971
Lieu de décès Port-au-Prince (Haïti)
Nationalité Haïtien
Parti politique Parti de l'Unité nationale
(PUN)
Conjoint Simone Ovide (décédée
en 1997)
Enfants Marie-Denise Duvalier
Nicole Duvalier
Simone Duvalier
Jean-Claude Duvalier
Profession Médecin

Présidents de la République d'Haïti


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François Duvalier, surnommé « Papa


Doc », né à Port-au-Prince le
14 avril 1907 et mort dans la même ville
le 21 avril 1971, est un médecin et
homme politique haïtien devenu
président de la République d'Haïti de
1957 à 1964, et président à vie de 1964 à
sa mort. Son règne fut marqué par la
corruption et l'utilisation de milices
privées, les tontons macoutes.
Autoritaire, il multiplie les actes
d'arrestation et de condamnation à mort.
Allié par intérêt aux États-Unis, il utilise le
culte de la personnalité pour être vu
comme un dieu vivant par la population.
Avant sa mort, il met en place une loi de
succession pour que sa famille se
maintienne au pouvoir. Son fils, Jean-
Claude Duvalier, lui succède à son décès.

Premières années et
accession au pouvoir
Fils du Pr Duval Duvalier, juge de paix,
professeur et journaliste[1], d'une famille
originaire de Martinique[2], et de Uritia (ou
Ulyssia) Abraham, il suit sa scolarité au
lycée Pétion où il obtient son diplôme de
fin d'études secondaires en 1928. Il
s'inscrit ensuite à l'École de médecine de
Port-au-Prince, puis commence à
pratiquer dans les régions rurales. Il
s'attire alors la faveur des populations
pour son aide à la lutte contre le typhus,
le pian et d'autres maladies de l'extrême
pauvreté. Il y gagnera aussi son surnom
de « Papa Doc ». En 1939, il épouse à
Pétion-Ville Simone Ovide, une infirmière
que l'on appellera plus tard Maman
Simone, avec laquelle il aura trois filles,
Marie-Denise, Nicole et Simone, ainsi
qu'un fils, Jean-Claude.

Duvalier fréquente à cette époque


l'ethnologue Lorimer Denis, spécialiste
du culte vaudou et militant de la cause
noire. Il partage ses idées, qu'il
développe dans les articles qu'il écrit
pour des revues nationalistes comme
Les Griots. Il y défend notamment l'idée
que la lutte des classes, en Haïti,
s'illustre par l'opposition entre les Noirs
et les Mulâtres, et que les premiers sont
appelés à diriger le pays au détriment
des seconds.

Duvalier s'appuie sur les relations de


Lorimer Denis pour rencontrer Daniel
Fignolé avec lequel il participe à la
fondation du Mouvement des Ouvriers
Paysans en 1946 dont il devient
secrétaire général. Sa popularité dans les
campagnes et son introduction dans les
milieux politiques incitent le président
Dumarsais Estimé à le nommer en 1946
directeur de la Santé Publique. En 1949, il
devient ministre de la Santé Publique et
du Travail. Après s'être opposé au coup
d'État de Paul Magloire, qui renverse
Estimé en 1950, il est poussé à l'exil et
s'engage dans l'opposition.

Profitant de la chute de Magloire et de


l'amnistie décrétée en 1956, il se porte
candidat à la présidence de la
République dans un climat d'agitation
sociale et d'instabilité politique : entre
décembre 1956 et juin 1957, cinq
gouvernements provisoires se sont
succédé, le parlement a été dissous et
des factions de l'armée continuent à
s'affronter[3].

Duvalier fait campagne avec un


programme populiste qui vise à flatter la
majorité afro-haïtienne en s'appuyant sur
un discours noiriste prétendant
bénéficier les masses populaires
« noires » au détriment de l'élite
« mulâtre »[4],[5]. Les élections sont
organisées le 22 septembre 1957 par le
général Antonio Kébreau, président du
Conseil Militaire du Gouvernement.
Duvalier est élu avec 69,1 % des voix, son
principal adversaire Louis Déjoie ne
recueillant que 28,3 %.

Consolidation du pouvoir

Duvalier (assis, à droite) et ses généraux (debout)


en 1963.

Dix mois après son accession au pouvoir,


en juillet 1958, François Duvalier doit
affronter une tentative de coup d'État. Il
réagit en instaurant l’état de siège et en
exigeant du Parlement l’autorisation de
gouverner par décrets (31 juillet 1958). Il
écarte de l'armée les officiers qui ne lui
sont pas fidèles, interdit les partis
d’opposition et mène une politique de
répression. Avec l'aide du chef de la
police Clément Barbot et de la CIA[6], il
organise la milice des Volontaires de la
Sécurité Nationale, plus connue sous le
nom de ses membres, les Tontons
macoutes. Ce groupe paramilitaire de
5 000 à 10 000 membres, inspiré des
chemises noires de l'Italie fasciste, ne
touche aucun salaire[7].
En 1959, alors qu'il est soigné à l'hôpital
pour une crise cardiaque, un commando
tente de débarquer sur l'île. Le chef de la
police secrète, Barbot, fait alors appel à
la marine américaine pour empêcher
l'opération. Sitôt rétabli, Duvalier fait
emprisonner Barbot, qu'il soupçonne de
vouloir prendre le pouvoir, et l'accuse de
complot contre l'État. Barbot sera
finalement assassiné par les Tontons
macoutes en 1963 avec ses deux frères
et d’autres compagnons.

En quelques années, Duvalier devra faire


face à une dizaine d'attentats, de
tentatives de renversement et
d'invasions. Il en tire parti à chaque fois
pour renforcer son image de défenseur
de la patrie, éliminer ses adversaires et
durcir son pouvoir personnel. Il asservit
l'armée, entretient la corruption,
supprime les libertés civiles et
institutionnalise la terreur : massacres,
exécutions sommaires, pillages et viols
deviennent le quotidien du pays[8].

S'appuyant sur le climat de guerre froide


et sur le cas de la révolution cubaine, il
exploite la peur du communisme pour
justifier la répression et obtenir le soutien
des États-Unis. Le 25 juin 1960, il
prononce à Jacmel un discours qui met
en relation l'orientation politique de son
régime et l'aide américaine[9].
En avril 1961, deux ans avant la fin de
son mandat, il réécrit la Constitution et
organise une élection présidentielle à
candidat unique. Il obtient 1,32 million de
voix, et aucun vote contre. Réélu pour un
autre mandat de six ans, il prononce la
dissolution du Parlement. En réaction à
l'opposition de l'église catholique
romaine, il expulse plusieurs prêtres,
l'archevêque de Port-au-Prince,
Mgr Poirier, et deux évêques, ce qui lui
vaut son excommunication en 1961.
Trois ans plus tard, il expulse les
jésuites[10].
Lire le média
Le président à vie, Papa-Doc.

À la suite de ce qui s'apparente à une


tentative d'enlèvement de ses deux
enfants, il commandite le massacre du
26 avril 1963 où plusieurs maisons ont
été incendiées avec leurs occupants et
des dizaines de personnes assassinées
par balles ou encore enlevées pour ne
plus jamais être revues[11]. Lors de ce
massacre, de nombreux haut-gradés des
forces armées d'Haïti, soupçonnés d'être
opposés à son pouvoir, sont entre autres
ciblés.

Culte de la personnalité

En 1968, Duvalier rencontre l'ambassadeur du


Guatemala David Tercero Castro, dernier
ambassadeur du Guatemala à Haïti.

Pour échapper à toute incertitude


électorale, Duvalier se proclame
président à vie en juin 1964, après un
nouveau référendum qui l'approuve à
99,99 %. Libre de toute opposition, ses
adversaires ayant été éliminés ou exilés
à l'étranger, il modifie les couleurs du
drapeau haïtien, qui devient noir et rouge
au lieu de bleu et rouge, impose
l'affichage de son portrait dans les rues,
les bâtiments publics et les
établissements scolaires[12]. L'exil des
cadres politiques, administratifs et
techniques, le détournement des
ressources de l'économie haïtienne mène
le pays à la faillite, le PIB chutant de 40 %
entre 1960 et 1970[13].

En 1966, Duvalier reprend contact avec le


Vatican et obtient le pouvoir de nommer
la hiérarchie catholique haïtienne.
Perpétuant un nationalisme noir, il réussit
ainsi à renforcer son emprise sur l'île par
le contrôle des institutions religieuses.

Drapeau d'Haïti, sous le régime de Duvalier.

Parallèlement, il ranime les traditions du


vaudou, les utilisant pour consolider son
pouvoir : il prétendait être lui-même un
hougan et a délibérément modelé son
image sur celle du Baron Samedi pour se
rendre encore plus imposant. Il portait
souvent des lunettes de soleil et parlait
avec un fort ton nasal associé au Lwa. À
la mort de John Fitzgerald Kennedy, il
déclara que l'assassinat était la
conséquence d'un sort qu'il lui avait jeté.

En 1970, atteint par la maladie, il désigne


son fils de 19 ans, Jean-Claude Duvalier
comme héritier de sa dictature. Cette
modification constitutionnelle est validée
par le référendum de 1971.

Il meurt quelques mois plus tard, le


21 avril 1971, après 13 ans et demi de
pouvoir absolu. Son fils, qui sera
surnommé « Baby doc », lui succède dès
le lendemain.

Profanation du tombeau
Le 8 février 1986, quand tombe le régime
des Duvalier, la foule s'en prend au
mausolée de « Papa Doc », qui sera
détruit à coups de pierres et à mains
nues ; le cercueil est sorti, la foule danse
dessus puis le met en morceaux ; elle
s'empare du corps du dictateur pour le
battre rituellement, joue avec ses
lunettes, et chante « les tontons
macoutes, ils mangent du caca ! ».
Pendant cette journée, on dénombre une
centaine de victimes, essentiellement
des tontons macoutes[14],[15].

Œuvres
Evolution stadiale du Vodou, avec Denis
Lorimer, 1944.
Problème des classes à travers l'histoire
d'Haïti : sociologie politique (avec
Lorimer Denis), Service de la Jeunesse
de Port-au-Prince, 1948.
Face au peuple et à l'histoire, Service
d'Information et de Documentation de
Port-au-Prince, 1961.
Histoire diplomatique, politique
étrangère : géographie politique,
politique frontérale, Presses nationales
d'Haïti, 1968.
Œuvres essentielles, Presses
nationales d'Haïti, 1968.
Hommage au martyr de la non-violence,
le révérend Martin Luther King, Jr.,
Presses nationales d'Haïti, 1968.
Hommage au Marron inconnu, Presses
nationales d'Haïti, 1969.
Mémoires d'un leader du Tiers Monde :
mes négociations avec le Saint-Siège ou
Une tranche d'histoire, Hachette, 1969
Élément d'une doctrine : Œuvres
essentielles, 1967

Notes et références
1. [1] (en) Richard M. Juang et Noelle
Morrissette, « Africa and the
Americas: Culture, Politics, and
History, Vol. 1 », Abc-Clio Inc, 2008, p.
391.
2. Sophie Chautard, Les dictateurs du
e
 siècle, Studyrama, 2006, p. 203.
3. Sauveur Pierre Étienne, Haïti, misère
de la démocratie, L'Harmattan, 1999,
p. 70
4. Belleau Jean-Philippe, « Liste
chronologique des massacres
commis en Haïti au XXe siècle » ,
sur https://www.sciencespo.fr ,
14 décembre 2009
5. Evans Sanon et Trenton Daniel,
« L'ancien dictateur haïtien Jean
Claude Duvalier succombe à une
crise cardiaque » , sur leau-vive.ca,
4 octobre 2014
6. Olivier Acuña, « 10 of the Most
Lethal CIA Interventions in Latin
America », Telesur,
18 septembre 2016 (lire en ligne ,
consulté le 23 juillet 2018)
7. André-Marcel d'Ans, Haitï : Paysage
et société, Karthala, 1987
8. Kern Delince, Les forces politiques
en Haïti, Karthala, 1993, p. 282
9. François Duvalier, Œuvres
essentielles, Presses nationales
d'Haïti, 1968, p. 413
10. Micial M. Nérestant, L'Église d'Haïti à
l'aube du troisième millénaire. Essai
de théologie pratique, Karthala, 1999,
p. 121 et 144
11. (en) James Ferguson, « Papa Doc, Baby
Doc: Haiti and the Duvaliers »,
Blackwell Pub, 1988, p. 45.
12. Etzer Charles (préf. Jean Ziegler), Le
pouvoir politique en Haïti de 1957 à
nos jours, Karthala, 1994, pp.265
13. Rapport de la Banque
interaméricaine de développement,
1989
14. Evénements Haïti, Archives INA
15. Profanation du tombeau de François
Duvalier, Archives INA

Bibliographie
Jean Florival, Duvalier. La face cachée
de Papa Doc, Mémoire d'encrier, 2007
(ISBN 2923153820)
Bernard Diederich et Al Burt, Papa Doc
et les tontons macoutes, Albin Michel,
1971
Etzer Charles (préf. Jean Ziegler), Le
pouvoir politique en Haïti de 1957 à nos
jours, Karthala, 1994
Le romancier Graham Greene a décrit
le régime des tontons macoutes dans
son roman Les comédiens (The
comedians) 1965
(ISBN 978-2221107089).

Voir aussi

Articles connexes

Histoire d'Haïti
Duvaliérisme
Tontons macoutes
Jeune Haïti
Massacre des Vêpres jérémiennes

Liens externes

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(en)
Vidéo: François Duvalier en 1968, un
portrait de "Papa Doc", une archives de
la Télévision suisse romande
Des récits en dehors de l'histoire.
Mémoires des « événements de 1969 »
à Cazale (Haïti) , Maud Laëthier, 2018

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Dernière modification il y a 11 jours par Gnurok

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