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Ambre Massé (22107303)

Groupe de TD n°1
Année scolaire 2021-2022

UFR IHSS
Parcours : Psychologie et Humanités

Licence 1

Modèles psychosomatiques
à partir du chapitre de DUMET N. (2014). Somatisation et/ou symbolisation, Forme primaire de
symbolisation (pp 73-90). Édition Dunod.

TD : Psychologie de la santé

Chargée de TD : NORET Juliette


Pendant plusieurs siècles, l’approche dualiste, visant à penser de manière désolidarisée
l’esprit et le corps, a été le paradigme dominant qui faisait l’unanimité. Ainsi, médecine
somatique et médecine psychologique étaient drastiquement séparées. Cependant, certains
syndromes, tel que l’eczéma, ne peuvent être expliqués uniquement par le corps : c’est alors
que l’on ouvre un nouveau champ de réflexion de la maladie, celui du psychosomatique. Pour
définir simplement la psychosomatique, nous pouvons affirmer qu’elle désigne les troubles
occasionnés, déclenchés ou aggravés par des facteurs psychiques sur le corps humain. En effet,
l’eczéma est l’exemple parfait du trouble psychosomatique, apparaissant de manière chronique
surtout lors de périodes de stress intense.
Pour parler de la psychosomatique, nous nous appuyons sur un extrait, tiré de l’ouvrage
Forme primaire de symbolisation rédigé par de multiples auteurs. Il s’agit du chapitre 4 de
celui-ci, intitulé Somatisations et/ou symbolisations et est traité par Nathalie DUMET,
professeure de psychopathologie clinique à l'Université Lyon 2 mais aussi psychologue
clinicienne, psychanalyste et présidente de la Société Rhône-Alpes de Psychosomatique. Dans
l’extrait étudié, elle cherche à mettre en évidence les potentiels liens qu’il pourrait exister entre
la somatisation et la symbolisation. Dans la partie qui va suivre, nous allons explorer certaines
théories sur la psychosomatique et tenter de les comprendre.

Les théories dans le domaine de la psychosomatique sont nombreuses, nous pouvons


notamment citer le courant psychophysiologique, mais sont, pour la plupart de celles que nous
pouvons identifier dans le texte, d’orientation psychanalytique. Il me semble donc tout à fait
pertinent d’expliciter tout d’abord le courant psychanalytique dans la théorie psychosomatique.
En psychanalyse, on pense que le trouble psychique peut avoir des répercussions sur la santé
somatique. Plusieurs auteurs ont conceptualisé de manière plus ou moins brève la question de
la psychosomatique. Le célèbre Sigmund Freud notamment pense cette relation entre la vie
psychique et le monde organique, notamment à travers la citation suivante « La psychanalyse
n’oublie jamais que le psychique repose sur l’organique, bien que son travail ne puisse
poursuivre le psychique que jusqu’à ce fondement et pas au-delà » (Freud, 1910). Les limites
dans l’approche freudienne néanmoins sont que cette dernière n’ignore pas les rapports entre le
psychique et le somatique mais ne s’en préoccupe pas, négligeant ainsi toute l’approche
thérapeutique autour de la maladie psychosomatique et les représentations mentales qu’elle
pourrait impliquer. D’autres auteurs, tel que Sandor Ferenczi, se penchent sur le sujet. Ce
dernier introduit la notion de « pathonévrose », soit le fait qu’un symptôme névrotique soit
localisé dans une partie de l’organisme où figurait déjà une maladie somatique. George
Groddeck quant à lui établit une théorie selon laquelle le Ça est une entité littéralement toute
puissante, sans limite, et qu’il est, par conséquent, capable de produire aussi bien des
symptômes ou des syndromes psychologiques que des symptômes voire des maladies
organiques. La maladie aurait, dans cette lignée de pensée, une valeur symbolique et pourrait
donc être traitée aussi bien qu’une névrose via une cure psychanalytique. Nous avons également
Franz Alexander qui va développer et créer un réel courant dans la branche psychosomatique,
en conceptualisant une approche à la maladie d’un œil psychophysiologique mais aussi
psychanalytique, afin d’avoir une approche multifactorielle de la maladie. Nous ne pouvons pas
oublier de mentionner enfin l’approche Lacanienne de la psychosomatique. Selon Lacan, le
symptôme psychosomatique est dû à un manque de verbalisation du trouble, qu’il qualifie
comme un échec de la mise en place du langage. Ainsi, nous pouvons donc affirmer que les
théories psychanalytiqyes en psychosomatique sont nombreuses et variées. En effet, Nathalie
Dumet se penche sur plusieurs auteurs dans son ouvrage et nuance plusieurs thèses, mais j’ai
choisi d’expliciter celles qui sont apparues comme les plus influentes dans l’extrait : celle de
L’École de Psychosomatique de Paris, fondée par Pierre Marty, et celle de Christophe Dejours.

Pierre Marty est un des piliers dans le domaine de la médecine psychosomatique.


Diplômé de médecine, spécialisé en psychiatrie mais également psychanalyste, P. Marty est
principalement connu pour son investissement dans l’émergence de l’École de
psychosomatique de Paris dans les années 50 mais également dans la fondation de l’IPSO
(Institut de psychosomatique de Paris) dans les années 1970. Aujourd’hui, l’ASM 13 dispose
même d’un centre de traitement psychosomatique à son nom.
Sa thèse se base effectivement sur l’idée qu’un appauvrissement de la vie fantasmatique
du sujet romprait l’ordre psychosomatique du sujet. Le psychique et le somatique ne sont dès
lors plus dissociables l’un de l’autre mais bien complémentaires et la détérioration de l’un aurait
des conséquences sur l’autre. Il explique ainsi la maladie somatique : Le sujet, s’il se retrouve
coupé de son inconscient, n’est plus capable d’exercer les fonctions mentales de régulation
émotionnelle correctement, et le trouble somatique se présenterait donc comme une expression
des émotions, qui ne sont plus capables d’emprunter la voie psychique. Il s'ancre légèrement au
milieu de la tendance naturaliste et de la tendance humaniste, car il considère que malgré la
singularité du sujet il existe une caractéristique commune aux malades psychosomatiques : celle
de l’inaccessibilité pour le patient à ses fonctions mentales. Il se détache donc de la nosographie
médicale classique, et veut introduire une nosographie psychosomatique particulière, prenant
en compte les critères qu’il observe chez une grande majorité de ses patients tout en ne
négligeant pas l’unicité particulière du sujet, ce qu’il reproche à la médecine somatique
classique. Le point principal de sa thèse est donc de penser qu’un environnement contraignant
la norme psychique d’un sujet est à l’origine des symptômes somatiques, que le psychisme à
une influence sur l’organique. Pour lui, le symptôme psychosomatique est dépourvu de sens, il
n'est qu’un symptôme identifiable et réel dû à une absence de fantasmes. Selon P. Marty, une
vie mentale en activité permettrait donc un accomplissement réussi des fonctions que l’on
pourrait qualifier de vitales effectuées par l’organisme ; l’organisme ne peut fonctionner que si
le bien-être psychique du sujet est assuré. Ainsi, selon sa thèse, le suivi médical et le suivi
psychologique sont tous deux nécessaires, afin de donner à l’individu un moyen d’accéder à ses
représentations et à ses fantasmes. Les travaux de P. Marty sur la question psychosomatique
ont notamment été repris dans la psychologie du développement pour comprendre les bébés.
En effet, le bébé dès qu’il ressent un quelconque excès (fatigue, faim…) s’exprime par des
pleurs : c’est l’expression somatique de ses tensions psychiques. En clair, P. Marty considère
que la somatisation est due à un manque de symbolisation et qu’elle apparaît quand il n’y a plus
de vie fantasmatique.

Christophe Dejours, psychiatre, psychanalyste et professeur de psychologie spécialisé


dans le domaine du psychosomatique mais aussi dans la psychodynamique du travail est un
second auteur qui apparaît régulièrement dans le texte. Il propose une thèse dans laquelle il
exprime sa vision quant au rapport somatisation et symbolisation et de manière plus générale
sur la question du psychosomatique.
Dejours, à l’inverse de Marty, pense qu’il existe des « somatisations symbolisantes ». Il
est important de comprendre que pour C. Dejours, l’expression somatique, d’un trouble
notamment, est le symbole de celui-ci. Développer un symptôme quel qu’il soit à partir d’un
désordre dans la vie psychique aurait donc une signification. On s’éloigne donc de la conception
selon laquelle le symptôme psychosomatique est dénué de sens. Ainsi, le texte présente ainsi
cette idée « Des somatisations, en cours de psychothérapie, s’inscrivent ainsi dans un
mouvement de réorganisation et de reprise de l’évolution mentale. Elles apparaissent comme
des étapes de symbolisation, en créant des liaisons nouvelles, sur le chemin qui conduit de
l’excitation à la pulsion et à la représentation mentale des conflits ». Selon lui donc, les
somatisations ayant lieu pour exprimer un trouble psychique sont des formes de symbolisation,
qui permettent d’accéder au contenu du conflit psychique dont le sujet souffre. Mais ce n’est
pas le seul apport que l’on doit à Dejours dans le domaine psychosomatique. Il théorise l’idée
selon laquelle la pensée ne passerait pas seulement par l’esprit et le cerveau mais par le corps
tout entier. Ainsi, la distinction physiologique et psychique des troubles est totalement effacée,
et la médecine « traditionnelle » et la médecine du psychique pourraient ainsi travailler de
manière complémentaire. L’auteur pense donc la maladie somatique non plus d’un point de vue
purement physiologique mais comme « le résultat de processus psychopathologiques centrés
par la désorganisation de l’économie érotique ». En continuité de sa proposition, il voit la
maladie psychique comme avant tout une maladie touchant le corps, mais ciblée plus
précisément sur le cortex cérébral et la production de pensée, sans négliger la perturbation de
la sphère inconsciente.

Nous voyons donc à travers l’exposition de ces différentes théories, ayant ouvert la
réflexion autour du trouble et de son origine mais aussi de la thérapie psychosomatique, une
réelle évolution de la pensée des maladies. En effet, réduire la distinction entre le champ
physiopathologique et psychopathologique permet d’aborder sous de nouveaux angles les
troubles, aussi bien psychiques que somatiques et ainsi envisager une meilleure compréhension
du corps du patient mais aussi de son esprit, permettant ainsi de mieux pouvoir guérir. De plus,
nous voyons à travers l’exposition des courants de pensée très différents que proposent P. Marty
et C. Dejours que tous les courants ne se rejoignent pas sur la question du rapport entre la
symbolisation et la somatisation. Cela peut donc nous amener à nous questionner sur l’impact
des théories psychanalytiques quant à la façon de soigner les patients atteints de symptômes
psychosomatiques.

Bibliographie :
Press, J. (2008). La construction de la théorie en psychosomatique. Revue française de
psychosomatique, 34, 151-168. https://doi.org/10.3917/rfps.034.0151

Keller P-H. (1995), Les théories psychosomatiques : modèle médical ou modèle psychologique ? Une
réflexion épistémologique, Revue Française de Psychosomatique, N° 8, 1995, pp.153-176, PUF

Dagher, H. (2021), La psychosomatique, quand le psychisme et le corps ont mal, Fady Mozaya, pp. 1-
6,
https://www.academia.edu/49054282/La_Psychosomatique_quand_le_psychique_et_le_corps_font_m
al

Rivals Fotaki, G. (2011). Les dissidences du corps de Christophe Dejours. Revue française de
psychosomatique, 39, 173-179. https://doi.org/10.3917/rfps.039.0173

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