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Introduction

Le cohérentisme est un courant de l’épistémologie morale. Il s’oppose au


fondationnalisme. Le débat entre les deux courants est celui de dire ce qui justifie nos
croyances, nos intuitions. Il s’agit donc d’un débat portant sur la structure de la justification
épistémique. En fait, de quoi s’agit-il dans ce débat ? Qu’est-ce que le cohérentisme ?

Fondement du cohérentisme.

Le point de départ du débat entre le cohérentisme et le fondationnalisme est le


problème d'Agrippa1. En effet, ce dernier énonce les postulats suivants permettant de justifier
une affirmation :

- la justification s'arrête à certaines affirmations qui ne sont pas elles-mêmes justifiées.

-la justification continue à l'infini.

- la justification s'appuie circulairement sur des affirmations qu'elle devait justifier.

Le fondationnalisme accepte le premier postulat. Car selon ce courant, certaines


croyances (les croyances de base) justifient nos croyances sans être elles-mêmes justifiées par
d'autres croyances. Alors que le cohérentisme accepte le troisième postulat qui dit que les
croyances peuvent se justifier les unes les autres circulairement.

Explication et présentation du cohérentisme

D’après les cohérentistes, la justification est une question de relation de cohérence


entre les croyances ; une croyance est justifiée quant elle fait parti des croyances justifiées.

John Rawls, Théorie de la justice, développe une approche cohérentiste de la justice. Il


va de ce qu’il appelle la « position originelle », qui serait l’état initial ou de nature chez
d’autres auteurs, pour élaborer les principes de la justice. Ainsi, il se pose la question
suivante : qu’est-ce qui fait que les principes de justice soient valides ?

1
Agrippa, philosophe sceptique qui vécut vraisemblablement vers la fin du Ier siècle ap. J.-C. Ce problème est
souvent appelé « trilemme d'Agrippa ».
Selon lui, il faut vérifier que ces principes sont en accord avec nos intuitions, c’est-à-
dire chercher à savoir notre sens habituel de la justice : est-ce que ces principes sont en accord
avec notre manière d’appréhender la justice ? Et s’il y a accord, Rawls appelle cela
l’ « équilibre réflexif ». S’il n’y a pas accord, il faut retourner vers les principes pour les
rectifier. Chez Rawls, une norme est valide lorsqu’elle a réussi au test d’équilibre procédural.

Ainsi, dans le cohérentisme, on peut toucher ou modifier les intuitions puisqu’elles


peuvent être confuses (ce qui n’est pas le cas dans le fondationnalisme). Les principes de la
justice peuvent aussi clarifier et ordonner les intuitions.

En outre, l’on parle souvent d’un certain cohérentisme kantien. Car la doctrine morale
de Kant ne se réfère pas à un ordre moral transcendant. Kant part de la présentation du sujet
moral comme un sujet libre et autonome, une autonomie qui consiste à donner à soi-même des
normes de sa conduite. En effet, la théorie de Kant propose une procédure de construction des
normes : « agis de telle sorte que la maxime de ton action soit érigée en norme universelle ».

Conclusion

L’originalité du cohérentisme, en épistémologie morale, est le fait d’admettre la


justification, la modification des intuitions. L’homme qui est un être fini ne peut pas d’un
coup émettre des vérités infinies. Et Gaston Bachelard nous dit qu’accéder à la science, c’est
spirituellement rajeunir, c’est accepter une mutation brusque qui doit contredire le passé. 2
Ainsi, en science il n’y a donc plus de vérité absolue. Même si le fondationnalisme évite la
régression à l’infini, il serait plus scientifique que les principes de base d’une discipline soient
modifiables pour leur conformité au réel, c’est ça qui fait évoluer la science.

2
Gaston Bachelard, La formation de l’esprit scientifique, Contribution à une psychanalyse de la connaissance
objective. Paris, Vrin, 1967, p. 14.

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