Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
DOSSIER DE RECHERCHE
Niveau : Master 1
Spécialité : Epistémologie
Introduction
Conclusion
Introduction
La nature est une entité qui englobe l’ensemble des êtres non-animés et des êtres animés.
Ceux-ci, dits autrement êtres vivants, sont séparés en deux règnes : le règne végétal et le règne
animal. Ce qui nous intéresse ici c’est le règne animal qui régit par classe, par ordre, par
famille, par genre et par espèce tous les animaux y compris l’homme qui fait partie intégrante
de la classe des mammifères, de l’ordre des primates, de la famille des hominidés, seul
représentant du genre Homo. De ce fait, si l’on sait bien que l’homme partage naturellement
le même règne avec tous les animaux, il est d’une importance capitale de se demander :
« L’homme est-il un animal comme les autres ? ». Cette question peut se poser sous une autre
manière à savoir : peut-on parler d’identité, de ressemblance, ou d’égalité entre l’homme et
les autres animaux ?
Pour apporter une solution à ce problème, il serait nécessaire et pertinent de se poser une série
d’interrogations qui feront l’objet de notre problématique :
Peut-on soutenir qu’il existe une spécificité radicale de l’homme pour faire une critique contre
le naturalisme ?
Quelle est la position des sciences humaines pour différencier l’homme à l’animal ?
.Nous allons répondre à ces différentes questions dans notre développement pour essayer de
résoudre cette énigme.
I- La naturalisation de l’homme
La naturalisation ou le naturalisme peut se définir comme une théorie ou une doctrine selon
laquelle il n’y a pas d’existence en dehors de la nature. Tout ce qui existe, à savoir les êtres
vivant, les objets et les faits, a des genèses naturelles et peut avoir des explications par le
moyen des principes naturels. Ceux-ci, ces principes naturels, constituent le commencement,
l’origine, ou encore la cause première de tout ce qui est. De ce fait, on peut parler d’une
approche réductionniste qui consiste à une ontologie qui ramène tout à sa base naturelle.
Ainsi, qu’en est-il de l’homme pour qui, on avait définie antérieurement comme un être vivant
du règne animal appartenant à la classe des mammifères et de l’ordre des primates ? Si l’on se
fonde sur cette ontologie réductionniste qu’est le naturalisme, on dira simplement de l’homme
qu’il est un être naturel comme tout être vivant et puisqu’il est du règne animal, il est un
animal comme les autres.
Par conséquent, le naturalisme est une ontologie réductionniste qui utilise le monisme et le
physicalisme pour réduire et concevoir l’homme à un animal comme les autres. Etant donné
que cette hypothèse de la réduction de l’homme à un animal est bien démontré, il serait
pertinent de se poser la question de savoir : peut-on rejeter l’idée d’une spécificité humaine ?
Les mammifères tels que les lémuriens, les tarsiers, les loris, les humains constituent l’ordre
des primates. L’étude de la biologie moléculaire démontre que l’homme a des gènes commun
avec les primates soient 98% des gènes. Cette similarité entre l’homme et le singe est l’objet
d’étude de la primatologie. La théorie selon laquelle l’homme descend du singe est dépassée
par certains primatologues qui voient que l’homme est un singe. Frans de Waal s’engage dans
ce même ordre d’idée. Ses études du comportement des bonobos et des chimpanzés replacent
l’homme dans la lignée des primates. Ces deux espèces, à savoir le bonobo et le chimpanzé
sont les plus proches génétiquement parlant de l’homme et ont des comportements que l’on
croyait être spécifiquement à l’homme. Par exemple, aussi bien que chez l’homme, il existe
des comportements comme l’empathie et la marche debout chez les bonobos et chimpanzés.
A ces similitudes de comportements entre l’homme et le singe, Pascal Picq ajoute : «l’outil, le
rire, les pleurs, la coopération, le bien et le mal, le tabou de l’inceste, la chasse, le partage de
la nourriture, la culture, les traditions, la communication, le symbolique, la politique : ces
caractéristiques que l’on croyait humaines sont présentes chez les grands singes.» 4 Cette
exceptionnalité de l’homme à avoir des qualités qui lui sont propres est exclue par la
primatologie comme le témoigne Pauline Gravel en ces termes : « L’étude du comportement
des grands singes a déboulonné l’homme de son piédestal et battu en brèche cette idée tant
répandue que l’homme est le but ultime du processus d’évolution. Homo sapiens sapiens ne
détiendrait pas l’apanage de la bipédie, du langage, de l’outil, des systèmes sociaux, voire du
Kama sutra, de la moral et de la guerre comme on l’a cru jusqu’à récemment. Le propre de
l’homme serait beaucoup plus subtil que ce que les anthropologues du dernier siècle on bien
voulu croire. »5 Bref on peut simplement accepter que par la primatologie le propre de
l’homme est renvoyer.
6
Frans de Waal, Sommes-nous trop « Bêtes » pour comprendre l’intelligence des animaux, LES LIENS QUI
LIBERENT, p.3
7
Ibid, p.139
3-Une différence de degré
En résumé, par le naturalisme on est parvenu à réduire l’homme à l’animal grâce à des
méthodes comme le monisme et le physicalisme qui sont ontologies réductionnistes et grâce à
la primatologie et l’éthologie.
Cette ontologie réductionniste qu’est le naturalisme a-t-elle raison de réduire l’homme à pour
ne subir aucune critique ?
« Tout est nature » est la conception fondamentale du naturalisme. La nature est régie par des
lois qui se fondent sur la causalité, une relation de cause et de l’effet, qui fait qu’à la fin de
chaque évènement on attend une conséquence bien déterminée. On parle alors de
déterminisme. Une cause A produit fatalement un effet B. C’est dans ce sens que tous les
énoncés scientifiques sont réduits aux énoncés de la physique, on ramène tout à la nature de
même que l’homme. Cependant, est-il légitime de parler de naturalisme face aux sciences
humaines et sociales qui excluent les concepts de déterminisme et de causalité par les
concepts de liberté, de motivation et de conscience qui donnent à l’homme la possibilité de
transformer l’effet d’une cause à sa guise. Certains philosophes aussi apportent de sévères
8
Ibid, p. 7
critiques contre le naturalisme en développant l’idée d’un propre de l’homme. De même, par
la religion à savoir le Christianisme et l’Islam, on peut réfuter le naturalisme.
Les sciences humaines et sociales sont définies par le système éducatif français comme un
ensemble de disciplines étudiant divers aspects de la réalité humaine sur le plan de l’individu
et sur le plan collectif. Elles condamnent le point de vue naturaliste pour qui, il n’y a pas de
propre de l’homme car on peut tout expliquer par le moyen des énoncés de la physique, en
traitant des activités humaines. La linguistique par exemple qui est une science humaine qui
étudie le langage, la langue qui est une activité humaine, démontre que le langage humain est
différent du système de communication des animaux parce que celui-ci n’est qu’informatif
c'est-à-dire il se limite seulement à communiquer une information alors que l’homme est
capable de penser et d’exprimer sa pensée et d’échanger des informations complexe par le
langage. Ainsi, le langage proprement dit est le propre de l’homme. La parole est spécifique à
l’homme. A l’instar de la linguistique, toutes les sciences humaines et sociales défendent
l’idée d’une spécificité humaine en développant un caractère ou une activité qui est propre à
l’homme. Ainsi le problème de savoir si l’homme est un animal comme les autres est résolue
par les sciences humaines et sociales qui soutiennent le propre de l’homme.
La question, l’homme est-il un animal comme les autres, a amené d’énormes contradictions
chez les philosophes. Certains d’entre eux adoptent une position naturaliste et d’autres
différencient l’homme et l’animal par des concepts proprement humains. Parmi ceux-ci on
peut citer Descartes, Rousseau et Karl Marx. Pour le premier, Descartes, la pensée est
proprement humaine puisque c’est un produit de l’esprit. Son dualisme nous enseigne que
seul l’homme est constitué par un corps et une âme par opposition à l’animal. Celui-ci n’est
qu’un corps et ne pense pas parce qu’il n’a pas d’âme, d’esprit. Chez Descartes c’est l’âme,
substance immanente du corps et pensante qui permet à l’homme de penser à partir des mots
de la langue qu’elle a créé. Ainsi il compare l’animal à une machine. L’activité animal est
comparable à celle d’une machine puisque l’animal n’agit pas par conscience ni par pensée. Il
écrits : « Je sais bien que bêtes font beaucoup de choses mieux que nous, mais je ne m’en
étonne pas ; car cela même sert à prouver qu’elles agissent naturellement et par ressorts,
ainsi qu’une horloge, laquelle montre bien mieux l’heure qu’il est, que notre jugement nous
l’enseigne. Et sans doute que, lorsque les hirondelles viennent au printemps, elles agissent en
cela comme des horloges. » 9
Jean Jacques Rousseau s’engage aussi dans cette différenciation de l’homme à l’animal par le
propre de l’homme. Il parle d’« instinct animal » et de « perfectibilité humaine ». Pour lui la
perfectibilité est une propriété humaine et elle sépare l’homme de l’animal, elle explique
l’évolution de l’homme. L’animal ne progresse pas, il agit par instinct seulement pour
satisfaire un besoin naturel. Tendis que l’homme rend meilleur son cadre de vie en
l’améliorant. C’est cette faculté de se perfectionner qui permet à ROUSSEAU d’établir une
nette différence entre l’homme et l’animal. C'est ce qu’il justifie en ces termes : « Mais quand
les difficultés qui environnent toutes ces questions (concernant différence entre l’homme et
l’animal) laisseraient quelque lieu de disputer, il y a une autre qualité très spécifique qui les
distingue, et sur laquelle il ne peut y avoir de contestation : c’est la qualité de se
perfectionner ; faculté qui, à l’aide des circonstances développe successivement toutes les
autres, et réside parmi nous tant l’espèce que dans l’individu, au lieu qu’un animal est, au
bout de quelques mois, ce qu’il sera toute sa vie, et son espèce, au bout de mille ans, ce
qu’elle était la première année de ces mille ans. »10
Pour différencier l’homme à l’animal, Karl Marx part de se remarque : « Les hommes eux-
mêmes commencent à se distinguer des animaux dès qu’ils commencent à produire leur
moyen d’existence. »11 Il fait du travail, l'activité spécifiquement humaine qui réalise
l’humanité de l’homme et le distingue de l’animal. C'est en travaillant que l’homme devient
pleinement et aussi maitre et possesseur de la nature. Ainsi, le travail proprement dit est
humain et est différent de l’activité animal qui n’est que le produit de l’instinct. L’homme a
une conscience sur son activité. Il l’idée de la chose avant sa réalisation. Le travail est en ce
sens distinct de l'activité instinctive de l’animal. Pour démontrer que le travail est le propre de
l’homme et distingue celui-ci de l’animal, Marx écrit : « Notre point de départ c’est le travail
sous une forme qui appartient exclusivement à l’homme. Une araignée fait des opérations qui
ressemblent à celles du tisserand, et l’abeille confond par la structure de ses cellules de cire
l’habileté de plus d’un architecte. Mais ce qui distingue dès l’abord le plus mauvais
architecte de l’abeille la plus experte, c'est qu’il a construit la cellule dans sa tête avant de la
9
René DESCARTES, « Lettre au marquis de Newcastle du 23 novembre 1646 », in Œuvres et lettres, Gallimard,
coll. « Bibliothèque de la Pléiade », p. 1257
10
Jean Jacques ROUSSEAU, Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes et si elle est autorisée par la
loi naturelle, 1755, Partie1
11
Karl MARX ET Friedrich ENGELS, L’idéologie allemande, 1845-1846
12
construire dans la ruche. Le résultat auquel le travail aboutit préexiste idéalement dans
l’imagination du travailleur. Ce n’est pas qu’il opère seulement un changement de forme
dans les matières naturelles ; il y réalise du même coup son propre but dont il a conscience,
qui détermine comme loi son mode d’action, et auquel il doit subordonner sa volonté. »
Les religions révélées (Christianisme et Islam) ont une conception totalement différente avec
le naturalisme, les sciences de la nature, en ce qui concerne les origines de l’homme. Les
biologistes évolutionnistes conçoivent que l’homme descend d'un ancêtre commun avec tous
les êtres vivants. Par contre ses religions ont une conception anthropomorphiste de l’homme.
L’homme est à l’image de Dieu. La tradition biblique apporte un regard sur cette question de
l’origine de l’homme comme peut le citer dans la Bible : « Dieu créa l’homme à son image, à
l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. »13 Dans ce récit de la bible on peut
accorder à l’homme une certaine supériorité face aux autres vivants animaux et végétaux.
Ainsi l’homme est placé au centre du monde par le christianisme. On ne peut plus parler qu’il
descend de l’animal ou encore plus qu’il est un animal. Cette suprématie de l’homme sur le
reste conçu par la Bible fait que ce livre sacré a des points communs avec le livre sacré des
musulmans, le Coran. Celui-ci a en quelque sorte une même conception de l’origine que la
Bible. On peut citer ce verset : « Nous avons crée l’homme d’une argile crissante prise d’un
limon fétide. » 14 Adam et Eve sont les premiers hommes selon le Coran et la Bible. Ceci peut
constituer une critique contre le naturalisme. L’idée de réduire à l’animal ou de concevoir
l’homme à un animal comme les autres est bannie par ses deux religions révélées.
En somme, le naturalisme peut être critiqué par le fait de prouver qu’il existe une spécificité
radicale de l’homme. Ce faisant part des sciences humaines et sociales pour qui on a cité la
12
Karl MARX, Le Capital, 1867
13
Bible de Jérusalem, Genèse1, 27.
14
Coran ,Al-Insan, 76/2
linguistique qui montre que le langage proprement dit est le propre de l’homme, en passant
par l’attitude qu’ont certains philosophes à développer des caractères proprement humain pour
enfin donner le point de vue de la religion qui exclut l’idée d’une origine animal de l’homme.
CONCLUSION
Pour conclure, la question de savoir si l’homme est un animal comme les autres est ambigüe.
Dans un premier temps, on a convoqué la réponse du naturalisme qui selon laquelle l’homme
est un animal comme les autres. Cette réponse s’est fait par le moyen du monisme et du
physicalisme qui réduisent l’homme à un animal, par la primatologie et l’éthologie qui
soutiennent qu’il existe des similitudes morphologiques et comportementales entre l’homme
et les autres animaux. Ce qui fait qu’on ne peut parler de différence de nature entre l’homme
et l’animal on parle désormais d’une différence de degré. Dans un deuxième temps, on a fait
une critique sévère contre le naturalisme en donnant à l’homme des spécificités qui le
distingue de l’animal en montrant position des sciences humaines et sociales et ceux des
philosophes qui ont développer des caractères proprement humains. Et aussi on a montré
comment la religion constitue-t-elle une critique contre le naturalisme en ce qui concerne
l’origine de l’homme.
Bibliographie
CRESSON André, Darwin : sa vie, son œuvre avec un exposé de sa philosophie, Paris, PUF,
1956
NEURATH Otto, Empirische Soziologie. Der wissenschaftliche Gehalt der Geschichte und
Nationalokonomie, Spinger, Wien, 1931
Frans de Waal, 2016, « Il est temps d’arrêter de courir derrière le propre de l’homme », Le
Monde, 10 octobre.
Frans de Waal, Sommes-nous trop « Bêtes » pour comprendre l’intelligence des animaux, LES
LIENS QUI LIBERENT
Jean Jacques ROUSSEAU, Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes et si elle est
autorisée par la loi naturelle, 1755