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Edmond Frézouls

Le théâtre romain de Tipasa


In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 64, 1952. pp. 111-177.

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Frézouls Edmond. Le théâtre romain de Tipasa. In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 64, 1952. pp. 111-177.

doi : 10.3406/mefr.1952.7374

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-4874_1952_num_64_1_7374
LE THEATRE ROMAIN DE TÏPASA

PAR
M. Edmond Frézouls
Membre de l'École

Comme sa voisine Cherchel, capitale de la province, la ville de


Tipasa1, dont les fouilles en cours révèlent de jour en jour plus
clairement l'importance2, possédait à la fois un amphithéâtre et
un théâtre. L'amphithéâtre, qui n'est pas encore entièrement dé
gagé, mais dont d'importants vestiges sont visibles, était voisin
des deux temples du parc national Trémeaux et des grands thermes.
Le théâtre, au contraire, occupait une position excentrique, à
l'ouest de la ville, près du point où l'enceinte, parallèle à la direc
tiongénérale de la côte, fait un coude pour rejoindre celle-ci (fig. 1).
La route de Cherchel, qui n'est encore dégagée que jusqu'au nym-
phée, passait à faible distance de la cavea avant de sortir de la
ville par une porte monumentale. Cet éloignement du centre de la ·V
ville explique peut-être la date toute récente de la fouille.

Les fouilles '

Le théâtre de Tipasa, en effet, est pourtant toujours demeuré


visible, quoique presque complètement enterré ; il n'a pas échappé
à l'attention des premières missions archéologiques. Dès 1846,
Charles Texier, accompagnant la mission navale du contre-amiral

1 A 70 km. à l'ouest d'Alger, sur la côte.


8 Lé dernier état des fouilles et la physionomie actuelle de la ville
sont donnés par M. L. Leschi, directeur des Antiquités de l'Algérie, dans
Tipasa de Mauritanie, Alger, 1950.

mi
ίΓΛ

Β, FR&&OULS
Rigodit, le vieite et signale, la bonne conservation de la comèta : .
« :.. un beau théâtre, dent heureusement les gradins sont fMjgiJ^. ■ /,
tous enterrés, ce qui les a sauvés de la destruction. Un portkpjA
d'ordre dorique donnait accès dans l'orchestre1. La scène oat
presque entièrement détruite ; mais la cavea... est conservée dans
tout son pourtour* ». Mais Texier met également en garde, contre .
les dangers du pillage : « ... Les beaux blocs de pierre de taille
avaient déjà attiré l'attention des spéculateurs, et ils y envoyaient ,J
des barques qui se chargeaient pour Alger. La direction de l'Inté- .
rieur a arrêté à temps ce trafic3... » Arrêt bien illusoire ou du
moins provisoire, puisque, avec la colonisation de Tipasa à partir
du Second Empire, le trafic reprend de plus belle, par la route
cette fois. On sait que le théâtre servit de carrière pour la cons
truction de l'hôpital de Marengo4 et que presque tous les gradins,
avec, sans doute, d'autres éléments, furent emportés. Ce pillage
explique en partie le médiocre intérêt qu'accordait St. Gsell à l'édi
fice8 ; même lorsque, en 1901, on ne connaissait encore en Algérie
que cinq autres théâtres conservés — dont trois seulement en bon
état· — il l'estimait « trop détruit pour présenter le moindre inté-

1 Sur l'existence de ce portique, cf. ci-dessous, p. 128 et 133.


* Ch. Texier, Extrait d'un aperçu statistique des monuments de V Algér
ie,in Revue archéologique, 1847, p. 728.
8 St. Gsell mentionne même un pillage plus ancien, remontant à la
domination turque. Cf. l'article des Mélanges de l'École française de
'.*'.· Rome, 1894, p. 323. Cet article, qui reprend et complète la thèse latine
De Tipasa, Mauretaniae Caeeariensis urbe, Alger, 1894, sera désigné
ultérieurement sous la forme ; Mél., 1894. Les monuments antiques de
ψ l'Algérie, Paris, 1901, seront signalés par l'indication '.Mon. ont., et les
Promenades archéologiques aux environs d'Alger, Paris, 1926, par : Prom. ,
arch.
* Gsell, Mél., 1894, p. 355 : « Les marches et les gradins en pierre de
taille ont disparu : ils ont servi, paraît-il, à la construction de l'hôpital
de Marengo. » ^
5 Gsell, De Tipasa..., p. 51 : vestigia theatri, valde quidem corrupta
exiguique momenti. :
* Ceux de Djemila, Khamissa et Timgad.
PROMONTOIRE
DE LA NÉCROPOLE
DE LEVEQUE ALEXANDRE È

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DE L'ÉVEQU '
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PRIVÉE

COLLINE de L'OUEST

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AMPHITHEATRE ?fc 'ύΤ* , ,ί/3 , I
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Sentiers touristiques

Clôture du Parc national

Fig. 1. — Plan d'ensemble de Tipasa

(D'après L. Leschi Tipasa de Maurétanie)


:
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP ASA 113

rêt1 ». Dès lors, son dégagement fut indéfiniment ajourné, même ί , ί·4
après la reprise dea fouilles en 1913 par le Service des Monuments
historiques. C'est seulement en 1942, au moment où les recherches
de M. P.-M,' Dtfval sur l'enceinte de Tipasa2 ramenaient l'intérêt
sur les secteurs périphériques, que M. L. Leschi décida de faire
dégager le théâtre, assumant lui-même la direction des travaux.
Entreprise au printemps 1942, la fouille débuta par l'extrémité
est de la. cavea et se poursuivit jusqu'en 1944 8. Quelques travaux
de consolidation garantirent de l'écroulement certaines voûtes. Il
ne restait plus qu'à terminer la fouille de la scène et d'un égout
passant sous les substructions du mur de scène; ce travail fut
entrepris pendant mon séjour à Tipasa, en juin 1950 *.

Description d'ensemble
L'édifìce est un des quelques théâtres antiques d'Afrique cons
truits en plaine6, selon la tradition romaine originale : la moitié

1 Gsell, Mon. ant., 1, p. 199.


• Cf. P.-3Î. Duval, Ckerchel et Tipasa : recherches sur deux villes fortes
de VAfrique romaine, Paris, 1946.
* M. L. Leschi a rendu compte de la fouille dans son rapport d'en
semble sur les travaux archéologiques réalisés en Algérie pendant la
guerre depuis 1942. B. C. T. H., procès-verbal de la séance du 17 juin
1946, p. χχνπ-χχνίπ. Voir aussi Id., Fasti archeologici, 1, 2094, et Π,
2839.
4 M. A. Grenier, directeur de l'École française de Rome, m'avait dési
gné pour une mission archéologique en Algérie ; M. L. Leschi, directeur
des Antiquités de l'Algérie, voulut bien me confier l'étude du monument
qu'il avait lui-même fouillé ; pendant tout mon séjour, sa bienveillance
a grandement facilité mon travail et ses avis m'ont été extrêmement
précieux. Je les prie tous deux de trouver ici l'expression de ma respec
tueuse gratitude. Je tiens également à remercier M. le colonel J. Bara-
dez, directeur des fouilles de Tipasa, qui a mis obligeamment à ma dis
position une équipe d'ouvriers.
6 Moins rares, cependant, qu'on ne croit généralement : outre ceux,
encore peu connus, de Bulla Regia, Althiburus (Medeïna) et Assuras
(Zanfour), les théâtres de Madaure, de Chemtou et de Sabratha ne
s'adossent pas non plus à une colline. Celui de Philippeville comporte
Mélanges d'Arch. et d'HUt, 1952. 8
° I? S3 DO Ο C? Ο
Murs conservés au-dessus du sol. .
Fig. 2, — Plan du théâtre (état actuel)
;■'
Λΐ-ί

LE THÌ ATRE ROMAIN DE TIPASA 115


extérieure de la cavea est supportée par des voûtes reposant sur
des murs qui délimitent de longues chambres : quatre d'entre elles
comportent dès escaliers d'accès aux gradins. Les spectateurs pé
nétraient dpnc soit par le« entrées latérales traditionnelles, 'soit
par l'arrière de la cavea, qui constituait ainsi une façade d'entrée,
de hauteur considérable. Une particularité de Tipasa est l'exis
tence, aux deux extrémités de la cavea, à% deux fort massifs sem
blant dessiner, avec la façade1, deux départs à peu près symétriques
de galerie circulaire, mais s'interrompant de chaque côté à la hau
teur du premier escalier (voir plan fig. 2).
La bâtisse se dresse sur un terrain solide. La roche calcaire af
fleure dans la dernière salle annexe de la scène à l'ouest (1 sur le
plan); on la retrouve en face du premier escalier en partant de
Test ; à cet endroit,, elle s'élève même rapidement, vers l'est, plus
haut que le niveau du pied de l'escalier. Il n'est pas impossible,
par conséquent, que l'on ait dû en certains endroits creuser la
roche pour constituer le plan sur lequel on a bâti le théâtre8. Mais
'4
des substructions dans sa partie supérieure, mais il est surtout établi sur
une pente naturelle. Cf. Gsell, Mon. ont., p. 192 sqq. On voit combien
abusive est donc, par exemple, l'affirmation de M. Homer F. Pfeiffer,
qui, après avoir noté que le théâtre de Dougga n'a pas de véritable fa
çade extérieure, ajoute : This was the case in all North African theatres
{The ancient Roman theatre at Dugga, in Memoirs of the american Aca-
detny in Home, 1931, p. 151, n. 3).
1 Pour la commodité de l'exposé, on continuera à appeler « façade »
le demi-cercle des pilastres donnant sur l'extérieur, en réservant la ques
tion de savoir s'ils ont réellement constitué la façade ou ont été entourés
d'une galerie.
2 Ce plan est, d'ailleurs, à un niveau sensiblement plus bas que celui
du nymphée voisin et de la route menant à Cherchel. Le dégagement du
dernier tronçon de cette route et de l'espace qui la sépare du théâtre
éclairerait cette question des niveaux relatifs et permettrait sans doute
de comprendre à la fois comment fut constituée l'assiette de l'édifice et
quels étaient les accès à la façade. Dans son étude sur le théâtre d'Ostie,
construit lui aussi en plaine, P. André signale une semblable dénivella
tion : « La galerie de pourtour... se trouvait un |eu en contre-bas du
sol de la rue extérieure* ce qui peut faire eroire que cette galerie ne com-


1,
la dénivellation n'était certainement pas telle qu'elle laissât à i'^r-
chitecte le choix eritre un theatre adossé et un théâtre con^r^r;.-;
A Tipasa, d'ailleurs, quel que fût l'emplacement choisi, il n'était
guère possible, comme dans tant d'autres villes, d'épargner les
massives substructions de la cavea,, car, si la côte est abrupte et le
relief assez vigoureux autour du site antique, la surface intérieure
aux remparte présente peu de dénivellations suffisantes, sauf tout
1 V à fait en bordure de la mer, et surtout peu ou pas de dénivellation
importante juxtaposée, selon une henreus© exposition, à un espace
plat. C'est donc une quasi-né^ets^é qui a amené la construction
de toutes pièces, en un terrain aplani pour la circonstance. La solu
tion comportait l'avantage de permettre le choix d'une exposition *
excellente : le théâtre est orienté vere le noid-nord-ouest, répon
dant ainsi aux prescriptions de Vitruve31 : les spectateurs ne
peuvent, avoir le soleil en face (yoir plan, fig. 1).
C'est encore le caractère entièrement artificiel de l'édifice qui
explique la variété de la construction : toutes Jes parties les plus
visibles à l'entrée ou pendant le spectacle (façade, entrées latérales,'
annexes de la scène, gradins) sont en pierre de taille de grand
appareil, la matière première étant le calcaire coquillier courant
dans la région2, légèrement jaunâtre avec parfois une teinte plus
rouge, facile à tailler, mais résistant mal aux intempéries — assez
analogue, en sommé, au tuf dont sont faits certains théâtres ita
liens. Les murs nord et sud et les piliers de la fosse de scène sont
du même appareil. Ses murs ouest et est, ainsi que les parements
ί<ί *
des murs soutenant les voûtes de la cavea, sont d'un appareil

muniquait avec le dehors qu'en certains points, au droit des entrées


menant à l'orchestre et au droit des escaliers qui conduisaient aux étages
supérieurs » {Mélanges de V École française de Rome, XI, 1891, p. 496).
* y itmve,V, S, 2 : Etiamque providendum est ne impetus habeat a mer
idie. Les citations de Vitruve suivent le texte de Granger.
2 St. Gsell {Mêï., |894, p. 375) signale l'existence de nombreuses car
rières à Tipasa et un peu à Test de la ville.
ri.
'fi*

LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 117

beaucoup plue petit et moins régulier. Les voûtes et les murs qui
les supportent sont de blocage; dans la partie basse de la cavea,
non soutenue par des substructions, les gradins reposent également
sur un blocage. La brique apparaît comme élément de renforc
ement et dans la façade du pulpitum. On n'a pas trouvé sur place
de marbre1*,
Ces matériaux variés ont diversement résisté au temps et ont
plus ou moins tenté les pilleurs. Les voûtes de blocage se sont en.
général effondrées, les murs ont parfois suivi, mais les piliers fo
rmant façade et les escaliers sont assez bien conservés. Des gradine,
la plupart ont été enlevés et il n'en reste que trois rangs ; l'o
rchestre et une partie des entrées latérales ont perdu leur pavement,
et ces entrées elles-mêmes, dont les murs sont inégalement conser
vés, n'ont plus de leurs voûtes que l'amorce8. Le mur du pulpitum
eât intact jusqu'à une hauteur variant entre 45 et 80 cm. La fosse
de la scène, avec ses piliers, est bien conservée; en revanche, le
mur de scène a disparu et il n'en reste qu'un informe soubassement.
Les pièces annexes 4e la scène, avec leur entrée, sont en assez bon
état à l'est jusqu'à lm50 du sol ; à l'ouest, on n'en a guère que le
plan.
Enfin, si son état actuel ne confère pas au théâtre de Tipasa le
prestige de ceux qui ont eu moins à souffrir, sa taille lui donne, à ■ ''té
première vue, une place honorable en Afrique ; il mesure environ
73 m. dans sa plus grande largeur, mais ce chiffre considérable est
dû à l'existence des deux massifs (A et A' sur le plan) <jui aug
mentent la largeur de la cavea et à l'extension corrélative des an
nexes de la scène. Ces éléments insolites faussent la comparaison
avec les autres théâtres d'Afrique; si l'on opère la rectification, <"à
.

on obtient pour la cavea une largeur maximum d'environ 64 m., soit

1 La question de savoir s'il faut malgré tout penser à dés revêtements


sera examine« plus loin (voir ci-dessous, p. 125}*
8 De façon générale, le côté est est bien moins ruiné que l'aytre.

"s
1
'fa -Vi

118 E.

sensiblement la même qu'à Djemila (62 m.), Dougga (63m50),


gad (63^60), Khamieea (64 m.)· te théâtre de Guelma a 58 ïn;
large, celili de Philippeville S2m40 ; ceux de Sabratha et de Bôn$,
les plus vastes d'Afrique, 92m60 et 400« ^ Lee dimensions de l*by*
poecaenium (30ra40 χ 7m30 en moyenne) conviennent à un théâtre
fi:
te ' dé bonne importance, nullement indigne àé la cité qui Ta cone*
truit : la surface delà scène* est moindre à Dougga8 (30m75 χ
5m50) et surtout k Timgad (30*60 χ 4*90), légèrement supérieure,
à Djemila (34«a30 X 7*»15) et k Gtielma (37 m. X 7m15), nette
ment plus vaste à Sabratha4 (42 ni. X 7 m.) et à Khamissa
(43«»60 χ

La « cavea»

Elle était constituée, on Ta vu, par des rangées demi-circulaires


de gradins dont les plus hautes reposaient sur dee chambres voû
tées aux entrées formant façade ; aux extrémités est et ouest, la
façade est doublée par deux courts massifs dont la courbe lui est
parallèle.

A. Les substructions.
fei: · Les chambres, au nombre de vingt et une, ont toutes la même
forme de trapèze très allongé ; quatre d'entre elles comportent un
escalier (2, 3, 4, 5 sur le plan) ; les deux escaliers extrêmes (2 et 3)
sont symétriques, chacun occupant la troisième chambre à partir
de l'entrée latérale, maie les deux plus proches de la chambre mé
i. diane ne sont pas symétriques par rapport à elle : il y a un léger

ί Cf., pour les théâtres algériens, St. Οϋβϋ,Μοη. ant., I, p. 186 sqq. ;
pour Dougga, Dr Carton, Mémoires présentés pur divers savants..., XI,
1904, p. 94 ; pour Sabratha, Q. Guidi, Africa Italiana, III, 1930, p. 8.
1 Et on verra (ci-dessous, p. 153) que la scène est à Tipasa plus vaste
que Yhyposcaenium. '
« Cf. Carton, l. /., p. 126. '
* D'après le plan du prof. D. Vincitori (G. Guidi, l. L, tav. I) ; G. Guidi
omet de donner les dimensions de la scène.

fi
•Λ"'
LE THEATRE KOMAIN DE TIPASA 119

décalage vers Test. Ces escaliers comportent dix-sept marches, d'un Je
peu plus de 20 cm. de haut en moyenne ; la treizième s'élargit en
palier ; les deux dernières, comprises entre deux montants massifs,
sont moins larges (voir photo 11, pi, VI). Les escaliers 3 et 5 sont
1 \i
en bon état; 4 n'a que onze marches avant le palier : il semble
donc en manquer une à la base; le quatrième, 2, n'a que sept
marches, en deux groupes, mais tous sont certainement du type
décrit ci-dessus. Ils commencent à environ 2m70 de l'entrée de la
chambre1.
A l'exception des deux chambres çontiguës aux entrées latérales,
plus étroites et de plan aberrant2 (elles ont visiblement été faites
en dermer lieu et ont servi à corriger les écarts de la construction, - <ΪΛ
ce qui n'offrait pratiquement aucun inconvénient), toutes ont des
dimensions à peu près similaires, avec de légères modifications lors
qu'elles renferment un escalier. Dans ce cas, en effet, la longueur
dépasse toujours 9m30, alors qu'elle varie ordinairement entre 8m30
et 9m20 ; la petite largeur (celle du mur de fond ou de la dernière
marche) y est plus grande que dans les chambres sans escaliers
(lm75 à lm92 contre lm23 à 'V°S7) ; au contraire, la grande largeur
(du côté de l'entrée) y est plutôt faible (elle varie entre 2m76 et
2m91, alors qu'elle atteint jusqu'à 3œ15 pour les chambres sans .. γ,
escalier). Ainsi, on a visiblement cherché à donner une bonne lar
geur, et surtout une largeur presque constante, aux chambres abri -

1 2m68 et 2e71 pour les deux intacts ; 3m03 pour le troisième, auquel
il manque une marche à la base. Le quatrième commence à 4 m. ; mais,
même en intercalant six marches entre ses deux groupes et deux en
haut, il faut supposer qu'il ea manque deux à la base — ce qui rappro
cherait le point de départ de l'entrée. Ces distances sont prises non de
la ligne de la façade, mais de rareté intérieure de l'avancée latérale des
pilastres.
·

2 Celle de l'ouest (8 sur le plan) forme un trapèze étroit, mais très


ouvert (9m02 de long, 0m94 de large côté intérieur et 2m33 côté exté
rieur) ; celle de l'est est, au contraire, très peu ouverte (8m91 de long sur
1*55 et 2»tl).
7*W
S"


' < '
>'% taÎîSdOLs


tant des escaliers, quitté à reporter l'effet d'élargissement,
sairê pour cotivrir nute surface circulaire, sur les autres (cet „^τ Λ w 7I
sèment du fond à l'entrée n'excède pas 1 m. dans les chambre* A -
JXV
escaliers, alors qu'il pm% aller ailleurs jusqu'à près de lm50). Vin«
tention est évidente : il s'agit d'éviter les bousculades dans les
vomitoria, à l'entrée ou à la sortie. C'est à la même précaution
qu'on peut rattacher rétablissement, aux tâpoie quarts de l'escalier,
»■ du petit palier déjà signalé. '-' -

.
Les murs comportant eux aussi un élargissement du fond de la
chambre à l'entrée, nécessité par le poids de, plus en plus grand
qu'üs ont à soutenir; leur épaieseur, qui varie en général entre
1*»15 et lm20 (minimum : ivtQ&i maximum : 1^34) au départ des
voûtes, augmente d'une vingtaine de centimètres jusqu'à la façade
(minimum : lm20 ; maximum : 1B154). Cet accroissement concourt
accessoirement à diminuer l'élargissement des chambres elles-
mêmes. >
Une épaisseur, aussi considérable s'explique par la qualité mé
diocre du mur : un blocage assez grossier et des parements de pe
ί; ,ι ' tits moellons irréguliers (voir photo 1, pL I); le mortier grisâtre,
dur et grenu, qui régularise la surface/ semble bon, mais le mur
porte des traces de réfection : certains pans ont dû être rejointoyés,
B^
et on n'a pas ménagé le mortier, qui apparaît en saillie. Plusieurs
moyens ont permis de consolider ce mur. Des rangs de briques sont
intercalés, généralement en deux bandes de trois briques dont l'une
est au niveau de la comiche des pilastres (soit 3 m.) et la plus
2Ȕ '
basse à environ lm20 du sol; òn les distingue sur la photo 11,
pi. VI ; les briques sont petites (28 à 32 cm.) et épaisse» de S cm. ;
la couche de mortier atteint 3,5 à 4 cmi.^. ί
Autre procédé : contre les pilastres, on a inséré dans le mur, à
W:'"
1™60 du sol environ, un gros bloc analogue à ceux dont sont failli

1 En plusieurs points, on a trouvé dès graffiti sur les joints. Voir


l'appendice B,
ί
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 121

les pilastres eux-mêmes et qui repose sur quatre ou cinq rangs sup
plémentaires de briques (photo 1? pi. I). Il y a ainsi sept ou huit
rangs de briqués et la masse du bloc (environ 50 χ 80 ein.) donne
à l'ensemble une forte cohésion.
La faible résistance du blocage et même du parement est donc ( A"

'
compensée par l'épaisseur du mur et les éléments de consolidation.
Un système analogue combine dans la construction des voûtes le
blocage et la Tbrique — en proportions bien inégales, d'ailleurs. A
son départ, la voûte s'appuie, en effet, sur un arc de briques carrées
de 40 cm. de côté (pédales), bien visible dans la chambre à esca
lier5; vers le milieu de sa longueur, elle est soutenue par un autre
arc de briques du même modèle (que l'on trouve à environ 5 m.
du fond dans la chambre 21). Aucune voûte n'étant conservée inté
gralement, on ne peut être sûr de l'existence d'un troisième arc
de briques ; elle est pour le moins vraisemblable. Pour éviter l'e
ffritement, le blocage porte toujours un revêtement analogue au
mortier des murs; ce revêtement, très résistant, a conservé la r WA
trace des planches qui soutenaient l'ensemble pendant la cons : 4
: /i
truction.
Les voûtes partent, en moyenne, à 3m75 du sol; aucune n'est
conservée bien au delà du milieu des chambres : la partie la plus
haute s'est partout écroulée, sauf pour la voûte de la chambre mé
diane (6), qui n'a, au contraire, conservé que la partie voisine de
l'entrée, et à un niveau d'ailleurs bien inférieur (4m55-4m75) à celui
'. rt
qui devait être atteint partout ailleurs. Ce fait et sa position la
mettent à l'écart des autres et nous envisagerons plus loin1 le pro
blème qu'elle soulève. Pour les autres voûtes, la pente est, au con
traire, considérable ; la plus grande hauteur conservée — vers le
milieu d'une chambre — est de 6m40; les données sont suffisantes
pour permettre de calculer le pourcentage général, qui est de
39 % ; la hauteur augmente d'environ ,3*60 du départ au sommet,

1 Voir ci-dessous, p. 122, n. 2, et 140.


- '' λ '. ' '"''/'' ν '"\>;'ί f. '
.V '■;,··"·,

,
122 E. FRÉZOULS
ce qui double assez exactement l'altitude des voûtes (comme en
pouvait s'y attendrie du fait que lee substructions commencent 4ii
milieu de la cavea) < la hauteur maximum du dessous de la voûte
devait être de l'ordre de 7*40., ', t H;1
La question se pose de l'utilisation de cet ensemble voûté; si
toute occupation des pièces extrêmes (7 et 8) parait exclue, en
raison de leur exiguïté et de leur irrégularité, on pourrait être tenté
de penser que d'autres chambres ont été des taberriae, selon l'ha*
bitude italienne, telle qu'on la constate & Hérculanum et surtout
à Ostie *. En fait, il n'y a pas a Tipasa d'indices suffisants d'occu
pation permanente : ni seuil, ni traces de plafond (car on ne pouv
ait guère laisser à la chambre toute sa hauteur : à Ostie, l'espace
est coupé par une voûte déterminant un entresol; le haut servait
de logement au boutiquier qui y accédait par un escalier, conservé
dans la plupart des cas) *. Les trous que l'on voit aux murs (photo 11,
iff', , \
pi. VI) n'ont rien à voir avec un aménagement analogue : ils se
succèdent en ligne verticale et existent aussi dans les chambres à
escalier, évidemment non habitées. Sans doute sont-Os liés à la
construction des murs et des voûtes et ont-ils servi à mettre en
ψ
1CL P- André, l. L, p. 496-497, et D. Vaglieri, Not. Sàav., 1911,
.

p. 407-408, et 1913, p. 391-393 et 439. A Ostie, chaque boutique dispose


même d'une pièce secondaire, due à l'agrandissement du théâtre sous
Commode et Septime-Sévère : l'adjonction d'un nouveau portique donn
ait, à la place de l'ancien, une nouvelle série de tabérnae, plus grandes,
sous le troisième maenianum ainsi créé. Les anciennes servirent d'arrière-
boutiques. ■;' /i

.

* On pourrait songer à faire une exception pour la chambre médiane


de Tipasa. A vrai dire, sa position même et le fait que sa voûte basse
soit la seule conservée feraient penser, plutôt qu'à une taberna, à un local
utilisé pour le fonctionnement du théâtre (magasin ou bureau de distr
ibution des tesserae, par exemple) * Mais la voûte est beaucoup trop im
portante pour être un simple plafond (la comparaison avec Ostie ne
laisse aucun doute, à ce sujet), et c'est en haut, dans la c<wea, qu'il faut
chercher la dé du problème (voir ci-dessous^ p. 140-141). D'ailleurs, Feu
trée est barrée par une forte assise qui, si elle n'est pas une adjonction ré
cente, prouve que la chambre était fermée au public.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPAS A 123
place l'échafaudage. Les graffiti que nous avons signalés — sur le
mortier et non sur les briques — datent de la construction même
et ne prouvent rien concernant une hypothétique utilisation. Du
reste, les conditions générales sont très différentes à Tipasa et à
Ostie : cette dernière est une ville très commerçante, qui s'est la
rgement développée, comme l'atteste précisément l'agrandissement
de son théâtre, situé, d'ailleurs, dans un quartier particulièrement
actif. Tipasa, qui n'a pas connu de poussée démographique aussi

Fig. 3. — Les extrémités de la « cavea »

importante, ne devait pas souffrir non plus d'une telle pénurie de ·:&
locaux commerciaux ; on ne voit pas très bien l'intérêt d'une mult
iplication des boutiques loin du port et du centre, près de la sortie
de la ville. Aussi bien ne trouve-t-on pas d'exemple certain d'une
semblable utilisation de substructions d'un théâtre en Afrique : à
Madaure, il n'en est pas question, étant donné les dimentions et la
construction du théâtre 1 ; à Sabratha, G. Guidi n'a trouvé qu'un
dépôt tardif de monnaies dans une chambre et n'apporte aucune
preuve d'occupation permanente2 ; le plan, avec ses deux galeries
concentriques, réduit, du reste, les possibilités.

1 Cf. A. Ballu, Revue africaine, 1920, n°» 304-305, p. 310-314.


8 Cf. G. Guidi, l. l., p. 4 et 14. C'est seulement parce que le fait se
rencontre ailleurs que l'auteur admet, sans plus de précisions, l'utilisa-
124 κ. FRifcBouLs ' '■-;;= ;■ -λρ

En somme, l'aménagement de» substructions est peut-ôtrë Îw


fait plue exceptionnel
* qu'on n'a cru; il semble exclu à Ifoêimwfrl.w''*
* '",11$".' ',

<
comm«, sans doute, dans les' autres théâtres africains. Λ f/.
■Α Η
^ Β. L« façade. .
ϊϊν.
Les pilastres massifs qui la constituent, beaucoup plus soignés
que les chambrée dont ils séparent les entrées, sont bâtis de gros
blocs calcaires bien appareillée3 dont certains ont un volume d'un
quart de mètre cube (un bloc alterne avec deux demi-blocs);
l'épaisseur du mortier est très faible. Lee cinq premiers à l'ouest
sont plus ou moins ruinés; les autres sont conservés au moins jus
qu'à la corniche, qui est souvent intacte. Leur plan présente trois
avancées de largeur sensiblement égale (lm32 ; voir plan et photo 2,
pi. I) ; celle qui donne vers l'extérieur est plus en saillie que les
f^ massifs latéraux : 53 cm. en moyenne au lieu de 38. La largeur
totale en façade est d'environ 2m10 [1™32 + (2 χ 38 cm.)] ; étant
donine que la hauteur des pilastres, corniche comprise, n'est que
de 3 m., on voit quel intérêt présente cette idée de fragmenter les
plans, et notamment celui qui forme façade, grâce à des avancées " :
un pilastre de 2m10 sur 3 m. sans avancée aurait paru trop trapu
et donné une fâcheuse impression d'écrasement mettant en relief
le faible « envol » de l'édifice. Le faire plus étroit était Impossible ;
il fallait une masse imposante pour soutenir des murs pesante,

tion de certaines pièces de Sabratha : II fornice di questa tipo poteva


essere una taberna ο tkermopolium, poiché sappiamo che al pian terreno di
teatri, anfiteatri e circhi romani esistevano magazzini e spacci di cibi e
bevande.
1 Une utilisation non permanente par des marchands ambulants, au
moment des représentations, reste évidemment possible. Elle est invé
rifiable* puisqu'elle n'a du laisser de traces. '
* Certains, comme d'autres dés paradai, portent des marques de
tâcheron, un V ou un Λ, sans intérêt particulier.
8 La question de savoir si l'avancée centrale supportait une voûte
sera posée plus loin ; de toute façon, la présence d'une voûte n'impliquait
nullement une semblable avancée, qui reste à expliquer.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 125

mais par eux-mêmes assez médiocrement résistante; d'ailleurs,


l'esthétique elle-même commandait que ces murs très épais fussent
le plus possible cachés par l'avancée des pilastres de façade. De :*M
même, la hauteur était imposée par les proportions générales de
'Mi
l'édifice. La solution adoptée répond aux nécessités techniques -.v^
tout en évitant l'impression d'écrasement : la surface s'organise
en banden verticales et la forte saillie de l'avancée centrale confère
à l'ensemble une certaine sveltesse qui empêche l'œil de sentir les
proportions réelles des pilastres1. Naturellement, la corniche, s
obrement moulurée, couronne et met en valeur ce plan. Outre
qu'elle constitue par elle-même une saillie (de 13 cm., pour une
hauteur d'un peu moins de 30 ; voir photo 2, pi. I), elle se trouve
en surplomb ~ de 15 cm. en moyenne — - au-dessus de l'avancée
en façade. On pourrait se demander si un débordement aussi im
portant n'était pas en même temps exigé par l'existence d'un revê
tement de marbre ; cette hypothèse est sans doute à écarter : on
n'a trouvé ni fragmente d'un tel revêtement ni même trace du
ciment et des crampons qui auraient dû le fixer contre la maçonn
erie; d'ailleurs, même en supposant un revêtement épais (et les
crustae marmoreae ne dépassaient guère 2 cmi 5) *, le surplomb qu'il
s'agit d'expliquer serait diminué, mais non supprimé ; enfin, les
pilastres sont très soigneusement appareillée et peuvent, aussi bien
que d'autres parties du théâtre qui ne portaient sûrement pas de

*La comparaison avec un grand théâtre construit, celui dé Marcel-


lus, par exemple, est instructive : ici, les murs rayonnante, malgré Pénor-
mité de l'édifice, sont minces, parce que construits en un appareil à toute
épreuve. Dès lors, les pilastres de la façade peuvent être étroits : ils ont
inoins de 2 m. de large et c'est cette étroitesse, conjuguée avec la hauteur
de la voûte (le rapport est inférieur à 1/2, au lieu .de 2/3 à Tipasa), qui
produit le magnifique élan de la façade. Nul artifice à fort relief n'est
nécessaire et les colonnes engagées qui ornent le milieu de chaque pilastre
valent bien plutôt parleur richesse décorative (grâce à la superposition
des trois ordres) qu'elles ne concourent à la verticalité de l'ensemble.
2 Cf. Blümner, Technologie und Terminologie der Gewerbe und Künste
der Griechen und Römern, II, p. 185.. .'."■■,

1 t
v-i
ì ''
126 8. fft&SOÜLS /ο
ψ revêtement, avoir été eux-mêmes exposés à la vue. Force etffc, ^.
' de s'en tenir à une interprétation décorative de cette double îb^î-
lie de la corniche : on a voulu donner à une façade un peu nue et !/ i
construite en un matériau vulgaire l'ornement d'un relief vigmi^;: ,^|> ,
reux -t- et, de fait, le résultat est assez heureux (voir photo Q$r<. \^A
*
pî. JV). ; - (■ ' μ- <
: ,

-
Les avancées latérales sont utilisées poor supporter les départe
d'une voûte qui donne à chaque chambre une véritable entrée :
autre intérêt de la fragmentation du plan de façade, puisque l'ef
fet monumental ainsi obtenu est plus grand que si la voûte se déta
chait simplement du pilastre, sans qu'une amorce de même lar
geur qu'elle l'annonçât depuis le sol. Aucune de ces voûtes n'est
malheureusement conservée en entier, mais lés éléments en place
(photo 11, pi. VI) permettent de compléter leur dessin ; un simple
tracé graphique donne à la voûte une élévation légèrement supé
rieure à l"*^ au-dessus du niveau de la corniche, donc à 4m25 au-
dessus du sol. L'épaisseur des blocs qui constituent la voûte étant
de 50 cm., la hauteur totale du premier étage atteint 4m75.
Si l'on peut se faire une idée assez précise de cet étage inférieur,
avec ses pilastres, finalement assez élégants, sa corniche largement
débordante et ses voûtes en retrait, aucun vestige ne subsisté du
second ordre. L'élévation maximum nous est donnée par la hau
teur des voûtes supportant la cavea (environ 7m40), majorée de
50 cm. (épaisseur de la voûte en façade)1; l'ensemble des deusi
étages ne peut, en tout cas, dépasser 8 m., ce qui ne laisse guère
plus de 3 ïn. au second ordre, contre 4ia75 a« preinier®. Malgré
l'absence de tout élément du second étage, cette inégalité de hau-

1 En supposant que le second ordre soit analogue au premier ou, du


moins, comporte lui aussi des voûtes similaires ; mais c'est très vraisem-
• blable, car il serait bien difficile de maequer autrement l'arrivée des
'
voûtes de blocage. '..;
* II faut, en effet, tenir comptç de l'assise
'/:. .';.:;, /3r
horizontale (ou des assises)

qui doit nécessairement, reposant elle-même sur les voûtes, supporter


LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 127

teur parait vraisemblable : en effet, au-dessus de la corniche, le


pilastre se rétrécit d'environ 30 cm. et n'a guère plus de 1 m. de
1
large au lieu de lm321. Le rapport des largeurs : j-^r est bien voi-
·


-
3
sin du rapport : j-== que nous proposons pour les hauteurs et il
■■

faut, d'autre part, exclure l'idée, aussi peu satisfaisante du point


de vue esthétique que du point de vue de la solidité, d'un retour
à la largeur de la base au-dessus de l'assise horizontale — donc
admettre tin pilastre plus grêle, correspondant à une hauteur 1 'r
moindre. C'est là tout ce qu'on peut conjecturer touchant le second
étage ; certains blocs ou fragments de corniche trouvés au pied de
la façade peuvent lui avoir appartenu, mais ce n'est pas certain.
À plus forte raison ne savons-nous rien de ce qui pouvait surmont
er cet étage et couronner la façade. Néanmoins, on est autorisé à
penser à une hauteur totale d'au moins 9m50 à 10 m, 2, ce qui
devait donner à l'édifice, se détachant en terrain plat, un aspect
assez imposant.
En somme, malgré leur médiocre conservation, les substructions
de la cavea seraient assez faciles à interpréter, si la ruine ne nous
contraignait à envisager l'existence d'une galerie circulaire, source
de difficultés. Nous avons signalé, en considérant provisoirement
la suite des pilastres et des voûtes, comme la façade du théâtre,
qu'il y avait pourtant là un problème 8. Les données sont les su
ivantes : à l'est et à l'ouest de la cavea existent deux importants
massifs d'appareil semblable à celui des pilastres, amorçant une
courbe concentrique à celle de la « façade ». Le massif ouest est
moins bien conservé en hauteur que l'autre, mais il est plus com-

le second ordre (cf. théâtre de Marcellus). On ne peut lui accorder moins


de 15 à, 20 cm.
* Bien visible sur la photo 11, pi. VI.
2 Puisqu'il fallait bien, dans un théâtre construit, un parapet dépas
santlargement 1 m. en arrière du dernier gradin.
3 Cf. ci-dessus, p. 115 et 118,
:*<·' ψ
«Vf./ " *
' ' B. FRÉZOUL8
,

13Ô

'
:

'
plet. Les plans font apparaître une symétrie d'ensemble
fig. 3). Les mums augmentent d'épaisseur en »'éloignant de y v
dos : de lm36 à lm54 à l'est, de 1»34 à 1»6Q à l'ouest. Le
ne s'allonge que sur un peu phie de 10 m., tandis que l'autre,
passe nettement 12m501, ce qui explique facilement la différence
d'épaisseur maximum. En face de chacun des pilastres dont ils
suivent, à près de 3 ni. de distance, la courbe, ces murs comportent
une avancée répondant à l'avancée médiane du pilastre ; le mur
ouest en a trois ; lé mur est, qui s'arrête juste à la hauteur du tro
isième pilastre, n'a que les deux premieres*; mais, si on lui restitue
un développement égal à celui de son symétrique, on trouve assez
exactement la hauteur nécessaire à la troisième avancée. La hau
teur, inégale à l'ouest — sur une petite surface,- toutes les. assises
au-dessus du sol ont même disparu — y va jusqu'à 1»»65 ; à l'est,
I-'-- la hauteur, constante, est légèrement supérieure ; ce n'est qu'en
bordure de la parodos que deux assises en plus lui' font atteindre
2m40. La largeur du passage entre les avancées est tout à fait iden
tique de part et d'autre (voir fig. 3) : 2m35 entre a et a, 2m32 entre
a' et et' ; 2m74 entre b et β, 2m74 entre b' et β' ; 2m75 entre c' et γ'.
Le rétrécissement entre les deux premières avancées est dû à une
plus grande saillie du premier pilastre de « façade* » : lœ26 à l'est,
lm04 à l'ouest au lieu de 53 cm. en moyenne, et les deux ensembles
présentent une symétrie très sensible ; visiblement, ce rétréciss
ement vise à constituer une espèce d' « entrée » donnant sur la
parodos. De ce côté, du reste, les dimensions sont extrêmement
régulières (fig. 3) : on trouve, par exemple, la même mesure

1 Ces mesures sont celles de l'arc formé par le côté extérieur du


mur.
• Cf. photo 4, pi. II, Ce qu'on voit au premier plan, au pied du mur,
n'est pas la base du pilastre manquant. Π s'agit seulement du roc sous-
jacent, taillé selon une fórme très irrégulfère et difficile à expliquer.
8 Cette double exception n'a pas été signalée dans l'étude des pi
lastres parce qu'elle est manifestement liée au problème qui nous oc
cupe ici.
ι »"■.

IC« ι
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP ASA 129

(73 cm.) pour lee quatre faces nord : l'impression est confirmée
par les caractères exceptionnels des deux avancées se faisant face :
une corniche les couronne à un peu moins de 2m30 au-dessus du
niveau de base des escaliers, soit à 70 cm. plus bas que pour tous
les autre» pilastres ; mais surtout l'avancée α comporte, en retrait
par rapport à la première, et dans l'alignement général de la «fa
,* '. iH
çade », une seconde corniche, dont il reste peu de chose, mais qui
est indubitablement en place 1. Cette seconde corniche surplombe
- s l}\
d'environ 80 cm. la première; à un peu moins de 3m10 de haut,
elle est sensiblement dans le plan horizontal des autres, comme
elle se trouve aussi dans leur alignement semi-circulaire. Toutes
les données, malheureusement fragmentaires, semblent donc indi
quer l'intention, au contact de la parodos, en utilisant un pilastre
normal renforcé et muni d'une seconde corniche plus basse et une
avancée symétrique du mur concentrique à la « façade », d'établir
une entrée assez monumentale, sans doute voûtée — la voûte s'ap-
puyant sur les deux avancées basses.
Mais où menaient ces entrées? L'existence des deux murs con
duit à penser à la galerie circulaire courante dans les théâtres cons
truits2. Pourtant, une telle galerie ne semble pas avoir pu exister
à Tipasa :
'il
1° D'abord, la fouille n'a absolument rien révélé au delà des Ά
17
deux massifs signalés, soit sur les -^ de la circonférence. Sans
doute Tipasa a-t-elle été pillée et a-t-on dû démonter les murs bloc
à bloc en progressant suivant leur tracé ; mais quelle coïncidence Hi
1 On ne peut malheureusement s'appuyer que sur les mesures du
côté est, car, à l'ouest, les pilastres sont presque rasés. Mais nous croyons
pouvoir induire de la symétrie parfaite des plans celle de l'élévation et
imaginer à l'ouest des hauteurs égales, d'autant plus que les deux avan
cées de l'est sont très bien conservées. Du côté du mur extérieur, la
première avancée (a) est d'ailleurs la seule — et c'est fâcheux — à avoir
gardé sa corniche basse (voir plan, flg. 3 et photo 4, pi. II).
2 Par exemple, au théâtre de Marcellus, à Ostie, à Sabratha/etc...

Mélangea d'Areh. et dUUt. 1952.


la© s

ou quel étrange souci de symétrie, si l'on s'était arrêté, de part «t


d'auto*, juste à la même hauteur \ D'autours, là où ils existent^·\\
mura, sont sensiblement dan» le même état de conservation q»e
les pilastres correspondante : très ruinée à l'ouest, assez bien ooij*
serves à Pest. Pourquoi supposer un traitement différent sur tout -
le reste du demi-cercle, où les pilastres sont en bon état et où il ae
reste pas la moindre trace de mur? X)e plue, comment imaginer
que les pilleurs aient pris la peine de faire tiisparaître un mur jus
qu'aux fondations, alors qu'il était ai facile de se servir un peu
plus loin? Il est bien difficile de ne pas sé fier aux résultats de la
fouille : le mur n'a très probablement pas «xisté là où nous n'en •χ
avons plus
* trace.
2° Eût-il existé, son rôle nous serait incompréhensible et cela
nous aide à admettre une situation de fait aussi bouleversante :
en effet, ce qu'on trouve à Rome, à Ostie, à Sabratha, etc. *, c'est
un portique dont les arcades correspondent aux entrées des
chambres ; PambuÎacre, sans être aussi bien éclairé qu'une façade,
n'est tout de même pas obscur ; d'autre part, la façade extérieure
du portique constitue bien pour le théâtre une façade. A Tipasa,
dans l'hypothèse du mur continu supportant une voûte, même
percé de temps à autre d'une ouverture (et nous avons deux mass
ifs continus de plus de 10 m.), l'effet le plus évident serait d'obs
curcir complètement l'ambuiacre, de rendre vain le soin avec lequel
a été construit ce que nous pensons être la façade8 et d'exposer à la
vue des arrivants une surface grossière et monotone4.

1 Cf. les ouvrages cités plus haut et M. Bieber, The History of the
Greek and Roman Theater* Princeton, 1939, p. 326 sqq.
* Oft peut rencontrer, il est vrai, une corniche à l'intérieur d'un por
tique', c'est le cas au théâtre de Marcellus. Mai» il s'agit d'un édifice i.
luxueux et ^existence d'un portique véritable laissé un intérêt à bette *■
sorte de façade intérieure, qui reçoit tout de même au jour. A Tipasa»
il n'en serait pas ainsi, et tous les effets que nous avons analysée per
draient leur sens s'il y avait une galerie circulaire couverte.
■ * On trouve bien, à Chemtou, un exemple de galerie circulaire fîmftée
L8 THEATRE ROM AJ Ν DE TIPASA 131
3° Faut-il imaginer quelque chose d'autre que le portique semi-
circulaire sous sa forme classique? Ne pouvait-il y avoir, au-dessus
des assises actuellement conservées, des arcades? Pure hypothèse,
qu'aucun vestige ne justifie. Et pourquoi, dans ce cas, un mur
plein jusqu'à près de 2 m. — ou davantage? La seule explication

.i-Si

\^

Fio. 4. Coupés d'une « cavea ».a « praecinctio » centrale


et de la « cavea » de tlpasa

serait la nécessité de masquer une différence de niveaux; il n'est


pas impossible que la roche ait été entaillée pour constituer la
plate-forme du théâtre1; le mur jouerait le rôle d'une sorte de

par un mur plein destiné à retenir les terres environnantes ; cette galerie
est éclairée par des regards pratiqués dans sa voûte. Mais son mur inté
rieur est nu, lui aussi, au lieu de présenter comme à Tipasa tous les carac
tères d'une façade; surtout, la plate-forme demi-circulaire qui couvre
cette galerie a un rôle fonctionnel, puisqu'elle permet, par des passages
de plain-p>ied entre les gradins, d'accéder à la praecinctio — ce qui serait
absolument impossible à Tipasa. Sur Chemtou, cf. J. Toutain, in Mél
anges dé V École française de Rome, 1892, p. 359 sqq.
1 Voir ci-dessus, p. 115 et η. 2.
palissade isolant l'édifice d'un voisinage dépourvu d'attraits. Maie
nous n'avons pas envisagé une ^dénivellation <*e l'ordre de 2 m. et
il est inconcevable que les constructeurs, prenant la peine d'édi
fierla cavea sur des substruction», se »oient imposé de surcroît
pareil gaspillage da matériaux et de main-d'œuvre. Ils auraient
plutôt, si la pente avait été aussi forte, bâti un théâtre adossé, ou
du moins réduit au minimum les substructions, comme à Philippe-
' '
ville.

'
De plus, une telle dénivellation interdirait tout accès au sud,
venant de la route de Cherchel 1. Or, comment admettre que l'a
W.. rchitecte se soit privé, alors que la route est toute proche, d'un des
avantages essentiels du théâtre construit, la faculté de déconges
tionnerles entrées latérales en rendant la cavea accessible par l'a
rrière?
4° Rien ne 'nous autorise à dépasser ce que nous avons sous les
ΪΥι yeux : ni sous la forme d'une galerie voûtée à arcades8, ni sous
celle d'un mur plein continu, nous ne pouvons concevoir que les
murs qui nous intriguent aient fait le tour de la cavéa. Les prolon
ger arbitrairement, sur la fol d'une ressemblance avec d'autres
théâtres, illusoire, on Fa montré, ne sert qu'à rendre leur existence
plus insolite et moins compréhensible. Il n'est pas davantage ques
tion d'y voir un ouvrage inachevé : aucun indice positif ne le per
met, et cela n'expliquerait pas mieux le rôle dévolu à ce mur.
•Ϊ.Γ, *
5° Quel peut-il être, si l'on considère les deux massifs, tels qu'ils
se présentent, comme complets? .
Certes, ces murs, isolée, ne sont pas moins insolites que ne le
seraient les ensembles que nous venons d'écarter. Pourtant, un

>.,' '. 1 Car on ne voit pas comment «'opérerait cet accès, à moins d'ima
giner encore tput un ensemble compliqué et gratuit.
1 Le fait que Ton n'ait pas trouvé, en fouillant, de restes de blocage
à l'extérieur de la façade est un argument de plus contre la galerie voû
tée traditionnelle.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 133
rapprochement peut nous éclairer : d'une part, on a ménagé un , .ν*
passage d'aspect soigné entre la parodos e% l'arrière de la cavea1 ;
d'autre part, les deux massifs s'arrêtent exactement au premier
escalier à Vest et à l'ouest. L'espèce de corridor ainsi créé joint
donc la parodos avec les entrées postérieures, l'accès traditionnel
avec l'accès propre aux théâtres construits, comme si on avait
t
voulu donner une souplesse plus grande au système des entrées,
et particulièrement canaliser vers les escaliers les spectateurs s'en-
gageant dans la parodos sans avoir pour autant leur place dans la
cavea inférieure. Sans doute, une véritable entrée voûtée n'était
pas nécessaire : pourtant, elle invitait naturellement le spectateur
novice à comprendre qu'il y avait aussi un passage par derrière et
à l'emprunter, alors que, sans les murs A et A', il n'aurait pas
manqué de suivre la parodos vers la cavea inférieure8, réservée, en
province comme à Rome — avec les sièges de l'orchestre - — aux
notabilités. Faute d'une organisation de ce genre, les avantages du
théâtre construit risquaient de se trouver annulés, les étroites paro·
doi et la cavea inférieure encombrées et la foule des pullati, voire
des esclaves, mélangée aux prêtres ou aux decurione8.

1 Cf. ci-dessus, p. 128-129.


9 II y avait sans doute en province des employés chargés de placer
les spectateurs correspondant aux dUsignatoree de Rome, mentionnés
par Plaute (prologue du Poenulue, v. 17 sqq.) et qu'on retrouve sous
l'Empire. Mais, dans les petites villes, le système devait moins bien
fonctionner. A Tipasa, le danger de désordre et de bousculade s'accrois
sait du fait qu'une partie des spectateurs, venus des campagnes voisines,
étaient particulièrement novices.
* On sait que la réglementation concernant les places au théâtre, loin
de s'affaiblir aprè» Auguste, se maintint à Rome et même se fit plus
stricte encore, notamment sous Domitien. Quoique nécessairement plus
simple, une réglementation existait également en province, comme en
font foi les inscriptions. Les principales sont mentionnées, avec les
textes des historiens, par Marquardt, Römische Staatsverwaltung, IH,
p. 513 sqq. Sur cette réglementation provinciale, et notamment sur la
Lex colonia* genetivae Juliae, cf. également la communication de B. Ché-
non, in B, S, 4. F-, 1913, p. 127 sqq.


&: De plue, une raison; architecturale «β joignait à la raisoa
tionnelle; l'absence dee maeew A et A' aurait créé un rentrant
peu harmonieux entre les eaUee annexée de la scène et la caçéaï
Leur présence, au contraire, équilibre lieureiieement, de part et
d'autre de la parodos, deux dimeneione sensiblement équivalent«,
de même qu'eue donne au passage entre paredos et salle annexe
(22 sur le plan) une réponse dont la symétrie est agréable (23).
Considération non dénuée d'intérêt si l'on se rappelle, par exemple»
l'importance qu'attache Vitruve à la symétrie et la place qu'il lui
fi.·· donne dans sa définition de la beauté2.
6° Notre explication ne permet pas non plue une reconstruction
complète des deux corridors de liaison : lés mure sont trop ruinés ·
pour qu'on puisse è coup dur leur assigner des voûtes ou leur en
refuser. S'ils en avaient, leur épaisseur considérable s'explique
œ- ■-
mieux; néanmoins, les raisons d'économie exposées plus haut8 et
rinutilité de semblables voûtes pour un' simple passage font pen
cher pom» la négative — en dehors du petit arc de l'entrée. Les
^

secondes et troisièmes avancées (b, ß', b', p1 et c, γ, ο',γ') devaient


comporter, de toute façon, une corniche répondant à celle des
pilastres.
Il y aurait ainsi non pas destruction, mais renforcement, par les
deux murs symétriques, des effets de la « façade » — qu'il fau
drait donc bien considérer comme telle. La cohésion architecturale
y trouverait son compte aussi bien que la cohésion fonctionnelle,
caractérisée par la. connexion, dans un sens comme dans l'autre4,

* Et il était nécessaire de donner à ces salies une grande étendue,


surtout si, comme nous Je pensons (voir ci-dessous, p. 169), il n'y avait
pas à Tipasa de porficw post scaenam.

8 Voir ci-dessus, p. 133.


4 En effet, le processus inverse de celui analysé plus haut est égal
ement valable : il valait mieux, pour un spectateur de la cavea inférieure
arrivant par derrière, passer par le corridor et la parodos que de prendre
μη escalier pour redescendre ensuite.
LE THEATRE ROMAIN DE TIPASA 135

entre les deux modes d'accès. Si, en principe, le public du haut en


trait par derrière et empruntait les deux escaliers centraux, les
spectateurs du bas descendant les parodoit les deux « corridors »
permettaient, avec les escaliers extérieurs, une souple redistribu
tion, hors de la cavea, des égarés et des hésitants.
Tout cela ne peut se présenter que comme une hypothèse, dont
le simple avantage est de ne pas bouleverser la ruine et d'essayer
de lui donner sa signification fonctionnelle et esthétique la plus
pleine. On pourra sans doute se prononcer beaucoup plus affirma
tivement lorsque les divers accès à l'édifice seront connus avec
_ y:*
précision — quand, notamment, la capitale question des liaisons,
que nous avons admises, entre la route de Cherchel et le théâtre,
et, avec elle, celle des diversités de niveau seront résolues —
o'est-à-dire quand toute la zone sera fouillée.

' C. Les gradins.

Appuyés les uns sur le sol, les autres sur les substructions, les
gradins reposaient toujours sur un solide blocage, visible là où ils
manquent. La forme générale est celle d'un demi-cercle d'un peu
plus de 58 m. de diamètre, amputé de chaque côté de la largeur de
la parodos; mais celle-ci était voûtée et devait supporter des tri-
bunalia et, en haut, des gradins. L'ensemble de la cavea formait
donc exactement un demi-cercle, comme il est normal dans un
théâtre romain ; le centre se trouve à quelques centimètres en avant
de la façade du pulpitum, ce qui correspond pratiquement à la
prescription de Vitruve V
On sait que la. cavea a été systématiquement pillée jusqu'au qua
trième gradin inclus; il ne reste donc, outre quelques éléments
d'escaliers qu'il sera aisé de remonter, que ce qui est en deçà du
troisième rang. La séparation entre cavea et orchestre est marquée

1 Vitruvè, yf 6, 1 ι Per centrum paraUelos linea ducatur; quae dis fun-


gat proscaenii pulpitum et orchestrae reçionem.
'■ ,*'· -ψι

136 Χ, FAÉSWHJL8
par une rangée d'orthostate» épais de 22 cm., rognés en général
au ras du sol1. Ces orthoetatee sont maintenus, du côté de Toï-
Φ:
ohestre, par un demi-cercle de dalles larges de 60 cm. et épaieae»
de 11 cm. en moyenne ; du côté de la cavea, à quelques centimètre·
,

plus haut que ces dalles, par une praecinctio de lm25. Sous cette
praecinctio, empruntée par les spectateurs venant des parodoi pour
gagner les escaliers, se trouve un égout, sur lequel ouvrent dee
trous percés dans certaines dalles.
,ίί ',
Le premier gradin est précédé, suivant l'usage, d'un marchepied,
où poser les pieds sans être dérangé par les passants et dont les
dimensions sont plus faibles de moitié : 36 cm. de profondeur sur
une vingtaine de haut. Les gradins, eux-mêmes taillés, sans cor
niche, dans un calcaire résistant, et bien conservés, font . 72 à
75 cm. sur 34. Cinq escaliers, déterminant quatre cunei, y sont
creusés, à intervalles réguliers, le premier et le cinquième longeant
exactement la parodos (voir photo 5, pi. III) ; selon la technique
habituelle, les gradins sont entaillée de manière à doubler le nombre
des degrés en en diminuant profondeur et hauteur de moitié; il
reste ainsi, le marchepied n'ayant pas besoin d'être entaillé, six
marches d'environ 17 cm. de haut sur 35 cm. de profondeur (soit
sensiblement moins que pour les escaliers extérieurs). La largeur
moyenne est de 85 cm., ce qui peut suffire, à l'extrême rigueur,
pour deux personnes de front.
Les gradins ne comportent pas d'autre particularité que Pexis^·
tence au second rang, aussitôt après le second escalier en partant
de l'est, de trois inscriptions identiques, nettement gravées à trois
places successives et se composant des lettres CHI 2. A cet endroit,
il s'agit évidemment d'inscriptions réservant les places à un part
iculier, une famille ou une collectivité; un tel usage n'est pas

1 Les mieux conservés n'atteignent que 86 cm. de haut.


8 II n'est pas impossible d'en distinguer une quatrième, identique, à
la suite, mais en si mauvais état que le doute est préférable.
LE THÉATAE ROMAIN DE TIPASA 137

rare *, que l'inscription soit gravée sur le plat ou sur la tranche du


V wl
gradin; mais ni la comparaison avec d'autres exemples ni la con
frontation avec les inscriptions de Tipasa ne nous ont fourni d'in
terprétation satisfaisante. Toutefois, il est intéressant de rappro
cher le cas présent de quatre autres inscriptions de Tipasa2, que
Poinssot croit provenir de l'amphithéâtre ; elles comportent aussi
quelques lettres, dont la première est un C ou, selon Gsell,
un G.
Au delà des trois gradins, on n'a plus que le blocage sur lequel
reposaient les suivants; après la fouille, on l'a recouvert de terre
et on y a fait pousser des plantes grasses pour en éviter la dégra
dation. On a toutefois ménagé une saignée qui permet de bien ■v?
distinguer la suite des gradins. C'est cette bonne conservation qui
nous invite à poser l'importante question de la praecinctio. Normal
ement, dans un théâtre de l'importance de Tipasa, on doit s'at
tendre à trouver au moins une praecinctio , outre celle du bas ; sa
place semble tout indiquée au niveau où débouchent les vomito-
ria, c'est-à-dire au milieu ou un peu avant le milieu de la cavea.
Le relief bien conservé du blocage nous garantit, en tout cas, qu'il
ne peut y avoir de praecinctio avant cette zone : on compte, en ef -'vi
fet, très facilement sept gradins après les trois premiers (voir
photo 5, pi. III) ; au delà, une zone deux fois plus profonde qu'un
gradin, après laquelle reprennent, jusqu'au bord des chambres, les
substructions — et qui pourrait? paraître convenir.
Mais, d'abord, elle est plus basse que la marche supérieure de

1 Surtout dans les amphithéâtres, il est vrai (notamment, au Colisée,


à Pola, à Rimini, Arles, Nîmes et Lambèse). Hübner, dans sa recension
des Iscrizioni esistenti sui sedili dei teatri ed anfiteatri antichi, in Annali
deW Istituto di corrispondenza archeologica, 1856, p. 52 sqq., et 1859,
p. 122 eqq., cite des inscriptions de théâtres grecs (particulièrement à
Mélos, Larissa, Naxos, peut-être Taormine), mais n'en connaît pas de
sûre dans les théâtres romains.
8 Cf. Poinssot, Bulletin trimestriel des antiquités africaines, 1884,
p. 214, n°e 487-4Ö0, et C, I, X., VIII, 20879-20882,
S. FRÉZ0UL8
l'escalier et l'on né conçoit guère une praecinctio obligeant;

■Vi cendre après être monté1. D'autre part, c'est derrière elle
a un abrupt (deux foie environ la hauteur d'une marche), alo»
qu'Une praecinctio dessert le mat&ianum supérieur et non le rmè-
" nianum inférieur (voir fig. 4). Surtout, elle n'existe que vere le
Ρ*
centre de la cavea : aux extrémités*«et et ouest, un blocagfr vjei^
blement en place trahit la continuité des gradins jusqu'à la nais
sance des voûtes, qui sont en plusieurs points assez bien conser-
vées. Le théâtre de Tipaea ne peut ilgbé avoir comporté de prae
cinctio centrale. Quelque difficile que celât paraisse, il faut bien
admettre que les spectateurs de la cavea supérieure, débouchant
ìfrT.
des çûmitoria, empruntaient pendant quelques mètres un simple
gradin: pour y gagner l'escalier qu'ils devaient gravir.
Y avait-il une praecènetio plus haut? Ce n'est pas sûr, car c'est
à l'arrivée des escaliers postérieure qu'elle était vraiment le plus
ν }■
utile ; de plus, à la reculer, il faut la rejeter très loin, puisque les
voûtes interrompaient la continuité des gradins sur plus de 2 m.
de profondeur (elles semblent, en effet, ne commencer qu'au-dessus
du palier précédant les quatre marches supérieures — ce qui repré
sente, suivant sa position exacte, i^Gê à 2 m., inutilisables, c'est-à-
dire pratiquement trois gradins en moins, soit plus de 2m10). La
y* disproportion serait alors bien grande entre les deux maeniana,.
Toutefois, le second, même de profondeur réduite, représentait
ι? ' -■· » une surface très étendue, et pareille disproportion n'est pas sans
exemple8. Nous préférons courir le risque de l'admettre plutôt que
de supposer un théâtre sane autre praecinctio que celle qui succède
immédiatement à l'orchestre : elle se placerait ainsi après le dix-
septième gradin.
Ajoutons que le décalage des escaliers,- qui est normalement de

1 II y a bien, au bout de l'escalier 5, use marche qui redescend, mais


elle n'est certainement pas en place.
* Notamment à Khamissa, Cf. Gsell, Mon. ant., I, p. 190.
« 'DÌ
LE THÉATAE ROMAIN DS TIPASA 139

'
règle1, ne lait aucune difficulté avec une praecinctio très haute,
alors qu'il était impossible à Tipasa avec une praecinctio située au
niveau des vûmUoria ou plus bas : ceux-ci, en effet, occupent pré
devraient'
cisément la position que prendre les escaliers du second
maenianum. Enfin, comme la valeur des places augmentait avec
leur proximité de la scène, il a pu sembler avantageux de sacrifier
plutôt des rangs éloignés que deux gradins proches — surtout dans
une eavea relativement petite et. qu'on ne pouvait songer à agrand
ir sans un gros cubage de maçonnerie, donc une grosse dépense.
De même, une précinction haute pouvait servir de bamère entre
le second maenianum, réservé aux gens de peu, et le reste de la
cavea. Au contraire, une galerie centrale, inapte à jouer ce rôle,
eût favorisé, dans la cavea supérieure, une promiscuité peu con
forme, on l'a vu, aux habitudes romaines 2.
Quant au seul point qui semblait rendre probable la praecinctio
centrale, il s'interprète parfaitement dans la présente hypothèse : le
« couloir », plus large après lé dixième gradin, correspond en fait à
la disparition du onzième 8 : les dimensions conviennent exactement.

1 Les escaliers du momianum supérieur partant du milieu du cuneus


inférieur. Cf. Vitruve, V^ 6, 2. .
* Notons ici que notre hypothèse concernant l'organisation des en
trées (voir ci-dessus, p. 133), qui prenait, par avance, appui sur l'inexis
tenced'une praecinctio centrale— que l'on croit maintenant avoir dé
montrée — rend à son tour cette conception de la cavea plus compréh
ensible : une organisation ne permettant pas de répartir les spectateurs
dès rentrée appelait une séparation nette entre les places « honorables »
et les autres, donc un battens, qui ne pouvait exister que devant une
praecinctio à la hauteur des vomitoria. Si, au contraire, les spectateurs
de marque sont seuls à entrer par le bas de la cavea, Us n'ont plus besoin
d'être « protégés », mais gagnent librement leurs places, pendant que les
autres spectateurs suivent, à partir des vomitoria, le mouvement géné
ralascendant — la praecinctio haute permettant un nouveau tri entre
non-privilégiés. Ainsi deux conceptions étranges, si on les considère iso
lément, se complètent en un tout cohérent dont la valeur est essentiell
ement fonctionnelle — et qui est indice de la souplesse avec laquelle était
traitée la construction d'un théâtre romain,
8 Sans doute eue à un aménagement du terrain pour le pillage.
140 . tbézouls
ψ"
L'évaluation du nombre de gradins ne dépend pas, celite du
nombre de spectateurs dépend assez peu, de la place de là prae-
cinctio* En revanche, l'incertitude où nous sommes, & premium
vue, touchant le haut de la cavea est plus grave. Il est possible que
les derniers gradins aient été moins profonds et que Ton ait gagné
ainsi an ou deux rangs1 ; c'est même probable, ear la profondeur ,
dee range conservée est considérable (73 cm«, quand elle n'est à
Timgad que de 60 cm.)· Mais y avait-il une galerie, comme à Tim·-
te
gad ou à Dougga? C'est peu vraisemblable dans un théâtre cons»
truit où la place était précieuse et coûteuse8.
Le seul élément conservé qui ait rapport ave> la cavea supérieure,
quoique bien ruiné, engage à préciser les choses dans une autre
direction : il s'agit de la voûte basse et à peu près horizontale de
la chambre médiane. Nous avons écarté8 l'explication qui ferait
de cette voûte un simple plafond ; si, cornine son importance j'im
pose, elle était vraiment 'destinée à supporter quelque chose de
plus qu'un entresol, ce ne pouvaient être non plus des gradins :
son niveau (moins de 5 m. au-dessus du sol) et son horizontalité
l'interdisent, comme ils écartent l'idée d'une entrée centrale dans
la cavea supérieure*. Il s'agit donc d'une surface plane, sans com
munication avec l'extérieur, à laquelle on accédait de la cavea
même. Sa position exactement centrale et la relative fréquence de
tels édifices en Afrique5 conduisent à penser à un de ces petits

1 C'est ce qui se passe à Dougga, où la différence est de 10 cm. (64 cm.


au lieu de 74 cm.) ; cf. Carton, l. l., p. 103. A Arles, .elle est de 8 cm·
(72 cm. contre 80 cm.) ; cf. J. Pormîgé, Remarques diverses sur les théâtres
romaine à propos de ceux d'Arles et d'Orange in Mémoires présentés par
divers savants... } 1932, p. âl-32.
» Même pour le luxueux théâtre de SabratUa, G. Guidi (l. L, p. 19)
n'a pas de preuves de son existence et l'admet seulement par analogie.
* Voir ci-dessus, p. î'21-122. ,,
.

4 De telles entrées n'existent, comme à Ostie ou à Madaure, qu'au


niveau du sol. .
9 Notamment à Guelma, à Cherchel et très probablement à Philippe-
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPÀSA ■141
sanctuaires de théâtres qui abritaient la statue d'une divinité.
L'exiguïté des vestiges ne prouve rien contre l'existence de l'édi
fice : autant il est invraisemblable qu'on ait pillé jusqu'à la der Λ

nière assise d'un hypothétique mur circulaire, autant il est certain


qu'un ouvrage sans aucun doute construit et décoré avec soin, et,
de plus, resté constamment au-dessus du sol, aurait déchaîné les
convoitises jusqu'à disparaître entièrement1.
Le niveau (un peu plus de 5 m., car nous n'avons pas toute l'épais
seur de la voûte) convient parfaitement : il est à peu près le même ■■<?,
que celui de la praecinctio, ou, si l'on préfère, celui où nous la
situons8. Ici encore, les deux hypothèses se renforcent : de la
praecinctio, ainsi placée après le dix-septième gradin, soit à envi
ron 5sa25 du fond de la cavea, l'accès au sacellum pouvait être
facile et ne pas coûter beaucoup de place. Un couloir très court,
horizontal, suffisait, avec peut-être quelques degrés à l'entrée, la
profondeur de Pédicule se chiffrant entre 4 et 5 m. vj
" De même, la largeur disponible est satisfaisante : nous savons
que le sanctuaire ne pouvait déborder au-dessus des chambres voi
sines, puisque l'une d'entre elles a des restes de voûte inclinée.
Mais les murs de pierre de taille ne réclamaient pas l'épaisseur de
l'énorme blocage inférieur; même en abandonnant la moitié de
cette épaisseur aux retombées des voûtes voisines, la largeur du
petit temple pouvait encore atteindre 4m50. C'est suffisant pour
un édifice de ce genre : à Guelma, où le plan est carré avec une
exèdre demi-circulaire débordant le mur de fond, le côté mesure

ville ; cf. St. Gsell, Prom, arch., p. 70-71, et Mon. ant., I, p. 193 et 196.
Pour Dougga et Timgad, où la chose est également possible, nous n'osons
pourtant être aussi affîrmatif que M. G. Caputo. Les deux sanctuaires
seraient dédiés à Gères Augusta (Dioniso, 1947, fase. I, p. 19).
1 Nulle part, ces sanctuaires ne sont, d'ailleurs, bien conservés.
2 La dénivellation entre la praecinctio et l'orchestre est plus forte,
mais celui-ci est lui-même en contre-bas de 80 cm. par rapport au sol
derrière là cavea; les parodoi sont en nette déclivité.
<vtî
ÎS|^5^^^ ·.·;£

142
telles dimensions ne soulevaient
difficulté à Tipasa ; quasi à le hauteur, elle pourrait
valeur un peu supérieure, donnant au sanctuaire une façade hat-
monieuse, aeeez analogue à celle qui a été reconstituée à
sani pour cela déparer la perspective en dépassant le mur de fond
— qui devait, on l'a vu2, aller au moins jusqu'à 9m50 à 10 m.
Les vestiges sont trop dérisoires pour fonder, malheureusement,
autre chose qu'une hypothèse. EU» p&ig& semble la seule capable
d'expliquer un fait — l'existence de là' voûte basse — sans hetok
ter les autres. De plus, à Tipasa, elle bénéficie d'un autre appui
encore. Combien, en effet, n'est-il paa naturel que l'architecte,
' §·· -* *-
tardif, mais soucieux, nous l'avons déjà pressenti, de créer un en
semble complet et harmonieux, soil allé chercher des idées et un
modèle dans la capitale voisine, toujours prestigieuse depuis
Juba II? Or, le théâtre de Cesaree comportait un temple au som
met, Gsell admet qu'il faisait partie des réalisations conçues, pour
l'embellissement de sa capitale, par le savant allié de Home' lui-
même. Si c'était vrai, nous aurions à Tipasa, par une filiation
assez attachante, un modeste reflet de l'ouvrage qui dut retenir
durant ses années romaines les regards de Juba et inspirer ensuite
ses plans : le théâtre de Pompée, majestueusement couronné par
le temple de Vénus Victrix*.
Si l'on accepte des gradins plus étroits au sommet, sans galerie,

1 Cf. plan dans St. Gsell, Mon. ant., I, p. 195.


* Cf. ci-dessus, p. 127.
8 L'étude des théâtres d'Afrique montre bien que le cas du théâtre
dé Pompée est beaucoup moins isolé qu'on ne t'a cru. ML 0. Caputo l'a
justement observé {L t., passim) ; il faut, pensons-nous^ aller plus loin
et voir dans Cbercbel, que M. G. Caputo ne mentionne pas, l'intermé
diaire à peu près certain par lequel s'est manifestée l'influence de Rome ;
ςριβ sa construction remonte ou non à Julia, l'édifice est l'un des plus an*
ciens d'Afrique et Cesaree garda longtemps une position eminente.
Sur l'origine même du temple de Vénus Victrix au sommet du théâtre
de Pompée, cf. G. Marchetti-Longhi, Religione è Teatro, V influente rel
igiosa nella topografia del teatri di Roma antica {Dioniso, 1942, 1,p. 15 sqq.).
LE THEATRE BOM ΑΙ Ν DE TIPASA 143

interrompus au milieu de la cavea par un sacellum, il y a place, en


hauteur comme en profondeur, pour vingt-cinq rangs, que la prae-
cinctio — prenant elle-même la place de deux gradins — diviserait
en deux maeniana de dix-sept et de huit rangs. Étant donné le >"'*".']
diamètre de là cavea (19m75 en bas et 58"?25 au sommet), on ob
tient, en défalquant l'espace occupé par les escaliers, l'arrivée des
vomitoria et le temple, un développement approximatif de 1.400 m.,
ce qui correspond à 3.500 places, si l'on admet que chaque spec
tateur disposait de 40 cm.1. Ce total est d'ailleurs un minimum,
car les enfants et les spectateurs du second maenianum pouvaient
être plue serrée ; de plus, aux jours d'affluence, on pouvait s'asseoir
sur les escaliers. De sorte qu'il faut penser à une capacité plus
proche de 4.000 que de 3.000 places. On voit combien injustifiées
apparaissent les réticences de St. Gsell, qui fixe comme un max
imum le chiffre de 2.000?. En fait, par ses possibilités comme par
ses dimensions et sa valeur architecturale, le théâtre de Tipasa
\ , ' / ■' *
.■

.
'■

'

occupe un rang honorable en Afrique. ■ '

L'orchestre et les entrées latérales (« parodoi »)


Y V orchestre. , -

Séparé de la cavea par le rang d'orthostates décrit plus haut, il


\r*
formait un demi-cercle de 8m25 de rayon ayant son centre sur le

1 On n'a pas tenu compte, dans ce calcul, de l'amputation subie par


les huit premiers rangs au, débouché des parodoi ni de la diminution de
densité dans les tribunalia : les places ainsi perdues devaient se retrou
ver, à peu de choses prés, avec les sièges disposes dans l'orchestre.
Quant au chiffre de 40 cm. par spectateur que nous adoptons, il cor
respond au maximum attesté dans les théâtres ou amphithéâtres où les
marque» de séparation entre les places se sont conservées (par exemple,
à Pompéi, Nîmes, Arles). M. J. Formigé .'(/. /., p. ,32-33) a critiqué irréf
utablement la mesure de 50 cm. choisie par Garistie — et utilisée égal
ement par l'ouvrage de Boeswillwald-Cagnat-Ballu, Timgad, une cité afri
caine sous VErppire romain \ç>. 117-118) — pour calculer la capacité du
théâtre de la vale.
»Cf. Mon. ant>, l, p. 199 ; Prom, arch., p. 102. M. G. Caputo, l t.,

'F

„M
144 VR&SOULS

fronl du pulpitum. La séparation pouvait n'être pas continue et


comporter, comme à Timgad ou à Sabratha1, un passage en fatte
w> de l'eecalier central : les orthostatee ne sont pas conservés en ce
point et Fune dee dalle» dé la praecinctio s'avance plus que ma voi
sines (voir photo 5, pi. III et plan, flg. 2). Du pavement, l'orchestre
u: .Τ-
n'a conservé que le rang extérieur de dalles ; il n'est pas impossible
que ce rang appartint à un de ces gradins d'orchestre courante,
gui recevaient, à Timgad et à Sabratha, par exemple, des sièges
honorifiques. Mais les dalles sont à peu près au niveau des paro-
dai : la dénivellation, s'il y en avait une, ne pouvait être que très
faible et l'hypothétique gradin était, à coup sûr, unique. Nous ne
le croyons pas indispensable8 à l'installation de sièges mobiles,
plus confortables3, qui reste vraisemblable, nous l'avons admis,
dans un théâtre construit, où la place était précieuse.
Le pavement devait, qu'il y -eût un gradin ou une légère pente,
rejoindre le niveau de l'assise supportant le mucus pulpiti (voir

p. 13, reprend à son compte le chiffre de Gsell. M. L. Leschi, op. L, p. 22,


propose très justement une capacité de 3.000 à 4.000 places.
1 Cf. Boeswillwald-Cagnat-Ballu, op. L, p. 98, et G. Guidi, /. /., p. 19.
«M. J. Formigó, ï. /., p. 28-30, semble penser, au contraire,
que l'orchestre comprenait toujours au moins un gradin. Mais la d
imension moyenne qu'il propose, voisine de 20 cm., serait déjà bien
trop forte pour Tipasa. De plus, le nombre des gradins d'orchestre
varie tellement là où on les a retrouvés (de un à cinq) qu'on peut
sans difficulté concevoir leur suppression complète. Avec une légère
pente, quelques rangs de spectateurs, contraints de toute façon à lever
les yeux assez haut, ne pouvaient se gêner entre eux. L'avantage, dans
un théfttre construit, était de gagner plusieurs dizaines de centimètres
en hauteur, ce qui représente des tonnes de blocage et de maçonnerie
économisées. Au surplus, rargument essentiel de M. Formigé — nécessité
de laisser libre pour le spectacle une. partie de l'orchestre — a moins de
force à Tipasa, où il n'y a pas de communication directe, par escaliers,
avec le pulpitum." V
* M. J. Formigé, l. l., p. 28, les identifie avec les subseUaria de Vi-
truve, V, 6 — lecture de Choisy qu'il faut corriger, avec Krohn, en t«*-
sellia. A tort, selon nous ; dans gradus tpectaculorum, ubi subsettia com-
ponantur, le mot s'applique, les dimensions données ensuite le montrent,
à tous les gradins de théâtre, dont il précisé, par rapport à gradus, Vuti-
LE THEATRE ROMAIN DE TIP ASA 145
photo 7, pi. IV). L'écoulement des eaux était prévu, puisqu'on
retrouve, au pied de l'exèdre centrale du pulpitum, un petit canal
de 12 cm. de large, taillé dans l'assise qui la supporte ; peut-être
se continuait-il ou correspondait-il à une légère déclivité vers le
centre; Après, s'être élargi en un petit bassin grossièrement circu (* 'ì 'J
laire d'enyiron 42 cm. de diamètre, il traverse le mur; la longueur
totale est voisine de lm10. Les eaux de l'orchestre s'écoulaient
donc vers Vhyposcaenium, où devait les recueillir une conduite,
peut-être en rapport avec l'égout passant sous le mur de scène.

Les « parodoi »»

EUes constituent deux longs couloirs en pente, dont les extré


mités sont à 80 cm. au-dessus du niveau de l'orchestre. Leur lon
gueur est de 28m50, de l'orchestre aux entrées, comprises entre les
grandes salles 9 et 1 et les massifs A et A' ; la largeur diminue de
l'extérieur à l'intérieur : 4Bt20 à l'entrée1, lm70 au débouché dans
l'orchestre. Le pavement est conservé à l'ouest sur un tronçon de
près de 10 m. de long, cependant qu'il est à peu près complet à

lisation comme « banquettes ». C'est, d'ailleurs, le sens courant du mot


quand il s'agit de théâtre (cf. Plaute, Poenulus, V, 5 :
Bonoque ut animo sedeant in subselliis.
Et qui esurientes et qui saturi venerint. /I
aussi*
Cf. Suétone, Auguste, 43, où le mot, employé au singulier pour
tout un groupe de spectateurs, signifie forcément « gradin» : Parthorum
obsides... super... se subseUio secundo coUocavit). On trouve aussi, dans
une inscription de Civitavecchia (C. I. L., I, 1341), subseliarium, mais
la mot désigne, par opposition à scaeniarium, un ensemble de gradins.
Il est vrai que le vocabulaire de De architectures est embarrassant;
dans le même chapitre, quand il désigne clairement les sièges mobiles
de l'orchestre : in orchestra autem senatorupi sunt sedibus loca designata
(V, 6, 2), Vitruve emploie le même mot vague sedes que lorsqu'il parle
non moins évidemment des places de la cavea : in cornibus utrumque adi-
tus efus mensurae perpendiculum interiores sedes praecidantur (V; 6, 5).
Mais cette imprécision n'est pas chez lui un cas isolé.
1 Largeur mesurée aussitôt après les gros pilastres d'angles, qui la
réduisent ^δ^δ.
Mélange* d'Arch, et d'UUt. Vèhì. 10
M"? ! *. '

l'est ; il est fait de dalles rectangulaires, de faible surface,


mais taillées iet ajuetéée avoc soin. ' , :
Les murs comportent des pilastre« construite, comme eux, en
gros appareil, disposés è intervallee réguliers et m répondant d*taj
côté à l'autre; ces groupes de deux pilastres sont au nombre de
six pour chaque paroâos — en comprenant les fins de murs de
l'entrée, qui ne sont pas de véritables pilastres {voir plan, fig. 2
et photo 8, pi. V). Entre les deux prèmi«»» groupes en partant dô
l'extérieur, l'intervalle est plus grand «t atteint S^O1 ; entre 1m
deux derniers, il est d'environ 3m5Q8 ; ailleurs, il ne dépasse pas
2m60. La saillie des deux premiers groupes est plus forte : 56 cm. \
le dernier comporte une base moulurée qui déborde elle aussi de
l'alignement, puisqu'elle s'avance de 45 cm., au Heu de 30 cm.
pour le haut du pilastre, qui est dans le pian des trois autres. On
a voulu à la fois maintenir rectiligne l'enfilade des pilastres et
décorer les derniers, qui apparaissaient', pour qui venait de l'o
rchestre, comme les montants d'une espèce de porte monumentale.
A la différence d'avancée correspond une différence de largeur :
lm33 en moyenne pour les deux premiers groupes, 73 cm. ailleurs ;
les bases moulurées atteignent 1^05 à l'est, lm0i à l'ouest. La
hauteur conservée est faible en général, surtout du côté de la scène,
mais la parodos est permet de se faire une idée de l'effet assez heu
reux que pouvait produire l'ensemble (voir photo 8, pi. V).
P.-
11 y manque, toutefois, un élément : le surplomb de la voûte,
.

qui, à l'entrée, devait être imposante (et dont nous n'avons plus
que de faibles amorces). Pas plus que nous n'avons vu de nécessité

1 C'est naturel, puisque cet intervalle correspond aux entrées des


grandes salles et aux passages vers les escaliers dé l'arriére.
* Ce qui ne surprend pas non plus : l'avant-dernier correspond au <
mur de fond des chambres, limite entre là caew inférieure et la caveç
supérieure, le dernier au début de la voûte dit côté de l'orchestre. Ces
pUastres ont une fonction impérieuse, qui He laisse pas, comme pour lei
autres, leur place indifférente, mais exige qu'ils apportent, en un point
délicat, le renfort d'un arc de gros appareil.

u'.
m
*>', V -ί· .-■

LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 147

à couvrir les passages menant aux escaliers arrière, nous ne suppo


sonsde prolongement de la voûte au-dessus du « carrefour » des
entrées : un tel débordement de la cavea, tout à fait insolite, ne
fournirait, d'ailleurs, que de mauvaises places. De même, la voûte
s'arrêtait certainement au pilastre mouluré, ce qui lui donne une
longueur de 16 m. '
C'est à l'ouest que l'amorce en est le mieux conservée, sur une
petite surface, du côté de la cavea, à une hauteur relativement
faible (photo 9, pi. V). La facture est analogue à celle des voûtes
couvrant les chambres qui soutiennent la cavea, mais l'épaisseur
du blocage devait être nettement plus forte. Ni la hauteur ni la
pente ne sont les mêmes que pour l'ensemble de la cavea : com
mençant bien plus près de l'orchestre et devant pourtant livrer
passage aux spectateurs, la voûte est obligatoirement plus haute,
comparativement, que celles des chambres : la preuve en est qu'elle
dépasse nettement le niyeau des gradins situés à la même distance
qu'elle de l'orchestre.
Si, en effet, les entrées avaient respecté-la pente générale de la
cavea (39 %), la voûté, à l'arrivée dans l'orchestre, aurait été â
environ 2m30 au-dessus de lui, laissant moins de 2m20 de hauteur
effective — puisque la parodos est en déclivité. Mais il faut tenir
compte des arcs en pierre de taille qui soutiennent la voûte sans
s'y incorporer *, La photo 8 {parodos est) montre clairement qu'il
y a lieu de retrancher du niveau de la voûte les quelque 50 cm.
d'épaisseur de l'arc, ce qui met le « plafond » à environ 1*70 : trop
bas pour un spectateur un peu grand I Outre l'aspect mesquin d'un
débouché près de quatre fois moins haut quell'entrée2 et sa di
sproportion avec l'ensemble de la. cavea et de la scène, cette solution

1 On ne pouvait guère se passer de ce soutien, étant donné la largeur


de la voûte et le poids qu'elle supportait, ni de cet ornement au débou
ché sur Forchestre. ^ > -
'

8 Qui devait avoir la même hauteur que les chambres déjà étudiées
.

(soit 7œ40), si, dû moins, elle n'était pa» piafonnée plus bas pour laisser

' "Ü
148 it, frìzouls ,
ne permettrait même pas le pass&ge. Une voûte plus haute, partant
une pente moine accentuée— si l'on ne voulait pas p«Mre J^eed-
coup de place — s'imposaient donc. Les gradins perdus de ce
&
'

par suite de la dénivellation avec la<wea, étaient remplacés,


d'habitude, dans la partie inférieure, par des tribunes horizont
* "■■« f ,·
ales ; la pente plus faible diminuait, d'ailleurs, un peu la masse
de blocage exigée pour construire une surface plane au-dessus de
la voûte ascendante.
Ces plates-formes ne sont pas conservées à Tipasa, mais on ne
saurait mettre en doute leur existence : le niveau effectif de la
voûte se laisse deviner sur la photo 9 (pi. V) ; un tracé graphique
■IV- donne 3m50 au-deseu» de l'orchestre1, alors que l'arête du gradin
correspondant n'atteindrait pas 3m40 : cela représente en fait une
différence d'au moins 70 cm.8, soit l'épaisseur de deux gradins.
Le même léger écart se retrouve pour la pente : 35 % au lieu de
39 % : c'est suffisant pour donner à la voûte plus de 3 m. au-dessus
de l'orchestre et près de 2m50 libres sous l'arc de gros appareil8.

la place d'une pièce derrière les tribunalia, comme c'était probablement


le cas à Dougga. Cf. Carton, L L·, p. 117.
1 Le morceau conservé ne commence qu'à 1^30 du départ de la voûte ;
la hauteur en ce point est donc sensiblement moindre. Mais l'écart avec
la cavea reste le même.
* II faut, en effet, ajouter à cette faible différence, pour comparer des
niveaux correspondants, l'épaisseur du gradin et céjle du blocage qui
le supporte — ou celle de la voûte.
8 La différence avec l'entrée imaginée plus haut, selon la pente des
chambres, est encore de l'ordre de 70 cm., ce qui se comprend aisément,
puisque cette pente est aussi celle de la cavea antérieure.
La hauteur libre n'a rien d'insolite et correspond à ce que Ton trouve
ailleurs. Ce qui est inhabituel, c'est la profondeur de l'entaille faite à la
cavea pour ménager l'entrée voûtée. Alors que Vitruve, V, 6, 5, propose
pour cette entaille le sixième du diamètre de l'orchestre, elle atteint à
Tipasa près du tiers : môme en incluant dans l'orchestre balteus et prae-
cinctio, les dimensions respectives sont de 6 mètres pour la parodos non
voûtée et de 19m50 pour le diamètre de l'orchestre.
Cette différence du simple au double s'explique par la pente modérée
de la cavea de Tipasa, mais surtout psjv l'exiguïté — même eu égard
LE THÉATftE ROMAIN DE TIP ASA 149
Cette inclinaison est tout de même assez marquée pour interdire
de songer à des tribunes trop importantes, qui auraient surchargé ' J '."Vf
de blocage les voûtes. Mais s'arrêtaient-elles au milieu de la cavea,
au niveau du mur formant le fond des chambres, ou allaient-elles

aux dimensions d'ensemble — de l'orchestre. La hauteur de la voûte


est une de ces données qui ne varient pas sensiblement selon l'échelle
du monument, mais sont régies par une nécessité fonctionnelle cons
tante. Vitruve lui-même prévoit pour elles des exceptions à ses prescrip
tions (V> β, 7) ; sans qu'il l'explicite, il est très probable que la propor
tion du sixième pour Γ « entaille » ne vaut que pour un grand théâtre,
doté d'un vaste orchestre, et qu'il faut l'assouplir ailleurs.. Les dimensions
de l'orchestre étaient trop variables à l'époque même de Vitruve pour
qu'il n'ait pas aperçu l'absurdité d'une application stricte de sa règle.
C'est dire qu'il est abusif de rendre, avec MUe M. Bieber, la proportion
vitruvienne responsable de la « faible hauteur » des voûtes de parodoi :
... the seats of the lowest tier must be cut away to a depth of one-third of
the radius. This results in a rather low passage i probably because the tr'i-
bunalia, or boxes for the magistrats and officials, are situated on top of the
entrances (op. I., p. 353). En fait, le passage a pourtant une hauteur
suffisante pour remplir son rôle fonctionnel ; s'il semble bas à l'échelle
des grands théâtres, il ne dépare pas l'harmonie d'ensemble et permet %
de gagner des places. Quant à la raison invoquée par MUe M. Bieber, M
nous ne la croyons pas valable : on ne voit pas comment le souci de
ménager des tribunes plutôt que des gradins aurait amené à abaisser
la voûte. Vitruve a, ici comme ailleurs, l'intention exclusive d'ordonner
suivant des proportions simples et harmonieuses les divers éléments du
théâtre. Il ne mentionne, du reste, pas les tribunalia dans le passage en
question : ils n'apparaissent chez lui qu'incidemment, dans rénumérat
ion, signalée plus haut, de certains éléments pouvant, par la force des
choses, échapper aux exigences de la symmetria (V, 6, 7).
Les tribunalia sont d'ailleurs parfois très hauts et ne paraissent nul
lement impliquer l'abaissement de la voûte des parodoi. Il faut, en réal
ité, renverser la perspective : c'est parce que la voûte est surélevée — ·
pour les nécessités du passage — - par rapport à la cavea et en rompt la
continuité qu'il devient nécessaire, si l'on veut récupérer la place per
due, d'établir des sièges sur une surface horizontale, jusqu'à ce que la
dénivellation devienne assez faible, pour que les gradins puissent re
prendre. En d'autres termes, quel que soit le parti monumental que les
Romains aient su en tirer, les tribunalia ne nous paraissent, dans le pas
sage des parodoi grecques ouvertes aux itinera couverts, qu'un effet
second de la grande idée architecturale et d'abord qu'un habile moyen
de lui donner une rentabilité maximum,

.'„ V
150 TBÉZOUL8
jusqu'à la praecinctioy qui pouvait leur fournir un» entrée
Rien ne pennet de se prononcer1.
ν.·
La scênb et sbs däpbrdances
Si l'orchestre et, ^es parodoij inalgré bien des destructions, ne
laissent pas subsister d'incertitudes, majeuree, tout ce qui est plu*
au nord est trop rasé pour nous livrer autre chose qu'un plan» par-
foie confus. Comme la fouille n'a mie au jour, en dehors des él
éments en place et d'objets de terre cuite grossière, qu'un petit
autel non sculpté et quelques fragments de colonnes sans grande
signification, les problèmes d'élévation nous demeurent à peu près
insolubles.. Cette situation n'est pas rare en Afrique — on la
retrouve, par exemple, à Timgâd, & Gherehel, E31e «et due ici tout
particulièrement à la déclivité sud-nord du terrain : la scène, le
mur de scène et les dépendances, constamment restés au-dessus
du niveau des terres, n'ont pas été protégés de la destruction ni, du
pillage, particulièrement tentant dans les parties, traditionnell
ement les plus ornées d'un théâtre (voir photo 12, pi. VII).

A. Le plan d'ensemble.
*,?■*'', Il est impossible d'étudier séparément les différentes parties sans
définir préalablement leur dépendance mutuelle. Malgré le mau-

1 La photo 10, pi. VI, montre, sur le mur sud de la parados ouest,
de gros trous carrés formant une ligne parallèle à la direction de la voûte ;
ils existent aussi 4 Test, oà ils se font face, -sur les deux nuir&, selon la
même pente ; de chaque cète, leur ligne monte de lœ3O*>iô à 2œ80. Ils
ne portent aucune trace particulière et nous avouons hésiter sur leur
interprétation. ÏIÉ ne peuvent avoir servi à la construction de la voûte,
puisque le mur ne porte pas trace d'un revêtement qui pût les cacher.
Ils n'ont pu recevoir -*- à ce niveau — des poutres dont on ne voit, an
reste, p$us l'intérêt, ni <— avec cette ponte — une rampe. Reste la pónti- ·
bilité d'une utilisation décorative : ils ais«ient servi à fixer une série
d'ornements métalliques ou des plaques de marbre ; mais leur taille
rend la chose très difficile et ils ne portent aucune trace de sceUeiaent,
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ι' * ·
152 Β. FRÌBOULS
vaie état de la partie ouest, la symétrie générale par rapport è
l'aie gué-nord du théâtre, qui est évidente (voir plan, fig. 5),
'
lite cette mise en place. , . \ *\
On distingue assez bien, aux extrémités, deux grandes ealtee ΐ
rectangulaires (9 et 1) communiquant à la lois avec l'extérieur et
avec la parodos ; puis, vers le centre, deux autres surfaces rectan
gulaires (17 et 18) plus petites, limitées par quatre avancées, dont
les deux septentrionales ne forment A l'intérieur de ces salles qu'une
très faible saillie1. Au centre, un -grand rectangle excavé, flanqué
de deux surfaces inégales, qui rompent la symétrie ; au sud de la
fosse, un mur à exèdres donnant sur l'orchestre et axé sur son
centre ; au nord, un rectangle oblong nettement en retrait avec
des dépendances, dont une salle rectangulaire (15) et une autre à
peu près carrée, de plan confus (14) *. Nouvel élément asymétrique,
mais qui ne fait pas difficulté : la citerne (16) de l'est, qui a profité
d'un redan formé par la grande salle et l'ensemble en retrait.
Tout cela est assez simple et l'on reconnaît aisément dans les
éléments énumérés : les vastes foyers du théâtre, les parascaenia
rectangulaires, Yhyposcaenium, le mur du pulpitumet le soubasse
ment allongé du mur de scène 'avec ses dépendances —-pourvu
qu'on résolve une difficulté : que signifient les espaces inégaux
flanquant, à l'est et à l'ouest, la fosse de la scène? Car, d'une
part, on ne peut concevoir — par définition — de parascaenia que
contigue à la scène. D'autre part, s'il faut localiser la frons scaenae
entre, les murs 10 et 11, elle se trouve désaxée ; comme elle a forcé
ment sa valva regia en 12 (face au centre de l'orchestre), où placer
les kospitaks? >

1 A l'ouest, ce plan est moins net : la saillie dtj sud-est et la paroi


nord manquent et on trouve, en revanche, un élément en équerre orienté

suivant un autre plan. Mais il doit s'agir d'une réfection et la symétrie


n'est tout de même pas douteuse.
* Ici encore, c'est à l'est seulement que ces données sont complète
ment conservées, mais, à l'ouest, on a trois mura de chacune de ces deux
salles et les dimensions sont les mêmes qu'à l'est.


LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPAS A 153

Cette double difficulté vient, un coup d'oeil sur le plan le montre,


de ce que Ykyposcaenium est lui-même désaxé : ses murs est et
ouest ne sont pas en face des extrémités dû murus pulpiti· La lar
geur est la même, maie, tandis qu'à l'est la fosse mord légèrement
sur la première niche, laissant au delà d'elle le premier tronçon,
rectiligne, de la façade (lm5ô), elle dépasse à l'ouest le débouché
de la parodos et finit à plus de 3 m. de la dernière niche, à plus
de lm50 de la fin de la façade. La seule solution possible est de ne
pas tenir compte, pour le plan de la scène, de oelui du sous-sol et
d'admettre que le plancher continuait jusqu'aux espaces 17 et 18. A
Λ ce prix seulement peuvent être assurés l'équilibre de la frons
scaenae et l'existence des parascaenia : l'hésitation est impossible.
La confirmation de l'hypothèse est, d'ailleurs, comme inscrite dans
l'appareil des murs de· la fosse : ceux du nord et du sud ont plus
d'un mètre de large et sont en gros appareil très soigné, alors qu'ils
ne supportent l'un que le mur peu élevé du pulpitum, l'autre que
les avant-corps à peine plus hauts du mur de scène. Ceux de l'est
et de l'ouest, au contraire, sont minces et- construits en petits moell ./fi
ons. Gomment leur faire supporter les murs limitant la scène,
hauts d'au moins 3 m.? Ils étaient tout Juste bons à servir de
limites à la fosse et de soutien au plancher. De même, l'augmentat
ion d'épaisseur du mur de la parodos à partir des parascaenia
(entre 13 et 13 a sur le plan, fig. 5) est significative : de 1 m. à peine,
on passe à lm30. Elle n'est pas due à la nécessité de supporter la
voûte des parodoi, qui existe déjà avant l'augmentation; elle ne ■'■s
s'explique que par le passage du mur bas qui longe la scène, s'élève
avec la voûte, mais ne supporte pas de toit, aux hautes construc
tions couvertes des parascaenia. Pourquoi maintenant ce désaxage
et cette différence de surface entre hyposcaenium et pulpitum?
Nous montrerons x φι'Π était nécessaire de pousser Yhyposcaeniutn
plus à l'ouest que le mur du pulpitum. Mais cette nécessité n'exis-

x Voir ci-dessous, p. 164 sq.


ite S. »ft&SÒUtS
tait pas à Pest, ni pour lee dernière mètres de l'ouest,
dèe lore, ββ donner la peine d'excaver toute 1ή surface du
La fosse était bien assez spacieuse et il suffisait, on le
m. qu'elle doublât simplement la partie pourvue do niches du
pulpiti. Be plu», il y avait une raison majeure de ne pas excaye*
l'espace voisin du para&cattnwm est : c'est qu'il est traversé par
un égout dont la voûte n'est pas. à plus de 2 m. de profondeur*.
Le plan général, une fois cette apparente anomalie dissipée, der
vient compréhensible ; il reste original et la comparaison avec
d'autres exemples fait sentir son intérêt (noue avons choisi comme
types Orange, fig. 6, et Bosra, fig. 7) ; eet intérêt réside essentiell
ement dans la coexistence des vastes foyers et âe l'avancée du pûst-
scaenium. Le type le plus courant en Occident (fig. 6)3 forme un
tout compact où les foyers occupent toute la profondeur de la
scène et du postscaenium; le type le plus rare, qu'on rencontre sur
tout en (Ment4 (fig< 7), comporte un rentrant accusé, dû à l'inexis
tencedes foyers. A Tipasa, les foyers existent, mais se contentent
fey *·
de la profondeur de la scène et ne doublent -pas le postscaenium0.

1 Voir ci-dessous, pf 158*


8 Voir ci-dessous, p. 170.
8 Que Ton rencontre encore à Herculanum, Ostie, Arles, Mérida, 'Vi·
Guelma, Sabratha, sans doute à Djemila et, sous une forme un peu dif
férente, à Timgad.
* Notamment au théâtre romain d'Éphèse, à Aizanoi, Bosra et, avec
quelques différences, à Aspendoe. Dougga, qui se rapproche, à première
vue, du type oriental, représente eu fait un cas original — mais en sens
inverse de- Tipasa ; les grandes salles y sont remplacées par de vastes
passages, qui vont même plus loin en profondeur que l'arrière du pogtseae-r
num. Pour tous ces théâtres, cf. plans dans St. Gseïl, Mon. ant.,Jf
p. 186 sqq., et dans E. R. Piechter, Die èaugeschichtliche Entwicklung
deê antiken Theaters, 1914, Abb 66 sqq., et M.,Bieber, Die Denkmäler
zum Theateiweeen im Altertum, 1920, et op. f., p* 356 sqq.
5 II est impossible de supposer, pour compléter le rectangle, des cons
tructions disparues- — qui n'auraient aucun aèns : la façade du foyer,
avec ses pilastres et ses demi-colonnes (photo 13, pi. VII), et l'appareil
— visiblement un appareil d'angle — du coin nord-est (photo 12,
pi. VII) l'excluent absolument. De même, quelle que soit la date de sa
-*<V3

LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP AS A 155


Faut-il voir là l'effet de conditions locales qui nous échappent?
Ou penser à l'influence d'un style étranger à l'Afrique? Dans lès
deux cas, cette originalité témoigne d'une certaine liberté de con
ception ©t itteus met — avec d'autres particularités— en présence
d'une arjehitecture aseéi évoluée.

, r ^. Im façade du ^ pulpüum τ».


:

Le pillage mentionné plus haut y est particulièrement sensible*


puisque le mur, autrement assez bien conservé, ne comporte plus
qu'un appareil de brique, posé sur l'assise supérieure du mur de la
foese (voir photo 7, pi. IV). Tel ne pouvait être l'aspect d'un él
ément aussi monumental, dans un théâtre où toutes les parties vi
sibles sont en pierre de taille ; il faut lui supposer un revêtement
de marbre, comme à Sabratha et dans bien d'autres théâtres, sans
s'étonner qu'il n'en reste rien. L'épaisseur, toujours faible1, des
crustaene devait pas altérer sensiblement les mesures de la façade.
L' «armature » de briques, conservée sur toute la longueur, ne
dépasse jamais 80 cm. de hauteur; le mur avait certainement au
moins 25 cm. de plue*. Le plan est caractérisé par l'alternance
rigoureuse d'exèdres rectangulaires et demi-circulaires; il y en a
en tout quinze, dont aucune, sauf celle du milieu, ne présente de
différence par rapport à son type. Les niches rectangulaires ont
en moyenne lm25 de large sur 61 cm. de profondeur, les niches semi-
circulaires lm28 de diamètre; la niche centrale atteint i^O de
diamètre.
Cette alternance est tout à fait courante, mais le grand nombre
■'■' " /' r

'

'
:

construction, l'existence de la citerne, dont le mur extérieur n'est d'ail


leurs pas dans l'alignement du postscaenium, mais plus au nord, renforce
cette exclusion. ,
1 Cf. ci-dessus, p. 125, n. 2.
a Vitrave, V, 6, 2, ne fixe pas de limite inférieure, mais recommande
de ne pas dépasser 5 pieds. En fait, la hauteur est souvent inférieure,
notamment en Afrique. Mais M. G. Caputo reste un peu au-dessous de
la réalité quand il parle d'un tipo costante, alto appena un metro ο poco

Ί U&'ii
156 S. PRÉZOULS
dee exedres est insolite : s'il va jusqu'à treize (plue deux escalxerj)
dans l'immense théâtre de Vienne1, il n'y en a que neuf à Meriwia»,
, Ostié, Khamisea8, sept à Herculanum, Sabratha, Timgad, cinq
à Dougga et à Djemila. C'est φι» bien eonvent elles sont plot
, grandee et n'oocupent pas toute la largeur du mur, lui-même géné
ralement plus étroit que la scène»4. Λ Tipasa, au contraire, & part
deux lignes droites de lm50 à chaque extrémité, tout le front du
pulpUum est morcelé en niches ; de plue, lait exceptionnel, il occupe
une largeur égale à celle de Ykyposcaenium, Une pareille étendue
aussi fragmentée n'a son équivalent que dans le stylé exubérant
des théâtres romains d'Orient5. L'absence d'escaliers faisant con)"
'"/ ν ί
muniquer l'orchestre et l'estrade, assez rare en Occident", accroît
encore la ressemblance et impose à la vue l'impression de répéti
tionornementale. 11 serait évidemment téméraire d'en déduire
quoi que ce soit concernant la richesse de la frons scaetiae disparue.
Au moins le style du murus pulpiti — en même temps qu'il est
un indice de construction assez tardive — révèle-t-il un parti pris
décoratif intéressant : il exclut, en effet, à peu près sûrement la
solution du Ijas-relief qui a prévalu, notamment, à Sabratha et
pour laquelle les exèdres de Tipasa offriraient une surface trop
,

exiguë. Mais il compense cette absence, à moindres frais, par une


richesse purement architecturale.

piu. On a bien lm03 à Dougga, mais lm19 à Khamissa, lm27 à Timgad,


la34 à Djemüa, l^à Sâbrathau
1 Ct. 3. Fotmigè, Le théâtre romain de Vienne, Ì85Q.
* Mais flanquées à Chaque extrémité d'un escalier.
8 Où les deux exèdree extrêmes sont occupées par des escaliers.
* Cf. plans et photographies dans les ouvrages citée ci-dessus, ■■.".'
p. 154,
.•;ìh-iÌ^;·'..':; ■;";.;■ ;-*-'1 ■■■'-. '.■■·;;:■-·.■·■.
'

• Celai de iPalfflyre, par exemple, a dix-neuf niches pour une largeur


sensiblement égale à celle du pulpitum de Tipasa, Cf. Th. Wiegand, Pal
myra, Ergebnisse der Expeditionen von 1902 und 2917, 1932, p. 41 sqq.,
■■ Taf. 23. rvi^vv'^. :■:■■' ■ '- .;■'."■
r

.

• Et exceptionnelle en Afrique, où les escaliers sont tantôt parall


èles, tantôt et plus souvent perpendiculaires au front de l'orchestre,
mais existent toujours,
LE THEATRE ROMAIN DE TIP ASA 157

C. Ζ' « hyposcaenium ».

Son niveau même a sauvegardé la fosse de scène, que la fouille


a progressivement révélée comme un des éléments les plus orig
inaux dé Tipasa. Sa profondeur étonne, comme la bonne conserva
tion de ses murs et des piliers qui soutenaient le vaste plancher1
du pulpitum (voir photo 3, pi., II). Nous avons décrit et expliqué %
les différences d'appareil entre les murs est-ouest et les murs nord-
sud8. Précisons, toutefois, qu'à l'ouest on retrouve à 2m50 de pro
fondeur tout un soubassement de gros moellons (voir photo 10,
pi. VI) ;. au moins près de l'angle, deux fortes assises doublaient
même ce mur — présentant l'une 52 cm., l'inférieure 82 cm. de
saillie. Aucune raison immédiate n'apparaît dé leur existence, que
nous essaierons plus loin d'expliquer8.
On n'a pas trouvé le fond de la fosse, mais seulement quelques
indications concernant son niveau : en plusieurs pointe, on rencontre
le roc entre 3 et 4 m. de profondeur*. Comme on ne le trouve pas
partout, il faut exclure l'idée qu'on ait pu y tailler le fond de Y hy
poscaenium5. Étant donné le caractère purement utilitaire du local
et l'absence de tout vestige, il faut penser à une installation som
maire — un simple béton, par exemple, qui se serait décomposé

1 Car le pulpitum n'a pu être voûté et dallé comme à Dougga et sans


doute à Sbeïtla.
1 Voir ci-dessus, p. 153.
8 Voir ci-dessous, p. 166.
4 Les profondeurs mentionnées le sont par rapport au niveau maxi
mum actuellement conservé du murus pulpiti, qui est aussi, à peu de
chose près, celui des assises les plus hautes sur tout le périmètre de la
fosse. Par rapport à l'orchestre, il faut retrancher 80 cm. ; par rapport
au plancher, en ajouter au moins 25.
• On a pu le creuser à certains endroits, mais il présentait sans doute
de trop fortes dénivellations pour qu'on y constituât une sorte de pave
ment nature}. C'est dire la vigueur du relief : à 25 m. de là, dans la
grande salle de l'ouest, ce roc affleure au niveau actuel. Un peu plus loin,
il le dépasse. La situation est analogue à Farrière de la cavea, où elle
complique, on l'a vu, plusieurs questions.

. ή
/' '* ' ,
158 *.
après άςβ siècles passés sous terre, — plutôt qu'à un pavement.
Peut-être la saillie la plus basse, le long du mur ouest (voir phofà $0,
$-; pi. Vì), k 3*90 de profondeur, représente-t-elle le niveau cl
Bien entendu, les fondations partaient de plw bas : le mur
descend à plus de 4m50, les pilier» presque aussi profond — san»
doute parce qu'on tenait à s'appuyer sur la roche.
Ces piliers forment trois rangs est-ouest qui en ont conservé
chacun de sept à neuf ; ils sont également alignés trois par troie,
dans le sens nord-sud. Le rang sud est à 1*30 environ du murus
pulpiti, le rang nord à la même distance du mur de scène et à 1 m.
à peine du rang intermédiaire ; le plue grand écart est entre ce der
nier et le rang sud : plus de 2 m. Les piliers, dont la section dimi
nuelégèrement de bas en haut, ont en moyenne 50 cm. (nord-sud)
sur 80 (est-ouest). Ils se succèdent en moyenne tous les 2^30. L'en*
semble devait former un soutien très suffisant au plancher où se
.-«'.'
donnait la représentation.
Les dimensions de la fosse peuvent être considérées, on l'a vu,
ι-'r,.'·- comme moyennes pour l'Afrique ; la largeur est de 30m25 au nord
et de 30*60 au sud, la profondeur de I^Ob à l'est et de 7m5O à
l'ouest. Le petit accroissement reçu par les côtes sud et ouest β"
\, " ' r
donne à l'angle sud-ouest une valeur légèrement aiguë. Cette ano-
mafie est à rapprocher du fait plus important que nous avons
signalé1 : le décalage — à droite — de la, fosse par rapport à sa
façade et au plan d'ensemble du théâtre. Tous deux ne peuvent
s'expliquer qu'en fonction d'un élément que nous avons à dessein
différé de signaler : la présence, entre le mur sud et, le rang de
piliers le plus proche, d'un mur continu dottt le, sommet forme, è
2m60 de profondeur, un couloir horizontal Os mur, de petit appar
eil,occupe toute la largeur disponible, soit i»05j et a lui-même
plus de. 2 m. de haut. Le fossé qu'il 4étermine et le décalage, de

1 Voir ci-dessus, p. 153.


Λ '<*


LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP ASA 159

,
Yhyposcaenium vers l'ouest sont évidemment à mettre en rapport,
et l'on pense naturellement au dispositif permettant la manœuvre
des aufaea, équivalent de notre rideau d'avant-scène.
Il n'est pas facile de percevoir le détail de ce dispositif : tout le
matériel a disparu, et surtout les conditions, malgré une nette re
ssemblance d*enseinble, s'écartent assez, si l'on y regarde de près,
de celles qu'on rencontre d'ordinaire. Dans bien des théâtres (à
Pompéi, Timgad, Arles, par. exemple), on trouve des conduits de
pierre verticaux, de section carrée, où coulissaient des piquets de
bois soutenant le rideau. D'autre part, à Timgad, à Arles, la part
iedroite de la scène porte les traces d'encastrement des machines
permettant, par un jeu de câbles et de poulies, la commande des
piquets — et c'est bien à droite qu'est décalé Vkyposcaenium éé
Tipasa. Dans l'article déjà cité, M. J. Formigé, s'inspirant de Ma-
zois, mais le complétant magistralement1, a reconstitué dans tous
les détails le fonctionnement du système, tel du moins qu'il se
présente à Arles et aussi, sans doute, à Syracuse, Timgad, etc.;
Nous ne pouvons que renvoyer à son exposé, dont nous admettons
le schéma général — en signalant et en essayant de résoudre les
difficultés propres à Tipasa. '
.

1 Cf. J. Formigé, l. L, p. 58 sqq. Reprenant le principe des âmes de


bois s'emboîtant les unes dans les autres et coulissant dans les conduits
— formulé par Mazois — - M. Formigé précise la nature du moteur : il
s'agit d'un tambour toujours situé à droite en regardant l'orchestre et
sur lequel s'enroulent les câbles qui tirent les âmes. Le tambour tourne
sous l'effet d'un contrepoids tombant dans une « cheminée » aménagée
dans le mur de la parodos; à son tour, un treuil remonte à loisir le con
trepoids pendant que les acteurs sont, en scène. E. R. Fiechter, op. l.,
p. 120 sqq. ; G. E. Rizzo, II Teatro greco di Siracùsq,, 1923, p. 149 sqq. ;
M. Bieber, op. L, p. 359, évitent de prendre nettement position. Dans
ses articles sur le théâtre de Fourrières, M. P. Wuilïeumier apporte des
éléments intéressants sur la disposition des conduits, niais ne s'engage
pas sur la question du moteur. Voir notamment : Théâtre» romains de
Lycki, in Études â?archéologie romaine y Gand, 1937, p. 148 sqq., et Ze*
fouilles de Lyon, in R. É. Α.,.'1941, p. 56 sqq. — Bibliographie sommaire
chez M. Bieber, p. 354, n. 30 à 38.
160 FRÉZOULS
1° Tout d'abord, le fossé du rideau n'a conservé, dans
qui noue intéresse, ni led habituels conduits de pierre ni la
ι- ', *Y · surface horizontale qu'ils traversaient au niveau de l'orchestre et
<

qui recevait le« aidaea une fois abaissés. Même si Ton n'exchit^as
un pillage à cette profondeur, ces éléments devraient au moins
avoir laissé quelque» vestiges pour qu'on pût les restituer. Or, le
mur sud et le» piliers, très bien conservée, ne portent aucune trace
d'arrachement ni d'encastrement pouvant convenir à un véritable
« piafon/1 » permanent de la fosse. ' !

'
Par ailleurs, celle-ci ne peut être autre obése que le réceptacle
du rideau ; de plus, l'analogie d'ensemble avec d'autres théâtre»
est trop grande, la profondeur convient trop bien ponr qu'on songe
& autre chose qu'au système de M. Formigé. On «si seulement con
traint de lui donner une forme plus Bommaire en supposant la
pierre ou la brique remplacées par le bois dont la disparition n'au
rait alors rien que de naturel. La construction en bois n'est, à notre
connaissance, attestée nulle part ailleurs1, mais satisfait aux con
ditions mécaniques requises; de forts conduits de bois encastrés
à leur base dans le fond de la fosse *, traversant en haut un plancher
qui les maintiendrait solidement, présenteraient une stabilité très
suffisante pour remplacer leurs équivalents en pierre d'Arles ou
de Timgad. Bien graissés, ils auraient — outre celui d'être plus
économiques et facilement remplaçables — l'avantage de gui
der avec moins de frottements la course des âmes auxquelles
était accroché le rideau. De même, le poids de celui-ci n'était

1 Ce qu| n'est pas un argument décisif contre notre thèse : Vhyposcae-


nium n'est bien conservé que dans une petite minorité de cas et les ins
tallations en bois, à supposer qu'elles aient existé, peuvent avoir tou
jours disparu complètement. D'autre part, on connaît des théâtres qui
n'avaient sûrement pas d'aulaea. .. -
,

■ Les trous d'encastrement dans tin btoea&e ou un béton ont pu dis


paraître beaucoup plus facilement que tout l'appareil de pierre que nous
cherchons en vain.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP AS A 161
pas tel qu'un plancher de bois ne pût le supporter aisément1.
Nous ne hasarderions pourtant pas notre hypothèse sans l'ap
pui d'un fait curieux, difficile à interpréter en dehors d'elle : l'exis ■M
tence, dans le mur sud, en face de chaque pilier, quelques centi
mètres au-dessous des briques, de- deux ou trois trous carrés de
section assez faible, auxquels répondent, dans lés piliers eux-mêmes,
des vestiges symétriques (on les voit nettement sur la photo 5,
pi. III). Le niveau et la nature des évidements conviennent par
faitement aux poutres qui devaient supporter le plancher. Pour
quoi des trous multiples et d'aussi petite section? Sans doute pour
ne pas évider une trop grande surface immédiatement au-dessous
du murus pulpiti. Des entailles multiples fixaient aussi solidement
qu'une seule entaille plus importante — et très suffisamment pour ■'"10
une portée en somme assez faible — des poutres qui avaient sur
tout besoin d'être larges, pour bien assurer le passage d'une planche
à l'autre. Lee conduits verticaux devaient se placer soit au milieu
des intervalles, soit plutôt— pour des raisons de nombre et de
stabilité — de part et d'autre de chaque pilier et à faible distance
de lui*.
2° En second lieu, l'extrémité ouest de Vhyposcaenium, si elle
constitue une dissymétrie insolite, ne présente aucune trace des
machines décrites par M. Formigé. Autre difficulté : la faible lar
geur disponible entre la fin du rideau8 et le mur ouest (3m50 envi
ron, dont à peine 2m50 utilisables au delà du dernier pilier— voir
photo 10, pi. VI — contre .plus de 6 à Arles, plus de 3 à Timgad).·
Ici encore, il faut penser à un mécanisme un peu différent de celui
proposé par M. Formigé.

1 M. J. Fornligé, l. L, p. 66, revalue pour Arles à 6 kg. par mètre, ce


qui donnerait ici moins de 200 kg.
2 A Arles, l'équidistance des conduits est d'environ lm60 (cf. For
migé, l. L, pi. I). Elle serait à Tipasa de 2m30 dans le premier cas envi-,
sage et — solution préférable — de lm15-dans le second.
8 Qu'il est normal d'arrêter, pour- une raison de symétrie, en face de

Mélanges cTArch. et tTHitt.

.UÈ."
5 ->

162 E. FftÉZOULS
La localisation dans l'excavation même du tambour qui enroul
ait
les câbles des piquets interdit' de supposer son axe enoastré
de part et d'autre dans la pierre, puisqu'il n'y a rien en face φι
mu? «uà*. Ce qui explique qné nous ne trouvions pas trace dTnm
tel encastrement. Force nous est d'imaginer un dispositif indépen?
dant, en l'occurence un axe soutenu par un chevalet qui ne pou
vait être qu'en bois et devait reposer à la fois sur le mur en petit
appareil (a sur la photo 10) et sur le sot de Vhyposcaenium*
?7· '
Quant à l'exiguïté de l'espace réservé aux machines, elle impose
l'abandon du contrepoids « en hauteur » dont M. Formigé a retrouvé
les traces à Arles et à Timgad, mais dont aucun chemin vertical
n'indique, à Tipasa, la présence dans le mur de la parados. La par- ,
tie de Yhyposcaenium située au delà du dernier pilier est, en effet,
trop étroite pour recevoir à la fois le tambour de commande, le
treuil permettant, sur un axe différent, de remonter le contrepoids
et, entre eux, le contrepoids lui-même. Faut-il en conclure que le
tambour était manoeuvré directement, sans contrepoids? M. For
migé fait justement remarquer la lenteur du mouvement dans
cette hypothèse et sa difficulté, alors que le rideau doit cacher rap
idement les acteurs au public. Mais cet abandon n'est pas néces
saire et l'espace devient suffisant pourvu qu'on suppose au treuil
de remontée un axe prolongeant celui du tambour, ou même indé
pendant, mais installé à faible distance, sur le même chevalet —
ce qui n'est pratiquement possible qu'avec un contrepoids « en
profondeur »»glissant le long du mur en petit appareil2.

la paroi extérieure de la dernière exèdre — car Yhyposcaenium atteint


à peine ce niveau à l'est. / ■■■■■■ '■"■:':"^ V:-^·--/
1 Alors qu'à Arles où à Timgad le tambour se place dans l'espace
faiblement excavé qui termine Vkyposcaenium et dispose d'un mur pa
rallèle au mud sud pour y appuyer l'autre extrémité de son axe (cf. For- ■·'
nàgèilt, pi .^). ■■ .·· - : :\:'?^&:i ·■;.,■ ·..{'.'■
'

'

1 Aucune trace de treuil à axe encastré dans la pierre, qu'il lût



orienté nord-sud ou est-ouest, ne permet de supposer, ici non plus, autre


chose qu'un ensemble indépendant, donc en bois.
Fig. 8. ~ Schéma du contrepoids en hauteur Fig. 9. — Schema du con
(D'après M. J. Formigé)
ν»-

t. FRÄZOULS
Pourquoi ce moindre encombrement avec un contrepoids « en
profondeur »? Parce que, ùtMteiA directement l'action de la pe**ii~
teur et non indirectement au moyen .d'une poulie (voir les schémas
fig. Set 9) S il tombe dans la pfirticale du tambour et non à côté de
lui3. Parce que, de même, le treuil, agissant aussi sans poulie, pm%
Sans inconvénient remonter le contrepoids, qui est libre, selon une
trajectoire légèrement différente de celle de la descente et, par con
séquent, se trouver très voisin du tambour, {j'espace nécessairi»
varie à peu près du simple au double, ce qui correspond justement
aux possibilités de Tipasa.
La solution convient particulièrement â une scène comportant,
de toute façon, une fosse profonde : il a pu sembler inutile de cons
truire une installation en hauteur compliquée lorsque l'on disposait
pour le contrepoids d'une « descente » naturelle de près de 4 m.,
suffisante si l'on choisit des diamètres d'enroulement convenables.
Elle offre l'avantage de fournir une explication de la surprenante
construction du coin sud-ouest de Yhyposcaeniûm, qui n'a pas son
pendant à l'est : des deux assises débordantes en pierre de taille,
l'inférieure (b sur la photo 10, pi. VI — en saillie de 82 Cm.) a pu
ν ν
1 Cf. Formigé, 1. 1., flg. 6 et 7. De plus, le même problème qui se pose
pour le logement de l'axe du tambour reparaît pour la poulie jusqu'à
laquelle remonterait le contrepoids « en hauteur » ; son axe trouverait
à s'encastrer, au sud, dans le mur de la parodos, mais non au nord.
* Si le système « en hauteur » exige plus de place, c'est non seu
lement parce qu'une raison de sécurité interdit de faire tomber le
contrepoids au-dessus du tambour, mais aussi parce que, le contre
poids ne descendant pas dans le plan d'enroulement de son câble,
mais à l'intérieur du mur, un changement de direction de la force est
nécessaire* qu'opéré la poulie à axe oblique (fig. 8), mais qui soulèverait
d'insurmontables difltcuités si le contrepoids tombait au-dessus du tam
bour.· ' - . ■
Les mêmes considérations sont valables aussi pour le treuil, qu'il
soit horizontal, comme à Arles, ou oblique, comme à Timgad, selon
M. Formigé, (en pointillé, fig. 8). On peut les résumer commodément
en disant que le système « en hauteur », contraint de prendre appui sur
la pierre, élément fixe, doit transformer l'action de la pesanteur, alors
que l'autre, parfaitement indépendant, l'utilise à son gré.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 165
former pour le chevalet un butoir inébranlable, la supérieure (c sur
la photo — avançant* de 52 cm.) soutenir le départ de la petite
plate-forme nécessaire à la manœuvre du treuil ; son niveau (envi
ronlm40 au-dessous de l'orchestre) mettrait la machine à exacte
portée de la main. Il serait bien difficile de comprendre, sans la
solution envisagée, la différence d'appareil et l'étrange coupe du
mur.
Une telle reconstitution, comme toutes celles de ce genre, de
meure hypothétique. Elle a la malchance de disposer de peu d'él
éments positifs et d'utiliser surtout l'absence de vestiges dans la
pierre comme argument en faveur de la construction en bois. Mais
cette absence est aussi, à sa manière, un témoignage positif. Si
vraiment la fosse est destinée au rideau et si le principe de la ma
nœuvre est celui que l'on connaît par ailleurs — ce qui ne saurait
être mis en doute — il faut bien rendre compte de l'installation.
Or, un fait concret (existence p!es trous — et d'eux seuls — dans
le mur sud et les piliers, à la hauteur de l'orchestre) exclût la
pierre ou la brique. D'autres (largeur disponible, manque de tout
point d'appui au nord, particularités du mur ouest) font rejeter
à la fois l'élévation courante et, de nouveau, l'intervention de la
pierre. Un ensemble de bois, avec contrepoids en profondeur, ré
pond donc seul à la fois aux exigences générales du procédé et à
celles, particulières, que nous impose la ruine1.
On vérifiera la nécessité d'employer parfois une méthode aussi
« négative » à propos d'un dernier problème : cejui des accès à
Y7iyposca$nium. Ni porte ni escaliers n'ont été trouvés et, sur tout
le périmètre, les murs sont conservés trop haut, sans trace de réfec
tion, pour qu'on puisse penser à un accès permanent. Il faut, ici

1 La date relativement tardive du monument (voir ci-dessous, p. 173)


permet de penser à une vulgarisation du procédé courant, sous une
forme plus facile à construire, à manier et à réparer, moins encombrante
aussi. Le contrepoids en profondeur est peut-être, de plus, lié, on l'a vu,
à des conditions topographiques propres à Tipasa,
166 S. FRÉZOULS

encore, supposer un ou des escalier» de bois donnant but des


trappes. L'extrémité ouest, peu visible de la cavea, à cause du dé
calage signalé, conviendrait particulièrement, d'autant plus qu'un
accès rapide aux machinée était nécessaire. Point n'est besoin de
préciser qu'il n'est rien resté de tela escaliers escamotables.

D. Le « postscaenium »et ses annexes.

De leur élévation, nous ne connaissons rien ; nous savons simple


ment«lue leurs murs étaient assez épais et assez bien construits
(toujours en grand appareil) pour supporter une bâtisse élevée.
On a vu qu'il faut prolonger le postscaenium jusqu'aux murs
extérieure des parascaenia, alors que la frons scaenae s'arrêtait à
leurs murs intérieurs* Cela donne pour le premier une longueur de
K'·
49 m. et de 39 m. pour la seconde. Les substructions, y compris les
deux murs de pierre qui les limitent au nord et au sud, ont 5m85
de large, soit nettement moins que le pulpitum. Ce rapport assez
faible interdit de penser à un relief vraiment accusé pour la frons
scaenae; le contraire est plus fréquent en Afrique et il y a peut-
être là un élément de rapprochement avec les théâtres. d'Orient1.
Les quelques vestiges subsistant en face de la fossé (voir photo 7,
pi. IV) : massifs de blocage, moellons marquant des départs de
murs transversaux, ne sont guère significatifs. Notons seulement
que deux de ces blocs encadrent exactement l'axe du théâtre.
L'ensemble 4é deux salles (14 et 15) conservé à l'est est plus
intéressant. La plus petite est assez confuse et comporte, avec de
fe·' beaux murs, des masses de blocage indiquant un niveau surélevé
— plutôt le niveau d'un soubassement avancé de la frons scaenae*

1 La largeur du postscaenium est légèrement inférieure à celle du


pulpitum à Djemila «t à Timgad, mais nettement supérieure, comme à
Orange et à Merida, à Khamissa, Dougga, Sâbratha. Elle est nettement
inférieure, comme à Tipasa, dans les théâtres de Bosra, Palmyre, Aspen-
dos, etc...
* £!n raison de l'épaisseur du mur sud, trop faible (53 cm.) pour per-
LE THÉÂTRE ROMAIN DB TIPASA 167

que celui d'une chambre située derrière elle1. Elle nous donne, en
tout cas, la limite extrême que pouvait atteindre l'esèdre de la
valva hospitalis orientale ; peut-être l'angle rentrant qu'elle pré*
sente au sud-ouest est-il l'amorce de cette esèdre ; on serait tente
de le croire, car il fait face .à un massif de blocage autour duquel
on a trouvé des traces de parement ; la distance (un peu plus de
3 m.) pourrait convenir. Si nous avions vraiment là les linéaments
d'une exèdre, l'intérêt serait surtout de constater qu'elle semble
quadrangulaire ; on aurait alors un hémicycle au centre, ce qui est
la règle en Occident, et notamment en Afrique8. Mais cette rest
itution n'est rien moins que certaine.
La seconde salle est moins équivoque : son plan allongé, ses d
imensions (5m50 sur un peu moins de 2m50), sa position extrême
et surtout le fait qu'elle comporte du côté nord une ouverture di
sproportionnée avec sa taille (lm47 de large) si elle n'était une salle
de passage, indiquent clairement sa destination : elle abritait l'e
scalier d'accès au premier étage du bâtiment qui a pour façade la 'â-
frons scaenae. Cette disposition est tout à fait conforme à l'habitude
générale (cf. plan du théâtre d'Orange, fig. 6). A l'ouest, elle a con
servé une couche de blocage de 50 cm. de haut.

Έ,. Les « par ascaenia» et les foyers. -


La comparaison avec Orange ou avec Arles montre, de même,
combien classique est le plan des parascaenia. On y retrouve la
saillie plus forte des murs du côté de la parodos, bien compréhens
ible, puisque c'est sur la partie arrière du plateau que devaient

mettre une grande élévation. La hauteur (moins de 1 m. au-dessus du


pulpitum dans l'état actuel) n'est pas trop forte pour une plate-forme
de ce genre.
1 Pour assurer la stabilité des deux grands murs : celui dé la frons
scaenae et le mur arrière, on les joignaient en de nombreuses lignes trans
versales, qui déterminaient une série de petites chambres, dont certaines
seulement étaient utilisables. Cf. Fownigé, i. Z., p. 80.
2 Ct M. Bieber, op. L, p. 379, et G. Caputoy l. L, p. il.
ιββ
arriver lee groupes d'acteurs ou lee véhicules qui attendaient
cette sorte d« oouliflsé le moment de paraître. Les murs ont ρίοβ
de 1 m. d^paieeeur et pouvaient monter très haut ; la surface iaté*·
rieure resté tout de même assez ample (5m50 χ 2m75). Λ l'oueet»
un blocage x indique, sur une cortame étendue, un niveau surélevé ;
85K - ■> il comblait la différence entre le eoi et la hauteur du pulpümn; du
reste, la Continuité de l'aesiee nord-sud 24 montre bien que l'on
est tout au plus au niveau du seuil8.
L*es foyers sont beaucoup plus vastes, puisqu'ils ont ΙΟ'ΒβΟ sur .
près de 7 m. à Test et 10»»45 sur 7mW àTouetó*. Ils servaient de
salles dee pas perdus pendant les entr'actes, mais aussi de halls
d'entrée, comme l'indiquent leurs portes, au flud et à l'est (ou
l'ouest). Celles du foyer est sont en très bon état (voir photo 8,
pi. V, et photo 13, pi. VII). Ä l'ouest, le plan «et bien visible, mais
à un niveau trop bas, comme l'indiquent l'affleurement du roc à
l'intérieur de la salle et la légère dénivellation par rapport à la
parodos. Le sol antique était, comme dans le parascaeniam, où le
blocage est conservé, d'au moins 50 cm. plus haut que le niveau
à partir duquel nous commençons à distinguer le plan complet. On
a ainsi le mur sud, mais au-dessous, du seuil, donc sans différencia
tion entre la porte et le reste. A l'ouest, l'emplacement de la porte
. est même en saillie — 40 cm., soit presque jusqu'au niveau du
seuil4..

1 Haut de 40 à 50 cm.^ . .
* II n'y a pas trace à Tipasa de la petite loge entre les deux saillies
méridionales, que M. Formigé attribue pour Arles À un « procurator a
scaena », maie qui n'est pas courante. v
■ν 8 La largeur plus grande ne surprend pas : elle est commandée par
la position du mur nord de Vkypòscaenium, que le mur.du foyer prolonge
au delà de l'interruption des parascaenia. Or, on se souvient que l'Ay-
poscaenium s'élargit ψβαί en ouest dans une proportion (7m05 à 7m40)
qui expliqué parfaitement la différence entre les deux foyers.
4 Toutefois, maljgré cette absence des portes, la symétrie n'est pas
douteuse, car lèi soubassements des colonnes sont conservés, à des dis
tances des angles correspondant exactement à celles de Test. Ils sont
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP ASA. 169
Les portes donnant sur les parodoi sont de simples passages de
2 m. de large, en face des «couloirs » conduisant derrière la cavea.
Les autres, vers Test et vers l'ouest, sont de véritables entrées mor
numentales, larges de plus de 3m50, flanquées à l'extérieur de deux
*-'·::
demi-colonnes engagées, à base moulurée, posées sur des soubas
sements ^rectangulaires1. Leur présence, équilibrée par celle des
murs qui font pendant au delà de la parodos, donne deux véritables
façades latérales à l'édifice.

F. Le problème du portique.

Nous avons cherché en vain les vestiges du portique si fréquent


derrière les bâtiments du mur de scène et si formellement recom
mandé par Vitruve2. Peut-être des sondages plus poussés permett
raient-ils d'en découvrir trace; cependant, la saillie du postscae-
nium obligerait ce portique à avoir un plan insolite et compliqué.
L'existence de la citerne, l'ampleur des foyers nous invitent plu
tôt à penser qu'il manquait à Tipasa. Les deux avancées (19 et
20 sur le plan fig. 5) que poussent au nord les murs limitant à l'est,
et à l'ouest le postscaenium peuvent s'expliquer par un petit dal
lage ou quelques degrés donnant accès aux bâtiments. Là encore,
il faut attendre le dégagement de toute la zone environnant le
théâtre pour avoir une certitude.
:■**;
La mention d'un portique à Tipasa chez Texier ne nous fait
pas, pour l'instant, changer d'avis : il est très possible que Texier
ait voulu parler du passage semblant > — et qu'il pouvait croire,
avant la fouille r— faire le t0uf de la cavea3.

plus larges qu'à l'est, mais il s'agit d'une assise de fondation. Les demi-
colonnes ont naturellement disparu.
1 Ces soubassements ont, à l'est, 33 cm. χ 69 cm. Les demi-colonnes
ont 48 cm. de diamètre.
2 Cf. Vitruvej V, 9, 1 : Post scaenam porticu* sunt constituendae.
8 Voir ci-dessus, p. 127 sqq. ' ~

\\>
170 Β. PRÉZOULS

G. Χα cìttjrne et Végout. ,
( On sait que la citerne du sud-est (6m50 χ 5m85 dans œuvre),
dont les murs périmétraux sont mal conservés, mais qui a gardé
son enduit, ne concorde pas avec Panière du postscaenium, mais
profite de l'avancée de son mur est vers le nord. La mauvaise qual
IV; ité de ceux de ses murs qui ne sont pas mitoyens (voir photo 12,
pi. VU) incite peut-être à la considérer comme postérieure à la
construction de l'édifice, ou du moins à penser qu'elle a été répar
ée. De toute façon, sa présence à proximité d'un théâtre est nor
male, voire nécessaire — notamment pour les sparsiones. On en
connaît dans bien d'autres cas1.
Enfin, noue avons déjà signalé l'égout qui passe sous le postscae-
nium. Son départ se situe à peu près en face, de la limite est de
Vhyposcaeniurfi. Il a lm45 de haut, 72 cm. de large et sa voûte
demi-circulaire est à environ 2 m. du niveau actuel du sol. On Ta
dégagé sur 7 m. de long. Son appareil de gros blocs est très soigné.
A l'extrémité du trajet fouillé, une courbe vers le sud semble
s'amorcer. Il est probable qu'il s'agit là du collecteur dans lequel
se jetaient l'égout passant sous la praecinctio voisine de l'orchestre
et la conduite qui recueillait, dans Yfiyposcaenium, les eaux de l'o
rchestre lui-même8.

♦:?·
L'étude de détail a permis de dégager, chemin faisant, les carac
tères essentiels de l'édifice. Le plan, assez classique à première vue,
comporte pourtant maintes particularités qui éloignent Tipasa non
it , -
1 On en suppose à Carthage, à Athènes (ci. Formigé, l, i., p. 39). On
les a trouvées à Cassino {cf. G. Carettoni, Not* Sem., 1939, p. 109), à
Dougga (cf. Carton, II, p. 102). Elles sont généralement plus vastes et
— plus discrètement — incorporées, non juxtaposées, au plan d'en
semble (sous les gradins ou sous la scène). Cette différence confirmerait
le caractère tardif et adventice de celle de Tipasa.
• Voir ci-dessus, p. 154,
:1
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 171
seulement du typé vitruvien, mais aussi des autres théâtres d'Afrique.
A l'égard de Vitruve, la fórme demi-circulaire de l'orchestre, la lar
geur de la scene correspondent exactement aux prescriptions du De
Architectura1 ; en revanche, la scène est hypertrophiée en profondeur
— aux dépens, nous l'avons vu2, du niur de scène particulièrement
étroit : la dimension est presque double de celle donnée par le tracé
vitruvien —i égale au demi-rayon de l'orchestre8. La position des es-
caliers de la cavea* ne correspond pas davantage à ce tracé théorique
— non plus, très vraisemblablement, que celle des valvae hospitales.
Quelque faibles que soient les indices nous permettant de les local
iser, ces portes étaient plus espacées à Tipasa que selon le schéma
de Vitruve ; c'est certain si le massif 25 (plan, fig. 5) est en rapport
avec Fune d'entre* elles6; c'est plus que probable même dans le
cas contraire, étant donné la largeur totale de la scène. Rien
d'étonnant à cela, du reste : les acteurs jouaient sur le devant du
proscaenium et, plus le mur de scène est loin derrière eux, plus on
avait intérêt à en élargir l'ordonnance monumentale ; d'autre part,
l'ensemble des trois portes devait occuper presque autant de lar
geur que la façade à niches du pulpitum < — très- développée à Ti
pasa — ou que le rideau d'avant-scène qui s'étend, lui aussi, sur
une trentaine de mètres.

1 Un sixième du diamètre de l'orchestre pour la première, deux fois


ce diamètre pour la seconde. Cf. Vitruve, V, 6, S· et 6.
8 Voir ci-dessus, p. 157 et 166.
8 Cf. Vitruve, V, 6. Cette hypertrophie de la scène n'est d'ailleurs
pas particulière à Tipasa. On la retrouve un peu partout, notamment en
Afrique. Elle correspond à un éloignement de plus en plus grand du
type grec à scène étroite, depuis Vitruve, rendu nécessaire par les util
isations nouvelles du plateau — qui, dans la plupart des cas, ne devait
plus servir qu'exceptionnellement aux tragédies ou comédies de la tra
dition hellénique. ,··■·■
* Le premier et le dernier se trouvent, à Tipasa, le long des parodoi,
ce qui les place plus près du pulpitum que ne l'admet la régularité géo
métrique de la construction vitruvienne. Cette dérogation est, toutefois,
de peu de conséquence.
6 Voir ci-dessus, p. 167,

■ ,',,■·■

■m
m S. fÄÄZOULS

C'est donc essentiellement par tout ce qui touche à la scène que


l'édifice 81écarte des données vitroviennee — qu'il respecte 'peur
ailleurs, pour les éléments contrôlables s'entend1. C'est aussi dans
ce secteur qu'il se distingue le plus certainement des autres théâtres
africaine ; sans parler des problèmes posée par le rideau et du
décalage de l'hyposcdènium, on a noté le nombre, insolite en Occi
dent, des niches de pulpitum et l'absence de tout escalier ; la forte
saillie du postscaenium par rapport aux. foyers et, corrélativement,
la forme allongée de ceux-ci : divergence« d'autant plus intéres '-Vf*
santes qu'elles semblent éveiller des résonances orientales2.
Mais là cavea et ses substructions ont, elles aussi, leur original
ité. Entre Madaure — cas un peu spécial du petit théâtre sans
ambulacro, à entrée centrale — et Sabratha — grand édifice à
deux ambulacres concentriques et à deux étage* d'escaliers — dif
férent aussi de Chemtou, Tipasa présente unt^pe de théâtre cons
truit de moyen développement, caractérisé par la simplicité des
aménagements : accès 'direct de l'arrière à la cavea, par les quatre
escaliers, vraisemblablement réduction de Pambulacre extérieur à
deux couloirs symétriques faisant communiquer les entrées laté
rales et postérieures ; caractérisé en même temps par le sens de
l'harmonie architecturale : outre la façade arrière, affinée et mise
en valeur par les artifices que nous avons étudiés3, on a ménagé
deux véritables « façades latérales »^ grâce, justement, aux deux
embryons d'ambulacrè, réponse aux foyers allongée qui dépassent,
de par leur forme, l'alignement de la façade arriéré.
$&$■<"■'
1 Pour la longueur découverte des parodoi, bien supérieure à l'éva
luation vitruvienne, on ne peut dire, cependant, qu'il y ait divergence
absolue. ;* ■'·/·,.
.

Tout ce qui concerne l'élévation nous échappe, par suite de l'inexis


tencedu mur de scène. De même, faute d'une interprétation satisfai
santede Vitruve, V, 6, 3, toute vérification est impossible concernant
la place des murs séparant la scène des paraseaenia. Sur. cette aporie
concernant les itinera versurarum, cf. Fensterbnsch, in Pauly-Wissowa,
s. v. Theatron, col. 1419 sq. . ^* " '
a Voir ci-dessus, p. 166. . '
-· Voir ci-dessus, p. 169.
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP ASA 173

Le même souci de faire un tout complet et équilibré apparaît


avec la présence du sacellum, qui, outre sa valeur religieuse, sou
ligne vigoureusement, face à la valva regia et à la niche plus large
du pulpitum, Taxe nord-sud du théâtre. Le même sens de la sim
plicité et de l'économie se laisse deviner, selon notre hypothèse,
dans le recul de la praecinctio centrale jusque vers l'entrée du
sanctuaire, auquel elle donnerait ainsi accès.
Tous ces caractères composent une physionomie vraiment ori
ginale en Afrique et trahissent un art déjà évolué, accessible peut-
être à quelques influences lointaines. Ils constituent par là même
une présomption pour la datation de. l'édifice. Stylistiquement,
Λ -i'ä,
Tipasa ne saurait être antérieur, et devrait même, croyons-nous,
être postérieur, à la grande série antonine à laquelle appartiennent
Timgad, Djemila, Khamissa, Philippeville, Carthage, Dougga,
Sabratha, etc.1... Y a-t-il moyen d'acquérir une certitude? On
sait qu'aucune inscription, aucun relief ne le permettent; la tête,
bien mutilée, que nous donnons plus bas (appendice B) ne fournit 4
pas plus de précisions que les monnaies. Quant à l'appareil, il est
assez déroutant : toutes les parties en pierre de taille — et on n'a
pas lésiné — sont soignées et pourraient sans difficulté remonter à
la même époque que Djemila ou Khamissa. La maçonnerie, en
revanche, est très mauvaise et pousse à abaisser la date ; dans les
parties en briques, l'épaisseur des joints de mortier la ferait des
cendre, si l'on était à Rome, jusqu'au ive siècle8 1 Et, pourtant, il
n'y a aucune raison de penser à une réfection : à part quelques
pans de murs rejointoyés, tout doit être de la même époque. Il
est vrai qu'en province, l'apparente disparate s'explique plus fac
ilement : la chronologie étant beaucoup moins rigoureuse qu'à
.

Rome, le mauvais appareil des chambres peut indiquer des ouvriers


malhabiles, ou l'indifférence de l'architecte à l'égard des parties

1 Sur leur datation, cf. Gsell, Mon^ βηί., I, et Or. Caputo, l. l., pas
sim. ■': " '. .':, ■.. " ·.■..■..''■
2 Cf. E. Boisé Van Deman, in A. J. Α., p. 429 sq.
.
;

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rVÏ'
174 Β. PBÉZOUL8
destinées à rester cachées, aussi bien qu'une époque très basse. H

w ne saurait guère, cependant, remonter plus loin que le m« siècle


— ce qui peut, à la rigueur, convenir à la façade, dont l'intérêt
monumental tout particulier expliquerait alors l'appareil soigné.
Le renforcement des murs, dans les chambres, par des bandes de
briques commande, lui aussi, une date assez tardive ; ce genre
d'opus mixtum, rare en Afrique, apparaît surtout vers la fin de
l'Empire*.
Mais une autre considération doit intervenir ici : la situation du
théâtre à l'extrême-ouest de la ville, au voisinage immédiat de
l'enceinte, invite, à essayer de replacer sa construction dans l'his
toire du développement de la cité. Il est vrai qu'on connaît bien
mal cette histoire ; pourtant, on pense, depuis Gsell, que la, colo
nie latine — de Claude — puis romaine — d'Hadrien — - ayant
profité de la prospérité antonine, s'agrandit vers la fin du 11e siècle
ou au début du 111e 2. La construction du théâtre dans un quartier
excentrique a été vraisemblablement un élément de cette exten
sion, que confirme, par ailleurs, l'établissement de la seconde en
ceinte, beaucoup plus vaste que la première. Sur la datation de
cette enceinte, on n'est pas d'accord ; mais, depuis les dernières
fouilles, il semble qu'on puisse la faire remonter assez haut : milieu
du 11e siècle8. Où placer, dans l'histoire de ce développement de

1 Cf. Cagnat-Chapot, Manuel d'archéologie romaine, I, p. 25.


* Cf. Gsell, Mél.t 1894, p. 298 sq.
8 M. P.-M. Duval, op. l., p. 64 sq., se iondant sur, l'étude des appar
fa' eilset sur la comparaison avec Cherchel, descendait jusqu'à la deuxième
moitié du tu0 siècle. Son opinion a rencontré des résistances. La critique
de M. Fr: B, BfoWn/ia 4. Λ A;, 1949, 2, p. 228 sqq., est plus âpre que
convaincante. Elle propose une date très haute pour les deux enceintes :
ψ
ft Inherent probability and the closely parallel material of Gaul and North
Italy would suggest a Claudian daté. Tipdsa cannot be separated from its
neighbour (j»„ 229). Mais, quoi qu'il en soit de CbWchel, cette date ne peut
en aucun cas convenir à Tipasa, qui a précisément obtenu de Claude le
statut de colonie et n'a grandi que bien postérieurement jusqu'à la taille
délimitée par l'enceinte. Même si le rempart primitif beaucoup moins
LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIPASA 175

la cité, la construction du théâtre? Question bien difficile, faute


de tout indice littéraire ou épigraphique. Néanmoins, les témoi
gnages d'un agrandissement un peu plus précoce qu'on n'avait cru
jusqu'ici invitent à remonter aussi haut que le permettent l'appar *.ii
eil et le style du monument : extrême fin du 11e ou plutôt début
du me siècle, telle serait donc la date que tous ses caractères et
ce qu'on connaît de l'histoire de la ville désignent comme la plus
probable pour le théâtre de Tipasa1. L'originalité de l'édifice
s'explique mieux et son intérêt croît encore avec cette datation :
en face des deux grandes séries, augustéenne et antonine, de
théâtres africains, qui reflètent deux périodes particulièrement
brillantes de la pax Romana, il représentera peu près seul, la tro
isième période vraiment prospère de l'Afrique romaine — la der
nière avant les troubles du 111e siècle et le repliement des villes
sur elles-mêmes : l'âge sévérien. Il est l'un des derniers témoignages
— du moins dans le domaine des édifices destinés aux spectacles
— de l'activité des grands bâtisseurs païens d'Afrique et un mail
lonindispensable à la connaissance de l'évolution du théâtre en
Occident.
Edmond Frézouls.

vaste dont Gsell avait pensé retrouver la trace (cf. Mél., 1894, p. 324)
n'existe pas, la présence à l'intérieur de l'enceinte actuellement conser
vée de tombes du ier ou πβ siècle ap. J.-C. interdit absolument de la
faire remonter à l'époque de Claude. y<ß
Une découverte épigraphique encore inédite, qu'il a eu l'obligeance
de me communiquer, conduit M. J. Baradez à remonter jusqu'au milieu
du ne siècle — datation que les .vraisemblances historiques autorisent
parfaitement,
1 M. G. Caputo, l. L, p. 13, le date, lui aussi, dell'inizio del terzo secolo
d. e, mais pour des raisons que nous ne pouvons accepter : le fait di
essere libero dell'appoggio alla roccia, qu'il avoue d'ailleurs être un cri
tère insuffisant, se retrouve avant le me siècle en Afrique — notamment,
selon toute vraisemblance, à Sabratha — aussi bien qu'en Italie. Quant
au second argument : poca era la magnificenza della città, e, fosse sorto
prima, gli abitanti lo avrebbero ingrandito, il tombe avec l'évaluation de
la contenance à 2.000 places, erronée, comme on l'a vu.

M
176 E. FRÉZOULS

: Appendice à
Nous avons relevé sur des joints de
mortier, dans certaines chambres des subs
tructions, des graffiti. Un seul, dans la
chambre 2, comporte des lettres, que nous
lisons À G V 0 (ou S), sans pouvoir les
interpréter. Les autres ne sont apparem
ment qu'une suite de chiffres : VIII, dans
la même chambre, XXXXV à la paroi
ouest de la chambre 27 ; enfin, à la paroi
est de 26, toute une série que reproduit la
figure 10. Tous ces signes ont dû être
tracés sur le mortier frais, donc au mo
ment de la construction. Leur significa
tion n'en est pas plus claire ; peut-être
représentent-ils justement des comptes en
rapport avec les travaux?

Appendice Β
Outre une main de marbre, repliée et
tenant un objet difficile à déterminer,
trouvée en achevant de dégager Vhypos-
caenium, la fouille n'a livré qu'une tête
très mutilée, mais assez belle — dans une
chambre à l'arrière de la cavea (pi. VIII).
Cette tête, en marbre elle aussi, me
sure 27 χ 16 cm. Elle est cassée du som
met du crâne à la nuque et à. la tempe
droite ; la face est également mutilée : le
tfV> nez, la bouche, le menton et la plus
grande partie de la joue gauche' manq
uent. On aperçoit pourtant la base du
menton, large et massive, qui donne à
l'ensemble une certaine puissance. L'oreille
gauche et le début du cou se laissent
dèviae^. ί£- Φβ iewüer également pûiSf
sant. L'absence de rides, la chevelure et
la barbe courtes, traitées en petites mèches
irrégulières, présentant un certain relief,
sauf pour le dessus de la tête, coiffé
Pl. I

Photo 1

Photo 2
Pl. II

Photo 3

Photo 4
Pl. Ill

Photo 5
Pl. IV

Photo 6

Photo 7
Pl. V

Photo 8

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Pl. VII

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LE THÉÂTRE ROMAIN DE TIP AS A 177


« à plat », et surtout les yeux vagues, aux orbites profonds et aux
pupilles très sommairement indiquées, donnent à l'ensemble une "l£Sè
expression de jeunesse idéalisée qui pourrait convenir à un type
héroïque — - un Hercule- peut-être? -?- lointainèment dérivé d'un
original hellénique. Il est aussi difficile de dater ce fragment que
de l'identifier. Le traitement des yeux et de la barbe et son style
général le font, toutefois, croire antérieur à l'époque sévérienne.
— donc à la construction du théâtre, où il n'a dû pénétrer que par
accident.

Mélanges d'Arch. et d'tiiêt. 1952. 12

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