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Hypertension pulmonaire : quel arsenal thérapeutique

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May 16, 2023

Tout d’abord, rappelons que la prise en charge thérapeutique de l’HTP est


multidisciplinaire et réservée au centre de référence.

Hypertension artérielle pulmonaire

Évaluation initiale du pronostic


L’évaluation pronostique des patients est une étape essentielle dès le diagnostic posé. Elle
oriente la prise en charge thérapeutique initiale en séparant les patients en 3 groupes de
risque (faible, intermédiaire et élevé), en fonction de paramètres cliniques, biologiques,
d’imagerie et hémodynamiques (tableau 1).

Prise en charge thérapeutique


La prise en charge de l’HTAP nécessite une prise en charge globale, comprenant des
mesures générales, un traitement médical et une éducation thérapeutique.
 

Mesures générales
Encourager l’activité physique régulière, adaptée à l’importance des symptômes.
La vaccination contre la grippe, le pneumocoque et la Covid-19 est recommandée.

La carence en fer est fréquente chez les patients atteints d’HTAP, définie par une ferritine <
100 g/L, ou une ferritine à 100- 299 g/l et un coefficient de saturation de la transferrine <
20 %. Elle est associée à une aggravation des symptômes et à un risque accru de
mortalité. En présence d’une anémie ferriprive, il est recommandé de corriger le statut en

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fer chez les patients atteints d’HTAP (classe I, grade C). En cas de carence martiale même
sans anémie, une supplémentation ferrique peut-être envisagée (classe IIB, grade C).
L’oxygénothérapie de longue durée est recommandée chez les patients atteints d’HTAP

avec une hypoxémie importante (PaO2 < 60 mmHg) au repos, l’objectif étant
principalement symptomatique (classe I, grade C). Il ne faut pas s’attendre à une
normalisation de la SpO2 en cas d’HTAP associée à un shunt droit-gauche par un foramen
ovale perméable ou par une cardiopathie congénitale.

Le traitement anticoagulant n’est généralement pas indiqué chez les patients avec une
HTAP au vu du risque hémorragique et de l’absence de donnée robuste montrant son
intérêt, mais peut être considéré individuellement (classe IIB, grade C).

Un traitement diurétique en association avec un régime hyposodé est recommandé chez


les patients atteints d’HTAP présentant des signes d’insuffisance cardiaque droite.

Les femmes atteintes d’HTAP et en âge de procréer doivent recevoir des conseils clairs en
matière de contraception. Les dispositifs intra-utérins au cuivre ou au lévonorgestrel
représentent un mode de contraception efficace et peuvent être proposés à toutes les
patientes y compris aux nullipares. Cependant, leur mise en place peut occasionner dans
de rares cas une réaction vaso-vagale pouvant être mal tolérée en cas d’HTAP grave. Les
méthodes hormonales faisant intervenir les œstroprogestatifs ne doivent pas être
proposées, par ailleurs les progestatifs microdosés seuls et l’implant sous-cutané
constituent tous deux un mode de contraception efficace. La contraception hormonale
d’urgence post-coïtale est sûre et efficace chez les patientes avec HTAP.

⚠ Le bosentan, antagoniste des récepteurs de l’endothéline (ARE), peut réduire l’efficacité


des contraceptifs hormonaux. Chez ces patientes, il est nécessaire d’utiliser une double
contraception associant une méthode barrière et hormonale ou un dispositif intra-utérin.
Concernant la grossesse, elle est formellement contre-indiquée (mWHO IV)(2), du fait du

risque considérable d’aggravation de la maladie pouvant mettre en jeu le pronostic vital de


la mère (11- 25 % de risque de décès) et de l’enfant. Pour les femmes atteintes d’HTAP
ayant recours à une interruption de grossesse, il est recommandé que celle-ci soit réalisée
dans le centre de référence. Si la grossesse se poursuit, le traitement de l’HTAP devra être
adapté. Il est recommandé d’arrêter les ARE, le riociguat et le sélexipag en raison de leur
tératogénicité potentielle. Par ailleurs, malgré des preuves limitées, les inhibiteurs
calciques, les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (iPDE-5) et les analogues de
la prostacycline sont considérés comme sûrs pendant la grossesse.
 

Traitement médical de l’HTAP


• Inhibiteur calcique

Les patients atteints


d’HTAP idiopathique, héréditaire et médicamenteuse, qui répondent
favorablement au test de vasoréactivité aiguë au NO (moins de 10 % des patients)
peuvent répondre favorablement au traitement par inhibiteur calcique. Les inhibiteurs
calciques qui ont été principalement utilisés dans l’HTAP sont la nifédipine, le diltiazem et
l’amlodipine. L’efficacité de l’inhibiteur calcique doit être vérifiée par cathétérisme
cardiaque droit avec renouvellement du test de vasoréactivité aigu pour adapter les doses.
La posologie d’inhibiteur calcique utilisée dans cette indication précise peut être
supérieure à la posologie utilisée dans l’hypertension artérielle. Les patients avec une
réponse satisfaisante à long terme présentent un WHOFC I/II et une amélioration

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hémodynamique marquée (PAPm < 30 mmHg et PVR < 4 UW) sous traitement. En
l’absence d’une réponse satisfaisante, un traitement supplémentaire spécifique de l’HTAP
doit être institué.

• Antagonistes des recepteurs de l’endotheline (ARE)


L’endothéline est un peptide produit par les cellules endothéliales et par d’autres tissus,
qui représente le facteur vasoconstricteur endogène le plus puissant connu à ce jour.
Différents médicaments font partie de cette famille thérapeutique comme le bosentan,
l’ambrisentan et le macitentan. La principale toxicité est d’ordre hépatique avec une
cytolyse, réversible à l’arrêt du traitement ou après réduction de la posologie, nécessitant
une surveillance mensuelle des transaminases. Les ARE sont contre-indiqués en cas de
taux initial de transaminases à plus de trois fois la normale. Attention aux interactions
médicamenteuses avec le bosentan (contraceptifs hormonaux, warfarine…), beaucoup
moins fréquente avec l’ambrisentan.

• Inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (iPDE-5)


L’inhibition de la PDE-5 est à l’origine d’une augmentation de la concentration
intracellulaire de GMP cyclique, avec pour conséquence une relaxation du muscle lisse
vasculaire pulmonaire et une inhibition de la prolifération des cellules musculaires lisses.
Différents médicaments font partie de cette famille thérapeutique, le sildenafil en 3 prises
par jour et le tadalafil en une prise par jour.

• Stimulateur direct de la guanylate cyclase soluble (sGC)


Alors que les iPDE-5 augmentent la voie NO-GMPc en ralentissant la dégradation du


GMPc, les stimulateurs de la sGC augmentent la production de GMPc en stimulant
directement l’enzyme, de manière indépendante de la présence ou de l’absence de NO. Un
seul médicament : le riociguat.
⚠ Ne doit pas être associé avec
les iPDE-5.

• Analogues de la prostacycline et agonistes des récepteurs de la prostacycline


La prostacycline est produite par les cellules endothéliales. Elle entraîne une relaxation
des cellules musculaires lisses par le biais d’une augmentation de la concentration
intracellulaire d’adénosine monophosphate cyclique (AMPc), et possède également un
effet antiproliférant.

• Époprosténol

Ne peut être administré que par voie intraveineuse continue (demi-vie très courte 3-
minutes), à l’aide d’une pompe connectée à un cathéter tunnellisé. Les effets secondaires
sont fréquents : douleurs mandibulaires, céphalées, flushes, douleurs des membres
inférieurs, nausées, vomissements et diarrhée.

⚠ Risque de thrombose ou d’infection du cathéter, ne doit jamais être arrêté brutalement


en raison du risque de défaillance sévère du ventricule droit.

• Tréprostinil, analogue stable de la prostacycline, administré par voie sous-cutanée


continue. Les effets secondaires locaux sont fréquents (douleurs et réactions
inflammatoires au point d’injection) et peuvent parfois conduire à l’arrêt du traitement.

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• Sélexipag, agoniste sélectif du récepteur de la prostacycline (IP), prodrogue administrée
per os dont le métabolite actif stimule les récepteurs IP de la prostacycline.

Stratégie thérapeutique dans l’HTAP idiopathique,


héréditaire, médicamenteuse (non vasoréactive) et
associée à une connectivité (figure 1)

L’objectif du traitement de l’HTAP est


d’obtenir et de maintenir les patients à
un risque faible d’événement (selon
l’évaluation du risque en 4 groupes).

Stratégie thérapeutique percutanée (atrioseptostomie au


ballon) ou chirurgicale (anastomose de Potts)
L’atrioseptostomie au ballon est la création d’un shunt interatrial, l’anastomose de Potts
est une technique chirurgicale dont l’objectif est de faire une communication entre l’artère
pulmonaire gauche et l’aorte thoracique descendante. Ces techniques visent à décharger
le ventricule droit permettant une augmentation du débit sanguin systémique, améliorant
ainsi le transport systémique de l’oxygène malgré une désaturation artérielle en oxygène
secondaire au shunt (désaturation exclusivement aux organes intra-abdominaux et aux
membres inférieurs dans l’anastomose de Potts). Comme ces procédures sont complexes
et associées à un risque élevé de mortalité (particulièrement l’anastomose de Potts), elles
sont rarement pratiquées chez les patients atteints d’HTAP et ne peuvent être envisagées
que dans des centres expérimentés dans ces techniques.

Transplantation pulmonaire
La transplantation pulmonaire reste une option thérapeutique importante pour les patients
atteints d’HTAP réfractaire à un traitement médical optimisé. Chez les patients atteints
d’HTAP, l’orientation vers un centre de transplantation pulmonaire doit être envisagée,

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lorsqu’ils présentent une réponse inadéquate au traitement malgré une polythérapie
optimisée ; lorsqu’ils présentent un risque de décès intermédiaire élevé ou élevé, lorsque
les patients présentent une variante de la maladie qui répond mal au traitement médical,
comme la maladie veino-occlusive. Actuellement, la plupart des patients reçoivent une
transplantation bi-pulmonaire, tandis que la transplantation combinée cœur-poumons est
réservée aux patients qui présentent une atteinte cardiaque associée non corrigible
(cardiopathie congénitale).

Hypertension pulmonaire thromboembolique chronique (HTP-TEC)


L’HTP-TEC est une cause fréquente et importante d’HTP, avec une stratégie thérapeutique
bien distincte. L’algorithme de traitement de l’HTP-TEC comprend une approche
multimodale combinant l’endartériectomie pulmonaire, l’angioplastie pulmonaire au ballon
et le traitement médical pour cibler les différentes lésions anatomiques : proximale,
distale et microvasculaire (figure 2).

Stratégie thérapeutique de l’HTP-TEC (figure 3)

Traitement anticoagulant
Une anticoagulation à vie
est
recommandée pour les patients
atteints de HTP-TEC, car les embolies
pulmonaires récurrentes plus ou moins
accompagnées d’une résolution
incomplète des caillots sont les
caractéristiques physiopathologiques
clés de cette maladie. Les AVK sont recommandés par les experts et sont le plus souvent
utilisés comme traitement de fond chez ces patients. Plus récemment, les AOD ont été
utilisés comme alternatives aux AVK, mais sans preuves provenant d’essais cliniques
randomisés.

Endartériectomie pulmonaire
L’endartériectomie pulmonaire
chirurgicale est une technique complexe avec une mortalité
péri-opératoire relativement faible (< 2,5 %), quand elle est réalisée par des chirurgiens

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expérimentés dans ce domaine. C’est le traitement de choix en cas de lésion accessible
permettant une diminution importante des RVP jusqu’à 65 %.

Angioplastie pulmonaire au ballon


L’angioplastie pulmonaire est devenue un traitement de référence pour les patients


souffrant d’une HTP-TEC non opérable ou une HTP persistante/récurrente et
symptomatique après une endartériectomie chirurgicale, améliorant l’hémodynamique
(diminution des RVP de 49 à 66 %), la fonction cardiaque droite et la capacité d’exercice.
Elle est le plus souvent réalisée après un traitement médical spécifique de l’HTAP
permettant une préparation du lit microvasculaire avant les séances d’angioplastie.

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